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CHAPITRE ►--------------------------------------
Médicaments du diabète
Prescription et surveillance
Diabète sucré de types 1 et 2 de l'enfant
et de l'adulte. Complications
Pr Béatrice Bouhanick*, Dr Guillaume Grenet**
* Service d'HTA et de Thérapeutique,
Pôle Cardiovasculaire et Métabolique,
CHU Rangueil, Toulouse
**Service Hospitalo-Universitaire de Pharmaco
Toxicologie, CHU de Lyon OBJECTIFS: N ° 330-8
-+ Prescription et surveillance des classes de
médicaments les plus courantes chez l'adulte et chez
PLAN l'enfant, hors anti-infectieux (voir item 177).
1. Diagnostiquer un diabète -+ Connaître le bon usage des principales classes
2. Identifier les situations d'urgence et planifier thérapeutiques.
leur prise en charge -+ Médicaments du diabète (voir item 247).
3. Prise en charge thérapeutique, nutritionnelle
et médicamenteuse
4. Planifier le suivi du patient et décrire les
principes de la prise en charge au long cours
A 1. Diagnostiquer un diabète
2.1. L •hypoglycémie
2.1..1.. Diagnostic
Il ne s'agit pas d'une complication du diabète, mais de ses traitements spécifiques. C'est une urgence : y
penser systématiquement chez un diabétique (aux urgences).
• Symptomatologie aspécifique : sueurs, tachycardie, une pâleur, des tremblements, une asthénie, sensation de
fringale, malaise lipothymique, tout signe neurologique focalisé : déficit moteur, diplopie voire hémiplégie;
crise comitiale; tableau psychiatrique aigu avec manifestations d'angoisse.
• Un traitement par insuline, par sulfamides hyp oglycémiants ou glinides oriente le diagnostic.
• La confirmation repose sur une mesure de la glycémie capillaire (éventuellement confirmer a postériori par la
glycémie veineuse sans retarder le traitement).
• La valeur seuil définissant l'hypoglycémie n'est pas univoque, repères: < 3 mmol/L (0,55 g/L) chez l'homme et
< 2 mmol/L chez la femme hors diabète, même si toute valeur< 4 mmol/L(0,70 g/L) doit faire l'évoquer en pré
sence de signes cliniques et d'un traitement hypoglycémiant.
2.1..2. Traitement
• Dans tous les cas, il faut traiter l'hypoglycémie et trouver la cause sous peine de récidive :
• Traiter:
- En l'absence de troubles de la conscience : ingestion de 15 gramm�s de saccharose (= 1 à 3 pierres de sucre
diluées ou pas dans un verre d'eau) et contrôle de sa glycémie à 15 min(+/- la prise d'une tartine de pain avec
confiture ou d'un féculent complémentaire est en général conseillée).
- S'il s'agit d'une hypoglycémie sous insuline rapide, cela suffit en général au retour à l'euglycémie; les sulfamides
hyp oglycémiants exposent à une durée de l'hyp oglycémie prolongée et à une récidive non exclue surtout en cas
d'insuffisance rénale: surveiller plus longtemps voire hospitaliser(sujet âgé).
- Éviter les produits gras(chocolat ...) qui corrigent mal l'hyp oglycémie.
- En présence de troubles de la conscience : glucosé à 30 % si abord veineux possible; utilisation de glucagon
en extrahospitalier (chez les patients à l'insuline (pas chez ceux sous sulfamides hypoglycémiants); position
latérale de sécurité; surveillance des constantes.
• Enquête étiologique :
- Repas sauté, erreur de dose ou de comprimé, exercice physique imprévu, prise d'alcool, aggravation d'une
insuffisance rénale, amaigrissement sans baisse des doses de médicaments hyp oglycémiants en extrahospitalier
(chez les patients à l'insuline, pas chez ceux sous sulfamides hyp oglycémiants); position latérale de sécurité;
surveillance des constantes.
- Puis reprise de l'éducation thérapeutique et adaptation du traitement à envisager.
• Prévention de l'hypoglycémie :
- l'éducation thérapeutique est indispensable et le fait d'envisager la survenue de l'hyp oglycémie lors de
l'hospitalisation d'un diabétique en particulier dans un secteur ne relevant pas de la diabétologie aussi;
- dire au patient d'avoir des apports alimentaires réguliers et dans le cas contraire ou en cas de jeune à l'hôpital
(pour un examen par exemple), adapter et baisser les doses d'insuline faite AVANT qui couvre la période en
question ; augmenter la part des féculents en cas d'exercice physique ; augmenter parfois la fréquence des
autocontrôles glycémiques; en hospitalisation, vérifier la glycémie capillaire en début de nuit et proposer une
collation si celle-ci est basse de façon inhabituelle sous insuline ou sulfamides hyp oglycémiant.
En cas de signes cardinaux (asthénie, polyuropolydipsie, amaigrissement, polyphagie), c'est une urgence:
hospitaliser. En cas d'acidocétose surtout chez l'enfant, hospitaliser parfois en réanimation pour réhydrater,
se méfier de l'hypokaliémie, adapter l'insulinothérapie en phase aiguë.
Les sulfamides hyp oglycémiants (SH) sont privilégiés en bithérapie mais de rares résultats d'études sont défavo
rables dans cette situation. L'insulinothérapie, reste indispensable dans des situations à risque métabolique aigu
(coma acidocétosique ou hyperosmolaire) dans le diabète de type 2.
3.4. L'insuline
• L'insuline : insulines humaines recombinantes : rapides (Actrapid®, Umuline rapide®), intermédiaires (NPH :
Insulatard®, Umuline NPH®) ou combinées (Mixtard 30® ce qui correspond à 30 % d'Actrapid + 70 % d'insuline
NPH par exemple) et analogues de l'insuline: analogues rapides (Humalog®, Novorapid®, Apidra®), Analogues
lents de l'insuline (glargine = Lantus®, vendue pour durer 24 h et son biosimilaire abasaglar, detemir = Levemir®
en 1 ou 2 injections ou un mélange d'analogue rapide et d'une insuline ayant une durée d'action plus longue,
de 10-12 heures (Humalog mix 25 ou 50®, Novomix 30, 50 et 70®), plus récemment insuline ultra rapide FIASP® et
insuline basale analogue lente seule (Tresiba®) ou combinée avec un analogue du GLPl (Xultophy®) :
- médicament le plus puissant en cas de déséquilibre glycémique avec une baisse d'HbAlc qui peut dépasser
1 %;
- prescrite seule dans le diabète de type 1 ou en association aux autres antidiabétiques dans le diabète 2 en
complément des mesures hygiéno-diététiques sous peine de prise de poids;
- chez l'enfant diabétique de type 1, les AMM varient pour les analogues rapides et lents en fonction de l'âge;
- la HAS préconise dans le diabète de type 2 l'utilisation de la NPH plutôt que les analogues lents lors d'un
schéma bed-time ce qui n'est pas admis par tous;
- la dose initiale de NPH bed-time est comprise entre 10-12 unités (ou d'analogues lents);
- un schéma basal-bolus peut par la suite devenir nécessaire;
- interactions médicamenteuses : les antidiabétiques, les salicylés, les sulfamides, certains antidépresseurs les
IEC ou ARA2 peuvent réduire le besoin en insuline. Les contraceptifs oraux, les corticoïdes, les hormones
thyroïdiennes, les médicaments sympathomimétiques, les diurétiques peuvent augmenter le besoin en insuline.
L'alcool associée à l'insuline peut provoquer une hyp oglycémie sévère. Les bêtabloquants peuvent masquer les
signes d'hyp oglycémie ;
- utilisable dans l'insuffisance hépatique et rénale terminales ;
- nécessite une éducation thérapeutique, une autosurveillance glycémique ;
- attention au poids et aux hypoglycémies ;
- disponible sous la forme de flacons, stylos jetables (vendus par 5), rechargeables par des cartouches vendues
par 5 (1 stylo rechargeable remboursé par an) ; ne pas oublier de prescrire les aiguilles qui vont avec ;
- dans le diabète de type 1 mais aussi le type 2, d'autres modalités d'administration sont utilisables : pompes à
insuline externes ou implantables (ces dernières en arrêt d'implantation) couplées à un capteur de glucose avec
saisie des données sur un logiciel (système hybride) et à terme, l'utilisation de systèmes dits en boucle fermée
avec une intervention du patient réduite mais chez un patient bénéficiant d'une éducation thérapeutique
spécifique délivrée dans des centres experts ;
- nécessité d'une autosurveillance glycémique au moins un contrôle avant chaque injection qu'il ne faut pas
oublier de prescrire avec ses bandelettes dédiées (chez l'adulte, l lecteur est remboursé tous les 4 ans) couplé à
un autopiqueur et à des lancettes ;
- savoir que certains diabétiques de type 2 s'octroient des« vacances thérapeutiques» en ne réalisant pas toutes
les injections et y penser en cas de déséquilibre glycémique: proposer la reprise de l'éducation thérapeutique et
revoir les modalités d'injections et associer le patient au processus de décision.
• lncrétines(GLP-1 et GIP): hormones sécrétées par les cellules intestinales endocrines après la prise
alimentaire( GLP-1 = Glucagon-like peptide 1).
• Stimule la libération d'insuline glucose-dépendante, bloque la production hépatique de glucose en inhibant
la sécrétion de glucagon, ralentit la vidange gastrique. L'effet incrétine est diminué dans le diabète de type
2. Le GLP-1 est rapidement inactivé par l'enzyme DPP-4 et sa demi-vie d'élimination est courte(~ 1-2 min).
Il est possible d'augmenter le GLP-1, soit en l'administrant(analogues du GLP-1), soit en bloquant la DPP-4
(inhibiteurs des DPP- 4).
• Classes récentes efficaces sur la baisse de l'HbA1c.
• Pas d'indication dans le diabète de type 1 et indication non remboursée pour certains d'entre eux dans
l'obésité.
3.5.2. Les inhibiteurs des DPP-4 : sitagliptine (50 et 100 mg Januvia® ou Xelevia®),
vildagliptine (50 mg Ga/vus®), saxagliptine (5 mg Onglyza®)
- Même mécanisme d'action avec un effet plus modeste sur l'HbAlc car en bloquant l'enzyme DPP4, on
augmente le GLPl endogène (mais la dose reste moins importante que celle apportée par les agonistes du
GLPl).
- Utilisables en bithérapie ou en trithérapie avec metformine et/ou sulfamides hypoglycémiants.
- Dans le diabète de type 2 en général en bithérapie avec metformine ou sulfamides et en trithérapie avec
metformine et sulfamides ; mais aussi en monothérapie (sitagliptine) si metformine CI ou non tolérée ou avec
l'insuline.
- Pas de baisse de poids décrite dans les études cliniques.
- Posologie usuelle de sitagliptine est de 100 mg une fois par jour ; pour la vildagliptine de 50 mg x 2/jour (sauf
en association à un sulfamide hypoglycémiant : 50 mg/j seulement), pour saxagliptine de 5 mg par jour (non
sécable).
- Effets indésirables : nausées mais moins fréquentes que sous agonistes du GLP-1, hypoglycémies et risque
d'insuffisance cardiaque avec la saxagliptine. L'augmentation du risque de pancréatite apparait plus étayée
pour les iDPP4 que pour les A-GLPl dans les essais cardiovasculaires.
- Contre-indiqués chez les patients avec ATCD de réaction d'hypersensibilité grave (anaphylactiques, chocs,
angiœdème) car rares cas mais graves d'hypersensibilité: rash, urticaire, angiœdème, qui peuvent être favorisés
en association aux IEC.
- Dans l'insuffisance rénale modérée et sévère, utilisable avec pour la sitagliptine et la saxagliptine une réduction
posologique; vildagliptine utilisable à posologie réduite y compris au stade terminal mais plus en cas de dialyse.
- Contrôles des transaminases avant et après instauration de vildagliptine.
- Associations également disponibles avec la metformine + sitagliptine (Janumet® ou Velmetia®), + vildagliptine
(Eucreas®), + saxagliptine (Komboglyze®) : attention à ces associations« trompeuses» de par leur« petit nom»
qui contiennent de la metformine et qu'il faut suspendre en cas d'injection de produit de contraste iodé.
- Pas de de gain sur les complications macrovasculaires du diabète de type 2 dans les études.
• Suivi biologique:
- HbAlc 2 à 4 fois par an, à discuter en fonction de l'histoire des patients; selon les recommandations HAS
récentes, la cible est à déterminer en fonction de l'âge, des co-pathologies;
- Glycémie à jeun annuel si contrôle de l'autosurveillance glycémique;
- Ct, TG, HDL et LDL-CT annuel;
- Créatininémie et clairance (MDRD ou CKD-EPI), rapport alb/créatininurie sur échantillon annuel au moins.
► Bibliographie
• RÉFÉRENCES INDISPENSABLES
- hdps://www.sfdiabete.org/sites/www.sfdiabete.org/files/fi les/ ressources/mm m_2019_ndeg8_prise_de_posi10n_sfd_
dt2_d_v_finale.pdf
- Recommandation : Stratégie médicamenteuse du contrôle glycémique du diabète de type 2. http://www.has-sante.fr
• POUR ALLER PLUS LOIN
- Summary of Revisions: Standards of Medical Care in Diabetes-2021 Diabetes Care 2021 Jan; 44 (Supplement 1 : https://care.
diabetesjournals.org/content/44/Supplement_1
- 2019 ESC Guidelines on diabetes, pre-diabetes, and cardiovascular diseases developed in collaboration with the EASD.
- Cosentino F, Grant PJ, Aboyans V, Bailey CJ, Ceriello A, Delgado V, Federici M, Filippatos G, Grobbee DE, Hansen TB, Huikuri HV,
Johansson 1, Jüni P, Lettino M, Marx N, Mellbin LG, ôstgren CJ, Rocca B, Roffi M, Sattar N, Seferovié PM, Sousa-Uva M, Valensi P,
Wheeler DC; ESC Scientific Document Group Eur Heart J. 2019 Aug 31. pii: ehz486. doi: 10.1093/eurheartj/ehz486. [Epub ahead
of print].
- Diabète de type 1 VIDAL recos Edts 2016.
- http: //www.has-sante.fr/portai I/jcms/c_173 5 060/fr/guide-parcours-de-soins-diabete-de-type-2-de-l-adulte
FICHE DE SYNTHÈSE
• Ne pas oublier:
- de réévaluer la diététique à chaque étape de l'escalade thérapeutique;
- de se préoccuper de l'observance des traitements en cas d'échec thérapeutique;
- de peser périodiquement son patient.
• Très important :
- attention à la fonction rénale lors de l'utilisation de la metformine mais aussi lors de l'utilisation
des autres thérapeutiques antidiabétiques ou antihypertensives: pas d'automédication!
Pièges _à_éviter_:
- attention à l'inertie thérapeutique: « on verra cela la prochaine fois» : au contraire, agir!
- pas d'escalade thérapeutique non raisonnée: prendre l'avis d'un diabétologue en cas d'échec.
- attention aux écueils des stratégies basées sur une cible d'un critère de substitution: replacer
les objectifs du traitement au niveau clinique du patient (traiter le patient et non le résultat bio
logique).
hypoglycémiant.
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En l'absence de tr oubles de la conscience : ingest on de 15
grammes de saccharose(= 1 à 3 pierres de sucre diluées ou pas
i
dans un verre d'eau) et contrôle de sa g lycémie à 15 m n(+/·
r
La prise d'une ta tine de pain avec confiture ou d'un féculent
complémentaire est en général conseillée).
i
En présence de troubles de la conscience : glucosé à 30 % s abord
l
veineux possible ; uti isation de glucagon en extrahosp italie r
l
(chez les patients à l'insu ine (pas chez ceux sous su lfamides
i
hypog lycémiants) ; pos tion latérale de sécur ité; su rveillance des
constantes.
Traite r la cause de l'hypoglycémie.
La prévenir en y pensant, notamment o l rs des hosp italisations.
consultation de suivi, éducation d'un patient une baisse d'HbA1c qui peut dépasser 1%;
diabétique de type 1 Prescrite seule dans le diabète de type 1 ou en association aux
autres antidiabétiques dans le diabète 2 en complément des
mesures hygiéno-diététiques sous peine de prise de poids;
Chez l'enfant diabétique de type 1, les AMM varient pour les
analogues rapides et lents en fonction de l'âge;
La HAS préconise dans le diabète de type 2 l'utilisation de la NPH
plutôt que les analogues lents lors d'un schéma bed-time ce qui
n'est pas admis par tous;
La dose initiale de NPH bed-time est comprise entre 10-12 unités
(ou d'analogues lents);
L'éducation thérapeutique est essentielle dans la compréhension
de la maladie et de sa prise en charge
Suivi: HbA1c 2 à 4 fois par an ;
La cible est à déterminer en fonction de l'âge, des CO-pathologies.
281. Prescription médicamenteuse, consultation Les Biguanides (Metformine) recommandés en ire intention
de suivi et éducation d'un patient diabétique de en monothérapie, lorsque le régime et 1 1 exercice ne sont pas
type 2 ou ayant un diabète secondaire suffisants.
Les sulfamides hypoglycémiants : dans les recos HAS 2013,
constituent la bithérapie de référence en association à
la metformine en cas d'échec de la metformine, voire en
monothérapie en cas de Cl ou intolérance à la metformine. Plus
récemment, les sociétés savantes les déclassent au profit des
autres thérapeutiques en raison du manque de niveau de preuve
et du risque d'hypoglycémie.
Les inhibiteurs des DPP4 sont utilisables en bithérapie ou en
trithérapie avec metformine et/ou sulfamides hypoglycémiants.
Les analogues du GLP1: L'Europe les privilégie très tôt dans
la stratégie en associçition à la metformine chez un DT2 en
prévention secondaire CV.
Les inhibiteurs des SGLT2 sont à privilégier en bithérapie avec la
metformine ou en trithérapie avec un sulfamide hypoglycémiant
chez les patients présentant une maladie cardiovasculaire avérée,
une insuffisance cardiaque à FE altérée et/ou une maladie rénale
chronique.
Les analogues du GLP1 et les inhibiteurs du SGLT2 ont montré le
meilleur niveau de preuve sur le bénéfice cardiovasculaire (en
prévention secondaire majoritairement).
L'éducation thérapeutique est essentielle dans la compréhension
de la maladie et de sa prise en charge.
Suivi: HbA1c 2 à 4 fois par an, à discuter en fonction de l'histoire
des patients ;
Selon les recommandations HAS, la cible est à déterminer en
fonction de l'âge, des CO-pathologies.