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Lecture linéaire Baudelaire,

« Le Joujou du pauvre »
[texte bac n°3]

Introduction
Europe XIXe s. = forte industrialisation qui → à une urbanisation marquée.
Naissance ville moderne = thème privilégié pour les poètes. Dans son recueil Le Spleen
de Paris, publié en 1869, poète précurseur du symbolisme Charles Baudelaire accorde
gde place à la ville et propose nouvelle forme : le poème en prose. « Le Joujou du
pauvre » montre ainsi deux enfants, l'un pauvre, l'autre riche, fasciné par un même jouet
vivant : un rat capturé par les parents pauvres pour divertir leur enfant. Par le biais de
cette scène surprenante, le poète donne à voir les injustices du monde moderne et
rappelle finalement le rôle de la poésie.
Comment Baudelaire dénonce-t-il les inégalités ?

Mouvements du poème
Strophes 1 et 2 : intentions du poète et début de l'apologue
Strophe 3, 4 et 5 : le domaine de l'enfant riche
Strophe 6 : le domaine de l'enfant pauvre
Strophe 7 : chute de l'histoire
Strophe 8 : morale de l'apologue

Strophes 1 et 2
♥ Début de l'apologue : le poète énonce ses intentions. C'est le « je » du locuteur, du
poète qui s'exprime Il s'annonce puis s'efface de façon à donner l'illusion d'objectivité
(cf. l. 25 « œil impartial »). De la même façon, il fait exister le lecteur en disant
« vous » l. 8-13, ce qui permet de l'impliquer.
♥ Antithèse « divertissement innocent » l. 1 / « plaisirs coupables » l. 2 → ironie de
Baudelaire → culpabilisation lecteur.
♥ Vocabulaire urbain : « grandes routes » l. 3-4, « le long des cabarets » l. 7.
Baudelaire est un poète de la ville.
♥ Enumération de jouets peu onéreux « polichinelle plat mû par un seul fil »,
« forgerons qui battent l'enclume », « cavalier et son cheval » l. 5-6. Ce sont des jouets
dérisoires qui pourtant émerveillent les enfants pauvres : l. 8, « vous verrez leurs yeux
s'agrandir démesurément » , « bonheur » l. 10. Approfondissement écart entre coût
dérisoire jouet et bonheur enfants. Le lecteur a pitié → registre pathétique, renforcé par
l'hyperbole « démesurément ».
♥ L. 8-13 « … et ils s'enfuiront comme font les chats qui vont manger... » : mise en
relief sauvagerie enfant pauvre qui est assimilé à un animal + comparaison justifiée
puisque l'enfant pauvre joue avec un rat comme les chats avec les souris.
Strophe 3, 4 et 5
♥ Domaine de l'enfant riche, opposition « derrière la grille » l. 13 et « de l'autre côté
de la grille » l. 23 : dénonciation des inégalités + métaphore cf. « à travers ces barreaux
symboliques » l. 28. Barreaux symbole de la différence richesse / pauvreté.
♥ Champ lexical de la richesse et de la beauté pour l'enfant riche : « vaste jardin »,
« blancheur d'un joli château », « enfant beau et frais », « si pleins de coquetterie » l.
13-25 → description méliorative.
♥ Même champ lexical richesse dans la strophe 4 : « luxe », « insouciance »,
« richesse » l. 16, « jolis » l. 17, qui s'oppose dans la même strophe à « les enfants de la
médiocrité ou de la pauvreté » l. 17-18 → dénonciation des inégalités sociales et
rapprochement des deux classes sociales pour mieux souligner leur antagonisme.
♥ Strophe 5 : description jouet (une sorte de pantin, une poupée?) énumération
méliorative, le jouet incarne la richesse : « joujou splendide, aussi frais que son maître,
verni, doré, vêtu d'une robe pourpre, et couvert de plumets et de verroteries » (l. 19-21).
«Analyser « pourpre » symbole de richesse (à l'Antiquité, teinture chère signe de
pouvoir obtenue à partir de coquillages). Le jouet est à l'image de l'enfant. Derrière les
termes mélioratifs, impression de mort : le jouet « gisait » sur l'herbe. Le verbe
« gésir » signifie « être étendu » mais il est surtout utilisé pour parler des morts, dans
l'expression « ci-gît untel ». En outre le jouet abandonné, mort, s'oppose au jouet de
l'enfant pauvre, qui est vivant, comme on le voit l. 31-32 « c'était un rat vivant ! ». De
plus, le jouet semble être en « toc » et un peu vulgaire : il est « doré », couvert de
plumes, et les « verroteries » ne sont pas des pierres précieuses.
Strophe 6
♥ Cette strophe s'oppose à la strophe 3 en tous points. « Chardons et les orties » l. 26
sont des mauvaises herbes (qui piquent, de plus) s'opposent à « vaste jardin » l. 14. « un
autre enfant, sale, chétif, fuligineux » l. 24 s'oppose à « un enfant beau et frais » l. 16.
L'énumération « sale, chétif, fuligineux » sur un rythme ternaire met en valeur la
pauvreté de l'enfant → Dénonciation des inégalités sociales. Le champ lexical de la
misère invite le lecteur à prendre l'enfant pauvre en pitié → registre pathétique, d'autant
plus que l'enfant est un « marmot-paria », c'est-à-dire un être exclu de la société.
♥ L'image « dont un œil impartial découvrirait la beauté, si, comme l'oeil du
connaisseur devine la peinture idéale sous un vernis de carrossier, il le nettoyait de la
répugnante patine de la misère » l. 24-27 met en relief le rôle du poète (« l'oeil
impartial ») et de la poésie : celui de découvrir la beauté caché sous les apparences. On
a là une sorte de définition du symbolisme, qui rompt avec les certitudes matérialistes
pour déchiffrer les mystères du monde. La formule est mise en valeur par le présent de
vérité générale (« devine ») qui permettent la généralisation.
Strophe 7
♥ L'expression « à travers ces barreaux symboliques » l. 28 met en évidence
l'argumentation de Baudelaire et amène à la chute du poème : la découverte du rat. On a
évidemment une opposition entre la nature du jouet et l'attitude de l'enfant riche avec
« que celui-ci examinait avidement, comme un objet rare et inconnu » l. 29-30. La chute
est mise en valeur par l'énumération des verbes « agaçait, agitait et secouait » l. 31.
♥ On peut considérer la dernière phrase comme la morale d'un apologue. Les jouets
incarnent les différences qui opposent les deux enfants mais ils sont unis par une même
fascination pour le rat. Ce lien est mis en relief par le champ lexical de l'égalité et par
l'utilisation pronominale du verbe « rire » dans « se riaient l'un à l'autre » l. 34, par
l'adverbe « fraternellement » (l. 34) et par l'emploi en italique de l'adjectif « égale » l.
35. Selon Baudelaire, et c'est là la morale de l'histoire, l'enfance est un monde idéal où
les inégalités sont dépassées avec simplicité et innocence. La poésie en général est donc
un moyen de voir au-delà de la réalité et de dépasser les inégalités. Le poème est
autotélique (me demander d'expliquer ça en classe).

Conclusion
« Le joujou du pauvre » s'appuie sur de nombreux contrastes qui insistent sur l'idée
d'un monde séparé par les inégalités sociales. Toutefois, l'innocence des enfants et le
regard du poète permettent de dépasser ces différences. Le construction en apologue du
poème offre à Baudelaire l'occasion et de souligner la beauté et la fraternité qui unissent
tous les êtres, particulièrement les enfants.

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