20-390-A-10

Corps étrangers des fosses nasales,

rhinolithiase
M. François

Les corps étrangers (CE) des fosses nasales ne se voient pratiquement que chez les enfants. Le diagnostic
est facile si un adulte a assisté à l’insertion du CE ou que l’enfant lui-même le signale. Ailleurs, c’est à
l’occasion d’une symptomatologie nasale persistante ou d’une complication que le diagnostic est posé.
L’extraction se fait habituellement par les voies naturelles, avec des techniques plus ou moins sophistiquées
selon la forme et la nature du CE, et le matériel dont le praticien dispose. Cet incident est sans suite, sauf
en cas de piles boutons, d’aimants ou de CE très anciens qui peuvent léser les parois des fosses nasales
avec comme conséquences possibles synéchies ou perforation de la cloison nasale. La rhinolithiase est
une complication tardive d’un CE nasal méconnu qui, au fil du temps, s’enrobe de sels minéraux et peut
atteindre une taille telle qu’un morcellement devient nécessaire pour l’extraire de la fosse nasale.
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Mots-clés : Corps étranger ; Fosse nasale ; Rhinolithiase ; Aimant ; Pile bouton ; Rhinorrhée ; Crochet

Plan vomissement, sont exceptionnels et ne posent guère de problème

en pratique courante, étant facilement éliminés par un lavage de
■ Introduction 1 nez au sérum physiologique.
■ Épidémiologie 1
Fréquence 1
Âge 1  Épidémiologie
Terrain 1
Nature et caractéristiques des corps étrangers des fosses nasales 2 Fréquence
■ Physiopathologie 2 Il est difficile de connaître la fréquence des CE des fosses nasales,
Pénétration du corps étranger 2 car d’une part beaucoup sont éliminés à la maison par mouchage
Localisation du corps étranger 2 ou autres manœuvres effectuées par l’enfant de sa propre ini-
Conséquences de la présence d’un corps étranger dans les fosses tiative ou à la suggestion de ses parents, et d’autre part il s’agit
nasales 3 d’incidents habituellement bénins qui sont rarement répertoriés
■ Diagnostic 3 et encore moins publiés.
Clinique 3 Quelques services ont colligé leurs séries de CE nasal
Imagerie 3 (Tableau 1) [2–6] .
■ Complications des corps étrangers des fosses nasales 3
Infection locorégionale 3
Perforation septale 4
Âge
Synéchies 4 L’âge médian des enfants qui se mettent un CE dans le nez est
Rhinolithiase 4 de l’ordre de 3 ans [2, 3, 5, 6] . Les enfants les plus jeunes ont 1 an, mais
■ Diagnostic différentiel 5 il n’y a aucune limite d’âge supérieure !
■ Traitement 5
Méthodes d’extraction 5
Soins après l’extraction du corps étranger 5
Terrain
■ Conclusion 6 L’insertion d’un CE dans une fosse nasale est le fait du patient
lui-même, à la différence de ce qui se passe pour l’oreille par
exemple où l’insertion est parfois le fait d’un compagnon de
jeux [2] . Il s’agit en général d’enfants jeunes qui jouent avec de
 Introduction petits objets. Les corps étrangers sont rares après l’âge de rai-
son (traditionnellement fixé à 7 ans). Au-delà de cet âge, il s’agit
Ne seront évoqués ici que des corps étrangers (CE) introduits de patients qui ont un profil psychique particulier, avec ou
dans les fosses nasales par l’orifice narinaire. En effet, les CE intro- sans retard mental, ou bien d’adolescents et de jeunes adultes
duits à travers le sinus maxillaire, comme les armes blanches ou adeptes de la mode actuelle des faux piercings de l’aile narinaire
les projectiles d’arme à feu, relèvent d’un tout autre contexte [1] , (aimants) [7, 8] ou de certaines addictions (boulettes d’opium ou
et les CE introduits par la choane, comme certains débris alimen- autre) [9] .
taires qui peuvent pénétrer dans les fosses nasales lors d’efforts de Certains enfants récidivent [2, 3] .

EMC - Oto-rhino-laryngologie 1
Volume 11 > n◦ 3 > août 2016
http://dx.doi.org/10.1016/S0246-0351(16)76703-1
20-390-A-10  Corps étrangers des fosses nasales, rhinolithiase

Tableau 1.
Corps étrangers des fosses nasales, d’après quelques séries publiées dans la littérature : données démographiques.
François et al. [2] Claudet et al. [3] Cetinkaya et al. [4] Yaroko et Baharudin [5] Abou-Elfadl et al. [6]
Service ORL pédiatrique Urgences pédiatriques Deux services ORL Service ORL Service d’urgences ORL
Années 1994–1997 2003–2008 2006–2013 2008–2012 2011
Nombre de cas 68 388 1875 43 260
0,3 % des consultants en 0,2 % des enfants vus aux 4,3 % des enfants vus
ORL pédiatrique urgences pédiatriques aux urgences ORL
Âges 18 mois–12,5 ans 16 mois–14 ans 1–9 ans 1–16 ans
Moyenne 41 mois 42 mois 3 ans
Médiane 36 mois 36 mois 3 ans
Garçons (%) 58,8 49 52,9 60,5 58,3
Fosse nasale droite 65 % 58,1 %

ORL : oto-rhino-laryngologique.

Tableau 2.
Nature des corps étrangers des fosses nasales (en pourcentages).
Auteur François et al. [2] Yaroko et Baharudin [5]
Pays France Malaisie
Perles 20,6 0
Végétal 5,9 23,3
Plastique 23,5 0
Caoutchouc 0 16,3
Papier 14,7 0
Coton 10,3 4,7
Mousse, éponge 20,6 13,9
Métal 1,5 0
Piles boutons 0 16,3

Figure 2. Radiographie standard de face montrant un corps étranger

métallique dans la fosse nasale. L’aspect en marche d’escalier est très
caractéristique d’une pile bouton.

qui servent à rembourrer les coussins : quand l’enfant se mouche

et appuie sur ses ailes narinaires, la mousse se collabe et l’enfant
respire très bien pendant quelques minutes, ce qui peut être trom-
peur et faire penser à tort qu’il n’y a pas d’obstacle dans les fosses
nasales. Les piles boutons (Fig. 2) posent un problème particulier,
car elles peuvent induire rapidement une nécrose des parois de la
fosse nasale.
Enfin il peut s’agir d’un CE iatrogène comme un morceau de
coton [5] , de mèche de gaze ou d’ouate hémostatique, oublié dans
une fosse nasale bien après que l’épistaxis qui a motivé leur mise
en place s’est tarie.

Figure 1. Perle dans une fosse nasale.
Nature et caractéristiques
des corps étrangers des fosses nasales
Les CE retrouvés dans les fosses nasales sont très variés. Il peut
s’agir de CE inertes et organiques (aliments, végétaux, animaux)
(Tableau 2). Certains CE comme les pois chiches sont hydro-
philes. Ils gonflent dans la fosse nasale, ce qui empêche leur
expulsion naturelle par mouchage, et vont entraîner rapidement
une réaction de la muqueuse avec une rhinorrhée éventuellement
fétide dès le deuxième jour. À l’inverse, les CE non organiques,
comme les perles (Fig. 1) ou les boulons, sont mieux tolérés par la
muqueuse [10] . À signaler le cas particulier des fragments de mousse
 Physiopathologie
Pénétration du corps étranger
Le CE est introduit par l’enfant dans le seuil narinaire, puis se
bloque plus ou moins en arrière dans la fosse nasale.
Localisation du corps étranger
Dans l’immense majorité des cas, le CE se bloque à la partie
médiane de la fosse nasale, entre cornet inférieur et cloison nasale
(Fig. 3). Cependant, une manœuvre intempestive peut refouler le
CE plus en arrière, ou plus rarement vers la partie supérieure de la
fosse nasale. Il sera alors à la fois plus difficile à voir et plus difficile
à extraire.
Les CE sont un peu plus fréquents dans la fosse nasale droite
que dans la fosse nasale gauche [3, 5] . Cela est attribué au fait qu’il

2 EMC - Oto-rhino-laryngologie

A B
y a plus de droitiers que de gauchers, mais cette explication n’est
pas satisfaisante car si 80 % des enfants sont droitiers, seulement
deux tiers des corps étrangers nasaux sont à droite !
Le CE est habituellement unique, mais il est prudent de vérifier
après extraction qu’il n’y en a pas un autre derrière, ou dans l’autre
fosse nasale, ainsi que dans les conduits auditifs externes [2, 3, 5] .
Conséquences de la présence d’un corps
étranger dans les fosses nasales
Les lésions engendrées par la présence du CE au niveau de la
fosse nasale sont variables en fonction de sa nature et de la durée
de son séjour.
La présence du CE entraîne, rapidement en cas de corps étranger
organique type haricot ou pois chiche, beaucoup plus lentement
en cas de corps étranger inerte type boulon ou morceau de plas-
tique, un œdème de la muqueuse pituitaire à la fois par irritation et
par réaction inflammatoire. L’évolution se fait vers la surinfection
locale avec suppuration nasale, ce qui peut être source d’ulcération
de la muqueuse qui va se traduire par des saignements minimes
et la formation de tissu de granulation. En cas de CE très ancien,
on peut avoir une infection des cavités sinusiennes, une rhinite
atrophique et croûteuse, il a même été décrit une anomalie du
développement du squelette facial.
Les piles boutons et les aimants constituent des cas à part. La
pression mécanique des aimants peut entraîner une nécrose de
la cloison nasale si par malchance deux aimants se trouvent en
regard l’un de l’autre [11, 12] . Les piles sont particulièrement dange-
reuses, car en plus de la pression mécanique que la pile exerce sur
les parois de la fosse nasale, il peut y avoir libération de compo-
sants chimiques de la pile agressifs pour la muqueuse et réaction
électrochimique de bas voltage induisant une nécrose par coagu-
lation autour de la cathode et coloration noirâtre des tissus autour
de l’anode [13, 14] . L’administration intempestive de gouttes nasales
salées peut accélérer ce processus [13] . À un stade de plus appa-
raissent perforation septale par nécrose du cartilage, nécrose du
cornet inférieur, rhinite vestibulaire.
 Diagnostic
Clinique
Circonstances de l’examen
Les cas les plus simples sont ceux où l’enfant dit à ses parents
qu’il s’est mis quelque chose dans le nez ou bien lorsqu’un adulte
a assisté à l’introduction du CE dans la fosse nasale.
EMC - Oto-rhino-laryngologie
Corps étrangers des fosses nasales, rhinolithiase  20-390-A-10
Figure 3. Examen tomodensitométrique en
coupe sagittale (A) et coronale (B) montrant un
corps étranger radio-opaque dans la fosse nasale
droite (flèche), dans la position la plus habituelle
de ces corps étrangers.
Sinon, l’examen ne sera fait que parce qu’il y a des signes cli-
niques : bruit nasal, car la présence du CE crée des turbulences
lors du passage de l’air dans les fosses nasales, obstruction nasale,
rhinorrhée antérieure unilatérale, surtout si elle est fétide, parfois
cacosmie, odeur nauséabonde perçue par l’entourage, rarement
rhinorrhée sérosanguine, ou bien encore éternuements récents [5] .
Tous ces signes sont peu spécifiques, d’où un délai possible dans
le diagnostic [15] , mais ils attirent l’attention vers le nez.
Enfin la découverte du corps étranger peut être fortuite lors
d’un examen oto-rhino-laryngologique (ORL), car certains corps
étrangers sont asymptomatiques, tout au moins dans les premiers
jours.
Examen clinique
Il suffit souvent de relever la pointe du nez pour voir le corps
étranger dans la partie antérieure de la fosse nasale, lorsque le CE
n’est en place que depuis peu et qu’il n’y a pas encore de sécrétions
le masquant.
Sinon, il faut faire moucher l’enfant, à défaut aspirer les
sécrétions encombrant les fosses nasales avec une grosse sonde
(minimum Ch 10), et faire une rhinoscopie antérieure. Si la
muqueuse est très congestive, il est possible de rétracter la
muqueuse par application pendant trois minutes de coton hydro-
phile imbibé de Xylocaïne® à la naphazoline.
Il est rare d’avoir à utiliser un nasofibroscope ou une optique
droite, si l’obstruction nasale est postérieure et qu’il n’y a rien de
visible dans le tiers antérieur de la fosse nasale.
Imagerie
L’imagerie est habituellement inutile si le corps étranger a été
vu à la rhinoscopie antérieure. Mais, inversement, un corps étran-
ger radio-opaque peut être découvert fortuitement sur des clichés
de sinus ou des radiographies dentaires, sans symptomatologie
rhinologique [10, 16] .
 Complications des corps
étrangers des fosses nasales
Infection locorégionale
La présence d’un corps étranger dans la fosse nasale induit une
hypersécrétion de la muqueuse et une stagnation des sécrétions
nasales qui, plus ou moins rapidement, deviennent opaques et
colorées, par afflux de cellules dans les sécrétions. Il s’agit plus
d’une réaction muqueuse que d’une infection. De fait, il n’y a pas
3
20-390-A-10  Corps étrangers des fosses nasales, rhinolithiase
Figure 4. Examen tomodensitométrique en coupe coronale montrant
une synéchie entre cloison et cornet, secondaire à une pile bouton.
de signes généraux type fièvre ou frissons. Cette rhinorrhée puru-
lente peut parfois devenir fétide, par colonisation des sécrétions
par des germes particuliers. Les antibiotiques tant locaux que par
voie générale sont inefficaces sur ce type de rhinorrhée. Celle-ci
disparaît très vite après ablation du corps étranger. Il est excep-
tionnel qu’un corps étranger soit la cause d’une rhinosinusite
unilatérale.
Perforation septale
Les piles boutons si elles restent plus de quelques heures dans
une fosse nasale peuvent entraîner une nécrose muqueuse, puis
cartilagineuse de la cloison nasale avec un risque de perforation
septale séquellaire [14] . De même, les aimants peuvent provoquer
de telles perforations [11, 12] .
Synéchies
Les piles boutons, mais aussi des corps étrangers organiques s’ils
restent longtemps dans une fosse nasale, peuvent provoquer une
nécrose de la muqueuse nasale à leur contact qui, après ablation du
corps étranger, peut être responsable de synéchies entre cornet et
cloison nasale, elles-mêmes responsables d’obstruction nasale [14]
(Fig. 4).
Rhinolithiase
Les rhinolithiases ou rhinolithes sont des calculs des fosses
nasales constitués par apposition de sels minéraux autour d’un
corps étranger endonasal endogène (dent, séquestre osseux) ou
exogène (morceau de papier, fruit, perle, etc.) [9, 17–19] . Cette patho-
logie est très rare, mais peut être trompeuse.
Épidémiologie
Un rhinolithe peut se former en quelques mois : six mois dans
une observation rapportée par Kharoubi [20] , mais inversement
le rhinolithe n’est parfois diagnostiqué que plusieurs décennies
après l’insertion du CE nasal : 44 ans dans un cas rapporté par
Pacheco [21] , 50 ans dans un cas rapporté par Kharoubi [20] . Dans
certains cas particuliers, la famille a pu se souvenir de la date pro-
bable de l’insertion du CE initial. Mais, le plus souvent, il est
impossible de retrouver à l’interrogatoire la date de début des
troubles et encore moins la notion de l’insertion d’un CE dans
la fosse nasale. Parfois, une fois le rhinolithe extrait et analysé, le
patient se souvient du moment où il a inséré quelque chose dans
sa fosse nasale, comme dans le cas rapporté par Bader où le patient
s’est souvenu de cet épisode 64 ans après ! [20] .
Plus le rhinolithe est ancien, plus il est volumineux. La lenteur
de constitution des rhinolithes explique que, même si les CE des
4 EMC - Oto-rhino-laryngologie
Figure 5. Examen tomodensitométrique montrant un rhinolithe dans
la fosse nasale gauche.
fosses nasales sont observés essentiellement chez des enfants, les
rhinolithes ne sont observés pratiquement que chez des adultes.
Ils seraient plus fréquents chez les femmes [20, 22] .
La taille des rhinolithes est très variable, de quelques millimètres
à plusieurs centimètres de diamètre [19] , de quelques grammes à
50 g. Un rhinolithe de 116 g a été décrit par Abu-Jaudeh [19] .
Il existe des formes multiples et des formes bilatérales [20] .
Physiopathologie
La présence d’un corps étranger enclavé dans une fosse nasale
favoriserait une réaction inflammatoire chronique et une gêne
à l’évacuation des larmes et des sécrétions nasales avec dépôts
progressifs de sels minéraux, essentiellement sels de calcium et de
magnésium, autour du corps étranger. En fait, la pathogénie des
rhinolithiases n’est pas parfaitement claire, car cette pathologie
est exceptionnelle, alors que les corps étrangers des fosses nasales,
et en particulier les corps étrangers méconnus, sont fréquents.
Symptômes
La symptomatologie est dominée par l’obstruction nasale et la
rhinorrhée purulente unilatérales [19, 21, 22] . L’obstruction et la rhi-
norrhée peuvent être bilatérales, ce qui est trompeur. Il peut s’y
ajouter des céphalées, une rhinosinusite chronique, une cacosmie,
des épistaxis répétées unilatérales [20, 21] .
Enfin, la découverte du rhinolithe peut être accidentelle, lors
d’un examen de routine des fosses nasales ou sur des clichés
demandés pour des problèmes dentaires.
Il a été rapporté des cas de perforation septale ou palatine [22] .
Examen clinique
L’examen de la partie antérieure des fosses nasales, en soule-
vant la pointe du nez ou avec un otoscope, ne permet pas de faire
le diagnostic. Pour voir le rhinolithe, il faut d’abord préparer la
fosse nasale, au besoin en aspirant les sécrétions qui y stagnent et
en rétractant la muqueuse avec des mèches de coton imbibées de
Xylocaïne® à la naphazoline. L’examen à l’optique droite ou au
fibroscope permet alors de visualiser une masse obstruant la fosse
nasale, grisâtre ou noirâtre et dure à la palpation [20, 23] , occupant
le plancher de la fosse nasale : méat inférieur ou espace intertur-
binoseptal. Mais, souvent, les granulations autour du rhinolithe
saignent au contact, ce qui rend l’examen laborieux. À ce stade le
diagnostic qui est évoqué est celui d’une tumeur des fosses nasales,
et avant tout une tumeur maligne qui peut du reste y être asso-
ciée comme dans le cas rapporté par Özdemir et al. [24] . Un bilan
d’imagerie est alors demandé.
Imagerie
Sur l’examen tomodensitométrique, le diagnostic de rhinolithe
n’est évoqué que si la masse qui obstrue la fosse nasale est partiel-
lement ou totalement calcifiée (Fig. 5).
Dans tous les cas, cette imagerie permet de préciser le volume
et la localisation de la masse [23] , ce qui guidera le praticien pour
choisir la stratégie thérapeutique : biopsie, exérèse complète,

choix de la voie d’abord, difficultés prévisibles. L’examen tomo-
densitométrique permet aussi de visualiser une rhinosinusite
associée et d’éventuelles complications : déformation septale, lyse
de la cloison nasale, lyse du palais, de la cloison sinusonasale.
 Diagnostic différentiel
Le problème ne se pose que si l’introduction du CE dans la
fosse nasale est passée inaperçue. Chez l’enfant, toute suppura-
tion et toute obstruction nasale unilatérale sont des CE, jusqu’à
preuve du contraire. Il pourrait s’agir d’une rhinosinusite unilaté-
rale, d’une tumeur endonasale, d’une atrésie choanale unilatérale.
C’est l’examen des fosses nasales après rétraction de la muqueuse
avec un endoscope rigide (optique) ou souple (fibroscope) qui per-
met d’éliminer un CE et retrouve l’origine de la suppuration ou
de l’obstruction nasale.
Les diagnostics différentiels des rhinolithiases sont les tumeurs
nasosinusiennes à densité calcique telles que fibrome ossifiant,
odontome, ostéome, ostéosarcome, et chondrosarcome, ainsi
qu’un polype nasal calcifié, un séquestre osseux d’ostéomyélite
(syphilis, radionécrose) ou bien encore une tuberculose nasale
avec calcification [25] .
 Traitement
Méthodes d’extraction
L’exérèse d’un corps étranger des fosses nasales se fait par les
voies naturelles.
Avant de commencer, il faut s’assurer d’avoir sous la main le
matériel nécessaire [26] : bon éclairage laissant les deux mains libres
soit miroir de Clar, soit microscope, spéculum nasi de Vacher et
écarteurs de Palmer de taille adaptée aux narines de l’enfant, aspi-
rateur de mucosités avec des sondes souples (10 et 12 Ch) ou une
canule d’aspiration rigide pour fosses nasales, crochet mousse et
micropince, pince de Politzer, sonde à ballonnet (type sonde uri-
naire) [27] .
L’extraction peut se faire, l’enfant étant assis dans un fauteuil
d’examen, la tête calée en arrière pour qu’il ne puisse pas reculer.
Mais il est plus facile de le faire en décubitus dorsal, sur une table
d’examen [28] . Certains enfants sont très raisonnables et n’ont pas
besoin d’être maintenus, cependant, en règle générale, pour évi-
ter tout mouvement intempestif de rotation ou de recul de la
tête, ou que l’enfant ne vienne mettre ses mains dans le champ
de vision de l’opérateur, il est souvent préférable qu’un adulte
maintienne les coudes de l’enfant contre la table d’examen et
qu’un autre aide maintienne la tête en rectitude, un peu pen-
chée en arrière. L’inhalation de mélange équimolaire d’oxygène
et protoxyde d’azote (MEOPA) par la bouche peut aider l’enfant
à se détendre et faciliter le geste. Il est rare d’avoir à recou-
rir à une anesthésie générale qui alourdit considérablement la
procédure (consultation d’anesthésie, jeûne, disponibilité conco-
mitante d’une salle d’opération, d’un anesthésiste et d’un ORL,
puis délai avant que l’enfant ne puisse repartir chez lui [5, 10, 29] .
Une fois le corps étranger visualisé, il y a deux cas de figure [30] :
• le corps étranger est arrondi (perle, pois chiche, pile bouton) :
la solution la plus simple est d’introduire un crochet au-dessus,
puis en arrière du corps étranger et de le faire rouler vers le seuil
narinaire (Fig. 6) ;
• le corps étranger est aplati (morceau de papier, morceau de plas-
tique) : l’opérateur peut le saisir entre les mors d’une pince et le
retirer vers l’extérieur.
Certains corps étrangers friables et très volumineux sont morce-
lés lors des tentatives d’extraction (produits hémostatiques, corps
étrangers alimentaires, rhinolithes).
Seules les piles boutons justifient une extraction en urgence.
Tous les autres corps étrangers peuvent attendre que les conditions
optimales d’extraction (matériel, personnel) soient réunies.
Beaucoup d’autres méthodes ont été décrites, elles sont citées,
car elles peuvent rendre service dans des cas particuliers.
Chez le jeune enfant (par opposition au nourrisson) l’expiration
forcée nasale, c’est-à-dire le mouchage, peut suffire [31] .
EMC - Oto-rhino-laryngologie
Corps étrangers des fosses nasales, rhinolithiase  20-390-A-10
Figure 6. Schéma montrant la méthode d’extraction d’un corps étran-
ger arrondi en glissant un crochet en haut et en arrière du corps étranger
pour le faire rouler ensuite vers l’avant.
Une pression positive peut être appliquée par un adulte en
soufflant dans la narine opposée directement avec un cathéter
relié à une source d’oxygène, avec un fort débit (15 l/min) [32] ,
ou bien encore en soufflant dans la bouche de l’enfant direc-
tement (baiser parental ou parent’s kiss) [33] ou avec un ballon
Ambu® , tout en obturant la narine opposée [34] . Cela nécessite
beaucoup de doigté et la coopération de l’enfant et ne saurait être
conseillé comme méthode standard d’extraction d’un corps étran-
ger endonasal [3, 35] . Avec l’Ambu® et l’oxygène délivré par canule
endonasale il y a un risque d’emphysème sous-cutané, périorbi-
taire et médiastinal [36] .
Le lavage des fosses nasales en introduisant le liquide dans la
fosse nasale controlatérale permet de refouler vers l’avant des
corps étrangers de petite taille type débris alimentaires [35, 37] . Le
lavage est cependant déconseillé avec les piles boutons, car il
favorise les réactions électrochimiques et avec les corps étran-
gers hydrophiles, type pois chiche ou haricot sec, qui vont gonfler
encore plus. Il ne faut jamais laver directement dans la fosse nasale
où est le corps étranger, car le courant de l’eau va entraîner le corps
étranger encore plus en arrière dans la fosse nasale.
Une sonde à ballonnet, type sonde urinaire Foley 5, 6 ou 8 ou
sonde de Fogarty, peut être introduite dans la fosse nasale, au-
dessus et en arrière du corps étranger. Le ballonnet est alors gonflé
avec 2 à 5 ml d’air ou d’eau. Une traction douce sur la sonde
permet de ramener le corps étranger vers l’avant [27, 35] .
Si le CE est vivant (larve, ver, insecte), il faut le tuer ou au moins
l’anesthésier avant son extraction [30] .
Giourgos et al. [38] décrivent l’extraction d’un CE nasal par un
nasofibroscope dont on coude l’extrémité derrière le CE.
De même, il a été décrit l’extraction de corps étrangers métal-
liques avec un aimant [39] .
L’exérèse d’aimants peut être difficile et nécessiter un matériel
particulier [40] .
Certains auteurs ont utilisé la lithotripsie pour le morcellement
et l’extraction de rhinolithes [41] .
Le recours à l’abord chirurgical ne s’adresse qu’aux rhinolithes
« historiques » de grandes dimensions [17] , à la réparation d’une
perforation de cloison ou d’une fistule oronasale [22] .
Le risque d’une tentative d’exérèse dans de mauvaises condi-
tions est d’impacter un peu plus le corps étranger, ou de le voir
filer vers le cavum [10] d’où il pourrait être malencontreusement
dégluti (il s’agit quand même d’un risque très faible, car, pour être
inhalé, il faudrait que les mécanismes de protection du larynx
soient aussi pris en défaut).
Soins après l’extraction du corps étranger
Habituellement, il n’est pas nécessaire de prescrire autre chose
que des lavages de nez après l’extraction du corps étranger. La
5
20-390-A-10  Corps étrangers des fosses nasales, rhinolithiase
rhinorrhée cède en quelques jours. Si des lésions de la muqueuse
nasale sont constatées après l’extraction du corps étranger, soit
du fait de sa nature (pile bouton), soit parce que le corps étran-
ger était ancien ou les manœuvres d’extraction laborieuses, une
lame de Silastic® solidarisée au septum nasal et laissée en place
pendant une dizaine de jours permet de prévenir une synéchie
turbinoseptale [14] .
 Conclusion
L’évolution possible vers la rhinorrhée unilatérale chronique, la
perforation septale et la rhinolithiase explique la nécessité d’une
prise en charge adéquate sur le plan diagnostique et thérapeutique
des jeunes patients qui, souvent par inadvertance, introduisent
dans leurs fosses nasales des CE de nature très variée.
Déclaration d’intérêts : l’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts en rela-
tion avec cet article.
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Service ORL, Hôpital Robert-Debré, 48, boulevard Sérurier, 75019 Paris, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : François M. Corps étrangers des fosses nasales, rhinolithiase. EMC - Oto-rhino-laryngologie 2016;11(3):1-6
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Optiques droites pour l'examen des fosses nasales.
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