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INGESTIONS DE CAUSTIQUE

Urgence médicochirurgicale potentiellement grave


Tentatives de suicide ++
Mortalité globale ∼ 10%
Morbidité importante : Séquelles graves et handicapantes
Gravité des lésions dépend de la nature du caustique et de la quantité ingérée
Lésions œsophagienne et gastriques +++
Pronostic dépend de la précocité de la PEC thérapeutique
 Court terme pronostic vital
 Long terme pronostic fonctionnel

PEC multi-disciplinaire
- Réanimateur – Urgentiste
- Chirurgien viscéral
- Endoscopiste (endoscopies digestive et bronchique )
• Le bilan lésionnel initial endoscopique
• Conditionne le pronostic et guide la stratégie thérapeutique
- ORL et Stomatologue
- Psychiatre +

Un produit est caustique, quand il détruit par son action chimique ou physico-chimique la
structure des tissus organiques, avec lesquels, il entre en contact

EPIDEMIOLOGIE
➢ Ingestion Volontaire 9 x/10 ( tentative d’autolyse ) :
➢ Chez l’adulte jeune (25 - 35 ans ), sujets âgés+/-
➢ Femme > homme
➢ Plus grave chez l’homme : quantité importante
➢ Association médicaments - autres caustiques
➢ Ingestion Accidentelle : chez l’enfant

Produits caustiques et mécanisme d’action

Kaddioui Nizar – Les Ingestions de Caustique


La gravité des lésions dépend :
▪ Nature du produit ingéré (acide, base, oxydant)
▪ PH : < 2 ; PH > 12
▪ Concentration
▪ Forme : liquide, solide, visqueuse, fluide, paillettes
▪ Présence d’agents tensio-actifs
▪ Temps de contact avec la muqueuse (motilité)
▪ Type d’intoxication (accidentelle ou volontaire)
▪ Quantité ingérée ( entre 150 et 200 ml )
PHYSIOPATH : 4 phases lésionnelles
Phase initiale j1 Œdème et hyperhémie muqueuse et sous-muqueuse
Ulcérations et nécroses +/- profondes
Thromboses veines muqueuses et séreuses
Stase lymphatique
Risques : hémorragie, perforation, CIVD.

Phase de détersion j2-j8 Œdème pan-pariétal : exsudation dans les séreuses


Thromboses artérielles et veineuses : ischémie et ↗
nécrose
Ulcérations : matériel fibrino-leucocytaire
Paroi digestive extrêmement fragile
Risques : perforation +++ , surinfection pulmonaire.

Phase de réparation j8-j30 Résorption de l’œdème


Prolifération fibroblastique
Tissu de granulation et bourgeons inflammatoires
Néo-capillaires
Phénomènes infectieux
Risque : sténose dès J8, perforation j14, hémorragie,
fistule.

Phase de Cicatrisation j30 à 3 mois Fibrose +++,


Si rétractile => sténose
Parfois muqueuse hyperplasique => dysplasie.

Lésions du tractus digestif


➢ Sphère bucco-pharyngée: atteinte inconstante (sévère en cas de paillette de soude)
➢ Peau : mains, visage, face antérieure du thorax
➢ Œsophage : zones de rétrécissement anatomique, cardia, bouche œsophagienne
➢ Estomac : antre
➢ Au-delà du pylore :
• Plus rare car pyloro-spasme (acides + ; Javel - )
• Atteinte par contiguïté : rate, pancréas, colon transverse...
• Péritonite

Lésions des voies aériennes


➢ Carrefour pharyngo-laryngé : épiglotte, sinus piriformes, bandes ventriculaires,
arythénoïdes, cordes vocales
➢ Filière trachéo-bronchique :
- Endoscopie bronchique systématique (IIb-III) initiale et répétée
- Αtteinte directe par inhalation ou indirecte par extension de la nécrose : faces
postérieures et médiastinales
- Nécroses-perforations-fistules trachéo-oesophagiennes
➢ Atteinte parenchymateuse : inhalation ou ingestion de substances volatiles
➢ Epanchements pleuraux : (max 1ère semaine)
PRINCIPES DE LA PRISE EN CHARGE
• Initialement
➢ Eviter les erreurs: ne pas aggraver les lésions caustiques
➢ Trt symptomatiques des détresses vitales
➢ Faire un bilan lésionnel précis
➢ PEC des effets systémiques (pour certains caustiques)
➢ Poser rapidement l’indication opératoire si nécessaire
• Secondairement
➢ Réanimation hydro-électrolytique et nutritionnelle.
➢ Surveillance des complications aiguës nécessitant un acte chirurgical différé , ou une
ré-intervention (perforations-abcès- hémorragies-fistules).
• En différé : Réparations (chirurgie, dilatations), mais pas avant 3ème mois .

Les erreurs à éviter


✓ Pas de décubitus dorsal
✓ Pas de vomissements provoqués,
✓ pas de lavage gastrique
✓ Pas de neutralisation (Antidote peros, pansement gastrique..)
✓ Pas de sonde naso-gastrique
✓ Pas de voie jugulaire ou sous-clavière gauche (abord chirurgical cervical en urgence)
✓ Pas de FOGD si suspicion de perforation digestive
✓ Pas d’intubation O.T sauf détresse vitale

Mise en conditions
 Préparation à une Fibroscopie Digestive Haute et Endoscopie Trachéo-Bronchique +/-

Ce qu’il faut faire


• Position demi-assise
• Nettoyage de la bouche au SS
• Lavage à l’eau des surfaces cutanées contaminées
• Voie veineuse périphérique (pas de jugulaire gche)
• Assurer la liberté des voies aériennes sup, Oxygénation Corticothérapie IV si œdème
laryngé
• Intubation si détresse respiratoire ou troubles sévères de la conscience
• Corriger l’hypovolémie, les troubles acido-basiques
• Premiers prélèvement sanguins : NFS, ionogramme sanguin, urée, créatinine, CPK, LDH,
calcium, phosphore, magnésium, bilan d’hémostase, recherche de toxiques, gaz du sang,
βHCG chez les femmes…
• ECG (à la recherche de stigmates de troubles ioniques, hypocalcémie, hypomagnésémie,
hyperkaliémie).
• Radio de thorax / ASP

Anamnèse minutieuse
• Nature produit, forme (solide, liquide, gel, paillettes, comprimés), concentration, quantité
ingérée (2 gorgées = 50 ml)(ingestion massive: quantité > 150 ml )
• Horaire
• Rechercher poly-intoxication associée (alcool, médicaments)
• Notion d’autolyse ++ ou accidentelle
• Profil psychiatrique (antécédents similaires, depression, psychose, rupture trt psychiatrique )
• Le produit a-t-il été avalé ou recraché ? Le patient a-t-il vomi ? Le patient a-t-il bu après
l’ingestion ?...
• Rechercher les signes cliniques de gravité
RECHERCHER LES SIGNES DE GRAVITE
Examen Clinique doit-être répété (+++)
Signes de gravité 25%
• Péritonite: défense - contracture – sonorité pré-hépatique (sphacèle et/ou perforation
gastrique).
• Hématémèses
• Emphysème s/cutané cervical (perforation œsophagienne)
• Etat de Choc : hypovolémique, septique, toxique (association +++) (marbrures)
• Hypothermie +++ ou hyperthermie
• Agitation extrême, prostration
• Troubles neuropsychiques +/-
• Détresse respiratoire: par hypoxie, acidose métabolique

Examen ORL
• Lésions ORL 40 % (épiglotte ++)
• Dyspnée laryngée, dysphonie
• Laryngoscopie indirecte +/- Nasofibroscopie
• Œdème laryngé (cède en général sous corticothérapie IV à fortes doses)
• ou Destruction du carrefour pharyngo- laryngé
 Intubation en urgence parfois difficile
 Trachéotomie si brûlures importantes

Signes Cliniques Mineurs


• Douleurs spontanées (oro-pharyngées, rétro- sternales, abdominales)
• Brûlures : cutanées péribuccales, oropharyngées
• Dysphagie
• Hypersialorrhée
• Vomissements
• Éructations

Signes biologiques de gravité


➢ Thrombopénie
➢ Stigmates de CIVD
➢ Insuffisance rénale
➢ Acidose métabolique (lactique +) (souffrance tissulaire)
➢ Lipasémie ↗ (réaction pancréatique)
➢ Hyperleucocytose
➢ Anémie

Signes radiologiques de gravité


• Radiographie thoracique
o pneumopathie d’inhalation ( Sd de détresse respiratoire)
o épanchement pleural
o emphysème s/cutané cervical, thoracique, thoraco-abdominal
o pneumo-médiastin
o pneumothorax
• A.S.P
o pneumopéritoine
o iléus reflexe
Endoscopie Digestive +++
• Incontournable et obligatoire si pas de contre-indications
• Elément diagnostique essentiel
• Détermine le pronostic et guide la PEC thérapeutique : patients nécessitant une :
- Oeso-gastrectomie en urgence
- Jéjunostomie d’alimentation
- Simple surveillance

Conditions de réalisation de la FOGD


• Délai de réalisation (entre la 3ème et la 24ème heure) : (CI > 48h) (après 3èmeh lésions
maximales pour acides et bases fortes; et à la 6ème h pour ne pas retarder une éventuelle
pec chir; à la 24ème h le max d’aggravation des lésions si eau de javel ou formol)
• Respect des contre-indications : (complications clinique-pneumomédiastin)
• Etat hémodynamique, respiratoire stables
• Endoscopiste entraîné (en présence: réanimateur et chirurgien)
• S/contrôle de vue
• Endoscope souple - faible calibre - calibre canal opérateur suffisant
• Aspiration max, sans insufflation, ni rétro-vision +++
• Pas d’AG ni AL (Risque de vomissement et inhalation)
• Rapide mais complète, description précise et stéréotypée (type de lésions, segment par
segment, motricité)

Limites de la FOGD
• Renseigne sur l ’étendue en surface des lésions et leur type mais moins bien sur leur
étendue en profondeur (risque perforatif).
• Examen à confronter aux signes généraux et locaux de gravité
• Cet examen peut difficilement être répété sans danger
La gravité des lésions digestives n’est corrélée ni à la sévérité des lésions oro-pharyngées, ni à la
symptomatologie clinique
FOGD : Classification de Di Costanzo +++

Endoscopie trachéo-bronchique
• Atteinte parenchymateuse par fausse route ou produit volatil
• 2 types de lésions par :
- Inhalation (lésions diffuses) (atteinte surtout trachée et BSD)
- Diffusion depuis l’œsophage (paroi postérieure de la trachée, BSG ou carène)
• Systématique à partir du stade IIb et III œsophagien ou devant des signes respiratoires
• Conditionne la prise en charge chirurgicale et le pronostic immédiat +++
Place de la TDM en urgence
• La tomodensitométrie avec injection PDC, est actuellement l’imagerie de choix,
permettant de visualiser les signes de perforation digestive non décelable
radiologiquement.
• Indiquée dans les stades IIIb ou devant des signes de gravité, à la recherche d’une
complication ou : pour décision d’œsophagectomie en urgence
• critères scannographique de sévérité :
• absence de prise de contraste de la paroi œsophagienne et la présence d’une
nécrose œsophagienne trans-pariétale
• épaississement de la paroi œsophagienne ou gastrique
• une infiltration de la graisse péri digestive
• un épanchement médiastinal péri-œsophagien
• la présence de bulles d’air signe la perforation digestive.
• Elle permet également de faire un bilan précis des lésions pulmonaires associées.

Attitude thérapeutique – Lésions œsophagiennes


Attitude thérapeutique - Lésions gastriques

Les stades III : 2 stratégies


• Stratégie « préventive » : chirurgie précoce systématique
→ Rationnel : éviter les complications de la nécrose
• Stratégie « conservatrice » : chirurgie précoce si signes cliniques et/ou biologiques de
sévérité.
→ Rationnel : « économie d’organe »
Confrontation per-opératoire
Limites de l’endoscopie digestive
 « Stratégie conservatrice » : stades III

AU TOTAL

Évolution des lésions caustiques


Stade Guérison spontanée
I – IIa 65%

Stade Complications secondaires (< 3 sem.)


IIb – IIIa 20-25% Hémorragies
Perforations bouchées
Infections
Fistules
Séquelles : sténoses 70% lésions stade II et III, mosaïque Base > acide

Stade Complications immédiates :


IIIb - IV Mortalité ³ 25%,
Complications pulmonaires +++
Perforation œsophagienne (spontanément mortelle)
Hémorragie digestive
Diffusion précoce de la nécrose aux organes de voisinage

Complication à long terme : Néoplasie œsophagienne


• Rare < 5-7%
• Risque 1000x > population générale
• Après 20-40 ans
• FOGD régulière/an après 20ans
• Facteur favorisant: Dilatations répétées des sténoses.
• Meilleur pronostic :
▪ Se développe souvent sur une sténose ð rapidement symptomatique ð Diagnostic +
précoce.
▪ Extension locorégionale limitée par la fibrose péri œsophagienne.
Attitude thérapeutique après endoscopie trachéo-bronchique
Systématique => risque de médiastinite mortalité ++

L’atteinte respiratoire est une contre- indication au stripping

Chirurgie de reconstruction œsophagienne


• Délai post-ingestion + 6 mois
• Bilan psychiatrique
• Examen ORL
• Préparation colique
• Coloscopie totale si âge > 65 ans

Oesophagoplastie : Interposition rétro-sternale d’un greffon : Estomac, iléo-colon droit, colon


transverse

COMPLICATIONS POSTOP PRECOCES


MEDICALES Pulmonaires/Infectieuse
• Pneumopathie
• atélectasie
• Epanchement pleural
• Pneumothorax
• Médiastinite
• SIRS
Nutritionnelles

CHIRURGICALES ▪ Péritonite
▪ Fistule cervicale
▪ Fistule intra-abdominale
▪ Nécrose du transplant
▪ Paralysie récurrentielle

COMPLICATIONS POSTOP TARDIVES


• Sténose anastomotique
• Excès de longueur cervicale
• Reflux biliaire

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