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Les taux de change

Introduction

Depuis l’accélération du phénomène de la mondialisation, les taux de change


occupent une place de plus en plus importante dans la politique économique et sociale
de chaque pays. Leurs variations ont des implications multiples. Ils influencent les
exportations et par conséquent le niveau d’emploi, les importations et travers elles, le
niveau des prix (l’inflation), le solde touristique, les décisions d’investissement des
entreprises tant nationales qu’étrangère, la politique monétaire…Leur importance est
telle, que le niveau de taux de change de la monnaie domestique est mentionné
quotidiennement dans les bulletins de nouvelles dans différentes médias (internet,
journaux, radio, et télévision). Le taux de change est une variable importante surtout en
économie ouverte.

Il faut savoir que le marché des changes est le plus vaste marché du monde. Sur
ce marché, qu’on désigne parfois par son acronyme anglais FOREX (Foreign exchange), il
s’échange quotidiennement près de 5300 milliards de $ américains (en 2013), soit plus
de 3 fois le PIB du canada1. En 2022, ce volume dépasse 7500 milliards de $ américains.

I) Calcul et mode de cotation

1. Définition
Le taux de change correspond au prix d’une monnaie exprimé dans une autre
monnaie. A titre d’exemple, à la clôture des marchés vendredi 21 février, 1$ canadien
valait 0,797829 $ américain et 0,7008 euro. C’est donc un prix relatif entre monnaies.

1
Ce chiffre est considérable puisque le PIB est une production annuelle

1
2. Calcul simple

Pour reprendre l’exemple précédent, si 1$ CAD = 0,797829$ US, alors 1$ US =


1/0,797829 $CAD= 1,2534$ CAD.

Par ailleurs, si 1$CAD= 0797829 et 1$ CAD= 0,7008 euros, alors 0,7008 euros =
0,797829 $ US → 1 euro = 0,798929/0,7008 $ US = 1,13845 $ US.

3. Modes de cotation
Le taux de change est un prix relatif. Il existe donc deux modes de cotation des
monnaies. La cotation au certain et la cotation à l’incertain.

Le prix en monnaie étrangère d’une unité monétaire domestique désigne la


cotation au certain. Le prix en monnaie domestique d’une unité monétaire étrangère
renvoie à la cotation à l’incertain. A titre d’exemple, dans la parité suivante 1$ CAD =
0,7008 euros, le S CAD est coté au certain, et l’euro est coté à l’incertain. A l’inverse, si la
parité est 1 euro = 1,42694 S CAD, alors l’euro est coté au certain et le S CAD est coté à
l’incertain.

Avant l’avènement de l’euro, tous les pays du monde cotaient leurs monnaies à
l’incertain à l’exception du Royaume-Uni et certaines de ses anciennes colonies. Depuis
1999, les pays de la zone euro cotent leur monnaie unique (l’euro) au certain.

Sur un autre plan, il faut savoir que sur le marché des changes, il y a toujours deux
cours, le cours acheteur et le cours vendeur. Les premiers, présentent les valeurs
auxquels les combistes sont prêts à acheter la monnaie considérée. Les seconds
indiquent les prix auxquels ils seront prêts à vendre la monnaie. Dans cette double
cotation, les cours vendeurs sont plus élevés que les cours acheteurs. Le prix auquel on
achète une devise (l’ask) est donc toujours moins élevé que le prix auquel on la vend (le
bid). Cet écart entre l’asK et le Bid s’appelle la fourchette de prix ou le spread. Il est sert
à rémunérer l’intermédiaire financier pour son service. Le marché des changes, n’est pas
le seul marché où cette fourchette existe. Plus proche de nous, on peut citer le marché
le marché de l’or physique. Lorsqu’un particulier désire vendre ces bijoux à un bijoutier,
le prix qu’il obtient est toujours plus bas que le prix auquel ce même bijoutier vend ses
bijoux aux clients. Cet écart sert à rémunérer le travail du bijoutier. Sur le marché des
changes, comme sur tous les marchés qui fonctionnent en continue, il y a une double
cotation, avec d’un côté les cours acheteurs et d’un autre côté les cours vendeurs. C’est

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le cas notamment du marché actions. Analysons d’autres aspects de ce marché des
changes.

II) Le marché des changes


Comme tous les prix, le taux de change est obtenu grâce à l’interaction de l’offre et
de la demande des agents présents sur le marché des changes.

1. Les acteurs du marché des changes

Parmi les agents qui interviennent sur le marché des changes, figurent les banques,
les institutions financières non bancaires, comme les sociétés d’assurance, les fonds de
pension et plus généralement les sociétés de gestion d’actifs. On trouve également les
banques centrales et les entreprises engagées dans le commerce international ainsi que
la quasi-totalité des multinationales. Enfin, les ménages interviennent également sur ce
marché, notamment lorsqu’ils échangent des devises au guichet avant un voyage
touristique par exemple. Néanmoins, par rapport aux sommes traitées sur ce marché,
leurs interventions demeurent marginales.

1.1-Les banques commerciales

Sur le plan légal, toute transaction en devises doit partir d’un compte bancaire
vers un autre compte bancaire pour éviter notamment le blanchiment de l’argent de la
criminalité et diverses autres fraudes. Dans ces conditions, les arbres deviennent
incontournables. Tous les agents économiques qui doivent faire des transferts de fonds
internationaux le font d’un compte bancaire vers un autre compte bancaire. Même
lorsqu’elles ne sont pas directement impliquées 2 dans une opération de change, les
banques interviennent sur le marché des changes pour répondre aux besoins de leurs
clients.

Par ailleurs, il faut savoir que le rôle des banques est beaucoup plus large que
celle de l’ouverture de comptes. A titre d’exemple, les taux de change «au détail »
auxquels les entreprises ont accès sont beaucoup moins favorables que les taux de «
gros» interbancaires. Cela est compréhensible dans la mesure où les banques
bénéficient d’économies d’échelle dans puisqu’elles interviennent quotidiennement
pour le compte de centaines, voire de milliers de clients. Sur le marché interbancaire, il
n’y a aucune transaction qui soit inférieure à un million de dollars. En mutualisant, les
2
Dans le sens où elles n’interviennent pas pour leur propre compte en utilisant leurs fonds propres.

3
demandes et les offres de leurs clients, les banques achètent et vendent de gros
montants dans les différentes devises étrangères, ce qui leur permet d’obtenir des prix
plus favorables avec des spread plus petits. En revanche, les particuliers ou les PME
(petites ou moyennes entreprises) exportatrices ne peuvent obtenir de telles conditions.

1.2- Les entreprises.

Les entreprises qui sont actives dans le commerce international, interviennent


souvent sur les marchés des changes pour acheter les devises qu’elles doivent verser à
leurs fournisseurs étrangers ou pour échanger les devises qu’elles reçoivent des clients
non-résidents. D’autres multinationales interviennent sur ce marché interviennent sur
ce marché lorsqu’elles rapatrient les bénéfices réalisés dans d’autres pays ou
lorsqu’elles-mêmes ont besoin d’acheter des devises, en prélude à des investissements
directs à l’étranger.

1.3- Les institutions financières non-bancaires

Avec le mouvement de dérégulation financière entamé dans les années quatre-


vingt dans les pays développés, les distinctions entre les institutions financières se sont
atténuées progressivement. Aujourd’hui les assureurs offrent beaucoup de services,
autrefois réservées aux banques. Parmi elles, nous pouvons citer les placements mais
aussi les transactions sur devises. D’autres investisseurs institutionnels sont également
très actifs sur le marché des changes. Les fonds de pension qui cherchent à diversifier
les placements de leurs futurs retraités et cela passe par l’investissement de portefeuille
à l’étranger. Mais, cette stratégie doit être impérativement accompagnée d’une
politique de gestion du risque de change. En effet, un rendement de 20% peut
disparaitre rapidement si la devise dans laquelle, il est libellé se déprécie d’autant face à
la monnaie domestique.

Enfin, les fonds de couverture, appelé également fonds spéculatifs (hedge funds),
sont des agents très actifs sur le marché des change, tant pour des motifs de couverture
du risque de change, que pour des raisons purement spéculatifs.

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1.4- Les banques centrales

Les banques centrales interviennent également sur le marché des changes.


Parfois, elles le font de concert avec d’autres banques centrales dans le but d’acheter
une devise qui se déprécie trop rapidement pour éviter les crises de change. Une
banque centrale, peut également intervenir pour vendre sa propre devise en vue
d’empêcher ou d’arrêter une appréciation trop violente de la monnaie domestique. Ces
interventions ne sont pas fréquentes, mais elles sont scrutées de près par les
investisseurs car elles donnent des indices sur le type de politique monétaire que la
banque centrale compte mettre en place dans un proche avenir.

2. Caractéristiques du marché de change

- Rappelons que le marché des changes est le plus vaste marché de capitaux du
monde avec une croissance régulière des volumes et un fonctionnement
presque en continue (24h/24h). en 1989, ce marché enregistrait un volume
d’échange de 600 milliards de dollars par jour, en 2010, ce volume atteint 4000
milliards soit une croissance de 566,67% en 21 ans (près de 27% par an).

- Les places financières qui accueillent les plus gros volumes d’échange sont
Londres, New York, Tokyo, Frankfurt, et Singapour.

- Ce marché fonctionne quasiment sans interruption car dès qu’un marché,


comme la bourse de New-York, est fermé, le marché néozélandais puis le
marché australien sont ouverts. Les marchés asiatiques ouvrent progressivement
de Tokyo jusqu’à New Delhi. Avant leur fermeture, le marché russe et ceux du
moyen orient prennent le relais. Enfin, les bourses, d’Europe occidentale ouvrent
à leur tour six heures avant les marchés du continent américain. Les cotations
des devises convertibles ne s’arrêtent donc jamais, sauf en fin de semaine.

- Depuis l’invention d’internet, l’interconnexion des différentes places financières


mondiales s’est considérablement renforcée. De ce fait, il ne peut y avoir de
différence significative de taux de change sur deux marchés. Si cela devait,

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arriver, la situation est vite corrigée grâce aux opérations d’arbitrage. Supposons
que l’euro cote 1,2 dollar à New York mais qu’au même moment sa valeur est de
1,3 dollar à Londres. Dès qu’ils repèrent cette anomalie, les traders (courtiers)
vont simultanément acheter l’euro à New York et le revendre à Londres. Si un
trader achète 1 million d’euro à New York, il devra débourser 1,2 million de
dollars. En revendant le million d’euros acheté à New York à Londres, il percevra
1,3 million de dollars. Il réalisera alors un profit net de 100 000 dollars (soit 1,3
million de dollars – 1,2 million de dollars) sans aucun risque. Ce trader ne sera
pas seul à agir ainsi. D’autres traders qui surveillent les cours des principales
devises adopteront la même stratégie. De ce fait, la demande de l’euro
augmentera sur la place de New York, tandis que c’est l’offre d’euros qui va
augmenter sur la place de Londres. Dans le premier cas, l’euro va s’apprécier sur
la place américaine, tandis qu’il va se déprécier sur la bourse anglaise.
Conséquence de ces interventions des traders, la parité euro/dollar va évoluer
vers un taux de change unique dans les deux places financières. Ces anomalies
disparaissent rapidement grâce à l’action des traders qui sont attentifs à la
moindre opportunité d’arbitrage

- En théorie, les échanges sur le marché des changes peuvent se produire entre
n’importe quel couple de devises. Pourtant, plus 80% des transactions
impliquent le dollar américain. Supposons qu’une banque souhaite vendre des
francs suisses pour acheter des shekels israéliens. Souvent cette banque va
d’abord vendre ses francs suisses contre des dollars américains. Ces derniers lui
serviront alors pour acheter la monnaie israélienne. On parle alors, de taux de
change croisés. Bien qu’elle effectue deux transactions au lieu d’une seule, cette
façon de faire est, dans les faits, moins onéreuse qu’un échange direct entre
francs suisse et shekels. Les volumes change impliquant le dollar américain sont
tellement élevés, qu’il est facile de trouver une contrepartie (une banque, un
investisseur institutionnel, etc.) prête à échanger ses francs suisse, ses shekels ou
toute autre devise contre le dollar américain, ou dans le sens inverse, ses dollars
américains, contre toute autre devise. En revanche, trouver immédiatement un
agent qui veut vendre des francs suisses contre des shekels est plus difficile, car
ce sont des devises moins liquides. De ce fait, le dollar américain joue un rôle
majeur dans la majorité des transactions de change. On parle de monnaie
véhiculaire ou de monnaie internationale. Introduit en 1999, l’euro est peut-être
appelé à jouer un rôle véhiculaire dans le future. Toutefois, en 2010, seulement

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39% des échanges mondiaux ont impliqué l’euro. La livre Sterling quant à elle
perd progressivement son influence.

3. Taux de change au comptant et taux de change à terme


Les transactions évoquées jusqu’à présent se déroule sur le marché au comptant
(appelé également marché spot). Dans ce marché, les paiements (livraisons des devises)
se font au moment de la transaction, c’est-à-dire immédiatement. On parle alors de
taux de change au comptant. Néanmoins, dans beaucoup de cas, le règlement des
transactions de change intervient après un certain délai. Celui-ci peut aller de quelques
semaines à quelques mois, voire quelques années. Les taux de change associés à ces
opérations sont appelés les taux de change à terme. Deux agents peuvent se mettre
d’accord sur un échange à terme de devises à partir d’un taux de change fixé au
comptant. A titre d’exemple, deux banques peuvent s’entendre pour s’entendre
aujourd’hui le 26 février d’échanger 1 million d’euros contre 1,413 million de $ CAD
livrables le 31 mars prochain. Le taux de change de 1euro = 1,413 $ CAD est un taux de
change fixé au comptant mais la livraison des sommes en jeu aura lieu à terme. Nous
dirons que la banque canadienne achète à terme des euros et vend à terme des $
canadiens. La banque européenne fait l’inverse. Elle achète à terme des $ canadiens et
vend à terme des euros.

Les taux de change à terme sont souvent différents des taux de change au comptant.
Dès qu’un agent s’apprête à recevoir ou à régler un montant dans une devise étrangère,
il y a un risque de change associé à cette opération à terme. Nous verrons, dans une
section ultérieure, les différentes situations, les risques associés et les moyens de se
couvrir contre ses risques.

Enfin, comme les taux change à terme sont différents des taux de change au
comptant, il y a des appellations spécifiques qui désignent ces différences.

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Pour une monnaie cotée au certain (comme l’euro ou la livre sterling), lorsque la
différence entre le taux de change à terme et le taux de change au comptant est
positive, on parle de report. Lorsque cette différence est négative, on parle de déport.

Pour une monnaie cotée à l’incertain (comme le dollar canadien ou le yen), on parle
de report lorsque la différence est négative et de déport lorsque cette différence est
positive. C’est exactement le contraire d’une monnaie cotée au certain.

4. Les swaps de change

Un swap de change s’apparente à la vente d’une monnaie au comptant, combinée


avec un rachat à terme. Supposons que la firme Siemens vienne juste de recevoir dix
(10) millions de dollars de ses ventes aux États-Unis. Supposons que cette compagnie
doive verser une somme similaire de 10 millions de dollars à un de ses fournisseurs dans
six mois. Enfin supposons que cette firme souhaite dans cet intervalle placer la somme
reçue dans des obligations libellées en euros pour les faire fructifier. Mais au lieu de
procéder à ces deux opérations distinctes, la compagnie Siemens peut envisager de
conclure un swap. Il s’agit de trouver un partenaire qui lui est exactement dans la
situation inverse, c’est-à-dire qui dispose d’euros mais qui a besoin temporairement
(pour une période de six mois) d’une somme 10 millions de dollars. Supposons que cette
société soit la multinationale suisse Nestlé. Supposons que le taux de change au
comptant est 1 euro = 1,13639 dollars américain donc 1$ = 0,88 euro. Siemens remettra
10 millions de dollars américains à Nestlé et cette dernière donnera 8,8 millions d’euros
à Siemens. Après six mois, l’opération inverse aura lieu. Siemens récupérera ses 10
millions de dollars américains en redonnant les 8,8 millions d’euros à Nestlé. Le swap
de change est donc assimilable à un échange temporaire de devises. Cette technique
présente l’avantage d’éviter le risque de change et les frais associés à la couverture
contre ce risque de change. En revanche, il n’est pas toujours facile de trouver une
contrepartie avec, la devise, le montant et l’échéance recherchés.

5. Les contrats à terme et les options

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Les contrats à terme et les options sont d’importants instruments de couverture
contre le risque de variation des taux de changes3.

Un contrat à terme est un contrat par lequel, un agent économique s’engage à


acheter (ou vendre) un montant précis dans une devise identifiée à un taux de change
prédéterminé. Lorsque cette transaction se fait sur un marché organisé, on parle de
future.

Il est également possible de conclure un contrat à terme sur devise similaire avec
une contrepartie privée. Il est alors appelé contrat forward. Ce dernier a l’avantage
d’être fait sur mesure. Autrement dit, on peut choisir le montant précis dont on a besoin
et la date précise qu’on désire. A l’inverse, les contrats futures sur devises sur devise
sont plutôt standards tant en termes de durée que de montants. Ils sont par conséquent
plus contraignants que les contrats forward. En revanche, ils sont plus liquides que ces
derniers. Avec un marché plus liquide, un contrat future peut être revendu à tout
moment (donc même avant échéance) sur le marché4, ce qui n’est pas le cas du forward.
Cette flexibilité est d’autant plus appréciée que les anticipations sur les taux de change
ont changé5. Les forwards sont moins liquides car c’est le prix à payer pour avoir des
contrats sur mesure. Comme ce type de contrat est conclue avec des contreparties
privées, et non sur un marché organisé, alors chaque co-contractant doit attendre que le
son partenaire, avec lequel il a conclu cette transaction honore son engagement.

Les options de change sont essentiellement des droits. Lorsque nous achetons une
option d’achat ou une option de vente pour un montant en devise à une date donné,
nous achetons un droit. A titre d’exemple, une entreprise qui a une dette de 20 millions
de livres sterling payable dans un moins, peut acheter une option d’achat de cette
devise. Elle peut par exemple prendre l’option d’acheter 20 millions de livres sterling
d’une échéance d’un mois, donc exerçable au plus tard le 19 avril avec la parité
suivante : 1£ = 1,8847 $ CAD. Si d’ici le 19 avril, la livre sterling s’apprécie et côte

3
Les options peuvent également être utilisées comme instruments de spéculation.
4
En réalisant un gain ou une perte comme dans le cas d’autres actifs (actions, obligations,).
5
Supposons que nous avons acheté un contrat à terme en vertu duquel nous nous engageons à acheter
20 millions d’euros avec une parité à 1€=1,25 $ à une échéance de 3 mois. Dans ce contrat, le but est de
se protéger contre la hausse de la monnaie européenne. Si quarante jours, après la conclusion du contrat,
le dollar américain connait une nette appréciation face à l’euro, avec une nouvelle parité de 1€= 1,1 $
alors les anticipations de taux de change vont changer radicalement. L’euro s’inscrit désormais dans une
tendance baissière et il est donc inutile de se protéger contre sa hausse. Il faut alors vendre ce contrat
pour ne pas aggraver nos pertes.

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largement au-dessus de cette parité (exemple 1£ = 2,0135 $ CAD) alors, l’entreprise
canadienne va exercer son option en achetant ainsi les 20 millions de livres sterling à
une parité de change plus favorable que la parité constatée sur le marché. Dans ce
scénario, l’entreprise canadienne se serait protégée contre la dépréciation de la devise
canadienne (ou domestique) face à la devise britannique (ou ce qui revient au même,
elle se serait protégée contre la hausse de la devise britannique contre la monnaie
canadienne). En revanche, si à l’approche de la date d’échéance du 19 avril 2015, la
devise britannique côte largement en dessous de la parité initiale, (1£ = 1,8847) par
exemple 1£ = 1,7126 $ CAD, alors l’entreprise va abandonner son option (on dit qu’elle
ne va pas l’exercer) car elle peut acheter des livres sterling moins cher sur le marché.
Bien entendu, elle perd dans ce cas-là la prime payée pour l’achat de cette option.

Dans le cas où un agent économique (entreprise, banque, fonds de pension, etc)


possède une créance dans une devise étrangère, il peut également acheter cette fois
une option de vente, autrement dit, acheter le droit de vendre, cette devise pour un
montant précis et dans un laps de temps déterminé, appelé terme ou échéance.

Au total, selon la position dans laquelle on se trouve à l’égard des devises étrangères
(emprunteur ou créancier qu’on appelle également positon courte et position longue),
nous pouvons nous prémunir contre le risque de change en achetant deux types
d’options, l’option d’achat (acheter le droit d’acheter) ou l’option de vente (acheter le
droit de vendre).

Acheter le droit d’acheter

Options d’achat

Acheter le droit de vendre

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Attention, si un agent achète une option d’achat, c’est qu’il y a un agent, une
contrepartie, qui a vendu cette option en faisant le pari inverse sur l’évolution des taux
de change. On peut vendre l’option d’achat ou une option de vente. Mais dans ce cas-là,
il ne s’agit pas d’une stratégie de couverture du risque mais bien de la spéculation. En
effet, si l’agent qui a acheté l’option d’achat décide de l’exercer, c’est l’agent qui a
vendu l’option qui doit lui fournir les devises à l’échéance. Le risque de perte peut être
potentiellement très élevé, tandis qu’elle se limite à la prime dans le cas d’une option
d’achat.

Vendre le droit d’acheter

Options de vente

Vendre le droit de vendre

11
La gestion du risque de change

Introduction

En matière de commerce international, le règlement des transactions sur bien er


services se fait souvent à terme qu’il s’agisse de payer son fournisseur non-résident ou
de se faire par ses clients étrangers (ou non-résidents). Qu’une entreprise ait une dette
créance ou une dette en devise étrangère, elle encourt un risque lié à la variation des
taux de change. Ce risque de change concerne également les investisseurs intentionnels
qui effectuent des investissements, ou qui prennent des engagements, à l’étranger.

Dans un premier temps, nous préciserons les différentes positions de change


avant d’aborder les risques associés à chaque position. Enfin, nous présenterons
quelques exemples de couverture des risques de change.

III) Les positions de change et le risque de change

4. Définition
On parle de position de change dès lors qu’un agent possède une créance ou une
dette dans une ou plusieurs devises étrangères. Lorsqu’une entreprise a simultanément
une créance et une dette (ou engagement) dans deux devises étrangères, elle aura une
double position de change. Même si la créance et la dette sont la même devise, la
position sera toujours double. Toutefois, une créance et un engagement peuvent
s’annuler s’il y a une triple coïncidence, soit la même devise, les mêmes montants et les
mêmes échéances.

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5. Position courte, position longue et position fermée

Dans les positions de change il faut distinguer les positions courtes des positions
longues. La position fermée signifie l’absence de risque de change.

2.1-La positon courte

On parle de position courte lorsqu’une entreprise possède une dette (qu’on


appelle également engagement) dans une devise étrangère. Pour ses besoins courants,
Hydro Québec achète du matériel auprès du conglomérat américain General Electric
pour un montant de 70 millions de dollars américains. Cette somme est payable dans
quatre mois. Hydro Québec est alors dans une position courte. On dit qu’elle est courte
en dollars américains.

De manière générale, toutes les importations de biens et services donnent lieu à


des positions courtes en devises étrangères. Celle-ci peut également résulter d’un
emprunt fait en devise étrangère par un agent résident auprès d’un agent non-résident.

2.2- La position longue

On parle de position courte lorsqu’une entreprise possède une créance dans une
devise étrangère. Bombardier vend cinq avions d’affaires au Royaume-Uni pour
l’équivalent de 160 millions de livres sterling. Cette somme est payable dans 45 jours.
Bombardier est alors dans une position longue. On dit qu’elle est longue en livres
sterling.

De manière générale, toutes les exportations de biens et services donnent lieu à


des positions longues en devises étrangères. Celle-ci peut également résulter d’un prêt
fait en devise étrangère par un agent résident au profit d’un agent non-résident.

2.3- Les multi positions et la position fermée

Une entreprise est dans une position fermée lorsque trois conditions sont
réunies.

- La créance et la dette (ou engagement) sont libellées dans la même devise


étrangère
- Le montant de la créance est égal au montant de la dette

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- L’échéance pour le paiement de la dette correspond à l’échéance de la
réception ou de l’encaissement de la créance

Exemple1 : on peut reprendre le premier exemple concernant Hydro Québec.


Pour ses besoins courants, Hydro Québec achète du matériel auprès du conglomérat
américain General Electric pour un montant de 70 millions de dollars américains. Cette
somme est payable dans quatre mois soit le 19 juillet 2015. Supposons qu’à la même
date, Hydro Québec s’attende à recevoir une créance du même montant, soit 70
millions de dollars américains, de ses clients du Vermont à qui elle a livré de l’électricité
cet hiver. Le 19 juillet, lorsque la société québécoise recevra sa créance, elle la versera à
General Electric en guise de paiement de sa dette. Dans ce cas, Hydro Québec n’aura
aucun risque de change avec la devise américaine. On dit alors qu’elle a une position
fermée.

Toutefois, si l’une de ces trois conditions n’est pas satisfaite, on se retrouve dans
deux voire plusieurs positions de change (notamment pour certaines multinationales).
Pour illustrer cela prenons l’exemple suivant :

Exemple2 : Après avoir achevé la construction d’un barrage en Chine, SNC-


Lavalin s’attend à recevoir une somme de 630 millions de Yuans chinois au 01 mai. Pour
le 15 mais, elle doit s’acquitter d’une créance de 30 millions de dollars américains pour
des machines et des logiciels achetés aux États-Unis. Quelle est sa position de change ?

Ici il n’u a y a aucune coïncidence, ni en termes de devises, ni en termes de


montants ni d’échéance. Par conséquent SNC-Lavalin est dans une double position de
change. Elle est longue en yuans chinois et courte en dollars américains.

6. Les risques associés aux positions de change

3.1- La position courte

En dehors de la position fermée, les positions de change comportent toutes des


risques de change. Dans une position courte, le risque est l’appréciation de la devise
étrangère dans laquelle une entreprise possède un engagement (ou dette). Autrement
dit, le risque est que la monnaie domestique se déprécie face à la devise étrangère dans
laquelle la firme s’est endettée. Supposons que la société des alcools du Québec (SAQ) a
une dette de 15 millions d’euros payable à ses fournisseurs de vins français. Cette dette
est due pour le 30 mai 2015. Actuellement la parité euros/dollars est de 1€=1,3508 $

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CAD. A ce niveau, la SAQ doit débourser 20 262 000 dollars canadiens. Mais, si à
l’échéance, le taux de change de l’euro devait augmenter avec une parité supérieure à
1€=1,3508 $ CAD (exemple 1€=1,3850 $ CAD par exemple), alors la SAQ devrait
débourser 20 775 000 dollars canadiens, soit une somme supplémentaire de 513 000
dollars (ou une perte de change potentielle de 513 000 dollars canadiens). Cette perte
serait plus élevée si l’euro devait coter encore plus haut que 1,3850 dollars canadiens.

3.2- La position longue

Couche-tard est une entreprise québécoise dynamique à l’international. Elle a


acheté des chaines de dépanneurs tant aux États-Unis qu’en Europe. Supposons que sa
filiale norvégienne doive lui rembourser un prêt en plus du versement d’un dividende
pour une somme globale 647,32 millions de couronnes norvégiennes ou 100 millions de
dollars canadiens. La parité est donc 1$ CAD= 6,4732 couronnes norvégiennes. Cette
somme sera perçue le 01 juin 2015. Si la devise norvégienne s’apprécie face à la
monnaie canadienne, alors Couche-tard sera gagnante puisqu’elle percevra plus de
dollars canadiens. En revanche, si c’est l’inverse qui se produit, alors Couche-tard sera
perdante. A titre d’exemple, si la parité passe à 1 $ CAD= 6,7532 couronnes
norvégiennes, alors il faudrait 675,32 millions de couronnes norvégiennes pour obtenir
100 millions de dollars canadiens. Mais comme la créance n’est que 647,32 millions de
couronnes norvégiennes, Couche-tard ne peut obtenir que (100*647,32) /675,32 soit
95,853810 millions de dollars canadiens. Dans ce cas de figure, la perte sera 4,14619
millions de dollars canadiens.

Dans toute position longue, le risque de change réside dans la dépréciation (ou
baisse du taux de change au certain) de la devise dans laquelle on possède une créance.
Autrement dit, le risque est l’appréciation de la monnaie domestique face à la devise
étrangère dans laquelle sera remboursée la créance.

Face à ses risques de change, les entreprises ne peuvent pas se permettre de


spéculer en tablant par exemple sur une évolution favorable des taux de change. En
effet l’occurrence du cas inverse (évolution défavorable des taux de change) peut
entrainer des pertes financières considérables susceptibles de remettre en cause

15
l’existence de l’entreprise ainsi que des milliers d’emploi. Il est donc impératif pour elle
de recourir à des instruments de couverture du risque de change

4. La couverture des risques de change

Nous avons énuméré précédemment les différents instruments de couverture


contre le risque de change, à savoir les contrats à terme, les swaps, et les options. Dans
le point suivant, nous donnerons des exemples sur la manière dont on utilise ces
différents outils.

- Un agent qui est dans une position courte, peut conclure un contrat à terme,
en vertu duquel il s’engage à acheter (dans le futur), à une échéance fixée
d’avance un montant dans une devise étrangère selon une parité de change
fixée au présent. Dans notre exemple de la SAQ, qui doit payer quinze
millions d’euros (15 millions) aux vignerons français, elle peut voir s’il y a des
contrats à terme aux alentours de la parité actuelle, 1€ = 1,3508 $ CAD et
acheter 15 millions aujourd’hui mais livrables et payables (en dollars
canadiens) le 01 mai. Si les anticipations des agents accréditent une
poursuite de la baisse de l’euro, la parité retenue sera de 1,3508 ou moins
par exemple 1€ = 1,3243 $ CAD. En revanche, si les analystes s’attendent
plutôt à l’inversion de la tendance du fait par exemple de la baisse des prix
du pétrole et des matières premières en général, qui affectent l’économie
canadienne, alors ce contrat peut être signé avec une parité au-dessus du
taux de change au comptant, soit par exemple 1€ = 1,3778 $ CAD. En signant
un tel contrat, la SAQ sait à l’avance la somme exacte qu’elle devra
débourser à l’échéance. Si elle ne pense avoir de contrainte de liquidité à
court terme, elle peut signer un contrat forward, sinon elle opterait pour un
contrat à terme standard (future).

- Dans le cas particulier où la date du remboursement n’est pas précisée, la


SAQ peut opter pour l’achat d’une option d’achat de 15 millions d’euros à un
cours (ou parité) fixé d’avance, (exemple 1€ = 1,3610 $ CAD) exerçable
pendant une période de trois mois. Vers le mois de mai, une fois connue la
date de remboursement, la SAQ regardera le marché. Si l’euro s’est apprécié

16
et s’échange au-delà de la parité initiale retenue (soit plus que 1€ = 1,3610 $
CAD) par exemple 1€ = 1,3845 $ CAD, alors la SAQ va exercer son option.
Dans le cas contraire, par exemple 1€ = 1,3392 $ CAD, alors la SAQ, va
abandonner son option et acheter les 15 millions d’euros directement sur le
marché au comptant car ils sont moins chers. Dans cette optique, l’option
offre plus de flexibilité que le contrat à terme tout en protégeant du risque
de change. Il y a un prix pour cela, puisque la souscription (achat) d’une
option n’est pas gratuit et nécessite de payer une prime. Cette dernière est
perdue lorsque l’option n’est pas exercée.

- L’utilisation d’un contrat à terme sur mesure (forward) peut être envisagée
également lorsque les devises concernées ne sont pas les monnaies les plus
traitées sur le marché des changes (faible liquidité).

- Dans le cas d’une transaction commerciale ou financière avec un pays dont la


monnaie n’est pas convertible, on utilise ce qu’on appelle un forward non
convertible. C’est le cas notamment du Yuan Chinois. La banque Centrale
chinoise ne permet pas aux non-résidents de détenir des dépôts en Yuans.
Autrement dit, cette monnaie ne circule qu’à l’intérieur de la Chine. C’est
également le cas de la roupie indienne et de plusieurs autres monnaies. Pour
illustrer comment fonctionne un tel contrat à terme, prenons l’exemple
suivant : Début 2010, General Motors (GM) a vendu des pièces automobiles
pour un concessionnaire chinois pour un montant de 10 millions de yuans
payables dans trois mois (page 363). A cette date, le taux de change est 1$ US
= 6,8 yuans chinois. Cette parité est fixe, mais la banque centrale chinoise
l’ajuste régulièrement. GM ne peut pas vendre à terme ces yuans puisque
cette monnaie n’est pas convertible. Elle doit alors mettre en place une autre
stratégie qui consiste à faire des paris, payable en dollars, sur l’évolution
future du yuan. Pour s’assurer un taux de change futur de 6,6 yuans pour 1
dollar, GM va signer un contrat dont le profil de gain est fonction de la
différence entre le taux de change à terme et le taux fixé aujourd’hui par la
multinationale. Si d’ici trois mois, la Banque Centrale chinoise décide de
réévaluer sa monnaie en fixant son taux à 6,5 yuans = 1$ américain,
normalement ce serait une bonne nouvelle pour GM puisque ces yuans lui
permettraient d’avoir plus de dollars américains si elle n’avait pris aucun
instrument de couverture. Mais, comme elle a fait un pari, elle devra payer la
différence. Celle-ci sera de [(1/6,5)-(1/6,6)]* 10 000 000 yuans = 23 310
dollars. En revanche, si dans trois mois, la décision de la banque centrale

17
chinoise et de dévaluer sa monnaie avec par exemple un taux de change de
6,7 yuans = 1 dollar américain, alors ce qui aurait été une mauvaise nouvelle
pour GM si elle ne s’était pas couverte serait plutôt une bonne nouvelle. En
effet, sa contrepartie (avec laquelle elle a signé le contrat forward non
délivrable) doit lui verser la différence [(1/6,6)-(1/6,7)]* 10 000 000 yuans =
22 614 dollars.

- Les swaps de change peuvent convenir dans certains cas. Supposons qu’une
entreprise canadienne ait un engagement en euros de 20 millions d’euros
pour le 10 juin 2015, ainsi que deux créances respectivement de 8 millions
d’euros et de 12 millions d’euros à percevoir le 10 juillet 2015. Si elle trouve
une entreprise européenne qui a besoin de l’équivalent de 20 millions
d’euros en dollars canadiens, (soit 27 millions de $CAD) 6 pendant le même
laps de temps (entre le 10 juin et le 10 juillet) alors elles peuvent procéder à
un swap de devises.

- Notons enfin, que la vente d’option, ne constitue pas quant à elle un


instrument de couverture mais plutôt un outil de spéculation. En effet,
contrairement à l’achat d’une option qui confère un droit d’acheter et de
vendre, mais pas une obligation, le vendeur de l’option est lui tenu de fournir
le sous-jacent, ici le montant de devise, si l’acheteur décide d’exercer son
option. Dans ce cas, l’écart entre le taux de change au comptant et le taux de
change mentionné peut être élevé et constitue la perte du vendeur d’option.

II) Les variations du taux de change

Il s’agit dans cette partie, de mette en exergue les déterminants les plus
important qui sous-tendent la variation des taux de change. L’évolution du taux de
change d’une monnaie dépend de l’évolution de l’offre et de celle de la demande de
cette monnaie. Mais alors pourquoi les agents achètent-ils ou vendent-ils une
monnaie ?

Une monnaie peut être achetée (demandée) si les actifs libellés dans cette
monnaie offrent un couple rendement risque plus attractif et plus intéressant que ceux

6
Sur la base d’un taux de change de 1€= 1,3500 $CAD

18
d’autres monnaies. Dans le cas contraire, cette monnaie est plutôt vendue (offerte).
Cela se manifeste particulièrement à la suite d’une évolution des taux d’intérêt à court
terme.

Dans le même ordre d’idées, une monnaie d’un pays est achetée dans le but de
payer les biens et services importés de ce pays (que ce pays exporte). A l’inverse,
lorsque c’est ce pays lui-même qui importe, sa monnaie sera vendue pour acheter
d’autres devises qui serviront à payer les biens et services acquis à l’étranger. Enfin, les
niveaux de taux de change peuvent s’expliquer, notamment à long terme, par le pouvoir
d’achat des devises. C’est cela que montre la théorie de la parité des pouvoirs d’achat
(P.P.A). Avant d’aborder certains détails de cette théorie, disons qu’on peut expliquer le
niveau du taux de change par les différentiels de taux d’inflation entre les pays.

Nonobstant, les déterminants cités ci-dessus, les taux de change peuvent


également être affectés par facteurs qui ne sont pas directement aux fondamentaux de
l’économie. C’est notamment le cas lors des crises financières à l’instar de la crise de la
zone euro en 2011, des troubles socioéconomiques, … Ces éléments influencent le cours
des devises surtout à court terme. Par ailleurs, les relations sont rarement univoques.
Ainsi, si le solde de la balance courante influence le niveau de taux de change, une
variation du taux de change influence également le volume du commerce extérieur et
donc le solde de la balance courante.

1. La parité des taux d’intérêt et les taux de change

1.1- Le taux de change et la rentabilité des actifs

Pour comparer la rentabilité de deux dépôts dans deux devises différentes


(dollar et euro), il faut connaitre le taux de change anticipé entre ces deux devises.

Exemple : supposons que le taux de change courant (au comptant) soit 1 euro=
1,22 dollar ou bien à l’incertain 1$ =082 €. Le taux de change anticipé dans un an est 1$=
0,8 euro (suite par exemple à une dégradation prévue de la situation économique
américaine). Le taux d’intérêt d’un dépôt d’un an en dollars R $ = 6% et un dépôt
similaire en euro rapporte 4% (R€ = 4%).

19
Dans un an, un dépôt d’un dollar vaudra 1,06$ et un dépôt d’un euro vaudra
quant à lui 1,04 €. Quel dépôt offre le meilleur taux de rentabilité ?

Pour répondre à cette question, procédons en cinq étapes :

1. Déterminons le prix en euros d’un dépôt bancaire en dollars, en utilisant le


taux de change courant du dollar par rapport à l’euro. Si le taux de change au comptant
est de 0,82 euro par dollar, et si le dépôt est de 1$, alors le dépôt vaut 0,82 €
approximativement

2. Déterminons aussi la valeur en dollars dans un an du placement d’un dollar


aujourd’hui en utilisant le taux d’intérêt annuel en dollars. Si le taux d’intérêt annuel en
dollars est de 6%, alors à la fin de l’année, un dépôt de 1$ vaudra 1,06$.

3. calculons ensuite la valeur anticipée en euros du montant en dollars


déterminé à l’étape 2, en utilisant le taux de change anticipé. On anticipe que le dollar
va se déprécier par rapport à l’euro dans l’année qui vient, pour atteindre 0,8 euro par
dollar dans un an, La valeur anticipé en euro du dépôt en dollars sera alors
approximativement de 0,85 € (1,06 * 0,8).

4. Le prix courant en euros d’un dépôt d’un dollar (1$) est de 0,82 € et nous
pouvons prévoir sa valeur en euros dans un an soit 0,85 €. Il nous est donc possible de
prévoir le taux de rentabilité annuel anticipé d’un dépôt en dollars :
=[(0,85-0,82)/0,82]*100 = 3,7%.

5. Nous savons par ailleurs que la rentabilité annuelle d’un dépôt en euros (taux
d’intérêt) est de 4%. Nous pouvons donc déduire que le placement en euros offre une
meilleure rentabilité anticipée que le placement en dollars. Bien que les taux d’intérêt
en dollars soient 2% plus élevés (6% vs 4%), la dépréciation anticipée du dollar par
rapport à l’euro offre à ceux qui détiennent les euros une perspective de gain en capital
suffisamment importante pour compenser le différentiel de taux d’intérêt.

R€ = R$ + (Ee-E)/E

La rentabilité en euros d’un dépôt en dollars est, approximativement, égale aux


taux d’intérêt en dollars plus le taux de dépréciation (ou moins le taux d’appréciation) de
l’euro par rapport au dollar. En d’autres termes, pour couverture en euros le taux de
rentabilité d’un dépôt en dollars, il convient d’ajouter aux taux d’intérêt en dollars le

20
taux de croissance du prix en dollars de l’euro. C’est la parité des taux d’intérêt non
couverte

1.2- La parité des taux d’intérêt non couverte

Selon la théorie de la parité des taux d’intérêt, le taux de change qui s’établit sur
le marché correspond au taux auquel les agents acceptent de détenir des dépôts dans
différentes devises. Dans ce cas, le marché de change est à l’équilibre. Autrement dit, le
marché des changes est à l’équilibre lorsque tous les dépôts bancaires libellés dans
toutes les monnaies offrent la même rentabilité anticipée. Cela signifie que les
rentabilités de deux placements (dépôts) libellés dans deux monnaies différentes, mais
exprimée (ou mesurée) dans la même monnaie soient égales à l’équilibre.

Exemple 1 : pour mieux comprendre cette parité des taux d’intérêt, prenons
l’exemple suivant : Supposons que le taux d’intérêt en dollars américains soit de 6% et
que pour le même type de placement, le taux d’intérêt en euros est de 4%. Supposons
qu’on s’attende cette année à une dépréciation du dollar de 4% face à l’euro. Dans ce
cas de figure, la rentabilité anticipée des dépôts (ou placements) en euros dépasse de
2% le taux anticipé des dépôts en dollars. Comme les investisseurs sont censés préférer
détenir les actifs offrant la plus grande rentabilité (hypothèse), aucun d’entre eux ne
voudra détenir des dépôts en dollars. Leurs détenteurs vont les vendre pour des dépôts
en euros. Nous aurons alors une hausse de l’offre du dollar américain et une hausse de
la demande de l’euro. Conséquence de cette évolution, ce dernier va s’apprécier face au
dollar américain

Exemple 2 : Si les taux d’intérêt en euros sont de 4% mais ceux en dollars sont de
3%. Supposons que le dollar soit susceptible de s’apprécier par rapport à l’euro de 2%
au cours de l’année à venir. La rentabilité anticipée des dépôts en dollars dépasse de 1%
en euros. Dans cet exemple 2, aucun investisseur ne voudra conserver des dépôts en
euros. Ceux qui en détiennent les vendront pour faire des placements en dollars. La
monnaie américaine va s’apprécier face à l’euro.

Exemple 3 : Si les taux d’intérêt en dollars sont de 6%, et ceux en euros sont de
4%. Si le dollar est susceptible de se déprécier de 2% face à l’euro au cours de l’année.
Dans ce cas de figure, les deux dépôts offrent la même rentabilité anticipée. Les
investisseurs seront donc indifférents entre les placements en dollars et les placements
en euros. Dans ce cas-là, on peut dire que le marché des changes est à l’équilibre.

21
Le marché des changes est à l’équilibre si et seulement si la parité des taux
d’intérêt (P.T.I) est satisfaite. La représentation mathématique de la P.T.I est la
suivante :

R€ = R$ + (Ee-E)/E

R€ : C’est le taux d’intérêt à un an d’un dépôt en euros

R$ : C’est le taux d’intérêt à un an d’un dépôt en dollars

Ee : Le taux de change anticipé dans un an du dollar (euro à l’incertain)

E : Le taux de change au comptant à l’incertain pour l’euro

(Ee-E)/E : Le taux d’appréciation ou de dépréciation du dollar.

Voici en résumé comment le marché passe d’une situation de demande


excédentaire ou d’offre excédentaire à une situation d’équilibre. Si la rentabilité
anticipée des dépôts en dollars est supérieure à celle des dépôts en euros, le dollar
s’appréciera par rapport à l’euro. Cela s’explique par le fait que les investisseurs vont
vendre de l’euro (hausse de l’offre de l’euro) et acheter du dollar (hausse de la demande
du dollar). A l’inverse, le dollar se dépréciera face à l’euro si la rentabilité anticipée est
en défaveur de ce dernier

Exemple : voir le tableau 14.4 page 375 (chapitre 14)

R$ = 6%

Le taux de change courant est E : 1$ = 1 €

Ee : 1$ = 0,95 euro (à un an)

Le taux de dépréciation de l’euro (Ee-E)/E =[ (0,95-1)/1]*100 = -5%

Par rapport à la formule précédente : R€ = R$ + (Ee-E)/E, cela signifie qu’un dépôt


en dollars rapporte le taux d’intérêt R$ moins une prime de 5%= 6%-5% = 1%

Supposons que le taux de change au comptant entre les deux monnaies atteigne
brusquement 0,97 euro par dollar, le taux de change futur anticipé restant néanmoins à
0,95 euro par dollar. Qu’adviendra de la prime précédente, résultat de la perte de valeur
du dépôt en dollar mesuré en euro ? Le taux de dépréciation de dépréciation de l’euro
par rapport au dollar est maintenant de -2% par an =[(0,95-0,97)/0,97]*100 = -2% au

22
lieu de -5%. Comme R$ reste inchangé, la rentabilité anticipée du dépôt en dollar
exprimé en euro va augmenter à 6% - 2% = 4%

1.3- La parité des taux d’intérêt couverte

Nous allons voir dans cette section comment sont déterminés les taux de change
à terme. La méthode est identique à la parité des taux d’intérêt non couverte. La seule
différence est que le taux de change futur anticipé est remplacé par le taux de change à
terme. En optant pour ce dernier l’investisseur est certain du rendement qu’il va
réaliser, ce qui n’est pas toujours garanti dans le cas du taux de change anticipé puisque
l’anticipation peut s’avérer erronée.

Exemple : Soit F le prix à un an d’un dollar en euro. F : 1$=0,90 € tandis que

le taux de change au comptant E : 1$= 0,93 €

R$ = 8% ou 0,08 et R€ = 4% ou 0,04

Quelle est la rentabilité d’un dépôt de 1$ couvert en euros ?

Réponse : Un dépôt de 1$ coûte 0,93 € aujourd’hui et vaudra 1,08$ dans un an. Si on


vend aujourd’hui 1,08$ à terme au taux de change de 0,9 € par dollar, alors à la fin de
l’année, notre placement attiendra une valeur en dollar de 1,08$ * 0,9€ =0,972 €.

La rentabilité de l’achat avec couverture d’un dépôt en dollars exprimé en euros


est alors de =[ (0,972-0,93)/0,93]*100 = 4,5%= 0,045. Ce chiffre est supérieur au taux de
rentabilité de 4% offert par les dépôts en euros. La parité des taux d’intérêt couverte
n’est donc pas vérifiée. Dans ces conditions, aucun investisseur ne voudra détenir des
dépôts en euros, préférant les dépôts en dollars couverts. La formule de la parité des
taux d’intérêt couverte est la suivante :

R€ = R$ + (F-E)/E

La différence avec la parité non couverte est qu’au lieu du taux de change
anticipé Ee (non garanti), nous avons un taux à terme F (garanti). C’est pour cela qu’on
l’appelle la parité des taux intérêt couverte.

De manière générale, il existe une forte corrélation entre les variations des taux
de change au comptant et les variations des taux de change à terme. Cette corrélation

23
se vérifie pour les principales devises. En revanche, la parité des taux d’intérêt non
couverte (PTINC) ne se vérifie pas toujours.

2. Le solde du compte courant (balance courante) et l’évolution des taux de


change

Les variations des taux de change ont un impact direct sur le commerce
extérieur. En effet, le solde de la balance courante est déterminé principalement par
deux facteurs : le taux de change réel7 et le revenu disponible8. Les variations du taux de
change réel reflètent les modifications des prix des biens et services domestiques
comparativement aux prix des biens et services étranger. Ils sont donc déterminants
pour l’équilibre de cette balance. Le revenu disponible (revenu après impôt) agit sur la
balance courante via les dépenses courantes des ménages domestiques. Dans cette
section nous limiterons l’analyse à l’impact de de la variation des taux de change sur
l’équilibre de la balance courante.

2.1- Exemple

Avant d’aller dans le cœur de l’analyse prenons un exemple pour illustrer le taux
de change réel

Supposons ici que l’euro est coté à l’incertain contre le dollar américain

P* c’est le prix d’un panier de biens et services les plus fréquemment


consommés aux États-Unis (panier représentatif). P* = 200$

P : c’est le prix d’un panier de biens et services les plus fréquemment


consommés dans la zone euro. P = 160€

E : le taux de change nominal de l’euro (côté à l’incertain) face au dollar9.

E= 0, 8 soit 0,8 euro pour 1 dollar

Le taux de change réel = q

q = (E. P*)/P = (0,8. 200)/160 = 1


7
Le taux de change nominal, parfois appelé taux de change tout court est le rapport entre deux monnaies.
Autrement dit, c’est le prix relatif entre deux monnaies. Exemple 1€= 1,3522 S CAD. Le taux de change
réel quant à lui, est le prix relatif de deux paniers de biens et services (domestique et étranger).
8
En réalité, d’autres facteurs parmi lesquels figure le niveau des dépenses étrangères influencent ce
solde. Par souci de simplification, les auteurs ne retiennent, à ce stade, que ces deux facteurs.
9
D’ordinaire, l’euro est côté au certain et le dollar à l’incertain. Mais, dans ce livre chaque fois qu’on traite
d’une monnaie, le taux de change est supposé être à l’incertain.

24
Ici, q correspond au prix en euros d’un panier américain par rapport au panier
européen.

Une augmentation du taux de change à l’incertain de l’euro 10% avec E passant


de 0,8 euro pour 1 dollar à 0,88 euro pour dollar, induit une hausse de q qui passe de 1 à
1,1. q= (0,88 . 200)/160 = 1,1. Si le prix d’un panier américain en euros passe de 1 à 1,1
alors cela signifie une dépréciation réelle de 10% de l’euro par rapport au dollar.

Autrement dit une hausse du taux de change réel signifie une dépréciation. Cela
peut sembler surprenant ou contre intuitif. Mais, il ne faut surtout pas perdre de vue
qu’il s’agit du taux de change à l’incertain.

2.2- L’impact d’une variation du taux de change réel sur le solde du compte
courant

Toutes choses étant égales par ailleurs, que se passe-t-il en matière de


commerce extérieur lorsque le taux de change réel varie ?

- Lorsque q ou E.P*/P augmente, cela signifie que les biens et services


étrangers deviennent plus chers par rapport aux biens et services
domestiques. Les consommateurs non-résidents vont demander plus de
produits importés. Son corolaire c’est une hausse des exportations du pays
domestique et une amélioration du solde de sa balance courante.

- L’effet de cette augmentation du taux de change réel sur les importations est
plus ambigu. Les consommateurs résidents vont certes moins acheter de
biens et services étrangers. Mais cela n’implique pas que les importations
diminuent forcément. En effet, on considère ici la valeur des importations
mesurée en unités de biens domestiques et non le volume des biens et
services importés (ici c’est le raisonnement par les termes de l’échange). La
hausse de EP*/P accroît la valeur des biens importés en termes d’unités de
biens domestiques. Autrement dit, la valeur des importations peut
augmenter même si le volume de ses importations baisse. Par conséquent,
l’effet d’une modification des taux de change sur le solde de la balance
courante (ou du compte courant demeure ambigu).

25
- L’impact final dépendra de l’effet dominant entre l’effet valeur et l’effet
volume. Si on suppose que l’effet volume l’emporte, alors il y aura une
amélioration du solde de la balance courante.

2.3- Les taux de change et la courbe en J

Nous avons vu qu’une dépréciation du taux de change améliore le solde de la


balance courante, toutes choses étant égales par ailleurs. En réalité, le processus
d’ajustement des importations et des exportations est graduel.

26
Souvent le solde de la balance courante commence par se détériorer, ce qui peut
sembler contradictoire. Comment l’expliquer ?

En matière de commerce international, les contrats d’importations et d’exportations


de biens et services sont signés pour au moins quelques plusieurs semaines voire une
année. Les premiers mois suivants la dépréciation réelle de la monnaie, les volumes
exportés et importés évoluent peu. En revanche, la valeur des importations augmente
sensiblement tandis que les exportations mesurées en termes de production
domestique ne changent pas. On assiste alors à une détérioration de la balance
courante. Ce n’est que lorsque les nouveaux contrats commencent à être signés, sur la
base du nouveau taux de change, que nous insisterons à une inversion de la tendance.
Après un certain délai, variant de quelques semaines à une année, le volume des
exportations augmentera, tandis que celui des importations baissera, nous aurons alors
une amélioration du solde de la balance commerciale ainsi que celui du compte courant.

3. Les déterminants de la variation du taux de change

Même si les taux de change peuvent réagir à court terme à diverses annonces ou
facteurs, économiques ou géopolitiques, les taux de change sont fondamentalement
déterminés par les différences de niveaux de prix (parité des pouvoirs d’achat), et donc
aussi le solde de la balance courante et à court terme par les différentiels de taux
d’intérêt.

3.1- Le différentiel de taux d’intérêt ou la parité des taux d’intérêt

Toutes choses étant égales par ailleurs, si les taux d’intérêt à court terme
augmentent au Canada, cela rend actifs canadiens plus rémunérateurs. Les investisseurs
étrangers (ainsi que les investisseurs canadiens qui ont des fonds à l’étranger) vont
vouloir faire des placements en dollar canadien. Ils vont alors vendre leurs monnaies
domestiques pour acheter des dollars canadiens en prélude à ces placements. Ainsi, si
des investisseurs britanniques veulent faire des placements à court terme en achetant
des Bonds de Trésor canadiens, ils vont vendre la livre sterling qui sera alors offerte et
vont acheter des dollars (hausse de la demande). Dans ce cas, le $ canadien va
s’apprécier face à livre sterling. Et pour ce qui est du taux de change ? A ce niveau, si on
raisonne comme Krugman et les autres auteurs du livre à l’incertain, alors le taux de
change du dollar canadien va baisser tandis que celui de la livre sterling va augmenter. A

27
l’inverse, si la cotation est au certain, c’est le taux de change du dollar canadien qui va
augmenter et la celui de la livre sterling va baisser.

En résumé, ce qu’il faut retenir est que, toutes choses étant égales par ailleurs
(autrement dit, si tout reste inchangé sauf un, les taux d’intérêt dans le cas présent)

- Une hausse des taux d’intérêt dans le pays domestique → entraine une
appréciation de la monnaie du pays domestique et une dépréciation de la
monnaie du pays étranger.

- Une baisse des taux d’intérêt dans le pays domestique → entraine une
dépréciation de la monnaie du pays domestique et une appréciation de la
monnaie du pays étranger.

- Une hausse des taux d’intérêt dans le pays étranger → entraine une
appréciation de la monnaie du pays étranger et une dépréciation de la
monnaie du pays domestique.

- Une baisse des taux d’intérêt dans le pays étranger → entraine une
dépréciation de la monnaie du pays étranger et une appréciation de la
monnaie du pays domestique.

3.2- Le solde de la balance courante

Précédemment, nous avons montré comment la variation du taux de change réel


influence le solde du compte courant. Mais, il faut savoir que la relation entre ces deux
variables n’est pas univoque. Si la variation des taux de change a un impact direct sur le
solde de la balance courante, l’évolution des exportations et des importations des biens
et services n’est pas sans effet le taux de change des monnaies. Analysons les effets de
la variation des exportations et des importations du pays domestique sur le taux de
change entre la monnaie de ce pays domestique et la monnaie du pays étranger avec
lequel se fait le commerce des biens et services

3.2.1- Variation des exportations et des importations et évolution des taux de


change

28
Une augmentation des exportations d’un pays entrainera, toutes choses étant
égales par ailleurs, une entrée de devises étrangères dans ce pays, notamment des
dollars américains10. Mais à l’intérieur du pays, les salaires, les impôts, les fournisseurs
et les différentes dépenses sont faites dans la monnaie locale. Dans cette optique, les
entreprises exportatrices vendront une partie11 de leurs devises étrangères pour acheter
la monnaie domestique. L’offre de la devise étrangère (ou des) augmentera, tandis que
la demande de la monnaie domestique sera également à la hausse. Résultat de ces
mouvements, la monnaie domestique va s’apprécier (baisse de son taux de change si
elle cotée à l’incertain ou hausse de ce même taux de change si la cotation est au
certain). La devise étrangère offerte va au contraire se déprécier (hausse du taux de
change à l’incertain ou baisse du taux de change si la cotation est au certain).

Une augmentation des importations d’un pays entrainera, toutes choses étant
égales par ailleurs, une sortie de devises étrangères de ce pays, notamment des dollars
américains. En effet, le pays doit bien payer les biens et services importés. Mais pour
obtenir ces devises (notamment des dollars américains) Il faut les acheter, et pour cela,
les entreprises de ce pays doivent vendre la monnaie domestique. Cette dernière sera
donc offerte tandis que la devise étrangère (ou les devises étrangères) sera demandée.
Résultat de ces mouvements, la monnaie domestique va se déprécier (hausse de son
taux de change si elle cotée à l’incertain ou baisse de ce même taux de change si la
cotation est au certain). La devise étrangère demandée va au contraire s’apprécier
(baisse du taux de change à l’incertain ou hausse du taux de change si la cotation est au
certain).

Mais qu’en est –il lorsque les exportations ou les importations sont à la baisse ?

Un recul des exportations d’un pays entrainera, toutes choses étant égales par
ailleurs, une moindre entrée de devises étrangères dans ce pays, notamment moins de
dollars américains. Dans cette perspective, les entreprises exportatrices vendront moins
de devises étrangères et achèteront également moins de monnaie domestique. L’offre
de la devise étrangère (ou des) diminuera au même titre que la demande de la monnaie
domestique, qui sera également en recul. Résultat de ces mouvements, la monnaie
domestique, moins demandée, va se déprécier (hausse de son taux de change si elle
cotée à l’incertain ou baisse de ce même taux de change si la cotation est au certain). La
10
Car en matière de commerce international, plusieurs marchandises sont facturées en dollar américain,
même si la transaction n’implique pas les États-Unis.
11
L’autre partie sera investie à l’étranger (voir la balance des paiements).

29
devise étrangère, moins offerte va au contraire s’apprécier (baisse du taux de change à
l’incertain ou hausse du taux de change si la cotation est au certain).

Un recul des importations d’un pays entrainera, toutes choses étant égales par
ailleurs, une moindre sortie de devises étrangères de ce pays, notamment moins de
sortie de dollars américains. Dans ce cas, les entreprises importatrices vendront moins
la monnaie domestique et achèteront également moins la devise étrangère. L’offre de la
monnaie domestique diminuera au même titre que la demande de la devise étrangère,
qui sera également en recul. Résultat de ces mouvements, la monnaie domestique,
moins offerte, va s’apprécier (baisse de son taux de change si elle cotée à l’incertain ou
hausse de ce même taux de change si la cotation est au certain). La devise étrangère,
moins demandée va au contraire se déprécier (hausse du taux de change à l’incertain ou
baisse du taux de change si la cotation est au certain).

En résumé :

Appréciation de la monnaie domestique

Une hausse des exportations

Dépréciation de la monnaie étrangère

Dépréciation de la monnaie domestique

Une hausse des importations

Appréciation de la monnaie étrangère

30
Remarque : La hausse des exportations a le même impact sur les taux de change que la
baisse des importations mais les mécanismes conduisant à ce résultat sont différents.
De la même façon une baisse des exportations a le même effet sur les taux de change
qu’une augmentation des importations. Dans ce cas également, les mécanismes
explicatifs (les mouvements des courbes d’offre et de demande) sont différents.

Dépréciation de la monnaie domestique

Un recul des exportations

Appréciation de la monnaie étrangère

Appréciation de la monnaie domestique

Un recul des importations

Dépréciation de la monnaie étrangère

3.2.2- Variation du solde du compte courant et évolution des taux de change

Au terme de ce détour, il est important de lever partiellement l’hypothèse ceteris


paribus, ou toutes étant égales par ailleurs. Dans cette section, nous considérerons le
changement simultané des exportations et des importations. Puisque la hausse ou la
baisse simultanée des exportations et des importations donne des résultats opposés
concernant l’évolution des taux de change, nous prendrons en compte le solde de la
balance courante à travers le solde la balance commerciale12 (X-M).

12
Qui est la composante essentielle de la balance courante.

31
Si le solde (X-M) augmente, cela signifie que le solde de la balance commerciale
s’améliore. Cette amélioration peut signifier une hausse de l’excédent commercial ou
bien une baisse du déficit commercial. Mais, dans les deux cas la monnaie du pays
domestique va s’apprécier (baisse du taux de change à l’incertain ou hausse de son taux
de change au certain) tandis que la devise du pays étranger avec lequel elle échange va
se déprécier (hausse du taux de change à l’incertain ou baisse de ce taux de change si la
devise étrangère est cotée au certain).

A l’inverse, si le solde (X-M) diminue, cela signifie une détérioration du solde de la


balance commerciale. Cette détérioration peut signifier une baisse de l’excédent
commercial ou bien un creusement du déficit commercial. Mais, dans les deux cas la
monnaie du pays domestique va se déprécier (hausse du taux de change à l’incertain ou
baisse de son taux de change au certain) tandis que la devise du pays étranger avec
lequel elle échange va s’apprécier (baisse du taux de change à l’incertain ou hausse de
son taux de change si la devise étrangère est cotée au certain).

Appréciation de la monnaie domestique

Une hausse du solde (X-M)

Dépréciation de la monnaie étrangère

Dépréciation de la monnaie domestique

Un recul du solde (X-M)

Appréciation de la monnaie étrangère

32
3.3- Le niveau général des prix

Le déterminant fondamental de l’évolution des taux de change à long terme est le


niveau général des prix.

3.3.1- La loi du prix unique

La loi du prix unique stipule que des marchés compétitifs, sans coûts de
transport et sans barrières aux échanges commerciaux (droits de douane, quotas,…) des
biens identiques commercialisés dans des pays différents doivent être vendus au même
prix, lorsqu’ils sont exprimés dans la même monnaie. Supposons que le taux de change
du dollar canadien contre livre sterling est de 2 $ CAD = 1 £. Si un ordinateur se vend à
500 $ CAD à Montréal, son prix doit être de 500/2 = 250 £ à Londres. Supposons
maintenant que le prix des ordinateurs à Londres augmente et passe à 270 £. Comme le
taux de change exprime le rapport des prix, il va évoluer. La nouvelle parité sera donc de
500$/270£ = 1,85185 $ CAD= 1 £. Ici le taux de change à l’incertain du dollar canadien
diminue. Autrement dit le $ canadien s’apprécie par rapport à la livre sterling. Celle-ci se
déprécie suite à une hausse des prix domestique au Royaume-Uni. Cette conclusion
semble très logique dans la mesure où le pouvoir d’achat d’une monnaie est
inversement proportionnel au niveau général des prix constaté dans un pays.

Cette corrélation entre l’évolution du niveau des prix et celle des taux de change
est encore plus élaborée dans la théorie de la parité des pouvoirs d’achat (P.P.A).

3.3.1- La théorie de la parité des pouvoirs d’achat

La théorie de la parité des pouvoirs vient d’une idée développée aux XIX siècle par
des économistes, parmi lesquels, figure David Ricardo. Elle stipule que le taux de change
entre deux monnaies doit être égal au rapport du niveau des prix dans les deux pays.

33
Soit P€ : le prix en euros d’un panier de biens de référence vendu dans la zone euro

P$ : le prix en dollars de ce même panier de biens vendu aux États-Unis

A cette étape, on suppose que le panier des biens de référence est le même dans les
deux pays.

Formellement, la PPA se présente comme suit : E= P€ / P$

Le taux de change à l’incertain de l’euro (nombre d’euros pour un dollar)

Ainsi, le panier de biens de référence coute 200$ aux États-Unis et 160 € dans la
zone euro, alors le taux de change sera de 0,8 E= 160/200. Si le niveau de prix était deux
fois plus élevé dans la zone euro, E= 320/200 = 1,6 euros pour un dollar.

E= P€ / P$ donc P€ = P$ *E

A gauche P€, c’est le prix en euros d’un panier de biens européens.

A droite, P$ *E représente le prix en euros du même panier de biens mais acheté aux
États-Unis. Il exprime le pouvoir d’achat de l’euro lorsqu’il échangé en dollars puis
dépensé aux États-Unis

Les deux prix sont les mêmes si la PPA est vérifiée. C’est le cas lorsque le pouvoir
d’achat exprimé en monnaie domestique est toujours identique à celui exprimé en
monnaie étrangère.

La PPA énonce que le niveau général des prix dans le pays domestique et à l’étranger
est égal quand ces derniers sont mesurés dans la même monnaie.

La différence entre la loi du prix et unique et celle de la parité des pouvoirs d’achat
(P.P.A) et que la première est appliquée pour deux bien particuliers alors que la PPA
s’applique au niveau général des prix. Elle est donc moins contraignante. Sa validité
n’exige pas que la loi du prix unique soit systématiquement vérifiée pour tous les biens.

Enfin, pour mieux comprendre le fonctionnement de la PPA, il faut savoir que


lorsque les biens et services deviennent plus coûteux dans un pays, la demande pour les
produits de ce pays diminue → ce qui diminue également la demande de la monnaie de
ce pays. Le taux de change est alors affecté (la monnaie de ce pays de déprécie et son
taux de change à l’incertain augmente). Cet ajustement permet à la PPA d’être vérifiée.

34
3.3.2- PPA absolue et PPA relative

La PPA qui décrit le taux de change comme le rapport du niveau général des prix est
la PPA absolue. La PPA relative stipule que c’est la variation en pourcentage du niveau
de prix entre deux pays sur une période donnée qui est égale à la variation du taux de
change entre les monnaies de ces deux pays. A titre d’exemple, si le niveau de prix au
Japon progresse de 1% tandis que la progression est de 3% au Canada, alors la PPA
relative prédit une dépréciation de 2% du dollar canadien par rapport au yen japonais.
Cette dépréciation de 2% élimine la différence de 2% qu’il y a entre l’inflation au Canada
et l’inflation au Japon, tout en laissant le pouvoir d’achat relatif de chaque monnaie
inchangée. La même chose se produira dans le cas de n’importe quel couple de devises.

Formellement la PPA relative entre la zone euro et les États-Unis s’écrit de la façon
suivante :

(Et-Et-1)/Et-1 = (π€,t-π$,t)

Avec :

πt : est le taux d’inflation. πt = (Pt-Pt-1)/Pt -1 soit la variation en pourcentage du niveau


général des prix entre la date t et la date t-1.

A la différence de la PPA absolue, la PPA relative est valable sur un intervalle de


temps pendant lequel le niveau général des prix et le taux de change vont varier

Quel est l’intérêt de la PPA relative ?

Les instituts nationaux de statistiques ne calculent pas leurs indices de prix à partir
d’un panier de bien standardisé au niveau international. Or la PPA n’a de pertinence que
si les deux paniers de biens qui servent à la comparaison sont identiques. En effet, il n’y
a pas de raison pour que des paniers de biens différents soient vendus au même prix. En
revanche, il est plus concevable de comparer les variations en pourcentage du taux de
change avec des différentiels d’inflation, même si les paniers de biens sont différents

Empiriquement, les prédictions de la théorie de la PPA ne sont pas souvent vérifiées.


Diverses explications expliquent ce décalage entre les prédictions théoriques et les
résultats empiriques.

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- D’abord les coûts de transport sont loin d’être négligeable, ce qui limite les
échanges de certains biens. Les grandes différences dans le prix du Big Mac
(même produit) entre pays s’explique en partie par ces coûts ;

- Ces limites aux échanges proviennent également des outils protectionnistes


qui n’ont pas totalement disparu ;

- Les pratiques monopolistiques et oligopolistiques ne sont pas de nature à


permettre un libre fonctionnement du marché. Il y a également une
segmentation des marchés. A titre d’exemple, Hydro Québec applique des
prix différents entre l’électricité exportée et celle destinée au marché
domestique. En 2007, le prix de la Ford Focus était plus élevé de 5000 euros
qu’en Allemagne ;

- Les statistiques d’inflation sont basées sur des paniers de biens différents.
Dans ces conditions, La PPA ne peut être vérifiée même en l’absence de
barrières aux échanges.

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