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MISE AU POINT

Diabète de type 2 : l’essentiel


Un adulte sur 11 en Europe est concerné !
Par Ninon Foussard, Kamel Mohammedi
Service de diabétologie, hôpital Haut-Lévêque, CHU de Bordeaux, Pessac
ninonfoussard@yahoo.fr
kamel.mohammedi@chu-bordeaux.fr

L
e diabète de type 2 (DT2) se définit de personnes ayant un DT2 a été évalué libre glycémique représentent donc des
par une hyperglycémie (≥ 1,26 g/L) entre 4 et 4,5 millions en 2020 en France, enjeux considérables de santé publique.
chronique. Il est secondaire à une et à 1 adulte sur 11 en Europe en 2021,
insulinorésistance et à un hyperin- avec une augmentation générale estimée
sulinisme réactionnel évoluant vers à 13 % d’ici à 2045.1
FACTEURS DE RISQUE : QUI DÉPISTER ?
une insulinopénie relative (sécrétion Le dépistage est réalisé systématique-
insuffisante d’insuline par rapport à la COMPLICATIONS MÉTABOLIQUES ment chez les sujets ayant au moins un
glycémie). Avec une prévalence en aug- ET VASCULAIRES facteur de risque de DT2, notamment :
mentation et un risque de complications Le DT2 est responsable de complications âge > 40 ans, indice de masse corporelle
multiples, cette maladie fréquente est un métaboliques aiguës et vasculaires chro- (IMC) > 25 kg/m², répartition androïde du
problème majeur de santé publique. niques. L’hyperglycémie chronique est tissu adipeux, syndrome métabolique,
associée à une augmentation du risque antécédent familial au premier degré de
de morbidités cardiovasculaire et non DT2, syndrome des ovaires polykys-
QUELS ENJEUX ÉPIDÉMIOLOGIQUES ? cardiovasculaire, responsable d’une tiques, antécédent personnel de diabète
PRÉVALENCE EN HAUSSE mortalité précoce plus élevée que dans gestationnel ou d’enfant avec macroso-
Le DT2 représente plus de 90 % des la population générale. mie fœtale. Certaines origines ethniques
formes de diabète, et sa prévalence est En effet, le diabète est la première cause ont un risque élevé (Afrique, DROM-
en nette hausse. Le vieillissement de la d’insuffisance rénale terminale, de céci- COM, Asie…) [fig. 1].
population, les modifications du mode té avant l’âge de 55 ans (rétinopathie)
de vie et la progression endémique de et d’amputation de membre inférieur.
l’obésité, notamment, sont en cause Il multiplie par 2 le risque d’avoir un in- POSER LE DIAGNOSTIC
dans cette tendance. Il est classiquement farctus du myocarde, un accident vascu- Le dosage de la glycémie permet de diag­
diagnostiqué chez les sujets de plus laire cérébral ou une artériopathie obli- nostiquer un diabète :
de 40 ans, à un âge moyen de 65 ans. térante des membres inférieurs (AOMI).3 – glycémie à jeun ≥ 1,26 g/L vérifiée une
Si sa fréquence augmente avec l’âge, sa Un patient diabétique sur 3 est hospita- seconde fois (même en l’absence de symp-
prévalence est aussi en hausse chez les lisé au moins une fois par an.4 Le diabète tômes) ;
sujets jeunes.1 est une cause majeure de handicap et – glycémie ≥ 2 g/L quel que soit le moment
En France, la prévalence du diabète trai- d’altération de la qualité de vie, avec un de la journée, en présence de signes cardi-
té pharmacologiquement était estimée à retentissement sociétal et médico-éco- naux (syndrome polyuropolydipsique,
4,6 % en 2012 et à 5,3 % en 2020, soit nomique majeur. En Europe, en 2021, asthénie, amaigrissement) ;
3,5 millions de personnes (d’après Santé son coût a été évalué à 189 000 millions – glycémie ≥ 2 g/L deux heures après une
publique France). Par ailleurs, 2 % de la de dollars par la Fédération internatio- charge orale de 75 g de glucides (épreuve
population souffrirait d’un diabète non nale du diabète, et il y aurait été respon- d’hyperglycémie provoquée par voie orale
dépisté, soit 500 000 à 900 000 Français.2 sable – la même année – de 1,1 million [HGPO] réservée au dépistage du diabète
Ce retard diagnostique s’explique par de décès.1 gestationnel en pratique courante).
une évolution longtemps asymptoma- Le diagnostiquer précocement et per- En cas de glycémie normale, il est raisonnable
tique de la maladie. Au total, le nombre mettre aux patients d’atteindre un équi- de répéter le dépistage tous les trois ans.5

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TABLEAU. CARACTÉRISTIQUES DES TRAITEMENTS PHARMACOLOGIQUES DU DIABÈTE DE TYPE 2
Classe
Molécules Posologie Hypoglycémie Avantages Effets secondaires Contre-indications
thérapeutique
Biguanides Metformine 500 mg/j, puis palier Non Voie orale Diarrhées, carence en B12 Insuffisances rénale,
de 500 mg jusqu’à Coût faible hépatocellulaire,
1 000 mg  3/j max respiratoire, cardiaque
(palier 7 j) sévères
Sulfamides et Glibenclamide 5 mg  3/j max Oui Voie orale Hypoglycémies, prise de Insuffisance rénale
glinides Gliclazide 60 mg  2/j max Coût faible poids (sauf glinides) et
hépatocellulaire,
Glimépiride ; 1 à 6 mg  1/j ;
déconseillé si insuline
Répaglinide 4 mg  3/j max
rapide
Inhibiteurs de la DPP-4 Sitagliptine 100 mg/j max Non Voie orale Risque d’insuffisance Insuffisances rénale
Saxagliptine 5 mg/j max Bonne tolérance cardiaque pour la terminale et
saxagliptine hépatocellulaire
Vildagliptine 50 mg  2/j max
Analogues du GLP-1 Exénatide 5 μg  2/j pendant 1 mois Non Perte de poids, Nausées, vomissements, Insuffisance rénale
puis 10 μg  2/j protection diarrhées, pancréatite chronique
Exénatide lp 2 mg  1/semaine cardiovasculaire (DFG < 15 mL/min)
Liraglutide De 0,6 à 1,8 mg/j (palier 7 j)
Sémaglutide 0,25 à 1 mg/semaine
(palier 1 mois)
Dulaglutide 1,5 mg  1/semaine d’emblée
Inhibiteurs des SGLT2 Dapagliflozine 10 mg  1/j Non Cardioprotecteur, Infections et mycoses
Empagliflozine 10 mg  1/j, (max 25 mg) néphroprotec- urogénitales, acidocétose
teur, voie orale
Insuline Si lente : 0,2 UI/kg Oui Voie injectable, hypoglycé-
mies, prise de poids
DPP-4 : dipeptidylpeptidase-4 ; GLP-1 : glucagon-like peptide-1 ; DFG : débit de filtration glomérulaire ; SGLT2 : cotransporteur sodium-glucose 2.

CAS PARTICULIERS DU PRÉDIABÈTE diabète par des explorations complé-


PRISE EN CHARGE
Un diagnostic de prédiabète est retenu mentaires.
dans deux situations : Ainsi, en présence d’un amaigrissement ÉDUCATION THÉRAPEUTIQUE
– détection d’une hyperglycémie modérée franc, d’une altération de l’état général, Individualisée et systématique, l’éduca-
à jeun (entre 1,10 et 1,25 g/L) ; d’un antécédent ou de symptômes évo- tion thérapeutique inclut des conseils
– intolérance aux hydrates de carbone, quant une pathologie du pancréas ou un hygiénodiététiques (activité physique et
avec une glycémie en HGPO entre 1,4 et mésusage de l’alcool, la réalisation d’un alimentation) afin d’améliorer l’équilibre
2 g/L à deux heures. scanner, à la recherche d’un diabète se- glycémique, diminuer l’insulinorésis-
Chacune de ces deux situations augmen- condaire à une atteinte pancréatique, est tance et contrôler les facteurs de risque
terait le risque de développer un DT2 d’en- envisagée. cardiovasculaires.6 Une perte de poids,
viron 35 % (70 % si elles sont simultanées). Devant un amaigrissement, une acidocé- même modérée (5 %), apporte un bénéfice
Les modifications du mode de vie per- tose, un âge inférieur à 35 ans ou un IMC glycémique.
mettent de prévenir l’installation inférieur à 25 kg/m², la présence d’anti-
d’un DT2 chez ces sujets en état de pré­ corps anti-GAD (anti-acide glutamique ALIMENTATION NON RESTRICTIVE
diabète. décarboxylase), anti-IA2 (antiprotéine MAIS ÉQUILIBRÉE
tyrosine phosphatase) ou anti-ZnT8 Une évaluation diététique quantitative
QUEL TYPE DE DIABÈTE ? (anti­transporteurs du zinc 8) est en fa- et qualitative est réalisée afin d’adapter
En l’absence de tableau typique de DT2 veur d’un diabète de type 1 auto-immun. les repères de consommation à chaque
précédemment cité (âge adulte, histoire Enfin, en cas de découverte de diabète au patient (dimension économique,
familiale de DT2, surcharge pondérale…), cours d’une grossesse, un avis spécialisé contraintes psychosociales, comorbidités,
il convient d’éliminer un autre type de est indispensable. objectif pondéral, âge…).

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MISE AU POINT DIABÈTE DE TYPE 2 :
L’ESSENTIEL

Les repères nutritionnels donnés par pathie, rétinopathie, plaie de pied…).8 mides hypoglycémiants. Attention,
l’Agence nationale de sécurité sanitaire de Lorsqu’un patient présentant une compli- il n’est pas recommandé d’associer
l’alimentation, de l’environnement et du cation ou un facteur de risque cardiovas- deux médicaments de même mécanisme
travail (Anses) en 2016 et par Santé pu- culaire reprend une activité modérée ou d’action ;
blique France en 2019 orientent vers une intense, une vigilance accrue est néces- – les incrétines (recommandations de la
alimentation composée de trois repas par saire, notamment vis-à-vis du risque co- Société francophone du diabète [SFD]),
jour, non restrictive, avec 35-40 % des ap- ronarien. De plus, le patient doit être édu- sans risque d’hypoglycémie, sont
ports énergétiques totaux composés de qué à la gestion de l’hypoglycémie et à contre-indiquées en cas d’insuffisances
lipides, 10-20 % de protides (0,83 g/kg/j) et l’adaptation des doses en cas de traite- hépatique et rénale sévères ;
40-55 % de glucides, et un apport en fibres ment comportant ce risque. – les inhibiteurs des DPP-4 (dipeptidyl-
supérieur à 30 g/j. peptidase-4, iDPP-4) (recommandations
La consommation totale de sucres préco- TRAITEMENTS PHARMACOLOGIQUES : de la SFD) sont souvent bien tolérés et
nisée (fructose + saccharose), incluant les MONO-, BI- VOIRE TRITHÉRAPIE sans risque d’hypoglycémie. Ils peuvent
fruits, doit être inférieure à 100 g/j. Un traitement pharmacologique est in- être utilisés à des stades avancés d’insuf-
Il est conseillé de consommer plus de cinq troduit en cas d’hyperglycémie majeure fisance rénale avec une adaptation des
fruits et légumes par jour, des féculents à d’emblée ou si les modifications de mode doses variable d’une molécule à l’autre.
chaque repas (en privilégiant les céréales de vie ne suffisent pas (tableau).10 Ils sont neutres sur le plan cardiovascu-
complètes et les légumineuses), des pro­ laire, hormis la saxagliptine pour laquelle
téines animales (viande, poisson, œufs) Metformine en première intention ! une augmentation du risque d’hospitali-
1 ou 2 fois/j, des produits laitiers 2 fois par La metformine en monothérapie reste le sation pour insuffisance cardiaque a été
jour. Les boissons sucrées (dont jus de traitement de premier recours. Souvent observée ;
fruits, 1/j au maximum), la charcuterie bien tolérée, sans risque d’hypoglycémie – les analogues du GLP-1 (glucagon-like
(< 150 g/semaine), la viande rouge et très peu coûteuse, elle n’induit ni prise peptide-1, aGLP-1) injectables peuvent
(< 500 g/semaine), l’alcool, le sel (< 6 g/j) et ni perte pondérale. Elle doit être mainte- être prescrits jusqu’à un DFG de 15 mL/
les produits ultratransformés doivent être nue à tous les stades du DT2 même en cas min/1,73 m2. Ils favorisent la perte de
consommés avec modération.7 d’insulinothérapie (fig. 2). Elle doit être poids et n’entraînent pas d’hypoglycémie
L’American Diabetes Association (ADA) interrompue en cas d’intolérance diges- (sauf association aux sulfamides hypo­
conseille de préserver le plaisir de s’ali- tive ou en cas d’insuffisance d’organe glycémiants ou à une insulinothérapie).
menter en évitant les discours jugés mora- sévère : rénale (débit de filtration glomé- Ils réduisent le risque d’événements car-
lisateurs et en privilégiant des outils pra- rulaire [DFG] < 30 mL/min/1,73 m²), hépa- diovasculaires majeurs d’origine athéro­
tiques tels que : la moitié de l’assiette en tique, respiratoire ou cardiaque. scléreuse. Ils doivent être privilégiés si
légumes, un quart en protéines et un quart l’IMC est supérieur à 30 kg/m² et/ou en cas
en glucides.8 En deuxième intention, individualiser de haut risque cardiovasculaire. Ils sont
le traitement contre-indiqués en cas de maladie
ACTIVITÉ PHYSIQUE RÉGULIÈRE, En cas d’inefficacité, une deuxième, voire pancréatique. L’association iDPP-4-
MODÉRÉE, ADAPTÉE une troisième, molécule est associée aGLP-1 est déconseillée ;
Il est conseillé aux patients de réduire à la metformine, en fonction du profil du – les inhibiteurs du cotransporteur
la période quotidienne de sédentarité patient : sodium-glucose 2 (SGLT2), sans risque
(< 7 heures/j) : se lever toutes les 30 minutes – les sulfamides hypoglycémiants (re- d’hypoglycémie, ont un effet protecteur
et augmenter l’activité physique quoti- commandations de la Haute Autorité de cardiaque et rénal. Ils sont privilégiés en
dienne.8 Il est préconisé une activité modé- santé [HAS]) induisent un risque d’hypo- cas d’insuffisance cardiaque à fraction
rée de type marche ou cyclisme de plus de glycémie et de prise de poids modérée ; d’éjection du ventricule gauche réduite et
150 minutes par semaine en endurance non ils sont suspendus en cas de jeûne, de maladie rénale chronique. Leur effet
consécutive (répartie sur plusieurs jours), contre-indiqués en présence d’insuline antihyperglycémiant est limité si le DFG
permettant une baisse de l’HbA1C moyenne rapide, d’insuffisance rénale ou hépatique est inférieur à 45 mL/min. Leur prescrip-
de 0,7 %8, associée à deux séances par se- sévère. Seuls les glinides sont utilisables tion à visée cardioprotectrice est cepen-
maine de renforcement musculaire non en cas d’insuffisance rénale avec DFG dant autorisée pour la dapagliflozine
consécutives.9 compris entre 15 et 30 mL/min/1,73 m² ; jusqu’à un DFG de 25 mL/min, même chez
L’activité conseillée est adaptée indivi- – les glinides, de même classe que les sul- les patients non diabétiques. Le rembour-
duellement et prend en considération famides hypoglycémiants, ont une durée sement dans l’indication de néphropro-
les éventuelles complications (coronaro- d’action plus courte que celle des sulfa- tection est en cours d’évaluation ;

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POPULATION CIBLE DU DÉPISTAGE OPPORTUNISTE DU DIABÈTE DE TYPE 2

Homme ou femme âgé(e) de 45 ans et plus Femme âgée de 45 ans et plus

Référentiel
Facteurs de Origine non
État de
ATCD
risque de diabète caucasienne Sédentarité ATCD familial d’accouche-
pré-diabète ATCD
ou migrante et et/ou de diabète ment d’un en-
de type 2 (anomalie de diabète
ayant adopté surpoids (IMC (apparenté du fant de poids
(lien de causalité de la glyco- gestationnel
un mode de vie > 28 kg m2) 1er degré) de naissance
régulation)
démontré) occidental > 4 kg

Référentiel
ATCD d’ac-
Marqueurs de
couchement ATCD de
risque de diabète d’un enfant de
Tabagisme syndrome
de type 2 Précarité HTA Dyslipidémie faible poids
chronique des ovaires
(lien de causalité de naissance polykystiques
discuté) ou ATCD de
grossesse
avec retard
de croissance
intra-utérin

Référentiel
Examen biologique de dépistage

Glycémie veineuse après un jeûne de 8 heures (seuil d’anormalité > 1,26 g/L [7 mmol/L)

Examen biologique de confirmation

Second test de glycémie veineuse à jeun lorsque le test de dépistage a été fait par un prélèvement veineux

Rythme de répétition du dépistage


tous les 3 ans en cas de résultat négatif
entre 1 et 3 ans en cas de résultat négatif, pour les sujets ayant plusieurs facteurs et/ou marqueurs de risque de diabète
tous les ans pour les sujets ayant un prédiabète (glycémie à jeun comprise entre > 1,1 et < 1,26 g/L [>6 et < 7 mmol/L])

Figure 1. Dépistage du diabète de type 2 (HAS, 2014). IMC : indice de masse corporelle ; ATCD : antécédents ; HTA : hypertension artérielle.

– l’insuline, à risque d’hypoglycémie et seule (0,2 UI/kg/j, à titrer en fonction de systématique en l’absence de traitement
de prise de poids, peut être utilisée de ma- la glycémie du réveil), ou associée à une hypoglycémiant. Elle est néanmoins in-
nière temporaire ou définitive. En cas de insuline rapide avant les repas (fig. 2). dispensable pour l’adaptation des doses et
déséquilibre majeur avec signes d’insuli- la surveillance des hypoglycémies, en cas
nopénie (parfois dès le diagnostic), de d’utilisation des sulfamides hypoglycé-
grossesse chez une femme diabétique de
DES COMPLICATIONS NOMBREUSES miants, glinides et insuline.
NÉCESSITANT UN SUIVI STRICT
type 2, de pathologie intercurrente sévère Les objectifs thérapeutiques sont adaptés
ou de traitement insuffisant par antidia- SURVEILLANCE GLYCÉMIQUE à l’âge et à la fragilité du patient. Les re-
bétiques oraux, l’insulinothérapie doit Un bon équilibre glycémique permet de pères usuels, pour un patient nécessitant
être débutée, après avis du diabétologue. réduire le risque de complications (fig. 3). une HbA1C inférieure à 6,5 %, sont les sui-
Une insuline lente est alors prescrite, L’autosurveillance glycémique n’est pas vants :

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MISE AU POINT DIABÈTE DE TYPE 2 :
L’ESSENTIEL

– glycémie entre 0,8 et 1,2 g/L à jeun (ou L’équilibre glycémique est évalué tous les – inférieur à 8 % pour un diabète ancien ou
avant un repas) ; trois mois par dosage de l’HbA1c. Sa valeur associé à des complications et/ou comor-
– glycémie entre 1,2 et 1,60 g/L en post- cible est adaptée à chaque contexte : bidités sévères et évolutives avec un risque
prandial (2 heures après un repas). – inférieure à 6,5 % pour un diabète récent élevé d’hypoglycémie ;
du patient jeune, en l’absence de compli- – inférieur à 9 % pour un patient âgé,
L’adaptation thérapeutique se fonde sur cations ou en cas de grossesse ; polypathologique, dont l’espérance de vie
l’HbA1c, le nombre d’hypoglycémies, – inférieure à 7 % en cas de diabète non est limitée.
les effets indésirables et l’évolution des compliqué et sans comorbidité sévère (ou Un bilan biologique hépatique est réalisé
fonctions rénale, hépatique, respiratoire si les complications et/ou les comorbidités au moins une fois par an (dépistage d’une
et cardiaque. sont stables) ; hépatopathie dysmétabolique).

TRAITEMENT INITIAL PAR METFORMINE ET MESURES HYGIÉNO-DIÉTÉTIQUES

Situation commune Situations particulières : maladie rénale chronique,


Âge< 75 ; IMC < 35 kg/m2, absence de maladie insuffisance cardiaque ou maladie athéromateuse avérée
athéromateuse avérée, d’insuffisance
cardiaque et/ou de maladie rénale chronique
MET

MET
+
Si HbA1c > objectif individualisé Maladie rénale chronique Insuffisance cardiaque Maladie athéromateuse
avérée

ou ou ou
iSGLT2 AR GLP-1 iSGLT2 AR GLP-1 iSGLT2 AR GLP-1
MET

Quel que Si intolérance ou Quel que Si intolérance ou Quel que soit le taux d’HbA1c
+ soit le taux contre-indication soit le taux contre-indication
d’HbA1c aux iSGLT2 d’HbA1c aux iSGLT2
ou ou ou ET si HbA1c ET si HbA1c
iDPP- SU > objectif > objectif
iSGLT2 AR GLP-1
4 individualisé individualisé
Choisir une molécule ayant démontré un bénéfice cardiovasculaire et/ou rénal :
- pour les AR GLP-1/liraglutide, dulaglutide, albiglutide**, efpeglénatide** (niveau de preuve plus faible)
- pour les iSGLT2 : empagliflozine, dopagliflozine, canagliflozine**

* Dans l’attente de nouvelles données, les AR GLP-1 devront être utilisés avec précaution en cas
En particulier si IMC > 30 kg/m2 d’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection diminuée
** Molécule non commercialisée en France à ce jour
A B

Figure 2. Traitement du diabète de type 2 (SFD, 2021).


A. Stratégie thérapeutique si l’HbA1c est supérieure à l’objectif personnalisé malgré des modifications thérapeutiques du mode de vie et une monothérapie
par metformine à dose maximale tolérée chez un patient en situation « commune ».
B. Stratégie thérapeutique après modifications thérapeutiques du mode de vie et metformine à dose maximale tolérée chez un patient ayant une maladie
athéromateuse avérée et/ou une insuffisance cardiaque et/ou une maladie rénale chronique.
IMC : indice de masse corporelle ; MET : metformine ; HbA1c : hémoglobine glyquée ; iDPP-4 : inhibiteur du dipeptidylpeptidase-4 ; iSGLT2 : inhibiteur du
cotransporteur sodium-glucose 2 ; AR GLP-1 : agoniste du récepteur du glucagon-like peptide-1 ; SU : insuline.

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L’ESSENTIEL
La prévalence du DT2 est en Éducation thérapeutique, règles Un dépistage des complications
augmentation, notamment chez le sujet hygiénodiététiques systématiques, traitements dès le diagnostic, puis annuel,
jeune. Le dépistage ciblé systématique pharmacologiques individualisés et prise en est indispensable : rétinopathie,
ne doit pas être négligé car la maladie charge des facteurs de risque cardiovasculaires néphropathie, neuropathie et maladie
peut rester longtemps asymptomatique. favorisent la stabilité de la maladie. cardiovasculaire.

Référentiel Référentiel Référentiel Référentiel Référentiel Référentiel

Cardiovasculaire Neurologie Ophtalmologique Rénale Dentaire Podologique

Référentiel
Mal perforant
Objectif Parodonto­
Risque cardio- Neuropathie Neuropathie Rétinopathie Néphropathie plantaire, Risque
préventif pathie, chute
vasculaire global périphérique autonome diabétique diabétique ulcérations, podologique
de la des dents
amputation
surveillance

Malaises
Localisés
orthostatiques
Angor aux membres
Troubles Douleurs Douleurs
Claudication inférieurs :
Signes digestifs Altération de dentaires plantaires
intermittente paresthésies
fonctionnels Anomalies l’acuité visuelle Hémorragie Déficit
AIT douleurs
de la vidange gingivale sensoriel
Dyspnée troubles de
vésicale
la sensibilité
Impuissance

Localisés
Ischémie Décollement Déformation
aux membres Hypotension Microalbumi-
myocardique de rétine du pied
inférieurs : orthostatique nerie Cals, callosi-
silencieuse, IDM Micro­anévrismes Neuropathie
Signes abolition des AOMI Protéinurie Inflammation tés, cors
AOMI Hémorragies sensitive
cliniques réflexes ostéo-­ Allongement persistante gingivale Plaie cutanée
AVC rétiniennes AOMI
tendineux du segment QT Insuffisance Érythème
Insuffisance Exsudats liqui- Ulcération
troubles à l’ECG rénale Mycose
cardiaque diens cardiaque Amputation
sensitifs

ECG de repos Ratio


Palpation des Réflexes os- Tension albuminurie/ Examen
pouls périphé- téo-tendineux artérielle créatinurie visuel, à la Gradation
Examens riques Test au Palpation Fond d’œil Créatininémie recherche du risque
Auscultation monofilament des pouls Débit de d’une lésion podologique
cardiovasculaire Nylon ECG de repos filtration cutanée
et pulmonaire glomérulaire

Tous les 2 ans


À chaque
Rythme de (1 fois/an si À chaque
examen (ECG : Tous les 3-4 mois 1 fois/an 1 fois/an 1 fois/an
répétition diabète ou HTA examen
1 fois/an)
non équilibré)

Figure 3. Suivi du diabète de type 2 (HAS, 2014). AIT : accident ischémique transitoire ; AOMI : artériopathie oblitérante des membres inférieurs ;
AVC : accident vasculaire cérébral ; ECG : électrocardiogramme ; IDM : infarctus du myocarde ; HTA : hypertension artérielle.

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MISE AU POINT DIABÈTE DE TYPE 2 :
L’ESSENTIEL

DÉPISTAGE DES COMPLICATIONS tion cardiaque et carotidienne, palpation N. Foussard déclare avoir été invitée à
MICRO- ET MACROVASCULAIRES des pouls périphériques, recherche de des congrès par Lilly, Novo Nordisk, Sanofi
Les complications sont parfois présentes claudication intermittente, électrocar- Aventis, Sandoz et Servier. K. Mohammedi
dès le diagnostic : elles doivent être re- diogramme annuel. Le score calcique déclare avoir reçu, à titre personnel ou pour
cherchées sans attendre. coronarien, calculé sur une imagerie par des associations de recherche dont il est
Un fond d’œil (ou rétinographie) est scanner thoracique, est désormais membre, des soutiens financiers (sous
réalisé annuellement, pour dépister une conseillé pour stratifier le risque cardio- forme d’honoraires pour communication ou
rétinopathie diabétique. vasculaire.11 expertise, ou d’invitations à des congrès)
La néphropathie diabétique est recher- Le suivi est adapté au niveau de risque du de AstraZeneca, Boehringer Ingelheim, Novo
chée une fois par an par dosage de la créa- patient et à sa symptomatologie. Nordisk, Sanofi Aventis, Eli Lilly et Abbott.
tinine sanguine, calcul du DFG, dosage de Un bilan lipidique doit être réalisé au
l’excrétion urinaire d’albumine et dosage moins annuellement.
de la créatininurie sur échantillon, avec
calcul du rapport albumine/créatine uri- NE PAS OUBLIER LES PIEDS RÉFÉRENCES
naire (RAC). La découverte d’une albumi- ET LA BOUCHE ! 1. International Diabetes Federation. IDF Diabetes Atlas.
nurie pathologique (> 30 mg/24 heures L’examen minutieux des pieds recherche 10e édition. Bruxelles: International Diabetes Federation,
2021.
ou RAC > 30 mg/g ou 3 mg/mol) nécessite la l’apparition d’une plaie. La découverte
2. Lailler G, Piffaretti C, Fuentes S, et al. Prevalence of
confirmation par un deuxième pré­ d’une lésion impose une mise en décharge
prediabetes and undiagnosed type 2 diabetes in France:
lèvement six mois après le premier, en l’ab- jusqu’à cicatrisation. Results from the national survey ESTEBAN, 2014-2016.
sence d’infection urinaire, de menstrua- Les soins podologiques sont remboursés Diabetes Res Clin Pract 2020;165:108252.
tions ou de déséquilibre glycémique en fonction de la classification suivante : 3. Sarwar N, Gao P, Seshasai SR, et al. Diabetes mellitus,
majeur. Le recours au néphrologue est – grade 0 : absence de neuropathie, d’AOMI, fasting blood glucose concentration, and risk of vascular
disease: a collaborative meta-analysis of 102 prospective
conseillé en cas d’atteinte atypique (suspi- de déformation ; studies. Lancet 2010;375(9733):2215-22.
cion d’une autre cause que le diabète) ou de – grade 1 : neuropathie sensitive au mono- 4. Assogba FAG, Penfornis F, Detournay B, et al. Facteurs
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education reduces risk of all-cause mortality in type 2
Un dépistage de la maladie macrovas- Enfin, un suivi dentaire régulier est pré- diabetes patients: a systematic review and meta-analysis.
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9. Boulé NG, Haddad E, Kenny GP, et al. Effects of exer-
– Le diabète de type 2 est une maladie initialement asymptomatique mais responsable cise on glycemic control and body mass in type 2 diabetes
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• Fédération française des diabétiques : https://www.federationdesdiabetiques.org/
11. Valensi P, Henry P, Boccara F, et al. Risk stratifi-
• Maisons du diabète (Ligue des diabétiques de France [LDF]) cation and screening for coronary artery disease in
• Union Sports & diabète : www.unionsportsetdiabete.com asymptomatic patients with diabetes mellitus: Posi-
tion paper of the French Society of Cardiology and the
– Le site www.mangerbouger.fr est une source riche d’informations sur l’alimentation. French-speaking Society of Diabetology. Diabetes Metab
2021;47(2):101185.

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