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La Fondation pour la Recherche Médicale


sur le front des pandémies

Les mécanismes de l’émergence des


maladies infectieuses
et la coévolution hôte pathogène

Mercredi 23 septembre 2009

Dossier de presse

Contacts Presse :

Fondation pour la Recherche Médicale : Valérie RIEDINGER


Tél : 01 44 39 75 57 – valerie.riedinger@frm.org

Agence Wellcom : Camille PIGER & Yoann MOISAN


Tél : 01 46 34 60 60 – cpi@wellcom.fr – ym@wellcom.fr

Dossier de presse FRM – Maladies infectieuses 1


Sommaire

I – Les maladies infectieuses et le passage des barrières d’espèces aujourd’hui p. 3

A – Les maladies infectieuses

B – La problématique du passage des barrières d’espèces

C – Les défis de la recherche

D – Les axes à développer

II – Zoom sur le virus de la grippe A (H1N1) p. 7

Rencontre avec le Pr Antoine FLAHAULT,


Directeur de l’École des Hautes Etudes en Santé Publique (EHESP)

III – Le programme de la FRM p. 9

A – Présentation de l’appel à projets

B – Les partis pris de l’appel à projets

3 questions à… :
 Dr Laurent ABEL, responsable de l’unité de Génétique humaine des maladies
infectieuses (Inserm U550), au sein de la Faculté de Médecine de Necker à Paris
(Université Paris Descartes)
 Pr Xavier NASSIF, responsable de l’unité de Pathogénie des infections systémiques
(Inserm U570), au sein de la Faculté de Médecine de Necker à Paris (Université Paris
Descartes)

C – Le financement des meilleurs chercheurs

D – Premier bilan de l’appel à projets

Annexes p. 13

Lexique

Texte de l’appel à projets

Fiche de présentation de la FRM

Dossier de presse FRM – Maladies infectieuses 2


Fidèle à sa volonté d’être un « aiguillon » de la recherche, la Fondation pour la Recherche
Médicale (FRM) a initié le programme « Pionniers de la recherche » qui vise à anticiper les
besoins de la médecine de demain, à favoriser l’innovation et la pluridisciplinarité au
service de recherches particulièrement porteuses d’avenir. Dans ce cadre, elle a lancé en
2009 un premier appel à projets sur le thème des « Mécanismes de l’émergence des
maladies infectieuses et coévolution hôte-pathogène ».

I – Les maladies infectieuses et le passage des barrières d’espèces aujourd’hui

A – Les maladies infectieuses

Ce sont des maladies provoquées par l’infection de l’organisme par un microorganisme (virus,
bactérie, parasite, champignon/levure - voir lexique en annexe).

Voici quelques exemples de maladies infectieuses :


- maladies virales (hépatites, grippe, Sida, rage, poliomyélite, fièvres hémorragiques…),
- maladies bactériennes (tuberculose, coqueluche, méningites, choléra…),
- maladies parasitaires (paludisme, maladie de Chagas, leishmanioses…),
- mycoses (candidoses, aspergillose, cryptococcoses…).

L’émergence des maladies infectieuses doit aujourd’hui être considérée à l’échelle planétaire. Le
Sida, qui se transmet par voie sexuelle, ou la grippe qui se transmet par voie aérienne, sont
présents partout dans le monde malgré des modes de transmission différents.
Même si des pathologies infectieuses ont disparu dans certains pays, comme le paludisme en
France, de nouvelles émergent (Sida dans les années 1980, SRAS dans les années 2000...), et
d’anciennes persistent (listériose, salmonellose…).

Le mode de transmission des agents pathogènes étant très variable, et les infections plus ou
moins contagieuses, l’étude des maladies infectieuses est un domaine passionnant et complexe
de la santé publique.

o Un exemple de maladie infectieuse due à un virus :

• Le chikungunya est un virus transmis à l’homme par des moustiques. Cette infection n’est
donc pas contagieuse entre humains. Un vaccin est en cours d’élaboration par l’Inserm, il sera
probablement disponible d’ici à 2012. La maladie sévit, en épidémies, sur les continents africain
et asiatique, en particulier en Inde depuis 2007 (environ 2 millions de cas avérés et suspects à
ce jour), et dans l’océan Indien (en 2005-2006). Elle a récemment fait son apparition en Europe,
touchant environ 200 personnes en Italie en septembre 2007.

o Un exemple de maladie infectieuse due à une bactérie :

• La tuberculose est une maladie contagieuse due au bacille de Koch (Mycobacterium


tuberculosis). Elle se transmet entre hommes par voie aérienne. Elle tue près de 2 millions de
personnes chaque année dans le monde. L’épidémie de Sida et l’émergence de souches du
bacille résistantes aux antibiotiques aggravent l’impact de cette maladie, considérée comme
l’une des plus graves par l’Organisation Mondiale de la Santé.

L’OMS estime qu’entre 2000 et 2020, près d’un milliard de personnes seront nouvellement
infectées par la tuberculose. Parmi elles, 200 millions développeront la maladie, dont 35 millions
mourront si cette infection n’est pas mieux contrôlée.

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o Un exemple de maladie infectieuse due à un parasite :

• Le paludisme est dû à un parasite, le Plasmodium falciparum, transmis d’homme à homme par


l’intermédiaire d’un moustique : l’anophèle. Il n’y a pas de transmission interhumaine directe. Si
aucun vaccin n’est aujourd’hui disponible, des moyens existent pour s’en défendre
(antipaludéens et lutte contre les moustiques vecteurs du Plasmodium). Mais les parasites
développent des résistances aux médicaments et les moustiques des résistances aux
insecticides…
Selon les estimations de l’OMS, le paludisme tue un enfant toutes les 30 secondes en Afrique et
entre 1 et 3 millions de personnes par an. Près de 40 % de la population mondiale est exposée
et environ 500 millions de nouveaux cas surviennent chaque année.

L’étude des agents infectieux relève de nombreuses disciplines au rang desquelles :

• l’épidémiologie, qui permet l’étude de l’impact d’un agent infectieux sur une ou des
populations ;

• la microbiologie, humaine et vétérinaire, qui vise à identifier les microorganismes


responsables, leur circulation, leur résistance aux agents anti-infectieux, mais aussi à mieux
connaître la génétique, le métabolisme et les bases de la virulence de ces microorganismes
pathogènes ;

• la biologie cellulaire qui permet d’étudier le détail des interactions moléculaires entre
pathogènes et cellules de l’hôte. Les modèles in vitro se complètent de modèles in vivo, chez
l’animal, permettant d’analyser, au plus près de la réalité, le développement global du processus
infectieux ;

• l’immunologie, indissociable de la microbiologie, qui apporte les éléments fondamentaux des


paramètres de la réponse de l’hôte infecté à l’agent infectieux causal ;

• la génétique humaine et animale qui permet d’identifier les gènes « responsables » d’une
sensibilité particulière d’un individu à un agent infectieux. Voir lexique en annexe

B – La problématique du passage des barrières d’espèces

La plupart des infections émergentes proviennent du monde animal. L’actualité de ces derniers
mois concernant la grippe A (H1N1) pose à nouveau la question du passage des virus de
l’animal vers l’homme. C’était déjà le cas de la grippe aviaire A (H5N1) ces dernières années.

Le rappel des faits

• En 2004, la grippe aviaire a fait la une lorsqu’a été détectée la souche H5N1 du virus de la
grippe A chez des oiseaux sauvages et chez quelques hommes alors fortement malades. Ce
virus s’est révélé surtout transmissible entre volatiles, plus rarement à des mammifères (dont le
porc, réceptif aux virus grippaux aviaires et humains), encore plus difficilement à l’homme et non-
transmissible d’homme à homme. Cette épidémie a donc été facilement endiguée, mais ce virus
reste sous surveillance. En septembre 2008, l’OMS estimait à 245 le nombre de cas mortels dont
aucun dans les pays hautement industrialisés comme la France. Début 2009, ce virus restait actif
chez les oiseaux, essentiellement en Asie du Sud-Est. Le risque d’une pandémie existe donc
toujours.

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• Courant mars 2009, le virus H1N1 de la grippe A fait sa réapparition au Mexique sous une
forme génétique inédite chez l’homme. On a découvert qu’elle provenait d’élevages de porc (d’où
son nom initial de grippe porcine). La pandémie s’est alors poursuivie, sous haute surveillance
de l’OMS et des autorités sanitaires de chaque pays.

Un virus similaire fut responsable de la pandémie de grippe espagnole de 1918-1919, qui tua
environ trente millions de personnes. On ne sait pas ni comment ce virus est apparu ni pourquoi
il a disparu en 1919 pour réapparaître par la suite sous une forme beaucoup moins virulente : en
1977-1978, la souche H1N1 fut aussi responsable d’une pandémie à la mortalité relativement
faible.

Les besoins de la recherche dans ce domaine

Pour les raisons exposées ci-dessus, il est essentiel de comprendre les mécanismes de passage
des agents pathogènes entre espèces.
Les chercheurs ont besoin d’identifier génétiquement les virus pour savoir d’où ils proviennent,
d’étudier leurs mécanismes de transmission, de colonisation, de dissémination, et de
comprendre les raisons de leur plus ou moins grande virulence.

Le virus du SRAS (Syndrome respiratoire aigu sévère), apparu en Chine fin 2002, résume assez
bien les besoins et les manques en la matière. Ce virus a été détecté chez quelques espèces
animales dont la civette, un petit mammifère sauvage vendu sur les marchés et consommé au
sud de la Chine, mais son origine exacte reste encore mal connue et le rôle de la chauve-souris
comme « réservoir » principal du virus est maintenant sérieusement considéré. La transmission
du SRAS d’homme à homme a rapidement été identifiée : elle se fait par des gouttelettes de
salive contaminée. Le virus, lui, était inconnu au moment de son apparition, même si sa famille
(les coronavirus) l’était. Les coronavirus sont généralement à l’origine chez l’homme de rhumes
sans gravité.

Rappelons que le SRAS a éclaté au niveau mondial en 2003 avec plus de 8 000 cas et près de
800 morts. Mais l’épidémie a pu être endiguée grâce à des mesures d’isolement et de
quarantaine, et le coronavirus responsable a pu être rapidement identifié.

C – Les défis de la recherche

La recherche en microbiologie (voir lexique en annexe) et en immunologie (voir lexique en


annexe) est d’un bon niveau en France. Il existe une « tradition » dans ces disciplines, suite à
l’« école pasteurienne ».
Il y a donc de nombreux projets de recherche français en cours dans ce domaine, issus des
différents organismes, certains en collaboration avec des équipes étrangères, en particulier en
Europe et dans les pays en voie de développement.

Il existe bien entendu de nombreux défis à relever dans la lutte contre les maladies infectieuses.
Parmi eux, quatre axes de recherches prioritaires ont été retenus par la FRM pour faire l’objet de
son appel à projets :

1 – La sensibilité de l’hôte aux agents pathogènes et leur spécificité d’espèce

Comprendre pourquoi un individu réagit différemment des autres à un risque infectieux permet
d’améliorer la connaissance du fonctionnement de notre système immunitaire, mais aussi
d’envisager à terme une médecine personnalisée, afin d’anticiper une forme grave de la maladie
et d’administrer précocement un traitement optimisé.

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2 – Les bases moléculaires de l’interaction entre l’hôte et l’agent pathogène

Il s’agit ici d’approfondir les connaissances actuelles sur les phénomènes transitionnels des
infections. Le pneumocoque, par exemple, colonise les voies respiratoires d’environ 30 % de la
population en hiver mais très peu développent une infection générale grave : pneumonie,
septicémie, méningite. Qu’est-ce qui explique qu’en présence du même agent infectieux, certains
individus ne sont pas malades et que d’autres le soient ? Et que certains développent des
complications qui les conduisent à succomber à la maladie ? Telles sont les questions clés de
santé publique posées dans ce domaine de recherche.

3 – Les mécanismes évolutifs permettant le passage d’un agent pathogène entre


espèces

Comme nous l’expliquons plus haut, la plupart des infections émergentes proviennent du monde
animal. Pourtant, elles sont encore parfois mal connues et de nombreuses questions restent en
suspens :
- Pourquoi un virus va coloniser et envahir une espèce animale, mais est incapable d’être
transmis à l’homme ?
- Quels sont les éléments nécessaires pour qu’un virus dissémine efficacement d’homme à
homme ?
- Est-ce que les barrières entre espèces sont étanches ? Par exemple : est-ce que le virus de la
grippe doit transiter par le porc pour passer des volatiles à l’homme ?

4 – Le transfert d’information génétique entre microorganismes provenant


d’écosystèmes différents, aboutissant à l’émergence et à la résistance d’agents
pathogènes pour l’homme

Dans ce domaine, l’environnement s’entend au sens large. C’est un réservoir inépuisable de


gènes et d’éléments génétiques de transfert qui « alimente » constamment le processus
d’évolution des microbes qui nous colonisent voire nous infectent. L’intestin peut être considéré
comme un exemple d’environnement et les questions qui se posent aujourd’hui sont entre
autres :
- Comment la flore microbienne intestinale évolue-t-elle ?
- Comment co-évolue-t-elle avec l’homme qui est son hôte ?
- Comment cette coévolution influe l’identité génétique des microbes mais aussi celle de
l’homme ?

D – Les axes à développer

L’avancée des connaissances devrait donc permettre de :

• développer des outils diagnostiques plus fins ;

• disposer de vaccins mieux ciblés ;

• détecter les passages d’un agent pathogène d’une espèce à une autre, et pouvoir les
contrecarrer si nécessaire.

• comprendre pourquoi certains agents infectieux sont plus virulents que d’autres, ou
pourquoi ils subsistent plus ou moins longtemps dans l’environnement.

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II – Zoom sur le virus H1N1

Rencontre avec le Pr Antoine FLAHAULT, directeur de l’École des Hautes Etudes en Santé
Publique (EHESP), qui évoque pour nous l’actualité du virus de la grippe A (H1N1) dont
l’épidémie progresse de par le monde depuis son apparition au Mexique en avril dernier.

L’origine porcine du virus de la grippe A (H1N1) a été confirmée début juin. Comment se
transmet le virus de l’animal à l’homme ?

Antoine Flahault : Le virus de la grippe A (H1N1) serait en effet d’origine porcine et circulerait
depuis de très longs mois dans la population humaine et depuis des années chez le porc, selon
une étude1 publiée début juin dans la revue Nature. Cette étude confirme d’ailleurs un autre
article scientifique publié en mai dans Science2.

Nous pouvons déterminer les points communs entre les virus de grippe circulant chez le porc,
chez l’homme, chez les oiseaux, grâce aux analyses génétiques de ces virus. On sait par
exemple que le virus H1N1 est composé de huit éléments dont le plus ancien est un gène de
1918 et le plus récent date de 1998. Bien que certains de ces fragments de gènes soient
d’origine humaine ou aviaire, l’assemblage de ces huit fragments s’est fait chez le porc. H1N1
circule certainement depuis des années dans les élevages porcins et probablement depuis de
longs mois dans l’espèce humaine.
On pourra ensuite probablement, par des modélisations, reconstituer le circuit du virus et savoir
par quelles espèces il est « passé ».

Quels sont les besoins de la recherche aujourd’hui concernant l’étude de ce virus ?

A. F. : Les mécanismes précis qui font qu’un virus franchit parfois la barrière d’une espèce à une
autre, et parfois non, sont encore mal connus. C’est un point sur lequel la communauté
scientifique doit encore travailler. Ce que l’on sait est que les virus grippaux de type A circulent
de façon permanente chez différentes espèces animales et notamment les oiseaux mais aussi
les porcs ou les chevaux. Les oiseaux sont vraisemblablement l’hôte original des virus de la
grippe. Chez le porc, un virus modifié peut apparaître et se transmettre aux fermiers par voie
respiratoire. Après quelques mutations, le virus peut s’adapter ensuite à l’homme et se répandre.
C’est la raison pour laquelle on observe que les pandémies de grippe commencent souvent dans
des pays où la population vit en contact étroit avec les animaux. Cependant, on n’a jamais
observé jusqu’à présent de transmissions interhumaines avec d’autres sous-types de virus que
les sous-types H1, H2, ou H3. Les autres virus comme le H5N1 restent strictement aviaires et
leur passage à l’homme, rarissime mais possible, ne s’accompagne pas – jusqu’à présent – de
poursuite de la chaîne de transmission.

Ce virus de la grippe A est-il virulent ?

A. F. : Nous n’en savons encore pas assez aujourd’hui3. D’ailleurs, la virulence est probablement
la donnée la plus difficile à appréhender pour une maladie émergente, fut-elle aussi connue
qu’une grippe. Le taux de létalité, c’est-à-dire le nombre de décès rapporté au nombre total
d’infections par le virus est sans doute le meilleur des indicateurs de virulence. D’autant que l’on
a quelques références en la matière dans les pays développés, le taux est de l’ordre de 1 pour
1000 pour la grippe saisonnière, il était de 4 pour 1000 pour les grippes pandémiques de 1957 et
en 1968-69, et de “1 à 3%” pour la grippe espagnole de 1918-19.

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Les chiffres actuels suggèrent-ils que le virus H1N1 serait moins virulent que la grippe
saisonnière ?

Rien n’est moins sûr : le nombre de cas rapportés est très sous-évalué, même aux Etats-Unis ou
au Royaume Uni. Et puis, ici on parle de « cas », ailleurs on parle « d’infections », sans savoir
exactement la proportion de ces infections asymptomatiques qui ne deviennent jamais des cas.
Le nombre de décès est également difficile à estimer : il n’est connu que pour les décès
directement attribuables à la grippe. Or on sait que l’essentiel de la mortalité par grippe est
indirecte, par aggravation de maladies pré-existantes, et le plus souvent le lien avec la grippe
n’est pas fait, le décès se produisant souvent plusieurs semaines après l’épisode infectieux. Qui
plus est, la surmortalité n’est remarquée que tardivement lorsque l’on a connaissance des
statistiques de mortalité dans le pays concerné
La seule chose que l’on peut dire avec certitude, c’est que jamais une épidémie ne balaie un
large segment d’une population sans laisser de profondes traces en termes de mortalité.

1. Gavin J.D.Smith et al. Origins and evolutionary genomics of the 2009 swine-origin H1N1
influenza A epidemic. Nature. 2009 Jun 25; 459(7250): 1122-5.
2. Garten RJ. Antigenic and genetic characteristics of swine-origin 2009 A (H1N1) influenza
viruses circulating in humans. Science. 2009 Jul 10; 325(5937): 197-201.
3. Ce texte a été validé le 17 août 2009.

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III – Le programme de la Fondation pour la Recherche Médicale

A – Présentation de l’appel à projets

Créé pour financer des recherches très en amont et encore peu représentées en France, le
programme « Pionniers de la recherche » de la Fondation pour la Recherche Médicale a pour
vocation d’encourager les approches multidisciplinaires pour mieux comprendre les grandes
problématiques de l’évolution du vivant et favoriser l’émergence d’innovations thérapeutiques.

Le programme intitulé « Mécanismes de l’émergence des maladies infectieuses et coévolution


hôte-pathogène » est un des programmes « Pionniers » que la Fondation pour la Recherche
Médicale a lancé en 2009.

L’émergence de nouvelles maladies infectieuses est une menace pour l’homme qui doit être
anticipée. Cet appel à projets a donc pour objectif de mieux comprendre les mécanismes
biologiques qui conduisent à l’apparition de nouvelles maladies chez l’homme ou chez les
animaux et potentiellement transmissibles à l’homme. La finalité est de disposer des armes qui
permettront de contrôler les épidémies.

B – Les partis pris de l’appel à projets

L’objectif de l’appel à projets de la Fondation pour la Recherche Médicale « Mécanismes de


l’émergence des maladies infectieuses et coévolution hôte-pathogène » est de soutenir des
équipes françaises de renommée internationale dans ce domaine et impliquées dans des projets
de recherche fondamentale à visée thérapeutique.

En effet, toutes les avancées dans ce domaine suggèrent d’énormes potentialités mais aussi de
grandes difficultés qui font :
• qu’on connaît mal les mécanismes génétiques, moléculaires et immunologiques qui expliquent
l’évolution d’un agent pathogène puis son passage à une autre espèce (en particulier l’homme) ;
• qu’il reste encore de nombreux gènes et polymorphismes génétiques à identifier, impliquant
une plus grande sensibilité de certains individus aux bactéries, aux virus, aux parasites… ;
• qu’il y a toujours des travaux à poursuivre et approfondir en fonction de l’évolution des
technologies de biologie moléculaire et d’analyse génétique.

Il paraît donc essentiel de soutenir les recherches sur ces mécanismes génétiques, moléculaires
et immunologiques pour :
• imaginer des stratégies de prévention adaptées à chaque agent infectieux ;
• développer de nouveaux traitements eux aussi plus adaptés, comme des nouveaux vaccins ;
• disposer de modèles expliquant mieux le passage d’un agent pathogène d’une espèce à une
autre, pour éviter les pandémies ou mieux les anticiper.

Voir en annexe le texte de l’appel à projets de la FRM et ses axes prioritaires ( p. 15)

Dossier de presse FRM – Maladies infectieuses 9


Trois questions au :
Dr Laurent ABEL, responsable de l’unité de génétique humaine des maladies infectieuses
(Inserm U550), au sein de la Faculté de médecine de Necker à Paris (Université Paris-
Descartes).

Pourquoi la recherche s’intéresse-t-elle à la susceptibilité génétique des individus aux


maladies infectieuses ?

Laurent Abel : Parce que nous ne sommes pas tous égaux devant les agents infectieux. Par
exemple, certains d’entre nous tombent malades, plus ou moins intensément, face à un même
virus. D’autres non. Bien sûr, une part de cette variabilité est due à l’agent infectieux lui-même :
la quantité de virus, de bactéries, de parasites à laquelle on est exposé, ou encore une forme
plus ou moins virulente de cet agent… Mais ceci explique assez peu la variabilité pour des
maladies fortement endémiques comme la tuberculose ou le paludisme. En effet, ces infections
se développent toujours dans les mêmes pays et, pourtant, parmi les populations des pays en
voie de développement, tout le monde ne subit pas de la même façon les infections. Il y a donc
sûrement un facteur lié à la constitution même de l’individu. Or, nous savons que la réponse
immunitaire est souvent liée au bon fonctionnement de protéines comme les cytokines (protéines
qui permettent aux cellules du système immunitaire - macrophages, lymphocytes… - de
communiquer entre elles), ou encore les récepteurs de surface de nos cellules, etc. Ces
protéines étant « codées » par des gènes, le dysfonctionnement d’un ou plusieurs gènes peut
entraîner une déficience pour certaines de ces protéines. L’idée est donc que nous pouvons tous
avoir, plus ou moins, une prédisposition génétique vis-à-vis de certains agents infectieux et qu’il
est intéressant de comprendre cette variabilité génétique face aux infections.

Quels sont les défis de la recherche dans ce domaine ?

L. A. : Il y a eu des progrès considérables en matière de génomique : on peut désormais


rechercher et identifier les variations génétiques chez un individu.
Il existe un spectre continu de maladies infectieuses des plus rares aux plus communes. Les
plus rares et souvent les plus sévères (encéphalite herpétique, par exemple) peuvent s’expliquer
par une prédisposition dite « mendélienne » ou monogénique : c’est une mutation rare sur un
gène qui provoque une perte de fonction souvent complète de la protéine codée. Les maladies
les plus courantes (tuberculose pulmonaire, par exemple) sont probablement plus complexes
génétiquement : ce sont des variations génétiques plus fréquentes (on parle alors de
polymorphismes) qui peuvent entraîner des anomalies beaucoup plus subtiles au niveau de la
fonction de la protéine. Il reste beaucoup à faire pour ces maladies fréquentes, comme par
exemple rechercher l’ensemble des polymorphismes impliqués c’est-à-dire les différents gènes
ayant un rôle dans la réponse immunitaire.

Quels bénéfices concrets espère-t-on dans un futur proche ?

L. A. : L’idée serait de pouvoir compenser le défaut de réponse immunitaire, c’est-à-dire


restaurer la fonction manquante due à la protéine non fonctionnelle. Par exemple, certains
enfants font des infections graves au bacille de la tuberculose du fait de mutations rares de
certains gènes. Certains d’entre eux ont une mutation qui détruit les récepteurs à l’interféron
gamma : la seule façon de compenser ce dysfonctionnement est aujourd’hui une greffe de
moelle osseuse. D’autres enfants ont une mutation qui les empêche de produire l’interféron
gamma : ils doivent alors être traités par l’interféron gamma (qui existe comme médicament) en
plus du traitement antibiotique classique. La recherche sur la génétique de ces maladies permet
donc d’identifier les voies de réponses immunitaires impliquées puis d’envisager les traitements
correspondants. Si on raisonne en termes de vaccins, les recherches permettront de voir quel
est la réponse immunitaire qu’il faut stimuler.

Dossier de presse FRM – Maladies infectieuses 10


Trois questions au :
Pr Xavier NASSIF, responsable de l’unité de pathogénie des infections systémiques
(Inserm U570), au sein de la Faculté de médecine de Necker à Paris (Université Paris
Descartes).

Que permet de comprendre l’étude de l’interaction entre un pathogène et son hôte ?

Xavier Nassif : La compréhension des interactions entre hôtes et pathogènes est essentielle.
D’un point de vue de la recherche fondamentale, il est toujours intéressant de bien connaître des
mécanismes de ces interactions, notamment de savoir comment une bactérie devient virulente.
Ensuite, bien comprendre ces mécanismes permet de mieux agir en prévention comme en
traitement. Il s’agit par exemple de développer de meilleurs vaccins et des anti-infectieux
adaptés (antibiotiques, antiviral, antiparasitaire...).

Quels sont les défis de la recherche dans ce domaine ?

X. N. : Ces dernières années, la recherche a progressé concernant la connaissance des bases


moléculaires des interactions hôtes-pathogènes, du fait de techniques de plus en plus
performantes : techniques de séquençage des acides nucléiques, d’imagerie. L’idée est en
particulier de comprendre comment un organisme est colonisé par un agent pathogène, et
pourquoi certaines bactéries sont plus virulentes que d’autres. En cela, nos travaux sont très
complémentaires de l’approche sur la susceptibilité génétique des hôtes qui répond plutôt à la
question : pourquoi certains individus sont plus touchés que d’autres ? Dans mon équipe, par
exemple, nous tentons de comprendre pourquoi seules certaines souches de méningocoques
sont responsables d’infections. Nous nous concentrons sur l’analyse des phases de transition
entre la colonisation de l’agent pathogène et l’apparition de l’infection.

Quels bénéfices peut-on espérer dans un futur proche ?

X. N. : Nous avons d’ores et déjà mis en évidence qu’il existait un phage [un virus infectant les
bactéries, ndlr] plus volontiers associée à la dissémination de l’agent pathogène. Nous pouvons
désormais espérer comprendre pourquoi, lorsque les bactéries possèdent ce phage, elles sont
plus aptes à l’infection. Ou plus simplement : quelles sont les conséquences pour la bactérie ?
C’est un travail pluridisciplinaire qui fait intervenir notamment la génétique et la biologie
moléculaire.

C – Le financement des meilleurs chercheurs

Le Comité de Pilotage de l’appel à projets de la Fondation pour la Recherche Médicale


« Mécanismes de l’émergence des maladies infectieuses et coévolution hôte-pathogène » est
présidé par le Pr Philippe Sansonetti, membre de l’Académie des sciences, professeur au
Collège de France et directeur de l’unité de Pathogénie microbienne moléculaire, Institut
Pasteur-Inserm, Paris.

La sélection est réalisée en deux phases :

• 9 juillet 2009 : présélection par le Comité de Pilotage à partir d’une lettre d’intention ;

• Décembre 2009 : sélection finale sur la base de l’examen d’un dossier complet par deux
experts étrangers et d’une audition par le Comité de Pilotage.

Cet appel à projets, qui est donc très sélectif, devrait permettre de financer pendant trois ans
cinq à huit projets ambitieux et ciblés sur ce thème.

Dossier de presse FRM – Maladies infectieuses 11


Les financements pourront atteindre 300 000 euros par projet et pourront être attribués soit à une
seule équipe soit à plusieurs groupes de recherches travaillant en réseau. Ces financements
sont rendus possibles grâce aux dons, seules ressources de la Fondation pour la Recherche
Médicale.

Pour soutenir l’action de la FRM


La Fondation pour la Recherche Médicale agit en toute indépendance grâce au soutien régulier
de près de 450.000 donateurs. 1er partenaire caritatif de la recherche médicale publique
française, la FRM est la seule organisation à but non lucratif engagée dans tous les secteurs de
la recherche médicale. Elle finance, en moyenne chaque année, les travaux de près de 700
chercheurs et équipes de recherche.

Comment donner ?

Par internet : www.frm.org


Par courrier à la Fondation pour la Recherche Médicale :
54 rue de Varenne – 75007 Paris

Voir en annexe la présentation de la FRM

D – Premier bilan de l’appel à projets

Le 9 juillet dernier, la Fondation pour la Recherche Médicale a présélectionné 16 projets parmi


92 lettres d’intention recevables examinées, sur les 170 demandes reçues à l’origine. Les 16
projets sélectionnés sont d’un excellent niveau, les autres étaient soit des projets déjà trop
avancés, soit des projets d’un niveau inférieur, soit des projets sortant des quatre axes de l’appel
d’offres.

Les projets concernent surtout les trois premiers axes de l’appel à projets de la FRM
(susceptibilité génétique, passages des barrières d’espèces, etc.) et entrent parfaitement dans le
cadre de travaux pluridisciplinaires. La FRM essaie justement, par le biais de son programme
« Pionniers de la recherche » de soutenir et favoriser cette démarche d’avenir : les interfaces
entre disciplines.

Toutes les institutions françaises sont représentées : Institut Pasteur, Inra, Cnrs, Inserm,
Université de Strasbourg, Hôpital Necker, etc.

Le 20 septembre, les dossiers complets de ces 16 projets seront réceptionnés et examinés à


nouveau par le comité permanent et deux experts internationaux. Au final, 5 à 8 projets seront
retenus fin décembre.

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ANNEXES

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Lexique

Bactérie : organisme vivant unicellulaire de quelques millièmes de millimètres de long, sans


noyau. Il présente différentes formes : sphérique (coques), allongée ou en bâtonnet (bacilles), et
parfois spiralée. La plupart des bactéries sont inoffensives voire bénéfiques pour l’organisme. Il
en existe cependant des pathogènes à l’origine de maladies infectieuses comme le choléra, la
syphilis, la peste, la tuberculose…

Biologie cellulaire : étude des cellules et des processus vitaux qui s’y déroulent (reproduction,
métabolisme…).

Épidémiologie : étude des facteurs influant sur la santé et les maladies des populations
humaines (répartition, fréquence, gravité…).

Génétique : étude des gènes, caractères héréditaires spécifiques d’un individu, d’une espèce…

Immunologie : étude du système immunitaire.

Microbiologie : étude des micro-organismes vivants (bactéries, parasites, champignons,


levures).

Parasite : organisme unicellulaire ou pluricellulaire qui vient aux dépens de l’organisme qu’il
infecte, et entraîne une parasitose. En France, un des parasites les plus fréquents est le taenia,
ou « ver solitaire », qui s’installe dans le tube digestif.

Virologie : étude des virus.

Virus : entité biologique qui nécessite une cellule hôte pour croître et se multiplier. Un virus n’est
pas vivant, et n’est donc pas considéré comme un microorganisme au sens strict, mais il se
reproduit en détournant la machinerie cellulaire de l’organisme qu’il colonise. Les virus
provoquent des maladies comme la grippe, la SRAS, le Sida…

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La Fondation pour la Recherche Médicale
er
est le 1 soutien caritatif de la recherche médicale française
Fondée en 1947 par de grands noms de la recherche et de la médecine dont le Pr Jean
Bernard, la Fondation pour la Recherche Médicale (FRM) a pour mission de développer la
recherche dans toutes les disciplines médicales, au profit de tous.
Reconnue d’utilité publique depuis 1965, la FRM s'appuie sur la générosité de 450 000
donateurs réguliers qui par leurs dons et legs lui permettent d’agir en toute indépendance
et de développer des programmes ambitieux.

Un « aiguillon » de la recherche en France

• La Fondation pour la Recherche Médicale est le seul organisme à but non lucratif à intervenir
dans tous les domaines de la recherche médicale.
• Elle finance les meilleurs chercheurs, porteurs de programmes de recherche
conceptuellement innovants.
• Elle encourage le développement de recherches dans des secteurs délaissés ou
correspondant à de nouvelles priorités de santé publique.
• Elle apporte une aide importante aux projets de recherche qui impliquent de jeunes
chercheurs, œuvrant ainsi pour la pérennité de la recherche médicale en France et la qualité
de notre santé demain.
La Fondation pour la Recherche Médicale finance, en moyenne chaque année, les projets de
près de 700 chercheurs et équipes de recherche. En 2009, elle engagera 28 millions d’euros en
faveur de la recherche publique française.

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Trois grandes programmations

• Le programme « Espoirs de la recherche » : reconduit chaque année, ce programme


rassemble tous les appels à projets pluridisciplinaires, à travers lesquels la Fondation soutient
des projets de recherches en biologie, porteurs d’espoir de progrès dans le domaine de la santé.

• Le programme « Urgences de la recherche » apporte un coup d’élan dans des secteurs jugés
déficitaires ou dans des domaines identifiés comme prioritaires en termes de recherche et/ou de
santé publique.

• Le programme « Pionniers de la recherche » : finançant des recherches très en amont et


encore peu représentées en France, ce programme a pour vocation d’encourager les approches
multidisciplinaires pour mieux comprendre les grandes problématiques de l’évolution du vivant et
favoriser l’émergence d’innovations thérapeutiques.

Des procédures de sélection qui garantissent l’Excellence

Les fonds recueillis par la Fondation pour la Recherche Médicale sont attribués par son Conseil
scientifique composé de 32 chercheurs de haut niveau, représentant toutes les disciplines
médicales et scientifiques. Ses critères de sélection se fondent sur l’excellence des projets, les
espoirs de progrès médical dont ils sont porteurs et sur la qualité scientifique des chercheurs
impliqués.

La volonté d’une totale transparence sur l’utilisation des fonds

La Fondation pour la Recherche Médicale obéit à des procédures et contrôles qui permettent à
ses partenaires et donateurs d’être parfaitement informés de l’utilisation de leurs dons.

• Le contrôle d’un commissaire aux comptes


• L’envoi de ses comptes à l’ensemble de ses donateurs et partenaires
• La mise à disposition de son rapport d’activité sur son site Internet : www.frm.org
• Une « traçabilité » de l’orientation des dons : tout donateur ayant demandé une orientation de
son don sur un domaine de recherche spécifique peut savoir très exactement à quelle équipe
de recherche a été attribué son don.

Pour plus d’informations : www.frm.org


54 rue de Varenne – 75007 Paris

Relations Presse :
Fondation pour la Recherche Médicale Agence Wellcom
Valérie RIEDINGER Camille PIGER & Yoann MOISAN
Tél : 01 44 39 75 57 Tél : 01 46 34 60 60
valerie.riedinger@frm.org cpi@wellcom.fr & ym@wellcom.fr

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