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Arrêt
n° 79 du 16 juillet 2008. Aliou Bathily c/Abdoul Diallo pj
1 L a Cour
4Attendu, selon l’arrêt confirmatif attaqué, que par jugement du 28 mars 2001, le
tribunal régional de Dakar, après avoir rejeté la demande de résolution du contrat de
vente conclu entre Aliou Bathily et Abdoul Diallo et constaté que ce dernier s’est
libéré du prix convenu, a ordonné la perfection du contrat sous astreinte de 15000 F
par jour de retard ;
5Sur le premier moyen pris de la violation des dispositions des articles 323, 382 et
383 du Code des Obligations Civiles et Commerciales, en ce que le juge d’appel a
confirmé le perfection de la vente sur la base uniquement d’un acte sous seing privé
n’ayant pas date certaine, passé entre le défendeur au pourvoi et El hadji Mamadou
Sall qui, ne disposant pas d’une procuration notariée, n’a jamais justifié être son
mandataire, alors que, s’agissant d’un titre foncier, les transactions portant sur
l’immeuble dont la perfection de la vente était recherchée, sont régies par un
formalisme rigoureux fixé par les règles visées au moyen ;
6Vu les articles 323, 382 et 383 du Code des Obligations Civiles et Commerciales,
ensemble l’article 258 du même Code ;
9Qu’en se déterminant ainsi, alors que la vente porte sur un immeuble immatriculé,
la cour d’Appel a violé les textes susvisés ;
12Casse et annule…
Observations
131. « Les promesses n’engagent que ceux qui y croient » [1][1]Souvent prêtée aux
hommes politiques (on se demande bien… lorsqu’elles portent sur la vente d’un
immeuble immatriculé et si elles ont été passées par acte sous seings privés. Cet
enseignement constant [2][2]Cf. CS, 2ème civ. et com., 04 juin 1993, Arrêt n° 107,
EDJA n°… de la jurisprudence de la Cour suprême du Sénégal [3][3]La loi organique
n° 2008-35 du 7 août 2008 a institué, à… vient, à nouveau, d’être confirmé par
l’arrêt n° 79 du 16 juillet 2008. Toutefois, malgré cette constance de la jurisprudence
de la Cour, cet arrêt peut faire débat à un double point de vue, au moins. D’une part,
la règle plusieurs fois répétée ne semble pas être parfaitement entendue par les
juridictions du fond. Certaines décisions continuent à accorder, comme en l’espèce,
une certaine valeur juridique à la promesse sous seings privés de vente d’immeuble
immatriculé. C’est le signe que le principe du formalisme de la promesse est loin de
faire l’unanimité. Il appelle certaines critiques qui, à maints égards, paraissent
légitimes au regard du fondement discutable que lui assigne la Cour suprême.
D’autre part, le principe de solution consacré apporte une précision supplémentaire
quant à la portée du formalisme des contrats relatifs à une transaction immobilière,
au-delà de la seule promesse de vente [4][4]Cf. infra : n° 33. - s.. Cet arrêt suscite
ainsi une discussion essentielle sur la détermination des contours du formalisme
des contrats relatifs aux immeubles immatriculés [5][5]La question est d’autant plus
importante dans le contexte du….
142. A l’origine de cette affaire, un mandataire ne justifiant pas d’une procuration
notariée avait signé un acte sous seings privés portant sur la vente d’un immeuble
immatriculé. La perfection de la vente a été poursuivie par le futur acquéreur qui
s’était libéré du prix convenu. Celle-ci sera ordonnée par la Cour d’appel de Dakar
dans son arrêt n° 657 du 17 décembre 2004, confirmant le jugement entrepris par le
tribunal régional hors classe de Dakar en date du 28 mars 2001. En déférant cet
arrêt de la Cour d’appel à la censure de la Haute juridiction sénégalaise, le pourvoi
l’invitait à se prononcer sur la question de savoir si la promesse synallagmatique de
vente sous seings privés portant sur un immeuble immatriculé est valable.
Répondant clairement par la négative, la Cour suprême a affirmé qu’une telle
promesse, tout comme la vente sur laquelle elle porte, doivent être passées par acte
notarié.
153. Cet arrêt soulève des interrogations liées à la portée du formalisme des actes
relatifs aux immeubles immatriculés ainsi qu’à la valeur juridique de tels actes
lorsqu’ils sont passés sous seings privés. La Cour suprême y a apporté des réponses
tranchées en se prononçant sur la nature de la sanction de la violation de l’exigence
d’un acte notarié. Mais, de manière sous-jacente, l’arrêt de la Cour peut faire débat.
D’un point de vue de pure technique juridique, une distinction nette suivant la nature
des actes intervenus entre les parties n’a pas été clairement faite au regard des
dispositions visées. La Cour n’a pas fait le départ, ni affirmé clairement l’assimilation
entre la promesse visée par l’article 382 et « le contrat » auquel se réfère l’article
383. La promesse de vente -et au-delà d’elle, les avant-contrats- est-elle visée sous
ce vocable « contrat » ou est-ce seulement la vente définitive qui est visée ? D’un
point de vue de politique juridique, la nature des intérêts en cause dans les
transactions en matière immobilière doit être définie. De telles opérations
concernent-elles la protection des parties ou de la société, d’intérêts particuliers ou
de l’intérêt général ? Dans certains systèmes juridiques, la promesse synallagmatique
de vente (ou la vente), même portant sur un immeuble, peut être passée par acte
sous seings privés sans que sa validité ne soit remise en cause par ce seul fait [6]
[6]Ainsi, en droit français, la forme notariée n’est pas exigée…. Dans ce cas, la
portée de la promesse est déterminée par les stipulations des parties. Celles-ci
peuvent ainsi différer la seule prise d’effets de la vente jusqu’à l’accomplissement de
certaines formalités, auquel cas, la promesse synallagmatique de vente vaut vente [7]
[7]Par exemple, si les parties prévoient que le transfert de…. Mais elles peuvent
également prévoir que la formation de la vente est subordonnée à la signature d’un
acte authentique dans un certain délai. Dans ce dernier cas, la promesse ne vaut pas
vente [8][8]Cf. La vente d’immeuble. Sécurité et transparence, 99e Congrès…. Elle
s’analyse en un simple projet non obligatoire que certains qualifient, de manière
discutable, de vente sous condition suspensive [9][9]Cette qualification est
contestable dans la mesure où, d’une….
164. Au Sénégal, la Haute juridiction reste constante en matière d’encadrement des
opérations immobilières par le formalisme d’authenticité. Sur le fondement discutable
des dispositions d’ordre public du Code des obligations civiles et commerciales
(COCC), elle consacre, en effet, l’exigence d’un formalisme des contrats relatifs aux
immeubles immatriculés (I). Faut-il y voir une manifestation du renouveau du
formalisme en matière contractuelle ? Ce formalisme des contrats relatifs aux droits
réels immobiliers irait dans le même sens que les nouvelles tendances vers un
formalisme informatif protecteur [10][10]G. Couturier, « Les finalités et les sanctions
du formalisme »,…. Celui-ci est sanctionné, le plus souvent, sévèrement [11]
[11]Magnier, « Les sanctions du formalisme informatif », JCP 2004,…, par la
jurisprudence. Ou alors, est-ce la marque de lourdeurs mal fondées qui freinent ou
ralentissent inutilement les opérations immobilières ? Quel que soit le point de vue
adopté, le développement de ce formalisme de validité marque un recul
supplémentaire du consensualisme ou liberté des formes contractuelles [12][12]J.-L.
Bergel, Théorie générale du droit, Paris, Dalloz, 4e éd.…. La justification réside, selon
la décision d’espèce, dans l’ordre public, c’est-à-dire, des impératifs liés à la
protection des parties, des tiers et de la société, en général. Partant, la Cour a
apporté une précision quant à la sanction des actes sous seings privés portant sur un
immeuble immatriculé (II).
175. Suivant l’arrêt de la Chambre civile et commerciale, les actes juridiques litigieux
devaient faire l’objet d’un acte passé par devant notaire. Afin de préciser la base
juridique de cette exigence, la Cour se réfère à des dispositions d’ordre public
comme fondement textuel du formalisme (A). Dans le même temps, elle détermine
l’expression de ce formalisme (B).
2614. Ensuite, une telle référence est de nature à jeter le trouble dans la mesure où
il s’évince de ce texte que la promesse synallagmatique de vente, par laquelle les
parties s’accordent mutuellement, l’une pour vendre, l’autre pour acheter une chose
déterminée pour un prix fixé [19][19]A l’opposé, dans la promesse unilatérale de
vente ou d’achat,…, est une vente parfaite lorsque le contrat est consensuel. Sinon,
elle oblige les parties à parfaire le contrat en accomplissant les formalités nécessaires
à sa formation [20][20]Art. 323 du COCC.. La solution induite par l’article 323 prend
le contre-pied de celle qui découle de la position de la Cour. Elle obligerait les parties
à un contrat portant sur un droit réel immobilier à le parfaire en accomplissant les
formalités nécessaires à sa formation. Des dispositions supplétives de volontés,
consacrées à la vente, en général, ne devraient pas, selon la solution de l’espèce,
pouvoir faire échec à l’application de règles d’ordre public consacrées spécialement
aux contrats portant sur des immeubles immatriculés. L’opportunité d’inclure l’article
323 du COCC parmi les bases légales de l’exigence de formalisme est donc très
discutable. Et ce texte est d’ailleurs souvent brandi afin de justifier la solution
contraire [21][21]Cf. en ce sens, CA Dakar, n° 339 du 4 juil. 2002.
Décision… permettant de conclure à la validité de la promesse de vente sous seings
privés [22][22]Cf. supra..
2715. Une référence à l’article 322 du COCC aurait été plus compréhensible de la
part de la Cour suprême. Ce texte consacre une définition de la promesse
synallagmatique de vente plus précise que celle de l’article 382, alinéa 1. Il met
l’accent sur les éléments essentiels sur lesquels porte l’accord des parties : « une
chose déterminée » et « un prix fixé ». Il aurait donc été parfaitement
complémentaire avec les dispositions des articles 382 et 383 qui, dans l’esprit de cet
arrêt, déterminent la manifestation du formalisme.
B – L’expression du formalisme
2816. L’arrêt apporte deux précisions concernant la position de la Cour sur la
manifestation du formalisme dans les actes relatifs aux droits réels portant sur les
immeubles immatriculés. D’une part, il s’agit d’un écrit ad solemnitatem [23][23]On
parle de formalisme ad solemnitatem si la nullité est… (1) qui fait échec au principe
du consensualisme. D’autre part, c’est un écrit authentique (2) qui repose en principe
sur l’établissement d’un acte notarié.
1 – L’exigence d’un écrit ad solemnitatem
2917. Les conventions litigieuses auraient dû, selon les termes de l’arrêt, « être
passées par devant notaire ». Ainsi, le formalisme exigé par la Cour affecte la validité
de la vente, de la promesse ou du mandat consenti pour passer de tels actes. A ce
titre, il fait véritablement exception au consensualisme qui trouve son siège, en droit
sénégalais, à l’article 41 du COCC. Ce principe qui gouverne la matière des contrats
signifie que ceux-ci peuvent être passés librement, leur validité se suffisant de
l’échange des consentements. Les parties expriment leur consentement de quelque
manière que ce soit, à condition que la manifestation de volonté ne laisse aucun
doute sur leur intention [24][24]Article 60 du COCC.. L’exigence d’un écrit ou d’autres
formalités pour la validité d’une convention relève donc d’une exception qui doit être
prescrite par une disposition particulière. Selon la Cour suprême, la conclusion des
actes relatifs à un immeuble immatriculé, notamment d’une promesse, compte parmi
les exceptions au consensualisme, même si cela ne résulte pas, de manière
univoque, de la loi.
3018. Le formalisme réside donc dans la rédaction d’un écrit [25][25]Le formalisme
de validité peut également résider dans la remise… ad solemnitatem [26][26]L’acte
juridique qui est frappé d’un tel formalisme est un acte…. Si l’écrit n’est pas défini
par le législateur sénégalais, il est admis qu’il résulte d’une suite de lettres, de
caractères, de chiffres ou de tous autres signes ou symboles dotés d’une signification
intelligible [27][27]Définition consacrée par l’article 1316 du Code civil français…. En
principe, le support sur lequel est établi l’écrit est indifférent quant à sa valeur
juridique. En effet, la loi 2008-08 du 25 janvier 2008 sur les transactions
électroniques (LTE) prévoit que « lorsqu’un écrit est exigé pour la validité d’un acte
juridique, il peut être établi et conservé sous forme électronique… » [28][28]Article
19 LTE. Il convient également de noter que le règlement…. Il n’en est autrement que
pour, d’une part, les actes sous seing privé relatifs au droit de la famille et des
successions et, d’autre part, les actes sous seing privé relatifs à des sûretés
souscrites pour des besoins non professionnels [29][29]Article 20 LTE.. La promesse
de vente d’immeuble n’échapperait donc pas à la règle de l’équivalence fonctionnelle
des écrits sur support papier et électronique.
3119. L’écrit prescrit, selon l’arrêt d’espèce, pour la promesse de vente d’immeuble
se distingue de l’écrit exigé à titre de simple condition de preuve. La violation d’un tel
formalisme affecte l’efficacité de l’acte en cas de contestation. Ses effets sont alors
simplement paralysés. C’est le cas, en droit civil, pour les actes juridiques dont le
montant dépasse le seuil fixé par la loi [30][30]Ce montant est fixé à 20 000 FCFA,
soit environ 30,48 euros.. Mais le formalisme consacré aux contrats portant sur des
droits réels immobiliers est-il simplement de validité ou permet-il également de
remplir une fonction de publicité ? D’une part, pour ce qui est de l’acte notarié, on
peut considérer, comme en matière de droit de la famille, que « la forme assume
une fonction sociale… elle fait connaître l’acte privé. Elle lui donne la publicité » [31]
[31]G. Cornu, L’art du droit en quête de sagesse, Paris, PUF,…. D’autre part, en plus
d’être passé par devant notaire, l’acte constitutif ou translatif de droit réel immobilier
doit faire l’objet d’une inscription au titre foncier. Mais est-ce un acte de formation ou
d’exécution du contrat translatif de droit réel ? En vertu de l’article 381 du COCC,
« l’acquisition du droit réel résulte de la mention au titre foncier du nom du nouveau
titulaire du droit ». En droit sénégalais, le transfert de propriété ne s’opère pas solo
consensu [32][32]V. article 276 du COCC.. C’est plutôt par l’exécution de l’obligation
de délivrance que se réalise le transfert de la propriété de la chose à l’acquéreur [33]
[33]Cf. article 276, al. 3 du COCC.. S’agissant de la vente d’immeuble, la délivrance
est faite par la réalisation des formalités de publicité exigées par les dispositions
particulières à la propriété foncière et l’établissement du titre foncier au nom de
l’acheteur [34][34]Cf. article 277, al. 2 du COCC. L’inscription est soumise aux….
L’acte translatif de droit réel fait ainsi l’objet d’un formalisme de validité, un écrit ad
solemnitatem, mais également de publicité, qui permet d’assurer l’exécution de
l’obligation de délivrance.
3220. Mais sur la question de savoir si l’écrit exigé pour la validité de l’acte peut être
sous seings privés, la juridiction suprême n’a pas jugé dans le même sens que la
Cour d’appel. Cette dernière, malgré l’absence d’un acte authentique, avait admis la
validité de la promesse et prescrit la perfection de l’acte [35][35]CA Dakar, arrêt n°
657 du 17 décembre 2004, inédit.. La confirmation de la perfection de la vente avait
été obtenue sans que la Cour d’appel ne se prononçât directement sur la validité de
la promesse en elle-même. Ce n’est que par un raisonnement déductif que l’on
pouvait conclure que la Cour d’appel a affirmé la validité de la promesse sous seings
privés de vente d’immeuble immatriculé. Une position plus claire aurait été
bienvenue sur la qualification de la promesse synallagmatique de vente d’immeuble
immatriculé. L’importance de la question soulevée militait en cette faveur, du fait des
enjeux liés à la précision de la valeur et du régime juridiques de la promesse de
contrat en matière immobilière. Or, c’est le principe même de la validité de la
promesse de vente d’immeuble sous seings privés qui est rejeté par la Cour
suprême. Le fait que celle-ci exige qu’elle résulte d’un acte authentique imprime à la
promesse un caractère solennel. Le formalisme prescrit est un acte authentique.
3624. Suivant la solution consacrée par la Cour suprême dans la décision d’espèce,
la nullité qui sanctionne les actes sous seings privés relatifs aux immeubles
immatriculés est absolue. Mais au-delà de la consécration de la nullité absolue (A),
cet arrêt apporte une précision. La nullité est encourue non seulement par la vente
et la promesse de vente, mais également par le mandat les concernant. L’étendue de
la nullité (B) couvre donc d’autres contrats constitutifs ou translatifs de droits réels
immobiliers que la seule vente.
2 – La radicalité de la sanction
4129. Le caractère absolu de la nullité encourue est affirmé expressément par le
législateur concernant le contrat de vente. La Cour suprême l’a étendu à la promesse
et au mandat. Cette nullité, tout comme la nullité relative, prive de tout effet l’acte
qui en est affecté. Le contrat concerné est censé n’avoir jamais existé. Aucune portée
juridique n’est donc reconnue à l’acte sous seings privés qui constitue ou transfère
un droit réel portant sur un immeuble immatriculé. La protection des parties et le
contrôle des transactions immobilières sont donc privilégiés par rapport au respect de
la parole donnée qui fonde la force obligatoire des conventions. On peut comprendre
aisément que le souci de contrôle des opérations immobilières puisse justifier que la
vente soit soumise à un formalisme rigoureux sanctionné par la nullité absolue. Une
telle rigueur est-elle nécessaire, s’agissant des actes préparatoires à la vente
immobilière ?
4230. La position de la Cour peut être à l’origine de certaines difficultés. D’abord, les
actes préparatoires perdent de leur utilité s’ils doivent être passés dans les mêmes
formes que la vente. La promesse permet souvent de consigner les engagements des
parties en attendant de pouvoir passer l’acte définitif dans les formes requises. En
sus, la privation de tels actes de tout effet lorsqu’ils sont passés sous seings privés
remet en cause la sécurité des transactions en fragilisant la force obligatoire des
conventions. Il devient plus facile de se délier d’un engagement pris dans le cadre
d’une promesse de vente d’immeuble au motif que la promesse ou la procuration
établie en vue de la conclure n’a pas été faite par devant notaire. Au surplus, le fait
qu’ils soient établis par acte sous seings privés ne dispenserait pas les parties de
parfaire la vente. Celles-ci seraient obligées de conclure l’acte définitif par acte
notarié, puis d’accomplir les formalités requises, conformément aux dispositions des
articles 383 et suivants du COCC. Le contrôle des opérations immobilières serait ainsi
maintenu sur le contrat définitif de vente. La protection des parties par un acte
notarié serait pourvue efficacement au moment de la perfection de la vente.
4735. A l’examen, deux critères semblent découler des dispositions des articles 379
et suivants du COCC consacrées aux contrats relatifs aux droits réels immobiliers.
D’une part, il faut que l’acte soit qualifié de contrat, c’est-à-dire, qu’il puisse être
considéré comme un accord de volontés générateur d’obligations [57][57]Article 40,
alinéa 1er du COCC.. Ce premier critère permet d’écarter les actes juridiques
unilatéraux du champ du formalisme des actes relatifs aux droits réels immobiliers.
Contrairement au contrat, ils émanent de la manifestation d’une volonté solitaire et
peuvent, au-delà de l’obligation, faire naître d’autres effets juridiques [58][58]Cf. en
droit sénégalais, J.-P. Tosi, Le droit des obligations…. D’autre part, le contrat doit
constituer ou transférer un droit réel immobilier. Ainsi, même si c’est la vente qui est
visée par la Cour, d’autres contrats constitutifs ou translatifs de droits réels
immobiliers peuvent être compris dans le périmètre de la nullité.
4836. Ainsi, l’apport en société d’un droit réel immobilier doit également faire l’objet
d’un acte notarié. Il s’agit d’un apport en nature qui se réalise par le transfert des
droits réels correspondant aux biens apportés et par la mise à la disposition effective
de la société des biens sur lesquels portent ces droits. Il est donc bien soumis aux
dispositions des articles 379 [59][59]Article 379 du COCC : « Les contrats relatifs à
des immeubles… et suivants du COCC dans la mesure où ces dispositions ne sont pas
contraires à celles du droit uniforme africain des affaires de l’OHADA [60][60]La
supranationalité du droit uniforme africain des affaires de…. Cette formalité est
accomplie par la rédaction ou la réception des statuts de la société par un notaire.
Ainsi, si les statuts ne sont plus nécessairement établis par un notaire -ceux-ci
pouvant être simplement enregistrés auprès d’un notaire-, il en est autrement
lorsqu’un associé apporte un droit réel immobilier en pleine propriété. Dans ce cas, le
transfert doit être passé par devant notaire.
4937. L’interprétation extensive de l’article 383 du COCC dans cet arrêt permet
également de conclure à l’application du formalisme requis à la donation portant sur
des droits réels immobiliers. La donation est bien un contrat et non un acte juridique
unilatéral car il requiert un accord de volontés entre le donateur et le donataire.
Toutefois, seul le premier s’oblige, en principe, ce qui en fait un contrat unilatéral, à
moins que des charges soient stipulées pour être supportées par le second. Mais
dans tous les cas, la donation entraîne un transfert de la propriété du donateur au
donataire. Il est donc un contrat translatif de propriété. A ce titre, il doit être passé
par devant notaire à peine de nullité absolue.
5038. Il devrait en être de même d’un échange portant sur des droits réels
immobiliers. Il résulte également d’un accord de volontés et permet de réaliser le
transfert de propriété des immeubles qui en font l’objet. Comme en matière de
vente, le transfert de propriété dans l’échange se produit par l’inscription de chacun
des transferts aux titres fonciers respectifs [61][61]V. article 391 du COCC.. Même le
bail peut être inclus dans le périmètre du formalisme de l’article 383 du COCC
lorsqu’il est assorti d’une promesse de vente. Non seulement l’opposabilité aux tiers
requiert dans ce cas une inscription au titre foncier [62][62]Cf. article 390 du COCC
en ce qui concerne l’opposabilité aux…, mais la validité de la promesse est tributaire
de l’existence d’un acte notarié, suivant la jurisprudence de la Cour suprême. Certes,
dans ce cas, le formalisme est davantage lié à la promesse de vente en tant qu’acte
préparatoire.
Notes