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LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

Ministère de la justice
Et des libertés
L’institut Supérieur de
La Magistrature
Rabat

Mémoire de fin de formation sous le thème :

LA PROBLEMATIQUE DE LA
DETENTION PREVENTIVE ET SES
ALTERNATIVES POSSIBLES
PREPARE PAR L’ATTACHEE DE JUSTICE SOUS L’ENCADREMENT DE :

Soukaina SOUALIH Maitre Ouafae Zouidi

Promotion : 41
N° d’inscription 27 Juge d’instruction auprès de la Cour
d’Appel de Rabat

Période de Formation

2015 – 2017
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

REMERCIEMENTS

La réalisation de ce mémoire a été possible grâce au concours de plusieurs


personnes à qui je voudrais témoigner toute ma reconnaissance.
Je tiens tout d’abord à adresser toute ma gratitude à madame Ouafae
Zouidi – Juge d’instruction auprès de la Cour d’appel de Rabat, pour
sa patience, sa disponibilité tout au long de la réalisation de ce travail, ainsi
pour son inspiration, son aide, et ses judicieux conseils qui ont contribué à
alimenter ma réflexion et sans lesquels ce mémoire n'aurait jamais vu le
jour.
Mes remerciements s’adressent également à M. Abdelmajid Ghmija,
directeur général de l’institut supérieur de la magistrature, qui nous a été,
dès la première année de stage, très proche et toujours à l’écoute.
J’exprime aussi ma gratitude et mon respect à tous les cadres de l’institut
supérieur de la magistrature, particulièrement à M. Abdelhanine
Touzani et M. Mourad Ait Saqel pour leur support inestimable, leur
générosité et leur grande patience dont ils ont su faire preuve malgré leurs
charges professionnelles.
Les mots me manquent pour exprimer ma profonde reconnaissance à ma
tendre famille dont l'amour, la patience et le sacrifice s'inscrivent à chaque
page de ce document.
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

SOMMAIRE
Chapitre I- La détention préventive : Entre l’exception textuelle et
l’éventualité d’une pratique conditionnée

Section 1 : Le régime juridique de la détention préventive

Paragraphe 1: Les conditions préalables au placement en


détention préventive
Paragraphe 2: La durée de la détention preventive

Section 2- Le régime d’exécution de la détention provisoire

Paragraphe 1: Les modalités de mise en oeuvre de la détention


préventive
Paragraphe 2: Les statistiques descriptives relatives à la détention
préventive

Chapitre II : Les alternatives à la détention préventive : Des conséquences


inéluctables et des recommandations envisageables

Section 1 : La rationalisation de la détention préventive


Paragraphe 1 : Le système du contrôle judiciaire

Paragraphe2 : Le placement sous surveillance électronique

Section 2 : Les maux de la détention préventive et les


recommandations anéantissant son inflation
Paragraphe 1 : Les maux de la détention préventive
Paragraphe 2 : Des recommandations anéantissant l’inflation de la
détention préventive
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

LA PROBLEMATIQUE DE LA
DETENTION PREVENTIVE ET SES
ALTERNATIVES POSSIBLES
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

Introduction
« Quand l'innocence des citoyens n'est pas assurée,
la liberté ne l'est pas non plus. »1
Toute politique criminelle ne doit pas être fondée uniquement sur la
sécurité, mais elle doit aussi concilier cette notion avec le respect des droits et
libertés fondamentaux. La conciliation de ces éléments est la conséquence
logique de l'insertion des concepts de liberté et de justice au côté de celui de
sécurité dans les instruments internationaux des droits de l'Homme et dans la
Constitution.2
Le droit à la liberté et à la sûreté, garanti par l'article 5 de la Convention
européenne des droits de l'Homme, par l'article 6 de la charte des droits
fondamentaux de l'Union européenne et par l'article 9 du pacte
international relatif aux droits civils et politiques, n'est pas une notion
antinomique mais complémentaire. Cette affirmation se retrouve dans le point
de vue de la Commission européenne des droits de l'Homme selon lequel :
L'expression "liberté et sécurité" doit dans cette disposition être lue comme
formant un tout et comme ne visant que la liberté physique et la sécurité
physique. De cette manière, la notion de sécurité va de pair avec celle des
"voies légales" et de détention régulière, de sorte que cette dernière se trouve
liée à l'idée que toute privation de liberté doit émaner et exécuter d'une autorité
compétente et ne pas revêtir un caractère arbitraire.

Il se déduit de cette présentation que parmi les exceptions au droit à la liberté,


on peut relever le cas de la détention préventive. L’étape où se situe notre sujet
de développement est la phase d’instruction où le dossier, objet de la
procédure, est confié par le ministère public au juge d’instruction. Au cours

1
Montesquieu , « De l’esprit des lois », tome I, livre XII, chapitre II, p.197
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

de cette phase, le juge procède à une investigation, une instruction du dossier.


Pour les raisons de l’enquête, il fait appel à la personne suspectée dans
l’infraction pour des interrogatoires en vue de bien instruire le dossier. Pour
des raisons qui font parties de ses prérogatives, le juge d’instruction est
habilité à placer la personne suspectée en détention provisoire.

Le législateur ne définit pas cette mesure privative de liberté, il a laissé ce soin


à la doctrine, néanmoins il a timidement précisé que celle-ci devrait être une
mesure exceptionnelle car préjudiciant aux droits des inculpés. Du point de
vue juridique, on admettra comme définition générale que la détention
préventive ou provisoire est une mesure ordonnée par l’autorité judiciaire et,
qui consiste à priver un inculpé de sa liberté et à le placer dans un
établissement pénitentiaire à la disposition de la justice, avant la décision de
la juridiction de jugement.3

Selon Jean PRADEL « la détention provisoire est l'incarcération d'un


inculpé en maison d'arrêt pendant tout ou partie de l'instruction préparatoire
jusqu'au jugement définitif sur le fond de l'affaire ». Pour Jocelyne Leblois-
Happe, « la détention provisoire constitue un moment clé de l'instruction,
durant lequel des principes contradictoires doivent être conciliés : respect de
la liberté et du principe de la présomption d'innocence et en même temps
nécessité de préserver les besoins de l'instruction. ». C’est une mesure prise
dans le cadre d’une instruction préparatoire soit d’interrogatoire de première
comparution ou d’interrogatoire de fond.

C’est une mesure privative de liberté qui répond à un régime spécial la


différenciant ainsi des autres formes de privation de liberté dans le cadre du
procès pénal. Ainsi, elle ne doit pas être confondue avec la garde à vue qui est

3
Mohamed DRISSI ALAMI MACHICHI, « Régime juridique de la détention préventive », in Revue de la
sûreté nationale, n°184, 1996, p.2
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

pratiquée dans la phase de l’enquête préliminaire permettant à un officier de


police judiciaire de tenir à sa disposition, pour les besoins de l’enquête, un
suspect pour une durée de 48 heures à compter à partir du moment de
l’appréhension de la personne concernée, renouvelée une seule fois pour une
durée de 24 heures. Par ailleurs, la détention préventive diffère des autres
mandats ordonnés par le juge d’instruction. Le mandat de comparution,
d’amener, d’arrêt et de dépôt sont des ordonnances coercitives susceptibles
d’exécution par la force publique auxquelles le juge d’instruction a recours
lors de l’instruction du dossier. Ils s’appliquent aux personnes suspectées dans
l’infraction. Il ordonne l’un ou l’autre selon la gravité des cas, en vue de
procéder à l’interrogatoire des suspects. La grande différence à mentionner est
celle qui existe entre la détention préventive et une peine privative de liberté.
Sur le plan chronologique, nous voyons que la détention provisoire intervient
avant le jugement définitif, et son régime diffère de celui d’une peine privative
de liberté. La détention provisoire est renouvelable, tandis que la peine
privative de liberté est définitive.

L’évolution de la détention préventive au Maroc s’est déroulée en dent de scie.


En effet, la première reconnaissance officielle des droits et libertés individuels
lors de la détention préventive a lieu avec l’élaboration du premier code de
procédure pénale du 10 février 1959. Ce code a été influencé en grande partie
par celui de la France promulgué un an avant. Selon l’ancien article 159 C.P.P,
la détention est “mesure exceptionnelle. Elle fait généralement suite à la garde
à vue”. “C’est une mesure extrêmement grave, qui n’est ordonnée par le juge
d’instruction qu’à certaines conditions”. La présomption d’innocence y était
clairement reconnue. Ce grand artifice a fondu avec la promulgation des dahirs
de 1962 et 1974 qui avaient sensiblement limité les garanties des libertés
individuelles, nuançant ainsi sa réglementation protectrice pour engendrer des
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abus à son égard dans un souci d’accélérer la procédure. Dans le cadre de la


détention préventive, le délai légal a été doublé ignorant ainsi les droits et
libertés individuels. Cependant, la remise sur pied de tous ces principes du
procès équitable a été l’œuvre de la commission consultative des droits de
l’homme (CCDH). Cette commission constituée en vue d’étudier la situation
des droits de l’homme dans le cadre du procès pénal, a émis des propositions
des plus intéressantes qui seront d’ailleurs prises en compte pour le projet de
loi concernant le nouveau code de procédure pénale. Ce texte voté et
promulgué le 03 octobre 2002 reprendra les principes du procès équitable et
fera de la détention préventive une mesure exceptionnelle. Sa durée a
également été revue en baisse.

Les reformes apportées par le nouveau code de procédure pénale ont couronné
la détention préventive du principe de présomption d’innocence et de procès
équitable. Ainsi le régime de la détention préventive a retrouvé et amélioré
son régime d’antan. Elle est régie par les articles 159 et 175 à 188 du C.P.P.
Enfin, le projet de réforme du droit pénal et de la procédure pénale va marquer
une importante évolution en reconnaissant explicitement à la personne de
nombreuses garanties formelles et substantielles dont le but est de trouver un
équilibre, difficile à réaliser, entre sécurité et protection des droits et libertés
fondamentaux.

Toutefois, le régime de la détention préventive au Maroc n’a jamais été


épanoui qu’avec la nouvelle constitution du 1er Juillet 2011 qui rehausse la
présomption d’innocence et le droit à un procès équitable au niveau
constitutionnel avec toutes les garanties possibles.

Quant à l’utilité de cette mesure privative de liberté, la détention provisoire


soulève des interrogations en raison de la protection des intérêts qui entrent en
jeu. Il y a de ce fait, opposition entre l'intérêt de la société et celui de l'individu.
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

Vu sous l'angle social, la détention provisoire est un instrument répressif par


anticipation, ce qui donne à la collectivité, un sentiment de protection et de
sécurité. C'est une mesure donc nécessaire pour des raisons diverses : garantir
l'exécution du jugement en s'opposant à la fuite du prévenu ; faciliter la
recherche de la vérité, en ce sens que le prévenu, gardé sous-main de justice,
se présente à tous les actes de la procédure en cours (interrogatoire,
confrontation, reconstitution) ; elle empêche également le renouvèlement de
l'infraction et rétablit l'ordre public troublé par l'agissement du prévenu ; la
privation de liberté avant jugement aide, si nécessaire, à l'application d'un
traitement adapté au mis en examen ;enfin, elle protège le prévenu
d'éventuelles représailles.

Dans cette conception utilitariste de la détention provisoire, il n'en demeure


pas moins qu'elle engendre des inconvénients, voire masque souvent les
dangers de l'institution. Il s'agit là d'une mesure grave pour la liberté
individuelle, et qui paraît contraire à la présomption d'innocence, l'intéressé
subissant l'équivalent d'une peine sérieuse alors qu'il n'a pas encore été jugé.
Cet inconvénient s'aggrave du fait qu'en pratique le juge de jugement a parfois
tendance, pour ne pas désavouer le juge d'instruction, à choisir une peine au
moins égale à la durée de la détention provisoire et à user moins facilement du
sursis ou des substituts à l'emprisonnement lorsque cette durée a été longue.

Elle fait ainsi peser sur la personne mise en examen la présomption de


culpabilité entraînant sans doute, une augmentation des risques de
condamnation et bafoue un principe inscrit dans la déclaration des droits de
l'homme et du citoyen de 1789 en vertu duquel, « Tout homme est présumé
innocent jusqu'à ce qu'il soit déclaré coupable ». Et, c'est dans le même esprit
que Faustin Hélie a pu écrire à ce propos que « la détention préalable inflige
un mal réel, une véritable souffrance, à un homme qui non seulement n'est pas
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

réputé coupable, mais qui peut être innocent, et le frappe, sans qu'une
réparation ultérieure soit possible, dans sa réputation, dans ses moyens
d'existence, dans sa personne ».

Mais la détention préventive serait-elle vraiment une mesure


exceptionnelle comme le prévoit la loi ou serait-elle un préjugement ?

La détention provisoire caractérise-t-elle une atteinte à la présomption


d’innocence ?

Cette présomption d’innocence est décrite sous la plume de Jean PRADEL


comme étant « le principe cardinal de la procédure pénale dans un Etat de
droit, autour duquel tout gravite puisque les autres principes directeurs qui
gouvernent la procédure sont la conséquence du principe de la présomption
d’innocence. Le principe de la présomption d’innocence est reconnu être un
pilier de notre idéal démocratique. Mais pourquoi revêt-il une si grande
importance face à la détention provisoire ? Parce que le magistrat chargé de
l’instruction doit toujours se méfier d’une possible erreur judiciaire. Si des
indices laissent croire à un soupçon de culpabilité, la personne dite suspecte
reste néanmoins présumée innocente.

Il résulte que le maintien ou le placement d’un individu en détention provisoire


est conditionné par l’existence de motifs à la fois pertinents et justifiés et par
l’obligation d’agir avec célérité dans la conduite des procédures.

Quel est le régime juridique de la détention préventive ? Quelles sont ses


conditions permettant de la mettre en œuvre ? Comment fonctionne-t-elle ?
quelles sont ses dérives ? Quelles sont ses alternatives ? Présente-t-elle des
lacunes remettant en cause son principe? quelles sont les principales
recommandations qu’on pourrait éventuellement proposer face à une possible
déviation de cette mesure dite exceptionnelle ? La personne qui a fait l’objet
1
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

d’une détention préventive au cours d’une procédure terminée à son égard par
une décision de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement devenue définitive a-t-
elle droit, à sa demande, à la réparation intégrale du préjudice moral et matériel
que lui a causé cette détention ? Est-ce que la détention préventive injustifiée
est une forme d’erreur judiciaire prévue par l’article 122 de la constitution
marocaine ?

Tout travail scientifique exige, pour sa compréhension et pour qu’on ne tombe


pas dans le débordement du sujet, qu’il soit délimité en termes de toute
subdivision adéquate. En ce qui concerne le sujet sous examen, et pour
répondre aux questions soulevées ci-dessus ainsi qu’à d’autres, notre travail
sera scindé en deux parties, hormis l’introduction et la conclusion. La première
partie se focalisera sur le régime juridique et le régime d’exécution de la
détention en ayant comme titre « La détention préventive : Entre
l’exception textuelle et l’éventualité d’une pratique conditionnée » tandis
que la deuxième partie traite des alternatives à la détention provisoire tout en
se penchant sur ses limites et sur les recommandations pouvant atténuer
l’inflation de la détention et qui porte l’intitulé « Les alternatives à la
détention préventive : Des conséquences inéluctables et des
recommandations envisageables ».
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

Chapitre I – La détention préventive : Entre l’exception textuelle et


l’éventualité d’une pratique conditionnée

S’interroger sur l’utilité de la détention provisoire est primordial. Cette


détention va entraîner l’incarcération de l’inculpé pendant tout ou partie de
l’instruction. Il s’agit d’une mesure grave pour la liberté individuelle et qui
paraît souvent aux yeux de l’opinion publique contraire à la présomption
d’innocence, puisque l’intéressé subit l’équivalent d’une peine sérieuse alors
qu’il n’a pas encore été jugé4, dans le sens où le juge d’instruction la décide
sans jugement au fond. Elle constitue également une sanction qui ne
correspond pas à une infraction.

En revanche, elle permet au juge d’avoir sous la main le prévenu tout le temps
nécessaire à la manifestation de la vérité. Elle constitue en outre une mesure
de sécurité et pour la société et pour l’inculpé lui-même surtout en matière de
crime. Il nous faut donc s’intéresser au cadre juridique lui-même de la
détention provisoire, à la légalité lato sensu, et son efficacité dépendra
certainement des conditions de son application.5

Certes, certains considèrent que la détention préventive s’oppose à certains


textes relatifs aux droits de l’Homme, mais il existe un certain nombre de
garde-fous prévu par la loi, puisque tout est fait pour éviter les éventuels
dérapages. Ceux-ci se rapportent principalement d’une part, aux conditions de
placement en détention préventive et d’autre part à la durée de ce placement.
Mais les garanties offertes par la loi sont-elles suffisantes ?

4 Melique David, « la détention provisoire », mémoire de DEA, Université de Lille, 2000-2001,


p.235
55
BOUSSETTA Mourad “ Principes élémentaires de la procedure pénale marocaine”, 2ème
edition, Edition Almaarifa, 2006,p.126
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

Il sied de noter que pour ce chapitre, nous allons successivement développer


du régime juridique de détention préventive dans une première section, et du
régime de son exécution dans une seconde section.

Section 1- Le régime juridique de la détention préventive

Pour assurer le caractère exceptionnel de la détention provisoire, hormis


le recours à des termes tels que « sauf » et « à titre exceptionnel », le législateur
a prévu un nombre important de conditions d’application de ladite mesure6.
Plus elles sont nombreuses, moins il est aisé de mettre en œuvre une
disposition relative à la détention provisoire.

Ainsi, le législateur s’assure que cette mesure ne s’applique que dans certains
cas précis, et que le risque d’y recourir dans les hypothèses injustifiées
demeure moindre. Nous exposerons d’une part, les conditions préalables au
placement en détention préventive (premier paragraphe), et d’autre part le
formalisme exigé qui concerne la durée de cette mesure (deuxième
paragraphe).

Paragraphe 1- Les conditions préalables au placement en


détention préventive
De nombreuses législations procédurales pénales ne se contentent pas de
limiter la détention provisoire à certaines contraventions ou aux infractions
dont la peine prévue est une amende seulement, mais étendent le cercle de
cette expansion aux infractions délictuelles les moins graves et dont la durée
de la peine d’emprisonnement prévue diffère selon la politique protectrice de
la liberté individuelle d’une part et de la nécessité d’incarcérer le prévenu
provisoirement d’autre part.

6
KONE Oumar, « La problématique de la détention provisoire », é oire pour l’o te tio du diplô e de
criminologie de l’U iversité Na II, 11 , p.
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

Ainsi, selon la législation marocaine et pour que la détention provisoire soit


légale, il est impératif que cette dernière soit préalablement permise par
l’infraction en question7. C’est dans ce cadre que l’article 159 a explicitement
prévu que le contrôle judiciaire et la détention préventive sont deux mesures
exceptionnelles, applicables en matière de crime et de délit punissables de
peines privatives de liberté. C’est dans ce même sens que l’article 153 du
même code dispose que « Le juge d’instruction ne peut délivrer un mandat de
dépôt qu’après interrogatoire et si l’infraction constitue un crime ou un délit
punissable d’une peine privative de liberté. ». La même disposition s’applique
au ministère public, autorité émettrice du mandat de détention du prévenu
provisoirement dans la mesure où l’article 74 du code de procédure pénale
dispose que « Lorsqu’il s’agit d’un délit flagrant puni d’une peine
d’emprisonnement ou si l’auteur du délit ne présente pas de garanties
suffisantes de représentation, le procureur du Roi ou son substitut peut placer
le prévenu sous mandat de dépôt … ».

Il ne fait pas de doute que cette phase de l’instruction préparatoire se


caractérise par toute une série de règles qui s’efforcent de sauvegarder les
droits de toutes les parties et de garantir les conditions du procès équitable. En
effet, le juge d’instruction, compétent en la matière, ne peut recourir à la
mesure de détention préventive qu’après interrogatoire du prévenu. 8

Il faut souligner dès le départ que l’interrogatoire n’est pas exclusivement un


procédé destiné à recueillir les éléments de preuve, en particulier, l’aveu. C’est
aussi un moyen de défense permettant à l’accusé de connaître les faits qu’on
lui reproche, d’être informé du contenu du dossier et de présenter les

‫ عث ا بنعبد ه و حفيظ باحدو " ااعتقال ااحتيا ي التدابي ال وا ية في ضوء قانو ال سط ة الجنائية القانو ال قار " رسالة ن اية‬7
. 22 ,‫ ص‬، 2002-2002 ،‫التدريب بال ع د العالي للق اء‬
8
L’ordonnance de placement en détention préventive est dépourvue d’effet juridique si elle ne comporte pas
une signature du juge d’instruction. Cour suprême , Arr. n° 93 du 1/7/1958.
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circonstances susceptibles d’établir son innocence. Les droits de la défense


constituent d’ailleurs la pièce maîtresse de l’interrogatoire de première
comparution que l’article 134 du code de procédure pénale entoure d’un
certain nombre de garanties, qui sont bien connues. Il suffit de les rappeler
sommairement :

 Le juge d’instruction informe l’inculpé de son droit de choisir un avocat, et à


défaut de choix, il lui en fait, sur sa demande, désigner un d’office pour
l’assister. Ces dispositions répondent au but de l’article 5-3, l’article 5-4
CSDH et l’article 9-3 du pacte international relatif aux droits civils et
politiques car elles assurent à la personne le bénéfice d’une procédure
contradictoire. L’audition de la personne va dans ce sens et elle comporte un
double avantage. D’un côté, elle permettra aux juges de prendre une décision
spécifique ayant pour objet le maintien en détention ou la mise en liberté de la
personne recherchée et, de l’autre côté, elle donnera à cette dernière la
possibilité de plaider la cause de son élargissement ;
 Le conseil peut assister à l’interrogatoire relatif à la vérification de l’identité ;
 Le juge d’instruction fait connaître à l’inculpé chacun des faits qui lui sont
imputés et l’avertir qu’il est libre de ne faire aucune déclaration. Du reste, le
silence de l’inculpé ou le fait pour lui de ne pas répondre à une question ne
produit aucun effet sur la validité des formalités légales ;
 Dès sa première comparution devant le juge d’instruction, l’inculpé détenu a
le droit de communiquer librement avec son conseil. S’il est vrai que le
magistrat peut prescrire l’interdiction de communiquer, pour une période de
10 jours, renouvelable une seule fois, l’article 136 prend soin de préciser que
cette interdiction ne peut s’appliquer au conseil de l’inculpé.

Il en résulte que les larges pouvoirs reconnus au juge d’instruction sont


tempérés par la réaction contre les nullités qui peuvent entacher
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

l’information9, en l’occurrence la nullité absolue prévue à l’article 210 du


CPP en cas de violation des dispositions légales relatives à l’interrogatoire de
première comparution, ou à l’absence du conseil aux interrogatoires et aux
confrontations. En d’autres termes, les dispositions ci-dessus doivent être
observées à peine de nullité de l’acte entaché et des procédures ultérieures.

La motivation du placement en détention préventive. La détention des


personnes présumées innocentes est une atteinte grave au droit à la liberté. Il
est très important de savoir ce qui justifie une telle détention. Or, le législateur
marocain n’a pas pris le soin de répondre à cet objectif. En effet, l’article 159
du CPP se limite uniquement à préciser que la détention préventive et le
contrôle judiciaire sont deux mesures exceptionnelles sans pour autant fournir
une liste précise des motifs qui exige le placement en détention préventive.

La justification de la détention préventive est pourtant nécessaire, car elle


constitue un rempart contre les violations des droits et libertés individuels.
C’est aussi parce que la liberté est la règle et la détention n’a qu’un rôle
subsidiaire. Cela ressort clairement de l’article 9-3 du pacte international
relatif aux droits civils et politiques qui donne des orientations pour les
personnes impliquées dans une procédure pénale mais qui n’ont pas encore été
reconnues coupables et condamnées. Selon les termes de ce texte :« La
détention de personnes qui attendent de passer en jugement ne doit pas être
de règle, mais la mise en liberté peut être subordonnée à des garanties
assurant la comparution de l’intéressé à l’audience, à tous les autres actes de
la procédure et, le cas échéant, pour l’exécution du jugement. » C’est dans le
même esprit de Jocelyne Leblois-Happe a relevé que « la détention provisoire
constitue un moment clé de l’instruction, durant lequel des principes

9
ESSAID Mohammed Jalal, « Le procès équitable dans le code de procédure pénale de 2002 », Collection
Réforme du droit et développement socio-économique, volume n°1, p. 101,102.
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

contradictoires doivent être conciliés : Respect de la liberté et du principe de


la présomption d’innocence et en même temps nécessité de préserver les
besoins de l’instruction. »

Conscient de la gravité d’une atteinte aux libertés individuelles, le législateur


français a créé des hypothèses encadrant le pouvoir des juges d’instruction
pour décider du placement en détention provisoire. Ainsi, l’article 137 du CPP
exige d’abord que la détention provisoire ne puisse être prononcée qu’à raison
« des nécessités de l’instruction ou à titre de mesure de sûreté ». Le texte est
complété par l’article 144 du CPP, tel qu’il résulte de la loi du 5 mars 2007
ainsi rédigé : « La détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée
que s’il est démontré, au regard des éléments précis et circonstanciés résultant
de la procédure, qu’elle constitue l’unique moyen de parvenir à l’un ou
plusieurs des objectifs suivants et que ceux-ci ne sauraient être atteints en cas
de placement sous contrôle judiciaire ou d’assignation à résidence avec
surveillance électronique :

1- Conserver les preuves ou les indices matériels qui sont nécessaires à la


manifestation de la vérité ;
2- Empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur
famille ;
3- Empêcher une concertation frauduleuse entre la personne mise en
examen et ses coauteurs ou complices ;
4- Protéger la personne mise en examen ;
5- Garantir le maintien de la personne mise en examen à la disposition de
la justice ;
6- Mettre fin à l’infraction ou prévenir son renouvellement ;
7- Mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l’ordre public
provoqué par la gravité de l’infraction, les circonstances de sa
commission ou l’importance du préjudice qu’elle a causé. Ce trouble
ne peut résulter du seul retentissement médiatique de l’affaire.
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

Toutefois, le présent alinéa n’est pas applicable en matière


correctionnelle ».
En se conformant aux instruments des droits de l’homme et à la Constitution
de 2011, le législateur marocain s’est rallié aux Etats qui comprennent une
législation protectrice des droits et libertés individuels en adoptant le projet du
code de la procédure pénale et en incitant ainsi le juge d’instruction à motiver
ses décisions. La question de l’efficacité doit dès lors être liée de près à la
nécessité de la détention.
L’article 175 du projet précise que la détention préventive est une mesure
exceptionnelle. Ce texte est complété par l’article 175-1 du CPP ainsi rédigé
« La détention provisoire ne peut être ordonnée que s’il est démontré qu’elle
constitue l’unique moyen de parvenir à l’un ou plusieurs des objectifs
suivants :
1- La crainte d’entraver le déroulement de l’instruction
2- Mettre fin à l’infraction ou prévenir son déroulement ;
3- Conserver les preuves ou les indices matériels qui sont nécessaires à la
manifestation de la vérité
4- Permettre l’exécution des investigations impliquant la présence ou la
participation de la personne
5- Garantir la présentation de la personne devant la justice et empêcher sa
fuite
6- Empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur
famille
7- Empêcher une concertation frauduleuse entre la personne mise en
examen et ses coauteurs ou complices
8- Protéger la personne mise en examen
9- Mettre fin au trouble provoqué par la gravité de l’infraction, les
circonstances de sa commission ou la dangerosité des moyens
employés, ou l’importance du préjudice, ou la dangerosité du prévenu. »
La lecture des articles précités laisse montrer que les motifs de placement en
garde à vue sont identiques à ceux du placement en détention préventive. Ce
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

rapprochement est indispensable, car la perte de liberté impose au juge de


motiver sa décision de manière précise pour montrer le motif déterminant qui
justifie le placement en détention préventive. La motivation est d’autant plus
nécessaire que les détenus non condamnés doivent, jusqu’à preuve du
contraire, être présumés innocents des charges qui pèsent sur eux. C’est pour
cela que l’ordonnance de placement doit être écrite dans laquelle le juge
d’instruction démontre les considérations de droit et de fait justifiant le recours
à la détention préventive et les motifs empêchant l’application des mesures
alternatives à la détention préventive. Des expressions comme « la détention
provisoire est nécessaire à la manifestation de la vérité » ou « l’ordre public
exige de maintenir le prévenu en détention » sont insuffisantes pour légitimer
une privation de liberté.
Paragraphe 2 - La durée de la détention préventive

On pourra toujours écrire et répéter que les organisations humanitaires


internationales ou nationales ont exercé des pressions continues pour faire
engager le Maroc sur la voie des réformes libérales sur tous les plans. Mais, la
vérité historique oblige aussi de soutenir que, durant la dernière décennie de
son règne, le défunt Hassan II avait voulu réellement changer l’image du pays,
effacer les séquelles du passé et faire du Maroc, en droit comme en pratique,
un modèle de démocratie, qui « réaffirme son attachement aux droits de
l’homme tels qu’ils sont universellement reconnus ». 10
Au lendemain de son installation, le Conseil consultatif des droits de l’Homme
a créé le premier groupe de travail, chargé de l’étude de « la garde à vue et de
la détention préventive », qui présentera au conseil les toutes premières
recommandations d’abord d’ordre général en reconnaissant à la réforme du

10
Préambule de la constitution du 7 octobre 1996, B.O n° 4420 bis du 10octobre 1996
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

Code de procédure pénale le caractère de priorité absolue en raisons de ses


liens organiques avec les droits de la défense et ensuite des recommandations
spécifiques qui entourent la détention préventive de règles impératives dont la
violation devrait entrainer l’annulation de la procédure. Approuvées par le
Souverain défunt, ces propositions seront entérinées par la Chambre des
Représentants de l’époque11. Il s’agit des Dahirs du 30 décembre 1991 et du
10 septembre 1993 dont la plupart des dispositions seront reprises par le code
du 3 octobre 2002 qui limitera le délai de base de la détention préventive à
deux mois et pourra être prorogé cinq fois au maximum pour la même période,
par une ordonnance spécialement motivée du juge d’instruction sur les
réquisitions également motivées du ministère public.
Une fois le placement en détention provisoire justifié, les juges doivent
s’assurer que celle-ci n’excède pas une durée raisonnable afin de limiter au
strict nécessaire l’atteinte à la liberté individuelle et à la présomption
d’innocence12. Cette durée est appréciée en fonction de la gravité des faits.
Ainsi, deux hypothèses à distinguer :
Premièrement, l’article 176 C.P.P qui traite de la durée de la détention en
matière délictuelle énonce que la durée ne peut excéder un mois. A
l’expiration de ce délai, si le maintien en détention préventive apparaît
nécessaire, le juge d’instruction peut le prolonger par ordonnance
spécialement motivée sur réquisition également motivée du ministère public.
Ce délai ne peut être prorogé que deux fois pour la même durée. Si le juge
d’instruction ne prend pas de décision pendant ce délai conformément aux

11
ESSAID Mohammed Jalal, « Le procès équitable dans le code de procédure pénale de 2002 », Collection
Réforme du droit et développement socio-économique, volume n°1, p. 20,21.

12
EN-NEFKHAOUI Aziz, « La problématique de la détention préventive et ses alternatives possibles » ,
Article publié in REMALD, numéro 124, septembre-octobre 2015
1
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

dispositions de l’article 217 qui suit, l’inculpé est mis de plein droit en liberté
et l’instruction se poursuit (Article 176 CPP).
Deuxièmement, l’article 177 traite du cas de la personne soupçonnée d’avoir
commis un crime. Le juge d’instruction est saisi dans le cadre d’une
instruction obligatoire ou facultative. Ainsi en matière de crimes, la durée de
la détention préventive ne peut excéder deux mois. A l’expiration de ce délai,
si le maintien en détention préventive apparaît nécessaire, le juge d’instruction
peut le prolonger par ordonnance spécialement motivée sur réquisition
également motivée du ministère public. Les prolongations ne peuvent être
faites que dans la limite de cinq fois et pour la même durée. Si le juge
d’instruction ne prend pas une ordonnance de clôture de l’instruction,
l’inculpé est mis de plein droit en liberté et l’instruction se poursuit (Article
177 du CPP).
La mise en liberté provisoire. Elle peut être décidée à l’initiative du juge
d’instruction ou à la demande du ministère public, de l’inculpé ou de son
conseil.

En effet, dès la disparition des motifs de son inculpation, le juge d’instruction


doit le libérer et il peut le faire même spontanément, mais après consultation
du ministère public et après que le prévenu se soit engagé à se présenter
chaque fois que l’instruction l’exige, à informer le juge de ses déplacements
et de son installation. Cette libération provisoire peut même être subordonnée
à une attestation émanant d’un organe public ou privé, de santé ou
d’enseignement, et s’engageant à prendre en charge le prévenu. Elle peut
être également subordonnée à une caution matérielle (financière) ou
personnelle. Remarquons au passage, que la caution surtout pécuniaire peut
soulever des objections, dans la mesure où elle instaure des inégalités, en
favorisant les personnes fortunées au détriment des plus démunis. Il reste que
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

le maintien en liberté, comme l’accès à la liberté, est facilité par une telle
garantie.13 Dans le même ordre d’idée, la mise en liberté provisoire d’office
peut se combiner avec le nouveau substitut de la détention préventive. En effet,
selon l’article 178 al. 3 : La liberté provisoire peut être assortie du placement
sous surveillance judiciaire.
Le ministère public peut également requérir la mise en liberté provisoire à tout
moment. Dans cette éventualité, le juge d’instruction statue dans le délai de
cinq jours à compter de la date de ces réquisitions.14 Cette disposition révèle
probablement la mission réelle du représentant du parquet. Tout en engageant
les poursuites et en soutenant l’accusation, son rôle est celui d’un magistrat
objectif, qui doit faire prévaloir les intérêts de la justice sur les instructions
reçues des supérieurs hiérarchiques.
Quoiqu’il en soit, le cas le plus fréquent est celui de l’inculpé (ou son avocat)
qui peut à tout moment présenter une demande de libération provisoire au juge
d’instruction qui, à son tour, doit adresser la demande, sous vingt-quatre
heures, au procureur du Roi afin de présenter ses observations. La même
demande doit parvenir à la partie civile pour remarques. Dans tous les cas, il
doit rendre une ordonnance dans les cinq jours de la demande. A défaut de
réponse dans ce délai, le prévenu peut s’adresser à la chambre correctionnelle
qui a quinze jours pour décider après avoir consulté le ministère public (qui a
quarante-huit heures pour présenter ses remarques). A défaut d’une décision
dans les quinze jours, le prévenu est remis en liberté sauf l’existence d’un acte
d’instruction supplémentaire à accomplir. Une fois le juge d’instruction
dessaisi, par clôture de l’instruction, la décision de liberté provisoire revient à

13
ESSAID Mohammed Jalal, « Le procès équitable dans le code de procédure pénale de 2002 », Collection
Réforme du droit et développement socio-économique, volume n°1, p. 111.
14
ABOULOULA Amal, « La peine privative de liberté en droit marocain et comparé », REMALD, Première
édition, 2005, p. 83
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

la juridiction de renvoi avec cette particularité que la décision rendue par la


chambre criminelle ou la chambre correctionnelle d’appel n’est susceptible
d’aucun pourvoi. Et s’il y a pourvoi en cassation, la dernière juridiction ayant
statué est compétente pour se prononcer sur la détention préventive sans que
sa décision puisse être attaquée par une voie de recours. Les mêmes règles
s’appliquent en cas de décision d’incompétence. De toute façon, la juridiction
a huit jours pour se prononcer et décider dans les cas où elle accorde la liberté
provisoire de l’accompagner de l’une des mesures prévues pour la mise sous
contrôle judiciaire (Articles 180 à 187).
En revanche, les décisions rendues à ce propos par le tribunal de première
instance sont susceptibles d’appel devant la chambre correctionnelle d’appel.
Le délai est assez court puisqu’il peut être interjeté avant la fin du jour suivant
son prononcé.
Que le ministère public interjette appel ou non, le prévenu reste en détention
quand il s’agit de délits touchant les valeurs sacrées de la nation ou les
stupéfiants, à moins que celui-ci ne décide de la liberté provisoire. La chambre
correctionnelle d’appel a six jours pour statuer sur l’appel du ministère public
ou du prévenu et l’appel ainsi que la procédure qui s’ensuit ne sont pas
suspensifs.
L’application stricte de ces dispositions est susceptible de marquer réellement
le caractère exceptionnel de la détention provisoire. Il reste que le juge
d’instruction, comme la juridiction de jugement, peut recourir à toute une série
de mesures, destinées à permettre la représentation de l’inculpé et le bon
déroulement de l’information. Ces textes constituent ainsi une avancée très
remarquable au plan de la liberté individuelle puisqu’ils prévoient la mise en
liberté de la personne réclamée au bout du délai légal. Cependant, les délais
prévus par les textes sont longs engendrant deux problèmes majeurs. D’une
part, ils contribuent au surpeuplement carcéral, car on sait que 49% des
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

détenus sont en détention préventive. Cette situation va sans doute aboutir à


des conditions d’incarcération très difficiles. D’autre part, la durée excessive
de la détention préventive peut porter atteinte au principe de la présomption
d’innocence puisque le détenu peut rester un an en détention avant sa
condamnation par une décision définitive. Cela contrarie justement les
instruments internationaux tels le pacte international relatif aux droits civils et
politiques qui précise que toute personne accusée d’une infraction pénale a
droit à être jugée sans retard excessif ainsi que la constitution marocaine dans
son article 120 qui stipule que « Toute personne a droit à un procès équitable
et à un jugement rendu dans un délai raisonnable. » Il faut donc accélérer le
jugement des affaires en rapport avec des personnes placées en détention
préventive et de veiller à son achèvement dans les plus brefs délais.
Cette présentation met en lumière la nécessité d’opérer une réforme qui va
dans le sens de la réduction des délais de la détention préventive. Certes, le
législateur marocain n’a pas osé franchir ce pas dans son projet de réforme de
la procédure pénale, néanmoins il a pu réduire les délais de prorogation de la
détention dans le sens où elle n’est devenue possible que trois fois au lieu de
cinq fois, sauf pour les crimes énumérés par l’article 108 du même code. Cette
prorogation n’est possible que s’il est établi que les investigations menées par
le juge d’instruction ne sont pas encore achevées et que les motifs adoptés par
ce juge continuent à légitimer la privation de liberté. Si les conditions qui ont
motivé la détention changent et redent possible une mesure alternative
garantissant que l’accusé comparaîtra, le juge d’instruction doit réexaminer sa
décision initiale.
Cependant, le projet semble opérer une réforme de surface concernant cette
question car il n’a pas intégré dans le texte la notion du « délai raisonnable »
au regard de la gravité des faits reprochés à la personne mise en examen et de
la complexité des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité. Or,
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

cette notion est au cœur des instruments internationaux de protection des droits
de l’Homme. On en trouve trace au titre de l’article 5 de la convention
européenne des droits de l’Homme et au sein de l’article 9 du pacte
international relatif aux droits civils et politiques de 1966.
En France, à la suite de plusieurs condamnations dans les années quatre-vingt-
dix pour violation du délai raisonnable de la détention provisoire par la Cour
européenne des droits de l’Homme, le législateur a introduit dans sa réforme
de 1996 l’article 144-1 du CPP qui dispose que : « La détention provisoire ne
peut excéder une durée raisonnable, au regard de la gravité des faits
reprochés à la personne mise en examen et de la complexité des investigations
nécessaires à la manifestation de la vérité ».
Ainsi, dans l’affaire VOSGIEN c. France15 la Cour européenne des droits de
l’Homme a condamné la France pour violation du délai raisonnable de la
détention provisoire. Interpellé et placé en garde à vue pour avoir participé,
avec d’autres individus, à l’enlèvement et la séquestration d’un couple en vue
de l’obtention d’une rançon, M. Vosgien a été placé en détention provisoire.
L’affaire concerne la durée excessive du placement en détention préventive
du requérant qui s’étend sur quatre années, trois mois et deux jours, suite à
plusieurs prolongations. La Cour conclut à la violation de l’article 5 (droit à la
liberté et à la sûreté) de la Convention en raison de la durée excessive de la
détention provisoire du requérant.

15
Arr.3/10/2013, Requête n°12430 /11.
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

Section 2- Le régime d’exécution de la détention provisoire

Eriger la détention préventive en mesure exceptionnelle, c’est donc viser


la conciliation de deux principes antinomiques : la liberté des individus et
l’efficacité de la justice ; caractère exceptionnel qui peut constituer un moyen
de droit à invoquer par un avocat pour la défense d’un détenu.

Le législateur infléchit l’orientation donnée aux textes portant sur la détention


provisoire en privilégiant tantôt la liberté individuelle, tantôt l’efficacité de la
justice. La conciliation entre ces deux impératifs est une quête fluctuante.
C’est un équilibre à trouver, équilibre indéterminé et indéterminable, qui est
plus variable selon les idéologies, les époques, et surtout les mentalités. Ainsi,
nous exposerons d’une part, les modalités de mise en œuvre de la détention
préventive (premier paragraphe), et d’autre part les statistiques descriptives
relatives à la détention préventive (deuxième paragraphe).

Paragraphe 1 – Les modalités de mise en oeuvre de la


détention préventive
Le respect de la présomption d’innocence, qui est désormais consacrée,
rappelons-le, par l’article premier de notre code de procédure pénale, implique
que l’inculpé soit soumis à un régime carcéral différent de celui qui est
organisé pour les personnes emprisonnées à la suite d’un jugement de
condamnation.
En droit comparé, l’accent est mis sur trois séries de mesures16 :
 Faire exécuter la détention préventive dans des locaux spéciaux,
distincts des établissements pénitentiaires ordinaires et pourvus d’un
certain confort ;

16
ESSAID Mohammed Jalal, « Le procès équitable dans le code de procédure pénale de 2002 », Collection
Réforme du droit et développement socio-économique, volume n°1, p. 115.
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

 Nécessité d’un contrôle de l’autorité judiciaire ;


 Et assurer le respect des droits de la défense.

Depuis la promulgation de la loi n°23.98 du 25 août 1999 sur


l’organisation et le fonctionnement des établissements pénitentiaires et surtout
depuis l’avènement du Code de procédure pénale de 2002, le droit marocain
s’achemine vers une meilleure protection des personnes qui subissent la
détention préventive.
Les détenus privés de liberté avant jugement sont de plus en plus
nombreux, ils bénéficient par rapport aux condamnés définitifs d’un régime
pénitentiaire particulier dans la mesure où ils ne sont pas concernés par le
traitement pénitentiaire comme ils sont séparés des autres condamnés17. Le
principe de la séparation avec ceux qui ont fait l’objet d’un jugement de
condamnation, est posé, mais sa mise en œuvre dépend des possibilités
offertes par les établissements. C’est ce qui découle justement de l’article 615
du CPP : « Les inculpés en détention préventive sont incarcérés dans la
maison d’arrêt de la localité où siège la juridiction saisie de la procédure la
concernant, en première instance et, le cas échéant, en appel, pour autant que
la sécurité ou la capacité d’hébergement de l’établissement le permette ». De
son côté, la loi susvisée n°23.98 dispose don son 7ème article que « des locaux
distincts doivent être réservés aux détenus préventifs ».
Néanmoins, si la séparation n’est pas toujours possible, il importe
d’autoriser les détenus préventifs à entretenir tous les contacts et à jouir de
toutes les facilités compatibles avec les nécessités imposées par l’ordre et la
sécurité, aux fins de leur permettre d’assurer leur défense (Article 615, 2ème
alinéa). Dans le même ordre d’idées, et par suite de l’encombrement

17
L’article 10 alinéa 2 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966 prescrit que les
prévenus sont, sauf dans des circonstances exceptionnelles, séparés des condamnés et sont soumis à un régime
distinct, approprié à leur condition de personnes non condamnées.
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

temporaire des locaux, le régime de l’emprisonnement individuel ne peut être


appliqué à tous les détenus soumis à la détention préventive, ceux à l’égard
desquels l’autorité judiciaire aura prescrit l’interdiction de communiquer ou la
mise à l’isolement, doivent être placés par priorité en cellule individuelle
(Article 7 de la loi n°23.98) ».
Le code de procédure pénale a également renforcé le contrôle judiciaire sur
l’exécution des mesures privatives de liberté. A cet égard, deux dispositions
méritent d’être relevées :
La première est posée par l’article 249 du CPP qui fait obligation au président
de la chambre correctionnelle, ou son délégué, de visiter, au moins une fois
par trimestre, les maisons d’arrêts du ressort de la Cour d’appel, pour vérifier
à cette occasion la situation des inculpés en état de détention préventive.
De son côté, l’article 616 du CPP énonce que les détenus sont inspectés au
moins une fois par mois par le juge de l’application des peines, accompagné
du procureur du Roi ou de l’un de ses substituts, en vue de s’assurer de la
régularité des détentions et de la bonne tenue des registres.

Paragraphe 2 - Les statistiques descriptives relatives à


la détention préventive
Malgré les nombreuses conditions d’application, un usage excessif de la
détention provisoire demeure apparent en raison de son apport efficace à la
justice. Le recours excessif de cette mesure est pernicieux car attentatoire aux
libertés. S’il est compréhensible que les juges y recourent dans un souci
d’efficacité de la justice, ceci ne doit pas entraîner le mépris systématique des
droits individuels: la conciliation entre ces deux impératifs devrait être malgré
tout respectée.
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

Comme nous allons le voir, la mise en détention préventive et sa prolongation,


théoriquement des mesures exceptionnelles, sont dans la pratique,
abusivement usitées.
Il n’est pas inutile de relever que le nombre des détenus préventifs au sein des
prisons marocaines a atteint 99733 personnes durant l’année 2016 ce qui
représente 40,45% de la population carcérale qui était au nombre de 537100
personnes assignées devant les tribunaux(Tableau 1).

Tableau 1- Le pourcentage de la détention préventive des personnes assignées


devant les tribunaux pour l'année201618

Le nombre des personnes Le nombre des détenus Le pourcentage (%)


assignées devant les préventifs
tribunaux
537100 99733 19%

. ‫أرق‬ ‫ ح ل ااعتق ل ااحتي طي معطي‬1 ‫م رس‬ ‫عرض تقد به السيد مدير الشؤ ن الجن ئي ب لمع د الع لي ل قض ء بت ريخ‬ 18
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

Bien que ce pourcentage soit en perpetuelle augmentation, néanmoins il


demeure moins que l’année 2012 au cours de laquelle le nombre des détenus
préventifs qui représentait un pourcentage de 42,5% du total de la population
carcérale19 (Tableau 2).

Tableau 2 – Évolution du pourcentage de la détention préventive

Les années
Le pourcentage de
la détention
Le total de la Le total des détenus préventive par
population préventifs rapport à la
carcérale population
carcérale
2012 70758 30083 42.5%
2013 72005 31133 43.2%
2014 74941 31850 42.5%
2015 74039 30340 40.98%
2016 78716 31840 40.45%
31 janvier 2017 79084 32183 40.7%

35%

. ‫ ص‬، ‫القض ئي‬ ‫ منش را جمعي نشر المع م الق ن ني‬، 1 ‫ العدد الث ني أك بر‬، ‫ مج الشؤ ن الجن ئي‬19
1
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

Les données mentionnées dans le tableau ci-dessus se présentent dans ce


diagramme de la manière suivante:

Évolution de la détention préventive par rapport au


nombre des prisonniers pendant six ans
43,50%
43,20%
43,00%
42,50% 42,50% 42,50%
42,00%
41,50%
41,00% 40,98% Série 1
40,70%
40,50% 40,45%
40,00%
39,50%
39,00%
2012 2013 2014 2015 2016 2017

Par conséquent, les chiffres de la détention préventive montrent que l’usage


d’une telle mesure est encore excessif. Il est unanimement déploré que la
détention provisoire demeure aussi fréquente et aussi longue (en raison de
l’atteinte à la liberté d’aller et de venir, à la présomption d’innocence…).
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

Tableau 3 : Le nombre de prisonniers dans les différentes institutions selon les


cours d’Appel pendant l’année 2016

LA SITUATION PENALE Le
pourcentage
des détenus
préventifs
par rapport
Les institutions Peines La Les Le Le total aux peines
privatives contrainte préventifs pourcentage privatives
de liberté par corps % de liberté et
à la
contrainte
par corps
CA de Casablanca 170 40 21319 21.38% 21529 99.02%
CA de Rabat 36 134 8977 9.00% 9147 98.14%
CA d’El Jadida 8 79 2899 2.91% 2986 97.08%
CA de Settat 62 143 3697 3.71% 3902 86.78%
CA de Kénitra 120 745 5682 5.70% 6547 89.12%
CA de Khouribga 14 247 2139 2.14% 2400 92.48%
CA de Beni mellal 64 251 3840 3.85% 4155 98%
CA de l’Aâyoun 16 30 2272 2.28% 2318 98%
CA deTanger 224 286 5688 5.70% 6198 91.77%
CA deTetouan 126 89 3203 3.21% 3418 93.70%
CA de El Houceima 39 206 574 0.58% 819 70%
CA de Fes 112 232 6070 6.09% 6414 94.63%
CA de Meknes 46 179 5721 5.74% 5946 96.21%
CA deTaza 82 383 1350 1.35% 1815 74.38%
CA de Oujda 65 544 5144 5.16% 5753 89.41%
CA de Nador 33 147 2932 2.94% 3112 94.21%
CA de Rachidia 18 128 565 0.57% 711 74.46%
CA d’Agadir 331 226 7013 7.03% 7570 92.64%
CA de Ouarzazate 43 108 813 0.82% 964 84.33%
CA de Safi 29 125 3059 3.07% 3213 95.20%
CA de Marrakech 42 131 6776 6.79% 6949 97.51%

1680 4453 99733 100% 105866 94.20%


Total 6133 c-à-d 5.79%

Le pourcentage 1.59% 4.21% 94.21% 100.00%


LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

La proportion enregistrée concernant les détenus préventifs au Maroc


diffère de certains pays démocratiques dans la mesure où ledit pourcentage
demeure évolutif par rapport à certains pays en l’occurrene l’Espagne, les
Etats-unis et le Danemarque dans lesquels le pourcentage ne dépasse pas les
25% et moins de 40% aux Pays-bas et en Belgique.20

Ce grand écart des pourcentages enregistrées au niveau des tribunaux revient


au fait que certains ressorts territoriaux des Cour d’appels dépassent la
moyenne générale dans la mesure où le pourcentage des personnes détenues
parmi celles présentées devant les ministères publics est à trois fois plus en
comparaison avec d’autres tribunaux ( à titre d’exemple, le nombre de
personnes détenues dans le ressort territorial de la Cour d’appel de Casablanca
durant l’année 2016 a atteint 21319 personnes avec un pourcentage de 21,38%
tandis que le total des personnes détenues préventivement dans le ressort
territorial de la Cour d’appel de Ouarzazate a atteint 813 personnes avec un
pourcentage de 0,82%.

Cette divergence des proportions au niveau du recours excessif à la détention


préventive d’un tribunal à l’autre est essentiellement dûe à deux raisons
principales et non uniques notamment :

1. L’exagération quant à la saisine de la police judiciaire pour la


présentation des personnes suspectes ce qui engendre automatiquement
une augmentation dans la proportion des personnes auxquelles
s’applique la détention préventive, dans le sens où le ministère public
qui requiert la présentation de 100 personnes sur la base de 200

20
Il est possible de constater que certaines populations carcérales sont presque composés de condamnés :
Irlande, Chypre, Islande, alors que d’autres comportent plus de la moitié d’individus en attente d’une
condamnation définitive: Malte, Belgique, ou s’approchant de ce taux: France, Italie, Espagne.
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

personnes sujets de plaintes et de procès-verbaux aurait demandé la


présentation de 50% de ces dernières. Et dans le sens où si le parquet
procède à la détention de 40 personnes, il entraîne la détention de 40%
tandis que le ministère public qui se contente de demander la
présentation à l’encontre de 100 personnes sur la base de 1000
personnes sujets de plaintes ou procès-verbaux et procède à la détention
de 20 d’entre elles aurait demandé la présentation de 10% uniquement
et détient 20% d’entre elles ou uniquement 2% du total des personnes
dont leurs dossiers ont été traités.
2. La divergence au niveau de la nature des affaires traitées dans les
différentes régions judiciaires du Royaume, dans la mesure où la marge
de la mise en pratique des alternatives à la détention préventive demeure
assez étroite tel est le cas de certaines régions dans lesquelles les affaires
des stupéfiants constituent la majorité des procès-verbaux rédigés où la
procédure de la poursuite en état de liberté s’avère inapplicable en
comparaison avec d’autres affaires telles la violence.

Répartition des détenus préventifs selon les organes judiciaires en 31 janvier 2017

Les tribunaux de première Les cours d’Appel


instance La cour de cassation

Chambre Chambres Dans le Le pourvoi


La chambre Dans le Chambre s pénales pénales délai de en
correctionnelle L’instruction délai correctionnel instructi statuant statuant pourvoi cassation
d’appel les statuant on en 1ere en appel en
en appel instance cassation
3391 579 957 9838 5195 3189 5032 1809 2193
10.54% 1.80% 2.97% 30.57% 16.14% 9.91% 15.64% 5.62% 6.81%
4002 24211 3970
12.34% (12.98% en Décembre) 75.22% (74.95% en fin 2016) 12.44% (12.65% en
Décembre)
32183
TOTAL 40.70% du total des prisonniers en 31 janvier (79084) avec un surplus de
0.3 en fin 2016
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

Les données mentionnées dans le tableau ci-dessus se présentent dans ce


diagramme de la manière suivante:

12,33%
12,43%
Cour d'Ap
Cour de Cass
75,24%
TPI

En tout état de cause, le rôle du juge du parquet ou du juge d’instruction


demeure naturellement primordial dans son utilisation du pouvoir
discrétionnaire quant à la décision de la détention préventive. En effet, il s’agit
d’un pouvoir, quoique suffisamment encadré juridiquement, néanmoins la
marge de liberté dont dispose le juge reste vaste du moment où il lui revient à
lui seul l’évaluation de la prise ou non de la décision de la détention préventive
en cas de disponibilité de certaines conditions juridiques et qui se résument à
l’existence de l’état de flagrant délit ou à la gravité des faits accomplis et à la
disponibilité de garanties suffisantes de présence du prévenu.

De ce qui précède et en guise de conclusion, afin d’atténuer l’intensité du


recours à la détention préventive comme cela à été relevé et analysé à travers
les tableaux ci-dessus, il a été jugé nécessaire de mettre en place des mesures
alternatives à la detention preventive dans le but de consacrer une politique
pénale à juste titre.
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

Chapitre II- Les alternatives à la détention préventive : Des conséquences


inéluctables et des recommandations envisageables

Une personne irréprochable au regard de la loi pénale bénéficie sans


conteste de tous les droits politiques, économiques et sociaux, garantis par le
titre premier de la Constitution, avec à leur tête la liberté d’aller et de venir.
Dès que les poursuites s’engagent, des atteintes risquent d’être portées à ces
principes que la loi fondamentale elle-même qualifie de « principes
fondamentaux ». Ces atteintes peuvent varier de simples mesures restrictives
par rapport à certains droits ou à la liberté de circuler, jusqu’à la privation
totale de liberté, avec la traditionnelle détention préventive.
Le code de procédure pénale de 1959 ne comportait aucune mesure alternative
à la détention préventive à dimension humanitaire et n’offrait pas au juge
d’instruction des possibilités efficaces pouvant assurer la comparution de
l’inculpé aux formalités de l’instruction dans le cadre du procès équitable.
Inutile de revenir sur un ancien débat qui a toujours dénoncé les inconvénients
de cette institution. Si les poursuites engagées ne permettent pas d’établir la
culpabilité du prévenu, se pose le problème de son indemnisation. C’est
d’ailleurs ce qui explique les réformes introduites par certaines législations
étrangères qui ont prévu un certain nombre de substituts à la détention
préventive en l’occurrence la loi française du 17 juillet 1970 qui s’est engagée
dans la voie de l’institution du contrôle judiciaire.
La thématique des mesures alternatives à la détention préventive bénéficie
d’une primauté considérable au sein du ministère de la justice et des libertés21,
dans le sens où ce sujet constitue l’un des noyaux du débat qu’a connu le
dialogue national sur la réforme de la justice en tant que plan d’action et une
feuille de route pour la réforme de la justice. Par ailleurs, la 69 ème

1‫ ص‬،"‫الق ن ن الجن ئي‬ ‫ بدائل ااعتق ل في الق ن ن المغربي "دراس ع ى ض ء مشر عي ق ن ن المسطرة الجن ئي‬، ‫ مراد العلمي‬21
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

recommandation énoncée parmi les objectifs stratégiques de la Charte sur la


réforme de la justice, sous la haute approbation de sa Majesté le Roi
Mohammed VI a mis l’accent sur la nécessité et l’obligation de mettre en
œuvre les alternatives aux peines privatives de liberté en tant que mesure
basique et essentielle à l’installation d’une politique pénale efficace et
efficiente.
En effet et comme nous l’avons déjà relevé, suite à l’avènement de la
préparation des projets de réforme du Code de procédure pénal et du Code
pénal, l’on peut certainement remarquer le sursaut qualitatif opéré par la
politique pénale qui suit le mouvement de réforme avec l’apparition du
placement judiciaire à côté de la détention préventive et élargit les mesures du
contrôle judiciaire par l’adoption de la surveillance électronique.

Section1 - La rationalisation de la détention préventive

Le législateur a mis en place un ensemble de mesures alternatives en


l’occurrence le contrôle judiciaire inhérent aux fonctions du juge d’instruction
ainsi que la poursuite en état de liberté contre une caution personnelle ou
financière, la relaxe pour non adaptation de la poursuite et la transaction
pénale dans la mesure où elles ont été mises en pratique de manière intensive
entraînant ainsi un proportion de 18% des personnes prises à leur encontre la
procédure de la détention provisoire tandis que le reste demeure soumis aux
mesures alternatives de la détention. 22
Le projet du code de procédure pénale a veillé au développement des
alternatives à la détention préventive à travers l’adoption de mesures
susceptibles de rationaliser ladite détention. En effet, les innovations

‫ ص‬،"‫الق ن ن الجن ئي‬ ‫ بدائل ااعتق ل في الق ن ن المغربي "دراس ع ى ض ء مشر عي ق ن ن المسطرة الجن ئي‬، ‫ مراد العلمي‬22
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

législatives proposées visent la rationalisation de la détention préventive par


la considération de cette dernière comme une mesure exceptionnelle à
laquelle il ne faut avoir recours qu’à défaut de la mise en pratique d’une autre
mesure alternative ou dans le cas où la présentation du prévenu devant le
tribunal en état de liberté soit de nature à entraver le bon déroulement de la
justice, par la nécessité pour le ministère public de disposer d’un ou de
plusieurs motifs justifiant la décision de la détention préventive en faisant en
sorte qu’elle constitue l’unique moyen de parvenir aux objectifs mentionnés
ci-dessous :
- Si le prévenu avoue avoir commis l’un des éléments constitutifs
d’une infraction dont la peine prévue est l’emprisonnement ou si des
preuves ou forts indices présument son implication et que celui-ci ne
dispose pas de garanties suffisantes de présence.
- S’il est démontré qu’il constitue une atteinte à l’ordre public ou à la
sécurité des personnes et des biens.
- Si les faits accomplis sont graves ou si le préjudice causé est
important.
- Si les moyens employés pour la commission de l’acte sont dangereux
(Article 47-1 et 73-1 du projet de code de procédure pénale).

Lesdites innovations législatives visent également à allouer au prévenu ou son


avocat le droit de recours contre le mandat de dépôt émis par le parquet devant
l’organisme judiciaire statuant dans l’affaire ou devant un organisme collectif
constitué de trois juges si le mandat est émis par le procureur du Roi ou devant
la chambre correctionnelle s’il est émis par le procureur général du Roi auprès
de la Cour d’appel, comme elles visent à limiter les pouvoirs du juge
d’instruction par la nécessité de démontrer qu’elle constitue l’unique moyen
de parvenir à l’un ou plusieurs objectifs cités ci-dessous, et à obliger ce dernier
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

à justifier la décision de la détention préventive ainsi à la réduction du nombre


des prolongations de sa durée dans les crimes de cinq à trois fois à l’exception
des infractions prévues à l’article 108 du CPP , et enfin à l’élargissement du
recours aux mesures du contrôle judiciaire et l’organisation du contrôle
électronique.
Paragraphe 1- Le système du contrôle judiciaire

L’adoption par le code de procédure pénale de cette mesure cherche à


trouver des outils aptes à garantir l’application des actes judiciaires sans avoir
recours à la détention préventive, critiquée pour diverses raisons humanitaires
notamment à renforcer la garantie des droits individuels des citoyens, à limiter
les cas et la durée de la privation de liberté, à assurer une bonne marche de
l’instruction ou au procès, à préserver la sécurité publique par des mesures
contraignantes destinées à éviter la commission d’autres infractions23 et enfin
à inciter le juge d’instruction à ne recourir à la détention avant jugement qu’à
titre exceptionnel.
Le contrôle judiciaire, qui peut être pris en tout état de l’instruction, ne peut
être ordonné que si la personne mise en examen encourt une peine privative
de liberté. En effet, sa durée varie en fonction de la gravité de l’infraction.
Ainsi, pour les crimes la durée est de deux mois renouvelables cinq fois pour
la même période, alors que pour les délits la durée est de un mois renouvelable
deux fois pour la même période. Les délais cités peuvent paraître excessifs,
mais comme le prévenu est maintenu en liberté, l’application de la mesure est
peut-être tolérable.
Par ailleurs, des garanties entourent le placement sous surveillance judiciaire,
dans le sens où l’ordonnance du juge d’instruction, notifiée immédiatement
par voie orale à l’inculpé et dans les 24 heures au procureur du Roi, peut faire

23
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LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

l’objet d’un appel devant la chambre correctionnelle, qui doit statuer dans le
délai de 5 jours. De plus, la mainlevée du placement sous contrôle judiciaire
peut être ordonnée par le juge d’office, ou bien sur réquisitions du ministère
public ou sur demande de l’inculpé.
Il importe toutefois d’observer que la mesure, qui est d’ailleurs révocable à
tout moment de l’instruction, peut comporter de sérieuses restrictions aux
droits de l’individu et à sa liberté de mouvement. Elle astreint de ce fait la
personne mise en examen à se soumettre à certaines obligations qui sont
déterminées par le juge d’instruction, et choisies dans une liste établie par
l’article 161 du CPP. Ces obligations ont pour principale finalité d’aider la
personne à se réinsérer socialement et surtout à garantir son maintien à la
disposition de l’autorité judiciaire. Il s’agit d’interdiction et d’injonction,
parmi les premières :
 Ne pas sortir des limites territoriales déterminées par le juge
d’instruction
 Ne pas s’absenter de son domicile ou de la résidence qu’aux conditions
déterminées par le même juge ;
 Ne pas se rendre en certains lieux, ou de se rendre qu’à certains ;
 S’abstenir de conduire un véhicule à certaines conditions ;
 S’abstenir de recevoir ou de rencontrer certaines personnes
 Ne pas se livrer à certaines activités professionnelles ;
 Ne pas émettre des chèques ;
 Ne pas détenir une arme.

Parmi les secondes :


 Informer le juge d’instruction de tout déplacement au-delà des limites
déterminées ;

1
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

 Se présenter périodiquement aux services ou aux autorités désignés par


le juge d’instruction ;
 Répondre aux convocations de toute autorité ou de toute personne
habilitée désignée par le juge d’instruction ;
 Se soumettre à des mesures de contrôle portant sur son activité
professionnelle ou sur son assiduité à un enseignement déterminé ;
 Remettre soit au greffe, soit à un service de police ou une brigade de
gendarmerie royale tous documents justificatifs de l’identité, et
notamment le passeport ou une autre pièce d’identité en échange d’un
récépissé valant justification de l’identité ;
 Justifier le paiement des aliments ou la contribution aux charges
familiales ;
 Constituer, dans un délai, pour une période et un montant déterminés
par le juge d’instruction, des sûretés personnelles ou réelles. Ces sûretés
sont destinées à garantir les droits de la victime ;
 Verser une caution en garantie de la conduite pendant le procès. Elle
permet une sanction immédiate en cas de non-respect de ces conditions.

Certaines mesures peuvent avoir un « effet réflexe sur le problème de


l’inflation carcérale. Ainsi le mouvement de pénalisation dont le législateur
s’est inscrit, qui frappe même les faits les moins graves, conduit à ce problème.
Dès lors, un mouvement de dépénalisation doit être mis en place pour sortir
de la liste des faits incriminés par le droit pénal. Mais cela reste insuffisant,
car il faut aussi créer les mécanismes nécessaires qui peuvent constituer des
substituts à l’action publique. C’est le cas de la médiation pénale. En France,
la médiation est cantonnée au stade des alternatives aux poursuites. Or, la
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

Belgique l’utilise tout au long du processus pénal, aussi bien pendant


l’instruction qu’après la condamnation.

Elle consiste sous l’égide d’un tiers, à mettre en relation l’auteur et la victime
afin de trouver un accord sur les modalités de réparation mais aussi de rétablir
un lien et de favoriser, autant que possible, les conditions de non-réitération.
Pour la victime, il s’agit « par la communication rétablie avec son agresseur,
d’obtenir non seulement une réparation matérielle, mais également
psychologique et morale (considération retrouvée) ». Pour l’auteur des faits,
la médiation pénale fournit l’occasion de « faire amende honorable en
reconnaissant sa responsabilité et en réparant au mieux le préjudice causé ».

Paragraphe 2 - Le placement sous surveillance électronique


Le placement sous surveillance électronique24 (PSE) ou « bracelet
électronique » est une mesure d’aménagement de peine consistant à imposer
à une personne mise en examen ou condamnée, en lieu et place d’une période
d’incarcération, une assignation en un lieu dont elle ne peut s’absenter qu’à
des horaires determinés par le juge. En effet, la surveillance électronique vise
à exécuter les peines privatives de liberté tout en évitant aux justiciables
les effets nocifs liés à l’incarcération, à favoriser la réinsertion sociale en
limitant l’exclusion et en maintenant les liens sociaux, familiaux et
professionnels du justiciable, à diminuer le sentiment d’impunité qu’engendre
la non-exécution des peines et renforcer ainsi la crédibilité du citoyen vis-à-
vis du système pénal, à préserver la confiance qu’a le citoyen et l’appareil
judiciaire dans la mise en œuvre et le suivi des surveillances électroniques, à
diminuer le taux de récidive, et à lutter contre la surpopulation

24
En 2008, le placement sous surveillance électronique devient le premier aménagement de peine (environ
50% des aménagements de peine). On compte en 2014, 9 5911 personnes placées sous surveillance
électronique. Son évolution a été croissante : 4 489 en 2010, 5 767 en 2011, 7 889 en 2012, 9020 en 2013.
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

carcérale tout en diminuant les coûts liés à l’exécution d’une peine privative
de liberté.
En effet, elle n’est prévue que pour des peines d’emprisonnement et des
infractions bien déterminées. C’est ainsi que le législateur français édicte des
conditions précises25 pour la mise en œuvre de la surveillance électronique
dans la mesure où cette dernière ne peut être ordonnée, avec l’accord ou à la
demande de l’intéressé, par le juge d’instruction ou par le juge des libertés et
de la détention, que si la personne mise en examen encourt une peine
d’emprisonnement correctionnelle d’au moins deux ans26 ou une peine plus
grave.

Par ailleurs, le législateur peut exiger d’autres conditions pour la mise en


œuvre d’une telle mesure, notamment que le détenu exerce un travail ou une
activité professionnelle, ou qu’il répond aux besoins des personnes qui sont à
sa charge, ou encore qu’il suit un traitement médical.27

La surveillance électronique28 consiste à astreindre à leur domicile, les


condamnés équipés d’un système de surveillance électronique. Les horaires
d’entrée et de sortie du domicile sont fixés par le Juge d’Application des
Peines (JAP) à qui ils doivent rendre des comptes via les surveillants du pôle
de surveillance électronique d’une part, et leur conseiller pénitentiaire
d’insertion et de probation (CPIP), d’autre part. En pratique, lorsqu’un «
incident » survient dans la réalisation du plan d’entrée et de sortie du placé,

25 Article 142-5 du code de procédure pénale français


26
En droit belge, la surveillance électronique ne peut être ordonnée que si la personne mise en
e a e e ourt u e pei e d’e priso e e t orre tio elle d’au oi s trois ans ou une peine
plus grave
299‫ ص‬، ‫ منش را جمعي نشر المع م الق ن ني القض ئي‬، 1 ‫ العدد الث ني أك بر‬، ‫ مجلة الشؤون الجنائية‬27
28
En France, la surveillance électronique a été introduite au milieu des années 1990. A l’i star de so
homologue français, le législateur marocain a introduit cette mesure dans le projet du code de procedure
pénale marocain.
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

une alarme de violation apparaît sur le moniteur de surveillance : "Sortie


anticipée", "Retour après absence", etc. Immédiatement après cette
notification, le surveillant contacte le surveillé par téléphone et évalue avec lui
les raisons de l’alarme. Plus tard, dans le cadre d’un suivi sur le long terme, le
CPIP dressera un bilan des incidents, avec le placé, afin d’évaluer la bonne
tenue de sa sanction. L’ensemble de ces informations sera transmis au JAP qui
déterminera la suite de la peine (sa durée et sa nature).

Section 2 – Les maux de la détention préventive et les


recommandations anéantissant son inflation
D’une part, les maux de la détention préventive peuvent être conçus
de deux manières. En premier lieu, l’individu qui a fait l’objet d’une détention
arbitraire engendrant un préjudice moral et matériel, ne peut demander une
réparation intégrale. Ensuite, les limites dont souffrent les principes
fondamentaux posés par la rationalisation de la détention préventive
(Paragraphe 1).

D’autre part, l’encombrement des prisons causé en grande partie par l’inflation
de la détention préventive exige la mise en place de certaines
recommandations susceptibles de traiter ses principales causes (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 – Les maux de la détention préventive


Limites relatives à l’absence de réparation des victimes d’une
détention abusive. Il n’y a rien de plus contraire aux droits de l’Homme que
la détention préventive lorsqu’elle est arbitrairement et abusivement décidée.
Or, le code de procédure pénale ne prévoit pas l’indemnisation des personnes
même dans l’hypothèse des détentions arbitraires. C’est d’ailleurs la même
position du projet de réforme de la procédure pénale.

En effet, le but étant de se conformer aux instruments internationaux des droits


de l’Homme et à la Constitution qui prévoit dans son article 122 que « Les
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

dommages causés par une erreur judiciaire ouvrent droit à une réparation à la
charge de l’Etat. » Mais est-ce que la détention arbitraire est une forme
d’erreur judiciaire ?

Si on part du postulat qu’elle constitue une erreur judiciaire, il faut présenter


les arguments qui appuient ce raisonnement. Or, en l’absence du texte de loi
et de jurisprudence, cette réponse est fondée uniquement sur une conviction
personnelle qui elle aussi trouve un appui dans le droit comparé. Mais ce qui
est étonnant, c’est que la juridiction administrative a osé franchir le pas en
admettant la responsabilité administrative du ministère public fondée sur une
faute de gestion du service public de la justice. En effet, le tribunal
administratif de Rabat, dans sa décision du 25/7/201329 a reconnu la
responsabilité du ministère public fondée sur une faute de gestion du service
public de la justice, et qui consiste dans le manquement à une obligation de
contrôle sur les activités de police judiciaire, à travers l’obligation d’exécuter
les procédures judiciaires consistant à déférer la personne devant les
juridictions répressives et la carence de répondre aux demandes réitérées de la
défense et du tribunal lors de plusieurs audiences. Cela engendre la
responsabilité administrative du ministère public due à une faute de gestion du
service public de la justice. On lui reproche le retard de l’exécution d’une
décision de justice ordonnant la présentation de la personne avec d’autres
accusés à l’audience pour son jugement, ce qui lui a valu des reports successifs
de l’audience. Cela lui a causé un préjudice matériel et moral et une atteinte
au principe de la présomption d’innocence.

Le tribunal administratif saisi de l’affaire a mis en cause l’Etat puisqu’il a


relevé une faute de gestion du service public. Cette mise en cause ne contrarie
pas le principe de l’indépendance de la justice, dans la mesure où l’autorité

29
Arr. n° 2012/12/613, cité par Jamal Azouzi, revue Al Kanouni, n°208, en arabe.
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

judiciaire est soumise aux normes de reddition des comptes et de


responsabilité selon l’article 154 de la Constitution. Ainsi, il a condamné
l’Etat à verser une somme de 1000 0000 de dirhams à titre de réparation du
préjudice, et la publication du jugement dans un journal d’annonces légales à
la charge de l’Etat, et au paiement des entiers dépens. Cette décision est
assortie de l’exécution provisoire.

Mais est-ce que les juridictions de l’ordre judiciaire vont franchir le même pas
et accepter les demandes de réparation nées d’une détention arbitraire malgré
le silence de la loi ? Certes le tribunal administratif a accepté cette demande
mais il l’a fait sous l’angle d’une faute de gestion du service public, ce qui
paraît tout à fait compréhensible.

Limites relatives à la rationalisation de la détention préventive. Il est


constant que parmi les courants les plus influents dans la politique pénale
suivie par le Maroc depuis les années 80 du siècle dernier se trouve la politique
de « la rationalisation de la détention préventive » qui a bénéficié d’un soin
important au sein du ministère de la justice durant les trente dernières années,
néanmoins toutes les mesures prises afin d’orienter et de cerner l’avènement
de la rationalisation n’ont pas abouti. Cela est dû à plusieurs raisons dont
certaines se rapportent à la gestion du service judiciaire et d’autres aux choix
de la politique pénale tandis que d’autres concernent la culture sociétale
dominante. C’est ce qui fait principalement de la rationalisation une
préoccupation sociétale toute entière par excellence et non pas uniquement
celle du parquet ou du ministère de la justice.

Dans ce cadre, il est nécessaire de mettre en avant les nombreuses limites


procédurales liées à l’autorité de la justice engendrant une augmentation de
la détention préventive. En effet, elles concernent principalement
l’exagération quant à la prise de décision de la détention préventive et le défaut
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

d’évaluation de sa nécessité, ainsi que l’exécution de la détention préventive


à des affaires simples ne nécessitant pas une telle décision, comme elles
concernent le non recours aux alternatives existantes en l’occurrence le
contrôle judiciaire ou leur mise en pratique de façon inadéquate dans le sens
où elle est utilisée aux cas qui ne nécessitent pas une détention et où la
poursuite serait engagée en état de liberté.

Parmi les autres raisons qui font obstacle à la finalité de la rationalisation de


la détention préventive, l’on peut évoquer les orientations de la politique
pénale marocaine. En effet, or le suivi continu et la volonté de la politique
pénale à rationaliser la détention préventive et l’engouement du ministère de
la justice quant à sa stricte application qui a contribué en quelque sorte à la
conservation des mêmes résultats pendant une longue période, néanmoins la
même politique pénale se livre à adopter cette même attitude dans sa gestion
des affaires concernant ce sujet. Cela se matérialise essentiellement à travers
la mise en place du législateur de la procédure de traitement pénal afin de
trouver des issues aux différents cas sociaux, c’est ainsi qu’à chaque fois où
ce dernier est amené à faire face à un fléau négatif au sein de la société, il
recourt à une législation pénale basée sur des peines sévères expliquant ainsi
cette aggravation des peines surtout par les nécessités qu’impose la
moralisation de la vie en société, la protection des droits de l’Homme, la sûreté
et l’ordre public.

En effet, aucun texte juridique organisant l’un des domaines de la vie civile,
économique, financière, sociale ou environnementale ne saurait être élaboré
sans qu’il ne fasse appel à des dispositions pénales coercitives.

Lesdites orientations se concrétisent également à travers l’exécution d’une


politique pénale elle-même fondée sur la détention préventive soit en y faisant
recours de façon excessive pour une période bien limitée dans le temps, soit
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

de façon continue en un certain laps de temps, et c’est le cas notamment de la


lutte contre le trafic, les constructions aléatoires, la lutte contre la corruption,
le trafic des stupéfiants où la détention redevient le principe et non l’exception.

S’agissant des cultures généralisées au latente, l’on peut sans doute dire que
certaines cultures dites mutuelles négatives plaident en faveur de la détention
malgré le fait que le système de la justice pénale soutienne complétement
l’idée que la personne assignée devant le tribunal devra être poursuivie en état
de liberté mais doit être détenue jusqu’à sa présentation devant le tribunal qui
décidera de sa mise en liberté, notamment pour éviter toute réaction éventuelle
contre la décision prise.

Ceci conduit, en conséquence, à marginaliser et laisser cette catégorie de


personnes dans les prisons pour une durée qui contribue à accroitre le nombre
des détenus préventifs, car en effet malgré l’efficience et la rigidité des textes
législatifs, ces derniers restent de simples outils qui n’auront pas de valeur
ajoutée s’ils sont déployés à mauvais escient.

Il semble que la majorité des citoyens (notamment les accusateurs) ne


considèrent la justice efficace que si leurs adversaires sont immédiatement
détenus, voire plus ils se plaignent contre les décisions de poursuite en état de
liberté ainsi prises par le ministère public même dans les simples cas des voies
de fait.

Certains considèrent ce type de décisions en tant qu’indices évidents de


l’existence de la corruption et des pratiques déplacées et se subodorent de la
partialité de la justice. D’autres justifient la décision de poursuite en état de
liberté prise contre leur faveur comme un écart de conduite ou déviation des
attitudes des juges, ce qui pousse ces derniers à faire recours à la détention, et
les encourage à prendre une telle décision pour ainsi échapper à ce type de
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

plaintes, mais aussi pour éviter toute accusation possible et éventuelle à leur
encontre. En somme, cette situation d’ensemble est particulièrement
alarmante pour certains types d’affaires, notamment le trafic des stupéfiants,
ou la corruption financière (malversation économique) qui mobilisent
l’attention des médias et constituent la préoccupation majeure de la
communauté.

Paragraphe 2 – Des recommandations anéantissant


l’inflation de la détention préventive

L’inflation du phénomène de la détention préventive suppose la mise


en place de solutions susceptibles de traiter ses principales causes. C’est dans
ce sens qu’on peut en proposer certaines :

1- Des recommandations liées à l’absence de réparation des victimes


d’une détention injustifiée

Face au vide juridique dont le code de procédure pénale en vigueur et


son projet témoignent, le législateur marocain doit songer à intégrer dans le
projet une disposition permettant la réparation du préjudice matériel et moral
d’une personne victime d’une détention injustifiée, dans le but de se conformer
aux instruments internationaux et à la Constitution marocaine qui ouvrent
droit à la réparation à la charge de l’Etat en cas de dommage causé par une
erreur judiciaire.

Il serait ainsi judicieux de se référer au droit comparé pour ainsi parler du droit
à la réparation. En effet, en France la loi du 15 juin 2000 relative à la
présomption d’innocence ainsi que la loi 2000-1354 du 30 décembre 2000
tendant à faciliter l’indemnisation des condamnés reconnus innocents et
portant diverses dispositions de coordination en matière de procédure pénale,
ont institué un droit à réparation intégrale du préjudice moral et matériel en
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

cas de détention provisoire injustifiée, s’il arrive que des personnes


emprisonnées soient mises hors de cause à l'issue d'une instruction, ou
bénéficient d'une relaxe devant le tribunal correctionnel, ou encore d'un
acquittement.30

L'histoire judiciaire française garde en mémoire des cas célèbres d'innocents


injustement condamnés et incarcérés de longues années dont l'innocence a été
prouvée ultérieurement. L’on peut certainement citer quelques exemples
d'indemnisations telles que celle de Marc Machin en juillet 2014 qui se voit
attribuer 663.320 euros de dommages et intérêts. Condamné deux fois pour le
meurtre de Marie-Agnès Bedot en 2001 sur le pont de Neuilly, Marc Machin
a finalement été acquitté en décembre 2012, au terme d'un troisième procès.
Le véritable auteur du meurtre s'était constitué prisonnier en mars 2008, ce qui
avait permis l'annulation de la condamnation de Marc Machin par la Cour de
révision31. Ou encore celle de Loïc Sécher qui reçoit 797.352 euros, la plus
importante indemnité accordée à un ancien détenu. Il a été condamné à 16 ans
de réclusion en 2003, incarcéré pendant sept ans et trois mois pour viols d'une
adolescente, puis innocenté en 2011 lors d'un procès en révision, après la
rétractation de son accusatrice. En enfin, l’indemnisation allouée en juin
2003 à Patrick Dils après la révision de sa condamnation pour le meurtre de
deux enfants en 1986 à Montigny-lès-Metz (Moselle), qui obtient 700.000
euros pour 15 années de détention. En y ajoutant l'indemnisation allouée à ses
parents et son frère, ainsi que la somme attribuée au titre des frais de justice,
le total atteint un million d'euros.

30
https://www.courdecassation.fr
31
http://www.lanouvellerepublique.fr
1
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

Ce droit à réparation est toutefois exclu lorsque l’intéressé s’est librement et


volontairement accusé ou laissé accuser à tort en vue de faire échapper l’auteur
des faits aux poursuites.

2- Des recommandations liées au service de la justice

La justice en général, et particulièrement les juges jouent un rôle


primordial dans le traitement du système de la détention préventive, c’est ainsi
que, dans ce cadre, certaines propositions peuvent surgir :

a- La consolidation du principe qui fait de la détention préventive « une


mesure exceptionnelle » et la sensibilisation de l’importance de
l’application de ce principe en tant qu’exception à laquelle il faut avoir
recours qu’en l’absence de toute autre mesure pouvant la remplacer.
b- La mise en œuvre du contrôle judiciaire et l’élargissement de son champ
d’application afin d’inclure le ministère public au niveau des tribunaux de
première instance et des cours d’appel. Ceci va permettre au parquet,
surtout au niveau des cours d’appel de renvoyer au tribunal en état de
liberté les personnes poursuivies pour des crimes, chose qui facilitera le
contrôle du nombre des détenus préventifs.
c- L’opérationnalisation de toutes les mesures du contrôle judiciaire, au lieu
de mettre en œuvre uniquement certaines d’entre elles, et la sensibilisation
à propos de l’importance de leur pratique en tant que mesures alternatives
à la détention alternative.
d- La concrétisation du rôle du responsable judiciaire dans le contrôle de la
détention préventive, et la prise en considération de cette mesure parmi les
critères de l’évaluation de la performance des juges.
e- Veiller à préparer les dossiers des détenus préventifs dans les délais dits
raisonnables mis en programme, afin d’éviter le retard qui règne ce type de
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

dossiers et qui participe automatiquement à l’inflation du nombre des


détenus préventifs.
f- La justification des décisions de la détention préventive en cas de son
application que ce soit en raison de la gravité des actes commis ou de
l’absence des garanties de présence.
g- L’étude attentive des procédures et des dossiers ainsi présentés au
ministère public ou au juge d’instruction avant la prise de la décision de la
détention.
h- La prise en considération de la situation et des conditions humaines lors du
recours à la détention préventive.
i- La tenue par les tribunaux (précisément le parquet et le juge d’instruction)
des statistiques mensuelles permettant le contrôle de la situation des
détenus préventifs ainsi que l’étude des moyens susceptibles de rationaliser
la détention préventive.32
3- Des recommandations liées à la politique pénale

L’importance que revêt la politique pénale comme étant l’une des


politiques publiques de l’Etat dans le développement de la justice pénale,
et la garantie de l’exercice des droits et des libertés, suppose l’élaboration
des principes basiques afin de tracer une politique efficace, qui met parmi
ses priorités, l’anéantissement de la détention préventive. Dans ce sens, il
ne va pas sans intérêt de présenter les propositions ci-après :

a. Prévoir des peines nouvelles dites alternatives au lieu des peines


préventives de liberté, notamment dans le but d’alterner l’inflation des

1 ‫القض ئي ص‬ ‫ منش را جمعي نشر المع م الق ن ني‬، 1 ‫ العدد الث ني أك بر‬، ‫ مج الشؤ ن الجن ئي‬32
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détenus au sein des établissements pénitentiaires (effectuer des travaux


dans l’intérêt public, amendes, la privation de certains droits…).
b. Veiller à prendre toutes les mesures nécessaires afin de faciliter le
traitement rapide des dossiers concernant les détenus préventifs et ce à
travers le contrôle du système des notifications.
c. Statuer en urgence sur les demandes de mise en liberté conditionnelle.

3- Changement des cultures dominantes :

La réduction de la proportion de la détention préventive n’est pas liée


uniquement à l’autorité de la justice, mais nécessite des efforts
considérables pour ainsi modifier les cultures dominantes inculquées au
sein de la société qui font certainement de la peine et plus particulièrement
de la détention, le grand titre de la justice, ceci peut s’atteindre à travers :

a. La sensibilisation juridique des citoyens, dans la finalité de les


rapprocher de la théorie de la peine et de la détention.
b. La participation de la société civile à la modification de la culture
sociétale à propos de la théorie de la peine.
c. La participation de la justice, notamment à travers la stabilisation des
arrêts de justice sur le principe partant de l’idée qu’il ne faut recourir à
la détention que dans des cas exceptionnels.
d. La réduction des délais pour statuer sur les dossiers des personnes non
détenues ainsi que l’exécution des jugements prononcés à leur encontre
dans des délais assez courts, afin de sensibiliser la société que la justice
persiste sans qu’il n’y ait recours à la détention préventive. 33

‫القض ئي ص‬ ‫ منش را جمعي نشر المع م الق ن ني‬، 1 ‫ العدد الث ني أك بر‬، ‫ مج الشؤ ن الجن ئي‬33
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Conclusion

En guise de conclusion, cette étude comporte un constat et un espoir.


D’abord, le constat est que la loi 22-01 relative à la procédure pénale souffre
des limites importantes en matière de détention préventive qui risquent de
porter atteinte aux libertés individuelles et au principe de la présomption
d’innocence, car les autorités compétentes font souvent recours à cette mesure
au lieu d’être l’exception, comme en témoigne les statistiques publiées à ce
sujet. Puis, en second lieu l’espoir trouve une place avec le projet de réforme
de la procédure pénale et du droit pénale, notamment quant au volet qui traite
les peines de substitution à la détention. Cependant, cet espoir mérité d’être
nuancé, car il faut attendre l’application effective de ces alternatives proposées
après l’adoption des textes par les autorités compétentes. Mais, il faut aussi
préparer l’opinion publiques à accepter l’idée selon laquelle la prison ne
constitue pas la seule réponse à un acte incriminé, et aussi que le placement
en détention préventive ne signifie pas une présomption de culpabilité, bien
au contraire c’est une atteinte au principe de la présomption d’innocence.

Cet espoir peut aussi être nuancé, car certaines dispositions du projet
demandent d’être revues, comme c’est le cas des délais de placement en
détention qui sont longs. De même, certaines questions, qui constituent des
faiblesses de la loi 22-01, continuent d’être absentes dans le projet malgré que
leur intégration dans le texte permette de se conformer aux instruments des
droits de l’Homme et de la Constitution de 2011, dont la plus importante est
l’absence de réparation des personnes victimes d’une détention injustifiée.

Enfin, il est à noter que malgré les inconvénients de la détention


préventive, il relève de l’utopie de proposer, comme l’a préconisé Faustin
Hélie, sa suppression. C’est un mal nécessaire pour certaines faits graves qui
demandent de garder la personne, qui ne présente aucune garantie, à la
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

disposition du juge d’instruction chargé de l’affaire pour les besoins des


investigations judiciaires.
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

Bibliographie :

Ouvrages en langue française :

Ouvrages généraux :

ESSAID Mohammed Jalal, « Le procès équitable dans le code de procédure


pénale de 2002 », Collection Réforme du droit et
développement socio-économique, volume n°1 ;

ABOULOULA Amal, « La peine privative de liberté en droit marocain et


comparé », REMALD, Première édition, 2005 ;

BOUSSETTA Mourad “ Principes élémentaires de la procedure pénale


marocaine”, 2ème edition, Edition Almaarifa, 2006.

Ouvrages spéciaux :

EN-NEFKHAOUI Aziz, « La problématique de la détention préventive et


ses alternatives possibles » , Article publié in REMALD,
numéro 124, septembre-octobre 2015 ;

Mohamed DRISSI ALAMI MACHICHI, « Régime juridique de la


détention préventive », in Revue de la sûreté nationale, n°184,
1996 ;

KONE Oumar, « La problématique de la détention provisoire », mémoire


pour l’obtention du diplôme de criminologie de l’Université
Nancy II, 2008 ;

Melique David, « la détention provisoire », mémoire de DEA, Université de


Lille, 2000-2001.
‫‪LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES‬‬

‫‪Revues /exposés et thèses :‬‬

‫‪ ‬عثم ن بنعبد ه حفيظ ب حد " ااعتق ل ااحتي طي التدابير الم ازي في ض ء ق ن ن‬


‫ب لمع د الع لي ل قض ء‪،‬‬ ‫الق ن ن المق رن" رس ل ن ي التدري‬ ‫المسطرة الجن ئي‬
‫‪،‬‬ ‫‪11 - 11‬‬

‫‪ ‬مراد الع مي ‪ ،‬بدائل ااعتق ل في الق ن ن المغربي "دراس ع ى ض ء مشر عي ق ن ن‬


‫الق ن ن الجن ئي"‪.‬‬ ‫المسطرة الجن ئي‬

‫جمعي نشر المع م‬ ‫‪ ، 1‬منش را‬ ‫‪ ‬مج الشؤ ن الجن ئي ‪ ،‬العدد الث ني أك بر‬
‫القض ئي ;‬ ‫الق ن ني‬

‫م رس‬ ‫‪ ‬عرض تقد به السيد مدير الشؤ ن الجن ئي ب لمع د الع لي ل قض ء بت ريخ‬
‫أرق ‪.‬‬ ‫‪ 1‬ح ل ااعتق ل ااحتي طي معطي‬
LA PROBLEMATIQUE DE LA DETENTION PREVENTIVE ET SES ALTERNATIVES POSSIBLES

Table des matières


SOMMAIRE ................................................................................................................................ 3
INTRODUCTION ........................................................................................................... 5
Chapitre 1 : La détention préventive : Entre l’exception textuelle et l’éventualité d’une
pratique conditionnée ...................................................................................... 12
Section 1 : Le régime juridique de la détention préventive ................................... 13
Paragraphe 1 : Les conditions préalables au placement en détention préventive 13
Paragraphe 2 : La durée de la détention préventive ............................................. 19

Section 2 : Le régime d’exécution de la détention provisoire ............................... 26

Paragraphe 1 : Le régime d’exécution de la détention préventive ....................... 26

Paragraphe 2 : Les statistiques descriptives relatives à la détention préventive .. 28

Chapitre 2 : Les alternatives à la détention préventive : Des conséquences inéluctables


et des recommandations envisageables ........................................................... 36
Section 1 : La rationalisation de la détention préventive ....................................... 37
Paragraphe 1 : Le système du contrôle judiciaire .............................................. 39
Paragraphe 2 : Le placement sous surveillance électronique ............................ 42
Section 2 : Les maux de la détention préventive et les recommandations
anéantissant son inflation....................................................................... 44

Paragraphe 1 : Les maux de la détention préventive………………. ............... 44


Paragraphe 2 : Des recommandations anéantissant l’inflation de la détention
préventive .............................................................................. 49

CONCLUSION ............................................................................................................. 54
BIBLIOGRAPHIE ........................................................................................................ 56
TABLE DES MATIERES ............................................................................................. 58

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