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HYPERTENSION INTRACRÂNIENNE

Ekouele Mbaki HB

OBJECTIFS :

1. Définir hypertension intracrânienne (HIC)

2. Énoncer les mécanismes physiopathologiques de l’HIC

3. Décrire les caractères des céphalées de l’HIC

4. Énumérer 5 complications de l’HIC

5. Citer 5 étiologies de l’HIC

6. Énoncer les principes du traitement de l’HIC

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Plan :

1. GÉNÉRALITÉS

1.1. Définition

1.2. Intérêt

1.3. Rappel

1.4. Physiopathologie

2. DIAGNOSTIC

2.1. Positif

2.2. Différentiel

2.3. Étiologique

3. TRAITEMENT

3.1. But

3.2. Moyens

3.3. Indications

3.4. Surveillance

3.5. Résultats

Conclusion

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1. GÉNÉRALITÉS

1.1. Définition

Hypertension intracrânienne (HIC) est l’augmentation de la pression à l’intérieur de

l’enceinte contenant l’encéphale et ses annexes, au-dessus de 20 mmHg, de façon durable.

C’est une urgence médico-chirurgicale.

1.2. Intérêt

- Diagnostique

L’imagerie a amélioré l’identification des étiologies de l’HIC.

- Thérapeutique

Il existe des moyens chirurgicaux de contrôle de la pression intracrânienne.

- Pronostique

Par le risque de décès et de cécité irréversible.

1.3. Rappel

1.3.1. Anatomie

La boîte crânienne est inextensible chez l’adulte. Elle contient 3 volumes :

- le parenchyme cérébral

- le liquide cérébrospinal (LCS)

- le sang circulant dans les artères et les veines intracrâniennes

Chez le nouveau-né et le nourrisson avant 2 ans, les os du crâne sont espacés par les

sutures, et il y a également les fontanelles (figure 1). Le crâne est alors extensible.

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crânial

dorsal

Os frontal
Os pariétal

Os temporal

Figure 1. Vue latérale de la tête d’un fœtus

1. Bregma

2. Lambda

3. Ptérion

4. Astérion

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1.3.2. Physiologie

La pression intracrânienne (PIC) normale est comprise entre 5-15 mmHg (5-20 cm H2O).

1 mmHg = 1,36 cm H2O.

Le débit sanguin cérébral est assuré par une pression de perfusion cérébrale (PPC).

PPC = PAM – PIC

PPC = Pression de perfusion cérébrale

PAM = Pression artérielle moyenne

PIC = Pression intracrânienne

Selon la loi de Monroe-Kellie, toute augmentation d’un des 3 volumes intracrâniens doit être

accompagnée d’une diminution de volume d’un ou des deux autres, pour maintenir une PIC

constante.

La PIC varie en fonction de l’âge : 10-15, parfois jusqu’à 20 mmHg chez l’adulte, 3-7 mmHg

chez les jeunes enfants, 1-6 mmHg chez le nouveau-né.

En temps normal, la PIC est stable, malgré les perturbations transitoires induites par la toux,

l’éternuement ou l’effort à glotte fermée.

1.4. Physiopathologie

On distingue 3 mécanismes dans la survenue de l’HIC : liquidien, vasculaire et tissulaire.

- Mécanisme liquidien :

C’est l’augmentation du volume du liquide cérébro-spinal. Il s’agit en général d’un blocage à

l’écoulement (obstacle), parfois une augmentation de sa production ou un défaut de

résorption.

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- Mécanismes vasculaires :

En cas de saignement intracrânien ou d’obstacle qui gêne le retour veineux.

- Mécanismes tissulaires :

Augmentation de la masse cérébrale par un œdème ou une néoformation tissulaire.

En cas d’HIC, la première réponse physiologique correspond à la loi de Monroe-Kellie. Après

épuisement de ce mécanisme, la PIC va suivre une évolution exponentielle selon la courbe

de Langfitt (figure 2).

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Figure 2. Courbe de Langfitt représentant la relation pression-volume

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Les conséquences sont de plusieurs ordres :

- la distension des enveloppes méninges à l’origine de la douleur

- la stimulation du nerf vague et la tendance aux vomissements sans facteur

alimentaire, l’irritation du nerf abducens sans valeur localisatrice

- l’atteinte optique : par gène du retour veineux, elle va de la stase veineuse à

l’œdème papillaire, puis à l’atrophie du nerf optique qui est irréversible

- l’engagement cérébral: la masse cérébrale sous pression tend à faire hernie dans les

orifices qui se présentent à elle ou dans les espaces intracrâniens « non occupés »

(citernes, fentes)

- l’ischémie cérébrale : par baisse de la pression de perfusion

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crânial

latéral

Figure 3. Vue coronale de l’encéphale normal

crânial

latéral

Figure 4. Vue coronale de l’encéphale avec un engagement central

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crânial

latéral

Figure 5. Vue coronale de l’encéphale avec un engagement sous-falcoriel (1) et en

engagement temporal (2)

crânial

latéral

Figure 6. Vue coronale de l’encéphale avec un engagement trans-tentoriel (3) et en

engagement des amygdales cérébelleuses (4)

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2. DIAGNOSTIC

2.1. Positif

On distingue une phase d’état et une phase de complications. Le diagnostic positif est

essentiellement basé sur la présomption clinique. En pratique, la mesure de la PIC n’est pas

nécessaire, surtout parce qu’il s’agit d’une procédure invasive, sauf lorsqu’elle s’intègre dans

une stratégie thérapeutique.

2.1.1. Phase d’état

- Signes fonctionnels

o Céphalées :

Elles surviennent dans la deuxième moitié de la nuit (à partir de minuit) ou le matin.

Elles sont de siège variable, souvent atroces, à type de broiement. Elles évoluent sous

formes de crises, avec des moments d’accalmie (un fond douloureux peut persister).

La survenue des céphalées réalise souvent un phénomène de coup de tonnerre dans un ciel

serein.

Les céphalées sont exagérées par la toux, l’effort d’éternuement, ou la simple rotation de la

tête.

Chez le petit enfant, les céphalées sont remplacées par des pleurs incessants inexpliqués.

o Vomissements :

Ils sont peu fréquents, souvent remplacés par les nausées. Ils sont faciles (sans effort), en

jet, soulagent parfois les céphalées (surviennent au paroxysme des céphalées).

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o Signes visuels :

Ils sont courants. Il réalisent un flou visuel, voire une cécité uni ou bilatérale d’installation

progressive. Le patient peut rapporter une diplopie horizontale par atteinte du nerf

abducens ; cette atteinte n’a pas de valeur localisatrice.

o Signes psychiques :

Ils peuvent être signalés par l’entourage : lenteur d’idéation, diminution de la mémoire,

apathie (incapacité d’être ému ou de réagir, indifférence).

- Signes physiques :

L’examen du fond d’œil a une importance considérable. Les signes évoluent de la stase à

l’œdème papillaire.

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Figure 7. Fond d’œil normal

Figure 8. Fond d’œil avec œdème papillaire

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L’examen neurologique peut en outre retrouver des signes d’atteinte oculomotrice,

notamment du nerf abducens, avec un strabisme interne ou un déficit d’abduction.

Le reste de l’examen peut retrouver une bradycardie au moment des poussées

d’hypertension intracrânienne, une modification du pouls lors des changements de position

de la tête.

Chez l’enfant, il y a une macrocranie, c’est à dire une augmentation du périmètre crânien au-

dessus des valeurs normales pour l’âge. Il y a une circulation collatérale veineuse

superficielle visible sur le scalp, un regard en coucher de soleil. Les fontanelles sont tendues,

et il y a une disjonction des sutures.

2.1.2. Phase de complications

L’œdème papillaire évolue vers une atrophie du nerf optique, la cécité est alors irréversible.

Le syndrome de Foster-Kennedy peut être observé : atrophie optique d’un côté et œdème

papillaire de l’autre, avec parfois une anosmie du côté de l’atrophie optique.

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Figure 9. Fond d’œil avec atrophie du nerf optique donnant un aspect en cachet d’aspirine

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Les autres complications sont :

- troubles de la conscience d’aggravation progressive

- troubles du tonus musculaire (raideur du rachis cervical, hypertonie)

- troubles neurovégétatifs respiratoires, circulatoires et de la régulation thermique

- engagements :

o Engagement temporal :

Troubles de la conscience pouvant aller jusqu’au coma, encombrement pulmonaire,

mydriase unilatérale, homolatérale à l’engagement. Hémiplégie controlatérale à la mydriase.

o Engagement cérébelleux

Conservation de l’état de conscience, crises toniques postérieures de Jackson, perturbations

du rythme respiratoire, de la TA et du pouls.

Crises toniques postérieures de Jackson : céphalées aigues, raideur de la nuque, hypertonie

axiale, vomissements accrus, souvent déclenchées suite à une ponction lombaire.

2.2. Différentiel

Devant les céphalées, il s’agit de :

- syndrome d’hypotension intracrânienne

céphalées posturales, diplopie, raideur de la nuque. Le contexte est souvent évocateur

(après ponction lombaire), le fond d’œil est normal.

- syndrome méningé

les céphalées sont permanentes, intenses, associées à une photophobie. Il y a un signe de

Kernig et un signe de Brudzinski.

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- migraine

l’évolution est chronique, les céphalées sont précédées d’une aura. Il s’agit surtout d’une

hémicrânie. Le traitement médical sert également d’épreuve diagnostique.

2.3. Étiologique

Le diagnostic étiologique procède par une triple enquête, anamnestique, clinique et

paraclinique.

- Anamnèse :

o âge, sexe

o début des symptômes, leur évolution (aiguë ou chronique)

o signes associés : convulsions, fièvre, amaigrissement

o antécédents : habitudes alimentaires, suivi de la grossesse chez l’enfant,

facteurs de risque cardiovasculaires

- Clinique :

o signes généraux : mesures anthropométriques chez l’enfant, performans

status

o signes physiques : déficit moteur, autres signes de focalisation neurologique,

fond d’œil

- Paraclinique :

o tomodensitométrie : sans puis avec injection, elle est surtout indiquée en

urgence

o imagerie par résonance magnétique (IRM) : elle permet dans la majorité

d’identifier une étiologie de l’HIC

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o ponction lombaire : elle est contre-indiquée en cas d’HIC, surtout en cas

d’obstacle sur les voies d’écoulement du liquide cérébro-spinal (LCS). Elle

contribue à la mesure de pression du LCS qui indique celle de la PIC

o mesure de pression intracrânienne : elle peut être réalisée par ponction

lombaire ou par voie trans-crânienne. Elle a surtout un usage thérapeutique.

2.4. Étiologies

- Étiologies liées au compartiment liquidien

Il s’agit des hydrocéphalies soit par excès de production ou par défaut de résorption

du LCS. Le diagnostic est assuré par la tomodensitométrie ou l’IRM. L’hydrocéphalie

peut être la conséquence d’une cause liée au compartiment vasculaire ou

parenchymateux et n’en être alors qu’une conséquence.

- Étiologies liées au compartiment vasculaire

o Hématome intracérébral spontané (HIS)

Il s’agit d’un accident vasculaire cérébral. L’interrogatoire retrouve des facteurs de risque

cardiovasculaires. La tomodensitométrie sans injection permet d’en affirmer le diagnostic.

o Infarctus cérébral malin

Il peut être secondaire à une thrombose d’un tronc artériel cérébral. Il est pourvoyeur

d’œdème cérébral. Le diagnostic est assuré par la tomodensitométrie.

o Thrombose veineuse cérébrale

Elle est responsable d’œdème cérébral. Le diagnostic est posé à l’IRM avec angio-RM

veineuse.

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o Encéphalopathie hypertensive

Il s’agit le plus souvent d’une hypertension artérielle incontrôlée, dans le cadre de la

prééclampsie, le phéochromocytome, une glomérulonéphrite. Elle procède par un œdème

cérébral suite à une vasodilatation vasculaire cérébrale diffuse.

- Étiologies liées au compartiment parenchymateux

o Suppurations intracrâniennes

o Tumeurs cérébrales

o Traumatismes crânio-encéphaliques

o Hyponatrémie

- Autres causes

o Hypothyroïdie

o Hyperparathyroïdie

o Déficit en vitamine A : par altération des villosités arachnoïdiennes

- HIC idiopathique

Affection fréquente chez la femme obèse. Elle évolue par poussées, avec des céphalées et

des troubles visuels. Aucune cause n’est identifiée, malgré l’IRM et angio-RM.

3. TRAITEMENT

3.1. But

- Diminuer la PIC

- Traiter la cause

- Prévenir les complications

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3.2. Moyens

- Mesures de réanimation

o Hospitalisation

o Surélévation de la tête de 20° par rapport à l’horizontale

o Légère restriction hydrique

o Sédation

- Médicaments (tableau I)

o Antalgiques par paliers

o Osmothérapie

- Chirurgie

o Dérivation du LCS

§ Interne : dérivation ventriculo-péritonéale, ventriculo-cisternostomie

endoscopique

§ Externe

o Craniotomie : ouverture du crâne

o Craniectomie décompressive : ouverture du crâne avec retrait d’une partie de

l’os du crâne pour décomprimer le parenchyme cérébral. Le cerveau est alors

immédiatement sous la peau dans la zone opérée

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Tableau I. Médicaments

Type DCI Présentation Posologie Effet indésirable


250, 300, 500 15 mg/kg/6h chez
Antalgique palier 1 Paracétamol 1000 mg l’enfant Toxicité hépatique
Per os, IV 1g/6h chez l’adulte
50-100 mg
Antalgique palier 2 Tramadol 150 – 300 mg /j Vomissements
Per os, S/C
500 mL, 10-20% 0,25-1g / kg (20%)
Hyper-osmotique Mannitol Effet rebond
IV 60-100 mL / 4h (10%)
Sérum salé
Hyper-osmotique 7,5% 3 mL/kg/j Hypernatrémie
hypertonique

3.3. Indications

Elles diffèrent selon le cadre étiologique.

3.4. Surveillance

Elle est également liée à l’étiologie.

- Clinique

o Intensité des céphalées, fréquence des vomissements

o Périmètre crânien chez l’enfant

o Fond d’œil

o Examen neurologique complet

- Paraclinique

Tomodensitométrie ou IRM en fonction de l’étiologie.

Monitorage de la PIC en réanimation.

3.5. Résultats

Ils dépendent de l’étiologie et du stade évolutif.

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CONCLUSION

L’hypertension intracrânienne est une urgence médico-chirurgicale. Les signes sont

essentiellement cliniques, et sont dominés par des céphalées caractéristiques.

Les complications majeures sont la cécité et l’engagement qui peut conduire au décès.

Les examens complémentaires, à savoir la tomodensitométrie et l’imagerie par résonance

magnétique permettent, entre autre, d’en identifier les causes, qui sont variables selon le

mécanisme.

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Références :

1. De Recondo J. Hypertension intracrânienne et tumeurs cérébrales In Sémiologie du

système nerveux : du symptôme au diagnostic. 2e édition. Flammarion, 2004 : 205-8.

2. Proust F, Derrey S, Lavabre O, Castel H. Hypertension intracrânienne. EMC neurologie

2012 ; 9 (2) : 1-14

3. Biousse V., Bousser M.-G. Hypertension intracrânienne idiopathique. EMC (Elsevier

SAS, Paris), Neurologie, 17-037-M-10, 2006: 1-10.

4. I. Riss : Œdème papillaire dans l’hypertension intracrânienne idiopathique. EMC-

Neurologie 2005 ; 2 : 287–300.

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