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APPRENTISSAGE COOPÉRATIF/APPRENTISSAGE COLLABORATIF :

D'UN COMPARATISME CONVENTIONNEL À UN COMPARATISME


CRITIQUE

Alain Baudrit

CERSE - Université de Caen | Les Sciences de l'éducation - Pour l'Ère nouvelle

2007/1 - Vol. 40
pages 115 à 136

ISSN 0755-9593

Article disponible en ligne à l'adresse:


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Pour citer cet article :


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Baudrit Alain, « Apprentissage coopératif/Apprentissage collaboratif : d'un comparatisme conventionnel à un
comparatisme critique »,
Les Sciences de l'éducation - Pour l'Ère nouvelle, 2007/1 Vol. 40, p. 115-136. DOI : 10.3917/lsdle.401.0115
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Apprentissage coopératif/
Apprentissage collaboratif :
d’un comparatisme conventionnel
à un comparatisme critique
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Alain BAUDRIT*

Résumé : Assimilables à nos pédagogies de apparaître. Des investigations plus poussées


groupe, à l’activité collective en classe, permettent également d’identifier des
l’apprentissage coopératif et l’apprentissage origines scientifiques et socio-culturelles
collaboratif présentent pourtant des aspects différentes. Plus encore, des complémen-
distinctifs à plusieurs niveaux : rôles tenus tarités entre ces deux méthodes
par les élèves; interactions et échanges entre pédagogiques sont révélées par une colla-
eux; contrôle de l’enseignant sur les boration scientifique israélo-américaine
groupes; apprentissages escomptés; respon- tout à fait inédite. Au-delà des apparences,
sabilisation des élèves. Ce qu’un un comparatisme critique paraît nécessaire
comparatisme relativement classique fait pour révéler ce genre de données.

Mots-clés : Apprentissage coopératif, Apprentissage collaboratif, Analyse comparative,


Fondements scientifiques, Origines socio-culturelles.

* Professeur des Universités, ERCEF/DEFP, Université Victor Segalen Bordeaux 2.


Les Sciences de l’éducation - Pour l’Ère nouvelle, vol. 40, n° 1, 2007

L’apprentissage coopératif et l’apprentissage collaboratif font tous deux appel à une


structure particulière : le groupe. Faire travailler des élèves ensemble, les réunir pour
étudier un point du programme scolaire, les amener à développer des habiletés sociales;
ceci n’a rien de très original et de très novateur dans le domaine de l’éducation. Cela
dit, il y a là un dénominateur commun qui peut être source de confusions, à même
de créer l’amalgame entre ces deux formes d’apprentissage. Cela d’autant que les
termes coopération et collaboration sont très voisins. Ils ont des sens très proches et
font en général référence à une activité collective impliquant deux ou plusieurs
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personnes. D’où l’intérêt d’étudier d’un peu plus près ce qu’il faut mettre sous ces deux
types d’apprentissage. Sont-ils proches ou non? Convient-il de les associer ou de les
dissocier? Supposent-ils des interactions semblables ou différentes au sein des groupes?
Bénéficient-ils aux élèves de façon équivalente ou non? Peuvent-ils être indifféremment
mobilisés par les enseignants? Bref, une analyse comparative s’impose pour essayer
d’éclaircir ces divers points et afin de mieux comprendre la teneur de deux structures
d’apprentissage qui, apparemment, sont assez voisines. Pour ce faire, nous commen-
cerons par étudier les principales définitions ou précisions apportées par les auteurs
sur, d’un côté, l’apprentissage coopératif (A Coop) et, de l’autre, l’apprentissage colla-
boratif (A Coll).

L’A Coop peut être considéré comme «une série de


1. Que disent processus qui aident les personnes à interagir dans
les définitions? le sens d’un objectif particulier ou pour parvenir
à un produit final»1. Deux éléments ressortent de
cette définition. D’abord, grâce à des moyens
appropriés, il s’agit d’amener les membres d’un groupe à échanger, à fonctionner de
concert. Ensuite, l’orientation de l’activité collective est relativement claire. Ces mêmes
membres sont concernés par une tâche ou une réalisation commune, pour laquelle ils
œuvrent ensemble. Ce dernier aspect est mis en évidence par d’autres auteurs. Par exemple,
D.W.Johnson et R.T.Johnson assimilent l’A Coop à un travail dans le cadre de petits
groupes, où les sujets partagent un but commun, ce qui permet d’optimiser les appren-
tissages de chacun (JOHNSON & JOHNSON, 1990). En somme, l’activité collective devrait
se solder par des bénéfices personnels, notamment en termes d’apprentissage. La vocation
de l’A Coop est bien de faire progresser les élèves, d’améliorer leur niveau scolaire.
De son côté, P. Dillenbourg présente l’A Coll à travers les notions de situation et
d’interaction (DILLENBOURG, 1999). Une situation peut être qualifiée de collaborative,

1. PANITZ, 1999, p. 5; traduction personnelle.

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dit-il, à partir du moment où des personnes de même niveau cognitif, dont les statuts
sont équivalents, sont capables de travailler ensemble dans un but commun. Cette situa-
tion est ensuite considérée comme interactive si ces personnes communiquent de façon
soutenue, argumentent, voire s’opposent en évitant toutefois d’imposer leurs points de
vue. L’accent est donc mis sur l’échange entre égaux, sur la justification des idées émises
par les uns et les autres au sein du groupe. Certains auteurs vont plus loin en ne consi-
dérant pas l’A Coll comme une simple technique, comme un moyen parmi d’autres de
solliciter l’activité collective. Pour T. Panitz, il s’agit surtout «d’une façon de mettre en
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relation des personnes qui respecte et met en valeur les habiletés et contributions des
membres du groupe»2. Dans ces conditions, l’A Coll présente l’intérêt de rapprocher les
personnes, de les responsabiliser et, ce faisant, il devrait contribuer à l’émergence d’un
esprit communautaire. Vivre ensemble paraît plus important que travailler ensemble.
Thèse que Dewey (1938/1963) a en son temps développé voyant dans l’éducation une
entreprise sociale où chacun peut participer, se sentir responsable. Que dire de ces défini-
tions ou précisions apportées par quelques spécialistes de ces questions?
Des points communs et des divergences apparaissent. Les premiers se situent dans
le fait que l’A Coop, comme l’A Coll, réfèrent au travail à plusieurs, à l’activité
groupale. Dans les deux cas, les membres des groupes ont des buts communs, ils
visent une production collective. Les secondes concernent plusieurs points. L’activité
collective d’abord. Initiée, préparée dans une perspective d’A Coop, elle présente un
caractère plus spontané dans le cadre de l’A Coll. Les personnes interagissent comme
elles l’entendent. Dans ce dernier cas encore, le principal se situe dans une certaine
équité, dans le fait que les sujets se perçoivent comme égaux. Le secret de la dynamique
interactive est là. Par ailleurs, la notion d’apprentissage est évoquée en ce qui concerne
l’A Coop. Des progrès scolaires sont escomptés chez les élèves, quand l’A Coll a plus
pour vocation de les réunir, de les rapprocher et de les responsabiliser.
Tels sont les premiers éléments qu’il est possible d’extraire jusqu’à présent. Ils portent
à croire qu’en apparence l’A Coop et l’A Coll se ressemblent assez, puisqu’ils supposent
une activité à plusieurs orientée vers une réalisation commune. En réalité, les groupes
ne paraissent pas agir de la même façon dans les deux cas. Les élèves semblent avoir des
rôles et des fonctions distincts, leurs échanges pourraient prendre des formes différentes.
Avant d’étudier ces questions, un détour historique n’est pas inutile sachant qu’il est à
même de livrer des explications sur certains de ces aspects. Si deux orientations existent
effectivement, celles-ci doivent bien avoir des fondements scientifiques ou autres. Elles
sont sans doute attachées à des noms ou à des courants de pensée surtout en matière
d’éducation. Alors, d’où viennent l’A Coop et l’A Coll?

2. PANITZ, 1999, p. 4; traduction personnelle.

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2. Les origines Pour T. Panitz (1999, p. 5), l’A Coop prend


ses racines chez des chercheurs américains
comme Lewin (1944) avec ses études sur la
dynamique de groupes, ou Dewey (1927) pour
qui les apprentissages ont une nature sociale et
sont basés sur la réflexion collective. De son côté, l’A Coll est à situer dans la tradition
britannique où les enseignants ont pour habitude de faire que les élèves prennent un
rôle actif dans leurs apprentissages. Pour crédibles qu’ils soient, ces points de vue
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méritent quand même quelques développements, un examen un peu plus approfondi.
L’origine américaine de l’A Coop est tout à fait avérée, mais elle ne se limite pas
aux deux chercheurs mentionnés ci-dessus. Plusieurs psychologues sociaux améri-
cains ont inspiré ceux qui ont introduit cette méthode pédagogique dans le domaine
de l’éducation. Ainsi, D.W.Johnson & R.T.Johnson (1974, 1975) et R.E.Slavin (1977)
font largement référence à la théorie de l’interdépendance sociale que l’on doit à M.
Deutsch (1949, 1962). Ce dernier a en effet montré les effets différentiels de la coopé-
ration et de la compétition sur les relations entre les personnes. En général, la première
intensifie les échanges et incite à l’entraide, contrairement à la seconde plus propice
aux oppositions interindividuelles. Cette théorie part également du principe que les
relations sociales sont par nature conflictuelles. Mais la coopération peut favoriser
une résolution constructive des désaccords entre deux ou plusieurs personnes, ce que
la compétition ne semble pas permettre (DEUTSCH, 1969, 1973). Il n’est pas impen-
sable de voir là les bases de coopération avec controverse chère à D.W.Johnson &
R.T.Johnson (1979, 1987). De son côté, R.E.Slavin (1977) s’inspirera du modèle de
coopération compétitive présenté par Deutsch (1949) pour identifier les conséquences
conjuguées de la coopération et de la compétition : «Des mélanges de structures
coopératives et compétitives apparaissent comme une voie prometteuse pour produire
des effets positifs à la fois sur la réussite scolaire et sur le lien social»3. Ainsi, lorsque
la coopération favorise les relations sociales entre les élèves, la compétition les rend plus
performants à l’école compte tenu de la concurrence qu’elle crée entre eux. Il va de
soi que ce dernier aspect est loin de faire l’unanimité à l‘intérieur de la communauté
scientifique américaine. Ce point polémique est d’ailleurs abordé dans une autre
publication consacrée à l’A Coop (BAUDRIT, 2005).
Aux États-Unis, d’autres psychologues sociaux ont plus ou moins influencé les
promoteurs de l’A Coop dans le contexte scolaire. Très tôt, F.H. Allport parle de
facilitation sociale pour désigner l’effet positif du groupe, sur les acquisitions des
personnes le constituant, lorsque celles-ci sont confrontées à des activités de type

3. SLAVIN, 1977, p. 647; traduction personnelle.

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barrage de lettres ou associations verbales (ALLPORT, 1920). Elles progressent plus


que d’autres non concernées par le travail en groupes, amenées à se débrouiller seules.
Plus tard, les très célèbres travaux de Sherif et al. (1961) sur la construction des
cabanes vont faire écho bien au-delà du cercle des psychologues sociaux. Les vertus de
la coopération et les inconvénients de la compétition sont clairement mis en relief.
Dans un premier temps, ces chercheurs ont demandé à des groupes d’adolescents de
construire séparément des cabanes. Les groupes sont mis en concurrence par le biais
d’un système de récompenses, système censé stimuler l’efficacité et la créativité des
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adolescents puisque les groupes sont primés en fonction de la qualité de leurs réali-
sations respectives. Ce dispositif compétitif a pour effet de provoquer une hostilité
intergroupale et une solidarité intragroupale. Les adolescents déprécient les membres
des groupes concurrents et vantent les membres de leur propre groupe. Dans un
second temps, les mêmes groupes sont sollicités pour participer à une œuvre humani-
taire en l’absence de toute concurrence. Le principal est d’assurer au mieux cette
mission pour venir en aide aux personnes démunies. Des liens d’amitié se nouent alors
entre les jeunes, quels que soient les groupes pour lesquels ils travaillent. La coopéra-
tion a bien pour conséquence d’atténuer la distance sociale existant entre les groupes,
elle minimise également les conflits possibles entre eux (SHERIF, 1967). Il y a tout lieu
de penser que les origines de l’A Coop se situent chez ces différents auteurs qui ont
animé la psychologie sociale américaine durant une grande partie du XXe siècle.
Maintenant, d’où vient l’A Coll? Les origines britanniques identifiées par Panitz (1999,
p. 5) méritent quand même quelques commentaires. Selon cet auteur, les praticiens de l’édu-
cation de ce pays en seraient les instigateurs vu leur propension à rendre les élèves actifs, à
faire qu’ils s’engagent collectivement dans le travail scolaire. Une autre interprétation est
avancée par ceux qui, aux États-Unis, se sont intéressés à cette question (DAMON, 1984;
DAMON & PHELPS, 1989). Ces derniers voient les fondements de l’A Coll dans plusieurs
champs scientifiques où les situations collectives de travail font l’objet d’analyses spécifiques.
La psychologie piagétienne d’abord dans la mesure où Piaget considérait que ces situations
incitaient «les pairs à se décentrer, en adoptant des perspectives autres que les leurs»4. En
effet, le fait d’être confronté à un point de vue autre que le sien se traduit par «un choc
des idées qui incite à réexaminer, revoir et justifier ses propres connaissances»5. Ce choc
des idées a été particulièrement bien étudié par les Psychologues Sociaux de Genève sous
le nom de conflit socio-cognitif (PERRET-CLERMONT, 1980; DOISE & MUGNY, 1984). Le
conflit socio-cognitif (CSC) jouerait ainsi un rôle perturbateur à l’origine de la recons-
truction intellectuelle. De cette manière, les personnes sont amenées à reconsidérer leur

4. DAMON, 1984, p. 333; traduction personnelle.


5. DAMON & PHELPS, 1989, p. 143; traduction personnelle.

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façon de penser, leur manière de voir les choses. Mais, toujours selon la conception piagé-
tienne, ces bénéfices cognitifs autorisés par le travail en groupes ne sont pas les seuls. Des
bénéfices sociaux sont également escomptés particulièrement au niveau des habiletés à
communiquer ou à partager des idées (DAMON, 1984, p. 333). Outre-Atlantique, plusieurs
chercheurs vont s’inscrire dans cette mouvance au travers d’études portant sur des activités
de raisonnement ou sur l’acquisition des notions de conservation chez les enfants
(SILVERMAN & GEIRINGER, 1973; MURRAY, 1974; BOTVIN & MURRAY, 1975; MILLER &
BROWNELL, 1975; BEARISON, MAGZAMEN & FILARDO, 1986).
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D’un autre côté, la perspective vygotskienne (VYGOTSKI, 1962, 1978) n’est pas
étrangère à cette affaire. L’A Coll puise certaines de ses sources dans la psychologie sovié-
tique et chez des continuateurs américains de Vygotski comme Wertsch (1981) ou
Rogoff & Wertsch (1984). Ce courant de pensée part de l’idée que «les enfants peuvent
apprendre de la rencontre avec des pairs (…). En d’autres termes, les enfants sont
initiés à de nouveaux modes de pensée lorsqu’ils engagent des dialogues avec des pairs»6.
Par rapport à l’activité individuelle, l’activité collective est une nouvelle fois mise en
valeur. Mais il est maintenant moins question de chocs d’idées que d’échanges, de
situations faites pour «donner et recevoir des idées»7. Le principe de co-construction
est alors évoqué au sens où, à l’intérieur des groupes, les élèves mettent en commun leurs
connaissances respectives. C’est à partir de ces rencontres d’idées, et des discussions
qu’elles engendrent, que de nouvelles connaissances peuvent émerger. Nous retrouvons
la notion de co-construction au sein du troisième courant à l’origine de l’A Coll, à savoir
chez le psychiatre américain Sullivan (1953) avec l’un de ses continuateurs : Youniss,
1980. Selon eux, les enfants «apprennent les uns des autres non pas en copiant ou en
se servant des compétences des partenaires (…), mais grâce à un effort collaboratif
basé sur une planification mutuelle des activités»8. Ici les notions de mutualité et
d’équité sont intimement liées. Dans la mesure où les enfants se considèrent comme
égaux, des rapports de réciprocité deviennent possibles entre eux. Sur cette question,
Piaget (1932/1965) fait d’ailleurs figure de pionnier. Le Psychologue de Genève avait
clairement montré l’importance du respect mutuel dans la formation du jugement
moral chez l’enfant. Telles sont les principales bases sur lesquelles repose l’A Coll.
Si l’A Coop trouve ses origines dans un champ scientifique assez précis (la psycho-
logie sociale américaine) porté sur l’étude des phénomènes intra et intergroupaux, il
n’en va pas de même pour l’A Coll. Ce dernier paraît se nourrir de la psychologie
européenne, de la psychologie soviétique et d’un courant américain de psychiatrie. Sans
compter que les deux premières sont assez divergentes, si l’on se fie aux analyses

6. DAMON, 1984, p. 333; traduction personnelle.


7. Ibid., p. 334; traduction personnelle.
8. DAMON, 1984, p. 333; traduction personnelle.

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comparatives effectuées autour de Piaget et Vygotski (TUDGE & ROGOFF, 1989;


GARNIER, BEDNARZ ET ULANOVSKAYA, 1991; BROSSARD ET FIJALKOW, 1998). Ces
deux auteurs s’opposent en effet sur de nombreux points : le rapport entre pensée et
langage, la question de l’égocentrisme chez l’enfant, la place des processus intra et inter-
individuels. Les origines multiples, voire hétéroclites, de l’A Coll sont ainsi soulignées.
Dans ces conditions, il paraît peu surprenant que ces deux méthodes présentent plus
de différences que de points communs, comme le laissent penser les quelques défini-
tions ou précisions commentées plus haut. Étudions ces aspects d’un peu plus près.
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Un premier point commun est bien identifié
3. Convergences par Matthews, Cooper, Davidson & Hawkes
et divergences : (1995). L’A Coop et l’A Coll se démarquent
à quels niveaux? fondamentalement de la pédagogie tradition-
nelle telle qu’elle apparaît dans l’enseignement
supérieur. Pourquoi? Parce que l’un et l’autre remettent en cause l’autorité exercée par
les enseignants sur les étudiants. Tous deux favorisent le transfert de cette autorité vers
le groupe, vers la structure collective ici constituée par plusieurs étudiants. Cela dit, ce
processus est plus ou moins prononcé dans les deux cas. L’A Coop donne l’occasion à
l’enseignant «d’aller de groupe en groupe, d’observer les interactions, d’écouter les
conversations, et d’intervenir lorsqu’il le juge utile»9. L’A Coll ne donne pas à voir ce type
de comportement. Là, l’enseignant «ne contrôle pas les groupes de façon active et il leur
renvoie toutes les questions qu’ils se posent»10. En d’autres termes, il y a un transfert
d’autorité relativement partiel dans le premier cas, plus complet dans le second.
Ceci n’a rien de très surprenant au regard d’un autre aspect mis en évidence par
Bruffee (1995). Cet auteur défend l’idée que l’école primaire a pour vocation d’ini-
tier aux savoirs fondamentaux, d’inculquer des connaissances socialement avérées.
L’orthographe, la grammaire, les mathématiques, les faits historiques, la géographie,
constituent ces savoirs de base. Dans ces conditions, le rôle de l’enseignant n’est pas
à négliger. Il est en quelque sorte le dépositaire de ces savoirs et connaissances. Ainsi,
le fonctionnement groupal, l’activité collective, ne peuvent totalement lui échapper.
Ce qui semble être une caractéristique de l’A Coop. À l’inverse, l’enseignement
supérieur est plus tourné vers le développement de l’esprit critique, la recherche de
savoirs non fondamentaux. Il s’agit surtout «d’aborder des questions qui supposent
des réponses incertaines ou ambiguës»11. Le travail de mémorisation cède alors la

9. Ibid., p. 36; traduction personnelle.


10. Ibid., p. 36; traduction personnelle.
11. Ibid., p. 15, traduction personnelle.

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place au raisonnement, à l’exercice du jugement, qui supposent une mise en retrait du


professeur. L’A Coll est plutôt conseillé en pareilles circonstances. Il est plus à même
de faire fonctionner les groupes en autonomie, de favoriser leur libre jugement. De
la sorte, «l’apprentissage collaboratif est conçu pour progresser et l’apprentissage
coopératif pour fixer»12. Fixer les apprentissages fondamentaux à l’école primaire par
le biais de l’A Coop, progresser à travers les savoirs non fondamentaux à l’université
grâce à l’A Coll; telle semble être la chronologie conseillée par l’auteur.
La même idée est défendue dans un autre domaine : celui du développement profes-
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sionnel (DP) des enseignants. Le DP est pensé comme «un ensemble cohérent d’activités
destinées à approfondir et à élargir les connaissances, les attitudes et les savoir-faire direc-
tement liés à l’exercice de l’enseignement afin d’améliorer la professionnalité des maîtres»13.
Pour ce faire, les enseignants sont invités à confronter leurs pratiques quotidiennes au sein
de petits groupes qui se réunissent régulièrement dans les écoles. C’est pour eux l’occa-
sion de trouver ensemble des solutions aux difficultés rencontrées, aux problèmes qu’ils
éprouvent chacun dans leurs classes. À ce niveau, la coopération est en général considérée
comme «utile pour le travail en groupes, (mais) elle n’est qu’un préalable à la collabora-
tion entre professionnels»14. En somme, la coopération permettrait aux enseignants
d’apprendre à travailler à plusieurs, de s’initier à l’activité collective quand, ensuite, la colla-
boration traduirait «leur volonté de favoriser leur autonomie professionnelle (…) dans
un contexte de préoccupations partagées et d’examen critique»15. Ainsi, la coopération
est perçue comme nécessaire mais non suffisante dans une perspective de DP. Elle ne serait
qu’un moyen initial permettant aux enseignants, dans un second temps, d’échanger plus
et mieux sur l’exercice du métier, d’analyser de façon plus approfondie leurs pratiques
quotidiennes pour essayer de les perfectionner. Propos que l’on retrouve chez Cooper &
Boyd (1998) pour qui le DP ne doit pas se limiter à de simples ateliers de travail : il est
censé structurer l’école autour de «communautés d’apprentissage collaboratif»16. Encore
une fois, l’A Coll s’inscrit dans le prolongement de l’A Coop.
Un autre point mérite d’être examiné, il s’agit encore d’un élément assez diffé-
renciateur entre les deux méthodes. D’un côté, l’A Coop «a tendance à être plus
structuré dans son approche de l’éducation en petit groupe (…) et suppose un entraî-
nement des élèves à l’activité groupale»17. De l’autre, l’A Coll est peu soumis à ce type

12. Ibid., p. 16; traduction personnelle.


13. VAN TULDER, VEENMAN & SIEBEN, 1988, p. 209; traduction personnelle.
14. HENDERSON, 1992, p. 8; traduction personnelle.
15. HENDERSON, 1996, p. 187; traduction personnelle.
16. Ibid., p. 61; traduction personnelle.
17. MATTHEWS et al., 1995, p. 40; traduction personnelle.

122
Alain BAUDRIT

d’exigences : «Les élèves sont moins préparés aux habiletés et rôles inhérents aux groupes
et ils font moins état d’une réflexion structurée sur les interactions en groupes»18. Initier
les élèves au travail collectif, organiser l’activité à plusieurs; voilà qui semble caractériser
l’A Coop. Laisser les élèves s’organiser librement, ne pas les préparer particulièrement à
l’activité collective; telle paraît être une stratégie propre à l’A Coll.
Il faut dire que la notion de groupe structuré revient assez souvent dans la litté-
rature scientifique consacrée à l’A Coop. Deux sens peuvent être identifiés. Le premier
concerne l’activité préparatoire, tout ce qui contribue à éveiller «le sens des autres»
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(GILLIES & ASHMAN, 1996). À cette occasion les élèves sont sensibilisés à l’entraide,
incités à travailler ensemble et, le cas échéant, invités à échanger des informations ou
explications relatives aux tâches à réaliser. Parfois encore, ils se répartissent préalable-
ment les rôles et attributions au sein des groupes afin de mener à bien l’activité
collective. Ainsi, Fuchs, Kazdan, Karns, Beth Calhoon, Hamlett & Hewlett (2000)
ont pu observer des groupes d’élèves structurés de la sorte à la faveur d’activités mathé-
matiques dans des classes de troisième et quatrième niveaux de scolarité. Ils occupent
les rôles de lecteur, moniteur, contrôleur, scripteur et permutent régulièrement dans
ces quatre fonctions. Comme son nom l’indique, le lecteur lit l’énoncé des problèmes,
les questions posées, il aide également le groupe à trouver les informations pertinentes
pour pouvoir y répondre. Le moniteur s’assure que le groupe fonctionne correctement,
il voit si certains camarades ont besoin d’être soutenus. Le contrôleur aide le groupe
à franchir les étapes qui mènent aux solutions, il vérifie les fiches des uns et des autres.
Enfin, le scripteur note les réponses mathématiques fournies par le groupe aux
questions posées, il fournit éventuellement des explications à leur sujet. L’A Coop
donne ainsi à voir un second aspect structurant : l’organisation interne du groupe.
Chacun joue un rôle particulier, chacun a une place bien spécifique, même si des
rotations sont prévues afin que tous occupent les différentes fonctions. L’A Coll ne part
pas des mêmes principes. Il semble au contraire caractérisé par une non-structuration
groupale dans la mesure où les élèves ne sont pas particulièrement initiés à l’activité
collective. Du fait également qu’aucune organisation ne leur est suggérée ou imposée.
La structuration groupale propre à l’A Coop tient à une caractéristique supplé-
mentaire : l’interdépendance. Johnson & Johnson (1980) l’envisagent de cette façon :
les élèves des groupes coopératifs «peuvent atteindre leurs objectifs d’apprentissage si,
et seulement si, les autres élèves avec qui ils sont coopérativement associés atteignent
les leurs»19. En l’occurrence, l’efficacité du groupe paraît dépendre des différentes
contributions individuelles, et surtout de leur coordination, lorsqu’il s’agit d’œuvrer

18. Ibid., p. 40; traduction personnelle.


19. Ibid., p. 94; traduction personnelle.

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Les Sciences de l’éducation - Pour l’Ère nouvelle, vol. 40, n° 1, 2007

sur un projet commun. Ce qui devrait être à l’origine de rapports de réciprocité assez
étroits au sein des groupes. Une technique d’A Coop illustre tout à fait cela, il s’agit
de la méthode Jigsaw (ARONSON, BLANEY, STEPHAN, SIKES & SNAPP, 1978). Ici le
fonctionnement groupal est assimilé au principe du puzzle. Par exemple, une unité
d’enseignement est divisée en autant de parties qu’il y a d’élèves dans le groupe.
Chacun se voit donc attribuer une partie qu’il doit étudier pour, ensuite, l’enseigner
à ses camarades. De la sorte, les apports respectifs des différents membres du groupe
permettent d’étudier l’unité d’enseignement de façon relativement exhaustive. Mais
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qui dit interdépendance dit également responsabilisation dans la mesure où chacun
a une part de travail à assumer. Toute défaillance individuelle a immanquablement des
conséquences au niveau collectif (JOHNSON & JOHNSON, 1980). Telles sont les princi-
pales bases sur lesquelles repose l’A Coop.
L’A Coll est attaché à d’autres principes, voire à des conceptions opposées. Il invite
à se méfier des aspects structurels et «permet aux élèves de mieux dire s’ils forment des
groupes amicaux et associatifs. Leurs échanges servent à la découverte des choses»20.
Plus que la structure du groupe, c’est le fait d’être réuni avec des proches et d’inter-
agir de façon relativement autonome qui importe maintenant. L’A Coll invite à «créer
des savoirs ensemble»21. Explorer, échanger, partager des idées, trouver un consensus
lorsqu’elles présentent un caractère contradictoire; voilà ce qui caractérise l’activité
groupale dans le cadre de l’A Coll. À condition toutefois qu’une certaine équité existe.
En pareil cas, les membres des groupes doivent se considérer comme égaux. Tout
ascendant de certains sur d’autres est de nature à rompre cet équilibre, contribue à faire
que des élèves peuvent adopter des rôles de «leaders» ou de «suiveurs». L’A Coll ne
suppose pas d’implications inégales dans l’activité collective. La quasi-symétrie des
places et des positions occupées par chacun au sein des groupes collaboratifs est prati-
quement considérée par Dillenbourg (1999) comme une condition sine qua non.
Est-on vraiment sûr qu’il en soit toujours ainsi? Cette question méritera certaine-
ment d’être étudiée d’un peu plus près.
Cette interrogation pourrait concerner encore plus l’A Coop. En effet, un autre
principe est à l’origine de la constitution des groupes coopératifs : l’hétérogénéité.
Johnson & Johnson (1980) sont pour faire travailler ensemble des filles et des garçons,
de niveaux scolaires différents, d’origines sociales et culturelles distinctes. Ce type de
composition groupale est censé dynamiser les échanges, favoriser l’interactivité entre
les élèves. Phénomène que Lewin (1943) avait lui-même constaté avec des femmes
américaines dont les avis divergeaient à propos de leurs achats alimentaires. Mais

20. PANITZ, 1999, p. 6; traduction personnelle.


21. DAMON, 1984, p. 334; traduction personnelle.

124
Alain BAUDRIT

l’existence de biais n’est pas impossible en pareille circonstance. N’est-ce pas l’occa-
sion pour les élèves de bon niveau d’asseoir une certaine suprématie? De faire le travail
à la place des autres? Sans compter que les élèves de milieux sociaux défavorisés ou
appartenant à des minorités ethniques peuvent être marginalisés à l’intérieur de ces
groupes (COHEN, 1986, 1994). Il y a bien lieu de dénoncer de tels travers.
Ainsi, l’A Coop et l’A Coll ne paraissent pas dénués d’inconvénients. Ils ont certai-
nement des défauts respectifs qu’il convient de pointer à côté des avantages autorisés
par ces deux méthodes pédagogiques. D’ailleurs, c’est peut-être dans la balance points
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forts/points faibles que se joue le choix de l’une ou de l’autre quand il s’agit de mettre
en place du travail en groupes à l’école.

Quels sont les principaux défauts des deux


4. Points forts/points méthodes? Cette question trouve des réponses
faibles assez explicites chez Bruffee (1995). Pour cet
auteur, «le défaut majeur de l’apprentissage
collaboratif est qu’en misant sur les gains
éducatifs permis par l’autonomie des relations entre élèves, il sacrifie une responsabi-
lisation garantie»22. Dit autrement, l’A Coll rend les groupes indépendants mais les
élèves ne se responsabilisent peut-être pas de façon équivalente en leur sein, leurs
niveaux d’implication ne sont certainement pas similaires. Nous savons que le droit
de regard des enseignants sur les groupes collaboratifs est très limité, leur contrôle est
tout aussi réduit, il leur est donc difficile d’observer de tels déséquilibres et d’inter-
venir pour les compenser. Les groupes collaboratifs ne semblent donc pas à l’abri de
sérieux déséquilibres en matière d’investissement dans l’activité collective. Des élèves
ont la possibilité de s’investir beaucoup, d’autres nettement moins. Dans ces condi-
tions, il y a peu de chances qu’ils se considèrent comme égaux.
De l’autre côté, «le défaut majeur de l’apprentissage coopératif est qu’en garan-
tissant la responsabilisation, il risque d’entretenir des relations d’autorité dans les
groupes de travail (...) qui soient une réplique des relations d’autorité propres à l’édu-
cation traditionnelle»23. L’A Coop, nous le savons, responsabilise les élèves par le biais
de la structuration groupale. Les enseignants veillent à ce qu’une certaine interdé-
pendance soit respectée. Ils font en sorte que les élèves se divisent les activités, qu’ils
coordonnent leurs travaux respectifs pour mener à bien le projet commun. De la
sorte, s’ils sont bien responsabilisés, il leur est pratiquement impossible de ne pas

22. Ibid., p. 18; traduction personnelle.


23. BRUFFEE, 1995, p. 18; traduction personnelle.

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Les Sciences de l’éducation - Pour l’Ère nouvelle, vol. 40, n° 1, 2007

s’impliquer dans les groupes coopératifs. Mais la composition de ces derniers répond
aussi au principe d’hétérogénéité. Les élèves en coprésence appartiennent à des milieux
sociaux distincts, leurs origines ethniques ou culturelles ne sont pas obligatoirement
les mêmes et, surtout, leurs niveaux scolaires diffèrent notablement. Des relations
d’autorité au sein de tels groupes ne sont pas impensables. Nous avons déjà vu là une
des principales failles de l’A. Coop (BAUDRIT, 2005). Comment des élèves faibles
pourraient-ils faire jeu égal avec des camarades nettement plus avancés dans les appren-
tissages? Comment les seconds ne bénéficieraient-ils pas d’un certain ascendant sur
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les premiers? Une nouvelle fois, des problèmes relatifs à l’égalité des statuts entre
élèves apparaissent. Ils sont toutefois de natures différentes dans les deux cas.
D’un côté, le flou de l’autonomie inhérente à l’A Coll peut amener les élèves à
prendre des responsabilités de façon disproportionnée, à s’investir inégalement dans
le travail groupal. Ce qui va à l’encontre du principe d’équité. Tout tient au hasard de
leur bon vouloir. De l’autre, la rigueur de l’hétérogénéité liée à l’A Coop les oriente
vers des positions sociales distinctes tout aussi préjudiciables. L’organisation interne
des groupes semble les priver de facto d’une quelconque équité. Dans le premier cas
nous serions en présence d’une équité improbable, dans le second d’une équité impos-
sible.
Ceci étant, ces faiblesses ne doivent pas faire oublier les points forts caractéristiques
de ces deux méthodes. Toutes deux ont l’avantage de rassembler, de réunir pour
travailler ensemble, ceci afin d’œuvrer dans le sens de réalisations collectives. Toutes
deux privilégient les interactions, les relations entre pairs dans les groupes. Mais elles
font appel à des coordinations sociales différentes. Les échanges spontanés, non struc-
turés au départ, propres de l’A Coll font penser à des coordinations sociales de type
«partage». Chacun apporte ses connaissances ou savoirs, chacun donne et reçoit, ce
qui autorise une mise en commun de ces connaissances ou savoirs pour avancer dans
l’activité à réaliser. Les relations organisées, voire préconçues, spécifiques de l’A Coop
portent à croire que nous sommes en présence de coordinations sociales de type
«assemblage». Chacun a une part précise de travail à effectuer, chacun maîtrise une
partie du tout, la réalisation collective dépend alors de l’emboîtement des diverses
contributions individuelles. Pour ces différentes raisons, ces deux méthodes ne
devraient pas servir les mêmes objectifs, viser les mêmes types d’apprentissage. Autant
l’A Coll paraît propice à la réorganisation des connaissances, permet d’approfondir le
raisonnement, de découvrir de nouvelles idées, de résoudre des problèmes à plusieurs
(DAMON & PHELPS, 1989, p. 152-153); autant l’A Coop requiert «des savoir-faire

24. Ibid., p. 152; traduction personelle.

126
Alain BAUDRIT

opératoires et suppose des habiletés acquises par imitation»24. McCarthey &


McMahon (1992, p. 26-27) donnent cet exemple de quatre élèves qui, en groupe, ont
à réaliser une plaquette sur l’habitat animal et l’adaptation à l’environnement suite à
une sortie éducative à un musée d’histoire naturelle. Le premier se charge de collecter
des informations, le second des illustrations, le troisième de la rédaction du texte et
le quatrième essaie de coordonner le tout. Les risques de spécialisation ne sont pas
impossibles en pareil cas. Des rôles sont attribués à chacun dans les groupes coopé-
ratifs et les élèves s’y tiennent. L’A Coll ne présente pas cet inconvénient vu la souplesse
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et la latitude qui le caractérisent. Un certain émiettement des rôles est même possible
sachant que les élèves s’organisent comme ils l’entendent, s’investissent à leur gré.
Qui participe? Qui ne participe pas? Qui a aidé qui? Qui a fait quoi? Voilà des inter-
rogations auxquelles il est parfois peu aisé de répondre lorsqu’il s’agit d’analyser le
fonctionnement d’un groupe collaboratif.
Nous sommes bien en présence de techniques groupales qui présentent des
avantages et des inconvénients respectifs. En conséquence, elles ne peuvent être
confondues. Une approche comparative n’est donc pas superflue lorsqu’il s’agit de les
différencier ou de les mettre en perspective. C’est dans cet esprit que le tableau présenté
ci-dessous a été élaboré.

Tableau 1 : Aspects comparatifs entre l'apprentissage coopératif et l'apprentissage collaboratif

Critères Apprentissage Apprentissage


distinctifs coopératif collaboratif
Échanges Structurés Non structurés
Interactions (Principe d'interdépendance) (Partage, mise en commun des
savoirs)
Contrôle de Réel Faible
l'enseignant (Observation des groupes) (Autonomie des élèves)
Responsabilisation Garantie par Incertaine
des élèves l'interdépendance (À la discrétion de chacun)
Impossible Improbable
Équité entre élèves (Caractère hétérogène des (Organisation libre des groupes)
groupes)
Rôles tenus par les élèves Risque de spécialisation Risque d'émiettement
Savoirs fondamentaux liés aux Savoirs non fondamentaux : esprit
Apprentissages différentes activités scolaires critique, raisonnement,
visés découverte collective.

En fait, ce tableau met en évidence des traits qu’un regard plus ou moins distant
permet difficilement de distinguer. À plusieurs reprises, n’avons-nous pas aussi parlé
de points communs entre ces deux méthodes? Les apparences peuvent être trompeuses.
Dans l’un et l’autre cas, il y a bien des élèves regroupés, animés par des projets

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Les Sciences de l’éducation - Pour l’Ère nouvelle, vol. 40, n° 1, 2007

communs, mais qui en réalité interagissent et s’organisent différemment. Ce qui se


donne à voir de loin ne correspond pas vraiment à ce qui est observé de près. Ainsi,
l’analyse comparative semble autoriser un niveau de discernement difficile à atteindre
autrement. Mais ce n’est pas sa seule vocation. Le comparatisme en éducation touche
des aspects plus profonds (culturels notamment) qu’il convient d’aborder avant de clore
cette étude, tellement les enjeux qu’ils recèlent sont loin d’être anodins.
5. Et les cultures dans En effet, n’oublions pas les origines. Celles de
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cette affaire?

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l’A Coop ont été clairement identifiées. Voilà
une méthode dont les sources se trouvent
essentiellement dans la psychologie sociale américaine. Or les conceptions anglo-
américaines en matière d’éducation ont actuellement tendance à se propager au-delà
des frontières anglo-saxonnes, dérive dénoncée par plusieurs auteurs sous le nom
«d’anglo-centrisme» (STROMQUIST, 2000; GRÜBER, 2001; LADERRIÈRE, 2003; NÓVOA
ET YARIV-MASHAL, 2003). Dans cette mouvance, l’A Coop pourrait gagner des pays
ou des régions du monde dont les traditions sont tout autres, avec des populations
scolaires peu habituées à travailler de la sorte. Par exemple, il est visible en Israël
depuis plusieurs décennies (BAUDRIT, 2005). Que penser de ce phénomène?
A priori, il est très contestable. Pour preuve, lorsqu’une formule en vogue aux
États-Unis (en l’occurrence la coopération compétitive) est proposée à des enfants
mexicains, ils s’adaptent difficilement, ils semblent en mal de repères (KAGAN &
MADSEN, 1971; KAGAN, 1980). Et pour cause. Leur appartenance a une culture non
occidentale les prédispose plus à l’entraide qu’à la compétition (WHITING & WHITING,
1975). Leur gêne n’a donc rien de très surprenant. Cela dit, le cas d’Israël est diffé-
rent au sens où l’A Coop, tel qu’il est mis en œuvre dans ce pays, donne à voir des
groupes d’élèves qui interagissent de façon autonome, des organisations collectives peu
structurées au départ, des enseignants dont les interventions directes auprès des élèves
sont rares, des thèmes d’étude de type exploratoire (l’histoire et la culture d’un pays,
des questions d’écologie). Telles sont les principales caractéristiques de la méthode
Group Investigation que l’on doit à Sharan & Hertz-Lazarowitz (1980) et Sharan &
Sharan (1992). En fait, elle ressemble à s’y méprendre à de l’A Coll. La version israé-
lienne de l’A Coop est donc loin d’être conforme au modèle américain. Certes, ses
promoteurs ont emprunté à Dewey (1927) un certain nombre d’idées : la classe
comme lieu de vie, le partage des expériences, la réflexion collective. Mais ce n’est pas
tout. La tradition est très présente avec l’influence du mouvement sioniste qui se situe
au fondement de l’État d’Israël. Ce mouvement, porteur d’idées socio-marxistes,
symbolise une nouvelle façon de vivre. L’exemple type est à trouver dans les kibboutz,
ces villages agricoles communautaires où «les membres du Kibboutz sont considérés

128
Alain BAUDRIT

comme égaux dans le sens où les personnes participent à la collectivité autant qu’elles
le peuvent en termes de travail, et elles reçoivent de la collectivité ce dont elles ont
besoin»25. Ces principes n’épargneront pas le système éducatif israélien où le groupe
est considéré comme une communauté d’élèves, dont la vocation est d’être un lieu de
discussions et de débats (ELBOIM-DROR, 1986). Nous sommes loin des conceptions
américaines de l’A Coop qui voient dans le groupe une organisation structurée, plus
ou moins contrôlée par l’enseignant, avec des rôles bien spécifiques attribués aux
élèves. Sans compter que, parfois aussi, les groupes peuvent être mis en concurrence
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par le biais d’un système de récompenses.
La thèse de la propagation d’une méthode américaine n’est donc pas crédible dans
le cas qui nous intéresse. D’ailleurs, la terminologie de l’apprentissage collaboratif
semble plus appropriée pour caractériser le fonctionnement des groupes d’élèves dans
cette région du Proche-Orient. Mais il faut aussi savoir que plusieurs chercheurs
américains et israéliens travaillent ensemble sur des questions relatives à l’A Coop.
Ainsi, le programme SFA (Success For All) a pour vocation d’éviter la relégation d’élèves
classés «à risques» dans des sections d’éducation spécialisée (SLAVIN, MADDEN, DOLAN
& WASIK, 1996; HERTZ-LAZAROWITZ, SCHAEDEL & TOV-LEE, 1999). Côté américain,
ce programme concerne des enfants hispanophones confrontés à l’apprentissage de
l’anglais. Côté israélien, il touche des enfants juifs et arabes impliqués dans le même
type d’apprentissage. Au-delà du bilinguisme, il y a aussi l’intention de rapprocher les
communautés et les ethnies dans ces deux pays. Une opportunité que Slavin (1995)
résume en ces termes : «Lorsque les élèves travaillent à l’intérieur de groupes coopé-
ratifs culturellement mixtes, ils gagnent en liens d’amitié inter-ethniques»26. Il faut
croire que les divergences de fond qui opposent les chercheurs américains à leurs
collègues israéliens sur la question de l’A Coop ne les empêchent pas de collaborer,
d’œuvrer pour des causes communes. Là est sans doute l’essentiel.
L’A Coop et l’A Coll donnent ainsi à voir des conceptions scientifiques différentes
du travail en groupes, des façons distinctes d’envisager l’activité collective. Une
approche comparative conventionnelle permet de les identifier, de les examiner
point par point, item par item. Démarche caractérisée par le tableau présenté ci-
dessus. Ceci étant, ces différences méritent quelques précautions quant à leur
interprétation ou signification. Les cultures sont également là avec les traditions et
les systèmes de valeurs propres à chaque pays ou région. Pour preuve, les versions
américaines et israéliennes de l’A Coop ne peuvent être confondues. Pourtant la
dénomination est la même. Plus encore, les différences culturelles ne semblent pas

25. HERTZ-LAZAROWITZ & ZELNIKER, 1995, p. 268; traduction personnelle.


26. Ibid., p. 633; traduction personnelle.

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Les Sciences de l’éducation - Pour l’Ère nouvelle, vol. 40, n° 1, 2007

être un obstacle à l’association, à la mise en commun des points de vue. Une analyse
plus poussée de cette collaboration nous a permis de constater des progrès, côté
américain comme côté israélien, dans les manières de mettre en œuvre l’A Coop dans
les écoles (BAUDRIT, 2005). Ce qui validerait l’existence de liens de complémenta-
rité entre l’A Coop et l’A Coll, puisque ce dernier s’apparente fortement à la version
israélienne de l’A Coop. Il semble donc qu’il y ait des enjeux que le seul compara-
tisme classique ne permet pas d’appréhender. Un stade est à franchir au sens où le
comparatisme en éducation est de plus en plus confronté à «la complexité de ses
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objets d’études» (SCHRIEWER, 2003, p. 47). Alors, il est peut-être possible de parler
de comparatisme critique à partir du moment où le chercheur ne se contente plus
d’appréhender l’A Coop et l’A Coll dans ce qu’ils montrent, au regard de leurs
caractéristiques propres, mais aussi dans ce qu’ils recèlent de plus profond. Dans ce
cas, l’étude des soubassements historico-culturels sur lesquels reposent ces deux
méthodes s’avère tout à fait indispensable.

130
Alain BAUDRIT

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Les Sciences de l’éducation - Pour l’Ère nouvelle, vol. 40, n° 1, 2007

Cooperative/Collaborative Learning:
from conventional to critical comparative study
Abstract: Collective activity in class that is understood within our pedagogies of groups,
cooperative and collaborative learning may be understood at several levels. These
include the roles taken by pupils; interactions and exchanges between pupils; teachers’
control over groups; expected learning; giving responsibility to pupils. These factors
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are revealed by conventional comparative studies. More focussed investigations enable

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the identification of different scientific and socio-cultural origins.
Furthermore, the complementary aspects of these two pedagogic methods are revealed
by an unpublished study of an Israeli-American scientific collaboration. Despite
appearances, critical comparative studies seem necessary to illuminate this type of data.

Keywords: Cooperative Learning, Collaborative Learning, Comparative Analysis,


Scientific Foundations, Socio-Cultural Origins.

Aprendizaje cooperativo/aprendizaje colaborativo : de un


comparatismo convencional a un comparatismo critique
Resumen : Asimilables a nuestras pedagogías de grupo y a la actividad colectiva en
clase, el aprendizaje cooperativo y el aprendizaje colaborativo presentan sin embargo
aspectos distintos en varios niveles: al compararlos aparecen los papeles que juegan los
alumnos; interacciones e intercambios entre ellos; control del enseñante sobre los
grupos; aprendizajes esperados; responsabilización de los alumnos. Las investigaciones
más avanzadas permiten identificar orígenes científicos y socioculturales diferentes. Más
aún: aparecen complementaridades entre ambos métodos pedagógicos gracias a una
colaboración científica israeloamericana totalmente inédita. Más allá de las aparien-
cias un cooperatismo crítico parece necesario para revelar este tipo de datos.

Palabras claves : Aprendizaje cooperativo, Aprendizaje colaborativo, Análisis compa-


rativo, Fundamentos ciéntificos, Orígenes socioculturales.

Alain BAUDRIT. Apprentissage coopératif/Apprentissage collaboratif : d’un comparatisme conventionnel


à un comparatisme critique. Les Sciences de l’éducation - Pour l’Ère nouvelle, Travail social 2 –
La formation des travailleurs sociaux : nouvelles approches, vol. 40, n° 1, 2007, pp. 115-136.
ISSN 0755-9593. ISBN 978-2-9528025-0-5.

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