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Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences Prof. I.

Dekhissi

Démarche et outils de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences

Aujourd’hui, les organisations doivent tout à la fois satisfaire aux exigences de leurs
clients, résister à la pression de la concurrence et s'adapter aux fluctuations de
l’économie. Ces caractéristiques essentielles de l’environnement les obligent plus
qu’auparavant, à accorder une attention particulière à l’analyse de leurs faiblesses
actuelles ainsi que de leurs besoins futurs et à l’évaluation et au développement des
potentiels de leurs ressources humaines. Au centre de ces analyses et des modalités
d’action déployées dans les organisations, la démarche et les outils de la GPEC sont
absolument indispensables.

Démarche Etapes Outils

Analyse interne et externe


marchés, produits, technologies,
situation financière, réglementation,
situation socio-politique, etc.

Diagnostic des
compétences
Nomenclature des emplois

acquises
Orientations stratégiques
Cartographie des métiers

Fiche de poste
Hypothèses Ressources actuelles
d’évolution - Emplois Bilan social
Départ, entrées, - Compétences
Pyramide des âges
promotion
Référentiel de compétences

Ecart Portefeuille de
compétences
Evaluation

Entretien d’appréciation
Diagnostic des
compétences

Hypothèses de Besoins futurs


requises

transformation - Emplois 360°


technologies, - Compétences
marchés, productivité
Définition et mise
en œuvre d’un
plan d’action

Actions correctives : Plan de recrutement


- Affectation : mobilité, recrutement
- Développement : formation Plan de formation

Fiche de poste
Figure 3 : Démarche de la GPEC
Bilan social

Pyramide des âges


1
Référentiel de compétences
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1. La démarche GPEC

On peut rassembler la plupart des démarches GPEC autour d’un schéma directeur (voir
figure 3 ci-dessous) rythmé en trois étapes :
- Première étape : diagnostic des compétences acquises ;
- Deuxième étape : prévision des compétences requises ;
- Troisième étape : définition et mise en œuvre d’un plan d’action.

1.1. Première étape de la démarche GPEC : diagnostic des compétences acquises


La philosophie qui préside à l’étape de diagnostic repose sur l’idée de progrès qui stipule
que l’homme est, par essence, un être d’ouverture et de développement. Dans ces
conditions, s’il prend conscience de ses points faibles, il saura trouver la volonté et la
manière d’y remédier. Une telle philosophie n’est concevable que si elle est partagée et si
elle repose sur la confiance et sur la transparence qui sont les maîtres mots du diagnostic.

En conséquence, la première étape de la démarche GPEC consiste à vérifier si les salariés


sont toujours bien adaptés à leurs postes. Elle consiste également à identifier quelles
compétences les collaborateurs ont pu, ou su, développer, qui non seulement les rendent
compétents dans leur travail actuel, mais pourraient leur permettre d’évoluer vers d’autres
fonctions, et donc favoriser leur employabilité.
De manière plus concrète, le diagnostic des compétences1 acquises vise l’atteinte de trois
objectifs :
1. Préciser la finalité du processus de gestion des compétences et la mettre en
relation avec la stratégie de l’organisation, c’est-à-dire le cœur de métier ;
2. Définir les fondements du processus de gestion des compétences en choisissant la
clé d’entrée. Ce qui déterminera ensuite, les outils à mettre en place ;
3. Faire un bilan des compétences qui se sont développées au sein de l’organisation
au cours du temps.

1.1.1. Articulation de la GPEC avec la stratégie organisationnelle


Il est fondamental d’avoir une vision claire de la stratégie de l’entreprise, des enjeux qui
en découlent et de les articuler dans la politique GRH pour bâtir une gestion
prévisionnelle des emplois et des compétences. Cette dernière peut donc être déduite
de la stratégie organisationnelle qui constitue une réponse aux exigences de
l’environnement en définissant le cœur de métier de l’organisation et en identifiant les
facteurs de changements auxquels elle pourrait être confrontée à l’avenir.

Ainsi, décider de mettre en place un diagnostic des compétences acquises consiste au


préalable à faire des choix sur la finalité que l’organisation cherche à atteindre en
soulevant la problématique suivante : quel problème ou objectif doit régler la gestion des
compétences ?

1
Il faudra veiller à ne pas faire l’amalgame entre le diagnostic des compétences et celui des performances. Le
premier est porté sur l’évaluation du savoir, savoir-faire et savoir-être des collaborateurs. Tandis que le second
mesure le degré d’atteinte des objectifs individuels préalablement fixés par l’organisation.

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Cette problématique peut être déclinée en plusieurs questions spécifiques :


- Quel est le positionnement de l’organisation dans son environnement actuel ?
- Quelle est la situation présente des emplois, des effectifs et des compétences
(c'est-à-dire les besoins quantitatifs et qualitatifs en emploi) ?
- Quel est le projet d’entreprise ?
- Quel est l’impact du projet d’entreprise sur la situation des emplois, des effectifs et
des compétences ?
- Quels seront les emplois, les effectifs et les compétences futurs si aucune décision
ne vient modifier les orientations actuelles ?

L’ensemble de ces questions conduit à une description détaillée de la situation en


matière de ressources humaines, au regard de la problématique stratégique
préalablement repérée. Ce qui amènera l’organisation à une définition rigoureuse de ses
emplois en identifiant pour chacun d’eux le degré de technicité correspondant, le niveau
d’information associé ainsi que le niveau de valeur ajouté apporté.

1.1.2. Choix d’une clé d’entrée dans le processus GPEC


La question de la clé d’entrée revient à se demander comment l’organisation peut-elle
articuler son système de GRH avec la logique compétence ? La réponse à cette question
repose sur plusieurs critères :
- Nature du système de GRH préexistant dans l’organisation (modèle taylorien,
modèle fordien, modèle fondé sur la qualification/classification) ;
- Niveau d’implication de la direction générale dans la volonté de mettre en œuvre
une logique compétence ;
- Nature des référentiels métiers choisis par l’organisation : seront-ils créés par
l’organisation ou bien achetés dans des bibliothèques officielles de référentiels
métiers ?

Ainsi, la clé d’entrée est choisie en fonction de la finalité de la démarche et des objectifs à
atteindre. Ce n’est qu’à la suite de cette réflexion générale préliminaire qu’une définition
de la compétence, propre à l’organisation, pourra être exprimée. A ce propos, Retour
(2006) confronte les responsables RH et les dirigeants d’entreprises à l’interrogation
suivante : « sont-ils prêts à basculer d’un système de GRH basé sur les compétences
requises à une GRH qui s’appuie sur la prise en compte des compétences mobilisées,
détenues et potentielles de leurs salariés. En d’autres termes, sont-ils disposés ou
convaincus de l’intérêt à passer d’une logique de poste ou d’emploi à une GRH fondée sur
la prise en compte du capital de compétences des individus qui forment leur personnel ?
La réponse à cette interrogation dépend en partie de la pérennité des missions et des
activités de l’entreprise. En effet, plus une entreprise considère que les emplois qu’elle
mobilise peuvent être décrits et définis avec une relative stabilité, plus il y a de chances
qu’elle continue à s’appuyer sur des définitions de fonction et des profils de compétences
requises ».

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1.1.3. Etablissement d’un bilan de compétences


Le fait d’opérer un diagnostic des compétences acquises permet d’établir un bilan de
compétences qui est triplement bénéfique pour l’organisation, le hiérarchique et le
collaborateur :
Pour l’organisation, le diagnostic lui permet de :
- Dresser une cartographie de ses compétences internes ;
- Etablir un plan de formation adapté aux besoins des services comme aux attentes
des collaborateurs ;
- Percevoir des dysfonctionnements éventuels et d’y porter remède.

Pour le hiérarchique, le diagnostic lui permet de :


- Identifier les forces et les faiblesses internes de son service ;
- Fixer clairement ses objectifs de progrès ;
- Renforcer la motivation de son équipe par le fait de donner un sens au travail de
chacun.

Pour le collaborateur, la finalité du diagnostic est de :


- Savoir comment son travail est perçu tant du point de vue quantitatif que du point
de vue qualitatif ;
- Comprendre ses potentialités et d’avoir une vision claire de sa valeur ;
- Faire état de ses souhaits, besoins, suggestions, tant pour sa carrière personnelle
que pour l’amélioration globale du travail du service.

Concrètement, établir un bilan de compétences revient à évaluer ces dernières selon


deux manières envisageables :
- Par rapport à un référentiel de compétences qui peut contenir des profils cibles ;
- Par rapport à une grille générale d’analyse de compétences contenue dans
l’entretien annuel et qui peut être complétée en fonction des compétences
spécifiques de la personne.

1.2. Deuxième étape de la démarche GPEC : prévision des compétences requises


Cette étape permet de projeter, par différentes techniques de prospectives ou de
scénarios, les compétences dont l’organisation aura besoin dans le futur en fonction de
l’anticipation de sa stratégie. Il s'agit de s'interroger sur les besoins à venir en termes de
qualification et de compétences en soulevant les questions suivantes :
- Quelle doit être l'évolution des emplois existants ?
- Quelles compétences sont insuffisamment développées actuellement ?
- Quelles compétences sont à développer compte tenu de l'évolution prévisible des
emplois ?

L’idée principale de ce questionnement est d’intégrer aux futurs scénarios les facteurs de
risques, d’opportunités et de changement, afin d’imaginer un nouveau cœur de métier ou
de projeter le cœur de métier actuel. Cette analyse opère sur trois niveaux distincts de
l’organisation, avec d’importantes interactions entre eux :

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- Au niveau de l’organisation globalement considérée ; il s’agit alors de mettre en


évidence la logique d’ensemble du développement des compétences, orchestrée
de manière cohérente par la direction en partenariat avec le service GRH ;
- Au niveau de l’unité opérationnelle (le service, le département, etc.) ; il s’agit dans
ce cas d’identifier les besoins en compétences directement liés à son évolution
spécifique ;
- Au niveau de l’individu ; il s’agit d’apprécier l’adéquation entre son portefeuille de
compétences et les exigences du poste qu’il occupe à un moment donné, en
tenant compte de l’évolution probable ou souhaitée.

1.2.1. Evaluation des besoins en compétences au niveau de l’organisation


Il appartient au service GRH de mettre en place :
- Une systématique de saisie des besoins en compétences de l’organisation, qui
tiennent compte des changements intervenant dans l’environnement et dans les
missions poursuivies ;
- Une gestion du portefeuille collectif de compétences représenté par l’agrégation
de l’ensemble des compétences individuelles.

Ces deux opérations peuvent être facilitées par l’élaboration d’un référentiel de
compétences regroupant en quelques dizaine de champs les compétences essentielles
au bon fonctionnement de l’organisation (voir encadré 1 ci-dessous).

Encadré 1 : Exemple de référentiel de compétences d’une


organisation œuvrant dans le domaine industriel
- Capacité d’apprentissage
- Pensée positive
- Capacité de communication
- Capacité de coopération
- Orientation clients
- Conscience qualité
- Conscience environnement
- Capacité d’organisation
- Capacité de résolution de problèmes
- Sens de l’innovation

Cette analyse des besoins en compétences sera facilitée :


Du côté de l’anticipation des besoins de l’organisation : par la création d’un comité
d’anticipation des compétences (CAC) réunissant les responsables des différentes
directions de l’organisation ainsi que les chefs de projets importants. Ce CAC a pour
mission, lors d’une séance annuelle de type « revue stratégique », de mettre en exergue
les tendances fortes de l’environnement, l’évolution des métiers et les nouvelles
contraintes de l’organisation, afin de déceler les champs de compétences nouveaux qui
seront nécessaires pour un fonctionnement efficient des différents services. Au terme de
la séances prévisionnelle annuelle, des zones de compétences croissantes et

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décroissantes seront mises en exergue, orientant l’ensemble du processus de


développement des compétences pour la période à venir.

Du côté du portefeuille collectif de compétences : par le recueil et la gestion


automatisée des compétences dans le cadre du référentiel déterminé. Outre les
informations administratives le concernant, cela signifie que chaque membre du
personnel dispose de son portefeuille individuel de compétences, qui doit absolument
être tenu à jour selon les formations suivies et les responsabilités assumées. Des règles de
gestion de compétences modifient automatiquement l’état de disponibilité de ces
compétences, qui évoluent dans le temps sur une échelle ressemblant généralement à la
suivante :
4. Compétence parfaitement maîtrisée, utilisée dans la fonction actuelle ;
3. Compétence confirmée, mobilisable à court terme ;
2. Compétence confirmée, mobilisable moyennant une formation d’appoint ;
1. Compétence « dormante » (non utilisée depuis plusieurs années).

Lorsqu’une compétence n’est plus utilisée dans la fonction actuelle, elle passe
automatiquement du niveau 4 au niveau 3 puis 2 et 1. De la sorte, l’état actuelle des
compétences est immédiatement contrôlable en questionnant le système d’information
du personnel au moyen de la requête adaptée.
La confrontation entre les besoins futures de l’organisation et le potentiel futur (simulé) de
compétences du personnel fait apparaitre les domaines d’action prioritaires, qui devront
ensuite être déclinés et affinés dans les différentes unités opérationnelles.

1.2.2. Evaluation des besoins en compétences au niveau d'un service


Le service, unité de gestion de l'organisation, poursuit sa mission avec des ressources
financières, matérielles, informationnelles et humaines. Ces dernières présentent un
portefeuille collectif de compétences qui est plus ou moins en adéquation avec les
besoins de développement du service. Il s'agit donc de mettre sur pied le procédé
d'identification des besoins en compétences collectives, en tenant compte de l'évolution
de l’unité de gestion, pour le comparer ensuite avec les compétences maîtrisées par le
personnel en place. La meilleure manière de le faire consiste à élaborer un projet de
service.
De façon schématique, cette planification passe par les étapes suivantes :
1. Définition de la mission du service, intégrant les évolutions légales, politiques et
économiques ;
2. Formulation d'une vision, si possible de manière participative, qui décrit ce que le
service cherche à atteindre comme objectifs prioritaires et comment y parvenir ;
3. Analyse de l'environnement pertinent, permettant d'identifier les menaces et les
opportunités qui se présentent ;
4. Analyse interne, destinée à mettre en exergue, les forces et les faiblesses du
service, en particulier sous l'angle des compétences nouvelles nécessaires à la
poursuite de la vision ;

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5. Choix et mise en œuvre des projets prioritaires les plus efficients pour atteindre la
vision ; la réalisation conforme de ces projets sera suivie au moyen de tableau de
bord ressemblant les principaux indicateurs de gestion.

Procédant de la sorte, le service est en mesure de déterminer les axes principaux de


développement des compétences collectives. Les domaines de compétences actuels du
service doivent être identifiés, pour être ensuite confrontés à l'évolution des besoins. Ces
axes font ressortir des zones de compétences « montantes », c’est-à-dires de nouvelles
compétences utiles au bon fonctionnement du service, et des zones de compétences
« descendantes », dont l'utilité diminue. Le responsable du service est ainsi en mesure de
planifier l’effort principal de développement selon le tableau 2 ci-dessous.

Domaines de Compétences
Incidences liées Axes de
compétences collectives du
au projet de développement des
actuels utiles au personnel
service compétences
service (exemple)
Engagement de
nouvelles personnes
Domaine 1 Ok en l’état actuel Renforcement
ou formation des
personnes actuelles
Disparition Etudier les possibilités
Domaine 2 Sous-compétences 2
progressive à 3-5 de mobilité interne ou
ans externe
Etudier les possibilités
Domaine 3 Sur-compétences3 Stable de mobilité interne ou
externe
Domaine 4 Ok Stable Formation continue
……………….. ……………….. ……………….. ………………..

Tableau 2 : Axes de développement des compétences pour un service

1.2.3. Evaluation des besoins en compétences au niveau de l'individu


De manière simplifiée, cette évaluation procède par comparaison entre le profil
nécessaire au poste et les compétences effectivement maîtrisées par l’employé. Cette
analyse est bien entendu alimentée par l'examen des performances réalisées pendant la
période écoulée, au moyen de l'entretien d'évaluation. Dans une vision davantage
proactive, elle composera aussi avec l'évolution anticipée du métier exercé ainsi qu'avec
les souhaits de développent de l'employé concerné. C'est dire que le développement au
plan individuel revêt une dimension immédiate (adéquation de l'employé avec son poste)

2
Sous-compétences signifie que l’agrégation des compétences de l’ensemble du personnel du service, dans
ce domaine de compétences, est inférieure aux besoins nécessaires (par exemple le capital « langue » de
l’ensemble du personnel est inférieur aux besoins liés à l’activité du service).

3
Raisonnement inverse de la note précédente.

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et une dimension prospective (acquisition de compétences nouvelles en vue d'assumer


d'autres responsabilités).

Le profil du poste doit mentionner les compétences utiles à l'exercice des responsabilités
confiées. Ce profil gagnera à être exprimé dans les mêmes termes et en suivant la même
logique que celle préconisée par le référentiel global de l'organisation. Souvent réalisé
au moment de l'engagement, ce profil doit être régulièrement actualisé et comparé avec
les compétences maîtrisées par l'employé. C’est ici que la difficulté commence !
Pendant longtemps en effet, le CV des employés s'est limité à lister les différentes
formations scolaires et professionnelles suivies, attestant ainsi des savoirs maîtrisés.
D'ailleurs la notion de maîtrise paraît elle-même relative puisque l'obsolescence des
connaissances acquises pendant une formation est importante avec le temps, ce qui
n'empêche nullement le fait que les diplômes sont attribués une fois pour toutes !

Sous la pression d'une forte augmentation des taux de chômage, de nombreuses


approches ont vu le jour pour identifier le portefeuille de compétences effectivement
maîtrisées par une personne, au-delà des formations suivies. Il est rapidement apparu que
les compétences maîtrisées par un individu ne ressortaient pas uniquement de ses
formations, mais également des postes et responsabilités effectivement assumés, ainsi
que les rôles extra-professionnels (famille, associations, engagement politique, etc.)
endossés. Ce portefeuille individuel de compétences n'existe souvent pas et rares sont
les entreprises qui le gèrent.
Les raisons sont multiples (complexité de la démarche, temps nécessaire, obsolescence
rapide des analyses effectuées, etc.). Il est recommandé de réaliser ces portefeuilles
individuels sur les domaines de compétences prioritaires retenus par l'organisation, et
d'éviter de tomber dans les analyses trop fines. Par contre, au moment où l'individu
souhaite disposer d'un portefeuille détaillé de compétences, il s'agira de faire faire une
analyse complète auprès d'une instance spécialisée (par exemple, un centre de bilan de
compétences).

Suite à l'entretien annuel d’évaluation, et à l’appréciation des compétences qui en


découle, les besoins prioritaires apparaissent clairement en croisant le degré de maîtrise
actuelle et le degré de maîtrise souhaitable des compétences pour la fonction actuelle
(voir figure 4).
Potentiel à faire fructifier OK !
élevé
Degré de maîtrise

compétences
actuelle des

Besoins Besoins
moyen ??
secondaires secondaires
Besoins Besoins
faible ??
secondaires prioritaires
faible moyen élevé
Degré de maîtrise exigé des compétences

Figure 4 : Priorisation des besoins en compétences individuelles

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Au terme de cette deuxième étape de la démarche GPEC, l’organisation peut faire le


point sur le stock de compétences qu’elle possède et sur ses besoins compte tenu des
scénarios d’avenir plus ou moins probables. L’analyse des écarts est réalisée entre les
compétences acquises et les compétences requises afin de définir les orientations
d’ajustements et leurs modalités de mise en œuvre.

1.3. Troisième étape de la démarche GPEC : définition et mise en œuvre d’un plan
d’action
Après avoir recensé les ressources humaines existantes, anticipé les évolutions sur le plan
quantitatif et qualitatif, il convient d'en tirer les conséquences en matière de politique
GRH. La troisième étape de la démarche GPEC consiste donc en la définition et la mise en
œuvre d’un plan d’action susceptible de réduire l’éventuel écart constaté entre les
compétences acquises et les compétences requises par l’organisation.

1.3.1. Définition du plan d’action


A ce niveau, l’organisation doit mener une réflexion sur le plan de prévision à mettre en
place en se posant des questions sur les moyens dont elle doit disposer pour permettre
une meilleure prévision et sur les variables qu’elle peut influencer pour atteindre les
résultats escomptés. Autrement dit, l’organisation doit se pencher sur les deux questions
suivantes :
- Quels sont les moyens à mettre en œuvre pour prévenir, ou à défaut réduire les
écarts identifiés entre besoins et ressources ?
- Sur quelles variables, internes et/ou externes, est-il possible d’agir ?

La réponse à ces deux questions conduit à la rédaction d’un plan d’action dans le
domaine de l’emploi et de la gestion des compétences. Ce plan d’action s’articule autour
de deux niveaux de la GPEC :
- Le niveau collectif : la GPEC s’appuiera sur un ensemble de dispositifs (formation,
communication, recrutement, etc.) en vue de promouvoir l’apprentissage, la
reconversion et la polyvalence ;
- Le niveau individuel : la GPEC reposera essentiellement sur le potentiel de
mobilité du personnel qui existe au sein de l’organisation. En réalité, la mobilité est
une expression de la flexibilité organisationnelle. La GPEC n’existe potentiellement
que dans l’hypothèse d’une organisation flexible, dans laquelle il existe une
certaine marge de manœuvre.

Avec cette nouvelle stratégie, l’organisation devra analyser les écarts entre ses ressources
humaines actuelles et celles dont elle aura besoin afin de gommer les écarts de manière
efficace, faire un diagnostic sur les plans d’action RH réalisés auparavant et vérifier que ce
nouveau plan va permettre véritablement de préparer l’avenir.

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1.3.2. Mise en œuvre du plan d’action


L’accompagnement d’une démarche de GPEC suppose la mise en place d’une structure
« ad hoc », conçue spécifiquement pour répondre aux besoins d’interdisciplinarité et de
transparence exigés par les circonstances. Un tel dispositif comprend ordinairement un
comité de pilotage et un ou plusieurs groupes de projet :
- Le comité de pilotage : son rôle est de garantir le bon déroulement de la
démarche, sa cohérence par rapport aux objectifs poursuivis et la mobilisation des
ressources nécessaires. Sa composition dépend de la structure organisationnelle.
Cependant, on observe généralement que le comité de pilotage est constitué du
directeur général, des représentants des différents groupes professionnels
présents dans l’organisation et du responsable de la fonction RH ;
- Les groupes de projet : ils se composent de cadres et de salariés de toutes les
filières professionnelles concernées par la démarche GPEC. Avec l’assistance du
responsable RH, les groupes de projet collectent les données et procèdent à leur
analyse. Le responsable RH est le garant méthodologique de la démarche ; il met
à la disposition des groupes sa connaissance de la gestion des emplois et des
compétences et aide ainsi à l’élaboration des outils et des procédures propres à
l’organisation. Les résultats et les avancements des travaux sont régulièrement
transmis au comité de pilotage.

Après avoir implémenté le plan d’action à travers le dispositif susmentionné,


l’organisation devra procéder à une évaluation afin de repérer les éventuelles failles de sa
démarche GPEC et de contrôler la fiabilité des outils et méthodes mis en place. En effet,
l’environnement de l’organisation peut subir des changements à tout moment à cause de
l’incertitude de l’avenir. Pour cette raison, il faudra manier la démarche GPEC avec
beaucoup de précautions en repérant les améliorations à opérer tant au niveau des
emplois menacés, des emplois à reproduire, de l’accompagnement des salariés au niveau
des postes qu’ils occupent, au niveau des compétences qu’ils ont et en repérant ceux qui
doivent bénéficier de formations.

2. Les principaux outils de la GPEC

Avant de présenter une sélection d’outils de la GPEC, il est utile de différentier chacun
des termes suivants : poste, emploi et métier
- Un poste est un ensemble de missions, d’activités et de tâches correspondant à
une situation professionnelle précise dans l’organisation, à un moment, et dans un
lieu déterminés. Exemple : infirmière de bloc opératoire dans le service gastro-
entérologie à l’hôpital Al Farabi de janvier à mars 2020.
- Un emploi désigne un ensemble de situations de travail dont les caractéristiques
sont suffisamment communes pour pouvoir être occupées par un même individu.
Il s’agit donc d’un ensemble homogène de postes de travail. Exemple : infirmière
de bloc opératoire en gastro-entérologie. La notion d’emploi-type est parfois
utilisée. Elle correspond à un regroupement d’emplois présentant une certaine
proximité de compétence. Exemple : infirmière de bloc opératoire.

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- Un métier est un ensemble d’emplois de forte proximité en matière d’activité et de


compétences, socialement reconnu. Exemple : infirmière. Le métier d’infirmière
comporte de nombreux emplois-types : infirmière en soins généraux, infirmière de
bloc opératoire, infirmière puéricultrice, etc.

La distinction entre les notions de poste, emploi et métier étant faite, nous allons à
présent aborder successivement les principaux outils de la GPEC tout en interrogeant
leurs domaines et niveaux de pertinence.

2.1. La nomenclature des emplois


La nomenclature des emplois symbolise la représentation à un moment donné, des
emplois présents dans l’organisation. Son établissement requiert au préalable la prise en
compte des facteurs de changements auxquels est confrontée l’organisation et les
emplois. Ainsi l’analyse fine de ces facteurs de changement permettra de déterminer les
différents types d’emplois : les emplois nouveaux qui nécessiteront de nouvelles
compétences ; les emplois menacés qui seront appelés à disparaître ; les emplois
sensibles qui sont susceptible de subir des modifications ou des transformations à moyen
terme ; les emplois peu sensibles dont la configuration à moyen terme sera globalement
similaire.
Après avoir identifié les différents emplois, l’organisation peut procéder à l’élaboration
proprement dite de sa nomenclature des emplois en suivant les principales étapes ci-
dessous (voir l’exemple fourni dans l’encadré 2 ci-dessous) :
- Repérer au sein de l’organisation, les postes qui mobilisent des compétences
proches ;
- Identifier et nommer les familles professionnelles. A l’intérieur des ensembles ainsi
constitués, il convient de regrouper à nouveau les postes de telle façon que les
compétences globalement exigées soient homogènes ;
- Nommer les emplois ;
- Décrire les contenus des activités actuelles des emplois ;
- Vérifier la cohérence globale du contenu des emplois (non redondance, degré
d’exigences homogène, finalité commune).

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Encadré 2 : Exemple de nomenclature d’un emploi-type chez BARID AL MAGHREB


FAMILLE METIER EMPLOI POSTE-TYPE
Manager études et Chef de service développement des
développement nouvelles technologies
informatiques Chef de service études et réalisations
Architecture réseaux
Architecture système s et bases de
données
Chef de projet chargé du SIPS
Chef de projet Chargé du projet d’informatisation et
système informatique d’industrialisation du courrier
Etudes et
Chargé d’informatisation
développement
Chef de projet SITR
informatiques
Chargé du système d’information
géographique
Développeur Analyse programmeur
Concepteur Analyse concepteur
Programmeur Programmeur
Infographiste
Maquettiste
Infographiste
Chargé de conception et de
Informatique
réalisation des timbres
Chef de service exploitation et
Manager exploitation intégration des applications
Informatique Chef de centre informatique
Chef de service sécurité informatique
Manager réseaux Chef de service gestion réseaux
Administrateur Administrateur réseaux
réseaux
Administrateur de Administrateur de bases de données
Exploitation et
bases de données
maintenance
Technicien en maintenance
informatiques
(hardware)
Technicien BARID Net (réseau)
Chargé d’informatique
Technicien
Technicien réseaux
informatique
Technicien d’exploitation
informatique
Technicien maintenance informatique
Technicien SIG

2.2. La cartographie des métiers


La cartographie des métiers consiste en une représentation ordonnée des métiers de
l’organisation en mettant l’accent sur leurs évolutions en cours et prévisibles et en
intégrant dans leurs modalités de description une dimension prospective. Il s’agit de faire
un état des lieux des métiers en les décrivant à travers leurs activités et leurs compétences

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essentielles. La construction de cet outil de référence s’appuie principalement sur les


observations des métiers existants au sein de l’organisation et permet à cette dernière de
représenter graphiquement les passerelles logiques de passage d’un emploi à l’autre.

De manière plus concrète, la cartographie des métiers offre les avantages suivants :
- Le regroupement des postes ayant des points communs ou une technique
commune afin de favoriser la mobilité du personnel ;
- Le développement d’un regard transversal sur l’ensemble des métiers et le
repérage des grandes tendances d’évolution de ces derniers ;
- L’identification et la description des compétences requises pour l’exercice de
chaque métier ;
- L’analyse des métiers émergents, des métiers en voie de disparition et des métiers
susceptibles de subir des transformations à moyen terme ;
- Le ciblage des compétences stratégiques conférant un avantage concurrentiel à
l’organisation.

2.3. La fiche de poste


Un poste est une situation professionnelle composée de tâches à exercer avec des
compétences requises bien déterminées. La fiche de poste est un outil classique de
gestion de l’emploi pour les organisations qui ne sont pas véritablement engagées dans
une logique compétence. Néanmoins, en intégrant des compétences spécifiques
relatives à la fonction ou au poste, ce document reste incontournable dans la panoplie
des outils de la GPEC. Il permet de capturer une photographie complète d’un poste de
travail : missions, activités, responsabilités, compétences, situation hiérarchique (voir
l’exemple fourni dans l’encadré 3 ci-dessous). Il est indispensable à la fois pour le
collaborateur, le manager et le responsable des ressources humaines :
- Pour le collaborateur : il lui permet d’avoir une vision claire de ce qu’on attend de
lui ;
- Pour le manager : il lui permet de faciliter la gestion et l’organisation de son
équipe ;
- Pour le responsable RH : il lui permet d’avoir une vision d’ensemble des métiers et
compétences de l’organisation.

Pour rédiger une fiche de poste de manière efficace, il est généralement recommandé de
rapprocher les visions du manager et du collaborateur relatives au poste en question. En
effet, ces deux visions sont complémentaires car, d’un côté, le collaborateur est en
première ligne d’exécution et connaît exactement les tâches relatives à son travail. De
l’autre côté, le manager dispose de plus du recul par rapport aux missions de
l’organisation et aux compétences requises. Il est également vivement recommandé de
procéder régulièrement à une mise à jour de la fiche de poste (lors de l’entretien annuel
d’appréciation par exemple).

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Encadré 3 : Exemple d’une fiche de poste d’un emploi-type à l’OCP


Emploi : conducteur d’atelier de production dans les industries chimiques de 7ème
catégorie

Code : 7070
Titre : ouvrier hors classe
Niveau :

Niveau hiérarchique (NH) : catégorie 7


Niveau de rémunération (NR) : 33

Filière : usines
Bordereau : jour
I. Mission générale de la fonction :
Conduire l’installation dont il a la charge.
II. Relations :

a. Hiérarchique : relève du chef d’équipe ou de l’agent assurant cette fonction.


b. Fonctionnelles : a des relations fonctionnelles avec les autres conducteurs de
l’atelier, les opérateurs des salles de contrôle et les agents de maintenance.

III. Connaissances :

a. Connaissances de base : être titulaire du Bac et du diplôme des ITA ou équivalent.


b. Connaissances techniques et pratiques : du fonctionnement des équipements
dont il est responsable (connaissances parfaites), en physique-chimie, des procédés
de fabrication, en thermodynamique, en hydraulique, en technologie du matériel, etc.

IV. Tâches et responsabilités :

a. Techniques : assure les opérations et manœuvres de démarrages et arrêts des


équipements suivant les consignes d’exploitation, conduit les équipements dont il
aurait la charge et veille à la stabilité des paramètres de marche, détecte les
anomalies, y remédie le cas échéant et en informe sa hiérarchie, (...) ne doit quitter son
poste qu’après passation des consignes à l’agent devant assurer la relève, etc.
b. Administratives : établir tout rapport en relation avec son activité.
c. Humaines : supervise l’activité des personnes dont il aurait la responsabilité, veille à
la sécurité de son personnel, participe à la formation de son personnel et participe à la
démarche qualité.

V. Qualités ou aptitudes primordiales :

Sens des responsabilités, sens des relations humaines, bonne endurance physique,
bonne stabilité émotionnelle (sang-froid), rapidité des réflexes, Aptitude à assimiler les
techniques nouvelles et aptitudes médicales.

14
Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences Prof. I. Dekhissi

2.4. Le bilan social


Le bilan social dresse un état des lieux de la situation des travailleurs dans une
organisation. Il apporte une vue d’ensemble des caractéristiques du personnel et de leurs
conditions de travail afin de repérer les éventuels problèmes et dysfonctionnements et
d’y remédier. Il s’agit donc d’un outil de la GPEC qui assure deux principales fonctions :
- Fonction d’information : il regroupe en un seul document de nombreuses
données chiffrées qui sont des indicateurs apportant une certaine homogénéité
dans la façon de dénombrer le personnel et d'analyser ses caractéristiques ;
- Fonction de gestion : sur la base de l’analyse des indicateurs recensés, il permet
d’élaborer une démarche prévisionnelle de gestion des emplois et des
compétences à travers la fixation d’objectifs, la projection et l’aide à la décision.

Il convient de préciser que le bilan social n’est pas standard et figé. En effet, en fonction
des besoins de l’organisation, des indicateurs seront privilégiés à d’autres. La pertinence
d’un indicateur prend du sens et de l’intérêt dès lors qu’il peut être croisé avec d’autres
indicateurs. Ces derniers permettent de dégager des taux et des moyennes éclairant de
manière synthétique la situation observée. L’objectif est de garder la même
méthodologie d’une année à l’autre afin de comparer les résultats4.
A titre d’exemple, nous proposons ci-dessous une liste non exhaustive des principaux
indicateurs d’un bilan social regroupés par catégorie :
- Emplois : emplois permanents et non permanents, emplois à temps plein et à
temps partiel, etc. ;
- Effectifs : personnel permanent et non permanent, personnel à temps plein et à
temps partiel, effectif (regroupé par filières, services et niveaux hiérarchiques), âge
de l’effectif, ancienneté, taux d’encadrement, etc. ;
- Recrutements et carrières : recrutement sur emploi nouveau ou vacant ; modalités
de recrutement, mobilité interne, avancement et promotion, etc. ;
- Temps de travail et absence : nombre de jours travaillés dans l’année, taux
d’absence pour maladie de courte période et de longue période, durée des arrêts
de travail, autres absences, coût des absences ;
- Masse salariale et budget : masse salariale brute et nette, part de la masse salariale
dans le budget de fonctionnement, évolution comparée des dépenses de
personnel par rapport aux autres dépenses de fonctionnement, coût moyen par
emploi, etc. ;
- Formation : niveau de qualification, types de formations suivies dans l’année,
nombre d’agents bénéficiant des formations, durée moyenne par action de
formation, demandes de formation non réalisées, causes de non réalisation, plan
et coût de formation.

2.5. La pyramide des âges


La pyramide des âges est un mode de représentation graphique qui représente la
répartition, à un instant donné, du personnel d’une organisation par tranche d’âge et par

4
Parfois, lorsque de nouvelles problématiques sont rencontrées ou de nouveaux phénomènes sont à
quantifier, il est nécessaire de créer des indicateurs ex-nihilo.

15
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sexe. C’est un outil indispensable à la démarche GPEC qui lui offre la possibilité de
visualiser si l’organisation dispose en son sein des bonnes personnes au bon moment et
d’anticiper les évolutions à prévoir au niveau du recrutement, de la formation ou des
réductions d’effectif.
La représentation en fonction de l’âge permet à l’organisation d’identifier le nombre de
salariés les plus âgés et ceux qui constituent une sorte d’inertie pouvant l’empêcher de
s’adapter aux nouvelles technologies et aux changements de l’environnement.
De même, la représentation en fonction du sexe permet de voir si l’effectif est
excessivement masculin ou féminin afin d’éviter un apport de compétences insuffisant
découlant d’un déséquilibre entre les deux sexes.

La pyramide des âges peut revêtir plusieurs formes :


- La pyramide « champignon » : dans ce type de pyramide la population est
constituée de peu de jeunes et d’une majorité de salariés âgé ;
- La pyramide « violon » : dans ce type de pyramide la population est constituée de
classes d’âges intermédiaires peu nombreuses et d’une pénurie d’encadrement ;
- La pyramide « poire écrasée » : dans ce type de pyramide la population est
constituée d’une majorité de jeunes employés, d’une masse salariale allégée et, à
priori, d’un potentiel élevé ;
- La pyramide « ballon de rugby » : dans ce type de pyramide la population
combine tous les âges de façon harmonieuse, autrement dit, c’est un type de
pyramide bien équilibrée qui assure la régularité dans les sorties et dans les
entrées.

2.6. Le référentiel de compétences


Afin de compléter l’analyse quantitative apportée par de la pyramide des âges, la GPEC
recourt au référentiel de compétences qui s’inscrit dans une approche qualitative et qui
redéfinit la cartographie des métiers de l’organisation de façon simple, pragmatique et
opératoire. Il s’agit d’un document de référence qui décrit les compétences clés
indispensables à l’exercice d’un métier. En effet, chaque emploi exige des compétences
bien précises qu’il convient de définir, de regrouper et de hiérarchiser afin de mettre en
place les conditions nécessaires à son accomplissement.

De manière spécifique, le référentiel de compétence permet de :


- Décrire les taches, les activités et les savoirs nécessaires à l’exercice d’un emploi ;
- Vérifier si l’organisation dispose de suffisamment de compétences en volume ainsi
qu’en niveau de maîtrise ;
- Cerner les emplois en organisant et classant les données relatives à chacun d’eux ;
- Assurer l’analyse, le traitement et la comparaison entre les emplois ;
- Accompagner les salariées dans leurs démarches d’apprentissage et leurs
parcours professionnels ;
- Clarifier, vis-à-vis des employés, les niveaux de performance attendus par
l’organisation ;

16
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Pour établir un référentiel de compétences, une des techniques consiste à repérer les
principales missions du poste de travail et à déterminer les indicateurs existants qui
permettent d’évaluer ces missions afin de référencer les compétences clés nécessaires à
leurs réalisations. A ce stade, les compétences peuvent être définies à partir du triptyque
savoir, savoir-faire, savoir-être ou connaissances métier, savoir-faire opérationnels,
attitudes et comportements (voir l’exemple fourni dans l’encadré 4 ci-dessous).

Encadré 4 : Exemple d’un référentiel de compétences (pour les commerciaux)


Connaissances métier
- Connaître les spécificités des produits
- Savoir faire fonctionner les prototypes
- Connaître les réseaux communicationnels dans lesquels évoluent les clients
- Connaître les caractéristiques du marché
- Intégrer les valeurs de l’entreprise dans l’offre commerciale
Attitudes et comportements
- Savoir planifier son activité
- Définir la tactique d’une affaire
- Savoir entretenir son réseau
- Savoir conclure
Savoir-faire opérationnels
- Dépouiller un dossier d’appel d’offre
- Chiffrer les solutions
- Recouvrer les créances

2.7. Le portefeuille de compétences


Alors que le référentiel de compétences est un document à visée collective destiné à
l’ensemble des collaborateurs, le portefeuille de compétences est propre à chaque
salarié et confidentiel. Il s’agit d’un classeur élaboré par le salarié au fil du temps afin de
récolter les preuves de la mise en œuvre de ses compétences pour qu’elles soient
susceptibles d’être certifiées. Ce portefeuille constitue un élément opératoire de
l’employabilité de l’individu.

Généralement, le portefeuille de compétences est constitué de trois volets :


- Le premier volet reprend les évaluations annuelles, un extrait du référentiel de
compétences présentant les compétences cibles du métier exercé et parfois un
bilan de compétences ;
- Le deuxième volet décrit les compétences liées au métier, les compétences
transversales liées à la culture de l’entreprise et les compétences spécifiques liées
à l’individu. Pour chacune de ces compétences, l’idée consiste à récolter des
preuves de toutes nature (mail, extrait de compte-rendu, mot de félicitation, etc.)
attestant un niveau de maîtrise ;
- Le troisième volet rend compte de la trajectoire professionnelle du collaborateur
en fonction du passé, du présent et du futur.

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2.8. L’entretien annuel d’appréciation


L’entretien annuel d’appréciation est la forme d’évaluation de compétences la plus
répandue au sein des organisations. Il s’agit d’un outil de mesure dans le domaine de la
GPEC qui permet de faire le point sur les résultats de l’année écoulée et celle en cours ;
évaluer la performance ainsi que le potentiel permettant une gestion anticipative des
emplois et des compétences et de discuter sur le travail du salarié et de lui communiquer
les appréciations.
A travers cet entretien annuel, le collaborateur et son supérieur hiérarchique direct feront
le point sur le degré de satisfaction ainsi que sur les attentes mutuelles de l’organisation
et du collaborateur. Cela permettra, d’une part, à chaque salarié d’exprimer son désir de
formation et d’évolution d’emploi ou encore de discuter de ses conditions de travail ; et
d’autre part, à l’organisation de formuler ses attentes quant à l’atteinte des objectifs fixés.
En conséquence, l’entretien annuel d’appréciation, se présente comme une sorte de
négociation ou chacune des deux parties doit être à l’écoute et doit tenir compte des
besoins exprimés par l’autre dans le souci des intérêts partagés et de la régulation des
relations entre les salariés et leur hiérarchie.

Parmi les objectifs liés à la mise en œuvre de cet entretien :


- Détecter les potentiels d’évolution et les difficultés par rapport aux changements
organisationnels et par rapport à l’adaptation des salariés à leur emploi ;
- Cerner les besoins de l’organisation en termes de réaffectation à des emplois
convenant davantage aux compétences et aux connaissances des salariés ;
- Améliorer la communication et instaurer de bonnes relations entre les supérieures
hiérarchiques et le personnel ;
- Identifier les actions d’amélioration, les progrès à réaliser et les changements à
effectuer pour une meilleure efficacité organisationnelle ;
- Orienter les carrières professionnelles et rationnaliser les décisions en vue de
permettre une meilleure adéquation entre les compétences et les performances ;
- Mettre en œuvre un dispositif de formation à la fois cohérent et individualisé avec
un budget adapté aux besoins mutuels des employés et de l’organisation.

2.9. Le 360°
Le 360° est principalement un outil d’observation et d’évaluation des pratiques
managériales individuelles. Il s’adresse à toutes les personnes en situation de manager
une équipe (dirigeants, chefs de services, cadres supérieurs, etc.). Il peut également
s’adresser à des personnes non hiérarchiquement responsables mais jouant un rôle
transversal dans l’animation d’une équipe ou le pilotage de projets, on parle alors de
270°. Pour la GPEC, il s’agit d’un outil de perfectionnement individuel du manager et, à
travers ce dernier, de développement de compétences au niveau de l’ensemble de
l’organisation.

Le principe du 360° est basé sur un processus de feedback qui permet à la personne de
comparer sa propre évaluation à la perception de son entourage. Le support de
l’évaluation est un questionnaire ciblé sur les pratiques de management, élaboré à partir

18
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d’une grille de compétences propres à l’organisation. Ce questionnaire est rempli par le


manager et communiqué à un échantillon de personnes jouant le rôle d’observateurs.
Ces derniers sont choisis parmi la hiérarchie, les collaborateurs, les pairs, les clients ou les
fournisseurs de l’organisation (d’où le nom de 360°).
Une dizaine de questionnaires est un nombre suffisant pour garantir une bonne fiabilité.
L’anonymat des réponses et la confidentialité de la restitution garantissent, en principe,
l’impartialité des retours. Les données sont d’abord recueillies et traitées à l’interne ou, le
plus souvent, par le biais d’une expertise externe. Ensuite, elles sont retournées au
manager, de façon confidentielle, accompagnés d’un diagnostic (souvent présenté sous
forme de courbes) lui permettant de situer ses réponses par rapport à celles des autres
parties prenantes. Compte tenu des risques potentiels de ce type d’exercice
(interprétation erronée, recherche des personnes ayant « mal » répondu), il est vivement
conseillé de médiatiser ce retour par l’intermédiaire d’un expert formé à ce genre de
pratiques. Que l’action concerne un seul manager ou un groupe de managers, une
restitution collective peut être organisée. Elle est souvent une occasion d’échanges très
riches.

Le parti pris de l’ensemble de la procédure est que l’évaluation des pratiques et des
compétences managériales constitue une incitation à les améliorer. L’objectif étant de
déboucher sur un « plan de développement personnel » dans une perspective de
développement d’ensemble de l’organisation. En tant que dispositif de la démarche
GPEC, le 360° représente un outil flexible pouvant être utilisé à diverses finalités :
améliorer les performances et les compétences d’un manager ou d’un groupe de
managers, accompagner un changement de culture organisationnelle, soutenir le plan de
formation, etc.

3. Les politiques d’ajustement

Après avoir présenté une panoplie d’outils permettant à la fois d’évaluer les compétences
acquises et de prévoir les compétences requises, il convient de s’interroger sur les
moyens dont disposent les organisations pour ajuster l’écart constaté entre leurs
ressources et leurs besoins. Pour cela, nous allons nous pencher sur deux outils relatifs à
la troisième étape de la démarche GPEC, celle de définition et de mise en œuvre d’un
plan d’action. Il s’agit du plan de recrutement et du plan de formation.

3.1. Plan de recrutement


Les défis à relever par les organisations impliquent de plus en plus le choix d'un
personnel particulièrement motivé et compétent. Dès lors, la démarche GPEC doit
accorder une grande importance au processus de recrutement. Certes, ce processus
demeure un pari sur l'avenir, et en ce sens, ne saurait être assimilé à une démarche
scientifique. Mais une gestion rigoureuse de l'embauche permet d'éliminer la plupart des
pièges grossiers qui guettent les organisations. Ainsi, on peut distinguer dans le tableau 3
ci-dessous quatre principales étapes qui composent le processus de recrutement :

19
Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences Prof. I. Dekhissi

Etapes-clés Objectifs
1. Analyse du besoin Tester l'opportunité de l'engagement.
Préciser le profil professionnel et personnel
correspondant au poste à pourvoir.
2. Recherche des candidats Constituer un portefeuille de candidats bien ciblés par
rapport au besoin.
3. Sélection Choisir parmi les candidats la personne présentant le plus
de chance de succès dans le poste et au sein de l'équipe
de travail.
4. Intégration Accueillir et intégrer le nouveau venu afin qu'il soit
rapidement performant et membre à part entière de son
équipe.

Tableau 3 : Etapes-clés du processus de recrutement

3.1.1. Analyse du besoin


L'analyse du besoin nécessite une identification claire des tâches et responsabilités du
poste à pourvoir, ainsi que l'élaboration du profil du candidat idéal. Ces deux documents
seront ensuite validés par l'instance décisionnelle, donnant ainsi l'aval pour poursuivre le
processus de recrutement.

En règle générale, le profil du candidat à sélectionner doit préciser les éléments suivants :
- Formation de base et continue ;
- Expériences professionnelles ;
- Aptitudes particulières, par exemple entregent ;
- Compétences de management pour les postes de cadres.

En outre, il mentionnera les caractéristiques de personnalités et les intérêts nécessaires


pour exercer la fonction en étant motivé sur le long terme. Finalement, il faudra prévoir
les contraintes et les conditions spécifiques que le candidat doit respecter, tenant compte
de réglementation en vigueur ou d'autres exigences de l'employeur (lieu de domicile,
horaires de travail, etc.). En tous les cas, les critères du profil idéal seront classés en deux
catégories : critères impératifs ou éliminatoires, et critères souhaitables.

La pratique des recrutements montre que la détermination du profil idéal est


indispensable pour éviter de tomber dans des choix hasardeux. Toutefois, l'attraction et
le feeling passant entre le candidat et le recruteur exercera toujours une influence non
négligeable5

5
Les études ont montré que cette attractivité est liée à différents facteurs tels que l'apparence physique, les
qualités de communication et de présentation, la personnalité, la biographie (notamment les points communs
entre le candidat et le recruteur).

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3.1.2. Recherche des candidats


Il n'y a pas de bon recrutement sans de bons candidats. Rappeler cette évidence, c'est
souligner combien le recrutement doit s'opérer avec soin, en visant les cibles potentielles
les plus porteuses. L'objectif de cette deuxième étape est clair : obtenir une palette
de bons candidats (idéalement 3 à 5) parmi lesquels choisir.

Afin de bien mener cette deuxième étape du processus de recrutement, les deux étapes
suivantes sont à respecter :
- Identifier les sources de candidats potentiels. Ces sources peuvent être des lieux
de formation, des entreprises œuvrant dans le même domaine ou employant le
même type de compétences, des lieux géographiques on encore des catégories
socio-professionnelles.
- Sélectionner les moyens de recrutement les plus efficaces compte tenu des
sources identifiées. Outre l'annonce traditionnelle, les contacts par réseaux
personnels, les agences de placement, voire la consultation de bases de données
sur Internet, peuvent le cas échéant s'avérer plus ciblés.

3.1.3. Sélection
La sélection fine opère idéalement sur une population de trois à cinq candidats, avec au
moins trois méthodes différentes, apportant ainsi un regard croisé sur les qualités des
prétendants. Parmi les méthodes les plus fréquemment utilisées se trouvent : l'entretien
de sélection, la prise de référence, l'échantillon de travail et les tests.

L 'entretien de sélection
Cette méthode, la plus répandue, est incontournable. En effet, comment imaginer un
recrutement sans que le candidat soit venu se présenter et n'ait pu rencontrer son futur
employeur. En réalité, l 'entretien comporte trois dimensions bien distinctes :
- D'une part, c'est un échange interactif d'informations, le recruteur cherche à
cerner les compétences et la personnalité du candidat, et celui-ci cherchant à
percevoir les véritables dimensions du poste et de l'environnement professionnel
qui lui sont proposés.
- D'autre part, un échantillon de comportement. L'entretien correspond bien à une
situation vécue réelle, où le candidat utilise son langage verbal et non-verbal pour
présenter sa candidature de manière convaincante. En ce sens, il permet au
recruteur d'apprécier dans quelle mesure le candidat maîtrise cet exercice.
- Finalement, l'entretien est un vecteur important de l'image de l'organisation,
exerçant ainsi un rôle de marketing. Selon l'impression, positive et professionnelle,
ou au contraire négative et dilettante, qui est laissée au terme de l'entretien, le
candidat gardera en mémoire une image de l'organisation et en parlera à
l'extérieur de manière très différente.

Afin de mener l'entretien de sélection de manière professionnelle, il est recommandé


d’observer les principaux facteurs de succès suivants :
- Préparer le cadre et choisir un moment propice ;

21
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- Faire parler le candidat d'abord ;


- Préparer les questions essentielles avec des formulations neutres ;
- Equilibrer le temps de parole ;
- Connaitre les biais les plus courants des interviewers ;
- Eviter de chercher la faille.

La prise de référence
Dans la plupart des dossiers de candidature figurent des personnes de référence à
contacter. Ces personnes choisies par le candidat ont quasi nécessairement une opinion
favorable de lui, aussi n'est-il pas très utile de les appeler. Très utile par contre, est la prise
de renseignements préparée auprès de personnes ayant directement travaillé avec le
candidat. Cette source de renseignements peut se révéler très précieuse, surtout lorsque
des questions précises sont posées, en relation avec les qualités recherchées pour le
poste à pourvoir.

Outre les questions portant sur les performances accomplies par le candidat dans son
précédent emploi, ainsi que les éléments marquants de son comportement, il est
également suggéré de demander à son interlocuteur dans quelle mesure il voit le
candidat dans l'emploi à pourvoir, en décrivant succinctement les tâches et
responsabilités impliquées.

L'échantillon de travail
Trop rarement utilisé, l'échantillon de travail présente pourtant une excellente validité
prédictive. Il consiste à organiser une simulation du travail futur dans la mesure où cela est
possible. De la lettre dictée à la future secrétaire, à la simulation de client mécontent
venant se plaindre, en passant par l'exercice d'analyse de problèmes, les possibilités sont
multiples. L'important est de soumettre tous les candidats au même échantillon, de sorte
à pouvoir comparer les performances. Chaque candidat recevra des consignes claires et
le même temps de réalisation.

Les tests
Sans conteste, les tests représentent la méthode de sélection offrant le plus grand choix
d'instruments. Au fil de décennies de recherches, et d'un marché très demandeur,
d'innombrables tests se sont développés. Ces deniers peuvent être classés en trois
catégories : tests d'aptitudes particulières ou générales, tests d'intérêts et tests de
personnalité. Cette dernière catégorie se subdivise elle-même en tests dits « objectifs »
(composés de questions précises faisant référence à des faits) et tests « projectifs »
(présentant au répondant un matériel flou, incomplet comme des images ou phrases à
compléter lui permettant précisément de projeter sa personnalités).

La question qui se pose est de savoir comment apprécier la validité et l'utilité pratique
d'un outil de type test. Pour répondre à cette question, il convient d'abord de vérifier que
le test en question permet de situer les performances des candidats parmi celles d'une
population de référence (étalonnage du test). Sans cette référence, qui doit correspondre

22
Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences Prof. I. Dekhissi

à une population si possible proche des candidats testés, les résultats ne sont guère
interprétables. En second lieu, le test doit avoir passé avec succès les analyses attestant
de sa robustesse scientifique. Sans rentrer dans les détails, mentionnons simplement :
- La fiabilité : le test administré plusieurs fois, ou interprété par plusieurs évaluateurs
doit donner le même résultat ;
- La validité du contenu : le test, même fiable, ne mesure pas forcément ce qu'il
prétend mesurer ! Cette validité de contenu est évaluée en comparant les résultats
du test avec d'autres outils eux-mêmes certifiés quant aux dimensions qu'ils
évaluent.

3.1.4. Intégration
Le succès du processus de recrutement est lié à la conduite rigoureuse des phases
précédemment décrites. Toutefois, sans une attention particulière portée sur l'accueil du
nouveau venu, le meilleur candidat peut se voir rejeter par son équipe. En effet, le succès
du processus de recrutement réside moins dans le fait de trouver le candidat idéal que
d'anticiper l'adéquation avec celles et ceux qui vont travailler ensemble. Sous cet angle,
l'accueil et l'intégration relèvent d'un véritable processus de socialisation.

Pour réussir ce processus de socialisation, il est recommandé d'ajouter à l'analyse


purement technique du poste à pourvoir une analyse qui définisse le profil « culturel et
relationnel » du candidat qui est fonction de :
- La culture organisationnelle globalement et de la culture spécifique à l'unité qui
recrute. De la sorte, un choc culturel trop fort pourra être évité, et c'est là l’une des
causes très fréquentes de l'échec d’un recrutement.
- La culture et le mode de fonctionnement du groupe de travail restreint. Anticiper
dans quelle mesure le candidat pourra être accepté par le groupe d'accueil est
parfois difficile. Aussi la méthode la plus sûre consiste, là où c'est possible, à
intégrer des futurs collègues dans le processus de recrutement en organisant une
rencontre formelle avec les candidats finalistes.
- Bien entendu, l'adéquation des personnalités de chef direct et du candidat
demeure essentielle et ne doit pas être négligée.

3.2. Plan de formation


Le plan de formation est le deuxième outil que les organisations peuvent mobiliser pour
mener des actions correctives afin de combler l’écart constaté entre les compétences
acquises et les compétences requises. Pour présenter cet outil, nous allons d’abord nous
interroger sur le choix des stratégies et des moyens de formation. Ensuite, nous allons
voir comment implémenter les moyens de formation retenus. Le tout en déclinant ces
deux questionnements en trois niveaux d’analyse : organisation, service et individu.

3.2.1. Choix des stratégies et des moyens de formation


Le développement des compétences à travers la formation repose sur la qualité des choix
stratégiques de l’organisation ainsi que sur la manière dont cette dernière alloue ses
différentes ressources. Il s’agit donc de cibler les moyens les plus adaptés aux besoins

23
Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences Prof. I. Dekhissi

identifiés et aux particularités de chacun des trois niveaux suivants : organisation, service
et individu.

Au niveau de l'organisation
En matière de formation, les pratiques de développement des compétences au niveau
organisationnel sont extrêmement variées. En effet, les connaissances acquises en
pédagogie, andragogie, processus d'apprentissage, ainsi que les nouvelles technologies
de l'information, ouvrent de multiples pistes pour transmettre de manière efficace de
nouvelles compétences au personnel.

Dans le tableau 4 ci-dessous, nous proposons les principales pratiques de formation que
l'organisation peut mobiliser.

Types de formation Description

Interne ou inter-entreprises, cette formation est la plus


Formation en salle
répandue. Elle s'apparente à la formation scolaire classique.
Formation Les contenus de formation présentés sur ordinateur sont
(enseignement) assisté accessibles en tout temps et chacun peut avancer à son
par ordinateur (EAO) rythme.
Ce type de formation peut être facilité en organisant des
Formation au poste de réunions d'apprentissage où les collaborateurs présentent
travail des situations problématiques à leurs collègues afin de
bénéficier de leurs expériences.
Cette approche lie plus formellement deux partenaires
(l'apprenant et le coach) dans le cadre d'un processus
Formation-coaching
d'apprentissage qui alterne des phases d'enseignement et
(tandem)
des phases de traitement des problèmes concrets sur le
terrain.
Elle consiste à marier le transfert de compétences et la mise
Formation action
en œuvre, le plus souvent dans le cadre d'un projet.
Très populaire, cette formation consiste à mettre les
apprenants en situation à l'extérieur de l'organisation, en
Formation outdoor
partant de l'idée que les acquis pourront être facilement
transposés dans les tâches professionnelles.

Tableau 4 : Principales pratiques de formation

Au niveau du service
Le service peut utiliser l'ensemble des moyens évoqués dans le tableau 4. Les
particularités des choix au niveau du service sont les suivantes :
- Les axes prioritaires de formation identifiés donneront lieu à ce que les spécialistes
appellent des « couloirs » de formation prioritaires. Ces couloirs sont en principe

24
Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences Prof. I. Dekhissi

obligatoires pour l'ensemble du personnel, favorisant l'émergence d'une culture


et d'un vocabulaire communs, en plus des compétences collectives qui en sont
naturellement issus.
- Les moyens de formation retenus favorisent les processus d'apprentissage
collectif. Il est dans ce cas recommandé d'éviter les moyens de formation où les
participants proviennent de plusieurs contextes avec des préoccupations très
différentes. Au contraire, il s'agit de former des équipes internes au service, si
possible en mariant les métiers et les niveaux hiérarchiques, afin que ces
processus d'apprentissage puissent émerger.
- Les moyens retenus seront généralement axés sur l'action (formation action),
nécessitant ainsi une élaboration sur-mesure des contenus de formation et un suivi
de la mise en œuvre sur le terrain.

Au niveau de l'individu
Au niveau individuel, le choix des moyens de formation opère sur un double plan :
- Dans le cadre du service dont l'organisation du travail et le style de management
favorisent plus ou moins l'acquisition de compétences nouvelles : il s’agit d’une
formation sur la place de travail qui met la hiérarchie devant son rôle de
développeur du personnel et qui l'incite à partager de façon active (coach) ses
compétences. Il convient de noter que la mise en œuvre de ce genre de pratique
n'est pas évidente non seulement parce qu'elle nécessite un savoir-faire
pédagogique particulier, mais aussi parce que la hiérarchie y voit une perte de
pouvoir potentielle, pouvoir précisément lié à la maîtrise de compétences
spécifiques.
- Dans le cadre des moyens de formation mis à disposition par l'employeur de
manière centralisée : il s’agit d’un moyen que l’on trouve dans les grandes
entreprises qui disposent d’une structure interne dédiée à la formation appelée
« unité de formation ». Dans ce cas de figure, l’unité de formation montre sa réelle
plus-value non seulement en offrant des séminaires répondant aux besoins
prioritaires du personnel, mais aussi en agissant en qualité de conseiller au
personnel pour choisir les mesures de développent les plus appropriées.

3.2.2. Mise en œuvre des moyens de formation retenus


L’exécution de l’apprentissage consiste en une réalisation efficace et efficiente des actions
de formation retenues sur la base d’un contrat engageant les différentes parties
impliquées. Cela nous conduit à décliner la mise en œuvre du plan de formation en trois
niveaux : organisationnel, collectif (le service) et individuel.

Au niveau de l'organisation
La mise en œuvre implique une planification de l'ensemble des moyens de formation
retenus par l'organisation. A titre indicatif, nous proposons dans le tableau 5 ci-dessous
un cheminement adaptable selon les particularités de chaque organisation :

25
Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences Prof. I. Dekhissi

Timing6 Actions à entreprendre


Janvier à Mars Analyse des formations réalisées l'année passée.

Février à Mai Recueil des besoins de formation auprès des services.


Synthèse des besoins et contact avec les formateurs
Mai à Septembre
potentiels.
Mai à Octobre Elaboration du budget de formation pour l'année suivante.
Elaboration de la première version du programme de
Septembre
formation.
Confirmation des contrats de formation avec les partenaires
Septembre à Octobre
externes.

Novembre Réalisation de la version définitive et envoi aux services.

Décembre à janvier Inscription des participants.

Janvier Tri des inscriptions et confirmation.

Janvier à Décembre Réalisation des actions de formation.

Tableau 5 : Mise en œuvre du programme de formation

La mise en œuvre pose également la question de l'imputation des coûts de formation aux
services « consommateurs ». Cette imputation poursuit deux objectifs :
- Premièrement, dans le cadre de la détermination des coûts de fonctionnement
réels des services et prestations fournies, cette imputation correspond à ce que la
comptabilité analytique considère comme une prestation interne, aboutissant à un
transfert de charges entre le service « fournisseurs » (l'unité de formation) et le
service utilisateur.
- Deuxièmement, cette imputation vise à responsabiliser les services en les rendant
attentifs aux coûts effectifs de la formation. A partir du moment où la formation est
facturée aux services, elle fait partie de leur budget de fonctionnement et
« charge » leur enveloppe globale. On peut dès lors penser que les choix seront
faits avec sérieux et effectivement suivis (moins de désistements).

Au niveau du service
Plus ou moins intégrée aux tâches quotidiennes que doivent réaliser les services, la
formation représente une surcharge et doit être soigneusement planifiée. L'analyse des
raisons de non-fréquentation de la formation fait ressortir, parmi les motifs recensés, une
proportion importante liée à la surcharge de travail et aux changements de priorités. Cela
signifie que les moyens de formation devront être intégrés dans le plan opérationnel du
service et considérés comme activité importante par rapport à la mission du service, et
non comme une activité accessoire à effectuer lorsque toutes les autres tâches ont été

6
Certaines phases se chevauchent.

26
Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences Prof. I. Dekhissi

liquidées. Dans la mesure du possible, il est préférable de les planifier en tenant compte
des périodes creuses et en évitant les vacances du personnel.

Au niveau de l'individu
Au niveau individuel, la mise en œuvre des moyens retenus se limite souvent à sa plus
simple expression : le collaborateur sollicite une formation, parvient à convaincre sa
hiérarchie qui l'inscrit pour cette formation. Le processus s'arrête là, ce qui se révèle
incontestablement insuffisant. En effet, nous recommandons que la mise en œuvre fasse
l'objet d'une forme de contrat de formation entre le responsable hiérarchique et le
collaborateur. Le tableau 6 ci-dessous reprend les principaux éléments de ce contrat.

Contrat de formation Partenaires Période concernée

Collaborateur concerné
Responsable hiérarchique
Mentionner les faits qui justifient un développement des
Contrat initial, selon
compétences (demande, besoins, voire obligations si
évaluation périodique du...
performances insuffisantes).

En relation avec la description de poste, selon le


Compétences à acquérir
référentiel de compétences de l 'organisation.
Mesures de développement Mesures ad hoc, interne au service, ou selon programme
des compétences retenues offert par l'unité de formation.
Evaluation prévue et
Généralement lors du prochain entretien d'évaluation.
conséquences associées
L'engagement n'a pas de valeur juridique, il témoigne
Date et signature des
d'une collaboration où les deux partenaires
partenaires
s'impliquent.

Tableau 6 : Eléments du contrat de formation

4. Les limites de la GPEC

En guise de conclusion, il convient de signaler que les scientifiques autant que les
praticiens ont appris à se méfier des modèles prévisionnels : trop ambitieux, trop
sophistiqués, ils ont progressivement montré leurs limites tant en ce qui concerne la
planification stratégique globale7 que la GPEC en particulier. Ainsi, Gilbert (1995)
constate, à travers une enquête réalisée auprès de grandes entreprises, que les bénéfices
escomptés de la GPEC sont loin d’être évidents, surtout lorsqu’on les compare au temps
et à l’énergie qu’il a fallu déployer pour concevoir et mettre en œuvre cette démarche.

7
Voir à ce propos le célèbre ouvrage de Mintzberg : « Grandeur et décadences de la planification
stratégique », 1994.

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Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences Prof. I. Dekhissi

Parmi les principaux écueils rencontrés, on peut citer les suivants :


- Une gestion prévisionnelle « imprévoyante », qui se développe sur une durée trop
longue et fréquemment s’enlise sous l’effet de méthodes exagérément
complexes ;
- Une gestion prévisionnelle déconnectée des processus décisionnels de
l’organisation, qui a pour effet de ne pas être en phase avec les besoins en
informations de la direction, ce qui rend les analyses effectuées inutiles ;
- Une difficulté à saisir réellement la dynamique des organisations, la subtilité des
compétences effectivement (et non pas théoriquement, de manière simplifiée)
nécessaires pour occuper avec succès les emplois analysés ;
- Un activisme où la création et l’exploitation d’outils spécifiques, tels que les
référentiels de compétences et les nomenclatures des emplois, prennent le pas
sur les objectifs prévisionnels, aboutissant à une confusion entre la fin et les
moyens ;
- Et finalement, une démarche où les experts font souvent défaut. Parce que la
GPEC mobilise des savoir-faire très spécifiques (prévisionnistes, ergonomes,
psychologues du travail), elle s’avère bien souvent très complexe tout en étant
confiée à des non-spécialistes promus « experts » pour l’occasion. Résultats : des
analyses inopérantes, des conclusions inapplicables et surtout, du temps et de
l’argent gaspillés.

Signalons que tout en gardant à l’esprit de ne pas lui associer des ambitions démesurées,
la GPEC demeure une démarche indispensable pour de nombreuses raisons. Tout
d’abord, les ressources humaines ne peuvent être traitées à la même enseigne que les
autres ressources. Notamment pour des raisons légales, économiques et éthiques.
Raisons légales, parce que le contrat de travail qui lie le personnel à son employeur
définit des règles d’engagement et de licenciement, variables d’un pays à l’autre, mais qui
ont en point commun une certaine protection du personnel. Cette protection se
concrétise notamment par des délais de résiliation, qui limitent une gestion du personnel
à court terme, hormis par les pratiques fortement contestées des « contrats sur appel » ou
la multiplication des contrats à durée limitée. Raisons économiques, parce que les
ressources humaines sont parmi les ressources les plus coûteuses, et qu’ainsi, toute erreur
de gestion (emploi occupé à double, personnel en sureffectif, compétences inadaptées,
etc.) a potentiellement des conséquences très douloureuses au niveau de la masse
salariale (pour ne mentionner que les coûts directs). Et raisons éthiques enfin, parce que
s’il est de bonnes manières de traiter le personnel, respectueuses et durables, qui visent
une implication à long terme du personnel, celles-ci ne peuvent être improvisées. Dans
l’urgence et sans références à des valeurs respectueuses du personnel, l’employeur peut
agir en contrevenant à des règles non seulement juridiques, mais également à des règles
éthiques. La GPEC, à elle seule, ne peut garantir bien entendu une GRH éthique ; parce
qu’elle permet d’anticiper les incidences, positives autant que négatives, de l’évolution de
l’organisation sur le personnel en place, elle pose les bases d’une gestion saine des
employés, complément indispensable à une politique du personnel fixant le cadre et les
valeurs de référence prévalant dans la GRH.

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