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L'aide à la décision entre outils et organisation

Article in Entreprises et histoire · January 1996


DOI: 10.3917/eh.013.0009

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Albert David
Paris Dauphine University
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L’aide à la décision entre outils et organisation

Albert DAVID
Université Paris-Dauphine
Centre de Gestion Scientifique de l’Ecole des Mines de Paris

Cet article a été publié dans Entreprises et Histoire,


décembre 1996/3, n°13, pp. 9-26.

La littérature concernant la décision, l’aide à la décision, les outils d’aide à la


décision a été très fournie et variée depuis les premiers travaux de Barnard [1938] et de
Simon [1947], qui marquent l’irruption de la problématique de la décision dans la
théorie des organisations.
Les outils d’aide à la décision, que cette décision soit stratégique, financière,
marketing ou quelle concerne « les opérations », ont signé les vagues de rationalisation
qui ont jalonné l’histoire des sciences de gestion et de la théorie des organisations.
Plutôt que de nous lancer dans une typologie des outils, nous explorerons ici deux
questions. Les outils d’aide à la décision présentent-ils des propriétés structurelles
spécifiques ? A l’aide de quels concepts peut-on analyser et comprendre la dynamique
de leur introduction dans les organisations et les processus d’apprentissage qui en
découlent ?
Nous nous demanderons tout d’abord ce qu’est un outil, pour quelle aide et pour
quelles décisions. Nous verrons qu’il n’y a pas de production de connaissances sans
outils, que la décision est un processus complexe et que l’aide à la décision est une
relation de prescription. Nous confronterons les outils d’aide à la décision à deux
modèles fonctionnels et à deux modèles critiques de la décision. Nous examinerons
ensuite la structure et la dynamique des innovations managériales en général. Nous
analyserons enfin en quoi les outils d’aide à la décision constituent, par leur substrat
technique, par leur philosophie gestionnaire et par la vision simplifiée qu’ils portent des
relations organisationnelles, des innovations managériales particulières. Nous mettrons
en perspective, en conclusion, approche de conformation ou d’exploration, mode de
pilotage du changement et nature des apprentissages au cours du processus de
contextualisation des outils.

1
1. Quels outils, pour quelle aide, pour quelles décisions ?

1.1. Il n’y a pas de production de connaissances sans outils.

Le terme d’outil désigne « un objet fabriqué qui sert à agir sur la matière, à faire un
travail »1. Par rapport à un instrument ou une machine, un outil est conçu comme plus
simple et utilisable directement « par la main », c’est-à-dire, d’une certaine manière,
sous contrôle de son utilisateur. L’outil est alors considéré comme un prolongement,un
amplificateur des capacités humaines. On peut néanmoins noter que les expressions
« instruments de gestion » [cf par exemple Soler, 1993], « machines de gestion » [Girin,
1981], « modèles de gestion » [cf par exemple Hatchuel et Moisdon, 1993],
« dispositifs de gestion » [cf par exemple Moisdon, 1996], « appareil
gestionnaire »[Hatchuel et Weil, 1992] existent également dans la littérature de la
recherche en gestion. Si outil et instrument sont employés quasiment indifféremment,
l’expression de « machine » désigne quelque chose qui dépasse et, éventuellement,
manipule ou asservit ses utilisateurs, tandis que les notions de dispositif ou d’appareil
gestionnaires évoquent des systèmes d’outils qui structurent l’organisation de l’action
collective. La distinction entre modèle et outil est plus délicate. Dans une approche
positiviste de la modélisation, on peut considérer qu’un modèle est plus prescriptif - il
dit la vérité - alors qu’un outil est plus ouvert - il aide à la découvrir. Aujourd’hui,
comme nous le verrons, même les modèles les plus formels sont utilisés dans une
logique constructiviste, ce qui rend la distinction entre outil et modèle quelque peu
artificielle.
On peut considérer comme outil de gestion « toute formalisation de l’activité
organisée, [...] tout schéma de raisonnement reliant de façon formelle un certain
nombre de variables issues de l’organisation, et destiné à instruire les divers actes de la
gestion » [Moisdon, 1996]. Nous retiendrons ici que le terme d’outil désigne un objet,
donc quelque chose d’au moins partiellement « extérieur » à son utilisateur et qui
présente un minimum de formalisation. Un outil n’est donc pas entièrement lié au
contexte dans lequel il est utilisé, ce qui signifie qu’il est toujours formellement
transposable. Notons que cette conception de l’outil comme moyen d’agir renvoie à
l’étymologie et au sens philosophique du verbe « informer », qui signifie façonner,
former, donner une structure, une signification. Autrement dit, construire et utiliser un
outil, c’est produire et manipuler des connaissances. A contrario, on peut dire qu’il
n’est pas de production de connaissances sans outils, aussi simples, aussi peu formels
ou aussi peu explicites soient-ils. La définition de Moisdon, bien qu’élaborée en faisant
surtout référence à des outils travaillant au moins partiellement sur la base de modèles
formalisés - c’est ce qu’indique la notion de « variable » - s’applique donc aussi à une
liste, un tableau à double entrée, un organigramme, des groupes de travail, des
entretiens d’appréciation ou des contrats d’objectifs.

1
Définition du dictionnaire Robert.
2
1.2. La décision est un processus complexe

Qu’est-ce qu’une décision ? Et si l’on prend une définition élargie de la gestion,


qu’est-ce que gérer si ce n’est décider ?
« Décider », dit-on, « c'est ce que l'on fait quand on ne sait pas quoi faire ». Image
classique du décideur entrain de décider, c'est-à-dire, étymologiquement, de trancher...
Et quand on ne sait pas quoi faire, soit on se décide - c’est-à-dire que l’on décide qu’il
faut trancher - soit on remet à plus tard le moment du choix, par exemple parce que l’on
estime ne pas être suffisamment informé sur les caractéristiques ou les conséquences de
tel ou tel scénario. Il y a, dans cette conception de la décision, focalisation sur l’instant
de la décision. A moins qu’il ne décide de remettre sa décision à plus tard ou de
collecter davantage d’informations, le décideur est seul avec son libre arbitre. Et même
le fait de ne pas décider est une décision. Dans ce cas, l’aide dont il aurait
éventuellement besoin se limiterait à un soutien psychologique, sous forme
d’encouragements par exemple. On comprendra néanmoins que ce décideur ne s’est pas
trouvé dans cette situation par hasard : cette décision qu’il est entrain de prendre a une
histoire. Dans le modèle classique du décideur rationnel, cette histoire commence par la
formulation du problème. Ensuite, le décideur envisage différentes alternatives, puis
fait son choix, ce moment du choix restant ce que l’on appelle décision, ce qui se passe
avant n’étant qu’une phase de préparation, ce qui se passe après n’étant que de
l’intendance.
Les différentes critiques qui ont été faites à cette conception de la décision peuvent
se résumer par les propositions suivantes :

• le moment du choix, à supposer qu’il soit repérable, n’est pas isolable des
conditions de construction des alternatives, du contexte individuel et organisationnel
du choix : la décision est un processus, pas un instant ;
• une décision n’est pas un décret : le processus ne s’arrête pas au moment du
choix ; il n’y a pas d’application d’une décision qui ne soit transformation,
réinterprétation de cette décision ;
• il n’existe ni réalité de premier ordre, ni décideur unique et omniscient, ni
optimum objectif [Roy, 1985]
• la décision n’est ni linéaire, ni monorationnelle, ni monofinalitaire [Sfez,
1973] ; les concepts d’ambiguïté créatrice, de traduction, de hasard organisateur, de
surcodage, d’apprentissage, d’exploration sont centraux dans toute tentative
d’analyse de processus de décision complexes ;
• la rationalité des acteurs est limitée non seulement par leurs capacités
cognitives individuelles mais par les systèmes d’organisation qui définissent et
structurent l’action collective, donc les processus de décision ; s’organiser, c’est
choisir une manière particulière de produire des connaissances ; on peut dire, en
prenant la contraposée de la proposition de Simon, que la limitation de la rationalité
est une condition nécessaire à l’action : l’organisation conditionne et structure
l’action mais on ne peut pas agir sans s’organiser ;
• on peut distinguer des décisions programmées, des décisions non programmées
mais fortement structurées et des décisions non programmées et faiblement
structurées [Simon, 1957 ; Le Moigne, 1973 ; Mintzberg et alii, 1976] : les décisions
programmées « pourraient être gérées par des automatismes (recherche
3
opérationnelle), l’intervention humaine se limitant à vérifier que les conditions
d’application de l’automatisme sont bien remplies ; les décisions non programmées
mais faiblement structurées relèveraient de modélisations partielles et de simulations,
le jugement du décideur, aidé par les outils, n’étant jamais éclipsé par ces outils ;
dans les décisions non programmées et faiblement structurées, l’intelligence du
problème jouerait le rôle essentiel, les capacités du décideur étant déterminantes »2 ;
aucune décision n’est pas essence programmée ou non, structurée ou non structurée :
d’une part, on trouve en permanence des solutions à des problèmes qu’on ne savait
pas résoudre et, d’autre part, une décision peut devenir programmée simplement
parce que ses acteurs ont décidé d’utiliser tel ou tel outil pour effectuer leurs choix,
indépendamment du caractère réaliste de la modélisation3 .

1.3. L’aide à la décision est une relation de prescription

Parler d’aide à la décision, c’est introduire une relation de prescription. Dans


l’histoire des techniques managériales, la prescription a été forte lorsque la modélisation
a prétendu dicter des choix relevant d’une rationalité universelle indépendante des
acteurs. Ce fut le cas de Taylor et de son organisation scientifique du travail, ce fut
également le cas pour la recherche opérationnelle lorsqu’elle a confondu optimisation
d’un modèle et optimisation de la réalité. La prescription a été faible à chaque fois que
les outils ont été conçus ou utilisés dans une logique d’aide et non de substitution au
décideur. Autrement dit, la prescription a été d’autant plus forte que les outils étaient
utilisés dans une logique fermée, de conformation, et d’autant plus faible que les outils
étaient utilisés dans une logique ouverte, d’exploration4.
La crise de la recherche opérationnelle, c’est-à-dire, dans la seconde partie des
années soixante-dix, le doute qui a gagné à la fois une partie des concepteurs d’outils et
un certain nombre de managers-utilisateurs quant à la performance des modèles, peut
être analysée comme une crise de la relation de prescription [Hatchuel, 1996]. Dans le
domaine de la décision comme pour nombre de démarches instrumentales en gestion,
une des évolutions majeures, commencée dès la fin des années soixante [Roy, 1968], a
été le renoncement progressif à une prescription forte se réclamant d’une rationalité
universelle. La science de la décision a laissé la place à une relation de prescription plus
faible, qui s’incarne dans l’idée d’une science de l’aide à la décision [Roy, 1990].
L’aide à la décision, selon Roy [1985] « est l’activité de celui qui, prenant appui sur
des modèles clairement explicités mais non nécessairement complètement formalisés,
aide à obtenir des éléments de réponse aux questions que se pose un intervenant dans un
processus de décision, éléments concourrant à éclairer la décision et normalement à
prescrire, ou simplement à favoriser, un comportement de nature à accroître la
cohérence entre l’évolution du processus, d’une part, les objectifs et le système de
valeurs au service desquels cet intervenant se trouve placé, d’autre part ».
2
H. Bouquin, article « Contrôle », Encyclopédie de gestion, p. 556.
3
Par exemple, l’indice Dow Jones est une moyenne arithmétique simple calculée à partir de quelques
dizaines de titres ... ce qui n’empêche pas cet indice de servir de référence, donc de réalité à un certain
nombre de places financières.
4
Le caractère fort ou faible de la prescrition dépend aussi des savoirs techniques : il est plus difficile à
un département Marketing de « prescrire » au Bureau d’études ce que doit être le véhicule qui sortira
dans cinq ans qu’à un mécanicien de « prescrire » un changement de plaquettes de freins [David, 1990].
4
Cette définition semble donner l’aide à la décision un rôle assez modeste. Cette
conception de l’aide est en réalité assez sophistiquée. Un outil d’aide à la décision serait
un modèle « clairement explicité mais non nécessairement complètement formalisé »,
qui aiderait l’intervenant à agir de manière plus cohérente par rapport aux objectifs et
aux systèmes de valeurs qui sont les siens. Naturellement, la neutralité n’est ici
qu’apparente : nous verrons plus loin que l’aide à la décision ainsi définie tend à
orienter le processus de décision d’une manière particulière.
Dans ce contexte, « décider ou, de façon plus large, intervenir dans un processus de
décision n’est qu’exceptionnellement trouver une solution à un problème. C’est, le plus
souvent, imaginer des compromis, faire accepter un arbitrage dans une situation de
conflit » [Roy, 1993, p. 21]. On voit que « décider » a ici une définition très large.
Notons néanmoins que si l’on accepte de la décision une définition trop large, on est
obligé de considérer comme outil d’aide à la décision tout ce qui permet d’améliorer
l’efficacité des décisions. A ce titre, des cercles de qualité, une nouvelle structure, des
entretiens d’appréciation, des rencontres entre une direction générale et l’encadrement
supérieur, une analyse graphologique constituent des outils d’aide à la décision au
même titre d’un tableau de bord, un score, une méthode multicritère. Mais alors, lire la
Bible, installer une machine à café ou offrir une prime ne peuvent-ils pas aussi
constituer une aide à la décision ?
A ce stade, il y a bien un risque de dilution de l’objet de notre analyse : si toute
activité peut être rattachée à un processus de décision, décider n’est rien d’autre que
l’activité permanente d’une organisation et l’aide à la décision n’a pas de limites
claires. On voit bien ici le caractère empirique des définitions : le terme « outils d’aide
à la décision » est généralement utilisé pour qualifier des outils formalisés issus, par
exemple, de la recherche opérationnelle, de la théorie de la décision ou des statistiques.
De même, l’expression « outils d’aide à la décision stratégique » désigne l’ensemble
des outils nés de la vague d’instrumentalisation de la décision stratégique [Allouche et
Schmidt, 1995] : modèles de courbe de vie, matrices BCG ou ADL, outils de
planification stratégique, etc.

1.4. Les outils face à quatre modèles de la décision.

Prenons, d’une part, deux modèles « fonctionnels » de la décision : le modèle


canonique IDCE de Simon et la décision vue par Courbon [1980] comme une boucle de
régulation. Prenons, d’autre part, deux modèles plus « critiques » de la décision : le
modèle du garbage can [March et Olsen, 1976] et la théorie de surcode [Sfez, 1973]5.
Comment peut-on, sur ces quatre modèles, concevoir la nature et le rôle d’outils d’aide
à la décision ?
Le modèle « canonique » de la décision proposé par Simon distingue, rappelons-le,
quatre phases interdépendantes : intelligence (I), conception (D - pour design), choix
(C), évaluation (E). Nous considérerons ici ce modèle standard comme un modèle
analytique général, qui ne présuppose ni décideur unique, ni séquentialité du processus :
des phases I, D, C et E peuvent, pour une même « décision », coexister en parallèle

5
Nous prenons ici ces quatre modèles à titre illustratif, pour opposer logique fonctionnelle et approche
critique. Pour une analyse plus complète des types de rationalité en oeuvre dans les modèles de
décision, voir par exemple Munier [1994].
5
dans différents endroits d’un système multi-acteurs. En ce sens, l’utilisation que nous en
ferons n’est pas incompatible avec l’idée évoquée plus haut que les processus de
décision ne sont ni linéaires, ni monorationnels, ni monofinalitaires.
Dans une perspective plus systémique, Courbon [1980] considère la décision comme
une boucle de régulation en quatre moments :

environnement

décision
réelle

système opération- système


observation
de -nalisation de
mesure
pilotage modélisation controle

décision
virtuelle

représentation
intelligence
de l'organisation

Figure 1 : la décision comme boucle de régulation

Décision réelle, observation et mesure, décision virtuelle et opérationnalisation-


modélisation s'enchaînent dans cet ordre sans qu'aucun des quatre puisse être considéré
comme premier ou dernier. Chaque élément est lié à un autre terme, qui figure en
encadré sur le schéma. La décision virtuelle est la traduction de la représentation que
l'individu ou l'organisation se font des choses, et qui constitue « l'intelligence de l'orga-
nisation », c'est-à-dire sa capacité à construire une vision juste du fonctionnement du
système dont elle fait partie. A ce stade, on parle de décision virtuelle : la décision
réelle n'est pas encore prise. Le système de pilotage permet la traduction opérationnelle,
modélisée, de la représentation : grâce à lui, l'entreprise peut élaborer l'ensemble des
« manettes » nécessaires pour agir. La décision réelle désigne l'action proprement dite ;
elle est la traduction de la représentation en action à travers le système de pilotage. Le
système de contrôle permet d'effectuer les mesures et observations nécessaires sur les
éléments du système sur lesquels la décision est supposée avoir un effet ; il nourrit,
c'est-à-dire confirme ou contredit, la représentation qui a engendré la décision.
Ces quatre éléments forment une boucle : les représentations influent sur le système
de pilotage qui permet la transformation de la décision virtuelle en décision réelle. Le
système de contrôle permet de mesurer l'efficacité de la décision et fournit un retour qui
à son tour modifie potentiellement les représentations.
Bien que postulant l’existence d’une phase de choix - ce que des modèles plus
critiques contestent -, ces représentations de la décision permettent déjà de dépasser
6
l’aide à la décision comme aide au seul moment du choix : intelligence de la situation,
conception d’alternatives, évaluation et, dans le modèle de Courbon, les représentations,
le système de pilotage, le système de contrôle sont également concernés.
L’aide à la phase d’intelligence renvoie à la problématique de l’éclairage présente
dans la définition de Roy : il s’agit d’apporter aux décideurs des éléments qui viennent
enrichir et rendre plus pertinente la formulation qu’ils ont du problème auquel ils sont
confrontés. L’aide à la phase de conception est une aide à la construction des
alternatives du choix. C’est une phase fondamentale du processus dont
l’instrumentation n’a que depuis peu fait l’objet de rationalisations [Hatchuel, 1994 et
1996 ; Weil, 1996]. L’aide au choix proprement dit relève de problèmes de description
fine des alternatives et d’évaluation de leurs conséquences, de problèmes d’agrégation,
d’une dimension plus psychologique de soutien (l’angoisse du décideur devant
l’obligation de trancher et la responsabilité que cela représente). L’aide à la phase
d’évaluation renvoie à la fois à des difficultés de mesure des effets des décisions prises
et au processus d’apprentissage, et donc de modification des représentations, qui naît de
la confrontation entre effets attendus et effets mesurés.
Si l’on reprend la boucle de Courbon, l’aide à la décision virtuelle regroupe l’aide
aux phases intelligence, conception et choix de Simon. L’aide à la phase
« opérationnalisation-modélisation » concerne les leviers, c’est-à-dire les moyens de
l’action : des contrats d’objectifs, la structure d’une organisation, le recours à des
procédures contentieuses sont des moyens d’opérationnaliser, donc de rendre concrètes,
réelles, des décisions virtuelles. La phase « décision réelle » de la boucle est, dans une
logique d’aide à la décision, un « point aveugle » : la balle est, à ce moment, dans le
camp de l’ « environnement » qui reçoit la décision ... Du point de vue du décideur, il
ne se passe rien de plus avant que le système de contrôle puisse « lire » les effets de la
décision. La phase de contrôle correspond à la phase « évaluation » de Simon : il s’agira
donc d’aider le décideur à concevoir un système de contrôle adapté et interpréter les
informations qui en sont issues de manière pertinente.
La plupart des outils d’aide à la décision pourraient être mis en correspondance avec
une ou plusieurs des phases de ces deux modèles, en particulier les phases choix et
évaluation de Simon et les cases système de pilotage et système de contrôle de
Courbon. Cette correspondance se complique néanmoins quelque peu si l’on admet que,
dans bien des cas, les outils donnent des idées de problèmes, la manière dont on
opérationnalise une décision virtuelle contraint du même coup la manière dont on
pourra contrôler les effets de la décision réelle, les solutions changent la représentation
ou l’intelligence que l’on a du problème. On sent bien dès à présent que l’introduction
d’un outil dans une organisation représente beaucoup plus que le simple
« branchement » d’une procédure d’aide circonscrite à un moment et dans un espace
bien déterminés du processus de décision.
Si nous regardons maintenant du côté de modèle plus critiques, il nous faut changer
de perspective. Le modèle du garbage-can postule, pour simplifier, que les problèmes,
les solutions et les décideurs se rencontrent de manière anarchique6. L’aide à la décision
au sens défini par Roy consiste alors à introduire un peu de méthode dans la grande
poubelle de Cohen, March et Olsen. Le modèle du surcode est plus sophistiqué : une
décision a la structure d’un récit. La notion de hasard - au sens de rencontre de chaînes

6
Bien que dans un espace défini par la « poubelle », donc confiné et contraint. L’anarchie n’est donc
pas totale.
7
causales indépendantes - est également présente, mais Sfez analyse de quelle manière le
surcodage d’un code - c’est-à-dire de la rationalité d’un acteur - par un autre code -
c’est-à-dire par la rationalité d’un autre acteur - peut être producteur de sens et
d’innovation. Dans ce modèle, chaque acteur peut instrumenter son point de vue
comme il l’entend, mais la décision au sens de « récit » n’est susceptible d’être aidée
que de deux manières : (1) le fait pour des acteurs de savoir qu’un processus de
décision a cette structure peut les éclairer et leur éviter des erreurs qui viendraient de ce
qu’ils interpréteraient ce qui leur arrive avec une vision classique, (2) on pourrait
améliorer la coopération entre ces acteurs à certains moments du processus, mais il est
clair que le « on » en question devrait alors être considéré à son tour comme un acteur
du récit, avec sa rationalité, donc son code. Autrement dit, à moins de postuler
l’existence d’un coordinateur supra-rationnel, l’introduction d’un tel acteur qui fait
partie du processus de décision. Nous retrouvons ici la difficile question de savoir dans
quelle mesure un modèle descriptif de la décision peut être utilisé dans une logique
prescriptive.
Dans la suite, il nous faudra donc à la fois considérer l’aide à la décision dans une
optique fonctionnelle pour comprendre de quelle aide les acteurs d’un processus de
décision ont besoin et dans une optique critique pour prendre en compte le fait que
toute démarche d’aide à la décision est une démarche d’intervention qui représente
l’irruption d’un nouvel acteur dans le processus.

2. Structure et dynamique des innovations managériales


2.1. Outils et organisation : une structure isomorphe

Hatchuel et Weil [1992] ont montré que tout outil de gestion7 est fait de trois
éléments en interaction : un substrat technique, qui est l’abstraction sur laquelle repose
l’outil et qui lui permet de fonctionner, une philosophie gestionnaire, qui correspond à
l’esprit dans lequel l’utilisation de l’outil est envisagée - et une vision simplifiée des
relations organisationnelles, qui permet d’entrevoir sommairement les principaux
acteurs et leurs rôles autour de l’outil. Par exemple, les systèmes experts ont un substrat
technique qui est composé d’une base de règles, d’une base de connaissances et d’un
moteur d’inférence. La philosophie gestionnaire de ces systèmes est, du moins à leurs
débuts, l’automatisation des raisonnements. La vision simplifiée des relations
organisationnelles qu’ils véhiculent implicitement met en scène des experts (qui
possèdent le savoir), des cogniticiens (qui l’extraient) et des décideurs (qui l’utilisent
par exemple pour faire des diagnostics).
Hatchuel et Weil ont élaboré cette structure en trois éléments pour des techniques
managériales comme l’organisation scientifique du travail, la recherche opérationnelle,
les sytèmes experts ou la gestion de production assistée par ordinateur. La particularité
de ces techniques est qu’elles s’adressent d’abord et explicitement aux connaissances et
non aux relations organisationnelles : lorsque l’on conçoit un système expert, on
commence par travailler sur des règles, des connaissances et des raisonnements par

7
Hatchuel et Weil emploient le terme de « technique managériale ».
8
inférence, indépendamment des relations nouvelles que son utilisation suppose
implicitement entre les acteurs.
Mais il existe des outils de gestion qui s’adressent d’abord et explicitement aux
relations entre les acteurs : une nouvelle structure, par exemple. D’autres encore
s’adressent à la fois aux relations et aux connaissances : un contrat d’objectifs évoque à
la fois une relation - contractuelle - et des connaissances - les objectifs. Nous avons
donc généralisé l’analyse d’Hatchuel et Weil aux innovations managériales en général
[David, 1996], distinguant ainsi innovations orientées connaissances (IOC), innovations
orientées relations (IOR) et, sur un continuum entre les deux, innovations mixtes (IM).
Dans une innovation orientée connaissances, le substrat technique concerne
uniquement les connaissances, la vision simplifiée de l’organisation uniquement les
relations entre acteurs. Dans une innovation orientée relations, le substrat technique est
relationnel et la vision simplifiée de l’organisation concerne uniquement des
connaissances.
On voit donc qu’un outil a toujours, implicitement ou explicitement, de par son
substrat technique ou à travers sa vision simplifiée de l’organisation, une double
composante connaissances/relations. Une organisation peut, de même, être vue à la fois
comme un système de relations et comme un système de production de connaissances.

outils

relations connaissances

organisation

Figure 2 : Outils et organisation : des structures isomorphes

L’organisation et les outils procèdent donc d’une rationalité limitée de même nature.
Ceci va nous permettre de définir une distance entre un outil et une organisation et de
mieux comprendre ce qui se passe lorsqu’une organisation adopte un outil - en
particulier, nous le verrons dans une troisième partie, lorsqu’il s’agit d’un outil d’aide à
la décision.

2.2. Distance entre outil et organisation et processus de


contextualisation des outils.

Les quatre points de départ possibles du processus d’introduction des


innovations managériales

9
Une innovation managériale peut concerner, nous l'avons vu, d’abord les relations - IOR
- ou d’abord les savoirs - IOC. De plus, au départ du processus d’introduction de
l’innovation, le détail des relations et des savoirs peut être fixé ou non. Par exemple, lorsque
des contrats d’objectifs sont mis en place, ils peuvent n’être définis que dans les grandes
lignes ou, au contraire, avoir dès le départ une définition élaborée, avec liste d’indicateurs et
organisation détaillée des procédures de négociation et de discussion entre les acteurs
signataires.
Le point de départ du processus d’introduction d’une innovation managériale peut donc
être représenté par un point sur un graphique à deux dimensions : l’axe horizontal indique si
l’innovation concerne les relations ou les connaissances - ou les deux -, l’axe vertical
indique avec quel degré de précision l’innovation est définie au début du processus, c'est-à-
dire son degré de formalisation. La Figure 1 ci-après indique quatre situations types. Un
cadrage relationnel pur, comme la nouvelle structure décidée en février 1990 à la RATP
[David, 1995], se positionne dans le quart nord-ouest du schéma. C’est une configuration
relationnelle qui n’est, au départ, définie que dans ses grandes lignes. Un cadrage qui ne
concernerait que les savoirs - cadrage orienté connaissances - se placerait dans le quart
nord-est. Par exemple, la décision d’une direction générale de diminuer le niveau des stocks
de moitié - sans préciser comment y parvenir - constitue un tel cadrage. Si des acteurs, par
exemple marketing et bureau d’études dans l’industrie automobile [David, 1990], souhaitent
démarrer une coopération, et si on définit au préalable la composition exacte du groupe, la
fréquence des réunions, les modalités de compte-rendu, etc., cette coopération constitue une
procédure relationnelle que l’on peut situer dans le quart sud-ouest du schéma. On peut
enfin élaborer dans le détail comment des connaissances doivent être élaborées et traitées :
s’il s’agit, par exemple, de fixer la manière dont le personnel doit être évalué et si l’on
définit au préalable et avec précision les différents critères de jugement, les procédures
d'agrégation des évaluations sur chaque critère et de quelle manière l'évaluation conditionne,
par exemple, la carrière des personnes, alors nous sommes en présence d’une procédure
orientée connaissances que l’on peut situer dans le quart sud-est du schéma.

cadrages

cadrages
cadrages
sur les
relationnels
connaissances

relations connaissances

procédures procédures
relationnelles orientées
connaissances
détail

0
10
Figure 2 : les quatre points de départ possibles
du processus d'introduction d'une innovation managériale

Contextualisation interne et distance entre innovation et organisation

Qu'une innovation managériale soit orientée relations ou orientée connaissances, que son
degré initial de formalisation soit faible ou fort, une troisième variable va intervenir : le
degré de contextualisation interne de l'innovation. Par contextualisation nous entendons un
état ou un processus particulier de transformation réciproque de l'innovation par les acteurs
et des acteurs par l'innovation8. Le degré de contextualisation interne peut être défini comme
la "distance" qui existe, à un moment donné de l'histoire d'une innovation dans une
organisation, entre cette innovation et cette organisation. Plus la distance qui existe entre
l'innovation et l'organisation qui l'adopte est grande, plus le degré de contextualisation
interne est faible. Plus, au contraire, l'innovation est proche de l'organisation qui l'adopte,
plus le degré de contextualisation interne est élevé. Qualitativement, cette « distance »
correspond non seulement à l'écart entre le fonctionnement présent et ce que l'on imagine du
fonctionnement futur, mais aussi à la longueur et à la difficulté du chemin à parcourir pour
que l'innovation fonctionne effectivement dans l'organisation.
Si nous considérons, au départ du processus, l'organisation (relations et connaissan
ces), d'une part, et l'innovation managériale, d'autre part, et si nous admettons que chacune
des deux intègre une vision inachevée de l'autre (les acteurs n'ont, au départ, qu'une
représentation incomplète de l'innovation ; l'innovation véhicule une vision simplifiée de
l'organisation), alors le processus de contextualisation d'une innovation managériale dans
une organisation peut être vu comme un processus d'exploration croisée. Au départ, le
substrat technique est plus ou moins maîtrisé ou maîtrisable par les acteurs, la philosophie
gestionnaire est plus ou moins comprise et les acteurs y adhèrent plus ou moins, la vision
simplifiée des relations ou des connaissances est plus ou moins schématique et éloignée des
relations et des connaissances présentes, l'ensmble définissant de fait une certaine
« distance » entre l'innovation et l'organisation. Ce processus va, si tout va bien, converger,
au prix de transformations plus ou moins importantes de part et d'autre, vers une intégration
complète entre l'innovation et l'organisation. A ce moment, l'innovation est totalement
contextualisée, c'est-à-dire que le substrat technique fonctionne, la philosophie gestionnaire
est adaptée et la vision simplifiée des relations et/ou des connaissances est devenue explicite
et complète : on peut alors dire que la distance entre l'innovation et l'organisation est nulle.

La dynamique des innovations managériales

Nous venons de montrer qu'au départ du processus de contextualisation, il existe une


certaine « distance » entre l'innovation et l'organisation qui dépend à la fois de l'innovation
en elle-même et de l'état particulier de l'organisation qui s’apprête à l'adopter. Cette distance

8
Cette notion de contextualisation est donc plus puissante que celle, plus classique,
d'adoption, et moins ambiguë que celle de codification, qui renvoie à la fois à la formalisation de
l'innovation dans des manuels et des modes d'emploi et au concept d'encodage utilisé notamment en
sciences cognitives.
11
va, se réduire jusqu'à être proche de zéro. Ce processus n'est ni nécessairement régulier ni
forcément convergent. Degré de faisabilité du substrat technique, plus ou moins grande
pertinence de la philosophie gestionnaire, compatibilité entre les relations et connaissances
réelles - qu'elles soient, pour reprendre les termes d'Argyris et Schön [1978], affichées ou en
usage - et la vision simplifiée des connaissances et/ou des relations véhiculée par
l'innovation sont les trois dimensions qui font cette distance entre une innovation et une
organisation. La mise en mouvement du processus se fait parce que la comparaison par les
acteurs entre l'innovation et l'organisation génère une tension. C'est cette tension qui initie un
processus d'exploration des relations et/ou des connaissances affichées ou en usage.
Nous pourrons donc visualiser le processus d’implémentation des innovations
managériales - donc, en particulier, des outils d’aide à la décision - sur un double schéma
(Figure 3). Le premier prend en compte, sur l’axe horizontal, le fait que l’on travaille sur les
relations ou sur les connaissances et sur l’axe vertical, le degré de détail dans la définition de
l’innovation. Le second permet de visualiser le degré de contextualisation interne, comparé
au degré de formalisation. Quel que soit le point de départ du processus, le point d'arrivée -
sauf interruption - sera toujours en bas et à droite du premier schéma : que l'on mette en
place des IOC (innovations orientées connaissances) ou des IOR (innovations orientées
relations), nous nous intéressons ici aux conditions et à l'organisation de la production des
connaissances. Dans notre schéma d'analyse, l'efficacité de la mise en place de relations
nouvelles sera donc analysée par rapport à la pertinence des connaissances qu'elles
permettent de produire. Tout processus de contextualisation d’une innovation managériale
peut donc être visualisé par un trajet plus ou moins tourmenté.

cadrage
point de degré de
départ contextualisation
minimum maximum

minimum
formalisation
degré de

relations connaissances

maximum

détail

Figure 3 : Visualisation du processus de contextualisation


d’une innovation managériale (cas d’une innovation orientée connaissances).

12
3. L’aide à la décision entre outils et organisation
3.1. Evolution des outils formalisés d'aide à la décision

L'histoire des outils d'aide à la décision et de leurs modes d'existence est liée à la fois
à l'histoire des techniques, aux évolutions épistémologiques et l'histoire des
organisations. De même qu'une invention ne devient innovation que si la société lui
donne une valeur d'usage, de même un outil ne devient outil d'aide à la décision que si
on peut lui associer un usage organisationnel, cet usage fut-il imaginaire.

Concrètement, les outils d'aide à la décision ont évolué de trois manières :

• Le processus de programmation de décisions auparavant non programmées mais


fortement structurées ne s'est pas arrêté : les progrès de la combinatoire et la
puissance des ordinateurs ont permis, par exemple, de trouver des solutions à des
problèmes comme la construction d'horaires qui nécessitent, si l'on veut faire aussi
bien que l'expérience des agents de planning, de travailler sur une base de plusieurs
centaines de milliers d'actions candidates, en couplant programmation mathématique
et algorithmes de génération de colonnes [Jacquet-Lagrèze, 1995].
• L’interaction homme/machine ou décideur/modèle a été incluse dans la
modélisation avec le développement, notamment, des systèmes interactifs d’aide à la
décision (SIAD) ; du simple développement du caractère conversationnel des outils
on est passé à une prise en compte explicite des allers et retours entre résultats du
programme et raisonnement du décideur. Un des premiers logiciels interactifs d’aide
à la décision fut PREFCALC [Jacquet-Lagrèze, 1984], qui permet à l’utilisateur
d’indiquer ses préférences sur une sélection d’actions préalablement évaluées sur
plusieurs critères puis de modifier les fonctions d’utilité calculées par le programme.
Par la suite, ce que l’on appelle les « méthodes interactives » sont des procédures qui
prennent explicitement en compte le processus d’exploration, de construction
progressive d’une structure de préférences [Vanderpooten, 1990]. Dans ce cas, on
peut dire que c’est l’interaction homme/machine qui permet la structuration
progressive d’une décision non programmée et faiblement structurée ou la
programmation progressive d’une décision fortement structurée mais non
programmée. La métaphore la plus fréquemment utilisée est, à cette époque, celle du
« chauffeur » : le décideur confie au programme le soin de le guider dans
l’exploration du problème.
• Des variables traditionnellement extérieures aux modèles formalisés, comme le
degré de décentalisation d’une structure ou le degré d’autonomie d’une catégorie
d’acteurs on été explicitement incluses dans des outils [Erschler et Thuriot, 1992,
Saïdi-Kabèche, 1996].
• Un double saut épistémologique s’est produit : (1) l’apparition de démarches
multicritères, qui représente bien plus qu’une extension à plusieurs critères d’outils
ne raisonnant que sur l’optimisation d’un seul et (2) la prise de conscience du fait
que les outils ne sont pas seulement de conformation mais aussi d’exploration. La
logique générale de ce double saut est de rendre l’utilisation des outils compatible
avec des processus de décision complexes.

13
3.2. Structure des outils d’aide à la décision

Les outils d’aide à la décision ont-ils un substrat technique, une philosophie


gestionnaire, une vision simplifiée de l’organisation spécifiques ? D’une manière
générale, on peut considérer que ces trois éléments sont liés à l’évolution des
techniques, à l’histoire des siences - et, en particulier, aux évolutions épistémologiques -
et à l’histoire des organisations. Les substrats techniques des outils d'aide à la décision
font le plus souvent appel à des concepts et des méthodes issus des mathématiques
(probabilités, algorithmes d'optimisation, techniques combinatoires, etc.) ou, pour des
outils formellement plus simples, à des formes particulières d'organisation de la pensée
comme des listes, des tableaux à double entrée, des arborescences, des graphiques9.
Nombre de ces concepts et ces méthodes sont rendus opérationnels par des moyens de
gestion de l’information et de calcul de plus en plus puissants et rapides. Les
philosophies gestionnaires ont également évolué, à la fois en fonction des possibilités
offertes par les substrats techniques et en fonction des « besoins » des organisations :
mesurer la qualité, rendre traçables des processus de décision, recompenser le mérite,
décentraliser les décisions, gérer la variété, automatiser les diagnostics, anticiper des
risques sont autant de cibles des processus de rationalisation qui se succèdent, se
matérialisant à chaque fois par une ensemble d’outils nouveaux. La vision simplifiée de
l’organisation, c’est-à-dire la théorie que fait implicitement l’outil de l’organisation
dans laquelle il doit s’insérer - dépend à la fois de la conception générale de
l’organisation qu’ont les prescripteurs de l’outil, de l’idée qu’ils se font de ce que sont
la réalité et l’objectivité (épistémologie) et, par là même, du rôle normatif ou
exploratoire qu’ils comptent lui donner.

Nous allons détailler cela sur trois exemples d’outils d’aide à la décision : un tableau
de bord, un score et une analyse multicritère.

Un tableau de bord a un substrat technique simple : il s’agit en général d’une liste ou


d’un tableau croisé, constitué de divers indicateurs reflétant l’activité de l’organisation.
Le niveau d’abstraction est donc faible10. La philosophie gestionnaire renvoie à la fois
au pilotage et au contrôle : un tableau de bord, c’est fait pour renseigner sur l’état de
l’organisation et sur l’état de l’environnement et pour suivre les effets internes et
externes des décisions. La vision simplifiée de l’organisation concerne des acteurs et
leurs relations : sont mis sommairement en scène un pilote et un contrôleur et une
structure de coordination pour remplir le tableau et pour élaborer des décisions à partir
des résultats.
Le substrat technique d’un score est plus sophistiqué. Traditionnellement, on fait
appel à des techniques d’analyse statistique comme l’analyse discriminante. La méthode
permet d’expliquer une variable Y par un certain nombre de variables dites
« explicatives ». L’objectif est de trouver une ou plusieurs équations qui permettent de
classer au mieux les individus dans les différentes catégories définies par Y à partir de
la seule connaissance de leurs caractéristiques sur les variables explicatives. Un certain

9
Sur la manière dont listes, classements, tableaux constituent une « raison graphique », voir Goody
[1977].
10
En revanche, la construction des indicateurs qui composent le tableau de bord peut soulever des
difficultés importantes.
14
nombre d’indicateurs statistiques permettent de juger de la qualité du modèle. Dans les
décisions d’octroi de crédits bancaires, le score permet d’établir un diagnostic sur le
déroulement prévisible (bon ou mauvais) du contrat de prêt. On voit donc qu’il s’agit
d’une véritable modélisation du comportement du client. La philosophie gestionnaire
est celle de l’automatisation des décisions si l’optique est très normative, la
compréhension du comportement des clients et l’assistance à la prise de décision si
l’optique est plus ouverte. La vision simplifiée de l’organisation est en partie liée à la
philosophie gestionnaire : l’automatisation des décisions peut aller de pair avec des
utilisateurs peu qualifés dans un univers centralisé alors qu’une approche plus ouverte
met en scène un management plus moderne avec des utilisateurs plus autonomes et une
hiéarchie qui anime et conçoit la stratégie générale d’octroi des prêts.

Le substrat technique de l’analyse multicritère fait appel à des formalisations


mathématiques moins complexes qu’un score mais reposant sur des concepts finalement
plus sophisitqués. On y trouve des notions de critère, de famille cohérente de critères,
d’actions ou de scénarios, de seuils de préférence, de seuil de veto, d’indépendance au
sens des préférences. Les relations entre les actions sont de dominance, de
surclassement, d’indifférence, d’incomparabilité11.
La philosophie gestionnaire se décline, à un premier niveau, dans les quatre
problématiques définies par Roy : choix, rangement, tri ou simplement description des
actions possibles. Plus fondamentalement, l’analyse multicritère se propose d’aider à la
décision (1) en faisant ressortir ce qui est objectif de ce qui l’est moins, (2) en séparant
les conclusions robustes des conclusions fragiles, (3) en dissipant certaines formes de
malentendu dans la communication, (4) en évitant le piège des raisonnements illusoires,
(5) en mettant en évidence des résultats non controversables une fois compris [Roy,
1993]. On voit bien ici qu’il n’est pas seulement question de techniques permettant de
raisonner sur plusieurs critères au lieu d’un seul : certes, la philosophie gestionnaire de
l’approche multicritère emprunte à la recherche opérationnelle l’idée de travailler sur
un modèle pour aider à sélectionner des solutions - ce que traduisent les quatre
problématiques citées plus haut - mais la filiation de ces méthodes est surtout à
rechercher du côté des théories du choix social. Comme l’ont constaté plusieurs auteurs
[par exemple Pomerol et Barba-Romero, 1993, Munier, 1993], il y a identité
conceptuelle entre le problème de l’agrégation des opinions de juges sur des actions et
celui de l’agrégation des évaluations des actions sur des critères multiples. Or les
théories du choix social (Borda, Condorcet, Arrow, etc.) ont été élaborées par des
chercheurs qui travaillaient dans le champ des sciences politiques sur des questions,
pour simplifier, de démocratie : comment élaborer une procédure d’agrégation des
votes individuels qui reflète au mieux la volonté collective, donc l’intérêt général ? On
retrouve explicitement cette préoccupation dans l’approche multicritère : il s’agit
d’introduire autant de raison que possible dans un processus de décision, tout en
respectant les jeux des acteurs. On peut, d’ailleurs, mettre en parallèle cet idéal
démocratique et d’honnêteté véhiculé par l’approche multicritère avec le principe
d’isonomie - absence de parti pris - proposé par Hatchuel [1994] pour garantir le
caractère scientifique de l’intervention du chercheur dans l’entreprise et avec le principe
de « normativité faible » qui qualifie, selon Lautmann [1994], l’approche crozierienne

11
Pour des développements complets se reporter à Roy [1985] et Roy, Bouyssou [1993].
15
des organisations : tout se passe comme si l’acteur qui aide à la décision était « l’allié
des réformateurs idéaux du système, [...] que ces réformateurs existent ou non »12.
La vision simplifiée de l’organisation peut paraître inexistante : c’est ce que
laisserait penser le caractère apparemment très général de la formulation du problème.
Qui pourrait contester que décider, c’est choisir, trier, ranger ou simplement décrire des
actions potentielles évaluées sur un ensemble de critères ? En réalité, la vision
simplifiée de l’organisation concerne, comme pour un tableau de bord ou un score, les
relations en acteurs. Pour l’analyse multicritère, elle s’articule autour de deux éléments
:

• d’une part, un tableau multicritère n’est pas un simple tableau multivarié. Il s’agit
d’évaluer les performances des actions sur des dimensions - les critères - qui
permettent des comparaisons rigoureuses en termes de préférences. Les critères
retenus constituent donc une véritable théorie de l’efficacité des actions.
• d’autre part, les procédures d’agrégation des critères sont la version analytique
d’une véritable négociation en univers multiacteurs ou multi-institutionnel : la
manière de comparer les actions et de parvenir à une proposition s’apparente à un
processus de recherche de compromis. Il s’agit donc d’une théorie de l’efficacité
des modes de relations entre acteurs.

Une organisation étant faite, nous l’avons vu, de relations et de connaissances,


thérorie de l’efficacité de l’action et théorie de l’efficacité des relations entre acteurs
constituent bien une théorie de l’organisation. On peut d’ailleurs constater que les plus
beaux succès de l’approche multicritère concernent deux types d’univers
organisationnel :

• des services de recherche opérationnelle internes à une entreprise, qui utilisent


l’approche multicritère à la fois parce que la dimension cognitive du problème
nécessite de faire appel à un outil et parce que le rôle de ce genre de service est, en
principe, de fournir des études « sans parti pris », aussi objectives et rigoureuses que
possible (par exemple, les services d’étude de la RATP ont utilisé les méthodes
Electre pour effectuer un rangement des stations à rénover en priorité)
• des coopérations multi-institutionnelles, par exemple dans le domaine de la gestion
environnementale [Maystre, Pictet et Simos, 1994], très proches de la philosophie
gestionnaire (besoin d’un outil qui permette de dépasser des jeux purement
politiques) et de la vision simplifiée des relations organisationnelles décrites plus
haut.

3.3. Dynamique des outils d’aide à la décision

On peut situer sur le graphique de la Figure 3 le trajet suivi par la contextualisation


d’un tableau de bord, d’un score, d’une analyse multicritère. Le point de départ sera en
général, comme pour la plupart des innovations orientées connaissances, du côté droit

12
Lautmann, 1994, p.187. « Une forme faible de normativité y est insérée, qui est d’adresser le propos
au décideur de bonne foi et d’esprit libre qui n’est pas un double du sociologue mais qui fait avec lui un
couple dual ». On ne peut que faire le parallèle avec le couple « décideur-homme d’étude » de Roy.
16
du schéma : ces outils s’intéressent explicitement aux connaissances et implicitement
aux relations organisationnelles. Ensuite, tout dépend de la manière dont le processus
est piloté et de la distance initiale entre l’outil et l’organisation : s’il s’agit d’un modèle
gestionnaire (Figure 4), la formalisation et la contextualisation se feront en même temps
alors que si le modèle est technocratique (Figure 5), donc de type « conception dans le
détail puis livraison aux utilisateurs », l’essentiel de la formalisation se fait d’abord ...
au risque de rencontrer des difficultés dans la phase de contextualisation.

cadrage
degré de
contextualisation
minimum maximum

minimum
1

2
relations connais-
sances
3

4
maximum

une transformation degré de


plus ou moins importante
des relations est nécessaire formalisation

détail

Figure 4 : le modèle gestionnaire du pilotage du changement

17
cadrage
1 degré de
contextualisation
minimum maximum

minimum 1
2

relations connaissances 2

3
3
maximum 4

degré de
formalisation
4

détail

Figure 5 : le modèle technocratique du pilotage du changement13

La différence, du point de vue des pilotes du processus, est que dans le modèle
gestionnaire, la dimension relationnelle implicite de l’outil est prise en compte
explicitement dans l’organisation du changement. Par exemple, une direction générale
peut demander que des tableaux de bord soient conçus dans chaque entité de
l’organisation. Ceci représente un cadre que les acteurs concernés devront tenter
d’élaborer dans le détail par eux-mêmes. Pour peu que la Direction accompagne le
processus et accepte de n’en évaluer qu’a posteriori les résultats, on a la garantie que la
formalisation s’accompagne en même temps de la contextualisation. On obtient aussi ce
résultat si des acteurs extérieurs (des chercheurs-intervenants, par exemple), jouent ce
rôle de médiation entre outil et organisation.

Conclusion : les outils d’aide à la décision entre conformation


et exploration

L’utilisation des outils d’aide à la décision a évolué depuis la fin des années soixante
: on est passé d’une vision prescriptive forte de leur rôle à une conception beaucoup
plus ouverte. En d’autres termes, on passe d’outils de conformation à des outils
d’exploration14. Ceci ne signifie pas que les outils de conformation réussissaient
vraiment à « conformer » les conduites des acteurs : on sait depuis longtemps l’écart qui
existe entre travail prescrit et travail réel ou, pour reprendre la formulation plus

13
Pour un exposé détaillé de ces modèles, aisni que sur le modèle politique et le modèle de la conquête,
non évoqués ici, voir David [1996].
14
Les termes conformation et exploration sont empruntés à Moisdon [1996]. On trouve notamment
chez Landry [1993] les termes « constraining » et « enabling » et chez Roy et Bouyssou les notions un
peu différentes mais conceptuellement voisines d’approche descriptive et d’approche constructive en
aide à la décision.
18
sophistiquée d’Hatchuel [1994], que l’introduction d’un outil, aussi normatif soit-il, se
traduit toujours par un apprentissage croisé entre le prescripteur et ceux qui sont les
cibles de la prescription. Autrement dit, le caractère plus ou moins contraignant était
surtout dans l’esprit des prescripteurs : par exemple, des outils de la théorie de la
décision comme les arbres de décision, malgré leur caractère apparemment très
normatif, sont utilisés dans la très grande majorité des cas dans une logique
d’exploration de l’espace des savoirs. Il y a néanmoins deux exceptions. D’une part,
lorsque l’outil prescrit réellement une décision, l’organisation peut décider de suivre
l’avis émis par l’outil. Dans ce cas, le processus de contextualisation se fait surtout de
l’organisation vers l’outil. D’autre part, le processus de contextualisation peut échouer,
l’outil n’étant à la fin ni de conformation ni d’exploration. Par exemple, si la mise en
place d’un tableau de bord se fait dans une logique trop technocratique et centralisée, le
risque est que ceux qui fournissent les informations nécessaires, se sentant peu
concernés ou, au contraire, menacés dans leur autonomie, le fassent mal ou trop tard.
L’outil risque alors, bien qu’existant formellement, d’échouer à la fois à contrôler
l’activité et à explorer les conditions de l’efficacité de l’action.
On voit donc que la nature des apprentissages autour de l’introduction d’un outil, et
en particulier d’un outil d’aide à la décision, varie suivant que l’outil est conçu dans une
logique de conformation ou dans une logique d’exploration, suivant le modèle de
pilotage du processus de contextualisation et suivant le moment où l’outil passe de la
phase de conception à une phase plus autonome d’utilisation courante. Les trois aspects
sont liés : plus l’approche est de conformation et plus la contextualisation aura de
chance d’être pilotée de manière technocratique et centralisée et plus l’outil sera livré
aux utilisateurs sans la coopération concepteurs-utilisateurs qui permettrait des
apprentissages croisés suffisamment riches pour garder à l’outil une part de son pouvoir
d’exploration. Le risque est alors de voir l’outil s’autonomiser complètement, jusqu’à
empêcher les acteurs, si le contexte change, de remettre en cause leurs représentations
du réel. Plus, au contraire, l’outil sera conçu dans une optique exploratoire et plus le
processus de contextualisation aura de chances d’être gestionnaire et décentralisé, et
plus la conception de l’outil relèvera d’un processus d’« ingénierie simultanée »
permettant des apprentissages croisés beaucoup plus riches. Mais si les acteurs
acquièrent ce degré de clairvoyance, jusqu’à quel point l’outil est-il ensuite nécessaire ?
Entre outil normatif et outil jetable, il y a tout un continuum de couples
outils/utilisation. Il ne s’agit plus seulement ici de confronter organisation réelle et
organisation implicitement véhiculée par l’outil, mais d’élaborer une théorie adéquate
du pilotage du changement, c’est-à-dire une théorie de l’intervention. La question reste
ouverte de savoir à quelle « bonne distance » de l’organisation concevoir et placer un
outil d’aide à la décision et comment en piloter la contextualisation : trop proche ou
trop éloigné, ou avec un modèle de pilotage du changement décalé, il peut échouer à
créer une tension génératrice d’apprentissage.

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