sonnet 22 Introduction • Dans les 24 sonnets, l’ante-pénultième • Au terme quasiment de toute une initiation amoureuse • Ici, enchaînement d’apostrophes à des divinités intimes (tutoyées) Soleil, sa sœur (la lune) (en premier quatrain), doublé d’une succession d’associations mythologiques soleil/lune, Mars/Vénus, Mercure/Jupiter… • puis discours à la 3e personne (v.4-10) sur l’harmonie planétaire. • Jusqu’au renversement du dernier tercet: ceux qui sont pris en exemple sont finalement (second tercet) dévalués car leur sort, plus enviable que celui de notre poétesse, et leur harmonie exemplaire ne tiennent … qu’à une belle chance, celle d’avoir leur alter ego tout près. Finalement dans l’analogie est ruinée, le sort de notre poétesse n’étant en rien comparable à celui des planètes. = une comparaison en vain ? Premier mouvement: la prise à partie des planètes • Soleil/ terre (« luisant soleil » / « t’Amie ») le « soleil » est surdéterminé (jusqu’au pléonasme) mais la terre? Téthys? est désignée par une simple périphrase • 2e vocatif: « et toi, sa sœur » (= la lune) qu’Endemyon embrasse. La lune n’est désignée que par ses expansions du nom, d’abord l’apposition « sa sœur » et la relative « qu’Endemyon embrasse » = elle n’existe qu’en fonction des autres qui la déterminent Second mouvement: les modèles d’harmonie • Sur tout le second quatrain: Mars/Vénus • Mercure/ Jupiter avec le mouvement du premier qui se répand dans les enjambements (dieu voyageur jusque dans les vers) • Effet–miroir dans les reprises de termes: « de Ciel en Ciel », « de lieu en lieu » • Comparatifs de supériorité « plus gais et chaleureux », • hyperbole « mainte place » • Harmonie dans les assonances en [v] « voit, Vénus, aventureux, voilà, divin » puis en [s] (Ciel en Ciel, se glace, place, ses) • Plénitude atteinte au vers 10 « qui les esprits divins ensemble lie » puisque la mise en commun se retrouve dans le pluriel (« les esprits divins »), dans l’adv. « ensemble » et dans le verbe « lier » = insistance sur la communauté Troisième mouvement: la volta • L’harmonie n’est que factice; • Loin de prouver que les humains devraient prendre modèle sur les deux, le poème prend finalement comme référence le sort humain et rend dès lors l’accomplissement divin improbable. Le modèle est devenu un contre-modèle. • Vers 11. hypothèse qui vient tout déranger « Mais s’ils avaient… » (adversatif « mais » + système conditionnel) • Reprise ironique de « harmonie » v.9 on y croit, v.12 on n’y croit déjà plus • Ironie aussi de l’adj. « irrévocable » après les vocatifs du début du sonnet • Tous les termes mélioratifs du début (« bienheureux », « amoureux », « chaleureux », « puissante », « aiment ») supplantés par « erreur », « vain » et le jeu de mot sur « travailleraient » (œuvrer mais aussi torturer) • Sonorités désagréables : allitération de la fricative [r] au dernier tercet (« harmonie », « ordre », « irrévocable », « tournerait », « erreur », variable », « travaillerait ») • Déséquilibre du nouveau duo: « moi » sans binôme • Dans ce tercet, aucune occurrence de « voir » alors que le mot apparait dans chacune des trois strophes précédentes (« voir », « voit », « voilà ») = couple séparé. Ce couple-là n’existe que désuni. Conclusion • On passe tout le poème à envier une harmonie factice et improbable. • Le lecteur en fin de tercet plutôt amené à trouver son modèle en la pauvre poétesse malmenée par son amour. • Aux deux vers finaux on comprend que « l’erreur » (= l’errance) et le vide, la vanité, l’immensité les plus terrifiants sont ceux de l’absence de l’être aimé, plus que la voûte céleste des planètes. Ouverture • Paradoxalement c’est à la fin du sonnet et dans les souffrances intérieures, que le plus vaste espace se dessine. • Préfiguration de « l’espace du dedans », abyssal, d’un Henri MICHAUX. Ouverture de conclusion bis Marceline DESBORDES-VALMORE, « Les séparés », Poésies inédites (1860)
N'écris pas. Je suis triste, et je voudrais m'éteindre.
Baudelaire, Paul Claudel, André Gide, Rameau, Bach, Franck, Wagner, Moussorgsky, Debussy, Ingres, Cézanne, Gauguin: Les études et biographies d'artistes de Jacques Rivière