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8 de gestion
Daniel BOUDIN
Chief Risk Officer, Europ-Assistance Holding
SOMMAIRE
Section 1 Le contrôle budgétaire et les frais de gestion
Section 2 Le contrôle et l’élaboration du compte technique
Section 3 Modèle de compte technique (simplifié) société « non-vie »
L’assurance est certes bâtie sur la répartition des risques et leur harmonique
dispersion, mais surtout sur l’utilisation des enregistrements statistiques des
données relatives à ces risques. Cela est vrai au niveau macroéconomique
de la profession, mais de manière encore plus exacte et plus adéquate, au
niveau de chacune des entreprises du secteur, tant chacune présente des
profils de portefeuille différents dus soit à la nature des réseaux
d’apporteurs, soit à des spécificités géographiques d’implantation, soit à la
nature et à l’importance relative des branches d’assurance dans lesquelles
l’entreprise a choisi de se développer.
C’est la structure du portefeuille, sa qualité, sa connaissance approfondie,
son évolution dans le temps et l’espace, qui vont orienter la formation et la
production des résultats techniques, la rentabilité et la solvabilité
indispensable.
Les entreprises d’assurance ont besoin de flux d’informations :
– normées (du fait de l’enregistrement comptable spécifique des opérations
d’assurance) ;
– fiables pour des besoins de contrôle tant externe qu’interne ;
– disponibles dans les délais propres à l’élaboration des comptes techniques
et adéquats avec la réactivité nécessaire en terme de mesures correctrices
ou innovantes à mettre en œuvre.
Le contrôle de gestion est donc un organisme « fournisseur » de la
direction générale et en contact avec toutes les facettes opérationnelles de
l’entreprise.
Un de ses rôles majeurs consiste aussi à écarter le soupçon de faible
transparence qui accompagne souvent la production des seuls documents
comptables réglementaires.
Le pilotage du résultat va donc nécessiter, pour aboutir à l’alimentation de
chacune des lignes du compte technique et à la détermination des multiples
ratios suivis dans le secteur, le déploiement et le suivi d’innombrables
données sous des formes extrêmement détaillées et sur des historiques
variables selon la duration des branches.
Nous verrons donc dans une 1re section le contrôle budgétaire et le suivi
des frais de gestion puis nous aborderons la constitution du compte
technique via chacun de ses éléments constitutifs.
Section 1 LE CONTRÔLE BUDGÉTAIRE ET LES FRAIS
DE GESTION
La notion de « frais de gestion » recouvre deux concepts dans le secteur
assurantiel :
• tous les frais généraux, personnel, loyers, transports, déplacements,
missions/réception, publicité/marketing, impôts, taxes, dotations
innombrables, etc. Ces frais sont enregistrés selon le plan comptable
général (PCG) par nature (classe 9) avant d’être répartis par destination
(classe 6). Par ailleurs, certaines dotations relatives aux placements
rejoignent le solde financier en tant que charges de placements inhérents
aux compagnies ;
• les commissions versées aux divers intermédiaires.
Le poids des frais de 5 à 10 % en vie, de 25 à 40 % en non-vie par rapport
au chiffre d’affaires, explique amplement l’incidence de ce poste sur le
résultat, et la maîtrise de ces frais est donc un enjeu majeur des sociétés
« non-vie ».
Les sociétés doivent satisfaire aux obligations légales d’information et à
leurs besoins internes : par exemple, des contraintes de présentation ou de
classement par type d’activité, par nature, par destination, par catégories
réglementaires (ministérielles), et en interne pour l’affectation par branche,
par produit, par marché, par zone géographique ou unités de
production/gestion.
Cela les a conduits à mettre en place un contrôle et un suivi budgétaire
pour identifier les éléments internes de compétitivité, apprécier le coût et
l’utilité de certaines tâches voire services organisationnels. Pour cet aspect,
le contrôle de gestion sera en charge :
– d’établir les budgets annuels ou pluriannuels de fonctionnement ;
– de les réviser périodiquement ;
– de constater le déroulement temporel des enregistrements ;
– d’analyser les écarts de réalisation par rapport au cadencement des
prévisions ;
– de proposer des mesures de réalignement.
Voyons successivement les contraintes externes de présentation puis le
classement des frais, enfin les besoins internes au regard des données
nécessaires au suivi de l’activité.
1 Le compte de résultat
L’objectif est de disposer des éléments contrôlés, ajustés et projetés, propres
à alimenter le compte de résultat qui, sous une forme très synthétique
pourrait se présenter comme suit :
Figure 8.1 – Résultat technique : exemple des points clés d’un compte technique « non-
vie »
Dans une version moins détaillée que le modèle complet, présenté en
section 3, et pour disposer en permanence du fil des éléments que nous
allons examiner, voici une version de synthèse sur laquelle nous suivrons
successivement tous les items. Son intérêt réside dans la présentation des
sept « pavés » de l’analyse, dans l’ordre de présentation du compte :
– les primes ;
– le financier ;
– la charge de la survenance ;
– la liquidation des antérieurs ;
– les autres prestations ;
– les frais d’acquisition et de gestion ;
– la réassurance.
Figure 8.2 – Compte de résultat technique « non-vie » – Version de synthèse
Le travail du contrôleur de gestion consiste donc à suivre par les tableaux
adéquats, l’ensemble des primes, puis la charge des sinistres, les frais
généraux évoqués en section 1, la réassurance et le financier.
Pour arriver à une compréhension de ces données il faut non seulement
travailler sur plusieurs dimensions, mais aussi disposer d’une analyse
précise du portefeuille assuré, de son évolution en structure et de sa
modification morphologique temporelle.
2 Le suivi du portefeuille
Il s’agit du suivi du « parc » et des « flux » qui composent le portefeuille.
Ce suivi est abordé en premier lieu car à l’évidence c’est le portefeuille en
cours qui va donner lieu à la survenance de sinistres d’une typologie, d’une
fréquence et de coûts en relation directe avec ce stock, et l’évolution de la
constitution quantitative et surtout qualitative de ce parc conditionnera
l’évolution de la fréquence, du quantum et du coût de la charge des
sinistres.
■■ La qualité du portefeuille
L’aspect qualitatif d’un portefeuille est une vision indispensable : le
bonus/malus par exemple en automobile, le classement des risques, ou la
nature des bâtiments et de leur occupation, leur localisation et leur nature
dans les assurances dommages des entreprises, les catégories
socioprofessionnelles en assurances de personnes et accidents, etc.
■■ L’incrémentation manuelle
Dans le cas le plus simpliste, le coût prévisible est incrémenté
manuellement lors de l’ouverture pour les dossiers et dans les branches
semblant plus « techniques », les corporels automobile, les sinistres de
responsabilité professionnelle, les branches « entreprises » en général…
C’est un rédacteur spécialisé qui va estimer la charge probable, soit au vu
d’éléments juridiques et factuels, soit à l’aide de tables internes ou
professionnelles d’expérience, des barèmes propres à certains secteurs.
■■ L’objectif du suivi
Le but final du suivi de ces charges est de pouvoir avec une marge de
certitude la plus grande possible, connaître par avance la charge finale qui
résultera des sinistres connus ou des sinistres encore inconnus mais qui
doivent être rattachés à leur exercice de survenance, ainsi que la charge
complémentaire à mettre sur les sinistres connus mais insuffisamment
évalués. Ce sont tous les calculs des provisions dites IBNR et IBNER, ainsi
qu’en branche construction de la PSNEM (Provision pour sinistres non
encore manifestés). Les méthodes actuarielles utilisées pour ce faire sont
variables, étant entendu qu’un contrôle robuste utilise plusieurs de ces outils
conjointement pour affiner et fiabiliser les charges finalement attendues.