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LES SOURCES DU DROIT

L'étude des sources du droit consiste à rechercher quelles sont les modalités de construction des règles juridiques. Ce faisant,
on peut dégager le rôle des différentes institutions dans l'élaboration du droit. Si les sources formelles, c'est-à-dire écrites,
qui existent au plan national et au niveau international, sont les premières sources du droit, il existe d'autres sources
informelles, au travers desquelles le droit se construit parfois de façon plus souple.

Section 1. Les sources écrites nationales du droit

I. La Constitution française

Le régime politique actuel est issu de la Constitution du 4 octobre 1958 qui a donné naissance à la Vème République. La
Constitution est placée au sommet de la hiérarchie des textes en droit français.

Le « bloc de constitutionnalité » est constitué par les divers textes qui ont valeur constitutionnelle :

- La Constitution au sens propre : La Constitution fixe les règles relatives à l'exercice du pouvoir et au fonctionnement
des institutions : président de la République, gouvernement, Parlement, etc.

- Le Préambule de la Constitution : Cet élément du « bloc de constitutionnalité » renvoie à trois textes : la Déclaration
da droits de l'homme et du citoyen de 1789, le Préambule de la Constitution de 1946 et la Charte de
l'environnement de 2004.

II. La loi

A. Domaine de la loi

La loi, entendue stricto sensu, est un texte voté en termes identiques par les deux chambres du Parlement, l'Assemblée
nationale d'une part, le Sénat d'autre part.

Certaines matières ne peuvent être régies que par le législateur et non par le gouvernement. Ce domaine exclusif de la loi est
défini et limité par l'article 34 de la Constitution.

Exemples : Droits civiques et garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques.

Dans d'autres matières, le Parlement fixe uniquement les principes fondamentaux et le gouvernement prend des mesures
d'application.

Exemples : Droit du travail, de la propriété, des obligations et contrats.

B. Adoption de la loi : procédure normale sans incident

Seul le Parlement est compétent pour adopter des lois. Cette exclusivité est une application du principe de séparation des
pouvoirs affirmé par la Constitution.

Le projet (initiative du gouvernement) ou la proposition (initiative du parlement) de loi est examiné successivement par
l'Assemblée nationale et le Sénat. Il est d'abord étudié par une des commissions spécialisées de l'assemblée saisie. Chacune
de ces commissions permanentes, au nombre de huit à l'Assemblée nationale et de sept au Sénat, est compétente dans un
domaine spécifique. La commission qui a été saisie désigne un rapporteur, elle procède aux auditions utiles et elle adopte un
rapport. Elle présente ensuite, par la voix de son rapporteur, le projet de texte législatif aux parlementaires appelés à voter.

Des amendements peuvent être déposés par le gouvernement et par les parlementaires, durant le travail en commission
aussi bien qu'en séance.

Le texte, éventuellement amendé, est proposé au vote lorsqu'il a été mis à l'ordre du jour. Si celui-ci est voté dans des termes
identiques par chaque assemblée, la loi est adoptée.
C. La mise en application de la loi

La promulgation de la loi résulte d'un décret du président de la République par lequel il constate officiellement l'existence de
la loi et la rend exécutoire. Cette intervention doit se faire dans les 15 jours du vote de la loi.

Pour que chacun puisse connaitre les lois en vigueur, les lois sont ensuite publiées au JournaI OfficieI, seulement accessible
sur Internet depuis le 1 janvier 2016. Les lois sont applicables le lendemain de cette publication ou à la date qu'elles fixent.

D. L'application de la loi dans le temps

1. Entrée en vigueur de la loi et application immédiate

Une loi nouvelle a un effet immédiat, c'est-à-dire qu'elle s'applique à toutes les situations juridiques créées postérieurement
à son entrée en vigueur.

Elle s'applique également aux situations juridiques nées antérieurement et dont les effets se prolongent, sans pouvoir porter
atteinte aux droits acquis.

Exemple : En matière de contrat, la loi nouvelle ne s'applique pas aux contrats en cours, sauf si le législateur en a décidé
autrement ou si la règle nouvelle est considérée d'ordre public.

2. Abrogation de la loi

L'anéantissement d'un texte provient de son abrogation. L’abrogation est expresse lorsque la nouvelle loi précise qu'elle
abroge l'ancienne. Elle est tacite si la loi nouvelle est différente de l'ancienne.

3. La non-rétroactivité de la loi

L'article 2 du Code civil précise que la loi n'est pas rétroactive. Elle ne s'applique donc pas à des faits ou à des situations
antérieures à son entrée en vigueur.

Ce principe connaît cependant des exceptions :

- Une loi interprétative, constituant un éclaircissement du sens d'un texte déjà adopté voit ses effets rétroagir au jour
de l'adoption de la loi avec laquelle elle forme un tout indissociable ;

- Une loi pénale « plus douce » s'applique aux infractions qui n'ont pas encore été jugées.

- Enfin, une loi peut être expressément rétroactive.

E. L'application de la loi dans l’espace

Les principes La loi nationale s'applique sur tout le territoire national, aux Français comme aux étrangers (principe de
territorialité). Elle s'applique également aux Français à l'étranger (principe de personnalité).

III. Les sources réglementaires du droit.

A. Le règlement autonome

Les matières autres que celles qui sont du domaine de la loi ont un caractère réglementaire. Dans ces matières, c’est donc le
pouvoir exécutif qui crée la norme. Ces règlements sont dits autonomes puisqu’ils interviennent dans un domaine différent
de celui de la loi. Ils ont la même force que les lois.
Exemples : La détermination des crimes et délits relève de la loi, car l'article 34 de la Constitution la cite expressément. A
contrario, la détermination des contraventions (les infractions les moins graves) relève des règlements.

B. Les ordonnances

En vertu de I'article 38 de la Constitution, le Gouvernement peut, pour l'exécution de son programme, demander au
Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du
domaine de la loi. Texte réglementaire par la forme (adopté en Conseil des ministres), l'ordonnance intervient dans le
domaine législatif, déterminé par l'article 34 de la Constitution, et a la même force que la loi, qu'elle peut abroger, modifier
ou compléter.

C. Les autres textes réglementaires

1. Le décret d'application, dont le rôle est de préciser les modalités de mise en œuvre des lois, des ordonnances ou des
règlements autonomes.

2. L’arrêté est un acte adopté par un ou plusieurs ministres, un préfet, un maire, etc., et posant une règle générale.

Section 2. Les sources supranationales écrites du droit


I. Les traités internationaux

Les traités internationaux sont des engagements entre États ou au sein d'organisations internationales. Leur objet est de
poser des règles concernant les rapports entre Etats contractants, ou des dispositions de droit privé intéressant les
ressortissants de différents Etats.

Les dispositions des traités internationaux sont supérieures aux lois nationales sous deux conditions. Il faut que le traité soit
régulièrement ratifié au plan national et que soit vérifié le principe de réciprocité : les autres pays signataires doivent eux-
mêmes respecter le traité.

II. Les sources européennes

A. Les autorités à l'origine du droit européen

1. La Commission européenne

La Commission élabore les propositions des textes législatifs dont elle est à l'initiative. Elle les transmet au Conseil des
ministres de l'Union européenne et au Parlement européen. Elle veille ensuite à l’exécution des politiques votées. Elle
possède donc le pouvoir exécutif.

2. Le Conseil des ministres de l'Union européenne

Appelée aussi Conseil de l'Union, cette institution rassemble périodiquement les ministres concernés par le sujet en
discussion de chacun des pays. Le Conseil de l'Union est le premier organe législatif de l'Union européenne. Il vote sur les
propositions de la Commission. Dans de nombreux domaines, il partage la compétence législative avec le Parlement.

3. Le Parlement européen

Les 751 députés européens sont élus pour 5 ans au suffrage universel direct par les citoyens des États membres de l'Union.
Le dispositif de la codécision est devenu la règle pour adopter les textes européens, par exemple en matière budgétaire.
4. Le Conseil européen

Le Conseil européen rassemble les chefs d'État ou de gouvernement des 28 pays de l'union. Ils se réunissent périodiquement
(en principe une fois par trimestre) pour décider des impulsions à donner à la politique européenne, et pour adopter les
orientations de l'Union européenne sur la scène internationale.

B. Les principales sources européennes

1. Les traités fondateurs (le droit primaire)

Le droit européen repose sur plusieurs traités fondateurs, principalement :

 Le traité de Rome de 1957,


 L'Acte unique de 1985
 Le traité de Maastricht de 1992
 Le traité de Lisbonne du 13 décembre 2007, entré en vigueur en décembre 2009.

2. Le droit dérivé

Le droit dérivé sont des textes obligatoires dans toutes leurs dispositions et directement applicables dans tous les États
membres, tant aux particuliers qu'aux entreprises.

C. Les principes propres au droit européen

1. Le principe de primauté

Dans les domaines de compétence qui ont été transférés aux institutions européennes, le juge national doit écarter toute
disposition de droit interne contraire à une norme européenne, que la première soit antérieure ou postérieure à la seconde.

2. L'effet direct

Il n'est pas indispensable que les règles européennes de droit aient été reprises par les droits nationaux pour s'appliquer aux
citoyens des États membres. Elles s'imposent donc directement aux sujets de droit de l'Union européenne.

3. Le principe de subsidiarité

L'importance du droit européen va dans le sens d'une législation élaborée sur une base commune aux États membres. Mais
cette importance est à tempérer avec le principe de subsidiarité : dans les domaines ne relevant pas de leur compétence
exclusive, les institutions européennes ne doivent intervenir que si les objectifs à atteindre ne peuvent pas l'être de façon
satisfaisante par chacun des États.

Section 3. La hiérarchie des sources écrites du droit


La hiérarchie entre les sources écrites du droit signifie qu'aucune disposition édictée par une source supérieure ne peut être
abrogée ni contredite par une norme inférieure, c'est-à-dire une règle émanant d'une source inférieure.
I. La place des sources internationales dans la hiérarchie

A. La place des traités

Pour qu'un traité devienne une source du droit interne, il faut qu'il soit ratifié par le président de la République ou le
Parlement selon les cas. Pour ce faire, les parlementaires devront vérifier sa conformité à la Constitution, ce qui peut
nécessiter une révision constitutionnelle préalable. Selon l'article 55 de la Constitution, la ratification d'un traité lui confère
une autorité supérieure à celle des lois nationales. Par conséquent, un traité ratifié s'insère dans l'ordre national interne,
juste au-dessous de la Constitution.

B. La place du droit européen dérivé

Le principe de la primauté du droit européen a pour effet de situer les textes européens au-dessus des sources écrites
nationales.

II. La représentation de la hiérarchie des sources écrites du droit

1) Bloc de constitutionnalité
2) Traités internationaux ratifiés
3) Règlements et directives européens
4) Lois ordinaires

Règlements autonomes
Ordonnances ratifiées
Décrets d'application
Arrêtés ministériels
Arrêtés préfectoraux
Arrêtés municipaux

Section 4. Les autres sources du droit

I. La jurisprudence
Le juge doit :
1. Juger sans réglementer. Confronté à un litige, le juge est obligé de juger, sous peine de déni de justice (C
art. 4), mais il ne peut pas rendre d’arrêt de règlement.
2. Interpréter la loi pour préciser le sens de la règle applicable.
3. Compléter la loi lorsqu’elle est incomplète.

Le terme de jurisprudence désigne les décisions de justice intervenues dans des affaire analogues. Cela signifie qu'il n'y a de
jurisprudence que lorsque se dégage des décisions de justice une solution récurrente adoptée dans des litiges similaires.
Un revirement de jurisprudence est toujours possible. Les juges, qui ont donné un temps une interprétation de la loi, peuvent
changer de position et adopter un nouveau point de vue par rapport à cette loi.
II. La coutume

A. La définition de la coutume
La coutume est l’usage prolongé d’une même règle de droit non écrite. Il s’agit de règles qui se dégagent lentement et
spontanément de faits ou de pratiques dont l'application apparait comme obligatoire.
La règle coutumière est une règle de droit. À ce titre, elle est obligatoire et sanctionnée par les tribunaux.

B. Les éléments constitutifs de la coutume


Deux éléments doivent se combiner pour donner naissance à une coutume : un élément matériel et un élément
psychologique.

1. L'élément matériel
La coutume nait d'une pratique, d'un comportement répété. Celui-ci doit être constant, c'est-à-dire suivi par les personnes.

2. L’élément psychologique
La règle non écrite doit être considérée par tous comme obligatoire. En cela, la coutume se différencie d'autres règles
sociales non écrites (comme la pratique du pourboire, les usages vestimentaires dans les cérémonies, etc.).

C. Typologies de coutumes
Par rapport à l’ancien droit (Ancien Régime), la coutume a une place moins importante aujourd’hui en tant que source du
droit. Elle est une source secondaire. Elle n’en reste pas moins extrêmement variée.

1. Coutume secundum legem


Dans un certain nombre de cas, des règles de nature coutumière, ainsi que des usages, spécialement des usages locaux,
s’appliquent en vertu d’une prescription formelle du législateur ou de l’autorité réglementaire.
Ainsi en est-il des usages locaux relatifs à la propriété foncière, rendus applicables par les articles 645, 663, 671 et 674 du
code civil, pour l’utilisation des eaux, les clôtures, les distances à observer pour les plantations ou pour certaines
constructions, le code civil ayant voulu tenir compte de la diversité de climats, de modes de culture et d’habitation.

2. Coutume praeter legem


La coutume praeter legem est la coutume qui intervient alors que la loi est muette.
Rien ne s’oppose en principe à ce que la coutume, à laquelle le législateur lui-même reconnaît compétence dans d’assez
nombreux cas, puisse intervenir sans renvoi du législateur, lorsqu’il y a une lacune du droit légiféré.
En fait, les cas d’intervention d’une coutume praeter legem sont très rares en droit civil, parce que, quand une question
soulève des conflits d’intérêts importants, elle est réglée par la loi ou par la jurisprudence avant qu’une coutume n’ait eu le
temps de se former.
Exemples :
 Tout au long du XIXe siècle, on pouvait citer comme exemple la coutume qui veut que la femme porte le nom
patronymique de son mari.
 On peut également considérer comme faisant l’objet d’une règle coutumière la preuve de la qualité d’héritier : celle-
ci se fait par des procédés (acte de notoriété, intitulé d’inventaire) dont le rôle a été dégagé progressivement par
l’usage, dans les rapports entre les notaires et les grands établissements auprès desquels il faut, en certaines
circonstances, justifier de la qualité d’héritier.

3. Coutume contra legem


La coutume peut s’opposer à la loi : c’est le cas de la coutume contra legem.
Exemple : La coutume en vertu de laquelle, malgré l’exigence d’un acte notarié en matière de donations (art. 931 c. civ.), la
pratique du don manuel est valable.

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