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Apple : la meilleure machine à

évasion fiscale au monde


Grâce à ses filiales irlandaises, l’une par laquelle l’argent rentre, l’autre par
laquelle il sort, Apple réussit à ne payer que 2 % d’impôt sur ses bénéfices.
Un système qui ne tombera pas sans une réelle volonté politique.
Apple, firme californienne riche à milliards, surfe sur l’ambiguïté. Championne de
l’optimisation fiscale, technique consistant à utiliser tous les moyens légaux possibles
pour échapper à l’impôt, la marque à la pomme est à l’origine de la mise en place d’un
système qui frôle parfois la ligne jaune. Et fait des adeptes. Si le géant de l’économie du
numérique était imposé en France comme n’importe quelle PME, il aurait dû s’acquitter
de 317,5 millions d’euros d’impôt sur les sociétés en 2011. Il n’en a payé que 6,7 millions.
Un record d’économies qui sont autant de recettes manquantes dans le budget de l’État.

La déréglementation fiscale qui sévit dans l’Union européenne constitue une aide
précieuse pour permettre à la multinationale d’échapper au fisc. Car Apple profite de la
complicité de l’Irlande pour payer le moins d’impôts possible. « Avec deux filiales en
Irlande, dont une domiciliée fiscalement aux Caraïbes, ce que l’on appelle le double
irlandais est la méthode phare pour éviter de payer des impôts sur les bénéfices », explique
Lucie Watrinet. La première filiale, Apple Sales International, sert à rassembler le gros du
chiffre d’affaires mondial. Les recettes de chaque iPhone, iPad ou Macbook vendu dans le
monde, à l’exception des États-Unis, y sont centralisées. Ce subterfuge permet à Apple de
déclarer en France un chiffre d’affaires 12 fois inférieur à la réalité. La seconde filiale,
présente en Irlande mais domiciliée dans un paradis fiscal des Caraïbes, permet de faire
sortir un maximum de bénéfices nets d’impôt.

Apple dispose d’un trésor de guerre de plus de


150 milliards de dollars
Entre les deux holdings irlandaises, explique Lucie Watrinet, « l’argent transite par une
filiale hollandaise, en réalité une simple boîte aux lettres et revient ensuite, net d’impôts,
vers la deuxième holding d’Apple en Irlande, Apple Opérations International ». Ce
crochet par les Pays-Bas permet au groupe de s’exonérer des taxes liées aux redevances
perçues au titre de la propriété intellectuelle (revenus liés aux brevets ou aux marques par
exemple). C’est ainsi qu’Apple réussit l’exploit de ne payer que 1,9 % d’impôt sur ses
revenus réalisés hors États-Unis. La destination finale de l’essentiel des bénéfices du
groupe c’est les îles Vierges britanniques. Un paradis fiscal dans les Caraïbes, moins
connu que les îles Caïmans mais tout aussi généreux. La multinationale y dispose d’un
trésor de guerre de plus de 150 milliards de dollars, qui continue à gonfler chaque année et
ne sert qu’à alimenter les généreux dividendes qu’Apple verse à ses actionnaires tous les
trois mois.

Pour atteindre ce record d’optimisation fiscale, Apple a négocié avec l’Irlande, en échange
de créations d’emplois, un taux d’imposition sur les sociétés d’environ 2 % dans un pays
où il est déjà agressivement bas à 12,5 %. « La Commission européenne a décidé
d’attaquer l’Irlande dans le cas d’Apple. Ce qui gêne le commissaire à la Concurrence,
c’est la possibilité pour une entreprise de négocier directement et secrètement avec un État
ses impôts. La Commission assimile cette pratique à des aides d’État illégales », explique
Lucie Watrinet. Dans une Europe minée par des choix budgétaires dévoués à l’austérité,
l’opinion critique de plus en plus la jungle des dérogations et des régimes d’exception.

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