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Bases pharmacologiques de

l'optimisation des traitements


antibiotiques
Sylvain Goutelle
UV DES – Pharmacologie & Toxicologie
Avril 2018
Objectifs pédagogiques
• Citer les facteurs pharmacocinétiques et pharmacodynamiques
importants pour l’évaluation des antibiotiques
• Définir les termes concentration-dépendance, temps-
dépendance et citer des exemples d’antibiotiques
• Expliquer des relations PK/PD pour les classes des bêta-
lactamines, aminosides, glycopeptides, fluoroquinolones
• Citer des toxicités d’antibiotiques corrélées à l’exposition
• Expliquer le rationnel des schémas posologiques optimaux pour
les classes des bêta-lactamines, aminosides, glycopeptides,
fluoroquinolones
• Expliquer le concept de « mutant selection window »
• Citer les populations de patients spéciales sur le plan de
l’antibiothérapie et les implications thérapeutiques
Bases pharmacologiques de l'optimisation des
traitements antibiotiques

• Notion de sensibilité et de résistance


• Propriétés PK et PD importantes dans l’évaluation des ATB
• Indices PK/PD
• Mode d'administration optimal
• Prise en compte de la toxicité
• Développement de la résistance
• Calcul de la dose optimale
• Importance des dosages sanguins
• Importance des comorbidités: neutropénie, mucoviscidose, brûlés, réa
NOTIONS DE SENSIBILITÉ ET
RÉSISTANCE
Interactions bactérie-antibiotique

• Les antibiotiques sont des toxiques pour les bactéries


• Les effets biologiques sur les bactéries dépendent directement
de la concentration de l’antibiotique au contact avec la bactérie
• L’effet antibactérien et le développement de la résistance sont
concentration-dépendants

• Conséquences in vivo
• La guérison est conditionné par l’éradication de la bactérie
pathogène
• L’éradication dépend de la capacité de l’antibiotique à exercer un
effet antibactérien (bactériostase ou bactéricidie)
• Rôle de la PK: capacité à atteindre des concentrations libres
suffisantes au niveau du site infecté
• Rôle de la PD: susceptibilité intrinsèque de la souche à
l’antibiotique (CMI, résistance)
Sensibilité et résistance
Notion de concentration critique

• Valeur permettant de classer une souche comme S, I ou R vis-à-vis d'un


ATB donné.

C  C( Tmax )  C( Tmax  T1/ 2 )  C( 4 h ). fu

• Les C(t) sont calculées pour la posologie normale (concentration critique


basse, c) et la plus élevée (concentration critique haute, C)

• Modification en fonction des populations résistantes

• Arrondissement à une puissance de 2

• Transformation en diamètre d'inhibition (courbe de concordance)


Sensibilité et résistance
Notion de concentration critique

Image CDC Image Indian Journal Medical Microbiology


Sensibilité et résistance
Souches S, I, R

• Souche S = sensible I = intermédiaire R = résistante

• Souche sensible: CMI < c


• Souche résistante: CMI > C
• Souche intermédiaire: c < CMI < C

Espèces S, I, R

• Espèce sensible: CMI90 < c


• Espèce résistante: CMI50 > C
• Espèce intermédiaire (modérément sensible):
90% des souches ont une CMI comprise entre c et C.
Sensibilité et résistance
Notion de CMI

• Concentration inhibant toute croissance visible en culture


• Nombreux facteurs de variabilité
• Type de milieu (solide/liquide)
• Conditions physico-chimique (température, pH…)
• Souche microbienne
• Opérateur

•Variabilité parfois forte


• Inter-laboratoire
• Intra-laboratoire

• Précision limitée d’une CMI individuelle


• Le classement S, I, R d'une souche peut être erroné
• Considérer la CMI populationnelle
Sensibilité et résistance
Notion de CMI

Concordance entre deux méthodes de détermination de la CMI

Hoogkampe-Korstanje JAC 1997


Sensibilité et résistance
Sensibilité et résistance
Notion de CMI

Varabilité analytique de la CMI de la vancomycine par la méthode de


référence
Sensibilité et résistance
PROPRIÉTÉS PHARMACOCINÉTIQUES ET
PHARMACODYNAMIQUES IMPORTANTES
DANS L’ÉVALUATION DES ANTIBIOTIQUES
Critères d'évaluation spécifiques aux ATB

• Spectre antibactérien: espèces S, I, R


• Mécanismes de résistance
• Facteurs contribuant à la sélection de mutants résistants
• Caractéristiques de l'activité bactéricide
• Liaison aux protéines
• Pénétration intracellulaire et tissulaire
• Corrélation PK-PD (relation entre exposition et bactéricidie)
• Associations possibles
Quatre propriétés PD importantes pour
l'optimisation du mode d'administration

Définitions

• Effet temps ou concentration-dépendant

• Effet post-antibiotique

• Effet inoculum et effet Eagle

• Résistance adaptative
Propriétés pharmacodynamiques importantes
1. Type de bactéricidie

Vitesse de bactéricie temps- ou concentration-dépendante


Propriétés pharmacodynamiques importantes
1. Type de bactéricidie

Vitesse de bactéricidie de la tobramycine sur une souche de P.


aeruginosa et de l’amoxicilline sur une souche de E. coli en
fonction de la concentration

Maire et al. Précis de bactériologie clinique 2000


Propriétés pharmacodynamiques importantes
2. Effet post-antibiotique

• Absence de recroissance bactérienne alors que l’ATB n’est plus ou


quasiment plus présent dans le milieu (in vitro) ou à concentration < au
seuil d’efficacité (in vitro)
• S’explique par des dommages durables sur la biologie des bactéries

L'EPA concerne :
• La majorité des ATB actifs sur les streptocoques et les staphylocoques,
aminosides et fosfomycine exceptés

• Les aminosides, les quinolones, parfois l'imipénème, éventuellement la


fosfomycine, sur les BGN, dont P. aeruginosa
Propriétés pharmacodynamiques importantes
2. Effet post-antibiotique

• EPA est une propriété favorable, augmentant l’effet


antibactérien pour un schéma posologique donné
• Dépend de la souche, de l'inoculum
• Dépend de l'AUC de l'antibiotique
• Plus prolongé in vivo qu'in vitro
• Plus court en cas d'immunodépression (rôle de l’immunité
dans l’EPA in vivo)
Propriétés pharmacodynamiques importantes
2. Effet post-antibiotique

Influence de l'immunodépression sur la durée de l'EPA

10 Contrôle
Animal neutropénique
9
Log CFU/Cuisse

8 Animal
7 J EPA = 7.1 h immunocompétent

6
5 EPA = 13.4 h
4
0 4 8 12 16 20 24
Temps (h)
CRAIG, J. Chemotherapy, 1995
Propriétés pharmacodynamiques importantes
3. Effet inoculum

• Effet inoculum: baisse de l'activité ATB en présence d'un inoculum


élevé: élévation de CMI
• Concerne les bêta-lactamines et les glycopeptides
• Justifie l'association bêta-lactamine + aminoside
Propriétés pharmacodynamiques importantes
4. Résistance adaptative
Evolution de la CMI du germe après une exposition à l'ATB

CMI

Temps
0 24 h

ATB concernés : aminosides


Propriétés pharmacocinétiques importantes
1. Liaison aux protéines

• In vitro, en culture, la CMI est déterminé en l’absence de protéine


plasmatique de liaison: 100% de la concentration est libre et active
• In vivo, la liaison aux protéines réduit la fraction libre
• Seule la forme non-liée diffuse librement dans les tissus et est active
• Forte liaison au protéine => restriction de l’activité

Type de liaison
restrictive permissive peu lié
bétalactamines* aminosides
vancomycine* et + téicoplanine* fluoroquinolones
* albumine + IgA
Propriétés pharmacocinétiques importantes
Importance de la liaison aux protéines sur la CMI

rapport de CMI dans Alb 50 g/l / CMI dans bouillon


18
Lié / Non lié dans alb. 50 g/l
14
S. aureus
11 11
E. coli
P. aeruginosa

2.8 3.0 2.9


1.9

Ceftriaxone (LP = 93%) Moxalactam (LP = 64%)

La liaison des ß lactamines à l'albumine est restrictive


CMI augmentée en présence de protéine si forte LP
Legett, 1989
Propriétés pharmacocinétiques importantes
Effet synergique du sérum

CMI Alb 50 g/l / CMI bouillon


CMI Sérum / CMI bouillon
Souches : E. coli, K. pneumoniae

Ceftriaxone Céfopérazone Moxalactam Ceftizoxime


LP : (93 %) (90 %) (64 %) (27 %)

La CMI est moins abaissé par la LP en présence de sérum


Rôle des composés antibactériens du sérum (complément)
Legett, 1989
Propriétés pharmacocinétiques importantes
2.a Pénétration intracellulaire

Pénétration intra Activité ATB


ATB
cellulaire intracellulaire
Bétalactamines 0 0
0 sauf rein et oreille
Aminosides 0
interne

Glycopeptides + à ++ +

Macrolides + à +++ ++

Fluoroquinolones ++ ++

Tetracyclines ++ ++
Propriétés pharmacocinétiques importantes
2.b Pénétration tissulaire

I. Théorie classique: Les dosages tissulaires sont inutiles car


H1. A l'équilibre, les concentrations libres dans le plasma et les liquides
interstitiels sont égales.
H2. Seule la concentration libre est active.
la concentration plasmatique libre permet de prévoir l'activité dans
les tissus.

Réfutation:
- L'équilibre n'est atteint qu'au bout de 5 demi-vies.
- Egalité des concentrations libres suppose diffusion passive.
- Suppose que la LP est restrictive et non saturable.
- Ne concerne pas les organes d'élimination.
- Ne concerne pas les infections intracellulaires.
- N'explique pas que l'efficacité dépende de la localisation.
Propriétés pharmacocinétiques importantes
2.b Pénétration tissulaire

II. Les dosages tissulaires sont trompeurs car:


1. Les -lactamines et les aminosides ne pénètrent pas dans les cellules
donc les dosages tissulaires sous-estiment la concentration interstitielle.
2. Les fluoroquinolones, macrolides et glycopeptides se concentrent dans
les cellules donc les dosages tissulaires sur-estiment la concentration
interstitielle.

Bon usage des concentrations tissulaires:

- Tissus liquides: LCR, humeur aqueuse, liquide synovial... : comparaison à


une CMI
- Tissus solides : comparaison de 2 modes d'administration.
Propriétés pharmacocinétiques importantes
2.b Pénétration tissulaire
Influence de la localisation tissulaire sur le pourcentage de succès dans les
infections à P. aeruginosa chez le neutropénique

% succès 85
68
60
52

19

Localisation Poumon Bactériémie Rectum Pharynx Urine


(8/42) (17/33) (16/27) (13/19) (11/13)

Bustamante, ICAAC 1984


Propriétés pharmacocinétiques importantes
2.b Pénétration tissulaire
Il est possible d'étudier la cinétique tissulaire chez l'homme : PETscan
Propriétés pharmacocinétiques importantes
2.b Pénétration tissulaire
Pharmacocinétique pulmonaire de l'azithromycine chez la souris :
la cinétique tissulaire dépend de la pathologie
15
C
Poumon non infecté
(µg/g)
10 Poumon infecté

0
0 24 48 72 96
Temps (h)
Vallee, AAC, 1992
Propriétés pharmacocinétiques importantes
2.b Pénétration tissulaire

Muscle

↑ Volontaires sains

Tissu
adipeux
SC

↓Patients

Concentration libres de pipéracilline après une dose unique de 4g dans le plasma et


les tissus chez 6 patients en choc septiques et 6 volontaires sains

Joukhadar Crit Care Med 2001


Propriétés pharmacocinétiques importantes
2.b Pénétration tissulaire

Joukhadar Crit Care Med 2001


INDICES PK/PD
SCHÉMAS POSOLOGIQUES OPTIMAUX
Principaux indices PK/PD des antibiotiques

Garraffo et Lavrut. Réanimation 2005


Principaux indices PK/PD des antibiotiques

Le profil des concentrations en réponse à une dose varie d’un individu à


l’autre => variations des indices PK/PD des ATB

Garraffo et Lavrut. Réanimation 2005


Relations PK/PD expérimentales

Bactéricidie des bêta-


lactamines

Ceftazidime / P.
aeruginosa

Bactéricidie des
fluoroquinolones

Temafloxacin /
S. pneumoniae

Craig. Infect Dis Clin N Am 2003


Relations PK/PD expérimentales

Bactéricidie de la
vancomycine

S. aureus

Rybak, CID 2006


Relations PK/PD expérimentales
Gatifloxacine, modèle animal, paramètres mesurés sur les concentrations
libres
Réduction bactérienne en log

2 souches de Salmonella enterica serotype Typhi:


Carrés, une souche sensible, CMI 0.5 mg/L
Cercles, une souche résistante, CMI 4 mg/L

Booker BM, 2005


Relations PK-PD des antibiotiques
Propriétés des prédicteurs d'efficacité
AUC/CMI, Cmax/CMI, T>CMI

• Indépendant de la CMI de la souche: s'appliquent aux souches S et R

• Indépendant de la molécule, dans une classe donnée, si la liaison aux


protéines est prise en compte

• Largement indépendant de la PK: permet la transposition de


l'animal à l'homme à condition de respecter le rapport

demi-vie / intervalle posologique

• Dépendant des co-morbidités (immunodépression, …)

• La valeur cible des prédicteurs peut dépendre de l'indication et/ou


de la localisation tissulaire de l'infection
Relations PK-PD des antibiotiques
Propriétés des prédicteurs d'efficacité
AUC/CMI, Cmax/CMI, T>CMI

Beta-lactamines et
pneumocoque

La valeur efficace de T>CMI est pratiquement constante pour une bactérie


donnée, quelle que soit sa sensibilité

Craig, Infect Dis Clin N AM 2003


Relations PK-PD des antibiotiques

ATB Type de bactéricidie Prédicteur d'efficacité


Aminosides
Fluoroquinolones
Daptomycine Concentration-dep AUC/CMI, Pic/CMI
Métronidazole
Télithromycine
Bétalactamines Temps-dep T>CMI
Vancomycine
Clindamycine
Macrolides Mixte AUC/CMI
Linézolide
Tétracyclines

Ambrose PG, 2007


Relations PK-PD des antibiotiques
Valeurs cibles des prédicteurs établies dans des études cliniques

ATB Indication Prédicteur d'efficacité

Aminosides Pneumonie noso. Pic/CMI, 5 à 10 (bid)


Pneumonie noso. fAUC/CMI, 62-75
Fluoroquinolones
Pneumonie com. fAUC/CMI, 34
Télithromycine Pneumonie com. fAUC/CMI, 3.4

Bétalactamines Pneumonie com. T>CMI, 40%


Cutané et tissus mous AUC/CMI, 110
Linézolide
Bactériémie AUC/CMI, 85
Tigécycline Cutané et tissus mous AUC/CMI, 18
Pneumonie,
Vancomycine AUC/CMI, 400
bactériémie
Relations PK-PD en clinique

Eradication bactérienne

86 82 n=74 patients avec une


81 pneumonie nosocomiale
% d'éradication

Emax = 86.4%
pour AUC/CMI de 350

30
22

AUC/CMI
62.5 125 250 500 >500
Forrest, 1993
Relations PK-PD en clinique

Corrélation entre T > CMI et l’éradication Probabilité de succès clinique dans des
bactérienne (S. pneumoniae ● et H. infections pulmonaires et de la
influenzae o) chez des enfants avec une otite peau/tissus mous (pointillés) traités par
bactérienne traités par bêta-lactamines lévofloxacine en fonction de Cmax/CMI

Craig et al. Pediatr Infect Dis J 1996


Rodvold. Pharmacother 2001
Relations PK-PD en clinique

Relation entre AUC/CMI et mortalité à 30 jours dans des bactériémies à


S. aureus

Holmes, AAC 2013


Impact des relations PK/PD sur le mode
d'administration optimal

1. ATB Temps-dépendant => perfusion continue ou doses fractionnées

ATB Conc.-dépendant => perfusion courte, forte dose unitaire

2. EPA longue durée => allongement de l'intervalle posologique

3. Résistance adaptative = perfusion courte, forte dose unitaire

4. Tenir compte de la relation concentration-toxicité éventuelle


Relations PK/PD et schéma posologique

Indice PK/PD Classe d’antibiotique Schéma posologique


corrélé à l’effet d’efficacité optimum

Maintenir les
Toutes les bêta-lactamines:
concentrations > CMI
T > CMI pénicillines, céphalosporines,
Doses répétées et/ou
carbapénèmes, aztréonam
perfusions longues
Aminosides
Obtenir un fort pic (Cmax)
Fluoroquinolones
Cmax/CMI Fortes doses, espacées si
Daptomycine
effet post-antibiotique
Métronidazole
Aminosides,
Fluoroquinolones Augmenter la
Daptomycine concentration moyenne
AUC/CMI
Macrolides (dose et/ou intervalle
Glycopeptides posologique)
Tetracycline
Relation exposition-toxicité des ATB

Antibiotique Toxicité Grandeur PK corrélé à


la toxicité
Aminosides Néphrotoxicité Cmin, AUC
Ototoxicité AUC cumulative
Vancomycine Néphrotoxicité Cmin
Bêta-lactamines Neurotoxicité ND
Daptomycine Toxicité musculaire Cmin
Divers Allongement du QT Cmax
fluoroquinolones et
macrolides
Linézolide Hépatotox, anémie AUC et temps-
dépendante
Relation exposition-toxicité des ATB

Probabilité de développer une


néphrotoxicité en fonction de l’AUC
pour un schéma à deux
administrations journalières (A) ou
une seule administration par jour
(B) d’aminoside +/- vancomycine
associée

Rybak et al. Antimicrob Agents Chemother 1999


Influence de la concentration résiduelle initiale de vancomycine
sur la néphrotoxicité de la vancomycine

Lodise et al. Clin Infect Dis 2009


Stratégies thérapeutiques optimales

Antibiotique Objectif Objectif de Schéma optimal


d’efficacité sécurité
Maximiser Cmax Minimiser Cmin Fortes doses espacées
Aminosides
et AUC (nephrotox) (min 24h)
Minimiser Cmin
Maximiser Cmax
Daptomycine (toxicité Fortes doses espacées
et AUC
musculaire)
Maximiser Cmin Minimiser Cmin
Glycopeptides Perfusion continue
et AUC (néphrotox)
Maximiser Cmax Limiter le pic si
Fluoroquinolones Fortes doses
et AUC allongement QT
Maximiser T > Doses répétes et/ou
Bêta-lactamines -
CMI perfusions longues
Limiter l’AUC Limiter la durée de
Linézolide Maximiser AUC
cumulative traitement (28j)
Stratégies thérapeutiques optimales

Effet Toxicité rénale


Probabilité

Aire sous la courbe des aminosides


• La toxicité rénale des aminosides est concentration-dépendante
• Médicament à marge thérapeutique étroite D’après Drusano et al. Clin Infect Dis 2007
Stratégies thérapeutiques optimales

Aminosides
• Privilégier les fortes doses espacées (min. 24h) pour maximiser l’effet
bactéricide et réduire le risque de néphrotoxicité

Threshold:
seuil de toxicité
rénale

Figure adaptée de Goodman Gilman The Pharmacological Basis of Therapeutics 12th Ed. 2011
Stratégies thérapeutiques optimales

Les perfusions prolongées optimisent la PK/PD des bêta-


lactamines
Felton et al. Diag Microbiol Infect Dis
Stratégies thérapeutiques optimales
• Pour certains antibiotiques, les objectifs d’efficacité et de
sécurité sont conflictuels:
• Marge étroite
• Intérêt des dosages plasmatiques +/- adaptation PK individuelle,
surtout si population spéciale
• Aminosides, glycopeptides, daptomycine

• Ne pas négliger la variabilité PK inter- et intraindividuelle


• Ne pas négliger l’influence de la sensibilité microbienne
Variabilité pharmacocinétique: profils PK possibles chez des patients
adultes recevant la même dose d’amikacine et ayant les mêmes
caractéristiques (poids, fonction rénale)
ClCr (ml/min) 20 40 60 80 100 120

500 mg IV toutes les 12 h

0,5 mg/l 94% 87% 75% 61% 49% 39%

1,0 mg/l 77% 49% 29% 17% 10% 6%

2,0 mg/l 29% 8% 2% 1% 0,3% 0,2%

1000 mg IV toutes les 12 h

0,5 mg/l 98% 97% 95% 92% 86% 80%

1,0 mg/l 94% 87% 75% 61% 49% 39%

2,0 mg/l 77% 49% 29% 17% 10% 6%

1500 mg IV toutes les 12 h

0,5 mg/l 99% 98% 98% 97% 96% 93%

1,0 mg/l 97% 95% 90% 82% 74% 66%

2,0 mg/l 89% 75% 57% 42% 30% 22%

2000 mg IV toutes les 12 h

0,5 mg/l 99% 99% 99% 99% 98% 97%

1,0 mg/l 98% 97% 95% 92% 87% 81% Patel et al. Clin
Infect Dis 2011
2,0 mg/l 94% 87% 75% 61% 49% 39%

Probabilité d’atteinte un ratio AUC/CMI cible de 400 pour différents régimes posologiques de
vancomycine, selon la clairance de la créatinine et la CMI du germe
DÉVELOPPEMENT DE LA
RÉSISTANCE AUX ANTIBIOTIQUES
Relation entre exposition et résistance
Concept de fenêtre de sélection

Canton. FEMS Microbiol Review 2011


Relation entre exposition et résistance
Concept de fenêtre de sélection

Andersson. FEMS Microbiol Review 2011


Relation entre exposition et résistance
Concept de fenêtre de sélection

MPC = Mutant Prevention Concentration MSW = Mutant Selection


Window
La sélection de mutant ne se produit pas à faible concentration (pas d'effet
bactéricide) ou à forte concentration (effet bactéricide sur les mutants)
Relation entre exposition et résistance
Exemple des fluoroquinolones sur S. aureus

Données combinées pour moxiflo-, levoflo-, gatiflo- et ciprofloxacine

TMSW = Temps passé dans la MSW


La sélection de mutant se produit lorsque TMSW est
supérieur à 20 % de l'intervalle posologique Firsov A, 2003
Relation entre exposition et résistance
Exemple des fluoroquinolones sur S. aureus

Une AUC/CMI > à 200-240 protège contre l'émergence de mutants R

Posologie nécessaire pour atteindre une AUC/CMI de 200 à 240


pour une CMI = 0. 25 mg/L

Posologie usuelle Posologie protectrice*


ATB
mg/j en % de la poso usuelle

Moxifloxacine 400 186

Levofloxacine 500 92

Ciprofloxacine 500 x 2 200

+++ Concentration critique basse : 0,5 ou 1 mg/L +++ Firsov A, 2003


Relation entre exposition et résistance

Chez un patient donné, l'émergence de mutant R est fonction:

• De la nature du germe : vitesse de croissance, taux de mutations,


variation de la CMI de la souche mutée

• De la nature de l'antibiotique : mécanisme de résistance

• De l'exposition à l'ATB: exposition faible = risque fort

• De l'observance : faible observance = risque fort

• De l'inoculum : inoculum fort = risque fort

• Des traitements ATB antérieurs : problèmes des résistances croisées

• Des associations éventuelles : association = risque plus faible


CALCUL DE LA POSOLOGIE OPTIMALE
Calcul de la dose optimale des ATB dont le
prédicteur est AUC/CMI

Dose = AUIC x CMI x CLT


(mg/j) (h) (mg/l) (l/h)

où AUIC = valeur cible de AUC 0-24h / CMI


CMI = CMI mesurée ou distribution des CMI
CLT = clairance totale de l'ATB ou sa distribution
Calcul de la dose optimale
exemple: ciprofloxacine dans les infections à P. aeruginosa
Forrest A, 2005
Distribution de CL Distribution de CMI
CL cipro

Fréquence
+

CLcreat CMI cipro


Simulation de la probabilité de succès
Modèle d'effet
(POC) selon la posologie
Prob. succès

+ =

AUC / CMI
IMPORTANCE DES DOSAGES
D’ANTIBIOTIQUES
Doser les antibiotiques: pourquoi ?
One (dose) size does not fit all…

Etude DALI: dosage Beta-lactamines en ICU (n=361)


Concentrations à 50% (A) et 100% (B) de l’intervalle posologique

Roberts et al. CID 2014


Doser les antibiotiques: pourquoi ?
Doser améliore la réponse clinique

Méta-analyse TDM de la vancomycine


Impact sur la réponse au traitement Ye PlosOne 2013
Doser les antibiotiques: pourquoi ?
Doser améliore la réponse clinique

Méta-analyse TDM de la vancomycine


Impact sur la néphrotoxicité Ye PlosOne 2013
Doser les antibiotiques: comment ?

Classe Cible efficacité Cible de toxicité Prélèvement Délai


Cmax/CMI > 8-10 Cmin < 5 mg/L (amik) Pic 30-60 min
Aminosides AUC/CMI > 70 Cmin < 1mg/L (genta, tobra) Résiduel
Dès 1ère dose

AUC/CMI > 400 Cmin < 15-20 mg/L (II) 24-48h après
Vancomycine Cmin > 10 mg/L (II) Css > 25 mg/L (CI) Résiduel ou Css dose de
Css > 20 mg/L (CI) AUC < 700 charge
Après dose de
Teicoplanine Cmin > 10 mg/L Cmin < 60 mg/L Résiduel
charge (48h)

Fluoro- AUC/CMI = 125-250


ND Pic 30-60 min 24h
quinolones Cmax/CMI > 10-12

AUC/CMI = 80-120
Linézolide T>CMI > 85%
Cmin = 2-6 mg/L Résiduel 72h

AUC/CMI > 200 Pic 30-60 min


Daptomycine Cmax/CMI > 100
Cmin < 25 (↑CPK)
Résiduel
Dès 1ère dose

CI = continuous infusion (perfusion continue) II = intermittent infusion (IV discontinue)


Cible avec preuves cliniques

Roberts, Lancet ID 2014


Jager, Expert Rev Clin Pharmacol 2016
Doser les antibiotiques: comment ?

Classe Cible efficacité Cible de toxicité Prélèvement Délai

Pénicillines fT>CMI = 100% ND Résiduel 24-48h

Céphalosporines fT>CMI = 100% ND Résiduel 24-48h

T>CMI > 75%


Carbapénèmes Cmin/CMI > 5 ND Résiduel 24-48h
fT>CMI = 100%
fT>CMI: temps passé au-dessus de la CMI en concentration libre (non-liée aux protéines)
Cible avec preuves cliniques

Roberts, Lancet ID 2014


Jager, Expert Rev Clin Pharmacol 2016
POPULATIONS SPÉCIALES &
CO-MORBIDITÉS
Influence des co-morbidités
La neutropénie (cancer, greffe de moelle)

Valeur du pic d'isépamicine à atteindre en fonction de la neutropénie

0.8
1000
Probabilité de succès clinique

500
0.6
300
200
0.4
100

0.2

0
20 40 60 80 100 120
Concentration au pic (mg/l)
Tod, 1996
Influence des co-morbidités
La mucoviscidose

• Absorption ralentie, F inchangée


• Vd en L/kg de LBW est similaire au patient non-mucoviscidosique
• CL rénale augmentée (DFG)
• CL métabolique augmentée pour :
CYP1A2, 2C8, UGT, NAT1, sulfotransférase
• Germes spécifiques (souche mucoïde P. aeruginosa), infections
récidivantes, terrain fragile: ne pas sous-doser

• Augmenter les doses de bêta-lactamines : x 1.3


aminosides : x 2
Influence des co-morbidités
Les brûlures étendues

• Phase aigüe (48 h) : hypovolémie, hypoperfusion, baisse de GFR


• Phase tardive (> 48 h) : hypermétabolique, augmentation de GFR,
baisse de la secrétion tubulaire.
• Hypoalbuminémie, augmentation de 1-glycoprotéine.
• Pertes transcutanées : augmentation de clairance des médicaments.
• Les modifications PK sont corrélées à la surface et à la profondeur des
brûlures
• Modifications posologiques : aminosides x 2 ou x 3
vancomycine x 1.5 (45 mg/kg/j)
teicoplanine x 2 ou x 3
-lactamines x2
Blanchet, 2008
Influence des co-morbidités
Réanimation

• Population très hétérogène


• Modifications PK
• Sepsis, remplissage, hypoalbuminémie => fuite capillaire,
augmentation du Vd des molécules hydrophiles
• Vasopresseurs, remplissage => clairance rénale augmentée
• Etat de choc => insuffisance rénale aigue
• Epuration extra-rénale
• Modification PD: germes hospitaliers, CMI augmenté
• Risque infectieux augmenté: ventilation mécanique, voies veineuses

• Posologies d’antibiotiques augmentées, à moduler selon IRA et EER


Influence des co-morbidités
Réanimation

Jager et al. Expert Rev Clin Pharmacol 2016


Vd Amikacine

Marik. Anaest Intensive Care 1993


En noir: moyenne et variabilité du
Vd en ICU

Cercle blanc: valeur moyenne


volontaires sains

Gonçalves-Pereira, Critical Care 2011


Influence des co-morbidités
Réanimation

Blot et al. Adv Drug Deliv Rev 2014


Influence des co-morbidités
Comparaison des doses d'amikacine

Dose journalière
Comorbidité d'amikacine en
mg/kg/j
Patient "standard"
15
Neutropénique fébrile
20
Mucoviscidose
30
Brûlure étendue
30
Réanimation (hors
30
IRA/EER)
Points-clés
• La PK/PD = fondement des schémas posologiques des ATB
• L’effet antibactérien in vivo dépend du profil PK, de la sensibilité
bactérienne et du terrain

• Les indices PK/PD corrélées à l’effet antibactérien sont


caractéristiques des classes d’antibiotiques
• Pour certains ATB: toxicité liée à l’exposition

• Attention aux populations spéciales


• Pour certaines molécules et certaines populations: faire des
dosages +++
• Le pharmacien peut participer à l’optimisation thérapeutique et
éviter les erreurs de sous-dosage / surdosage

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