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B 202
Angines
Étiologie, diagnostic, évolution, traitement
PR Jean-Jacques PESSEY
Service ORL et chirurgie cervico-faciale, CHU de Rangueil, 31043 Toulouse Cedex.
Points Forts à comprendre senté (11 % de la totalité des angines de l’adulte jusqu’à
50 % en période épidémique chez l’enfant). Les autres
streptocoques hémolytiques des groupes B, C et G sont
• Infection ou inflammation des amygdales plus rares. Parmi les autres bactéries, on peut retenir
palatines, l’angine aiguë est extrêmement l’association fuso-spirillaire, Corynebacterium diphtérie,
fréquente (plus de 8 millions par an, en France) Mycoplasma pneumoniæ et Arcanobacterium hæmolyticum
et dominée par le problème du streptocoque sont exceptionnellement impliqués. En ce qui concerne
du groupe A et de ses complications. Staphylococcus aureus, Hæmophilus influenzæ et
• Sachant qu’il n’existe aucune corrélation Streptococcus pneumoniæ, leur fréquence de portage
bactério-clinique, il n’est pas possible, chez l’enfant est grande et leur rôle pathogène demeure
sur la symptomatologie ou les caractères douteux.
de l’angine, de différencier les angines virales,
les plus fréquentes, des angines streptococciques.
Il est donc licite, actuellement, de traiter toutes
les angines.
Diagnostic
• L’arrivée et surtout la fiabilité des tests rapides D’une manière générale, la symptomatologie d’une
d’identification du streptocoque A devraient angine aiguë associe : une fièvre, des douleurs pharyngées
permettre, dans les années à venir, de modifier avec otalgie réflexe, une dysphagie, des modifications
cette attitude. des amygdales et de la muqueuse pharyngée.
L’examen permet ainsi de distinguer différentes variétés :
les angines érythémateuses, de loin les plus fréquentes,
les angines érythémato-pultacées et, enfin, les angines
Étiologie pseudo-membraneuses ou ulcéreuses.
Il était classique de différencier l’angine virale avec
L’oropharynx est le siège d’une flore microbienne riche amygdales érythémateuses, toux, obstruction nasale,
et variée appartenant à la flore commensale, c’est-à-dire adénopathies multiples, de l’angine bactérienne asso-
une flore constituée d’espèces non pathogènes. Elle ciant une angine érythémato-pultacée, une fièvre élevée,
constitue un degré de protection contre l’infection à des vomissements et une adénopathie en position sous-
point de départ oropharyngé. Cette flore commensale digastrique. En fait, toutes les études ont parfaitement
subit des variations quantitatives et qualitatives. montré qu’il n’y avait aucune corrélation bactério-
clinique et qu’il n’était pas possible – en dehors de
certaines situations particulières – de différencier une
Origine virale angine virale d’une angine bactérienne, notamment
en ce qui concerne les données de l’examen de l’oro-
Quarante à 80 % des angines sont d’origine virale. Les pharynx.
virus les plus fréquemment en cause semblent être : Dans certains cas, l’aspect, la topographie, le contexte
rhinovirus, coronavirus, virus de la grippe, virus para- permettent tout de même d’orienter le diagnostic et la
influenza. Parmi les autres virus, certains comportent démarche pratique.
une sémiologie particulière qui a le mérite d’être évoca-
trice : herpes simplex, coxsackie A, adénovirus, virus
d’Epstein-Barr. Angines à fausses membranes
Elles se présentent avec un dépôt fibrineux blanc grisâtre,
Origine bactérienne s’étendant vers le voile. Deux diagnostics peuvent être
retenus.
Elles sont retrouvées dans une proportion qui varie de • La mononucléose infectieuse est la cause la plus
20 à 40 % des cas au maximum : le streptocoque du habituelle actuellement en France. Il faut l’envisager
groupe A (SGA) demeure le plus fréquemment repré- devant l’association d’un purpura pétéchial du voile, une
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ANGINES
haleine fétide, des adénopathies diffuses, une Angines à adénovirus ou virus APC
asthénie, une hépatosplénomégalie. Elle est rencontrée (adenoidal pharyngeal conjonctival)
essentiellement chez l’adolescent et l’adulte jeune.
Elles s’observent dans les collectivités d’enfants et se
• La diphtérie doit être évoquée malgré la vaccination
manifestent par une fièvre modérée, une pharyngite éry-
obligatoire, susceptible de provoquer des épidémies
thémateuse avec adénopathies bilatérales ; l’élément
comme dans l’ex-Union soviétique. La fausse membrane
important, mais inconstant, est l’existence d’une
est grisâtre, adhérente, se reproduit facilement après
conjonctivite bilatérale.
exérèse et tend à s’étendre au-delà de la loge amygda-
lienne ; des adénopathies cervicales et un coryza muco-
purulent sont souvent associés à une hyperthermie à Angines des maladies infectieuses
38 °C, un malaise général et des signes toxiques. Le
prélèvement de gorge est obligatoire et montre la L’angine de la scarlatine est une angine érythémateuse
présence d’un bacille de Klebs-Loeffler. L’absence de diffuse. Il faut citer les angines de la typhoïde, de la
vaccination et (ou) le séjour en pays d’endémie sont des rubéole, de la rougeole, de la varicelle.
arguments complémentaires déterminants.
Examens complémentaires
Angine ulcéreuse
ou ulcéro-nécrotique Diagnostic microbiologique
Deux formes de cette angine peuvent être évoquées. 1. Culture du prélèvement pharyngé
• Une angine fuso-spirillaire de Vincent est favorisée,
le plus souvent, par une mauvaise hygiène bucco-dentaire. Réalisé dans 3 % des cas par les praticiens français, le
Unilatérale, elle se rencontre essentiellement chez prélèvement de gorge reste l’examen fondamental pour
l’adolescent et se présente avec une fausse membrane préciser l’étiologie de l’angine. Il est effectué par grattage
blanc grisâtre, friable, évoluant vers l’ulcération, une appuyé des 2 loges amygdaliennes, en évitant de toucher
haleine fétide ; la douleur unilatérale est intense avec la langue ou la face interne de la joue. L’acheminement
du prélèvement au laboratoire doit être rapide et réalisé
une fièvre peu importante.
dans un milieu de transport. Si l’examen direct suffit
• Les angines ulcéreuses des hémopathies sont généra-
pour le diagnostic d’angine de Vincent, il n’est que pré-
lement bilatérales associées à d’autres symptômes
somptif pour le diagnostic de diphtérie. Pour l’identifi-
(adénopathies, pétéchies, hémorragies…).
cation de streptocoques à pyogènes, la culture est la
méthode de référence. Le résultat est obtenu dans un
délai de 1 à 2 jours.
Angine vésiculeuse
2. Tests rapides d’identification du streptocoque
Elle est caractérisée par la présence d’une ou plusieurs La paroi du streptocoque du groupe A contient un poly-
vésicules complètes ou rompues donnant alors des oside C responsable de la spécificité. Le principe de ces
exulcérations minimes recouvertes d’un enduit jaunâtre tests repose sur l’extraction de cet antigène A de la paroi
et cerclées d’un halo érythémateux. Habituellement, bactérienne directement à partir de l’écouvillonnage de
ces causes sont toujours virales mais, bien entendu, une gorge. Cette méthode permet un diagnostic en moins de
surinfection bactérienne est possible. On peut indivi- 10 min au cabinet du médecin. Ces tests ne sont pas
dualiser 2 formes. encore diffusés en France pour des raisons d’ordre régle-
• L’angine herpétique est due à herpès simplex, virus mentaire et de prise en charge. Les facteurs limitants sont
type I, avec un début brutal marqué par de la fièvre, une essentiellement une extraction mauvaise et surtout un
douleur pharyngée avec odynophagie. Au début, il écouvillonnage peu chargé ou mal adapté, ce qui
existe des vésicules sur les régions amygdaliennes qui souligne l’importance de la technique de prélèvement.
peuvent confluer en éléments plus vastes à contours La spécificité de ces tests est voisine de 95 % et la sensi-
polycycliques. On peut retrouver d’autres ulcérations bilité supérieure à 90%.
sur l’ensemble de la cavité buccale et notamment les
gencives.
• L’herpangine est due à des entérovirus (coxsackie Examens biologiques ou sérologies
du groupe A) et survient surtout chez l’enfant âgé
de moins de 7 ans, en période estivale et survenant Ces examens sont à discuter, cas par cas, et n’ont qu’une
par poussées épidémiques. Les lésions vésiculeuses place minime dans le diagnostic des angines aiguës. La
siègent uniquement au niveau de l’oropharynx qui, en première indication est l’angine pseudo-membraneuse avec
se rompant, laissent des exulcérations régulières, le test de la mononucléose infectieuse (MNI). La numéra-
arrondies. La guérison spontanée survient habituel- tion formule sanguine est souhaitable dans les angines
lement en une semaine. ulcéreuses et ulcéro-nécrotiques pour éliminer une hémo-
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Oto-rhino-laryngologie
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ANGINES
Cette entité particulière résulte soit d’une récidive Du fait de l’absence de corrélation bactério-clinique,
précoce après un épisode traité, soit d’une fréquence 3 attitudes peuvent se concevoir.
anormalement élevée d’angine aiguë chez un patient
donné. On peut considérer que l’angine est récidivante à 1. Traitement antibiotique systématique
partir d’au moins 3 épisodes en 12 mois ou 5 épisodes de toutes les angines
en 2 ans. C’est l’attitude en France, puisque 90% des angines font
• L’étude du profil bactérien de ces angines récidi- l’objet d’une prescription. En fait, il est aléatoire de penser
vantes apparaît parfois difficile du fait des différences que cette attitude maximaliste a permis d’éradiquer le
entre la flore intra-amygdalienne et celle prélevée en rhumatisme articulaire aigu, puisque celui-ci avait
surface. Ces prélèvements montrent toujours un nombre régressé avant l’ère des antibiotiques et qu’il pourrait
particulièrement élevé d’espèces. Parmi ces espèces, on réapparaître si des modifications biologiques du strepto-
note la présence de streptocoque du groupe A représen- coque se produisaient. De plus, cette consommation
tant environ 20 % des causes bactériennes, mais aussi massive d’antibiotiques comporte un impact écologique
des streptocoques des groupes C et G. On peut égale- avec la possibilité de modification de flore, l’augmentation
ment retenir la présence d’Hæmophilus influenzæ, de des souches productrices de bêtalactamases, l’augmen-
Staphylococcus aureus ; la flore intra-amygdalienne se tation des résistances, sans oublier les éventuels effets
caractérisant essentiellement par la présence de indésirables et, bien sûr, le coût.
Moraxella catarrhalis, d’entérobactéries et des anaérobies
dont des fuso-bactéries. 2. Prélèvement de gorge systématique
• Les facteurs à l’origine de ces angines récidivantes pour culture et isolement
sont apparemment multiples. Les infections répétées Cette attitude, préconisée dans de nombreux pays,
engendrent des modifications anatomiques et histolo- implique un délai d’au moins 48 h pour débuter l’antibio-
giques induisant un phénomène de fibrose pouvant par- thérapie de l’angine streptococcique. Cela n’est absolu-
fois évoluer vers une amygdalite chronique. La pénétra- ment pas risqué par rapport aux complications inflam-
tion tissulaire de l’antibiotique dans l’amygdale se matoires post-streptococciques, puisqu’il a été prouvé
trouve de ce fait considérablement diminuée. Par que ce délai pouvait être de 7 à 8 jours sans majoration
ailleurs, un déséquilibre de la flore commensale apparaît du risque.
au niveau de l’amygdale. Un état bactériologique
instable, créé par la diminution de portage, notamment 3. Utilisation des tests de diagnostic rapide
de streptocoque alpha en rapport avec l’usage répété Ces tests permettraient de ne traiter que si la réponse est
d’antibiotiques, serait donc propice au développement positive.
de souches pathogènes dont le streptocoque A. Deux Compte tenu de l’implication du streptocoque du groupe
autres facteurs paraissent à l’origine de récidives : bacté- A dans 30% environ des angines aiguës, de la très faible
riologiques avec la théorie, bien que discutée, de la incidence du rhumatisme articulaire aigu en France, du
pathogénie indirecte qui résulte de l’activité lytique des caractère inconstant de l’angine et des incertitudes des
bêtalactamases sécrétée par les germes de la flore traitements reçus, il est légitime de remettre en question
commensale sur la pénicilline. On note par ailleurs le traitement systématique de toutes les angines aiguës à
depuis quelques années l’apparition de souches de condition d’utiliser les tests de diagnostic rapide.
streptocoques « tolérants » à la pénicilline ; l’inobser-
vance du traitement par la pénicilline. En effet, l’une Antibiothérapie de l’angine aiguë
des dernières hypothèses pouvant expliquer l’apparition
de réinfections après un traitement par la pénicilline • La pénicilline est l’antibiothérapie dite de « référence »,
tient à l’inobservance de l’antibiothérapie. En effet, la cible essentielle étant le streptocoque du groupe A
la posologie de cet antibiotique implique, pour assurer avec un schéma thérapeutique bien codifié :
l’éradication du streptocoque, 10 jours de traitement – pénicilline V (Oracilline) : 50 000 à 100 000 UI kg/j
à raison de 3 prises quotidiennes. Une telle posologie chez l’enfant, 1 à 3 millions chez l’adulte, 3 prises par
est rarement respectée, une fois les symptômes disparus. jour pendant 10 j;
– benzathine-pénicilline G (Extencilline), 600 000 UI
chez l’enfant de moins de 25 kg, 1,2 M au-delà,
Traitement 1 injection intramusculaire.
• L’alternative officielle en cas d’allergie aux amino-
Le problème essentiel des angines aiguës étant le strep- pénicillines est représentée par la classe des macrolides
tocoque du groupe A, l’antibiothérapie est dictée par (érythromycine-azithromycine-clarithromycine) avec
3 impératifs : prévenir le risque de complications immuno- une efficacité clinique et bactériologique identique. Le
logiques, suppurées ou toxiques ; réduire le risque de cotrimoxazole, les cyclines ne sont pas recommandées
transmission à l’entourage, améliorer plus rapidement du fait d’un taux de résistance trop élevé du strepto-
les symptômes. coque à leur égard.
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Oto-rhino-laryngologie
Amygdalectomie
Les indications de l’amygdalectomie sont actuellement
parfaitement bien codifiées : chez l’enfant, on peut retenir
la fréquence des épisodes d’angine aiguë et l’hyper-
trophie obstructive des amygdales palatines. En ce qui
concerne cette intervention chez l’enfant allergique, de
nombreuses études ont montré qu’il n’y avait aucun
argument immunologique de nature à contre-indiquer
l’amygdalectomie chez l’atopique. Il faut retenir
quelques précautions lorsqu’on porte ces indications
chez de tels sujets et notamment la nécessité d’une
confrontation entre oto-rhino-laryngologiste, pédiatre et
allergologue.
Chez l’adulte, l’amygdalectomie doit être proposée
devant des angines récidivantes, des antécédents de
phlegmon périamygdalien ou l’existence d’amygdalite
cryptique chronique. ■
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Oto-rhino-laryngologie
B 207
Cancers de l’hypopharynx
et du larynx
Épidémiologie, diagnostic, complications à long terme du traitement
DR Xavier PASQUESOONE, PR Dominique CHEVALIER
Service ORL, hôpital Huriez, CHRU 59037 Lille Cedex
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Diagnostic différentiel
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Oto-rhino-laryngologie
Facteurs prédisposants
• Le tabac reste la cause principale dans l’apparition
des cancers laryngés quel que soit l’étage considéré.
• Le rôle cancérigène direct de l’alcool reste flou.
• Un effet synergique entre le tabac et l’alcool est réel
pour les cancers sus-glottiques.
• D’autres facteurs sont évoqués : exposition prolongée
au nickel, au chrome, à l’arsenic, à l’amiante, à l’acide
sulfurique…
• Le surmenage vocal associé au tabagisme peut être
responsable de laryngite chronique, susceptible de
dégénérer. 2 Scanner cervical en coupes sagittales avec injection :
patient présentant une lésion de la face laryngée de l’épiglotte.
L’imagerie scanographique retrouve une prise de contraste
Diagnostic massive de toute la loge hyo-thyro-épiglottique.
1. Circonstances de découverte
• La dysphonie est le signe majeur de diagnostic puis- • L’imagerie par résonance magnétique est d’un intérêt
qu’elle est présente dans 95 % des cas. Toute dysphonie plus limité actuellement. Pour ne pas gêner l’interprétation
persistant plus de 3 semaines chez un patient tabagique des clichés, l’imagerie doit être, si possible, effectuée
nécessite un examen laryngé. avant l’endoscopie et les biopsies, surtout pour les
• La dyspnée traduit souvent un cancer laryngé évolué. petites tumeurs.
• La gêne pharyngée, la dysphagie, l’otalgie réflexe ou • La laryngoscopie directe complétée par une panendo-
une adénopathie cervicale métastatique sont plus rares scopie sous anesthésie générale est systématique. Elle
et plus tardives. Ces signes concernent surtout les précise l’extension locale de la tumeur en s’aidant éven-
lésions sus-glottiques et les cancers laryngés évolués. tuellement d’optique. Elle recherche une localisation
associée au niveau des voies aérodigestives supérieures.
2. Signes d’examen L’œsophagoscopie et une bronchoscopie sont souvent
• La laryngoscopie indirecte au miroir est souvent réalisées dans le même temps.
associée à la fibroscopie nasolaryngée, surtout pour les • La laryngoscopie directe permet d’effectuer les
patients dont le réflexe nauséeux est important. biopsies nécessaires au diagnostic anatomopathologique
Cet examen permet : de visualiser la topographie de la (le plus souvent ce sont des carcinomes épidermoïdes).
lésion (cordes vocales, épiglotte, sous-glotte…) ; d’appré- • Extension à distance : la radiographie pulmonaire est
cier l’aspect macroscopique de celle-ci (bourgeonnante, systématique. Au moindre doute, un scanner thoracique
ulcérante, infiltrante) ; d’étudier la mobilité laryngée de est associé. La fibroscopie bronchique peut être demandée.
la corde vocale et de l’aryténoïde. Une immobilité La fibroscopie digestive est réalisée si l’œsophagoscopie
aryténoïdienne à la toux et en phonation permet de porter au tube rigide n’a pas été possible. L’état buccodentaire
le diagnostic d’hémilarynx fixé contre-indiquant toute est toujours contrôlé. L’appréciation de l’état général et
chirurgie partielle. la recherche de tares associées sont systématiques.
• La laryngoscopie indirecte ainsi que l’examen à
l’abaisse-langue de la cavité buccale et de l’oropharynx Formes topographiques
recherchent une 2e localisation associée.
• La palpation cervicale des aires ganglionnaires est 1. Cancer glottique
méthodique. Son diagnostic est plus précoce que pour les autres
• Un schéma est réalisé au terme de cet examen préci- localisations et son pronostic meilleur.
sant la localisation tumorale, l’extension tumorale, la La tumeur concerne une ou les 2 cordes vocales. Une
mobilité laryngée bilatérale, la présence d’adénopathie extension à la commissure antérieure peut être associée.
associée. La présence d’adénopathie métastatique est rarement
La classification TNM (voir : Pour approfondir 1) est révélatrice d’un cancer glottique débutant. La mobilité
aussi utilisée. cordale et un bilan endoscopique précis sont des éléments
fondamentaux à apprécier afin de poser au mieux l’indi-
Bilan d’extension cation thérapeutique.
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Oto-rhino-laryngologie
POUR APPROFONDIR
N et M v. cancer de l’hypopharynx.
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Oto-rhino-laryngologie
CANCERS DE L’OROPHARYNX
Épidémiologie
Le cancer de l’oropharynx est particulièrement fréquent en
France où il représente 26 à 30 % des cancers des VADS.
Les régions les plus touchées sont : la Normandie, la Bre-
tagne, le Nord-Pas-de-Calais, l’Alsace. Dans le Calvados,
l’incidence atteint 58,1 pour 100 000 habitants.
C’est une tumeur qui touche l’homme dans 90 à 92 % des
cas ; l’incidence est de 60,8/100 000 chez l’homme, de
2,9/100 000 chez la femme. Depuis quelques décennies, la
fréquence augmente chez la femme.
L’âge moyen de découverte est inférieur à 60 ans. Le dia-
gnostic est plus précoce que dans les localisations pharyn-
golaryngées : près de 50 % des tumeurs sont dépistées avant
55 ans.
Les facteurs de risque sont habituels.
Le tabac agit par brûlure chronique, par ses composants 4
Oropharynx. Vue postérolatérale.
toxiques, la nicotine et par ses facteurs carcinogènes que 1 - Amygdale ; 2 - Loge amygdalienne ; 3 - Pilier antérieur
sont les hydrocarbures. Le risque augmente avec la concen- 4 - Pilier postérieur ; 5 - Voile ; 6 - Luette ; 7 - Base de langue
tration en goudrons. Une prédisposition génétique à l’ef- 8 - Fosse sous-amygdalienne ; 9 - Vallécule ; 10 - Langue mobile.
Complications du traitement
Le traitement peut associer chirurgie-radiothérapie-
chimiothérapie (voir : pour approfondir / 2). La surveillance
régulière, trimestrielle les 2 premières années, est indis-
pensable. Elle est avant tout clinique. Une endoscopie doit
être proposée au moindre doute, complétée d’une tomo-
densitométrie qui est d’interprétation délicate compte tenu
des remaniements post-physiothérapiques et (ou) chirur-
gicaux. La radiographie pulmonaire est annuelle, de prin-
cipe. La surveillance doit être prolongée, tous les 6 mois
jusqu’à 5 ans, puis annuelle pour déceler une récidive tar-
dive, une deuxième localisation, ou l’apparition de méta-
stases (voir : pour approfondir / 3, 4). Elle a pour rôle éga-
5 lement de dépister les complications du traitement qui
Modalités d’extension des cancers de la loge amygdalienne.
1 - Vers la commissure intermaxillaire peuvent survenir à long terme.
2 - Vers le plancher buccal
3 - Vers la base de langue et la langue mobile Complications de l’irradiation
4 - Vers la fosse sous-amygdalienne et sillon glosso-épiglottique Les complications de l’irradiation sont de gravité variable.
5 - Vers la paroi postéro-latérale Le problème des caries dentaires doit bénéficier d’une pré-
6 - Vers le voile vention : soins et extractions dentaires avant l’irradiation,
7 - Vers le rhinopharynx protection fluorée à vie par gouttières après la radiothéra-
pie. Le cicatrisation gingivale doit être complète avant le
début des rayons ; les extractions dentaires post-irradiation
doivent être discutées et imposent une antibiothérapie pro-
longée.
sation de corps étranger. La douleur est plus tardive, liée à Le trismus post-radique, dû à une sclérose musculaire, est
l’extension latérale. La voix est parfois modifiée, nason- rare mais invalidant, et il rend la surveillance clinique dif-
née ; le reflux des liquides par le nez, lors de la déglutition, ficile.
est lié à une infiltration profonde ou à une vaste ulcération. Le risque de sténose carotidie n’est pas chiffré ; c’est une
La lésion peut être serpigineuse, faussement superficielle, complication tardive de l’irradiation sur un terrain prédis-
bourgeonnante ou ulcérante amputant le voile et la luette. posé athéromateux du patient alcoolo-tabagique.
L’extension est facile à apprécier vers les loges amygda- L’ostéoradionécrose mandibulaire est une complication
liennes ou le palais; l’extension à la face postérieure du redoutable qui peut survenir à tout moment de l’évolution,
voile et au rhinopharynx n’est mise en évidence qu’à l’en- même tardivement. Elle est associée à une nécrose
doscopie. muqueuse, voire cutanée. Son évolution est térébrante et
Les adénopathies sont plus rares, de 30 à 44 %, bilatérales son traitement est difficile, avant tout préventif. Elle néces-
dans 9 à 13 % des cas, de siège sous-digastrique. site un traitement médical par antibiothérapie prolongée,
associée à une oxygénation hyperbare. L’ablation d’un
Cancers de la base de langue séquestre osseux doit être prudente et parcimonieuse. Elle
peut imposer une résection osseuse plus ou moins étendue
Ils sont de révélation tardive. La sensation de gêne pha- nécessitant alors des reconstructions par des lambeaux bien
ryngée est peu évocatrice. L’odynophagie, les otalgies uni- vitalisés.
ou bilatérales, une dysphagie, une voix étouffée, associée
à une hypersialorrhée sont plus évocatrices. L’adénopathie Complications de la chirurgie
est révélatrice dans un tiers des cas. Elles sont plus fréquentes en chirurgie de rattrapage. Les
Le diagnostic échappe à l’examen clinique endobuccal surinfections bronchopulmonaires sont habituelles et jus-
simple et nécessite un examen spécialisé par l’ORL. tifient une trachéotomie temporaire, ce d’autant que la
La lésion revêt un aspect bourgeonnant infiltrant ou ulcé- reprise de la déglution est aléatoire, en fonction de l’im-
rant ; la palpation est indispensable pour évaluer l’infiltra- portance de la résection.
tion de même que l’étude de la protraction linguale. Les complications locales à type de désunion simple voire,
L’extension latérale vers les loges amygdaliennes sera aisé- d’orostome, plus fréquentes en terrain irradié doivent être
ment évaluée de même que l’extension basse vers l’épi- prévenues par une hémostase soigneuse et une décontami-
glotte. L’extension antérieure vers la langue mobile est fré- nation du lit d’exérèse avant fermeture chirurgicale. La
quemment sous-estimée et nécessite un scanner. désunion muqueuse expose l’axe vasculaire avec risque de
L’envahissement ganglionnaire est important (60 % dès le rupture carotidie. Les techniques de reconstruction par
premier examen). L’extension ganglionnaire est bilatérale lambeaux musculo-cutanés permettent de protéger les vais-
Points Forts à retenir tion cisplatine, 5-fluorouracile. Elle peut être proposée en néoadjuvant
ou associée à l’irradiation. Même s’il existe des régressions tumorales
spectaculaires, la preuve de son efficacité sur la survie n’est pas faite.
Dans les lymphomes, la chimiothérapie est le traitement approprié, asso-
• Les cancers de l’oropharynx sont fréquents ciée à une irradiation de modalité particulière.
(30 % des tumeurs malignes de la VADS) Les indications, difficiles, doivent être adaptées à chaque cas en fonc-
survenant électivement chez l’homme tion de la tumeur (stade TNM, siège, caractères histologiques, aspect
de 55 à 60 ans. macroscopique et extensions) du degré d’envahissement ganglionnaire et
du terrain (l’état général, les antécédents, la motivation du patient et les
• Alcool et tabac jouent un rôle majeur possibilités de suivi sont à prendre en compte). Les tumeurs peu diffé-
et cumulatif dans la genèse de ces cancers. renciées, radiosensibles relèvent d’une radiothérapie première ; les
• Le diagnostic devrait être plus précoce tumeurs bien différenciées, à l’exception des tumeurs volumineuses, sont
car ils sont accessibles à un examen clinique traitées par chirgurgie suivie d’irradiation.
Les formes exclusivement bourgeonnantes peuvent bénéficier d’une irra-
standard. diation exclusive ; les formes ulcérantes et (ou) infiltrantes relèvent d’un
traitement chirurgical.
La taille de la lésion et son extension peuvent contre-indiquer l’acte chi-
POUR APPROFONDIR rurgical. Les caractéristiques tumorales dominent l’indication thérapeu-
tique quel que soit le statut ganglionnaire ; toutefois, l’existence d’un volu-
mineux ganglion fixé en profondeur impose une irradiation première.
1 / Anatomopathologie Pour les tumeurs d’origine salivaire : le carcinome adénoïde kystique et
des cancers de l’oropharynx tumeurs muco-épidermoïdes développées essentiellement au niveau du
La tumeur peut se développer sur une lésion bénigne à risque telle une voile, relèvent d’une chirurgie d’exérèse suivie d’irradiation. L’évolution
leucoplasie, une érythroplasie, ou un lichen plan. de ces tumeurs est lente mais imprévisible ; elles sont classiquement de
La forme histologique habituelle est le carcinome épidermoïde bien dif- malignité atténuée ; le taux de survie varie de 50 à 75 % à 5 ans.
férencié, kératinisant dans 70 % des cas ; les formes peu différenciées Les plasmocytomes de l’amygdale sont traités par radiothérapie.
représentent 15 % et se développent plutôt au contact des formations lym- Les lymphomes malins non hodgkiniens bénéficient d’une chimiothéra-
phoïdes. Le carcinome in situ est une forme initiale qui respecte la mem- pie associée selon le stade à une radiothérapie à 40-45 Gy. Leur taux de
brane basale de l’épithélium. Deux formes particulières peuvent être survie est de l’ordre de 30 à 40 % à 5 ans.
retrouvées : le carcinome à cellules fusiformes ou sarcomatoïde, rare, et
le carcinome verruqueux exophytique, hyperkératinisé, peu infiltrant de
pronostic plus favorable. 3 / Pronostic
Les lymphomes représentent 15 % des tumeurs oropharyngées, dévelop- des cancers de l’oropharynx
pées aux dépens des amygdales pharyngées ou basi-linguales. Les carci- Le pronostic des tumeurs épidermoïdes de l’oropharynx est médiocre,
nomes indifférenciés de type nasopharyngé peuvent se développer aux variable selon la localisation, la taille de la tumeur. Les récidives locales
dépens du tissu amygdalien. D’autres formes histologiques peuvent être représentent la première cause d’échec : elles apparaissent dans les 2 ans
retrouvées : tumeurs malignes à point de départ salivaire (adénocarci- après le traitement. Les récidives ganglionnaires sont en règle associées
nome, tumeur muco-épidermoïde, carcinome adénoïde kystique), méla- à une récidive locale.
nome muqueux, plasmocytome, sarcome. D’une manière générale :
Les carcinomes peu différenciés et les lymphomes sont proportionnelle-
– les tumeurs végétantes ont un pronostic meilleur que les tumeurs ulcéro-
ment plus fréquents chez la femme.
infiltrantes ;
– les tumeurs peu différenciées sont plus radiosensibles ;
– la lyse osseuse est un facteur de mauvais pronostic ;
2 / Traitement des cancers – le pronostic est plus sombre dans certaines localisations telles que base
de l’oropharynx de langue, sillon amygdaloglosse, commissure intermaxillaire ;
– les récidives locales sont plus fréquentes dans les épithéliomas bien dif-
La radiothérapie transcutanée par télécobalt peut être utilisée seule pour férenciés ;
le traitement de la tumeur et des ganglions. L’électronthérapie peut être – le volume tumoral et la diffusion ganglionnaire exposent aux récidives
utilisée en complément pour obtenir un surdosage localisé. La dose déli- locorégionales ;
vrée est de l’ordre de 65 à 75 Gy sur la tumeur primitive et de 50 à 70 Gy – la fréquence des métastases est liée à la taille de la tumeur et à l’enva-
sur les aires ganglionnaires cervicales. La radiothérapie postopératoire hissement ganglionnaire ;
délivre des doses moindres adaptées à la qualité de l’exérèse histologique – les deuxièmes localisations sont fréquentes ;
ou le degré d’envahissement ganglionnaire. – les lymphomes ont un meilleur pronostic que les carcinomes épider-
La curiethérapie interstitielle, utilisée en complément de l’irradiation moïdes.
transcutanée, permet de diminuer la dose reçue par les tissus sains, man- Les métastases sont pulmonaires dans environ la moitié des cas ; elles
dibule, voûte palatine notamment. sont présentes dans 10 % dès le premier examen. Les métastases osseuses
La chirurgie peut être proposée en première intention ou en rattrapage (22 %) ou hépatiques (6 %) sont plus rares. Le risque métastatique est
après irradiation. Sur la lésion, la chirurgie par voie endobuccale a des fonction du siège de la tumeur, de sa taille et du degré d’envahissement
indications limitées. La buccopharyngectomie transmaxillaire, avec sacri- ganglionnaire.
fice osseux, effectuée par voie externe, permet de réaliser de vastes exé- La fréquence de deuxième cancer des VADS grève encore le pronostic :
rèses sous contrôle de la vue. Elle peut être élargie à la demande en fonc- 20 % pour les cancers de la loge amygdalienne.
tion des infiltrations. Elle implique le plus souvent une reconstruction par
lambeau musculo-cutané pour couvrir la perte de substance et assurer la 4 / Survie des cancers épidermoïdes
protection de l’axe vasculaire jugulo-carotidien.
Le déficit fonctionnel et esthétique lié à la résection mandibulaire est
de l’oropharynx
acceptable ; toutefois, on tend de plus en plus à réaliser cette intervention Survie globale quels que soient T et N
avec une simple mandibulotomie médiane ou para-médiane avec ostéo-
Loge amygdalienne 39 % à 3 ans
synthèse.
26 % à 5 ans
Sur les aires ganglionnaires, on réalise soit un curage partiel avec examen
histologique extemporané en l’absence de ganglion, soit un curage cervi- Voile du palais 30 à 40 % à 5 ans
cal complet fonctionnel ou radical en fonction de la taille ou des ganglions. Base de langue 12 % à 5 ans
La chimiothérapie pour les épithéliomas épidermoïdes utilise l’associa- Paroi postérieure 15 % à 5 ans
Cancers du rhinopharynx
et de l’oropharynx
Épidémiologie, diagnostic, complications à long terme du traitement
Pr Danièle DEHESDIN, Dr Florence MOREAU-LENOIR
Service ORL et chirurgie cervico-faciale, CHU, hôpital Charles-Nicolle, 76031 Rouen cedex
CANCERS DU RHINOPHARYNX rieur du pharynx en bas. Elle est caractérisée par la présence
de l’orifice tubaire. Il faut souligner la proximité de la caro-
tide interne qui peut n’être qu’à 2 ou 3 mm du fond de la
Points Forts à comprendre fossette de Rosenmüller lorsque celle-ci est profonde.
Le drainage lymphatique s’effectue au départ d’un riche
plexus pré-tubaire vers les ganglions spinaux et jugulo-
Le cancer du cavum s’individualise des autres digastriques directement ou par l’intermédiaire des gan-
cancers de la voie aéro-digestive supérieure : glions rétro-pharyngiens et ce, de façon bilatérale.
• sur le plan histologique, il s’agit en règle
de carcinomes ;
• sur le plan épidémiologique, le cancer
du rhinopharynx a une répartition géographique
particulière : le sud de la Chine et l’Asie du Sud-
Est sont des régions véritablement endémiques ;
• sur le plan étiologique car il existe un lien étroit
entre cancer du cavum et virus lymphotrope
d’Epstein-Barr.
Rappel anatomique
Le nasopharynx s’ouvre en avant sur les fosses nasales,
surplombe l’oropharynx par l’intermédiaire du voile du
palais, entre en rapport avec l’oreille moyenne par les
trompes auditives, et répond au-dessus à la base du crâne. 1
Sa paroi postéro-supérieure, osseuse, est appelée toit du Schéma de profil du rhnopharynx.
cavum et mur postérieur. Elle est tapissée par la tonsille 1 - Sphénoïde
pharyngée et dessine une arche de courbure variable. Celle- 2 - Sinus sphénoïdal
3 - Fosse nasale
ci correspond à la base de l’occiput doublé des muscles 4 - Cornets
longs de la tête, au sphénoïde creusé des sinus sphénoï- 5 - Tonsille ou amygdale pharyngée
daux, à l’arc antérieur de l’atlas qui forme la limite infé- 6 - Torus ou bourrelet tubaire
rieure arbitraire du cavum et aux apex pétreux. 7 - Orifice pharyngien de la trompe auditive
La paroi latérale est musculo-aponévrotique : muscles élé- 8 - Voile
vateurs et releveur du voile en haut, muscle constricteur supé- 9 - Oropharynx
Épidémiologie Diagnostic
Le répartition géographique et ethnique est tout à fait par- Le cancer du rhinopharynx se développe en règle dans
ticulière pour les tumeurs du rhinopharynx (voir : pour l’angle postéro-latéral du cavum, au-dessus et en arrière de
approfondir / 1). L’incidence est variable selon la popula- l’orifice tubaire, zone d’accès difficile pour l’examen cli-
tion concernée. nique standard. L’extension locale aux structures osseuses
En Europe et en France en particulier, ces tumeurs sont voisines rend compte d’une symptomatologie d’appel
rares avec une incidence de 0,1 à 0,5 pour 100 000 habi- trompeuse. La dissémination ganglionnaire est souvent au
tants où elles concernent en règle une population maghré- premier plan ; les métastases à distance sont présentes dans
bine immigrée. Elles ne représentent que 1 à 3 % des can- 10 % des cas dès le premier examen.
cers de la voie aérodigestive supérieure (VADS).
Ce cancer affecte essentiellement l’homme : la répartition Clinique
est de 2 à 3 hommes pour une femme. La répartition selon
l’âge varie en fonction de la répartition géographique. L’association des signes rhinologiques, otologiques et gan-
glionnaires est rarement complète et ne permet d’établir le
diagnostic qu’après un délai de 8 à 10 mois.
Étiopathogénie Les adénopathies cervicales, dont la situation haute et pos-
Les études actuelles ne permettent pas de conclure sur térieure spinale est très évocatrice, sont volontiers bilaté-
l’existence d’un facteur génétique à l’heure actuelle. rales et représentent dans un tiers des cas le motif initial de
Aucun facteur environnemental ne peut être formellement consultation.
retenu. L’hypoacousie progressive de transmission unilatérale,
Tabac et alcool sont exclus. Les nitrosamines issues des associée à une autophonie, à une sensation de plénitude de
poissons séchés, les euphorbiacées tirées de la pharmaco- l’oreille et à des acouphènes, doit alerter avant d’envisager
pée chinoise (huile de ricin) sont deux facteurs plus parti- la pose d’un aérateur transtympanique.
culièrement incriminés, mais leur mode d’action n’est pas L’obstruction nasale uni- ou bilatérale avec rhinorrhée,
prouvé : action directe ou par réactivation d’une infection voire épistaxis, n’est guère caractéristique.
latente par le virus Epstein-Barr (EBV). L’extension de contiguïté exo- ou endocrânienne peut
Les facteurs immuno-virologiques sont encore incomplè- conduire à l’atteinte des nerfs crâniens ; une diplopie par
tement élucidés ; toutefois, il existe un lien étroit entre car- atteint du VI, des névralgies faciales atypiques dans le ter-
cinome naso-pharyngé de type indifférencié (UNCT) et ritoire du V ou du IX, un trismus par atteinte du V ou exten-
EBV sans influence de l’origine géographique des patients. sion aux muscles ptérygoïdiens.
Ce lien découvert de façon fortuite est prouvé sur l’exis- Ces atteintes neurologiques peuvent être uni- ou bilatérales
tence du génome EBV (ADN libre) dans les cellules épi- par compression ou envahissement.
théliales tumorales et sur un profil sérologique particulier Elles peuvent être isolées ou regroupées pour réaliser : un
des patients atteints du carcinome nasopharyngé. syndrome de la fente sphénoïdale avec atteinte des nerfs
L’élévation du taux d’anticorps immunoglobulines (Ig)G oculo-moteurs et du trijumeau ; le syndrome de l’apex orbi-
et IgA anti-EBV permet la distinction entre sujets sains ou taire est suspecté devant une amaurose ; un syndrome du
atteints d’un cancer de la VADS et les patients porteurs sinus caverneux entraîne une exophtalmie avec atteinte de
d’une tumeur du rhinopharynx. l’oculomotricité et du V1 ; l’atteinte des IX, X et XIe paires
Cette réactivité EBV est spécifique du cancer nasopharyngé crâniennes réalise un syndrome du trou déchiré postérieur ;
indifférencié. Elle permet en zone d’endémie un diagnos- l’envahissement sous-parotidien postérieur est révélé par
tic précoce de dépistage et pourrait contribuer de façon spé- l’atteinte des nerfs mixtes, du XII et du sympathique cer-
cifique au suivi post-thérapeutique. vical.
L’examen neurologique doit donc être complet et métho-
Anatomo-pathologie dique pour reconnaître l’extension tumorale périnerveuse
ou dépister une simple compression par une adénopathie
(voir : pour approfondir / 2) cervicale haute.
Les carcinomes malpighiens représentent 80 % des tumeurs L’examen clinique nécessite un examen soigneux du cavum
du rhinopharynx. devant tout symptôme ORL ou neurologique.
Les adénocarcinomes, cylindromes ou tumeurs muco-épi- Il comprend une rhinoscopie antérieure après rétraction de
dermoïdes sont rares et sans particularité au niveau du rhi- la muqueuse à l’aide de tampons imbibés de Xylocaïne-
nopharynx. naphazolinée. Cette rhinoscopie est actuellement au mieux
Les lymphomes développés aux dépens du tissu lymphoïde réalisée à l’aide d’optiques.
spécifique ou amygdale pharyngée représentent 10 à 15 % La rhinoscopie postérieure indirecte est effectuée à l’aide
des tumeurs du nasopharynx en Europe occidentale. Leur de miroir ; elle reste difficile et incomplète et rend la naso-
architecture est particulière, de forme diffuse, à grandes fibroscopie indispensable.
cellules. L’examen clinique doit être complété par un examen des
Chez l’enfant, le rhabdomyosarcome n’est pas exception- tympans sous microscope et insufflation. La tympanomé-
nel. trie apporte des arguments complémentaires pour une otite
Chez l’enfant, selon le volume irradié et les doses utilisées, 2 / Classification OMS (1978) des cancers
peuvent être observées des séquelles sur la croissance du du rhinopharynx
massif facial ou des séquelles endocriniennes par insuffi- Type I : carcinome malpighien spinocellulaire bien différencié avec ponts
sance somatotrope (dose supérieure à 30 Gy sur l’hypo- intercellulaires et kératinisation.
physe). Son agressivité est surtout locale ; son profil sérologique est différent : le
Sur ce terrain, il faut encore souligner la possibilité de can- taux d’anticorps anti-EBV est bas.
cers radio-induits. Type II : carcinome non kératinisant. Il est en règle assimilé aux carci-
De ce fait, on tend à l’heure actuelle chez l’enfant à limi- nomes indifférenciés de type nasopharyngé.
ter les indications d’irradiation, à réduire les volumes irra- Type III : carcinome indifférencié de type nasopharyngé, caractérisé sur
diés, à diminuer les doses d’irradiation grâce à une chi- le plan histologique par un aspect syncytial et non pavimenteux consti-
tué d’amas tumoraux irréguliers au sein d’un stroma lymphoïde. Ses carac-
miothérapie préalable. téristiques cytologiques et histologiques sont particulières à la localisa-
En dehors de certaines localisations, les cancers de l’oro- tion nasopharyngée. Son profil sérologique EBV est spécifique. Le
pharynx sont accessibles à un examen simple : l’examen lympho-épithéliome lui est rattaché.
endobuccal à l’abaisse-langue. Les techniques immuno-histochimiques et la sérologie EBV sont des élé-
Les signes d’appel sont pauvres, banals, expliquant bien ments indispensables au diagnostic de ces tumeurs non ou peu différen-
souvent le diagnostic tardif d’une tumeur déjà évoluée. ciées.
Corps étrangers
des voies aériennes
Diagnostic et traitement
PR Laurent GILAIN, DR Christophe GUICHARD
Service d’ORL et de chirurgie cervico-faciale, hôpital G.-Montpied, 63003 Clermont-Ferrand Cedex 01.
Points Forts à comprendre des cas). Le risque diminue ensuite pour de nouveau
augmenter vers 6-8 ans (petits jouets). Il existe une prédo-
minance masculine (2 garçons pour 1 fille). Chez l’adulte,
• L’inhalation accidentelle d’un corps la fréquence de l’accident augmente avec l’âge et sur-
étranger résulte de la mise en défaut du réflexe vient à partir de la 7e décennie. Un terrain prédisposé
protecteur des voies aériennes. (maladie neurologique) favorise ce type d’accidents.
• La majorité des corps étrangers sont observés
chez l’enfant entre 1 et 3 ans car celui-ci explore
l’environnement en portant plus facilement les Localisation
objets à sa bouche, il devient plus indépendant
et l’alimentation devient plus solide. La localisation du corps étranger est dans la majorité des
• L’inhalation est généralement provoquée cas bronchique mais elle peut être laryngée ou trachéale.
par une inspiration brusque et profonde Elle est fonction de la nature et de la taille du corps
ou lors du rire ou des sanglots. étranger mais également de la position du patient lors de
• La localisation bronchique des corps étrangers l’inhalation. La localisation laryngée est rapportée dans
est la plus fréquente (environ 90%). 1 à 5% des cas, trachéale dans 6 à 13% des cas et bron-
• Le cheminement dans les voies aériennes chique dans 86 à 91 % des cas. La localisation laryngée
d’un corps étranger est toujours marqué se voit chez l’enfant de moins de 1 an, principalement en
par un syndrome clinique de forte valeur raison du calibre du corps étranger ne pouvant franchir
diagnostique : le syndrome de pénétration. la sous-glotte. Cependant la rareté de cet accident avant
• Plusieurs situations cliniques résultent 1 an doit faire évoquer systématiquement un corps étran-
du niveau de blocage du corps étranger ger donné intentionnellement. En cas de localisation
et de son éventuelle mobilité dans l’axe aérien. bronchique, c’est la bronche souche droite qui serait la
• Le corps étranger laryngo-trachéo-bronchique plus exposée en raison de son plus grand calibre et de
avec son risque potentiel d’asphyxie aiguë est son angle plus ouvert avec la trachée.
une urgence vitale. Le corps étranger des fosses nasales touche essentielle-
ment l’enfant (voir : Pour approfondir).
L A R E V U E D U P R AT I C I E N 2 0 0 0 , 5 0 433
CORPS ÉTRANGERS DES VOIES AÉRIENNES
434 L A R E V U E D U P R AT I C I E N 2 0 0 0 , 5 0
Oto-rhino-laryngologie
mettre en évidence le corps étranger si celui-ci est radio- devenant intense, suivie d’une perte de connaissance
opaque (environ 10 % des cas). Des signes indirects reflétant l’anoxie cérébrale. Le risque de décès immé-
d’obstruction peuvent être retrouvés avec typiquement diat par asphyxie doit conduire à la réalisation de la
emphysème pulmonaire unilatéral et atélectasie localisée manœuvre de Heimlich qui est la seule dans cette situa-
d’un lobe ou de tout un champ pulmonaire. L’emphy- tion à pouvoir aboutir à l’expulsion du corps étranger. La
sème obstructif est bien mis en évidence par la compa- réalisation d’une trachéotomie en extrême urgence – si
raison des clichés de face du thorax en inspiration et en l’on dispose du matériel nécessaire et d’un praticien
expiration. La radiographie peut également montrer un capable techniquement de la réaliser sans délai – est une
pneumothorax localisé adjacent à un lobe collabé ce qui autre possibilité. Les autres manœuvres d’extraction
traduit un signe d’obstruction bronchique. (manuelle, mobilisation de l’enfant…) ne sont pas
conseillées. L’urgence est absolue et il faut d’emblée
2. Diagnostic tardif de corps étranger choisir les gestes ayant une chance d’être immédiate-
des voies aériennes ment les plus efficaces.
Le syndrome de pénétration est passé inaperçu ou n’est
pas signalé par l’entourage. Le tableau clinique est varié Diagnostic différentiel
et dominé par les signes bronchiques. C’est devant la
persistance ou les récidives d’un tableau bronchopulmo- Le corps étranger des voies aériennes est le premier
naire subaigu ou chronique chez l’enfant que le diagnostic diagnostic à envisager devant un trouble respiratoire
de corps étranger bronchique doit être évoqué. Un syn- d’installation brutale. On élimine :
drome de pénétration fruste dans les antécédents ou la • une laryngite aiguë sous-glottique marquée par le
notion d’une situation antérieure à risque (apéritif) doivent début nocturne, la toux rauque, la voix claire, une bra-
être systématiquement recherchés par l’interrogatoire de dypnée inspiratoire avec cornage;
l’entourage. Les formes cliniques sont variées. • une épiglottite marquée par un tableau infectieux, une
• Les bronchopneumopathies récidivantes sont latéra- hypersalivation avec dysphagie;
lisées à un seul côté. • une crise d’asthme avec sémiologie expiratoire, disten-
• La bronchite asthmatique rebelle est résistante au sion à la radiographie et antécédents;
traitement. • un corps étranger œsophagien pouvant par compression
• La toux rebelle, résiste au traitement et ne fait pas la donner une symptomatologie respiratoire chez le petit
preuve de son étiologie. enfant. En cas de bronchoscopie négative, l’examen
• D’autres cas sont l’hémoptysie par perforation bron- doit être complété par un contrôle œsophagien.
chique, l’abcès du poumon, la pleurésie au contact
d’une pneumopathie. Conduite à tenir et traitement
• Un cas particulièrement trompeur est représenté par
un corps étranger bronchique mobile obstruant alternati- Ils sont conditionnés par la gravité du tableau clinique et
vement les 2 bronches et provoquant une symptomatolo- la tolérance ventilatoire. Le traitement des corps étrangers
gie bronchopulmonaire à bascule. consiste en leur extraction, soit par des manœuvres
• L’examen radiographique peut visualiser le corps d’urgence, soit le plus souvent par la bronchoscopie en
étranger s’il est radio-opaque. Il montre principalement milieu spécialisé. Plusieurs situations sont à considérer.
des images de retentissement parenchymateux et pleural
du corps étranger. Les images sont variées à type d’até- Urgence vitale marquée
lectasie, de pneumothorax localisé ou de pleurésie. Elles par un syndrome asphyxique aigu
ne sont pas spécifiques d’un corps étranger. C’est leur
persistance ou leur récidive après traitement qui doit L’objectif prioritaire est la liberté des voies aériennes.
faire évoquer le diagnostic.
• Des séquelles ventilatoires peuvent être observées en 1. Avant l’arrivée des secours médicalisés
cas d’extraction tardive d’un corps étranger. Plusieurs La manœuvre de Heimlich représente un geste simple
facteurs favoriseraient les séquelles bronchiques dont la de réanimation ventilatoire. Elle permet la désobstruction
nature végétale du corps étranger, la localisation bronchique des voies aériennes supérieures obstruées par l’enclave-
gauche et surtout l’ancienneté de l’inhalation (durée > 15 j). ment d’un corps étranger. Cette manœuvre n’est réalisable
que si l’obstruction est totale. Elle est indiquée en cas de
3. Syndrome asphyxique aigu risque vital imminent et en l’absence d’autres moyens
Les signes d’asphyxie s’installent soit d’emblée et de réanimation ventilatoire immédiatement disponibles.
immédiatement après le syndrome de pénétration soit à • Mode d’action : cette manœuvre consiste à exercer
distance suite à un déplacement puis un enclavement une forte pression de bas en haut sur le diaphragme à
secondaire du corps étranger dans le larynx ou la trachée. travers la paroi abdominale provoquant une hyperpression
L’histoire est souvent évidente du fait de l’existence de l’air contenu dans les poumons et les bronches. La
d’un syndrome de pénétration et du caractère brutal de force pressionnelle permet l’éjection du corps obstruant.
l’installation de la détresse respiratoire aiguë. La gravité C’est l’augmentation de la pression d’air qui crée l’énergie
du tableau est marquée par l’apparition d’une cyanose cinétique nécessaire à l’expulsion du corps étranger.
L A R E V U E D U P R AT I C I E N 2 0 0 0 , 5 0 435
CORPS ÉTRANGERS DES VOIES AÉRIENNES
• Réalisation : placé en arrière du sujet asphyxique (enfant • Après extraction du corps étranger par bronchoscopie,
assis sur les genoux, adulte debout ou assis) le sauveteur une vérification par fibroscopie souple de la totalité de l’ex-
pratique une compression brusque du creux épigastrique, traction est parfois réalisée, en particulier si l’extraction a
de bas en haut, main gauche posée à plat sur son poing nécessité une fragmentation du corps étranger (corps étran-
droit fermé. Il est parfois nécessaire de répéter plusieurs fois gers végétaux avec migration vers les petites bronches).
la manœuvre pour libérer la voie respiratoire. Chez l’enfant, L’hospitalisation postopératoire est courte, conditionnée
il faut diminuer la force du choc sous-diaphragmatique par le traitement éventuel de complications. La prescription
car le risque de traumatisme hépatique est important. d’une antibiothérapie et d’une corticothérapie brève est
• Contre-indications : elles sont représentées par toutes conditionnée par l’existence éventuelle de lésions muqueuses
les autres situations d’inhalation d’un corps étranger. En ou de sécrétions trachéobronchiques muco-purulentes.
particulier, la manœuvre de Heimlich pratiquée sur une
obstruction partielle risquerait de mobiliser le corps Corps étranger ancien
étranger et de l’enclaver dans l’espace sous-glottique
provoquant l’obstruction totale du passage aérien. L’extraction du corps étranger s’effectue par broncho-
• Après la manœuvre, il faut vérifier si l’enfant respire scopie rigide suivant une technique classique. Parfois,
ou non, dégager les voies aériennes en vérifiant si le une antibiothérapie et une corticothérapie peuvent être
corps étranger est extractible sous contrôle de la vue et prescrites 24 à 48 h avant l’examen endoscopique. ■
débuter si nécessaire une ventilation artificielle. En cas
d’échec, la manœuvre de Heimlich est renouvelée en POUR EN SAVOIR PLUS
attendant les secours médicalisés.
Grany JC, Monrigal JP, Dubin J, Preckel MP, Tesson B. Corps
2. À l’arrivée des secours médicalisés étrangers des voies aériennes. Société française d’anesthésie-
réanimation (SFAR). Rapport 1999 : 765-86.
La laryngoscopie est le 1er geste accompagné de l’oxygé- Le Pajolec C, Bobin S. Corps étrangers laryngo-trachéo-bronchiques.
nation. Elle peut visualiser le corps étranger et permettre In : Garabedian EN (ed). ORL de l’enfant. Paris : Flammarion, 1996 ;
son extraction par une pince de Magill de petite taille 29 : 229-32.
(corps étranger laryngé). Si le corps étranger est non Lescanne E, Soin C, Ployet MJ, Lesage V, Mercier C. Corps étrangers
visible ou inextirpable, une intubation est tentée pour le laryngo-trachéo-bronchiques. Encycl Med Chir (Paris : Elsevier).
Oto-rhino-laryngologie, 20-730-A-10, 1997, 10 p.
repousser dans une bronche souche et ventiler sélective-
ment la bronche non obstruée. En cas d’échec, l’abord tra-
chéal doit être envisagé soit par ponction trachéale directe, POUR APPROFONDIR
soit par cricothyroïdotomie ou trachéotomie. Au terme de
ces gestes de sauvetage, si la fonction cardiocirculatoire
est maintenue, l’enfant est transféré directement vers le Corps étranger des fosses nasales
bloc opératoire ORL le plus proche pour faire le bilan des L’extraction se fait à l’aide de micro-crochets sous contrôle endoscopique.
voies aériennes, compléter l’extraction du ou des corps Le diagnostic est parfois tardif et doit être évoqué devant une rhinorrhée
étrangers et faire le bilan d’éventuelles lésions associées. purulente unilatérale et récidivante.
Le risque d’inhalation est toujours possible en cas d’inspiration brutale
et profonde de l’enfant pendant ou en dehors de la période d’extraction.
Transfert en milieu spécialisé
Le corps étranger est diagnostiqué précocement et la
tolérance ventilatoire permet le transfert en milieu spé-
Points Forts à retenir
cialisé qui doit être assuré dans les meilleures conditions
possibles en proscrivant toutes les mobilisations inutiles • L’élément-clé du diagnostic d’un corps étranger
de l’enfant. Plusieurs situations sont envisageables. des voies aériennes est représenté par le syndrome
• Existence de signes cliniques de gravité : aucun de pénétration.
examen complémentaire ne doit être effectué et une • Le corps étranger des voies aériennes est
bronchoscopie au tube rigide sera immédiatement le 1er diagnostic à envisager devant un trouble
réalisée au bloc opératoire ORL. respiratoire d’installation brutale.
• Absence de signe clinique et radiographie pulmonaire • Un examen clinique normal après un syndrome
normale : une fibroscopie souple est réalisée en 1re intention de pénétration ne permet pas d’éliminer
sans ou avec une anesthésie générale brève. La fibroscopie la présence d’un corps étranger.
permet rapidement de faire un diagnostic topographique • La notion d’un syndrome de pénétration impo-
et étiologique. Si le diagnostic est confirmé, une broncho- se la réalisation d’une endoscopie des voies
scopie au tube rigide est réalisée pour extraction. aériennes en milieu spécialisé.
• Dans tous les autres cas où les signes orientent vers • La manœuvre de Heimlich est indiquée en cas
un corps étranger mais sans signes de gravité, une broncho- d’asphyxie aiguë.
scopie est réalisée éventuellement après une radiographie • Devant toute pathologie respiratoire chronique
pulmonaire. Dans ce cas, une éventuelle fibroscopie ou récidivante chez l’enfant un corps étranger
peut être réalisée juste avant la bronchoscopie pour pré- ancien doit être suspecté.
ciser la topographie et la nature du corps étranger.
436 L A R E V U E D U P R AT I C I E N 2 0 0 0 , 5 0
Oto-rhino-laryngologie
A 37
Dysphagie
Orientation diagnostique
PR Bernard GUERRIER, DR Cécile NICOLAS-PUEL
Service d’ORL A et chirurgie cervico-faciale 2, centre hospitalo-universitaire Gui-de-Chauliac, 34295 Montpellier.
Examens complémentaires
La demande de ces examens est orientée par les données
de l’interrogatoire et de l’examen clinique.
1. Radiographies simples
• Des parties molles du cou : recherche un corps
étranger radio-opaque (fig. 1), une déviation de l’axe
laryngotrachéal (gros goitre ou goitre plongeant), une
image hydro-aérique d’un laryngo-pyocèle ou, plus bas
situé, un diverticule volumineux.
• Du thorax de face et de profil : recherche d’un élar-
gissement du médiastin, d’un déplacement trachéal,
d’un gros hile ou d’une image de pneumopathie droite
en particulier.
2. Transit pharyngo-œsophagien
Examen fondamental pour les dysphagies dont la cause 2 Transit pharyngo-œsophagien. Volumineux diverticule
n’est pas accessible à l’examen ORL, il fait le diagnostic de l’œsophage avec opacification bronchique par fausses
(diverticule de Zenker) ou l’oriente précisément (sténoses routes laryngo-trachéales.
Plusieurs mécanismes sont possibles : avant la déglutition ailleurs, il est obligatoire, dans ce type de cancer, de
par mauvais contrôle du bolus dans la cavité buccale coupler à l’endoscopie lésionnelle une panendoscopie
lors de la phase préparatoire et cela est particulièrement afin de rechercher une deuxième localisation.
vrai pour les aliments liquides ; pendant la déglutition • Cancer de l’œsophage : il s’agit souvent d’un homme
par défaut de fermeture du larynx ou par trouble de la autour de la cinquantaine, alcoolo-tabagique, porteur
coordination des différents temps de la déglutition ; d’une dysphagie basse, d’aggravation progressive et res-
après la déglutition par défaut d’ouverture du sphincter ponsable d’un amaigrissement très important.
supérieur de l’œsophage responsable d’une accumu- L’endoscopie complétée par une échoendoscopie et un
lation alimentaire ou salivaire et pénétration laryngée examen tomodensitométrique du médiastin confirment
lors de la reprise inspiratoire (ou par vidange du contenu le diagnostic et font le bilan d’extension et d’opérabilité.
du rhinopharynx lors de fausses routes nasales comme La recherche d’une deuxième localisation est, là aussi,
précédemment décrit). indispensable avant toute décision thérapeutique.
Les tumeurs bénignes de l’œsophage sont rares, le
3. Déglutition répétée contexte clinique est différent. Il faut y penser en cas
d’intégrité de la muqueuse de recouvrement car ces
Mécanisme mis en place spontanément par le patient : il tumeurs ont un développement sous-muqueux (léio-
traduit un défaut de propulsion de la base de langue avec myomes, angio-fibro-lipomes, etc.) .
mauvaise vidange valléculaire et doit faire rechercher un
trouble neuromusculaire. 2. Diverticule de Zenker
• La mastication prolongée dont l’origine est double :
centrale, le temps masticatoire est allongé en cas de C’est une hernie de la muqueuse postérieure de la
trouble de l’initiation du mouvement ; périphérique, il bouche de l’œsophage, au niveau d’une zone de faiblesse
s’agit soit d’un trouble praxique oro-bucco-facial, soit musculaire juste au-dessus du sphincter supérieur de
d’un mécanisme compensateur mis en place par le l’œsophage, consécutive à un défaut de relaxation de
patient pour atténuer une dysphagie aux solides en relation celui-ci et à l’hyperpression pharyngée. Cette poche
avec une obstruction sous-jacente. muqueuse, souvent méconnue au début de son évolution,
• La dysphagie douloureuse (odynophagie) est peu grossit et comprime l’œsophage sous-jacent aggravant
caractéristique dans le cadre d’un syndrome infectieux. la dysphagie initiale liée à l’achalasie du sphincter
Par contre, elle prend toute sa valeur chez un sujet supérieur de l’œsophage.
éthylo-tabagique et doit faire rechercher l’existence Le pic de fréquence de survenue de cette pathologie se
d’un cancer ulcéré. situe autour de 60 ans. Le diagnostic est évoqué devant 2
signes spécifiques : la régurgitation d’aliments non digé-
rés à distance de leur ingestion, et l’émission de bruits
Causes obstructives hydro-aériques lors de la palpation de la base du cou à
gauche au contact de la trachée. Le diagnostic est fait
1. Causes tumorales par l’opacification barytée qui précise la taille du diver-
ticule et son degré de compression de l’œsophage. Sa
Ce sont les premières à éliminer, qu’elles soient situées cure est chirurgicale, soit par voie endoscopique au
au niveau des voies aérodigestives supérieures ou laser, soit par voie cervicale. Le risque de cancérisation
de l’œsophage. Les examens endoscopiques sont la clef est faible (1 %).
du diagnostic en visualisant la tumeur et en permettant
la biopsie. 3. Sténoses non tumorales
• Cancers des voies aérodigestives supérieures : ce
diagnostic doit être soupçonné chez un homme alcoolo- • Les sténoses peptiques sont parfois le mode de révéla-
tabagique qui se plaint de dysphagie haute, latéralisée, tion d’un reflux gastro-œsophagien non traité. La
souvent douloureuse et associée à une otalgie ipsilatérale, symptomatologie est progressive dans un contexte d’œ-
parfois à une dysphonie et à des crachats sanglants. La sophagite par reflux gastro-œsophagien. Le diagnostic
palpation du cou retrouve fréquemment des adénopathies est fait par le transit baryté qui montre une sténose
de siège sous-digastrique, dures, parfois douloureuses, régulière axiale en « queue de radis » du tiers inférieur
bilatérales et fixées aux tissus avoisinants. de l’œsophage. L’endoscopie confirme le diagnostic,
L’examen met en évidence une lésion le plus souvent apprécie son degré de gravité par la biopsie et permet
ulcéro-bourgeonnante ou infiltrante venant envahir les une première dilatation (fig. 3).
régions voisines. Il s’agit habituellement d’un cancer de • Les sténoses caustiques constituent une complication
l’oropharynx (région amygdalienne, base de langue) ou évolutive grave de cette pathologie et doivent êtres
de l’hypopharynx (sinus piriforme). explorées par endoscopie et biopsie car il y a risque
La biopsie de la lésion est faite sous endoscopie, après de cancérisation secondaire. Siégeant au niveau de la
bilan tomodensitométrique de l’axe viscéral et du cou bouche de l’œsophage ou sur l’œsophage thoracique,
pour préciser l’extension locale et régionale et classer la elles peuvent se révéler par un blocage total lors de
lésion en stades TNM (tumor node metastasis). Par l’alimentation.
4. Corps étrangers
• Dysphagie haute : il s’agit d’une dysphagie aiguë,
douloureuse, incomplète (arête de poisson plantée dans
l’amygdale ou la base de langue). L’examen ORL
permet de voir le corps étranger et d’en faire l’exérèse.
• Dysphagie basse (bouche de l’œsophage) : la dys-
phagie est complète (aphagie) et s’accompagne d’une
hypersialorrhée. L’extraction ne peut se faire que sous
endoscopie.
En cas de blocage bas situé sur lœsophage, il faut penser
à un blocage sur sténose. ✶
L’interrogatoire précise la nature du corps étranger et
son heure d’ingestion. La radiographie des parties
molles du cou et du thorax prend toute son importance
en cas de corps étranger radio-opaque. Elle met en évi-
dence des épanchements gazeux, signe de perforation
muqueuse.
Causes infectieuses
✶ 1. Oropharynx
• L’angine est la cause la plus fréquente des dysphagies
douloureuses et son diagnostic est des plus simples.
En cas de dysphagie totale (aphagie), l’hospitalisation
est indiquée pour mettre en place une antibiothérapie
6 Imagerie par résonance magnétique de la base du crâne et une réhydratation par voie intraveineuse.
en incidence de profil. Malformation type Arnold-Chiari. • Le phlegmon périamygdalien est une infection qui
s’étend à partir du parenchyme amygdalien au travers
de la « capsule » vers l’espace périamygdalien. Une
odynophagie fébrile, d’aggravation rapide, survenant
quelques jours après une amygdalite associée à une
• Les lésions nerveuses extracrâniennes/atteintes ner- otalgie, un trismus, une voix couverte, est très évocatrice.
veuses périphériques donnent des paralysies flasques et Le voile est très nettement asymétrique avec un
imposent de rechercher une compression de ce nerf tout bombement important du pilier antérieur, la luette
le long de son trajet. est œdémateuse et refoulée vers le côté sain. La présence
Ainsi l’atteinte unilatérale du nerf vague associe de pus lors de la ponction confirme le diagnostic et
atteintes motrice et sensitive du pharyngo-larynx l’évacuation de celui-ci améliore très rapidement la
homolatéral, responsable d’une dysphonie (hémilarynx symptomatologie.
en ouverture en laryngoscopie indirecte) et d’une
dysphagie avec fausses routes laryngées (stase 2. Larynx
salivaire dans le sinus piriforme en pharyngoscopie indi-
recte). • L’épiglottite est une infection bactérienne aiguë
La paralysie du voile par atteinte des IXe et Xe paires de l’épiglotte touchant principalement l’enfant avant
crâniennes se diagnostique cliniquement. La voix est 10 ans ; elle est d’installation brutale. La clinique est
nasonnée et le malade est dysphagique avec fausses évocatrice ; l’enfant est bouche ouverte, en position
routes nasales et trachéales ; à l’examen de la cavité assise (le décubitus aggrave la gêne respiratoire).
buccale, le voile est asymétrique et ne se contracte que La déglutition est impossible et l’enfant bave. La
du côté sain, de même que la paroi postérieure du respiration est bruyante, il s’agit d’une dyspnée
pharynx (signe du rideau). laryngée avec stridor. La voix est couverte et la
La cause principale est constituée par les adénopathies toux est claire. La fièvre est élevée à 39-40 ˚C et la
malignes de la partie haute du cou parfois révélatrices palpation du cou retrouve des adénopathies bilatérales
d’un cancer des voies aérodigestives supérieures. et douloureuses.
Il s’agit d’une urgence médicale dont le diagnostic est
4. Atteintes neuromusculaires clinique et impose l’hospitalisation.
• La pyolaryngocèle est une surinfection d’une
• Les dystonies sont des contractions musculaires sou- laryngocèle, c’est-à-dire une poche muqueuse située
tenues et involontaires. Dans les formes focales oro- dans le vestibule laryngé, développée aux dépens
mandibulaires, les troubles de la voix et de la déglutition du diverticule de Zuckerkandl. Le tableau clinique
sont au premier plan. associe dyspnée laryngée, dysphagie haute douloureuse
• La myasthénie est une pathologie auto-immune et fébrile, dysphonie avec voix couverte et souvent
induisant des troubles musculaires prédominant au tuméfaction cervicale haute parahyoïdienne. La
niveau oculaire (ptôsis, diplopie), facial (diminution des laryngoscopie indirecte met en évidence un œdème
mimiques) et pharyngo-laryngé (troubles de la voix et majeur du vestibule laryngé de façon unilatérale venant
de la déglutition). Absents au repos, les symptômes obstruer la filière respiratoire et imposer, dans certains
apparaissent à l’effort. La présence d’anticorps anti- cas, une trachéotomie en urgence car l’intubation
cholinestérasiques sanguins et l’électromyographie est, comme dans l’épiglottite, très difficile.
Dysphonie
Orientation diagnostique
Pr Daniel BRASNU
Service d’oto-rhino-laryngologie et de chirurgie de la face et du cou, hôpital Laennec, 75340 Paris cedex 07,
université Paris V, UFR Necker-Enfants Malades
1 2 3
Paralysie récurrentielle gauche. Œdème de Reinke bilatéral prédomi- Kyste intracordal droit. Examen en
Examen en laryngoscopie directe en sus- nant du côté gauche. Examen en laryngo- laryngoscopie directe en suspension sous
pension sous anesthégie générale. La scopie directe en suspension sous anes- anesthésie générale.
corde vocale gauche est atrophique. thégie générale.
TABLEAU II
Causes des paralysies récurrentielles Points Forts à retenir
unilatérales
Chirurgie cervicale : • Toute dysphonie persistant plus de 3 semaines
– thyroïde, parathyroïdes est une dysphonie chronique. Elle impose
– œsophage, trachée un examen des cordes vocales par laryngoscopie
Causes tumorales : en consultation.
Cervicales : • Les causes des dysphonies sont multiples,
– cancers de la thyroïde, de l’œsophage, de la trachée la dysphonie est le maître symptôme du cancer
– tumeur ou adénopathie de l’espace rétrostylien du larynx.
Thoraciques (paralysie récurrentielle gauche) :
– cancer bronchique, tumeur médiastinale
• Toute dysphonie chronique chez un sujet d’âge
Causes cardiaques (paralysie récurrentielle gauche) : moyen et fumeur doit toujours faire suspecter
– maladie mitrale, coarctation de l’aorte le diagnostic de cancer du larynx et conduire
– chirurgie cardiaque systématiquement à l’examen des cordes vocales
Causes neurologiques : et du larynx.
– accidents vasculaires du tronc cérébral • Le nerf récurrent est une branche du nerf
– sclérose en plaques pneumogastrique. Le nerf récurrent droit
– syringomyélie contourne l’artère sous-clavière, le nerf récurrent
– encéphalite gauche contourne la crosse de l’aorte.
– méningite • Une paralysie récurrentielle doit toujours en
– poliomyélite
– syndrome de Guillain et Barré
faire rechercher la cause par un bilan complet.
– syndrome d’Arnold-Chiari Il faut systématiquement rechercher un cancer
– neuropathie diabétique, toxique, inflammatoire de la thyroïde, de l’œsophage, de la trachée,
Idiopathiques un cancer bronchopulmonaire, une tumeur
médiastinale.
Dyspnée laryngée
de l’enfant
Orientation diagnostique et conduite à tenir en situation d’urgence
DR Philippe CONTENCIN
Service d’oto-rhino-laryngologie, chirurgie cervico-faciale de l’enfant, hôpital Saint-Vincent-de-Paul, 75674 Paris Cedex 14.
Hormis la diphtérie, exceptionnelle, la gravité du décompenser l’état respiratoire. C’est la triade « dyspnée
tableau clinique de la laryngite sous-glottique ne semble laryngée-fièvre élevée-dysphagie » qui suffit à faire
pas dépendre du germe. évoquer le diagnostic. Les radiographies sont inutiles. Il
faut tout mettre en œuvre pour assurer au plus vite la
2. Laryngites striduleuses perméabilité des voies aériennes. En cas de doute, si une
Ce sont des laryngites « spasmodiques » réalisant laryngofibroscopie est jugée nécessaire, elle doit être
un accès brutal et bref de dyspnée laryngée avec tirage réalisée en structure de soins intensifs avec le matériel
et cornage, parfois associée à une toux rauque. La d’intubation prêt et à l’aide d’un mini-fibroscope. Le
dyspnée disparaît en quelques minutes ou quelques larynx apparaît globalement tuméfié, rougeâtre ou violacé ;
heures. L’accès peut se répéter mais de façon toujours l’épiglotte n’est souvent plus reconnaissable et il faut un
brève. Il s’agit très vraisemblablement d’un spasme réanimateur ou un oto-rhino-laryngologiste pédiatrique
glottique ou supraglottique du larynx. La laryngo- expérimenté pour intuber l’enfant, toujours en position
fibroscopie, le plus souvent réalisée après l’accès assise ou demi-assise. Ensuite, les prélèvements bactério-
dans cette forme d’évolution si rapide, ne montre qu’un logiques sont effectués par écouvillonnage et hémocul-
érythème laryngé diffus. On parle d’hyperréactivité tures, parfois même par ponction lombaire. Une antibio-
laryngée, d’allergie et de reflux gastro-œsophagien pour thérapie est entreprise.
expliquer partiellement cette affection encore un peu
mystérieuse. 5. Laryngotrachéobronchite bactérienne
3. Laryngites récidivantes On admet qu’il s’agit d’une forme sévère d’infection
trachéale par des staphylocoques ou des streptocoques
Il s’agit de laryngites dyspnéisantes répétées, tantôt (le plus souvent) qui s’étend aux bronches et au larynx,
rapidement résolutives, tantôt justiciables de corticoïdes pouvant entraîner une dyspnée inspiratoire prédominante.
per os et parfois même d’une hospitalisation. Chez Le tableau typique associe cependant une dyspnée aux
certains enfants, le coût social, psychologique et iatro- 2 temps avec encombrement trachéobronchique et alté-
génique de l’affection est considérable du fait de la ration de l’état général chez un enfant très fébrile.
répétition des crises. Le bilan étiologique de cette entité L’abondance des sécrétions purulentes avec nécrose
passe par l’élimination d’une malformation anatomique épithéliale et le risque d’obstruction laryngotrachéale
laryngée (sténose, hémangiome), d’un foyer infectieux
imposent l’intubation.
pharyngé ou sinusien. Une allergie a également été
souvent retrouvée de même que, surtout, un reflux 6. Corps étrangers
gastro-œsophagien pathologique. Il y a suffisamment
Chez un enfant en bonne santé, apyrétique, c’est la sur-
d’arguments pH-métriques pour affirmer l’existence
venue brutale d’une dyspnée laryngée en période diurne
d’une association entre reflux gastro-œsophagien et
qui doit faire évoquer le diagnostic. Alors que l’enfant
laryngites répétées mais cela ne permet pas de préjuger
d’une relation de cause à effet et les phénomènes était en train de jouer ou de manger, un « syndrome de
d’allergie alimentaire sont évoqués. pénétration » est survenu : accès brusque de suffocation
avec apnée, cyanose ou érythème intense et quintes
4. Épiglottite aiguë de toux avec reprises respiratoires bruyantes. Il est
C’est une infection bactérienne de la margelle et du ves- essentiel de retrouver cet élément clinique à l’interro-
tibule laryngé. Le germe en cause est un Hæmophilus gatoire de l’entourage présent au moment du début des
influenzæ de type B, retrouvé dans les hémocultures symptômes. Si le corps étranger reste bloqué au niveau
dans la quasi-totalité des cas. Cela explique que cette du larynx, il provoque le plus souvent une dyspnée
pathologie, rare jusque dans les années 1990, a pratique- modérée ou intense, parfois dramatique, avec dysphonie
ment disparu aujourd’hui grâce à la vaccination systé- voire même aphonie.
matique des nourrissons contre ce germe. Cependant, il À titre d’exemple, tout corps étranger végétal ou plas-
n’est pas exclu qu’elle puisse être à nouveau observée à tique plein, cylindrique ou arrondi, mais de surface irré-
la faveur d’une baisse de la vigilance vaccinale ou chez gulière, de taille proche des dimensions de l’endolarynx
un enfant étranger. de l’enfant (comprimés, cacahuète, bonbon, bille), peut
Cette laryngite exceptionnelle réalise une cellulite ou un provoquer une apnée obstructive catastrophique. À l’op-
abcès sous-muqueux qui peut obstruer complètement la posé, les corps étrangers fins acérés (plastiques, os ou
filière laryngée supraglottique. coquilles) entraînent une dyspnée modérée et une
Elle peut survenir à tout âge, sous la forme d’une rhino- aphonie s’ils sont fichés sagittalement dans la glotte et la
pharyngite très fébrile qui évolue rapidement vers la sous-glotte. Il faut y penser devant un tableau
dysphagie et la dyspnée d’intensité rapidement impres- de laryngite dont l’évolution n’est pas satisfaisante les
sionnante. On est frappé par l’attitude de l’enfant, pâle, premiers jours. La laryngoscopie est donc ici systéma-
qui reste assis, refuse de s’allonger et bave. La toux est tique. Enfin, un corps étranger trachéal, surtout s’il est
de tonalité normale mais la voix est étouffée. grossièrement sphérique, est généralement mobile et peut
L’examen doit être réduit au minimum : pas d’abaisse- entraîner, par intermittence, une dyspnée laryngée lors de
langue, pas de décubitus qui pourraient brutalement son positionnement dans la sous-glotte.
Nous détaillerons le traitement de la laryngite aiguë En cas d’extrême urgence, avec obstruction laryngée
sous-glottique, forme la plus classique mais aussi la complète (apnée), une manœuvre de Heimlich doit être
plus courante de dyspnée laryngée. Ce traitement est en tentée. Rappelons que celle-ci doit être faite par com-
effet applicable aux autres formes d’obstacle laryngé pression thoracique et épigastrique, à l’aide des bras et
dès lors qu’une inflammation tissulaire locale s’est des poings. Chez le nourrisson, on peut préférer la
installée (traumatisme d’intubation, d’endoscopie, de manœuvre de Mofenson (brutale tape dans le dos de
brûlure) ou risque de survenir (corps étrangers, l’enfant penché en avant). Cependant, ces manœuvres
processus expansifs). Ses principes sont : éviter le ont peu de chances d’être efficaces du fait du manque
stress, les changements de position, rassurer enfant et d’air dans les voies aériennes inférieures (l’inhalation a
parents, humidifier les voies aériennes, lutter contre souvent lieu en début d’inspiration). L’idéal est une
l’œdème. Sur ce dernier aspect, rappelons que les anti- ponction (aiguille ou cathéter court) à travers la mem-
inflammatoires, même en injection et en inhalation, brane crico-thyroïdienne afin de permettre d’admettre
n’agissent qu’en quelques dizaines de minutes. C’est la de l’air intrathoracique. Alors, la manœuvre de Heimlich
raison pour laquelle l’utilisation de vasoconstricteurs sera plus efficace. Il ne faut pas tenter une telle manœuvre
est fondamentale dans les premières minutes du traite- si l’enfant respire, même très difficilement.
ment. L’administration d’adrénaline en aérosol a été En cas de dyspnée modérée, il faut éviter de mobiliser
validée dans cette indication, sans effet secondaire l’enfant et envisager rapidement (dans les 2 à 5 h) une
connu aux posologies et rythme d’utilisation recom- laryngo-trachéo-bronchoscopie sous anesthésie générale.
mandés. Les corticoïdes viennent en complément et en Le traitement des kystes et des processus expansifs
relais de l’adrénaline pour éviter un éventuel effet endolaryngés repose sur l’exérèse endoscopique, plus
rebond lorsque l’effet de celle-ci est épuisé. Le tableau rarement par chirurgie cervicale externe.
résume le protocole à suivre pour ce traitement en
fonction du stade clinique de dyspnée (tableau, voir : Prévention
Pour approfondir 3).
L’antibiothérapie n’est nécessaire qu’en présence d’une La couverture vaccinale maximale contre Hæmophilus
fièvre élevée et (ou) de troubles de la déglutition de type B doit être maintenue ainsi que les campagnes
avec bave (risque théorique d’épiglottite ou, plus de prévention vis-à-vis des risques domestiques d’inha-
sûrement, de laryngotrachéite bactérienne). On choisit lation de corps étrangers.
une association active sur les cocci gram-positifs (y Enfin, la prise en charge visant à prévenir les récidives
compris les staphylocoques résistants à la méticilline) en cas d’épisodes identiques dans les antécédents (bilan
et sur Hæmophilus influenzæ, par exemple fosfomycine ou traitement du reflux gastro-œsophagien) doit être
et céfotaxime. poursuivie. ■
TABLEAU
Traitement en urgence d’une laryngite aiguë sous-glottique
POUR APPROFONDIR
Le diagnostic différentiel peut se poser avec l’otorrhée • Les examens complémentaires comprendront, selon
purulente et l’otorragie lorsque le liquide céphalo-rachidien les données de l’interrogatoire et de l’examen clinique :
est mélangé à du sang ou du pus. endoscopie, radiographie des sinus ou de la colonne
vertébrale, orthopantomographie, scanner.
Diagnostic étiologique
Diagnostic étiologique
1. Traumatisme crânien avec fracture du rocher
1. Otalgie symptomatique d’une atteinte
Il s’agit d’une fracture importante avec trait de fracture
unique ou multiple passant selon les cas par le tegmentum
de l’oreille
tympani ou le bloc labyrinthique. Le diagnostic est évi- • L’atteinte du pavillon est la conséquence d’une plaie,
dent par l’anamnèse, l’examen otoscopique, l’existence d’un othématome, de périchondrite, d’un nodule
d’une paralysie faciale associée et l’étude scanogra- douloureux de l’hélix, d’un cancer, d’eczéma ou d’un
phique. kyste sébacé surinfecté.
• L’otite externe est une dermite du conduit d’origine
2. Intervention chirurgicale otologique bactérienne ou mycosique donnant des douleurs
ou surtout oto-neuro-chirurgicale intenses, majorées par la traction du pavillon du tragus
• La chirurgie du cholestéatome ou de certaines tumeurs avec un aspect œdématié inflammatoire de la peau du
ayant dénudé la dure-mère peut entraîner des liquorrhées conduit associé à du pus et des filaments en cas de
postopératoires. mycose.
• La chirurgie du neurinome de l’acoustique et de la • L’otite externe maligne est une ostéite du tympanal
fosse cérébrale postérieure peut donner également des survenant chez des sujets fragilisés, âgés, diabétiques,
écoulements secondaires. qui va gagner la base du crâne avec des paralysies
• La chirurgie de malformation de l’oreille interne. crâniennes multiples.
• Une hernie méningée primitive ou secondaire. • Le bouchon épidermique du conduit peut être surin-
fecté.
• Une piqûre d’insecte, un abcès du conduit ou un
Otalgie corps étranger peut être responsable d’otalgie.
• Une atteinte de l’oreille moyenne, otite aiguë puru-
Les otalgies, symptômes fréquents, correspondent lente plus fréquente chez l’enfant que l’adulte, associe
souvent à une cause auriculaire ou jouxtant l’oreille, otalgies, fièvre et parfois otorrhée au décours d’une
comme la parotide ou l’articulation temporo-mandibu- rhino-pharyngite. Le diagnostic est fait par l’otoscopie
laire, mais elles peuvent être des douleurs réflexes et qui retrouve un tympan infiltré, bombant ou perforé.
rapportées relevant de causes très diverses qu’il faut • Une mastoïdite aiguë est une complication de l’otite
connaître. moyenne aiguë associant des otalgies extrêmement
importantes, des signes généraux associant fièvre et
Critères d’orientation diagnostique parfois signes digestifs, un empâtement de la région
auriculaire postérieure avec parfois décollement du
• L’interrogatoire précise : la date d’apparition de pavillon et, à l’otoscopie, un tympan infiltré ou bombant.
l’otalgie ; son caractère uni- ou bilatéral, permanent ou • Une complication infectieuse ou veineuse d’une otite
paroxystique ; les éléments déclenchants de la douleur : est caractérisée par des douleurs à l’émergence de l’hé-
traction du pavillon, pression sur le tragus, mastication, misphère mastoïdien, symptomatique d’une thrombophlé-
déglutition ; les signes d’accompagnement : otorrhée, bite du sinus latéral, une otalgie associée à une névralgie
surdité, vertiges, craquement lors de la mastication, dys- du trijumeau, symptomatique d’une thrombophlébite du
phagie, dysphonie, signes généraux ; les antécédents sinus pétreux (pétrosite).
chirurgicaux, locaux ou régionaux. • Un dysfonctionnement tubaire – catarrhe tubaire ou
• L’examen clinique comporte : un examen du pavillon otite séreuse – peut être à l’origine d’une otalgie généra-
de l’oreille et une otoscopie visualisant le conduit lement modérée. À l’inverse, un barotraumatisme au
auditif externe, le tympan ; un examen de la région cours d’une plongée ou d’un voyage en avion peut être à
péri-auriculaire : parotide, articulation temporo-mandi- l’origine d’une otalgie extrêmement violente s’accom-
bulaire, région mastoïdienne, région cervicale sous- pagnant parfois d’un syndrome cochléo-vestibulaire.
digastrique ; un examen de la cavité buccale : dents, • L’otite chronique est rarement douloureuse sauf en cas
gencive, plancher buccal et langue ; un examen de de réchauffement ou d’instillation de gouttes auriculaires.
l’oro-pharynx ; un examen du larynx et de l’hypo- • Le cancer de l’oreille moyenne est rare.
pharynx à l’aide d’une laryngoscopie indirecte au • Les atteintes nerveuses sont les suivantes :
miroir ; un examen du cavum à l’aide d’une optique ou – le zona du ganglion géniculé donnant une otalgie
d’un petit miroir placé derrière le voile du palais ; un intense à type de brûlure. Il existe une éruption cutanée
examen des aires ganglionnaires cervicales ; un examen dans la zone de Ramsay Hunt et une paralysie faciale
des paires crâniennes. secondaire ;
Épistaxis
Orientation diagnostique et conduite à tenir en situation d’urgence
PR Philippe HERMAN
Service ORL, hôpital Lariboisière, 75475 Paris Cedex 10.
3 Adénocarcinome de l’ethmoïde.
Le scanner (A) et surtout l’imagerie par résonance magné-
2 Rhinoscopie antérieure et endoscopie gauches. tique (B) révèlent l’existence d’une tumeur occupant la fosse
A – Notez la vision limitée vers la partie postérieure des nasale et les sinus ethmoïdaux, entraînant une rétention
fosses nasales lorsque seul le spéculum est utilisé. Ne sont dans le sinus maxillaire et refoulant la cloison.
visibles que la tête du cornet inférieur (CI), le septum (S), le
plancher des fosses nasales (P) et parfois la tête du cornet
moyen (CM).
B – L’endoscope permet un examen fin de la quasi-
totalité des fosses nasales après rétraction de la muqueuse.
Notez les queues de cornets inférieur (CI) et moyen (CM),
l’arche choanale (AC) et le cavum (C), enfin le récessus
sphéno-ethmoïdal (R).
Étiologie
4 Angiofibrome nasopharyngé.
1. Causes locales
A – Sur cette coupe coronale, notez la tumeur gauche,
Parmi les causes locales, on retrouve : centrée sur la choane avec un prolongement dans le foramen
• des causes idiopathiques : rupture capillaire au sphéno-palatin au voisinage immédiat de la fissure orbitaire
niveau de la tache vasculaire, spontanée, probable- inférieure (flèche).
ment liée à un étirement excessif de vaisseaux repo- B – Sur cette coupe sagittale, notez l’érosion osseuse du toit
du rhinopharynx réalisée par la tumeur qui pénètre ainsi
sant sur un support déformable – cartilage septal – ou
dans le sinus sphénoïdal.
consécutive à un grattage ;
• une rhinite atrophique – une perforation de cloison ;
• un traumatisme : fracture des os propres du nez, palatin. La découverte de cette tumeur violacée
fracture du squelette facial, fracture de l’étage antérieur parcourue par un lacis vasculaire évoque le diagnostic
de la base du crâne, voire exceptionnel traumatisme et proscrit toute biopsie en dehors d’un milieu spécia-
de la carotide interne ; lisé. Il s’agit en effet d’un angiofibrome, masse hyper-
• un corps étranger ; vascularisée dont l’effraction est très hémorragique.
• un polype saignant de la cloison ; Le diagnostic repose sur l’examen de la partie posté-
• une tumeur maligne du nez et des sinus : leurs types rieure de la fosse nasale à l’optique ou au fibroscope,
histologiques sont variés, qu’il s’agisse d’un adéno- et sur le scanner avec injection de produit de contras-
carcinome de l’ethmoïde (travailleur du bois), d’un te, qui met en évidence une lésion hypervascularisée
carcinome épidermoïde du sinus maxillaire, d’une dont il précise l’extension. Le traitement repose sur
tumeur de la placode olfactive, d’un mélanome, d’un l’exérèse chirurgicale précédée d’une embolisation
cylindrome ou carcinome adénoïde kystique… Quoi endovasculaire.
qu’il en soit, l’association de symptômes associés à
type d’obstruction nasale ou de rhinorrhée unilaté- 2. Causes secondaires
rales, d’hypo- ou d’anosmie doit faire rechercher cette Ces causes sont :
étiologie. Le bilan paraclinique repose alors sur la • une infection : banale rhinite, grippe, oreillons ;
biopsie avec examen anatomo-pathologique et sur • une maladie vasculaire : hypertension artérielle,
l’imagerie du massif facial (scanner avec injection et artériosclérose ;
imagerie par résonance magnétique [IRM] ; fig. 3) ; • des troubles de la coagulation ou de l’agrégation
• une tumeur du nasopharynx : angiofibrome naso- plaquettaire, congénitaux ou acquis ;
pharyngé (fig. 4). Surnommé « polype saignant de la • une prise médicamenteuse (antivitamine K, aspirine
puberté masculine », le fibrome nasopharyngien est et antiagrégeant plaquettaire) ;
une tumeur rare qui survient électivement chez les • la maladie de Rendu-Osler qui est une angiomatose
hommes, habituellement au stade pubertaire. Elle se familiale de transmission autosomique dominante. La
développe habituellement au pourtour du trou sphéno- maladie s’installe à l’âge adulte et se traduit par
os propres du nez, afin d’appliquer celle-ci contre la cloi- un ruban de 2 à 3 cm de large. Si plusieurs mèches sont
son. Cette compression doit être maintenue 5 à 10 min. successivement mises en place dans la même fosse nasa-
Dans les autres cas, c’est le plus souvent une manœuvre le, cela doit être colligé dans l’observation en vue du
de tamponnement qui est utilisée, toujours après une déméchage.
anesthésie locale avec rétraction de la muqueuse. Les De nombreux matériels de tamponnement peuvent
techniques de coagulation sous vidéo-endoscopie ne être utilisés. À la mèche grasse peuvent ainsi être
sont pas détaillées ici. substitués certains produits ayant une activité hémo-
statique (Algosteril), un pouvoir d’expansion (Mérocel),
1. Technique d’anesthésie locale et de rétraction etc. Le méchage est ensuite retiré 48 h plus tard en
Le principe est le suivant : l’hémostase est obtenue par consultation. Son retrait est souvent un peu traumatique.
compression, laquelle est maintenue plus de 24 h pour Aussi, lorsqu’il existe des troubles de l’hémostase
obtenir une thrombose du ou des vaisseaux en cause. connus, les mèches de type non résorbable sont pros-
Elle est toujours effectuée après une anesthésie locale crites au profit de matériaux pouvant être laissés en
avec vasoconstricteurs aussi prolongée que possible place et qui se déliteront avec quelques irrigations des
(supérieure à 10 min). En effet, celle-ci permet de fosses nasales au sérum physiologique (produits de type
rétracter la muqueuse des cornets ; on peut alors mettre Surgicel).
en place un méchage efficace sans lésion muqueuse
(nombre de tamponnements entraînent des lésions iatro- 4. Tamponnement postérieur
géniques importantes), réaliser le geste sans douleur, ce Réalisé selon la technique princeps, il s’agit d’une
qui est indispensable pour le confort du patient et aussi manœuvre délicate et douloureuse requérant un
parce que la douleur entraîne une augmentation réflexe opérateur expérimenté. Elle est au mieux réalisée après
de la pression artérielle, et enfin souvent arrêter le une très bonne anesthésie locale ou sous anesthésie
saignement. générale en sachant que l’induction anesthésique à
En pratique, on utilise un mélange de Xylocaïne et de estomac plein (épistaxis déglutie) ou en présence d’un
vasoconstricteurs (Xylocaïne à la naphazoline). saignement actif comporte un risque non négligeable
D’étroites bandes de coton d’environ 6 cm de long sont d’inhalation.
trempées dans le mélange puis introduites de façon Dans chaque narine est introduite une sonde de Foley ou
atraumatique le long du plancher de la fosse nasale, d’aspiration bronchique jusqu’à ce qu’elle soit visible
selon un plan parallèle au palais, à l’aide d’une pince de dans l’oropharynx. Elle est alors récupérée par la
Politzer dont la forme angulée permet d’éviter de blesser bouche et un tampon de mèche grasse de 2 x 2 x 2 cm,
le rhinopharynx en arrière. Deux, voire trois mèches solidarisé par 2 fils de 20 cm, est amarré à son extrémité.
sont ainsi introduites de chaque côté, de bas en haut, la Le second fil de rappel sort par la bouche à la fin de la
suivante repoussant la précédente vers le haut. manœuvre. Par une traction douce sur la sonde à partir
de l’orifice nasal, les tampons sont alors introduits dans
2. Cautérisation – Coagulation la bouche puis glissés derrière le voile pour bloquer
Les saignements dont l’origine est visible peuvent, l’isthme nasopharyngé. Le doigt vient alors bloquer les
lorsqu’ils sont peu abondants, être traités après anes- tampons dans le rhinopharynx. Puis, tandis que l’aide
thésie locale par cautérisation chimique ou thermique, exerce une traction douce mais ferme sur les fils, un
voire coagulation à l’aide d’une pince bipolaire. Cette tamponnement antérieur est réalisé. Les fils sont ensuite
manœuvre est relativement aisée sur la partie antérieure noués en tension en évitant une pression excessive sur la
de la cloison. Dans le cas des saignements postérieurs, columelle.
elle requiert en revanche un matériel sophistiqué. La durée maximale d’un tamponnement postérieur est
Les deux faces du septum ne doivent pas être cautérisées de 5 jours.
simultanément pour éviter une perforation. La surface En pratique, cette manœuvre est exceptionnellement
cautérisée doit être petite. réalisée. On lui préfère au mieux la mise en place de
sondes à double ballonnet (fig. 6), ou à défaut l’intro-
3. Tamponnement antérieur duction dans la fosse nasale d’une sonde de Foley glissée
C’est la qualité de l’anesthésie locale et de la rétraction jusqu’au cavum. Le ballonnet est ensuite gonflé à l’eau
qui fait l’efficacité du tamponnement. pour bloquer le rhinopharynx et empêcher tout saigne-
Pour être compressif et donc efficace, le tamponnement ment postérieur. Un tamponnement antérieur est alors
est le plus souvent réalisé de façon bilatérale en raison réalisé et la sonde de Foley maintenue en place.
de la compliance de la cloison qui se déforme aisément Ni la sonde de Foley, ni les fils de traction ne doivent
et diminue d’autant la pression exercée par le tampon- comprimer la columelle ou les cartilages alaires car une
nement. nécrose peut alors survenir rapidement et entraîner des
Après ablation des cotonnets, on introduit une mèche séquelles esthétiques.
grasse qui est tassée d’arrière en avant dans la fosse Une déviation septale majeure peut empêcher la
nasale. De grandes feuilles de Vitagaze ou Tulle gras réalisation d’un tamponnement efficace. Ce peut être
(20 x 20) sont utilisées. Afin d’éviter de traumatiser la l’indication d’une septoplastie afin de pouvoir réaliser
muqueuse, la gaze est découpée en serpentin pour obtenir l’hémostase.
7 Modalités d’embolisation et de
ligatures chirurgicales.
L’artère sphéno-palatine (A) et l’artère
faciale peuvent être contrôlées soit
par une embolisation par voie endo-
vasculaire, soit pour la première par
voie endonasale sous guidage endo-
scopique (B : en insert vue de l’artère
à son émergence du foramen sphéno-
palatin). Quant aux artères ethmoï-
dales (C), elles ne sont accessibles
qu’à un geste chirurgical mené par
une courte incision au-dessus de
l’angle interne de l’œil (D : en insert
vue de l’artère ethmoïdale tendue
entre la paroi interne d’orbite et la
périorbite refoulée en dehors).
sécrétion des lymphokines avec diminution de la réponse tionnelle bilatérale entrant dans le tableau de la rhinopha-
lymphocytaire ; ryngite.
– l’hypertrophie des végétations adénoïdiennes est consi- – Les formes ganglionnaires sont représentées par l’exa-
dérée comme pathologique si elle est obstructive (obs- cerbation des signes ganglionnaires cervicaux de la rhino-
truction nasale) ou si elle constitue un foyer infectieux chro- pharyngite banale. Il peut s’agir d’une adénite, d’un adéno-
nique ; phlegmon voire d’un abcès rétropharyngé par diffusion de
– modifications de l’écologie ambiante par le tabagisme l’inflammation dans l’espace cellulo-graisseux rétro-pha-
parental, altération de l’hygrométrie et de la température ryngé. L’augmentation de la fièvre et l’apparition d’un tor-
de l’air ambiant, pollution ; ticolis témoignent de l’atteinte de cet espace réalisant le
– la vie en collectivité (crèche, maternelle) favorise le syndrome de Grisel.
contact avec les virus et les bactéries portés par les autres – Les formes hyperthermiques amènent à rechercher des
enfants ; complications comme les convulsions ou la déshydratation.
– enfin, le reflux gastro-œsophagien par l’inflammation – Les formes trachéo-bronchiques avec toux productive
rhinopharyngée entretenue doit être recherché en cas de témoignent de la diffusion du processus inflammatoire à
récidive ou si une carence martiale est associée. l’arbre respiratoire inférieur. L’association des deux
atteintes respiratoires supérieures et inférieures sous sa
Diagnostic forme chronique et récidivante doit conduire à rechercher
1. Forme typique : rhinopharyngite aiguë simple une mucoviscidose, une maladie des cils immobiles (Kar-
tagener) ou un déficit immunitaire congénital.
Les signes cliniques associent une obstruction nasale bila- – Le faciès adénoïdien représente une complication évo-
térale avec respiration buccale et une fièvre à 38,5 °C. En lutive des rhinopharyngites récidivantes avec développe-
l’absence de complication, la fièvre est rarement plus éle- ment d’un visage droit, allongé et respiration buccale. À
vée. L’examen clinique permet de retrouver une rhinorrhée plus long terme, l’apparition d’une dysmorphose dento-
antérieure muqueuse ou mucopurulente bilatérale, une rhi- maxillaire est possible avec béance incisive supérieure et
norrhée postérieure inconstante avec écoulement muco- incompétence labiale.
purulent sur la paroi postérieure du pharynx, sous le voile, – L’obstruction nasale prolongée entraîne une élévation des
entre les amygdales. Le pharynx est discrètement inflam- résistances pharyngées avec développement possible d’un
matoire. Il existe des adénopathies cervicales bilatérales et véritable syndrome d’apnée-hypopnée du sommeil.
sensibles. L’otoscopie est systématique et retrouve des
tympans inflammatoires, roses sans otite. La résolution
spontanée est habituelle en 4 à 5 jours, en l’absence de com-
Bilan
plication. • Aucun bilan spécifique n’est nécessaire en cas de rhino-
pharyngite aiguë simple.
2. Formes cliniques • Dans les formes récidivantes et chroniques, le bilan com-
• Forme récidivante et chronique : l’évolution est marquée prend :
par la répétition des épisodes aigus. L’intervalle entre – une numération formule sanguine avec dosage du fer
chaque épisode est marqué soit par un retour à la normale sérique et de la ferritine plasmatique ;
avec un nez sec et perméable, soit par la persistance d’une – un dosage des IgE totales éventuellement complété par
rhinorrhée mucopurulente avec respiration buccale. On un bilan allergologique ;
considère le passage à la chronicité à partir d’une fréquence – la recherche d’une hypertrophie des végétations adé-
d’au moins 6 épisodes aigus par hiver. C’est dans ces noïdes par une fibroscopie nasopharyngée et un cliché de
formes récidivantes et chroniques que s’observent les prin- cavum de profil. La radiographie de cavum devra objecti-
cipales complications. ver la distance comprise entre l’orifice choanal (corres-
• Formes compliquées pondant à la face postérieure du sinus maxillaire) et l’hy-
– Les formes otitiques sont représentées par les otites pertrophie des végétations. La distance entre les végétations
moyennes aiguës et les otites séromuqueuses à tympan et le voile du palais est moins fiable car le voile est une
fermé. L’otite moyenne aiguë est suspecte sur l’élévation structure mobile. L’hypertrophie est considérée comme
de la fièvre (supérieure à 38,5 °C), l’otalgie et confirmée pathologique et obstructive si les végétations adénoïdes se
par l’otoscopie. L’otite séromuqueuse est suspectée sur une projettent sur la face postérieure du sinus maxillaire.
gêne auriculaire, une éventuelle baisse de l’audition et • Dans les formes compliquées, le bilan sera orienté selon
confirmée par l’otoscopie et la tympanométrie. le type de complications (recherche d’un reflux gastro-œso-
– Les formes laryngées sont représentées par les formes phagien, d’une mucoviscidose…).
sous-glottiques avec dyspnée inspiratoire caractéristique.
La laryngite sous-glottique se révèle le plus souvent la nuit Traitement
dans un contexte de rhinopharyngite fébrile (38,5 °C).
– Les formes sinusiennes sont rares. L’ethmoïdite aiguë est 1. Rhinopharyngite aiguë simple
une complication grave, atteignant le plus souvent l’enfant Le traitement essentiellement symptomatique poursuit
avant 6 ans. La sinusite maxillaire aiguë est rare ; il s’agit 3 objectifs : la lutte contre la fièvre, le drainage des sécré-
habituellement d’une sinusite maxillaire œdémateuse réac- tions nasales et la lutte contre l’obstruction nasale.
• La lutte contre la fièvre fait appel aux antipyrétiques, Ethymoïdite aiguë de l’enfant
anti-inflammatoires (salicylates et paracétamol).
• Le drainage des sécrétions associe la désinfection rhyno- C’est la complication sinusienne des rhinopharyngites
pharyngée et locale et la prescription de mucorégulateurs aiguës chez l’enfant de 2 à 3 ans. On distingue 3 formes
généraux. L’irrigation répétée des fosses nasales par du évolutives : l’ethmoïdite aiguë non extériorisée, l’ethmoï-
sérum physiologique ou par des dérivés de l’eau de mer dite aiguë extériorisée et les formes compliquées.
constitue la base du traitement. Les ampoules de sérum doi-
vent être préférées aux flacons et la solution doit être uti- 1. Ethmoïdite aiguë non extériorisée
lisée tiédie (le froid augmente l’obstruction nasale). On Elle se caractérise par une rhinopharyngite aiguë avec fièvre
peut adjoindre à ce traitement des pulvérisations locales élevée (39 °C) chez un enfant asthénique. L’examen met par-
d’un antiseptique ou d’un antibiotique. fois en évidence un œdème modéré de l’angle interne de
• La lutte contre l’obstruction nasale n’est nécessaire l’œil associé à une
qu’en cas de retentissement grave (apnées du sommeil) ou rhinorrhée puru-
chez un enfant chez qui la respiration buccale n’est pas lente du même
acquise. L’utilisation des vasoconstricteurs locaux com- côté. La fibrosco-
mercialisés est contre-indiquée chez l’enfant. Le traitement pie peut retrouver
fera appel à une solution d’adrénaline diluée (1 ampoule du pus au niveau
d’adrénaline diluée dans 1 ampoule de sérum physiolo- des orifices de drai-
gique à 10 mL) prescrite à la dose de IV à V gouttes par nage des sinus eth-
jour pendant 3 à 4 jours. moïdaux (méat
• Les anti-inflammatoires et les antibiotiques par voie moyen). L’examen
générale ne sont pas utiles dans la rhinopharyngite aiguë de l’œil est à ce
simple. L’antibiothérapie à ce stade présente le risque de stade normal. Le
sélectionner un germe pathogène et n’est indiquée qu’en traitement est celui
cas de suppuration nasale ou de complication suppurée. de la rhinopharyn-
2. Rhinopharyngites récidivantes ou chroniques gite associé à une
antibiothérapie
Le traitement poursuit 2 objectifs : l’éradication des fac-
générale.
teurs favorisants ou étiologiques identifiés et la prévention
des récidives. 2. Ethmoïdite
• L’ablation des végétations adénoïdes (adénoïdectomie) aiguë
est indiquée en cas d’hypertrophie pathologique avec obs-
truction nasopharyngée. Son indication se justifie devant
extériorisée
la répétition des épisodes rhinopharyngés aigus (plus de 6 Elle associe une
par hiver) surtout s’ils se compliquent d’otites aiguës ou fièvre à 39 °C et
des signes locaux 1
d’otites séro-muqueuses. Ethmoïdite aiguë extériorisée.
• Le traitement des carences martiales fait appel au trai- évocateurs. L’œ- Œdème palpébral inflammatoire attei-
tement per os, en 3 prises quotidiennes, pour au moins 2 dème palpébral gnant les deux paupières, prédomi-
mois. Le traitement d’une éventuelle allergie fait appel aux inflammatoire et nant au niveau de la paupière supé-
antihistaminiques et aux mesures d’éviction de l’allergène douloureux atteint rieure.
incriminé (lait de vache, poils d’animaux). La prise en les paupières supé-
charge d’un reflux gastro-œsophagien et le contrôle des rieure et inférieure mais pas systématiquement de façon
autres facteurs favorisants (tabagisme parental…) est par- symétrique. Il s’y associe selon le stade de l’atteinte un
fois nécessaire. Le traitement préventif des récidives fait œdème conjonctival ou chémosis. Il existe une rhinorrhée
appel à la prescription d’immuno-stimulants ou immuno- purulente homolatérale. La conduite à tenir implique :
modulateurs (fraction ribosomale ou antigénique), à l’oli- • la recherche d’un germe par prélèvement de tous les sites
gothérapie et à la réalisation de cures thermales au moyen (fosses nasales, méat sinusien, angle interne de l’œil) afin
d’eaux sulfurées. d’adapter le plus efficacement possible le traitement anti-
biotique. Les germes retrouvés sont des Hæmophilus
influenzæ, pneumocoques et staphylocoques ;
• la recherche par un examen ophtalmologique, d’une
exophtalmie et des signes de suppuration intra-orbitaire
Adénoïdectomie (anesthésie cornéenne, mydriase, paralysie oculomotrice)
Elle consiste à l’aide d’une curette à réaliser une exérèse des végéta- signant l’existence de complications ophtalmologiques ;
tions adénoïdes du rhinophraynx. Il s’agit d’un geste rapide, peu • le scanner des sinus est systématiquement demandé en
hémorragique, ne nécessitant qu’une légère et très brève anesthésie
générale, pratiquée en ambulatoire. L’âge de l’adénoïdectomie est
présence d’un œdème conjonctival ou s’il existe des signes
fonction de son indication. Elle est rarement réalisée avant 1 an. Les de souffrance oculaire. Il permet de poser l’indication chi-
récidives d’hypertrophie adénoïdienne sont d’autant plus fréquentes rurgicale ;
que l’adénoïdectomie a été effectuée plus tôt. • la mise en route en urgence du traitement, en milieu
hospitalier.
Sinusite de l’immunodéprimé
• Causes fréquentes d’hyperthermie isolée, les foyers infectieux chez l’immunodéprimé évoluent le plus souvent sur
un mode chronique. L’évolution chronique est émaillée d’accidents aigus à type de réchauffements et de complica-
tions (extériorisation essentiellement) qui peuvent démasquer le diagnostic.
Qu’il s’agisse d’immunodépression acquise ou congénitale, humorale ou cellulaire, les agents pathogènes en cause
sont parfois atypiques : bacilles gram-négatifs (Escherichia coli, Klebsiella, bacille pyocyanique...), mycobactéries
atypiques, mycose.
• Cas particulier : sinusite et SIDA
Les atteintes des voies aérodigestives supérieures sont fréquentes chez le sujet atteint du SIDA. Les sinusites évoluent
sur un mode chronique le plus souvent.
Quelques particularités sont à noter :
– les localisations ethmoïdales et sphénoïdales sont fréquentes d’où des risques importants de complications et la néces-
sité d’un examen scanographique pour le diagnostic ;
– les foyers sinusiens sont fréquemment associés à une atteinte pulmonaire ;
– les germes en cause sont les mêmes que ceux rencontrés chez le sujet normal. Cependant, certains agents agressifs
peuvent être retrouvés (essentiellement : Klebsiella, bacille pyocyanique) ;
– d’un point de vue évolutif et thérapeutique :
• les récidives sont fréquentes après le traitement utilisé dans les sinusites aiguës communes ;
• certains auteurs préconisent un prélèvement bactériologique systématique et un drainage chirurgical par méatotomie
moyenne comme traitement curatif, dès les premières récidives, plutôt que des antibiothérapies itératives. Le rôle de
ce traitement chirurgical dans la prévention des récidives n’est pas démontré.
Points Forts à comprendre abondante, fluide puis qui s’épaissit et se colore (d’aqueuse,
elle devient muqueuse, puis mucopurulente).
toléré viennent se greffer des poussées aiguës qui peuvent systémiques plus nombreux avec ces derniers. Les anti-
être faussement attribuées à des épisodes de rhinites infec- biotiques sont à réserver aux surinfections bactériennes
tieuses aiguës. C’est le caractère apyrétique des poussées traînantes (au-delà de 15 jours) ou aux complications.
évolutives et la fréquence des récidives qui doivent faire évo-
quer un dysfonctionnement nasal chronique. Les épisodes Sinusites aiguës de l’adulte
de surinfection aiguë vraie, virale ou bactérienne, viennent Diagnostic positif
parfois compliquer l’évolution et c’est alors uniquement le
de la sinusite maxillaire aiguë
caractère récidivant de l’infection qui doit faire évoquer le
dysfonctionnement nasal chronique. 1. Signes fonctionnels
Ce syndrome peut être rapporté à : une rhinite allergique Au cours de l’évolution d’une rhinite infectieuse aiguë, au
(perannuelle ou saisonnière) ; l’interrogatoire recherche un lieu d’une disparition de la symptomatologie évoquant la
terrain atopique familial ou personnel, des antécédents guérison, apparaissent :
allergiques connus, des intolérances médicamenteuses • une douleur : sous-orbitaire, à irradiation orbitaire ou den-
(aspirine)… ; une récidive de la symptomatologie ou sa taire ; le plus souvent unilatérale ; de type pulsatile ; favori-
chronicisation nécessite la réalisation d’un bilan allergo- sée par l’effort, la déclivité de la tête ; améliorée par un mou-
logique ; une rhinite non allergique à éosinophiles. Le bilan chage productif ; d’évolution variable : généralement
allergologique est négatif. Le diagnostic est posé devant continue, elle peut évoluer par paroxysme (survenant à heures
une hyperéosinophilie sur la cytologie des sécrétions fixes pour un même patient) ou par cycle (exacerbation pro-
nasales, réalisée en dehors de tout épisode infectieux ; une gressive de la douleur au cours de la nuit, diminution pen-
rhinite vasomotrice. Il s’agit d’un dysfonctionnement nasal dant la matinée après le lever, recrudescence en soirée) ;
chronique dont les mécanismes pathologiques sont encore • un mouchage : initialement mucopurulent, bilatéral, il a
mal connus. C’est un diagnostic d’élimination (bilan aller- tendance à devenir unilatéral avec un caractère purulent
gologique négatif, pas d’hyperéosinophilie). franc (jaune, vert), éventuellement sanglant, homolatéral à
Évolution la sinusalgie ;
• une obstruction nasale : fréquente, elle persiste à un degré
Une évolution favorable est de règle en 8-10 jours, souvent variable après la rhinite aiguë mais devient unilatérale,
spontanément. Il n’est pas rare de voir survenir une petite homolatérale à la douleur et au mouchage.
touche laryngée, trachéale ou bronchique qui témoigne de
la tendance des infections virales à diffuser à l’ensemble 2. Signes généraux
de la muqueuse respiratoire. La surinfection bactérienne On note une réapparition du syndrome infectieux ayant
est possible mais non obligatoire car l’agression virale accompagné la rhinite aiguë, avec une hyperthermie à 38-
« prépare le terrain » de l’attaque bactérienne. Une moyenne 38,5 °C. L'état général reste conservé.
de 2 à 4 épisodes par an est banale chez un adulte en rai- 3. Signes physiques
son du grand nombre de types antigéniques viraux en cause. • L’inspection de la face est normale.
Complications • La palpation peut retrouver une douleur exquise à la pres-
La surinfection bactérienne peut être à l’origine d’infec- sion de la zone d’émergence du nerf sous-orbitaire, du côté
tions de voisinage : otite moyenne aiguë, sinusite aiguë, de la symptomatologie rhinologique.
laryngite ou infection bronchopulmonaire aiguë, voire • La rhinoscopie antérieure et postérieure permet d’étudier
aggravation d’un asthme préexistant. la muqueuse pituitaire et ses caractéristiques. Elle retrouve
Une récidive trop fréquente ou une chronicisation des une muqueuse inflammatoire, congestive, couverte de sécré-
troubles doit faire pratiquer un bilan à la recherche d’une tions sales. Elle est cependant actuellement supplantée par
pathologie sous-jacente ou plus exceptionnellement d’un l’endoscopie des fosses nasales à l’optique rigide (0°-25°).
terrain pathologique (déficit immunitaire, diabète…). L’endoscopie est à réaliser après mouchage et anesthésie
locale. Les anesthésiques locaux sont associés à des vaso-
Traitement constricteurs (Xylocaïne, naphazoline) qui entraînent une
Il est purement symptomatique et doit être adapté à l’im- rétraction de la muqueuse et facilitent l’examen.
portance de la gêne fonctionnelle. L’aspirine ou le paracé- Non nécessaire en cas de rhinite simple, elle apporte de
tamol peuvent être utilisés pour lutter contre la fièvre et le précieux renseignements au diagnostic de sinusite. Elle
syndrome pseudogrippal. La vitamine C peut être prescrite apprécie l’état de la muqueuse nasale : œdème, degré de
pour des vertus anti-asthéniques et anti-infectieuses. congestion, présence de sécrétions, capacité de rétraction
En cas d’obstruction nasale, les vasoconstricteurs locaux sous l’effet des vasoconstricteurs ; l’architecture locale :
permettent un soulagement rapide, mais leur durée d’uti- anomalies anatomiques favorisant l’atteinte sinusienne
lisation doit être limitée à 8 jours au maximum. La poso- après rhinite aiguë risquant d’être à l’origine de sinusites
logie doit également être respectée et l’augmentation rapide aiguës récidivantes, voire de sinusites chroniques par obs-
des prises quotidiennes par un patient doit faire craindre tacle à la ventilation et au drainage sinusien (concha bul-
l’installation d’une pharmacodépendance et faire inter- losa, cornet moyen inversé, déviation septale) ; visualisa-
rompre le traitement (ne pas renouveler la prescription dans tion du méat moyen, congestif, inflammatoire. La présence
ce cas). Les vasoconstricteurs locaux sont préférables aux de pus à ce niveau signe le diagnostic.
vasoconstricteurs généraux, en raison des effets secondaires • Le reste de l’examen clinique doit être complété par un
examen oropharyngé (rougeur diffuse, surtout rhinorrhée paroxysmes peuvent s’associer à des vertiges, une tension
postérieure : traînée purulente de la paroi postérieure du des globes oculaires et avoir un retentissement psychique
pharynx ; par un examen dentaire, indispensable au dia- important. Les douleurs peuvent cependant mimer des dou-
gnostic étiologique ; par un examen des tympans, à la leurs de type névralgique : névralgie atypique du trijumeau,
recherche d’une otite séromuqueuse en particulier ; par un de territoire V1 et V2, ou de type algie vasculaire de la face ;
examen pulmonaire à la recherche d’un encombrement • des troubles ophtalmologiques sont fréquemment asso-
bronchique avec toux productive. L’association de l’atteinte ciés. Il peut s’agir d’une baisse de l’acuité visuelle, d’ano-
sinusienne à des anomalies tympaniques et bronchiques malie du champ visuel (scotome paracentral, puis central)
doit faire évoquer une atteinte de l’ensemble de la ou du fond d’œil (œdème papillaire avec possibilité d’abou-
muqueuse respiratoire (naso-sinuso-tympano-bronchique) tir à une atrophie du nerf optique), d’une paralysie des nerfs
et modifie le pronostic évolutif de l’épisode aigu ; par un oculomoteurs ;
examen ophtalmologique à la recherche de complications ; • la symptomatologie rhinologique est pour sa part totale-
par un examen neurologique, au moindre doute quant à une ment aspécifique et inconstante. L’endoscopie retrouve des
possible complication cérébroméningée. sécrétions purulentes postérieures (arc choanal, queue du
cornet inférieur) sur une muqueuse inflammatoire.
4. Examens complémentaires Le bilan radiologique est indispensable au diagnostic. Des
Aucun examen complémentaire n’est nécessaire devant ce radiographies standard en incidence de Hirtz (occiput-
tableau typique dont le diagnostic est avant tout clinique. plaque) ou crâne de profil montrent une opacité du sinus
Une thérapeutique peut être d’emblée mise en route. Cer- sphénoïdal. Le scanner permet, au mieux, de poser le dia-
tains auteurs préconisent un bilan radiologique, qui permet, gnostic positif et d’apprécier le retentissement de la col-
en plus d’apporter une preuve radiologique au diagnostic, lection intrasinusienne sur les structures de voisinage
de faire un bilan des lésions (atteinte des autres cavités sinu- (orbite, vaisseaux).
siennes, anomalie architecturale) et de servir de référence
pour les contrôles ultérieurs. Les clichés radiographiques 3. Sinusite ethmoïdale
standard comportent 4 incidences : nez-menton-plaque (inci- Une sinusite ethmoïdale aiguë isolée est rare chez l’adulte,
dence de Blondeau), nez-front-plaque (incidence face haute), contrairement à l’enfant chez qui le classique tableau d’eth-
occiput-plaque (incidence de Hirtz) et profil. Le sinus maxil- moïdite aiguë est de loin le plus fréquent. Une participa-
laire s’étudie sur le Blondeau et le profil, les autres clichés tion ethmoïdale est cependant constante dans les infections
servant dans le cas décrit à étudier l’état éventuel des autres aiguës des grands sinus, puisque leurs voies de drainage
sinus. On recherche une opacité complète d’un sinus maxil- traversent le labyrinthe ethmoïdal. L’ethmoïde antérieur est
laire, franche, homogène, homolatérale à la douleur ou par- touché dans les sinusites aiguës maxillaires et frontales,
fois une opacité partielle avec niveau liquidien ; une partici- l’ethmoïde postérieur dans les sphénoïdites. L’atteinte eth-
pation éventuelle des autres cavités sinusiennes ; des moïdale est souvent asymptomatique d’un point de vue cli-
anomalies anatomiques coexistantes. nique, alors qu’elle est la cause principale de l’obstruction
ostiale d’un grand sinus. L’atteinte ethmoïdale peut cepen-
Formes cliniques dant être cliniquement perceptible et devra être évoquée
devant des céphalées fronto-orbitaires pulsatiles ; une pho-
1. Sinusite frontale aiguë tophobie ; une douleur à la pression de l’unguis ; une dou-
Au décours d’une rhinite aiguë banale, apparaît une dou- leur à la mobilité des globes oculaires.
leur sus-orbitaire, pulsatile, ou à type de pesanteur, per- Ces signes sont caractéristiques mais non isolés, noyés dans
manente ou qui évolue selon un cycle caractéristique avec le reste de la symptomatologie.
deux acmés, l’un en fin de matinée, l’autre en fin d’après-
midi ; l’intensité de la douleur peut devenir intolérable et 4. Pansinusite
nécessiter un drainage en urgence (clou de Lemoine). La Le plus souvent, plusieurs cavités sinusiennes sont concer-
douleur peut aussi avoir un siège plus atypique, dans l’angle nées, réalisant un tableau de pansinusite aiguë (ethmoïdo-
interne de l’œil avec irradiation dans les tempes. Les autres fronto-maxillaire). Les manifestations cliniques corres-
signes sont identiques à ceux de la sinusite maxillaire. pondent à un amalgame des différents tableaux
précédemment décrits.
2. Sinusite sphénoïdale
Diagnostic étiologique
Rarement isolée, elle est de diagnostic clinique difficile car
Les origines les plus fréquentes des sinusites aiguës résul-
la symptomatologie est fréquemment atypique. Dans la
tent de la dépendance des cavités sinusiennes par rapport
forme classique, on décrit :
aux fosses nasales et du contact étroit de ces cavités avec
• des céphalées : les céphalées sphénoïdales sont des dou-
le complexe alvéolo-dentaire prémolo-molaire.
leurs profondes rétro-orbitaires. Elles peuvent aussi être
localisées à l’occiput, au vertex ou à la région temporo- 1. Sinusite rhinogène
pariétale. Des irradiations sont possibles vers la nuque, le On distingue en fonction de l’évolution :
cou, le bord postérieur du muscle sterno-cléido-mastoïdien. • Sinusite accident
Il peut s’agir d’une simple pesanteur ou de violentes dou- Elle fait suite à une rhinite ou rhinopharyngite aiguë infec-
leurs pulsatiles. Elles sont permanentes, avec exacerbation tieuse. Les germes les plus fréquemment retrouvés sont :
le matin au réveil, ou à heure fixe pour chaque malade. Les Hæmophilus influenzae, pneumocoque et autres strepto-
coques pyogènes, staphylocoques, Moraxella catarrhalis. objective une dent mobile, douloureuse, dont la percussion
Dans la plupart des cas, grâce à un traitement adapté, la gué- est vivement ressentie, et entourée par un érythème gingi-
rison est obtenu en 8-10 jours. Elle est définie par la dispa- val. On note, sur les clichés radiographiques, un élargisse-
rition de toute la symptomatologie clinique qui traduit un ment desmodontal au niveau de la dent en cause. Cet épi-
retour à l’état antérieur de l’intégrité de la muqueuse et des sode peut évoluer vers une autonomisation du foyer
fonctions d’aération et du drainage des cavités sinusiennes. sinusien, en cas d’absence de traitement ou de traitement
Un contrôle radiologique n’est souhaitable que devant la per- dentaire insuffisant. Un foyer infectieux dentaire est à évo-
sistance de signes fonctionnels. Il existe cependant un déca- quer systématiquement en cas de sinusite maxillaire réci-
lage entre la disparition des signes cliniques et la normali- divante ou chronique.
sation radiologique qui survient après 30 jours (restauration
d’une cavité sinusienne aérique, aux parois fines). 3. Sinusite aiguë sur hémosinus
• Sinusite aiguë récidivante Les risques de surinfection d’un hémosinus sont grands, le
Les épisodes sinusiens aigus se répètent, séparés par une sang constituant un excellent milieu de culture, d’autant
normalisation de l’aspect endoscopique, radiologique et plus qu’une dysperméabilité ostiale par œdème ou lésions
une disparition complète de toute symptomatologie. Un muqueuses, empêchant le drainage et l’aération de la cavité
bilan à la recherche de facteurs généraux ou locaux favo- sinusienne, se surajoute souvent. Un hémosinus peut être
risants est indispensable : consécutif à une épistaxis sévère, maîtrisée par un tam-
– facteurs exogènes les plus fréquents : pollution (milieu ponnement antéro-postérieur prolongé (plus de 48 heures) ;
citadin, milieu professionnel), tabac ; un traumatisme mécanique direct avec risque de sinusite
extériorisée d’emblée en cas de solution de continuité de
– facteurs endogènes : allergie, déficit immunitaire, dia-
la paroi des sinus. Le risque de surinfection est majoré par
bète, anomalies anatomiques (concha bullosa, déviation
un éventuel corps étranger intrasinusien (éclat de verre,
septale…).
lambeau de muqueuse incarcéré), par l’iatrogénicité d’une
Les facteurs favorisants sont souvent multiples, intriqués. réanimation lourde, par l’existence de tares préexistantes
La prise en charge thérapeutique du terrain est indispen- (diabète, immunodépression…) ou coexistantes (polytrau-
sable, au même titre que le traitement de l’épisode aigu. matisé…) ; un barotraumatisme (survenu au cours d’un vol
• Sinusite chronique en attitude ou lors de plongée sous-marine). Les barotrau-
Elle ne sera pas développée ici. Il faut cependant savoir matismes sont favorisés par une obstruction de l’ostium
qu’elle est caractérisée par un syndrome sinusien a minima, sinusien (anomalie architecturale, rhinite simple) qui
continu, émaillé de poussées aiguës de réchauffement, ren- empêche une équilibration de la pression entre les fosses
dant le diagnostic différentiel difficile entre des sinusites nasales et les cavités sinusiennes. Le contexte est évoca-
aiguës récidivantes et une forme chronique. Il n’existe pas teur : la clinique est caractérisée par une douleur brutale,
de rémission franche clinique, endoscopique ou radiolo- violente en regard du sinus atteint (frontal) avec épistaxis
gique entre les épisodes aigus. (par suffusion ou décollement de la muqueuse). Le bilan
2. Sinusite dentaire radiologique montre un épaississement des parois par
œdème muqueux et un hémosinus avec niveau liquidien.
Les sinusites dentaires sont le plus souvent chroniques.
Cependant, il existe des formes aiguës de sinusites maxil- Quelle que soit l’origine de l’hémosinus, il semble préfé-
laires d’origine dentaire secondaires à une desmodontite rable d’instaurer une antibiothérapie de couverture jusqu’à
ou une pulpite aiguës. Les dents en cause sont les molaires la vidange de l’hémosinus et d’écourter le méchage nasal
et prémolaires, avec atteinte par continuité ou contiguïté afin de restaurer la perméabilité naso-sinusienne.
du sinus maxillaire. Le processus infectieux peut ensuite 4. Sinusite nosocomiale (sinusite de réanimation)
diffuser vers les sinus ethmoïdaux et frontaux.
Les signes cliniques passent souvent au second plan par Les facteurs en cause sont multiples :
rapport au tableau de pulpite aiguë qui motive une consul- • iatrogénicité : corps étrangers endonasaux (sonde d’in-
tation odontologique. Cependant cette étiologie impose un tubation nasotrachéale, sonde nasogastrique), médicaments
bilan dentaire clinique devant toute sinusite maxillaire immunosuppresseurs (corticothérapie) ;
aiguë, à la recherche des signes de pulpite ou de desmo- • terrain débilité (défaillance multiviscérale, transplantés)
dontite aiguë. Une pulpite aiguë est à évoquer devant l’exis- auquel s’ajoutent des tares préexistantes (diabète) ;
tence de douleurs dentaires violentes, intenses, provoquées • agressivité des germes rencontrés : atteinte multimicro-
par le contact mécanique, le contact avec les aliments sucrés bienne dans 70 % des cas avec prédominance du bacille
ou acides, avec le chaud ou le froid. Ces douleurs sont spon- pyocyanique résistant (hospitalisme microbien).
tanées, lancinantes et localisées au début, puis pulsatiles,
insomniantes (exacerbées par le décubitus) et irradient à 5. Sinusite sur tumeur intrasinusienne
l’ensemble de la zone trigéminale homolatérale. L’examen (maligne, bénigne)
dentaire retrouve, au niveau de la dent en cause, une cavité Après l’épisode aigu de surinfection, une absence de rémis-
profonde dont le fond est tapissé par la dentine ramollie, sion au contrôle radiologique à un mois, parfois associée
recouvrant la pulpe sous-jacente. Une desmodontite aiguë à une persistance a minima de la symptomatologie clinique,
fait généralement suite à l’atteinte pulpaire. L’interroga- motive un bilan plus approfondi qui permettra de poser le
toire retrouve une douleur de type pulpaire et l’examen diagnostic étiologique.
Otites aiguës
Étiologie, diagnostic, traitement
PR Christian DUBREUIL
Centre Hospitalier Lyon Sud, 69495 Pierre-Bénite Cedex.
lorsque l’otite survient en dessous de 18 mois et qu’il Le cotrimoxazole n’est plus utilisé compte tenu de la
existe d’une façon concomitante une infection virale. résistance du streptocoque de sensibilité diminuée à la
Les défauts d’observance du traitement sont aussi fré- pénicilline. L’association érythromycine sulfisoxazole
quemment retrouvés (arrêt prématuré du traitement, active in vitro sur le streptocoque, de sensibilité dimi-
dose insuffisante). nuée à la pénicilline, montre un taux d’échec clinique
• L’échec clinique se manifeste dans les 48 à 72 h qui important vis-à-vis de ce germe.
suivent le début du traitement antibiotique par l’absence
d’amélioration ou par l’aggravation de la symptomato- 2. Aspirine et paracétamol
logie. La paracentèse est obligatoire, avec examen Ils sont utilisés systématiquement pour traiter la fièvre et
bactériologique et recherche de germes résistant au les douleurs.
traitement initial (pneumocoque de sensibilité diminuée
à la pénicilline). 3. Corticoïdes et anti-inflammatoires
• Un exsudat stérile ou une otite séreuse persiste chez non stéroïdiens
50 % des enfants au 15e jour, chez 30 % des enfants au Il n’y a pas assez d’études cliniques pour démontrer
30e jour, même avec un traitement antibiotique efficace. l’efficacité en termes de rapidité de disparition de
Cette otite séreuse peut faire le lit : symptômes, de prévention de l’otite séreuse résiduelle
– de l’otite séromuqueuse (avec épanchement en utilisant des corticoïdes et des anti-inflammatoires
muqueux) ; ses conséquences sur l’audition, la parole, non stéroïdiens.
sont d’autant plus importante que l’enfant est jeune ;
– de l’otite moyenne aiguë à répétition, le liquide de 4. Soins locaux
l’oreille moyenne servant de milieu de culture pour le Les lavages de nez au sérum physiologique, le mouchage
développement des germes issus du rhino-pharynx. Il avec ou sans utilisation d’une mouchette, les anesthé-
se peut que la paracentèse puisse diminuer la fréquence siques locaux dans le conduit auditif externe repré-
de ses otites séromuqueuses résiduelles. sentent les soins locaux les plus efficaces.
• Les complications telles que la mastoïdite, les infec-
tions labyrinthiques (surdité d’oreille interne, vertiges, 5. Paracentèse
acouphènes), la paralysie faciale, les méningites, les Une paracentèse est pratiquée en cas d’échec du traitement
abcès extraduraux et cérébraux, la thrombophlébite du antibiotique évalué à la 48e ou 72e h, nécessitant une
sinus latéral, sont devenues exceptionnelles en France, aspiration pour examen bactériologique et un antibiogramme
depuis l’utilisation systématique des antibiotiques dans spécialement s’il s’agit d’un pneumocoque résistant.
le traitement de l’otite moyenne aiguë.
Indications
Traitement
L’attitude thérapeutique a été définie lors du consensus
sur le traitement de l’otite moyenne aiguë en 1996 et
Moyens tient compte de l’évolution des résistances des germes.
• Il existe un syndrome otite-conjonctivite : l’infection
1. Antibiotiques à Hæmophilus influenzæ est probable.
Les macrolides ne sont pas recommandés du fait de la Il faut prescrire soit amoxicilline-acide clavulanique
résistance habituelle d’Hæmophilus influenzæ, et acquise 80 mg/kg/j soit une céphalosporine de 2e ou 3e génération.
du pneumocoque, y compris pour les nouveaux macro- • Il n’y a pas de facteur de risque d’infection à pneu-
lides actuellement commercialisés. mocoques de sensibilité diminuée à la pénicilline
L’amoxicilline ne peut être utilisée en raison de l’émer- (enfant de plus de 2 ans, pas de vie en collectivité, pas
gence des souches d’Hæmophilus influenzæ sécrétrices de traitement dans les 3 derniers mois par des amino-
de bêtalactamase. pénicillines) :
En revanche, la posologie élevée, 150 à 200 mg/kg/j est – utilisation des 3 classes de céphalosporines ;
utilisée dans le traitement des otites à Streptococcus – utilisation de l’association érythromycine-sulfisoxazole.
pneumoniæ de sensibilité diminuée à la pénicilline. • Il existe des facteurs de risque d’infection à pneumo-
Compte tenu de la fréquence des souches d’Hæmophilus coque de sensibilité diminuée à la pénicilline (v. supra),
influenzæ, de Moraxella catarrhalis et de staphylocoque il faut utiliser :
productrices de bêtalactamases, il faut donc utiliser des – amoxicilline acide clavulanique 80 mg/kg/j en 3 prises ;
céphalosporines orales, l’association amoxicilline-acide – cefpodoxime Proxétil 8 mg/kg/j en 2 prises ;
clavulanique, stables aux bêtalactamases. – céfuroxime Axétil 30 mg/kg/j en 3 prises.
En ce qui concerne le streptocoque de sensibilité diminuée La durée de l’antibiothérapie est de 8 jours ; le nombre
à la pénicilline, l’activité des céphalosporines de de prises quotidiennes doit être respecté.
1re génération est modérée, meilleure pour celles de 2e et • La durée du traitement antibiotique peut être réduite à
3e générations (sauf exception), l’amoxicilline acide 5 jours s’il n’existe pas de facteurs de risque d’infection
clavulanique. à pneumocoque de sensibilité diminuée à la pénicilline.
Audiométrie tonale
PEA d'un neurinome de grade I
Elle confirme l’atteinte neurosensorielle. Les courbes
peuvent prendre plusieurs formes : en plateau ; en cupule
(évocatrice d’hydrops labyrinthique) ; descendante
(prédominante sur les fréquences aiguës) ; ascendante 2 Potentiels évoqués auditifs normal et rétrocochléaire
(prédominante sur les graves). (neurinome).
Tomodensitométrie haute résolution Le 1er diagnostic à éliminer devant une surdité d’appa-
des rochers rition brutale est le neurinome de l’acoustique : 10 % des
neurinomes de l’acoustique se révèlent par ce symptôme.
Cet examen doit être réalisé en cas de suspicion d’une Ce diagnostic doit toujours être évoqué et recherché
malformation de l’oreille interne, notamment chez (potentiels évoqués auditifs, imagerie par résonance
l’enfant, ou en cas d’atteinte associée de l’oreille magnétique).
moyenne (otite moyenne aiguë, otite chronique, trau- Les autres tumeurs de l’angle ponto-cérébelleux sont
matisme). plus rares.
Surdité brutale
endocochléaires rétrocochléaires
sujet jeune
Étiologie la plus fréquente, elle doit être évoquée chez Elles sont évoquées sur la prise de traitements oto-
tout patient présentant des facteurs de risque cardio- toxiques dont les plus fréquents sont les aminosides,
vasculaires, des hémopathies ou un traitement par le furosémide (Lasilix), le cisplatine, le 5-fluoro-uracile,
œstroprogestatif. la quinine et l’aspirine à forte dose.
Ces surdités sont bilatérales, symétriques et progres-
sives (voir : Pour approfondir 3).
Causes virales
Les virus les plus fréquemment retrouvés sont le virus
ourlien, l’herpesvirus, la rougeole, la rubéole. Surdités traumatiques
Le diagnostic de certitude d’infection virale est difficile. La fistule périlymphatique doit être évoquée devant
Il est évoqué devant un contexte épidémiologique asso- une fluctuation de l’audition, notamment après un
cié à une séroconversion affirmée sur 2 prélèvements traumatisme crânien ou pressionnel. Elle est souvent
réalisés à 15 jours d’intervalle et dosés dans le même associée à un trouble de l’équilibre. Elle est due à une
laboratoire. fuite de liquide périlymphatique au niveau des fenêtres
ronde et (ou) ovale. Son traitement est chirurgical.
Causes bactériennes Les fractures du rocher, les traumatismes directs par
éléments contondants, les surdités après chirurgie de
Les otites moyennes aiguës et l’otite chronique évolutive l’oreille, l’électrocution et la fulguration ne posent pas
peuvent provoquer une atteinte neurosensorielle de difficulté diagnostique.
d’aggravation rapide en cas de labyrinthite soit par
contiguïté, soit par fistule labyrinthique. L’atteinte
labyrinthique peut être inflammatoire, permettant Maladie de Ménière
d’espérer une récupération auditive, ou suppurée, la
récupération étant rare. La triade symptomatique est caractéristique : surdité,
vertiges et acouphènes évoluant par crises. L’aspect de
La syphilis est un diagnostic classique mais rare.
la courbe audiométrique en cupule est évocateur.
Surdités auto-immunes
Surdités idiopathiques (brusques)
Ce diagnostic est à évoquer dans le cadre de maladie
générale connue ou en cas de surdités de perception Il s’agit d’un diagnostic d’élimination, lorsque les autres
fluctuante ou bilatérale. causes n’ont pas fait leurs preuves. C’est la forme la
Les diagnostics les plus fréquents sont la périartérite plus fréquente.
noueuse, la maladie de Wegener, le syndrome de Cogan.
Autres
Traitement étiologique
Les antiviraux, les antiagrégeants, les anticoagulants
Traitement chirurgical d’une fistule périlymphatique, sont prescrits en fonction de l’étiologie. ■
antibiothérapie et corticothérapie dans le cadre d’une
labyrinthite bactérienne…
POUR APPROFONDIR
Tuméfaction parotidienne
Orientation diagnostique
Pr Jean-Jacques PESSEY, Dr Josiane PERCODANI
Service d’oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale, hôpital de Rangueil, 31403 Toulouse cedex 4
Examens complémentaires
1. Ponction cytologique
Diagnostic d’une tuméfaction
parotidienne
C’est un moyen de diagnostic simple, rapide, peu trauma-
tisant, sensible et peu coûteux, surtout intéressant dans la Diagnostic clinique +++
pathologie tumorale. Elle n’a de valeur que si elle est posi- Tuméfaction comblant le sillon rétromandibulaire et soulevant en
dehors le lobule de l’oreille.
tive ; elle nécessite, dans l’interprétation des résultats, un
cytologiste expérimenté. Elle n’exclut jamais un contrôle Examens complémentaires :
anatomopathologique, lorsqu’une exérèse est pratiquée. – ponction cytologique R tumeurs
Elle ne présente aucun risque de dissémination cellulaire – radiographie standard R lithiase
– sialographie R lithiase
tumorale ou de lésion du nerf facial, contrairement à la parotidites
biopsie qui est formellement contre-indiquée. maladies
de système
2. Radiographies standard – scintigraphie R cystadénolymphome
maladies
Leur intérêt est limité à la lithiase salivaire, peu fréquente de système
au niveau de la parotide. – échographie R tumeurs volumineuses
lithiases
3. Sialographie – TDM R tumeurs
– IRM R tumeurs
Son principe est l’opacification du système canalaire par
un produit de contraste, injecté par le canal de Sténon. Son
intérêt est limité dans la pathologie tumorale car elle ne
visualise la tumeur que par des signes indirects de dépla- Orientations diagnostiques devant
cement des canaux salivaires. En cas de lithiase paroti- une tuméfaction parotidienne
dienne, de parotidite infectieuse ou inflammatoire, d’hy-
pertrophie salivaire, les modifications canalaires ou
unilatérale
parenchymateuses sont suffisamment caractéristiques pour
que le clinicien puisse faire le diagnostic. Tumeurs
• Scintigraphie au technétium 99m : son principe est la 1. Classification histologique
fixation sur les glandes salivaires du 99mTc, après admi-
nistration intraveineuse. Seules les tumeurs dont la taille • Elles sont le plus souvent bénignes. L’adénome pléo-
est supérieure à 1,5 cm sont visualisées. Le cystadéno- morphe est la plus fréquente (60 à 70 % des tumeurs paro-
lymphome papillaire est la seule tumeur capable de fixer tidiennes). Les autres tumeurs bénignes sont plus rares,
le 99mTc de façon précoce, intense et durable. Cet examen dominées par le cystadénolymphome, ou tumeur de War-
permet, en outre, d’analyser simultanément et pendant une thin (5 à 14 % des tumeurs parotidiennes). Parmi les autres
période donnée le fonctionnement des différentes glandes tumeurs bénignes, il faut citer :
salivaires (intérêt dans le syndrome de Gougerot-Sjögren). – l’adénome oncocytaire ;
• Échographie : seul le lobe superficiel de la parotide est – l’adénome à cellules basales ;
• Carcinomes à cellules acineuses qui se voient à tout âge, – l’orifice du canal de Sténon rouge avec salive rare mais
surtout chez la femme. Leur évolution est lente, il n’y a pas claire.
de critère pronostique histologique. Des récidives locales Sur le plan biologique, il existe une lymphocytose avec
ou ganglionnaires peuvent survenir tardivement. Les méta- mononucléose, l’amylasémie est élevée.
stases sont rares. La sérologie retrouve une élévation du taux des anticorps
La fréquence de survenue d’un carcinome sur un adénome à deux dosages.
pléomorphe dépend de la durée d’évolution de l’adénome D’autres virus peuvent plus rarement entraîner des paroti-
pléomorphe (1,5 % s’il évolue depuis moins de 5 ans, 9,5 % dites : coxsackie A, Échovirus, grippe, mononucléose
s’il évolue depuis plus de 15 ans). Le pronostic dépend de infectieuse.
la taille de la tumeur.
2. Parotidites aiguës bactériennes
4. Conduite à tenir devant une tuméfaction Les signes fonctionnels sont représentés par une douleur
parotidienne unilatérale vive et un léger trismus. Les signes généraux sont marqués
avec fièvre et asthénie intense.
Le but est d’obtenir un diagnostic de nature de la tumeur.
Pour cela, l’attitude est univoque : il faut réaliser une paro- À l’examen on retrouve :
tidectomie exploratrice sous anesthésie générale, avec exa- – une tuméfaction parotidienne inflammatoire ;
men anatomopathologique extemporané. – une douleur provoquée intense ;
Toute tumeur parotidienne impose soit une parotidectomie – un œdème prenant le godet ;
totale, soit une parotidectomie exofaciale. Il ne faut pas – l’orifice du canal de Sténon turgescent avec issue de salive
réaliser de tumorectomie ou d’énucléation, en raison du purulente.
risque de récidive. Sur le plan biologique, il existe une hyperleucocytose avec
Dans tous les cas, il est impératif de prévenir le patient des polynucléose.
modalités de l’intervention chirurgicale et des risques de Le traitement antibiotique doit rapidement être instauré.
complications : Ces formes, lorsqu’elles surviennent chez le sujet âgé,
déshydraté, en mauvais état général, sont de mauvais pro-
– une paralysie ou une parésie faciale sont en général tran-
nostic.
sitoires, sauf en cas de section du nerf facial accidentelle
ou de nécessité ; 3. Parotidites bactériennes chroniques non
– le syndrome de Frey est représenté par une sudation tem- spécifiques
porale lors des repas ou d’une stimulation salivaire. Il est Elles sont plus fréquentes chez l’enfant (elles peuvent sur-
de survenue inconstante et imprévisible ; venir chez l’adulte mais sont alors en général bilatérales).
– la dépression résiduelle de la région parotidienne est quasi Elles se manifestent sous la forme de poussées de paroti-
constante ; dites aiguës récidivantes. La sialographie est évocatrice et
– l’insensibilité de la région auriculaire est de récupération retrouve des images arrondies, en « plomb de chasse », qui
aléatoire et tardive. persistent aux clichés en évacuation, les canaux salivaires
sont normaux.
À l’examen, la glande parotide est parfois encore tuméfiée. Parotidites chroniques d’origine toxique
La palpation du canal de Sténon recherche la présence d’un Certaines intoxications chroniques sont responsables d’une
calcul. L’ostium du canal de Sténon est rouge, tuméfié, non tuméfaction parotidienne sensible : plomb, pesticides,
purulent. insecticides, iodures.
Les radiographies sans préparation recherchent le calcul.
La sialographie retrouve parfois la lacune due au calcul, et Calcinose salivaire
surtout une dilatation du canal en amont de l’obstacle. Sur
Elle se présente sous la forme d’une parotidite chronique
les clichés en évacuation, l’arrêt du produit de contraste
bilatérale ou à bascule, avec tuméfaction parotidienne dou-
avec rétention en amont est évocateur.
loureuse intermittente, salive séropurulente. Elle survient
préférentiellement chez les femmes de la cinquantaine, et
se caractérise par la présence de multiples calcifications
Orientations diagnostiques devant intracanalaires. Les radiographies sans préparation visua-
une tuméfaction parotidienne lisent les calcifications au niveau des deux parotides. La
bilatérale sialographie met en évidence des images arrondies, lipio-
dolées dans le parenchyme et des canaux légèrement dila-
Tuméfactions parotidiennes au cours des tés. ■
maladies de système
1. Sarcoïdose
Points Forts à retenir
La tuméfaction parotidienne est indolore, bilatérale, d’ins-
tallation rapide et de régression spontanée. L’association
parotidite, paralysie faciale et uvéite réalise le classique • Une tuméfaction parotidienne unilatérale
syndrome de Heerfordt. L’association d’une atteinte paro- doit faire évoquer en premier lieu une tumeur.
tidienne, sous-mandibulaire et lacrymale réalise le syn- • Une tuméfaction parotidienne bilatérale
drome de Mikulicz. doit faire évoquer en premier lieu une maladie
de système.
2. Syndrome de Gougerot-Sjögren • Une tuméfaction parotidienne unilatérale
La tuméfaction parotidienne est indolore, d’installation doit être opérée, les tuméfactions parotidiennes
lente, en général inhomogène et indurée au stade de sclé- bilatérales ne sont, en général, pas chirurgicales.
rose glandulaire. Elle doit faire rechercher une sécheresse En cas de pathologie tumorale, il ne faut jamais
buccale et oculaire. réaliser de tumorectomie ou d’énucléation, mais
toujours une parotidectomie totale ou subtotale.
3. Leucémies
• Il ne faut pas multiplier inutilement les examens
Au cours des leucémies lymphoïdes chroniques, une tumé- complémentaires.
faction parotidienne indolore et bilatérale peut être isolée
ou s’intégrer dans le cadre d’un syndrome de Mikulicz.
Au cours des leucémies aiguës, une tuméfaction paroti-
dienne peut être en rapport avec une infiltration leucémique
ou une infection virale dans le cadre d’une immuno-
dépression. POUR EN SAVOIR PLUS
Fiere A, Cartier E, Breton P, Faucon M, Freidel M. Intérêt de la cyto-
Parotidomégalies nutritionnelles ponction à l’aiguille fine dans le diagnostic des tuméfactions des
glandes salivaires. Rev Stomatol Chir Maxillofac 1990 ; 91 : 291-4.
1. Par excès
Lacomme Y, Dhermain F, Serrano E. Cylindromes de la parotide. À
Excès de consommation d’hydrates de carbone, diabète, propos de 11 cas. Ann Otolaryngol 1989 ; 106 : 27-34.
obésité, éthylisme chronique. Serrano E, Lemoine C, Boutault F, Pessey JJ, Lacomme Y. Les exa-
mens complémentaires dans la pathologie parotidienne. Revue offi-
2. Par carence cielle de la Société française d’ORL 1991 ; 8 : 21-5.
Grandes malnutritions, anorexie mentale.
Vertige
Orientation diagnostique
PR Jean-Pierre SAUVAGE
Service ORL, CHU Dupuytren, 87000 Limoges.
Examen clinique
L’examen clinique effectué au cours de la crise est
d’une importance capitale car il recueille des signes ves-
1. Nystagmus vestibulaires
tibulaires et neurologiques qui peuvent disparaître par la • Le nystagmus vestibulaire spontané est un déplace-
suite. À distance de la crise, le diagnostic repose ment rythmique des globes oculaires constitué d’une
essentiellement sur l’interrogatoire et l’examen clinique. secousse lente d’origine vestibulaire et d’une secousse
Les examens instrumentaux aident à poser l’indication rapide qui ramène l’œil à sa position de départ. Par
d’une imagerie en cas d’examen neurologique normal. définition, c’est le sens de la secousse rapide qui définit
le sens du nystagmus. Le nystagmus horizontal rotatoire
Diagnostic positif est en faveur d’une d’origine périphérique. Les nystagmus
purs, vertical, horizontal ou rotatoire, sont en faveur
Il repose sur la mise en évidence des éléments du d’une origine centrale.
syndrome vestibulaire, sur l’examen neurologique et • Le nystagmus vestibulaire provoqué de positionne-
sur l’étude de la fonction auditive et vestibulaire. ment est recherché par la manœuvre de Dix et Hallpike
(fig. 1) qui consiste à allonger brutalement le patient, la
Interrogatoire tête tournée soit à droite, soit à gauche, dans le plan du
canal postérieur jusqu’à atteindre une position tête
Le vertige est le symptôme majeur. pendante au bord de la table d’examen. On observe alors
parfois, soit immédiatement, soit après un temps de moins un audiogramme tonal à la recherche d’une surdité
latence l’apparition d’un nystagmus dont il convient de de transmission (en faveur d’une atteinte de l’oreille
noter le sens, la durée et s’il s’accompagne ou non d’un moyenne), d’une surdité de perception unilatérale sur
vertige. les fréquences graves (en faveur d’un hydrops endo-
labyrinthique) ou d’une surdité de perception unilatérale
2. Ataxie vestibulaire avec amputation des fréquences aiguës (en faveur d’un
Elle résulte de la présence d’une hypotonie homolatérale neurinome de l’acoustique). L’étude des potentiels
à la lésion. Elle est surtout nette au cours de la crise évoqués auditifs est indispensable en cas de surdité
vertigineuse. Dans la station debout les yeux fermés, de perception unilatérale pour préciser son caractère
il existe un signe de Romberg vestibulaire caractérisé endocochléaire ou rétrocochléaire. En cas de surdité
par une déviation latérale du corps, lente et progressive, de type rétrocochléaire, une imagerie par résonance
survenant après un temps de latence, avec une tendance magnétique (IRM) avec injection de gadolinium est
à la chute. À la marche, il y a une tendance à la déviation demandée directement à la recherche d’un neurinome
latérale, les pieds se croisant : c’est la marche en ciseau. de l’acoustique.
Si l’on demande au sujet de tendre les bras en avant et de
placer ses index face à ceux de l’opérateur, on constate, 6. Examen vestibulaire instrumental
après fermeture des yeux, une déviation des index dont Il comporte un enregistrement par électro- ou vidéo-
on doit noter le côté. nystagmographie (fig. 2) des nystagmus spontanés et
provoqués et une étude de la réflectivité vestibulaire par
3. Signes otologiques les épreuves rotatoire et calorique. Ces examens recher-
La recherche de symptômes auditifs (surdité et acouphènes chent des éléments topographiques essentiels.
unilatéraux) et l’otoscopie (découverte d’une otorrhée • Les nystagmus spontanés d’origine périphérique
purulente) apportent des éléments en faveur d’une origine sont exagérés dans l’obscurité et lorsque le regard se
périphérique. dirige du côté de la secousse rapide. Au contraire, les
nystagmus spontanés d’origine centrale changent de
4. Signes neurologiques sens avec la direction du regard et sont exagérés dans la
Des signes cérébelleux, des troubles moteurs et sensitifs, lumière et par la fixation oculaire.
une paralysie d’un nerf crânien sont surtout recherchés. • Les nystagmus positionnels d’origine périphérique
sont transitoires et s’accompagnent de violents vertiges.
5. Examen cochléaire instrumental Les nystagmus positionnels d’origine centrale sont
Il donne des arguments topographiques en faveur d’une prolongés et il n’y a pas de vertiges associés. En cas de
atteinte de l’oreille moyenne, de l’oreille interne ou compression dans la fosse postérieure, ils s’accompagnent
d’une lésion rétrocochléaire ou centrale. Il comporte au de malaises et de vomissements en jet.
Imagerie
Exemple de nystagmus horizontal L’indication dépend de l’étiologie recherchée. Si l’on
enregistré au cours d’une épreuve cherche une lésion osseuse de l’os temporal (fracture,
otite chronique, processus occupant de l’os temporal,
rotatoire pendulaire
etc.), on demande un examen tomodensitométrique du
rocher. S’il existe des signes neurologiques, un syndrome
vestibulaire central ou une surdité de type rétrocochléaire,
on demande plutôt une imagerie par résonance magné-
tique avec injection de gadolinium. En urgence, si l’on
recherche un hématome cérébelleux et que l’on ne peut
obtenir une imagerie par résonance magnétique, un
examen tomodensitométrique montre l’hématome.
2 L’électronystagmographie utilise le fait que l’œil est un
dipôle et que ses mouvements engendrent des champs Diagnostic différentiel
magnétiques qui peuvent être enregistrés. Il est ainsi possible
de mettre en évidence des nystagmus les yeux fermés ou dans Pour le malade, le vertige est un symptôme difficile à
l’obscurité et de calculer leurs paramètres. La vidéonystag- identifier. La notion d’illusion de déplacement n’est
mographie utilise un système sophistiqué de reconnaissance nette que lorsqu’il s’agit d’illusions rotatoires générées
d’images aux infrarouges pour enregistrer les mouvements par le système des canaux semi-circulaires. Les illusions
oculaires et leurs paramètres. Ces examens peuvent être
remplacés en urgence par une simple vidéonystagmoscopie
engendrées par le système otolithique s’apparentent à un
aux infrarouges qui permet de mieux observer les nystagmus déséquilibre ou à des chutes brutales et n’ont rien de
d’origine vestibulaire. caractéristique. Seul le contexte clinique permet de les
rattacher à l’appareil vestibulaire.
Le diagnostic différentiel est encore compliqué par
le fait que l’anxiété procure des sensations pseudo-
• L’épreuve calorique de Barany teste séparément vertigineuses et qu’à l’inverse les vertiges sont très
chaque labyrinthe postérieur en irriguant successivement anxiogènes. Ainsi, certains patients ont au début une
le tympan avec de l’eau chaude et de l’eau froide à une réelle pathologie vestibulaire qui génère des vertiges.
température de 7 ˚C au-dessus et au-dessous de la tempé- Dans un 2e temps, même si la pathologie a disparu, la
rature du corps. Normalement, sont obtenus pour chaque peur d’avoir un vertige engendre des crises de panique
oreille des nystagmus de sens inverse en fonction de la qui comportent des sensations vertigineuses et font
température de l’irrigation. L’hyporéflexie calorique, croire que le patient n’est pas guéri. De même, l’appré-
voire l’aréflexie, témoigne d’un syndrome destructif ciation d’un résultat thérapeutique est difficile chez ces
vestibulaire unilatéral siégeant au niveau du canal semi- patients car l’angoisse de présenter une nouvelle crise
circulaire latéral ou du nerf vestibulaire, y compris sa entraîne des comportements d’évitement. Par exemple,
portion intra-axiale. le patient n’ose plus sortir de chez lui alors que le
• L’épreuve rotatoire sur un fauteuil selon des accéléra- symptôme n’existe plus.
tions sinusoïdales autour d’un axe vertical, provoque des Pour distinguer le vertige d’une lipothymie, d’un malaise
nystagmus de sens opposé, en fonction du sens de gira- vagal, d’une hypotension orthostatique ou d’une crise de
tion. Une épreuve rotatoire symétrique en cas d’épreuve panique, l’idéal est d’assister à la crise. La découverte
calorique asymétrique témoigne d’une bonne compen- d’un nystagmus spontané ou provoqué identifie le vertige.
sation centrale après une lésion vestibulaire périphé- Si l’on n’assiste pas à la crise, un bon moyen pour
rique. authentifier le vertige est de demander au patient après
• L’étude du réflexe vestibulo-oculaire obtenu lors de les épreuves caloriques d’indiquer si le vertige provoqué
l’épreuve calorique et lors de l’épreuve rotatoire est par cette épreuve est analogue au vertige qu’il a présenté
en faveur d’une lésion cérébelleuse en cas de défaut au cours de la crise.
d’inhibition à la fixation oculaire.
7. Étude des mouvements oculaires
non vestibulaires Diagnostic étiologique
Il s’agit de l’étude de la poursuite oculaire, des Classiquement, on opposait le syndrome périphérique
mouvements saccadés de l’œil et du nystagmus opto- (lésions du labyrinthe ou des voies périphériques) au
cinétique. Ces différents réflexes utilisent des circuits syndrome vestibulaire central (lésions des voies centrales).
encéphaliques dont certaines parties sont communes Le syndrome vestibulaire périphérique est complet
aux réflexes vestibulo-oculaires. Par comparaison, (associant vertiges, nystagmus horizontal rotatoire et
on peut en déduire différents niveaux lésionnels, troubles de l’équilibre) et harmonieux (secousse lente
en particulier des atteintes pédonculaires ou protu- du nystagmus, déviation des index et tendance à la chute
bérantielles. dans le même sens).
Classification
Mieux vaut classer les causes en fonction du caractère et
du type évolutif du vertige. On distingue ainsi trois
types de causes.
• La crise unique est d’apparition brutale, évoluant sur 3 Fracture transversale du rocher (examen tomodensito-
plusieurs jours et régressant progressivement en métrique).
quelques jours à quelques semaines. Elle résulte d’une
lésion brutale parfois réversible récupérant progressive-
ment ou d’une lésion irréversible disparaissant grâce à faciale, surdité de perception brutale et éruption dans la
la compensation centrale. zone de Ramsay Hunt. D’autres virus peuvent être en
• Le vertige paroxystique est un vertige survenant par cause : ourlien, adénovirus, cytomégalovirus, herpès
crises. Les crises résultent d’un dysfonctionnement simple ou simple notion d’épidémie. Les réactions séro-
intermittent de l’appareil vestibulaire. Il en existe 2 variétés. logiques sont peu contributives. Une maladie de Lyme a
La première est constituée de crises continues durant de pu être parfois être incriminée même en l’absence de
20 min à plusieurs heures, séparées par des intervalles neuroborréliose patente. Cliniquement, le diagnostic
sains ou paucisymptomatiques. On parle alors de vertige repose sur l’apparition brutale d’un syndrome vestibulaire
itératif ou récurrent. La deuxième est constituée de vertiges harmonieux typique durant plusieurs jours. Les épreuves
brefs, positionnels ne durant que quelques secondes à caloriques mettent en évidence une aréflexie calorique
quelques minutes du côté opposé au nystagmus spontané. Il n’y a ni symp-
• Les situations vertigineuses chroniques sont faites tômes auditifs, ni signes cérébelleux. La régression des
de manifestations vertigineuses stéréotypées, souvent symptômes se fait soit par la récupération de la fonction
positionnelles, entrecoupées d’accès d’instabilité de vestibulaire soit par compensation centrale. Elle est
durée variable. Elles correspondent à des lésions progres- accélérée par la rééducation vestibulaire et retardée par
sivement destructrices d’un des éléments de l’appareil les thérapeutiques sédatives.
vestibulaire.
4. Thrombose dans le territoire vertébro-basilaire
Crise unique de plusieurs jours • La thrombose peut se situer dans le territoire de
l’artère cérébelleuse postérieure et inférieure (PICA).
Le vertige est continu, « d’une seule tenue », ne laissant Le vertige est très fréquent dans les infarctus cérébelleux.
aucun repos au patient qui doit rester strictement immo- Il existe une ataxie cérébelleuse avec syndrome statique
bile pour éviter d’aggraver le vertige. et cinétique. Les épreuves caloriques sont normales ou
donnent des réponses exagérées. Typiquement, il existe
1. Causes traumatiques à la vidéonystagmographie des anomalies de la poursui-
Le cas le plus fréquent est celui de la fracture transversale te oculaire et des anomalies d’inhibition du réflexe ves-
du rocher où le trait de fracture passe à travers l’oreille tibulo-oculaire par la fixation oculaire. Il faut se méfier
interne, souvent associé à une surdité totale (cophose) et d’une évolution en 2 temps avec constitution d’un
une paralysie faciale (fig. 3). hématome cérébelleux annoncé par des troubles de la
conscience.
2. Otite chronique • La thrombose peut se situer dans le territoire des
Au cours d’une poussée d’otite chronique, le plus souvent branches de l’artère vertébrale. Le syndrome de
cholestéatomateuse, la survenue d’un grand vertige Wallenberg (thrombose de l’artère de la fossette latérale
évoque une labyrinthite infectieuse liée à la propagation du bulbe), avec infarctus de la région latérale du bulbe,
de l’infection au labyrinthe postérieur au travers de la comporte fréquemment un grand vertige avec souvent
membrane de la fenêtre ronde ou par l’intermédiaire aréflexie calorique. D’autres atteintes neurologiques
d’une fistule labyrinthique. coexistent typiquement du côté de l’aréflexie (un syn-
drome cérébelleux, une hémianesthésie de la face avec
3. Névrite du nerf vestibulaire (parfois appelée anesthésie cornéenne, une paralysie vélo-pharyngo-
neuronite vestibulaire) laryngée, un syndrome de Claude Bernard-Horner) ;
Elle peut être d’origine virale dans le cadre d’un zona du côté opposé à l’aréflexie (hémianesthésie thermo-
auriculaire ou d’un syndrome de Sicard avec paralysie algésique dissociée).
• Lors de la thrombose isolée de l’artère auditive interne, • Les déficits visuels se traduisent par une perte de
l’association d’un syndrome vestibulaire harmonieux vision complète ou partielle, en particulier par une
et d’une cophose (surdité totale) est évocatrice d’un hémianopsie bilatérale homonyme.
accident labyrinthique constitué. • Les manifestations fonctionnelles sont une diplopie,
une dysphagie et une dysarthrie.
Vertige itératif ou récurrent 3. Neurinome de l’acoustique
Ce sont des épisodes de vertige continu d’une durée Au début, le neurinome de l’acoustique peut simuler une
comprise entre 20 min et quelques heures sans dépasser maladie de Menière par compression de l’artère labyrin-
24 h. Les périodes entre les crises sont souvent complè- thique. L’étude des potentiels évoqués auditifs montre
tement « silencieuses » ou bien les symptômes y sont une surdité typiquement rétrocochléaire dans le neurinome
mineurs : sensation d’instabilité ou vertiges positionnels et une surdité typiquement endocochléaire dans la maladie
intermittents. de Menière.
1. Maladie de Menière
Vertige paroxystique positionnel
La maladie de Menière (5 % des vertiges) est une maladie
de l’oreille interne de cause inconnue caractérisée par Ce sont des vertiges très brefs qui n’existent pas lorsque
une triade symptomatique, survenant par crises, et une le patient est immobile mais qui apparaissent lorsqu’il
évolution chronique. La triade symptomatique comporte : adopte certaines positions ou éxécute certains mouvements.
un vertige itératif, une surdité unilatérale fluctuante
au début de la maladie et des acouphènes également 1. Vertige positionnel paroxystique bénin
fluctuants du même côté que la surdité. L’évolution s’étale C’est la cause la plus fréquente de vertiges (1 tiers des cas).
sur de nombreuses années et comporte 2 stades successifs : • Description : le plus souvent, il apparaît brutalement
le stade de vertige itératif et le stade chronique. La maladie au cours de la nuit ou au lever. C’est un vertige violent et
de Menière est liée à un hydrops endolymphatique et bref déclenché par le fait de regarder en l’air, de
serait provoquée par un défaut de réabsorption de l’endo- s’allonger sur le côté ou de se retourner dans son lit. Il
lymphe au niveau du sac endolymphatique. est possible de le reproduire par la manœuvre de Hallpike
Les crises sont spectaculaires, elles sont annoncées par (v. supra) : le vertige apparaît après un temps de latence
une sensation de plénitude dans une oreille, avec un (2 à 15 s après que la position tête pendante est atteinte).
ronflement grave souvent comparé au bruit de la mer dans Simultanément, apparaît un nystagmus rotatoire roulant
un coquillage. Une baisse de l’audition survient, avec par- énergiquement vers le côté déclive. Si l’on maintient la
fois quelques otalgies. En quelques heures, le vertige se position, vertige et nystagmus se calment en 20 s et se
déclenche, de type giratoire, accompagné d’importants reproduisent lorsque le patient se relève. Le nystagmus
troubles de l’équilibre. Il s’accompagne de signes neuro- bat alors en sens inverse de la première fois. Si l’on
végétatifs. Le patient garde sa conscience pendant toute la répète la manœuvre au complet, vertige et nystagmus se
durée de la crise. Ensuite, il reste en proie à un malaise et à reproduisent, mais moins fort (fatigue). Lorsque vertiges
une angoisse pouvant durer plusieurs jours. Il n’y a aucun et nystagmus provoqués ont tous ces caractères, aucun
signe neurologique. L’examen montre un nystagmus examen supplémentaire n’est nécessaire.
horizontal rotatoire dont le sens varie au cours de la crise. • Étiopathogénie : le vertige positionnel paroxystique
Le stade chronique est rencontré après plusieurs années bénin serait lié à une canalolithiase. Après une lésion de
d’évolution. Les crises vertigineuses font la place à des l’oreille interne entraînant un essaimage d’otolithes, un
sensations de bascule, de flottement ou encore des accès dépôt lithiasique se constitue dans le canal postérieur.
de pseudo-ébriété, tandis que la surdité devient perma- Un vertige apparaît alors chaque fois que le patient
nente, s’accentue et que les acouphènes se pérennisent. effectue un mouvement dans le plan du canal postérieur.
Le temps de latence nécessaire à son apparition rend
2. Accidents ischémiques transitoires compte de l’inertie de la masse amorphe qui se déplace
La durée d’un accident ischémique transitoire (AIT) dans le labyrinthe. De nombreuses maladies de l’oreille
dans le territoire vertébro-basilaire est courte : 2 à 15 min, interne sont susceptibles de provoquer un vertige posi-
toujours moins de 24 h. Un tel vertige itératif ne peut tionnel paroxystique en provoquant une dégénérescence
donner lieu à un diagnostic d’accident ischémique tran- des otolithes. Les plus fréquentes sont les causes virales,
sitoire que s’il est associé à des symptômes ou des ischémiques ou dégénératives. Les traumatismes crâniens
signes neurologiques évoluant parallèlement à la crise. sont à l’origine des formes les plus rebelles. Le vertige
• Des déficits moteurs apparaissent dans un ou plusieurs positionnel paroxystique peut survenir au cours de
membres. Ils sont variables d’un épisode à l’autre dans l’évolution d’une otite chronique et de l’otospongiose.
le côté atteint ou dans la gravité : de la simple perte des • Évolution : la régression spontanée se fait en 1 à
mouvements volontaires d’un membre à la quadriplégie. 3 semaines par dispersion et réabsorption de la lithiase au
• Les déficits sensitifs se traduisent par des fourmille- niveau du sac du canal endolymphatique. On peut hâter
ments, des engourdissements dans une hémiface, dans cette guérison par la manœuvre libératoire de Semont qui
un membre ou dans un hémicorps. consiste à propulser le patient en sens inverse de la
manœuvre provocatrice, pour tenter de décoller la cupulo- ressemblent plutôt à des troubles de l’équilibre intermittents
lithiase de la cupule ou de faire sortir la lithiase du canal qu’à des vertiges proprement dits.
semi-circulaire postérieur. Les récidives sont fréquentes.
2. Fistules périlymphatiques
2. Vertiges de position d’origine centrale Après une blessure par coton-tige, un traumatisme crânien
Il sont provoqués par certaines lésions neurologiques : ou un accident de plongée, une fracture de l’étrier ou
tumeur du vermis, du plancher du 4e ventricule, com- une rupture de la fenêtre ronde, qui laissent sourdre la
pression au niveau de la charnière cervico-occipitale périlymphe par intermittence, peut survenir. Cette lésion
lorsque le patient prend certaines positions. À la est responsable d’une surdité de perception fluctuante et
manœuvre de Dix et Hallpike, on déclenche alors un de manifestations vertigineuses plus ou moins typiques
malaise et un nystagmus qui n’ont pas les caractères pouvant durer des mois. Ces symptômes sont souvent
typiques du vertige positionnel paroxystique bénin : confondus avec ceux du syndrome post-commotionnel.
aucun temps de latence, durée de plusieurs minutes, Le diagnostic ne peut être fait que par l’exploration chi-
faible vertige concomitant, vomissements en jet, etc. rurgicale. Elle met en évidence la fracture de la platine
de l’étrier.
3. Vertiges d’origine cervicale
Ils ne sont pas liés à l’arthrose mais à des malformations 3. Fistules labyrinthiques
de la charnière cervico-occipitale (impressions basi- Le labyrinthe osseux peut être érodé par tous les processus
laires) qui peuvent s’accompagner d’une malformation occupant le rocher. La cause la plus fréquente est l’érosion
d’Arnold-Chiari. La présence d’un nystagmus provoqué progressive du canal semi-circulaire latéral par un choles-
de type vertical inférieur est caractéristique. Le port téatome. Le patient éprouve alors des sensations verti-
prolongé d’une minerve ou des contractures cervicales gineuses intermittentes pendant des mois. Le diagnostic
peuvent aussi donner des sensations vertigineuses. repose sur la mise en évidence d’un nystagmus et d’un
vertige déclenché par la pression digitale sur le tragus
obturant le conduit auditif externe (signe de la fistule).
Situations vertigineuses chroniques
4. Maladies neurologiques
Elles correspondent à une lente dégradation de la fonction
vestibulaire, souvent associée à une dégradation progressive Il s’agit le plus souvent de lésions du tronc cérébral
ipsilatérale de la fonction cochléaire. Une surdité de per- (sclérose en plaques, syringobulbie, tumeurs intra-axiales)
ception se développe progressivement tandis que s’ins- ou comprimant le tronc cérébral (lésions vasculaires), etc.
talle une hyporéflexie calorique ipsilatérale. Deux causes On trouve des signes neurologiques en rapport avec ces
peuvent être reconnues : le neurinome de l’acoustique et affections car les vertiges y sont exceptionnellement isolés.
les fistules périlymphatiques. L’otite chronique et les 5. Causes inconnues
tumeurs du rocher sont habituellement détectées par
l’otoscopie. Souvent, la cause exacte reste inconnue. Parfois, on assiste à la destruction progressive de la
fonction cochléo-vestibulaire sans qu’aucune cause ne
1. Neurinome de l’acoustique soit découverte, y compris à l’imagerie par résonance
Dans sa forme habituelle, le neurinome de l’acoustique magnétique. On invoque alors la responsabilité d’une
donne peu de symptômes vestibulaires. Pourtant, il est boucle vasculaire développée à partir de l’artère cérébel-
pratiquement constant de découvrir une aréflexie calorique leuse antéro-inférieure et située dans le conduit auditif
ipsilatérale, même au début. En effet, la compensation où elle comprimerait le pédicule acoustique.
centrale s’effectue au fur et à mesure de la lente destruction
du nerf vestibulaire (fig. 4). Les manifestations présentées Situations inclassables
De nombreux vertiges ne rentrent pas dans les entités
précédentes et sont difficiles à définir car ils constituent
un mélange de vertiges positionnels, de crises d’instabilité
et de crises giratoires.
1. Exploration instrumentale cochléo-vestibulaire
• Une surdité de transmission ou une surdité mixte
apparaît au bilan audiométrique. Une otospongiose, un
cholestéatome, une dysplasie de l’os temporal (maladie
de Paget), une tumeur de l’os temporal, etc. peuvent être
en cause. Un examen tomodensitométrique de l’os tem-
poral en fenêtre osseuse est demandé.
• Une surdité de perception unilatérale apparaît au
bilan audiométrique. Si les potentiels évoqués auditifs
4 Neurinome de l’acoustique (imagerie par résonance orientent vers une surdité de perception de type rétro-
magnétique avec injection de gadolinium). cochléaire, une imagerie par résonance magnétique avec