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MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES


ET MÉTHODES DE LUTTE
par Guy RAYNAL
Maître assistant de Pathologie végétale, I.N.A.P.G., 78850 THIVERVAL GRIGNON

DEUXIÈME PARTIE : Principales maladies des cultures et méthodes de lutte

I. INTRODUCTION II. MALADIES DES CÉRÉALES À PAILLE


ET DU MAÏS
63.– Diagnostiquer une maladie est le préalable indis-
pensable à la mise en œuvre de méthodes de lutte appro-
priées. C’est donc un acte déterminant, mais générale- A. Généralités
ment difficile, car les symptômes sont souvent variables. Ils 64.– Les maladies des céréales ont de tout temps préoccupé
dépendent bien sûr du parasite en cause, mais aussi de la les hommes, en raison des dommages considérables qu’elles
plante (variété, stade de développement) et des condi- provoquaient sur ces cultures qui constituaient bien souvent
tions de l’environnement. Ceci est particulièrement vrai la base de l’alimentation. Les rouilles, oïdiums, charbons,
pour les viroses, les bactérioses et les mycoplasmoses caries, ergot du seigle étaient redoutés à juste titre, jusqu’à un
Liste dont la détermination ne peut être effectuée avec sûreté passé récent. L’importance de ces maladies a fortement dimi-
que par des spécialistes disposant des moyens adéquats. nué, notamment en France et dans l’Europe de l’Ouest, à par-
tir de la moitié du 20e siècle, grâce à l’emploi de variétés ayant
On peut avoir des symptômes caractéristiques, mais, sou-
une meilleure résistance (rouilles, oïdium), ou par des traite-
vent, plusieurs agents pathogènes interviennent en
ments de semences (charbons, caries) ou par l’abandon quasi
Ta b l e même temps et provoquent des symptômes complexes,
complet du seigle (ergot). Pour autant, ces maladies ne doi-
notamment dans le cas des maladies dues aux parasites
vent pas être négligées, car elles sont toujours présentes et sus-
du sol. De plus, on observe fréquemment des convergen-
ceptibles de faire des dégâts importants lorsque les conditions
ces de symptômes: deux parasites très différents peuvent
leur sont favorables ou lorsqu’apparaissent des races nouvelles
entraîner chez la plante des manifestations voisines, voire
des parasites (ex.: rouille jaune, oïdiums).
Index identiques (ex.: flétrissements, jaunissements, pourritu-
res, tumeurs, etc.). De la même façon, il est possible de De plus, l’augmentation spectaculaire des rendements a
confondre certaines agressions de ravageurs animaux été accompagnée de nouvelles techniques culturales et
(insectes, nématodes, p. ex.), de même que des accidents d’assolements céréaliers intensifs. De ce fait sont appa-
physiologiques, avec des attaques de micro-organismes. rues importantes des maladies favorisées par le retour
Glossaire Enfin, l’examen visuel est souvent insuffisant pour déter- rapide des céréales sur les mêmes parcelles, alors qu’elles
miner l’agent causal. Il faut avoir recours à des techni- étaient autrefois ignorées ou considérées comme négli-
ques qui sont du ressort des laboratoires spécialisés. Il geables. C’est le cas par exemple des piétins, septorioses,
faut donc être averti des possibilités d’erreur, que seule fusarioses, helminthosporioses et des maladies à virus.
l’expérience permet d’éviter le plus possible. Dans ce qui Pour combattre ces maladies, les traitements phytosani-
suit, la description succincte des maladies (portant sur- taires sont largement utilisés en France, notamment ceux
tout sur les mycoses), ne prétend donc pas résoudre tous effectués en cours de végétation, qui se sont généralisés
les cas. Elle donne seulement des bases pour la reconnais- depuis quelques années. D’abord pratiquée de façon
sance des symptômes caractéristiques des affections les assez empirique, l’utilisation des fongicides est de plus en
plus courantes. plus raisonnée, grâce à l’emploi de méthodes basées sur
les diagnostics des risques de maladies.
Etant donné la complexité du diagnostic et la quantité de
maladies présentes sur les nombreuses espèces cultivées
en France, des systèmes experts de diagnostic informatique B. Symptômes, biologie et épidémiologie des
seront progressivement mis en place par les divers spécia- maladies fongiques des Céréales à paille
listes, pour être utilisés par les Agriculteurs, les Con- 65.– Le tableau de la figure 13 récapitule les principales
seillers agricoles, le Service de la Protection des Végétaux, maladies fongiques et les parasites en cause.
les Instituts Techniques et les Firmes phytosanitaires.
Enfin, les conseils que nous donnerons pour la lutte phy- 1. Les Rouilles
tosanitaire ne pourront pas être détaillés. En particulier, 66.– Ce sont de graves maladies épidémiques des céréales
nous n’établirons pas la liste et les doses des matières dans le monde entier. Actuellement, en France, la rouille
actives (très nombreuses) utilisables sur telle ou telle jaune du blé et les rouilles brunes de l’orge et du blé sont
maladie. Cette liste est en effet fluctuante en fonction des les plus à craindre. En provoquant un échaudage des
progrès réalisés par l’Industrie. Elle peut être aisément plantes, elles peuvent diminuer considérablement le ren-
consultée dans l’Index Phytosanitaire de l’ACTA, remis à dement et la qualité des grains. Plus l’attaque est précoce,
jour chaque année. plus leur effet dépressif est important.

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MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE
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Champignon parasite
Culture et maladie Nom Place dans la classification
BLE
Basidiomycètes
Rouille jaune Puccinia striiformis Urédinale
Rouille brune Puccinia triticina Urédinale
Rouille noire Puccinia graminis Urédinale
Charbon nu Ustilago tritici Ustilaginale
Carie commune Tilletia caries Ustilaginale
Carie naine Tilletia brevifaciens Ustilaginale
Ascomycètes
Oïdium Erysiphe graminis Erysiphale
Piétin-échaudage Gaeumannomyces Sphaeriale
graminis
Champignons Imparfaits
Piétin-verse Pseudocercosporella Moniliale
herpotrichoides
Fusarioses Fusarium roseum Moniliale
Fusarium nivale
Moniliale
Septorioses Septoria nodorum Sphaeropsidale
Septoria tritici Sphaeropsidale
Rhizoctone Rhizoctonia cerealis Champignon stérile
ORGE Liste
Basidiomycètes
Rouille brune Puccinia hordei Urédinale
Charbon nu Ustilago nuda Ustilaginale
Charbon couvert Ustilago hordei Ustilaginale
Ascomycètes
Oïdium Erysiphe graminis Erysiphale Fig. 14. – Rouille brune du blé (Photo G. Raynal) Ta b l e
Champignons Imparfaits
Helminthosporioses Helminthosporium
gramineum
Helminthosporium teres Moniliale
Moniliale
Rhynchosporiose Rhynchosporium secalis Moniliale I n dex
Fusarioses Fusarium roseum Moniliale
Fusarium nivale Moniliale
AVOINE
Basidiomycètes
Rouille couronnée Puccinia coronata Urédinale Glossaire
Charbon nu Ustilago avenae Ustilaginale
Charbon couvert Ustilago levis Ustilaginale
SEIGLE
Basidiomycètes
Rouille brune Puccinia dispersa Urédinale
Ascomycètes
Ergot Claviceps purpurea Hypocréale
Fig. 13. – Principales maladies fongiques des céréales à paille

Les symptômes en cours de végétation se caractérisent par


des pustules pulvérulentes, les urédosores, producteurs
d’urédospores (15), qui font éclater les épidermes des
organes malades. Il s’ensuit une importante perte d’eau.
De plus, les urédosores se forment dans les parenchymes,
avec pour conséquence une diminution de la photosyn-
thèse. L’ aspect des urédosores est différent selon les
rouilles. Ils sont jaune vif, très petits, disposés en séries
linéaires sur les limbes, les gaines, parfois les glumes et les
grains verts chez la rouille jaune (cf. fasc. 2362). Ils sont Fig. 15. – Rouille noire du blé
(Photo Service Pathologie I.N.A.-P.G.)
brun-orangé à roux, ronds, dispersés sur le limbe chez les
rouilles brunes (fig. 14). Chez la rouille noire, ils sont de En fin de saison, sur les organes plus ou moins desséchés, se
grande taille, allongés, bordés par des lambeaux d’épi- forment des téleutosores (15), également d’aspect particu-
derme, brun-roux et se forment surtout sur les gaines, lier selon les diverses rouilles: très petits, noirs, en séries sur
rarement sur les feuilles (fig. 15). La rouille couronnée de feuilles et gaines pour la rouille jaune; brun-noir, couverts
l’avoine se manifeste par des urédosores jaune-orangé par l’épiderme chez les rouilles brunes et la rouille couron-
dispersés sur les limbes et les gaines. née; noirs, largement déhiscents, chez la rouille noire.

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La biologie des rouilles des céréales est souvent complexe


(15). Ainsi, le cycle complet de la rouille noire se déroule
en alternance sur les céréales et sur l’épine-vinette, sur
laquelle se forment les écidies. La rouille couronnée déve-
loppe ses écidies sur des Rhamnus . Dans le cas des
rouilles brunes, les hôtes écidiens sont variés. Pour la
rouille jaune, l’hôte écidien est inconnu. Le rôle épidé-
miologique des hôtes écidiens est relativement peu
important, car les rouilles peuvent parfaitement se per-
pétuer sous la forme asexuée productrice d’urédospores.
La dissémination des rouilles s’effectue par le vent et les
courants aériens qui transportent les urédospores à grande
distance.
Bien que de nombreuses graminées sauvages et cultivées
puissent héberger les espèces de Puccinia responsables de
rouilles de céréales, il existe chez ces dernières une forte
spécialisation parasitaire. Ainsi, une même espèce de Puc-
Fig. 16. – Carie commune du blé (Photo G. Raynal)
cinia présente des formes spécialisées, qui n’attaquent que
tel ou tel type de céréale (ex.: Puccinia striiformis forme La contamination des plantes a lieu au moment de la flo-
Liste spéciale tritici n’attaque que le blé, la forme spéciale hor- raison dans le cas des charbons nus du blé et de l’orge, les
dei n’attaquant que l’orge). Enfin, en fonction des varié- spores des épis charbonneux allant contaminer les ovaires
tés cultivées, peuvent se différencier des races de viru- des plantes saines. Ces derniers produisent des grains
lence différente (38). d’aspect normal, mais qui renferment le mycélium
d’Ustilago près de l’embryon. Chez la carie commune, le
Ta b l e La survie hivernale des rouilles s’effectue principalement charbon nu de l’avoine, les charbons couverts, la contami-
sous la forme asexuée (urédospores) qui se maintient sur nation a lieu lors de la germination des semences qui ont
les céréales et leurs repousses, ou sur certaines graminées été polluées en surface par les spores, au moment de la
sauvages. Dans le cas de la rouille jaune, qui prolifère sous récolte. Dans le cas de la carie naine, la contamination au
les climats à printemps frais et qui ne craint pas les grands moment de la germination des semences est due aux spo-
Index froids, l’hivernation s’effectue sur place. Les rouilles brunes res tombées sur le sol, dans lequel elles survivent très long-
qui nécessitent des températures un peu plus élevées pour temps. Dans tous les cas, la plantule est infectée de façon
se développer, hivernent dans les régions à hiver doux. interne. Le mycélium du champignon suit le développe-
Enfin, la rouille noire, exigeante en température, ne survit ment de la plante, se généralise aux diverses talles et provo-
en hiver sous la forme d’urédospores que dans le sud de que plus tard les symptômes décrits précédemment.
Glossaire l’Espagne et l’Afrique du Nord. A partir de ces foyers
hivernaux, elle envahit progressivement l’Europe Occiden- La conservation des charbons et caries (sauf pour la carie
tale au cours du printemps et de l’été. naine) s’effectue par les semences, contaminées de façon
interne ou en surface. L’utilisation de semences non trai-
2. Charbons des épis et Caries tées comporte donc de graves risques.
67.– Ces maladies affectent les épis. Grâce aux traitements Remarquons qu’il existe des charbons foliaires des céréa-
de semences, elles ne font pratiquement plus de dégâts en les, dont l’importance économique est nulle en France,
France. Il n’en est pas de même dans d’autres pays. mais qui font des dégâts dans les pays chauds et secs.
Les symptômes des charbons nus sont visibles à la florai-
son. Les ovaires et les enveloppes florales sont détruits et 3. L’Oïdium
remplacés par des masses noires et pulvérulentes consti-
tuées des spores des Ustilago. Ces masses se détachent 68.– Cette maladie est surtout importante sur les orges,
très facilement (cf. fasc. 2362). Les charbons couverts, par chez lesquelles le système racinaire des plantes malades
contre, respectent les enveloppes florales, si bien que les est réduit, ce qui a pour conséquence un échaudage.
masses sporifères pulvérulentes, recouvertes par ces
enveloppes, restent souvent intactes jusqu’à la récolte. Les symptômes sont d’abord dans les parties basses des
plantes, des taches chlorotiques sur les feuilles, puis des
Chez la carie commune du blé, les symptômes sont bien feutrages mycéliens blancs porteurs des spores de dissé-
visibles dès l’épiaison, où les épis ont une couleur vert- mination (conidies). En fin de végétation, de minuscules
bleuâtre. A la maturité, les épis cariés ont un aspect périthèces (16) noirs apparaissent sur les coussinets
ébouriffé (fig. 16), dû à la présence de grains malades mycéliens devenus grisâtres (fig. 17).
sphériques qui écartent les glumes et les glumelles. Ces
grains s’écrasent facilement et laissent échapper la pou- La dissémination du parasite est éolienne, à grande dis-
dre brune et nauséabonde des spores. Dans le cas de la tance, grâce aux conidies. Ces dernières germent bien à
carie naine, rare en France, les plantes sont chétives et les forte humidité, mais pas dans l’eau. En particulier, les
spores sont agglutinées en masses compactes qui tom- pluies sont néfastes aux oïdiums, qui, par contre, se déve-
bent sur le sol à la récolte. loppent bien en conditions sèches.

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La contamination des céréales peut avoir lieu dès
l’automne, à partir des repousses et de certaines grami-
nées sauvages. Les périthèces, organes de conservation du
parasite, ont un rôle mal défini dans la contamination.
Les céréales de printemps sont contaminées à partir de
l’inoculum présent sur les céréales d’automne, le cham-
pignon survivant parfaitement pendant l’hiver, même
sous de basses températures.

Liste

Fig. 17. – Oïdium du blé (Photo I.T.C.F.)

L’évolution des épidémies dépend essentiellement des con- Ta b l e


ditions climatiques et des variétés. L’oïdium prolifère à
des températures comprises entre 15 et 20° C, par belles
journées ensoleillées et nuits fraîches et humides.
Notons qu’Erysiphe graminis montre une spécialisation Fig. 18. – Piétin verse du blé
parasitaire sur les diverses céréales et peut former des races. (Photo Service Pathologie I.N.A.-P.G.) I n dex
Les systèmes de prévision des risques de piétin-verse sur blé
4. Les Piétins intègrent la sensibilité variétale des gaines et des tiges, et
69.– Le terme « piétin », désigne des affections des raci- les sommes des températures journalières, l’ensemble
nes et du pied des céréales. On distingue principalement définissant des unités de développement (U.D.). Par exem- Glossaire
le piétin-verse, très fréquent en climat doux et humide et ple, « Etoile de Choisy » variété de référence, nécessite
le piétin-échaudage, également répandu, mais dont les 600 U.D. pour que le champignon atteigne la tige (soit
dégâts sont mal évalués. Ces deux maladies sont favori- l’équivalent de 60 jours à la température constante de 10°
sées par les assolements céréaliers intensifs. C), alors que « Talent » nécessite 725 U.D.
70.– Le piétin-verse attaque toutes les céréales, mais c’est
71.– Le piétin-échaudage, comme le piétin-verse, est
sur les blés d’hiver qu’il provoque des dégâts importants
pathogène sur toutes les céréales et sur de nombreuses
dans les régions à hiver doux et à printemps pluvieux. Il
graminées. Il provoque la nécrose et la destruction des
peut entraîner la verse des plantes par cassure de la tige,
racines, qui noircissent. Il s’ensuit, surtout sur les blés de
mais, même en l’absence de verse, lorsque plus du quart
printemps semés tardivement, des jaunissements par
des tiges sont atteintes, les rendements peuvent être affec-
foyers, bien visibles après épiaison. Les plantes montrent
tés. Les symptômes peuvent s’observer sur les gaines des
bientôt des épis blancs, échaudés.
jeunes plantes, dès avant l’hiver. Mais c’est au début du
printemps (fin tallage-début montaison) que l’on décèle Le champignon se conserve longtemps dans le sol, sur les
les premières taches ocellées caractéristiques (fig. 18). Ces débris de végétation. Sa dissémination a lieu par les par-
nécroses allongées, sous le ler nœud, montrant des stromas ticules de terre portées par les instruments de culture. Il
bruns du champignon, touchent d’abord les gaines, peut passer d’une plante à l’autre par les racines. L’infes-
qu’elles traversent successivement, puis les tiges. Ces der- tation massive des sols et donc les fortes attaques ont lieu
nières peuvent être entourées par les lésions et casser. à la suite de la répétition des cultures céréalières et
La conservation du parasite s’effectue sur les débris de notamment lorsque le précédent du blé est une betterave.
récolte non enfouis et sur de nombreuses graminées, de
même que sur les repousses de céréales. 72.– Le rhizoctone est de plus en plus fréquemment
observé, surtout en années humides. Le parasite, vivant
La dissémination des spores, formées sur les stromas, de dans le sol provoque des nécroses décolorées allongées et
même que la pénétration du parasite dans la plante, ont bordées de brun, à la base des tiges. Il peut entraîner des
lieu par temps pluvieux et frais. Le développement du fontes de semis. Sa recrudescence serait due à l’emploi de
mycélium dans les gaines et les tiges est fonction de la fongicides actifs contre les autres maladies du pied des
température, l’optimum étant voisin de 18° C, mais sa céréales, mais auxquels lui-même n’est pas sensible.

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5. Fusarioses et Septorioses 6. Les taches foliaires des Orges


73.– Les fusarioses sont dues à diverses espèces de Fusa- 75.– Les helminthosporioses, dues à Helminthosporium
rium, champignons du sol, qui peuvent néanmoins être gramineum et H. teres sont fréquentes sur les orges. Elles
véhiculés par les semences. Tous les stades de développe- sont transmises par les semences. H. gramineum provoque
ment des céréales peuvent être atteints par des nécroses à de longues stries jaunes internervaires sur les jeunes
Fusarium. En particulier, Fusarium nivale, qui se manifeste plantes issues de semences contaminées. Ces stries bru-
surtout dans les régions à hivers et printemps froids, nissent et les feuilles se découpent en lanières. Les grains
entraîne des fontes de semis et des manques à la levée. Il sont attaqués au cours des contaminations secondaires,
peut également provoquer des anneaux nécrotiques noir- le champignon s’abritant sous les enveloppes. La maladie
violacé au-dessus des nœuds. Lorsque les épis sont atta- est favorisée par de fortes humidités et des températures
qués, les glumes montrent des colorations brunâtres à leur basses au printemps. H. teres provoque des stries nécroti-
partie inférieure. Les épis malades, plus ou moins échau- ques en réseau sur les feuilles, surtout sur les orges
dés, recèlent des grains porteurs du champignon. Fusa- d’hiver. Il se développe bien par des températures et une
rium roseum provoque les mêmes types de dégâts, mais se humidité élevées.
développe bien à des températures plus élevées et peut être 76.– La rynchosporiose est très fréquente sur orge et sur
dommageable au cours des étés humides. Les symptômes seigle, surtout dans les régions humides et froides. Les
nécrotiques sont plus diffus sur les bases des talles et des feuilles montrent des taches blanchâtres bordées de brun,
nœuds. En cas d’attaque des épis, ceux-ci montrent sou- en losange. Généralement, la base des feuilles est la pre-
vent la moisissure rose caractéristique de F. roseum. mière attaquée, ce qui peut entraîner leur dessèchement. Le
Liste parasite se conserve sur les débris de récolte non enfouis.
74.– Les septorioses sont importantes surtout sur blé
d’hiver. Les champignons responsables, Septoria nodo-
rum et S. tritici, sont fréquemment en mélange. S. tritici 7. L’Ergot
est souvent visible le premier, sur les jeunes plantes, puis
Ta b l e S. nodorum devient prédominant. Toutefois, en année 77.– Cette maladie, qui attaque de nombreuses grami-
pluvieuse, les deux espèces peuvent attaquer conjointe- nées, sévit surtout sur seigle. Les épis montrent des mas-
ment tout au long de la saison. ses noires de forte taille, les ergots, qui sont très toxiques
lorsqu’ils sont broyés avec les farines (fig. 19). Ces ergots
S. nodorum provoque d’abord des manques à la levée et sont des organes de conservation (sclérotes), dont une
des fontes de semis. Sur les plantes adultes, les nœuds partie tombe sur le sol à la récolte. Au début du prin-
Index
montrent des nécroses déprimées. Les premières feuilles temps, ils différencient de petits organes pédicellés qui
attaquées sont celles des parties basses, le parasite remon- produisent des ascospores (16). Celles-ci attaquent les sei-
tant dans les étages supérieurs à la faveur des pluies. Les gles au moment de leur floraison, qui est précoce. Le
feuilles portent des taches plus ou moins losangiques, parasitisme des ovaires donne naissance aux ergots. Des
Glossaire brunes puis jaunes, porteuses en leur centre de petits attaques sur blé ont été signalées, à la suite de contamina-
points bruns, les pycnides du champignon, qui produi- tions secondaires par le stade asexué du parasite, ce stade
sent des spores contenues dans des gelées (cf. fasc. 2362). se formant sur diverses graminées, notamment les Vul-
En cas de forte attaque, les feuilles peuvent se dessécher. pins. Ces graminées à floraison précoce servent de relais
Si la dernière feuille est très atteinte, le rendement est pour la maladie sur blé, dont la floraison tardive ne per-
affecté. La maladie peut remonter jusqu’aux épis qui met pas qu’il soit attaqué directement par les ascospores.
montrent alors des glumes dont la partie supérieure pré-
sente des taches brun-violacé. Les grains attaqués sont C. Méthodes de lutte contre les mycoses
échaudés, présentent une tache noire sur l’embryon
(moucheture) et conservent le parasite. 78.– La lutte contre les maladies des céréales fait d’abord
appel à des techniques culturales appropriées. D’un point
S. tritici provoque des symptômes surtout jusqu’à la fin de vue sanitaire, la rotation des céréales avec d’autres cul-
du tallage. Les feuilles montrent des taches allongées, jau- tures s’impose. Il convient également de soigner la des-
nes puis brunes, à centre desséché, se couvrant de pycni- truction des résidus de récolte par enfouissement, particu-
des noires bien visibles, car plus grosses que celles de S. lièrement en cas de rotations courtes ou absentes.
nodorum.
L’utilisation de variétés à bon niveau de résistance est
Les attaques d’épis sont rares dans nos régions, si bien recommandée. Cependant, aucune variété n’est résis-
que le parasite n’est pas transmis par la semence. S. tritici tante à toutes les maladies. Au contraire, assez souvent,
est surtout grave dans les régions et pays méditerranéens. une variété résistante à un parasite est sensible à d’autres.
Il convient donc de choisir ses variétés en fonction du
Outre la transmission par les semences dans le cas de S.
parasitisme régional ou local prédominant .
nodorum, les deux espèces se conservent sur les débris de
récolte laissés à la surface du sol, sur lesquels elles peuvent Le traitement des semences par des fongicides (de contact
se multiplier et sporuler pendant l’hiver, la dissémination et systémiques) est actuellement généralisé. Il permet de
des spores étant effectuée par la pluie. Notons qu’en plus combattre très efficacement les agents des caries, char-
des spores asexuées produites par les pycnides, se for- bons, fontes de semis et maladies des jeunes plantes à
ment des périthèces (type Leptosphaeria) dont les ascos- Fusarium, Septoria, Helminthosporium et Oïdium, ce der-
pores (16) sont capables d’attaquer les jeunes plantes. nier sur les orges.

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de dépassement de ces seuils, le traitement s’avère néces-
saire, le choix des fongicides parmi les très nombreuses
spécialités commerciales homologuées étant déterminé
par les maladies effectivement présentes.

D. Viroses des Céréales à paille


et méthodes de lutte
79.– Parmi les multiples maladies à virus attaquant les
céréales, la jaunisse nanisante de l’orge est actuellement la
plus importante. Sur les orges, surtout à la fin du tallage,
on observe un jaunissement des feuilles qui débute par
les extrémités. Courant montaison, les plantes se nani-
fient. En cas de forte attaque, les plantes tallent exagéré-
ment et disparaissent. Les épis, lorsqu’ils se forment, sont
chétifs. Les grains, petits et ridés, ne sont pas mûrs à la
récolte. Sur blé tendre d’hiver, à l’épiaison, la dernière
feuille prend une couleur violacée à son extrémité. Les
plantes malades peuvent se dessécher prématurément,
donnant des grains échaudés. Si l’attaque est très forte, la
coloration violette des feuilles se manifeste tôt (tallage- Liste
montaison). Les plantes demeurent alors chétives. Sur
avoine, les symptômes sont les mêmes que sur les orges.
Le virus (appelé BYDV ou VJNO) montre plusieurs sou-
ches de virulence différente. Il est transmis par des puce- Ta b l e
rons (Rhopalosiphum padi essentiellement). Ce virus, de
même que les pucerons, survivent en l’absence de céréa-
les et après la récolte sur les repousses de ces dernières,
sur les maïs et les graminées sauvages. En automne, les
jeunes semis (sensibles au virus jusqu’au stade 2-3 I n dex
feuilles) sont contaminés à partir de ces réservoirs d’ino-
culum, surtout à partir des repousses et des maïs qui sont
Fig. 19. – Ergot du seigle (Photo G. Raynal) alors fortement colonisés par les pucerons. Parmi ceux-
ci, seuls les individus ailés peuvent se déplacer à grande
Les traitements en cours de végétation sont largement
distance et transmettre la virose aux céréales. Ils se multi- Glossaire
pratiqués. Ils visent essentiellement à lutter contre le pié-
plient également sur ces dernières sous forme aptère,
tin-verse, les septorioses, les rouilles, l’oïdium. Ils doivent
laquelle transmet le virus d’une plante à l’autre, par
être appliqués uniquement en cas de nécessité et non de
foyers. Si l’hiver a été suffisamment clément pour que
façon systématique comme c’est trop souvent le cas. Un
subsistent des pucerons, les jeunes céréales de printemps
programme d’aide à la décision des traitements de ces
peuvent être contaminées à leur tour à partir des céréales
maladies sur les blés tendres d’hiver a été mis au point
d’hiver malades, des repousses et des graminées sauvages.
par l’ITCF (FONGITCF). Il détermine les niveaux de ris-
que en fonction des caractéristiques agronomiques de la La lutte contre le VJNO consiste à limiter les populations
parcelle, du climat, de la variété, de la date de semis, du automnales des pucerons vecteurs par la destruction des
stade de la plante (risques de base) et en fonction de l’évo- repousses de céréales et le broyage fin des cannes de maïs.
lution de l’état sanitaire (risque spécifique dû à telle ou Il faut éviter d’effectuer des semis précoces alors que les
telle maladie). pucerons ailés sont encore actifs. En cas de vols impor-
tants de pucerons, la protection insecticide des semis de
Lorsque les risques de base à la montaison et à l’épiaison céréales, avant le stade 3 feuilles, peut s’avérer nécessaire.
sont faibles, le traitement n’est pas conseillé. Un risque de
base moyen entraîne la prévision de 2 traitements contre 80.– Les Mosaïques du blé et des orges provoquent des
le piétin-verse, l’oïdium et la septoriose. Un risque de jaunissements des plantes, plus ou moins sous forme de
base élevé prévoit 2 traitements pendant la montaison petits traits chlorotiques sur les limbes. Les mosaïques du
avec des produits très polyvalents et 1 traitement à blé sont pour l’instant relativement limitées, alors que la
l’épiaison contre septorioses, rouilles et oïdium. mosaïque jaune des orges a pris une extension assez
grande dans le centre, le nord et l’est de la France. Les
Cette prévision globale est affinée par l’observation par virus responsables sont transmis par un champignon du
l’agriculteur de l’évolution des maladies en fonction des sol, Polymyxa graminis, qui se conserve très longtemps
stades de croissance des plantes, en particulier aux stades dans le sol. Le retour rapide d’une céréale sur un sol con-
1-2 nœuds et à l’épiaison. On définit alors un « risque taminé favorise la maladie. Une fois le sol fortement con-
spécifique » en comparant l’état des maladies à un taminé, les rotations deviennent inefficaces. La lutte
moment donné aux seuils de maladie définis par l’ITCF repose alors sur l’emploi de variétés tolérantes ou résis-
comme nécessitant une intervention. En cas d’atteinte ou tantes, qui heureusement existent.

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2361TA MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE

E. Maladies du Maïs La lutte utilise des produits préventifs ou systémiques, en trai-


81.– Contrairement à ce que l’on aurait pu prévoir en tement après les pluies contaminatrices. Deux traitements à
raison de l’extension des surfaces cultivées en maïs, les 15-20 j. d’intervalle (juillet-août) suffisent. Notons que dans
maladies de cette culture sont peu graves en France, certaines situations, des résistances aux benzimidazoles ont
même en régions de monoculture et sous irrigation. été observées en France et dans les pays méditerranéens.
La pourriture des tiges en fin de végétation est la maladie 84. — La ramulariose est responsable de taches foliaires
la plus fréquente. Elle est due à divers Fusarium qui enva- plus ou moins ovoïdes, plus grandes que celles de la cer-
hissent secondairement les tiges vieillissantes. cosporiose, à centre blanc, se craquelant parfois lors de
leur dessiccation. Cette maladie est rarement importante,
La kabatiellose, les helminthosporioses, l’anthracnose, sauf sur les porte-graines en fin de saison, dont les semen-
provoquant des dessèchements du feuillage, entraînent ces peuvent transmettre le parasite. Les traitements anti-
des dégâts très localisés. Cercospora suffisent pour juguler la ramulariose.
Le charbon, spectaculaire, n’est généralement pas domma- 85.– L’oïdium est de plus en plus fréquent, surtout par cli-
geable, de même que la rouille, fréquente en fin de saison. mat sec. Il se manifeste au cours de l’été par une poudre
La lutte est essentiellement culturale, par enfouissement blanche sur le feuillage (forme conidienne Oïdium) sur
soigné des résidus de récolte et repose sur l’utilisation de laquelle apparaissent en fin de saison d’innombrables péri-
variétés à bonne résistance. Les fongicides ne sont abso- thèces (forme Erysiphe) sous la forme de minuscules points
lument pas nécessaires en cours de végétation. Ils sont noirs. La lutte consiste, dès l’apparition des foyers, à appli-
par contre utiles en désinfection des semences pour lutter quer des fongicides anti-oïdium (soufre notamment).
Liste contre les fontes de semis à Pythium et Fusarium. 86.– La rouille apparaît tardivement et, de ce fait, n’est pas
considérée comme importante. Les limbes sont envahis de
III. MALADIES DE LA BETTERAVE pustules pulvérulentes de couleur rouille, les urédosores(l5).
87.– Le mildiou s’attaque aux plantules, qu’il peut
Ta b l e A. Mycoses détruire. Par la suite, par temps frais et humide, les
82.– La betterave est attaquée par des champignons qui feuilles du cœur des jeunes betteraves s’épaississent, se
provoquent des maladies du feuillage en été et automne, déforment et se recouvrent d’un duvet violet constitué
lesquelles entraînent des pertes parfois importantes: cer- des organes de dissémination du parasite. Dès la fin du
cosporiose, ramulariose, oïdium, rouille, mildiou. Les printemps, les symptômes disparaissent avec l’élévation
Index racines et les jeunes plantes sont atteintes par divers des températures, mais le champignon survit dans la
champignons du sol qui sont à l’origine de nécroses et de plante. Il réapparaît sur les porte-graines au printemps
fontes de semis (Pythium, Phoma, Aphanomyces). Le suivant, sur lesquels il peut faire des dégâts considérables.
tableau de la figure 20 répertorie les principales maladies. La maladie se conserve sur les débris de végétation et est
transmise par la semence. La désinfection des semences avec
Glossaire 1. Maladies fongiques du feuillage un anti-Oomycète systémique (ex.: métalaxyl) protège
efficacement les jeunes plantes pendant au moins 2 mois,
83.– La cercosporiose se manifeste début juillet. Elle se pré-
c’est-à-dire pendant leur période de sensibilité.
sente sous la forme de petites taches circulaires à centre gris,
auréolées de brun-violet (cf. fasc. 2362). Lorsque les taches
sont trop nombreuses, les feuilles se dessèchent, entraînant 2. Le « Pied noir» et les fontes de semis
de fortes baisses de rendement et une réduction de la 88.– Ces maladies des plantules sont dues à un complexe
richesse en sucre des racines. Le champignon responsable de champignons, parmi lesquels les plus fréquents sont
peut être transmis par la semence. Il se conserve également Phoma, Pythium et Aphanomyces. Des nécroses noires
sur les résidus de récolte. La contamination a lieu dès le stade des collets et des racines se manifestent, qui entraînent la
plantule, mais la maladie, favorisée par des températures mort des plantules. Les symptômes apparaissent surtout
élevées, ne s’extériorise qu’en été, où son développement est dans les parties les plus humides des champs, favorables
alors soumis à la pluviométrie. C’est ainsi qu’elle peut au développement des Pythium et Aphanomyces. La lutte
atteindre de graves proportions dans les pays méditerra- consiste à traiter les semences, de préférence avec des
néens (Grèce, Italie) en cultures irriguées. matières actives, ou des associations, à action curative.
Maladie Champignon parasite Place dans la classification
Sur feuillage: Cercosporiose Cercospora beticola Ch. Imparfait—Moniliale
Ramulariose Ramularia betae Ch. Imparfait—Moniliale
Oïdium Erysiphe betae Ascomycète—Erysiphale
Rouille Uromyces betae Basidiomycète—Urédinale
Mildiou Peronospora farinosa Oomycète—Péronosporale
Sur jeunes plantes: Pied noir et fontes de semis Phoma betae Ch. Imparfait—Sphaeropsidale
Pythium spp. Oomycètes—Pythiales
Aphanomyces cochlioides Oomycète—Saprolégniale
Fig. 20. – Principales maladies fongiques de la betterave

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MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE
TA 2361
B. Viroses

1. Les Jaunisses
89.– Ces maladies sont susceptibles de provoquer des
pertes très importantes de rendement en tonnage de raci-
nes (jusqu’à 30 %) et en teneur en sucre.
On distingue 2 types de jaunisses, selon les virus mis en
cause: la jaunisse modérée, très répandue et la jaunisse
grave, moins fréquente. Dans les deux cas, on constate un
jaunissement et un épaississement des feuilles, les nervu-
res restant vertes. La jaunisse modérée se reconnaît à la
couleur jaune-orangé des feuilles âgées (cf. fasc. 2362).
La jaunisse grave donne des couleurs jaune-citron et pro-
voque des taches nécrotiques. Lorsque les deux virus sont
présents, le symptôme de mosaïque grave l’emporte.
La transmission des deux virus est effectuée par des puce-
rons, parmi lesquels Myzus persicae (puceron vert du
pêcher) et Aphis fabae (puceron noir de la fève) sont les
plus répandus. De nombreuses adventices, les cultures Liste
d’épinards, les betteraves porte-graines et potagères, les
silos de betteraves fourragères, hébergent à la fois les virus
et les pucerons et constituent les points de départ des épi-
démies.
Ta b l e
La lutte, en l’absence de résistance variétale intéressante,
repose d’abord sur des méthodes culturales visant à
réduire les sources primaires de contamination et sur des
semis précoces, de sorte que les plantes soient à un stade
de développement suffisamment avancé, peu sensible, I n dex
lors de l’arrivée des vols de pucerons.
Les traitements insecticides sont appliqués dès le semis Fig. 21. – Fig. 21.- Rhizomanie de la betterave
sous forme de micro-granulés pour protéger les plantu- (Photo Putz-I.N.R.A., Colmar)
les, très sensibles, contre les éventuels pucerons. La pro-
tection peut s’étendre jusqu’à 2 mois. Environ 50 jours La seule méthode de lutte repose actuellement sur des mesu- Glossaire
après le semis, en fonction des populations de pucerons, res prophylactiques, la désinfection du sol, efficace, étant
on applique en 1 ou 2 fois des aphicides sur le feuillage d’un coût prohibitif. Il convient de drainer les parcelles, de
(les seuils d’intervention sont de 1 à 2 pucerons verts et détruire les foyers malades présents en zone saine, d’entre-
50 à 100 pucerons noirs pour 10 betteraves). poser les betteraves malades sur la parcelle d’où elles pro-
viennent, de nettoyer les matériels de récolte, de ne pas faire
retourner au champ les effluents de sucrerie, de ne pas mul-
2. La Rhizomanie de la Betterave sucrière tiplier les porte-graines dans les zones contaminées. Par
90.– Cette maladie est apparue récemment en France. ailleurs, on peut utiliser des variétés tolérantes. Les nom-
Depuis 1970, elle progresse dans toutes les régions bettera- breuses recherches en cours permettront peut-être de met-
vières. En 1983, 6 000 ha étaient contaminés. Elle provo- tre au point des techniques de lutte efficaces.
que des baisses de rendement de plus de 50 %, aussi bien
en racines qu’en sucre et s’avère préoccupante en raison de 3. La Mosaïque
l’absence de méthodes de lutte réellement efficaces.
91.– Cette maladie fréquente est peu grave, sauf parfois
Les symptômes sont rarement nets sur le feuillage, qui sur les porte-graines. Elle provoque une crispation et un
montre parfois des crispations, des jaunissements des ner- gaufrage des limbes qui présentent des nervures claires et
vures et une tendance à flétrir par temps chaud. Par con- des taches vert-clair, en mosaïque. Le virus responsable
tre, sur la racine, on distingue une prolifération de radicelles est transmis par les mêmes pucerons vecteurs que ceux
retenant la terre, certaines d’entr’elles étant nécrosées des jaunisses, si bien que la lutte aphicide contre ces der-
(fig. 21). Dans la racine principale, les vaisseaux sont nières limite l’extension de la mosaïque.
nécrosés et la coupe de la racine a une teinte grisâtre.
Le virus de la rhizomanie est transmis par un champignon
primitif du sol, Polymyxa betae. Celui-ci vit dans les radi-
celles et est favorisé par des sols lourds, humides, mal drai-
nés, se réchauffant vite au printemps. En raison de la très
longue conservation du champignon dans le sol, une par-
celle contaminée est perdue pour la culture de la betterave.

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2361TA MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE

IV. MALADIES DE LA POMME DE TERRE 94.– La conservation du champignon a lieu sous forme de
mycélium dans les tubercules faiblement atteints, utilisés
92.– Le tableau de la figure 22 résume les principales comme plants.
maladies fongiques et bactériennes en cours de végéta- Les premiers foyers sont dus à ces tubercules malades dont les
tion et pendant la conservation des tubercules. pousses sont porteuses des organes de dissémination du
Phytophthora (sporocystes). A la faveur des pluies et du
A. Mycoses et bactérioses en cours vent, ceux-ci se détachent et vont attaquer le feuillage des
plantes et des cultures voisines. Un temps pluvieux ou de
de végétation fortes rosées et des températures fraîches (10-15° C) sont
favorables à la contamination. L’incubation de la maladie
dure une dizaine de jours. La sporulation est favorisée par
1. Le Mildiou
l’humidité et des températures voisines de 20° C. Ainsi, au
93.– Le mildiou est toujours la maladie fongique la plus cours du printemps et du début de l’été, si les conditions cli-
importante et la plus redoutable de la pomme de terre, matiques sont humides, s’effectuent de nombreux cycles de
avec cependant des fluctuations selon les années, en multiplication du parasite, d’autant plus facilement que ce
fonction des conditions climatiques. dernier sporule et se dissémine abondamment. Entre 2
cycles successifs, le taux de multiplication de la maladie peut
Les symptômes sur les tiges sont visibles dès la levée, sous être très important et l’on peut arriver très rapidement au
forme de brunissements. Plus tard, sur plantes dévelop- seuil épidémique (au bout de 2 à 3 cycles) au-delà duquel la
Liste pées, les folioles se couvrent de taches jaunâtres à la face maladie est difficile, voire impossible, à combattre. En fin de
supérieure, qui bientôt se nécrosent en conservant une saison, l’infection des tubercules a lieu, surtout si le sol est
auréole chlorotique. Par temps chaud et humide, les humide, à partir des sporocystes formés sur le feuillage
fructifications du champignon sont visibles à la face infé- malade laissé en place.
rieure sous la forme d’un duvet blanc (cf. fasc. 2362). Les 95.– La lutte culturale consiste d’abord à réduire les sources
Ta b l e tiges et les pétioles montrent des taches brunes. En con- d’infections primaires, notamment par la destruction des
ditions favorables à la maladie, les parties aériennes peu- repousses et l’utilisation de tubercules sains. Pour cela, un
vent être rapidement détruites et la récolte fortement défanage précoce permet de détruire l’inoculum qui risque-
compromise, voire nulle. Les tubercules malades mon- rait de contaminer les tubercules. Le défanage est égale-
trent extérieurement des taches brunâtres et des nécroses ment indispensable pour les pommes de terre de consom-
Index internes de couleur marron. Ils pourrissent facilement. mation, pour éviter des pourritures de tubercules.

Maladie Parasite Place dans la classification


En cours de végétation:
Mildiou Phytophthora infestans Oomycète—Pythiale
Glossaire
Rhizoctone Rhizoctonia solani Champignon stérile
Gale commune Streptomyces scabies Actinomycète (proche des Bactéries)
Jambe noire Erwinia spp. Bactérie
En conservation:
Gangrène Phoma exigua Ch. Imparfait —Sphaeropsidale
Gale argentée Helminthosporium solani Ch. Imparfait —Moniliale
Fusarioses Fusarium solani Ch. Imparfait —Moniliale
Fusarium roseum Ch. Imparfait —Moniliale
Pourritures molles Erwinia spp. Bactérie
Fig. 22. – Principales maladies fongiques et bactériennes de la pomme de terre

La lutte chimique fait appel à de nombreux fongicides de L’utilisation de variétés résistantes se heurte au phéno-
contact, pénétrants ou systémiques. Les traitements mène fréquent chez Phytophthora infestans d’apparition
d’assurance, répétés tous les 8 jours, conduisent à des de races virulentes. Les variétés de grande consommation
applications inutiles et peuvent dans certains cas s’avérer sont toutes sensibles, mais il existe des différences de
peu efficaces. Les traitements raisonnés ne peuvent être résistance entre les variétés commercialisées.
mis en place qu’avec une surveillance très attentive des
cultures, surtout pour le dépistage des premiers foyers
qui conditionne le premier traitement, lequel est le plus 2. Autres maladies
important. La décision d’intervention est prise en fonc-
tion des périodes à risque et implique d’intervenir immé- 96.– Le rhizoctone est dû à un champignon du sol qui
diatement. Même en cas d’emploi de fongicides systémi- produit des sclérotes sous forme de paillettes brunes à la
ques, il faut rester très vigilant. Notons que, depuis surface des tubercules. Il est préjudiciable uniquement
l’utilisation des acylalanines (métalaxyl) on a vu l’appari- sur les plants, dont il provoque la pourriture des pousses.
tion de souches résistantes à ces fongicides. Leur emploi Une désinfection des plants est nécessaire.
est donc soumis à certaines contraintes (55).

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MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE
TA 2361
97.– La gale commune est extrêmement fréquente. Elle se Les tubercules atteints de gale argentée présentent des
manifeste par de petites pustules ou des épaississements lié- taches claires d’aspect argenté. Ces plages évoluent en
geux des épidermes. Elle ne nuit pas au rendement, mais cours de conservation pour devenir très nombreuses. Elles
affecte la présentation des tubercules. Les attaques sont provoquent à la longue le dessèchement des tubercules.
importantes en sols légers ou sur lesquels des amendements Les fusarioses provoquent des pourritures sèches et des
calcaires ont été apportés. Certaines variétés sont peu sensi- cavités internes tapissées d’un mycélium blanc ou rose,
bles et l’enfouissement d’engrais verts réduit la maladie. ou bleuté. Les Fusarium responsables s’installent à la
D’autres affections des épidermes peuvent être observées, faveur de blessures.
mais plus rarement (gale poudreuse). La redoutable Gale Les pourritures molles, d’origine bactérienne, à odeur
verruqueuse, ou noire, entraînant des tumeurs des bour- nauséabonde, ont une évolution rapide, contrairement
geons souterrains, est désormais très rare en France, aux pourritures à champignons. Elles sont fréquentes à la
grâce à des mesures obligatoires de prophylaxie. suite de blessures et en atmosphère humide.
98.– La jambe noire, due à un complexe bactérien dans 100.– Les mesures générales de lutte sont les suivantes:
lequel domine Erwinia carotovora var. atroseptica, est visi-
ble sur les jeunes plants au cours des printemps froids. Elle – arrachage des fanes, de préférence à la destruction
provoque des nécroses noires des tubercules et de la base chimique;
des tiges, entraînant le flétrissement des parties aériennes. – séchage des tubercules après récolte;
La désinfection des plants limite la maladie. – délai entre la récolte et la mise des tubercules au froid,
afin de favoriser la cicatrisation des blessures;
B. Maladies des tubercules en cours – conservation à basse température, en atmosphère ventilée; Liste
de conservation – désinfection des locaux de stockage et du matériel;
99.– Ces maladies sont susceptibles de faire perdre une – traitement des tubercules de semence par des fongicides
partie importante de la récolte, ou du moins de la dépré- appropriés, en pulvérisations à ultra-bas-volume, qui évi-
cier. Elles se sont développées en particulier en raison de tent les inconvénients du trempage dans un bain fongicide. Ta b l e
la mécanisation de la récolte et des nouvelles techniques
de conservation frigorifique. C. Maladies à Virus
La gangrène se manifeste par une dépression en « coup 101.– Les viroses de la pomme de terre sont nombreuses,
de pouce » à la surface des tubercules qui, en coupe, pré- ainsi que le montre le tableau de la figure 23, qui donne les
sentent une nécrose sèche et brune. Le parasite est pré- caractéristiques des principales que l’on rencontre en I n dex
sent sur les fanes et attaque les tubercules au moment de France. Ces maladies peuvent entraîner des pertes de rende-
la récolte, à la faveur des blessures. ment considérables et déprécier la qualité des tubercules.

Nom de la maladie Virus Symptômes Mode de transmission


Glossaire
Frisolée Y Crispation du feuillage, mosaïque, bigarrure Par contact et par pucerons
Enroulement E Jaunisse, enroulement des feuilles Par pucerons exclusivement
Mosaïque A Mosaïque plane très discrète Par contact et par pucerons
Enroulement mou M Mosaïque internervaire, feuilles en cuillère, symptômes souvent absents Par contact et par pucerons
Mosaïque X Mosaïque plane très discrète Par contact
Rattle Rattle Lignes brunâtres à l’intérieur des tubercules Par nématodes
Virose latente S Absence de symptômes Par contact et par pucerons
Fig. 23. – Maladies à virus de la pomme de terre

plusieurs virus peuvent cohabiter sur une même plante et


provoquer des symptômes complexes, de type « bigarrure ».
Dans certains cas (virus S par exemple), les symptômes sont
absents, mais la production est réduite. Le virus Y, responsa-
ble de la frisolée, est le plus fréquent et le plus grave (fig. 24).
L’identification des virus responsables ne peut se faire que
par des techniques spéciales (24).
102.– La lutte repose sur l’utilisation de plants certifiés
indemnes de virus, dont l’obtention est basée sur la sélec-
tion sanitaire et sur la limitation des populations des
pucerons-vecteurs (Myzus persicae notamment). Les
techniques de sélection sanitaire ont déjà été exposées
(60). Les traitements aphicides ne sont pratiqués que sur
Fig. 24. – Frisolée de la pomme de terre les pommes de terre de semence.
A gauche, plant sain – A droite, plant malade (Photo G. Raynal)
Dans le cas du rattle, transmis par les nématodes, la désin-
Les symptômes sont souvent peu caractéristiques et varia- fection du sol donne de bons résultats, mais n’est concevable
bles selon les variétés et les conditions du milieu. De plus, que dans les sols très contaminés, en raison de son coût.

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2361TA MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE

V. MALADIES DES PRINCIPALES CULTURES L’oïdium est fréquent surtout sur les cultures de pois
OLÉAGINEUSES, PROTÉAGINEUSES implantées tardivement. Le rendement peut alors être
ET FOURRAGÈRES affecté si les conditions de l’année permettent à la mala-
die de commencer son développement dès la fin du prin-
temps. Eviter les semis tardifs et utiliser des variétés résis-
A. Maladies du Colza et du Tournesol tantes constitue la meilleure méthode de lutte.
103.– Ces cultures, qui ont pris un grand développement Le mildiou est de plus en plus fréquent sur pois d’hiver et
en France, sont attaquées par diverses maladies fongiques. nécessite des traitements fongicides à la floraison.
La sclérotiniose, qui entraîne essentiellement des pourritures Le botrytis de la féverole d’hiver est une redoutable maladie,
des feuilles, tiges et siliques du colza et des capitules du tour- dont les premiers symptômes apparaissent dès novembre
nesol, est la plus importante. Le champignon se conserve sous forme de taches foliaires brunes et arrondies. Au prin-
dans le sol sous forme de sclérotes, lesquels produisent des temps, en particulier à la floraison et jusqu’à la fin du déve-
apothécies (l6) du printemps à la fin de l’automne. Celles-ci loppement des gousses, si le temps est humide, les fleurs, les
projettent des ascospores contaminantes, particulièrement à jeunes gousses et les feuilles se nécrosent et disparaissent. La
la floraison qui est le stade le plus sensible. Pour le tournesol, totalité de la récolte peut être détruite en quelques jours. Les
la seule méthode de lutte consiste dans la rotation des cultu- traitements s’avèrent d’application difficile et sont de ce fait
res sur les parcelles contaminées, sur une durée d’au moins 4 peu efficaces. Des recherches sont en cours pour améliorer
à 5 ans et dans l’utilisation de variétés peu sensibles. Pour le la résistance génétique.
colza d’hiver, des traitements avec des fongicides anti-Sclero- L’Anthracnose, qui provoque surtout des taches foliaires,
Liste tinia sont efficaces en applications à la floraison semble en extension.
L’alternariose du colza d’hiver est fréquente par temps
chaud et humide. Elle se présente sous la forme de taches Maladies Champignon parasite Place dans la classification
noires sur les tiges et les feuilles. Elle peut être domma-
geable sur les siliques, dont elle provoque l’éclatement. Pois:
Ta b l e
Les graines malades peuvent subir des fontes de semis. Anthracnose Ascochyta spp. Ch. Imparfait – Sphaeropsidale
Les contaminations sont dues le plus souvent aux débris Oïdium Erysiphe polygoni Ascomycète – Erysiphale
de récolte. Si les traitements sont efficaces après la forma-
tion des premières siliques, ils s’avèrent peu indispensa- Mildiou Peronospora pisi Oomycète – Péronosporale
bles, car leur rentabilité n’est pas assurée. Féverole :
Index
Le mildiou du tournesol attaque surtout les jeunes Botrytis Botrytis fabae Ch. Imparfait – Moniliale
plants. Il est très efficacement combattu, et en voie de
Anthracnose Ascochyta fabae Ch. Imparfait – Sphaeropsidale
disparition, grâce à des traitements de semences et par
l’utilisation de variétés résistantes. Fig. 26. – Principales maladies du pois et de la féverole
Glossaire Le botrytis du tournesol, rarement dommageable,
n’intervient qu’en fin de saison pour provoquer quelques C. — Maladie des cultures fourragères
pourritures des capitules.
(On consultera également les fiches nos 2002 et 2005).
Le Phoma, qui provoque des taches foliaires et des nécroses
du collet sur colza, est combattu par des variétés résistantes. 1. Luzerne et Trèfle violet
Maladies Champignon parasite Place dans la classification 105.– La verticilliose de la luzerne a longtemps constitué
un frein pour les rendements au nord de la Loire. Elle se
Colza:
manifeste par des jaunissements, un flétrissement et un
Sclérotiniose Sclerotinia sclerotiorum Ascomycète – Discale nanisme des plantes. Le champignon responsable se con-
Alternariose Alternaria brassicae Ch. Imparfait – Moniliale serve dans le sol, sur d’autres cultures et sur de nombreu-
Phoma Phoma lingam Ch. Imparfait – Sphaeropsidale ses plantes sauvages et mauvaises herbes. La maladie est
Tournesol: transmise lors de la fauche par la barre de coupe. La seule
Sclérotiniose Sclerotinia sclerotiorum Ascomycète – Discale méthode de lutte est l’utilisation de variétés résistantes
dont l’extension a permis de faire reculer la maladie.
Pourriture grise Botrytis cinerea Ch. Imparfait – Moniliale
Mildiou Plasmopara helianthi Oomycète – Péronosporale
Les parasites foliaires, très communs (Pseudopeziza, Asco-
chyta, Leptosphaerulina), peuvent réduire la production
Fig. 25. – Principales maladies du colza et du tournesol fourragère et surtout provoquer l’accumulation dans les
feuilles de substances toxiques pour les animaux. En
B. Maladies du Pois et de la Féverole l’absence de variétés résistantes, la fauche, même précoce,
104.– La principale maladie du pois d’hiver est l’anthrac- ne permet pas toujours de limiter les maladies foliaires,
nose, provoquée par 3 espèces d’Ascochyta. Elle se manifeste surtout par temps humide au printemps et en automne.
par des nécroses des plantules et de tous les organes. Elle est Les autres parasites peuvent être graves localement.
transmise par les semences. Les traitements de celles-ci sont 106.– La sclérotiniose du trèfle violet est sans nul doute la
à eux seuls insuffisants pour lutter contre l’Anthracnose. maladie qui, a l’heure actuelle, limite l’extension de cette
Restent l’enfouissement des débris végétaux, les rotations de culture et a une action prépondérante sur sa pérennité.
longue durée et l’emploi de variétés résistantes. Sclerotinia trifoliorum a une biologie voisine de celle de

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MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE
TA 2361
S. sclerotiorum (103), mais ses apothécies se forment en VI. MALADIES DE LA VIGNE
automne, si bien que les attaques hivernales donnent
naissance au printemps à de graves pourritures. Les jeu- A. Mycoses
nes semis d’automne sont fortement attaqués et doivent
parfois être retournés alors que les cultures de printemps 108.– Les maladies cryptogamiques de la vigne revêtent
se montrent plus résistantes. La lutte consiste à effectuer une importance considérable, en raison des dégâts
une rotation des cultures (4 à 5 ans), à proscrire les semis qu’elles sont susceptibles de provoquer et par les traite-
d’automne, même pour les variétés dites résistantes et à ments fongicides qu’elles nécessitent absolument (un
utiliser des variétés à bon niveau de résistance, notam- tiers du marché des fongicides porte sur la viticulture).
ment parmi les tétraploïdes. Le mildiou et l’oïdium, véritables fléaux à la fin du siècle
Les autres maladies du trèfle violet ont une importance dernier, restent préoccupants. D’autres maladies, con-
secondaire. nues depuis longtemps pour la plupart, sont également
devenues graves (pourriture grise, black-rot, excoriose)
Maladies Champignon parasite Place dans la classification ou menaçantes (eutypiose, esca). Les techniques cultura-
Luzerne: les modernes, notamment la récolte mécanique, présen-
Verticilliose Verticillium albo-atrum Ch. Imparfait – Moniliale tent de graves risques pour l’extension de ces maladies.
Taches communes Pseudopeziza medicaginis Ascomycète – Discale Ce type de récolte, plus que la vendange manuelle, exige
Pepper-spot Leptosphaerulina briosiana Ascomycète – Sphaeriale que les vignes soient dans un parfait état sanitaire pour
Taches noires Ascochyta imperfecta Ch. Imparfait–Sphaeropsidale éviter des pertes de raisins, des moûts de qualité médio-
Mildiou Peronospora aestivalis Oomycète – Péronosporale cre et surtout l’extension des parasites de blessure. Liste
Rhizoctone Rhizoctonia violacea Ch. Stérile Le tableau de la figure 29 rappelle les principales mala-
Tumeurs marbrées Urophlyctis alfalfae Ch. Inférieur – Chytridiale dies fongiques.
Trèfle violet:
Sclérotiniose Sclerotinia trifoliorum Ascomycète – Discale Maladies Champignon parasite Place dans la classification
Ta b l e
Oïdium Erysiphe polygoni Ascomycète – Erysiphale Mildiou Plasmopara viticola Oomycète —Péronosporale
Stemphyliose Stemphylium botryosum Ch. Imparfait – Moniliale
Oïdium Uncinula necator Ascomycète—Erysiphale
Fig. 27. – Principales maladies de la luzerne et du trèfle violet Pourriture grise Botrytis cinerea Ch. Imparfait—Moniliale
Excoriose Phomopsis viticola Ch. Imparfait—Sphaeropsidale
2. Graminées fourragères Black-rot Phoma uvicola Ch. Imparfait—Sphaeropsidale I n dex
107.– Les maladies foliaires sont les plus importantes en Brenner Pseudopeziza tracheiphila Ascomycète—Pézizale
production fourragère. Elles sont très nombreuses. On Eutypiose Eutypa armeniacae Ascomycète—Sphaeriale
distingue essentiellement les rouilles provoquées par dif- Esca Stereum hirsutum et Basidiomycètes—Aphyllophorales
férentes Urédinales (15) et les taches nécrotiques. La Phellinus ignarius
Glossaire
rouille couronnée est la plus fréquente et la plus grave, Fig. 29. – Principales maladies fongiques de la vigne
notamment sur les ray-grass.
Les helminthosporioses (ray-grass, fétuques), la scolécotri-
chose, la mastigosporiose (dactyle), provoquent des taches 1. Le Mildiou
et des nécroses foliaires, surtout au printemps et en 109.– Le mildiou de la vigne est apparu en France pour la
automne. Des différences de résistance variétale existent, première fois en 1878, aux environs de Coutras (Gironde).
notamment pour les rouilles. La fauche permet dans une Il a rapidement envahi la totalité du vignoble français et a
certaine mesure de réduire les attaques. entraîné des pertes considérables dans les régions à climat
humide.
En production grainière, outre les parasites foliaires déjà
cités et qu’il est possible de combattre par des fongicides, la Cette redoutable maladie est bien visible sur les organes
quenouille peut être grave sur dactyle. Contre cette maladie, verts. Sur jeunes feuilles, on distingue d’abord des « taches
aucune méthode de lutte n’est disponible, en dehors d’une d’huile », macules vert pâle ou rougeâtres selon les cépa-
durée limitée de la culture des dactyles porte-graines. ges, à contour peu net, qui montrent à la face inférieure,
par temps humide, un duvet blanc formé des organes de
Maladies Champignon parasite Place dans la classification dissémination du champignon (cf. fasc. 2362). Ces orga-
Rouille couronnée (R.G., F.) Puccinia coronata Basidiomycète–Urédinale nes sont des sporocystes, encore appelés sporanges ou coni-
Rouille noire (R.G., F., D.) Puccinia graminis Basidiomycète–Urédinale dies. Ces taches, en grandissant, finissent par se dessécher.
Rouille jaune (D.) Puccinia striiformis Basidiomycète–Urédinale Les feuilles adultes montrent, surtout en fin de saison, de
Rouille brune (D.) Uromyces dactylidis Basidiomycète–Urédinale petites macules jaunes limitées par les nervures, avec par-
Helminthosporioses (R.G., F.) Helminthosporium dictyoides fois quelques fructifications blanches du parasite (mildiou
Helminthosporium siccans Ch. Imparfait–Moniliale « mosaïque »). Les petites taches finissent par se nécroser
Mastigosporiose (D.) Mastigosporium rubricosum Ch. Imparfait–Moniliale pour donner le symptôme des « points de tapisserie »,
Scolecotrichose (D.) Scolecotrichum graminis Ch. Imparfait–Moniliale avant la chute des feuilles.
Quenouille (D., F.) Epichloe typhina Ascomycète –Hypocréale Les jeunes grappes peuvent être attaquées et se dessécher.
Fig. 28. – Principales maladies des graminées fourragères Par temps humide, sur jeunes grains, le parasite fructifie
(R.G.: Ray-grass; D: Dactyle; F: Fétuques) en donnant un duvet blanc (« rot gris ») qui entraîne la

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2361TA MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE

pourriture de la grappe. Sur les grains plus âgés, on ou d’éthylphosphite d’aluminium) pénètrent dans les tissus
observe le « rot brun », caractérisé par des taches brunes et sont redistribuées dans la plante de façon non négligeable.
déprimées qui entraînent le dessèchement ou la pourri- On considère qu’avec les produits systémiques, un délai de 15
ture des raisins. La maturation peut être perturbée. jours entre les traitements permet habituellement de protéger
Les rameaux non aoûtés sont également atteints et pren- les vignes de façon satisfaisante, la date du premier traitement
nent une teinte brunâtre. dépendant des indications des Avertissements agricoles. Ce
délai doit être réduit en cas de conditions très favorables au
110.– La biologie et l’épidémiologie de Plasmopara viticola mildiou. Les traitements de fin de saison peuvent être faits
rappellent celles de Phytophthora infestans (93). Le para- avec des fongicides cupriques fortement dosés en cuivre.
site se conserve en hiver dans les « points de tapisserie »
des feuilles tombées sur le sol, sous forme d’oospores Enfin, le réglage des appareils de pulvérisation doit être
communément appelées « œufs d’hiver ». Au printemps, parfait, de façon à protéger l’ensemble de la végétation.
ces « œufs » germent et chacun émet un sporocyste qui 112.– Depuis 1981 sont apparues des souches de Plasmo-
produit des zoospores dans l’eau des flaques présentes para viticola résistantes aux anilides (46), notamment dans
dans le vignoble. A la faveur des pluies, ces zoospores les vignobles du Sud-Ouest, de Cognac, du Val-de-Loire et
sont projetées sur les jeunes feuilles les plus basses et les de la Bourgogne. Il convient donc d’être prudent avec les
attaquent, pourvu que la température soit supérieure à spécialités contenant des anilides, en particulier de ne les
11 °C. En une dizaine de jours apparaissent les premières utiliser que préventivement, de limiter le nombre d’applica-
taches d’huile sur lesquelles, si le temps demeure humide, tions avec ces produits et de varier les produits utilisés.
naissent des quantités considérables de sporocystes.
Liste 2. L’Oïdium
A partir de ces foyers primaires, la maladie s’étend très vite
dans les vignobles. Les cycles de développement dépen- 113.– Connue depuis la seconde moitié du 19e siècle en
dent étroitement des conditions climatiques. En particu- France, cette grave maladie est actuellement répandue
lier, la pluie est nécessaire pour assurer la contamination, dans tout le vignoble français, notamment dans les
Ta b l e les zoospores contaminantes ne se formant que dans de régions méridionales où elle semble en recrudescence.
l’eau liquide. Les températures favorables au parasite
sont de l’ordre de 18-20 °C. Tout ceci explique que le mil- Les symptômes se manifestent à tous les stades de végéta-
diou soit particulièrement redouté dans les régions à cli- tion. Les organes verts sont recouverts d’une poussière
mat humide et, en France, notamment dans les vignobles blanchâtre constituée du mycélium et des conidies du para-
de la façade atlantique où le développement de la maladie site. Les jeunes pousses sont chétives et recroquevillées. Les
Index
peut être véritablement explosif. feuilles adultes montrent, surtout à la face supérieure, des
taches plus ou moins décolorées sur lesquelles on observe le
Les Avertissements agricoles tiennent compte en particu- champignon. Souvent, les feuilles malades se recourbent
lier de l’arrivée à maturité des œufs d’hiver, à partir des- vers le haut en se desséchant et parfois tombent prématuré-
quels s’effectuent les contaminations primaires. L’appari- ment. Les jeunes grappes, avant la floraison, peuvent se des-
Glossaire tion des foyers primaires est également très surveillée. sécher totalement. Après la floraison, le développement des
111.– La lutte contre le mildiou nécessite une grande vigi- grains est perturbé. Plus tard, la peau des grains éclate, lais-
lance et doit être très soignée, car cette maladie est tou- sant apparaître la chair et les pépins. De la véraison à la
jours menaçante. récolte, les grains montrent des taches réticulées brunâtres.
Il faut tout d’abord éviter l’eau stagnante sur le sol et éli- Les rameaux verts présentent des taches brunes dues au
miner les pousses vertes et les feuilles les plus basses. mycélium du parasite et aoûtent mal.
La lutte chimique a d’abord fait appel à des fongicides de 114.– Le champignon se développe à la surface des organes
contact, à action strictement préventive. Ces produits sont parasités et envoie des suçoirs dans les cellules épidermiques
toujours très utilisés. Les matières actives sont nombreu- pour se nourrir. Il forme de très nombreuses conidies ou
ses, la plus célèbre étant la bouillie bordelaise qui a oïdies, qui donnent la poussière blanche caractéristique. La
démontré son intérêt depuis un siècle. Ces fongicides ont dissémination de l’oïdium est assurée par les conidies très
cependant une efficacité restreinte par temps pluvieux— légères, qui sont transportées à grande distance par le vent.
favorable au mildiou—et nécessitent que l’on renouvelle Des températures élevées (25 °C), de même qu’une forte
les traitements, d’autant plus fréquemment que la crois- humidité atmosphérique (70-80 %) sont favorables à
sance de la vigne est plus active, les jeunes organes étant l’oïdium qui ne craint cependant pas la sécheresse, bien au
très sensibles (jusqu’à 14 traitements par an, certaines contraire. Les pluies violentes lui sont par contre néfastes,
années dans le vignoble de Cognac). car elles lessivent les conidies. On comprend alors que cette
maladie soit sérieuse dans les régions ensoleillées.
Depuis peu existent des fongicides pénétrants et systémiques.
Outre qu’ils sont moins sensibles au lessivage par la pluie, ils La conservation hivernale du parasite s’effectue sur les
ont l’avantage d’être curatifs et peuvent donc être appliqués taches des rameaux et entre les écailles des bourgeons.
après la pénétration du champignon dans les tissus de la Depuis quelques années, dans les vignobles méditerra-
vigne, dans les 3 à 4 jours qui suivent une pluie contamina- néens, la forme sexuée du parasite (périthèces) est de plus
trice. Les produits pénétrants (à base de cymoxanil) ne sont en plus fréquente et semble jouer un rôle prépondérant
toutefois pas redistribués dans la plante. Les jeunes organes dans les premières infections des grappes.
apparus après le traitement ne sont donc pas protégés. Par 115.– Selon les cépages et les régions, plusieurs applica-
contre, les matières actives systémiques (à base d’anilides (46) tions de matières actives anti-oïdium doivent être faites.

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MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE
TA 2361
En général, on effectue une application précoce (indispen- végétation trop dense favorisant l’humidité, notamment
sable en régions méridionales), par pulvérisation au stade autour des grappes. Les traitements insecticides (contre
2-3 feuilles, une application par poudrage (soufre) à la flo- les tordeuses de la grappe) et la lutte contre l’Oïdium sont
raison et un traitement entre la nouaison et la véraison. indispensables pour éviter les blessures.
Dans le vignoble méridional, on peut aller jusqu’à 6 à 7
traitements annuels. Généralement, les traitements sont La méthode de traitement actuellement la plus répandue est
jumelés avec ceux contre le mildiou. Notons que parmi les la méthode standard qui comporte 4 applications de fongici-
matières actives anti-oïdium, le soufre reste une des plus des à des stades phénologiques particulièrement réceptifs au
efficaces malgré son ancienneté. Son abandon au profit de Botrytis: début nouaison, fermeture de la grappe, début
nouvelles matières actives est peut-être une des causes de véraison et 3 semaines avant la vendange. Cette méthode
la recrudescence de l’oïdium dans le Languedoc. peut être modulée en fonction des régions, en tenant
compte des cépages et des conditions climatiques.
3. La Pourriture grise Des systèmes de prévision des risques, basés sur la modéli-
116.– La Pourriture grise de la vigne, ou Botrytis, est sation des épidémies sont en cours d’expérimentation.
redoutée en raison de son développement très rapide. Le Les premiers essais ont permis d’aboutir, avec seulement
champignon attaque à tous les stades de végétation. 2 traitements, à des résultats identiques à ceux de la
méthode standard.
Sur les feuilles se développent des nécroses larges qui se
dessèchent et par temps humide se recouvrent d’une moi- Les matières actives utilisées peuvent être des produits
sissure grise. Des symptômes identiques apparaissent sur multisites (45) anti-mildiou, actifs également contre le
les jeunes rameaux. En automne se forment des sclérotes, Liste
Botrytis, mais également des produits spécifiquement
sous forme de taches noires et allongées, sur les écorces des anti-Botrytis. Parmi ceux-ci, les imides cycliques, très effi-
rameaux mal aoûtés. Les grappes attaquées à la floraison caces, ont malheureusement abouti à la sélection de sou-
peuvent se dessécher et tomber. Après la floraison, le ches résistantes de Botrytis en certaines régions (en 1984,
champignon vit en saprophyte sur les pièces florales fanées particulièrement en Champagne, Bourgogne, Beaujo- Ta b l e
et à partir desquelles il contamine plus tard les baies, sur- lais). Dans ces régions, ces matières actives ne sont plus
tout à partir de la véraison. Si les conditions sont favora- efficaces et doivent être utilisées avec modération dans les
bles au Botrytis, les grappes peuvent pourrir rapidement autres vignobles, en alternance avec d’autres produits.
(cf. fasc. 2362). Ce dégât est particulièrement redouté à
l’approche de la vendange, car le champignon peut provo-
4. L’Excoriose I n dex
quer des pertes très importantes et influe sur la qualité des
moûts, par les enzymes qu’il possède et qui nuisent à la fer-
mentation, à la coloration des vins, notamment pour les 119.– L’excoriose est en extension en France, principale-
cépages rouges (casse oxydasique) et à la filtration. ment dans les vignobles des régions humides. Elle provo-
que essentiellement des nécroses longitudinales de la base
La pourriture grise est toujours nuisible pour les cépages des sarments, dont l’insertion sur le rameau de l’année Glossaire
rouges. Par contre, pour certains cépages blancs (en Alsace, précédente est étranglée et devient fragile. Les sarments
Anjou, Dordogne, Gironde), le Botrytis évolue parfois en atteints se rompent alors facilement sous l’effet des chocs
pourriture noble lorsque ses attaques sont tardives, sur les et du vent ou se dessèchent. Le champignon entraîne
baies mûres, lors d’une arrière-saison sèche. Il provoque également au printemps la mort des bourgeons des cour-
alors la surmaturation des raisins qui deviennent « confits » sons. En automne, les écorces des rameaux aoûtés blan-
et donnent des vins liquoreux et parfumés pouvant attein- chissent au-dessus des zones nécrosées et montrent des
dre des prix très élevés. La récolte des grappes « confites » est ponctuations noires, les pycnides. Des nécroses peuvent
faite en plusieurs fois en fonction de l’évolution de la pour- également affecter les grappes et les feuilles. La maladie,
riture noble sur les baies (récolte par « tries »). Les rende- dont le diagnostic est parfois difficile, entraîne progressi-
ments faibles en hl/ha sont compensés par la grande qualité vement l’affaiblissement des ceps.
des vins blancs produits (ex.: Sauternes).
117.– Le Botrytis se développe dans une large gamme de Le champignon se conserve en hiver par le mycélium pré-
températures, mais nécessite une forte humidité (pluie, sent dans les bourgeons et par les pycnides, lesquelles émet-
brouillard, rosée). Il est favorisé par les blessures (grêle, tent au printemps des spores disséminées par la pluie, qui
insectes, oïdium, etc.). Il se dissémine par des conidies vont contaminer les jeunes organes, à très faible distance. La
qui se forment en quantité sur les organes pourris et maladie peut également être transmise par le greffage. La
constituent une poussière grise bien visible. Les sclérotes sélection sanitaire des pieds-mères est donc importante, de
formés sur les rameaux, ainsi que le mycélium présent même que la désinfection des bois de greffe.
sous les écorces, permettent sa conservation hivernale. Au La lutte nécessite d’éliminer par la taille les sarments
printemps, mycélium et sclérotes produisent des conidies malades et d’utiliser des greffons indemnes de maladie. Les
qui initient la maladie. traitements de prédébourrement, à base d’arsénite de
118.– La lutte contre la Pourriture grise nécessite des sodium, sont efficaces, mais très toxiques. En post
mesures culturales et des applications de fongicides. La débourrement, les jeunes pousses peuvent être protégées
taille a une grande importance, car elle permet d’élimi- par 2 traitements avec des fongicides de contact ou 1 trai-
ner les extrémités des rameaux porteuses de sclérotes. De tement avec un produit associant un fongicide systémi-
plus, la vigne doit être conduite de façon à éviter une que et un fongicide de contact.

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2361TA MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE

5. Le Black-rot facilement. Les pousses issues des bras malades sont chéti-
120.– Cette maladie sévit principalement dans les vigno- ves, avec de petites nécroses. Les inflorescences se dessèchent
bles de la façade atlantique. Tous les organes herbacés ou fructifient mal. La maladie démarre toujours à partir
sont attaqués, en particulier les feuilles et les grappes. Sur d’une plaie de taille et son évolution est lente.
feuille, les symptômes se manifestent par des taches 123.– L’esca se caractérise par des troncs dont les écorces
rouge brique cernées de brun, sur lesquelles se forment éclatent et laissent par temps humide sortir les fructifica-
des pycnides. Les grappes montrent des grains dont la tions blanches du Stereum et fauves du Phellinus. Le bois
couleur devient fauve avant de noircir. Les grains mala- pourri est friable et ressemble à de l’amadou. Le feuillage
des se flétrissent et portent de nombreuses ponctuations, montre, selon les cépages, des jaunissements ou des rou-
constituées de pycnides, mais aussi de périthèces (16) qui gissements internervaires avec des nécroses marginales, à
mûrissent en hiver. ne pas confondre avec des carences nutritionnelles ou
La conservation hivernale s’effectue par les grains de raisin hydriques. En cas de sécheresse, il arrive que le feuillage
tombés sur le sol ou restant sur les ceps dans les vignes et les grappes flétrissent brutalement (apoplexie), mais
abandonnées. Au printemps, les contaminations primaires généralement la maladie évolue lentement.
sont dues aux ascospores projetées par les périthèces 124.– La lutte contre ces maladies est d’abord préventive.
(forme Guignardia bidwellii) sur les jeunes organes. Les Contre l’eutypiose, il faut détruire par le feu les souches
contaminations secondaires sont l’œuvre des spores pro- arrachées et tous les résidus de taille et non les laisser sur
duites par les pycnides. Des pluies et une humidité prolon- place ou en tas, afin de limiter la constitution de quanti-
gée sont favorables au développement du black-rot. tés massives d’inoculum à partir du bois mort. La taille
Liste La lutte prophylactique est très importante. En particulier, devrait être la plus tardive possible afin de faire coïncider
le parasite se conserve dans les vignes mal entretenues ou l’époque de moindre réceptivité de la vigne avec celle de
abandonnées. C’est pourquoi, dans certains départements, moindre production de l’inoculum. Il faudrait protéger
des arrêtés préfectoraux font obligation de détruire ces les plaies de taille par un fongicide, surtout dans le cas de
Ta b l e vignes ou de les remettre en état. La récolte mécanique, par vignes sévèrement taillées et transformées pour faciliter
ailleurs, favorise la chute des grains malades. Il convient la vendange mécanique.
donc de les enfouir pour les inactiver. Contre l’esca, les traitements d’hiver à l’arsénite de soude
La lutte chimique doit être précoce, avant les traitements conservent leur efficacité, en se conformant strictement
anti-mildiou en suivant les conseils des Avertissements aux prescriptions d’emploi.
Index agricoles. Ensuite, les traitements anti black-rot sont
jumelés avec ceux contre le mildiou avec des produits B. La Nécrose bactérienne
actifs contre les deux maladies. Dans certains vignobles
de l’Ouest, il est parfois nécessaire de traiter plus fré- 125.– Appelée d’abord « maladie d’Oléron », la nécrose
quemment contre le black-rot que contre le mildiou. bactérienne de la vigne est connue dans plusieurs pays.
Glossaire En France, elle est pour l’instant localisée aux Charentes
6. Le Brenner ou Rougeot parasitaire et au Languedoc-Roussillon. On peut craindre très forte-
ment son extension, en raison notamment de la générali-
121.– Le brenner est commun dans les vignobles de l’est sation de la récolte mécanique et de l’abandon des fongi-
et du centre-est de notre pays ainsi que dans les pays à cides cupriques qui avaient une excellente efficacité
hivers froids. On le trouve toutefois également dans le bactéricide.
Midi, dans des vignobles peu ou pas traités contre le mil-
diou. Il attaque uniquement les feuilles, sur lesquelles il La maladie est due à une bactérie, Xanthomonas ampe-
provoque des taches nettement délimitées par les nervu- lina. Elle se manifeste par des nécroses des organes verts
res. Selon les cépages, ces taches sont d’abord jaunes ou (sarments, bourgeons, pétioles, feuilles, grappes) sur les-
pourpres puis se dessèchent. La chute prématurée des quels se forment d’abord des taches d’aspect huileux qui
feuilles affaiblit les ceps. Le champignon se conserve en brunissent et se nécrosent ensuite. Par temps humide
hiver dans les feuilles mortes, sous forme de mycélium sourd un mucus contenant les bactéries qui sont dissémi-
dans les vaisseaux des nervures. Ce mycélium produit des nées par les pluies. Les sarments et les bois forment des
apothécies (16) au début du printemps, qui projettent à bourrelets cicatriciels plus ou moins crevassés.
la faveur des pluies des ascospores infectieuses, au La bactérie se multiplie dans les vaisseaux du bois et pul-
moment du débourrement. lule dans la sève. Elle est donc aisément transmise par la
On combat la maladie par des applications précoces de taille et par les blessures occasionnées au cours des opéra-
fongicides, puis par les traitements anti-mildiou. tions d’entretien et de récolte. En particulier, la vigne est
très réceptive à la nécrose bactérienne lors de la vendange
7. Les maladies du bois (Eutypiose et Esca) mécanique qui entraîne souvent de multiples blessures
aussitôt polluées par le jus et les débris évacués par les
Ces maladies « de dépérissement » sont souvent difficiles machines et contenant des bactéries. Le Xanthomonas se
à diagnostiquer. conserve sur les bois de taille broyés et enfouis. Dans les
122.– L’eutypiose provoque la mort des bras, avec des nécro- régions où l’on pratique la submersion hivernale, la bac-
ses en méplat qui se prolongent jusqu’au tronc. Le parasite térie migre dans l’eau et peut être redistribuée à l’ensem-
fructifie sous forme de plages noires (périthèces dans des ble de la parcelle, surtout à la suite du travail du sol qui
stromas) sous les écorces éclatées. Le bois pourri, sec, casse blesse les racines.

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MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE
TA 2361
La lutte repose d’abord sur le choix de greffons sains. Si après les premières éclosions, soit vers la mi-juin, alors que
quelques pieds seulement sont atteints, il faut les arracher et les premières larves ne sont pas encore infectieuses. Par la
les brûler. Les opérations de taille doivent être conduites suite, selon la persistance des produits, on effectue un traite-
pendant le repos total de la végétation, lorsque la sève ne cir- ment tous les 15 jours à 3 semaines.
cule pas. Les instruments de taille doivent être désinfectés,
les résidus de taille détruits. Il est nécessaire de désinfecter 2. Les Viroses. Exemple du Court-Noué
les plaies et de protéger les bourgeons et les jeunes pousses
127.– La vigne est sujette à de nombreuses maladies à
par des pulvérisations de bouillie bordelaise.
virus, répandues dans le monde entier et responsables de
pertes de récolte et de diminution de la qualité des moûts.
C. Mycoplasmoses et viroses
Le court-noué ou dégénérescence infectieuse est la virose la
plus importante agissant sur le rendement et la longévité
1. Exemple de Mycoplasmose: de la vigne. Les symptômes sont très variables et peuvent
La Flavescence dorée être confondus avec ceux d’autres maladies. Les sarments
126.– Les mycoplasmoses de la vigne ont longtemps été ont des entre-nœuds courts en zig-zag ou des anomalies
prises pour des viroses, notamment la Flavescence dorée de croissance (fasciations, doubles nœuds). Les feuilles
qui est la plus importante. Elle a détruit de nombreux montrent des sinus profonds, des déformations, des
vignobles du Sud-Ouest et de la Corse avant qu’on en taches colorées, des panachures. Les grappes sont petites
connaisse la cause. En Corse, certains cépages très répan- et souffrent de coulure et de millerandage. Les tests
dus et très sensibles (Nielluccio) seraient actuellement d’indexage et de sérologie (24) permettent de diagnosti-
menacés de disparition sans une lutte appropriée. quer le Court-Noué avec certitude. Liste
Les vignes atteintes de flavescence dorée montrent des La transmission du virus est opérée naturellement par
feuilles jaunes ou rouges selon les cépages, épaisses, cas- deux nématodes vivant dans le sol, Xiphinema index et
santes et enroulées vers le bas. Les sarments n’aoûtent Xiphinema italiae. Ceux-ci, piquant les racines, conta-
pas, restent flasques et leurs extrémités peuvent se nécro- minent les vignes saines s’ils se sont préalablement nour- Ta b l e
ser. Les inflorescences et les grappes se dessèchent. ris sur des vignes court-nouées. La transmission à grande
Selon les cépages, on peut observer deux types d’évolution échelle est réalisée par l’homme, par le commerce des
de la maladie. Dans le Sud-Ouest, sur Baco 22 A, on observe bois et des plants et par le greffage.
une crise très grave suivie d’un rétablissement et éventuelle- La lutte est basée sur la thermothérapie (61) qui permet
ment d’une rechute si le cep est réinoculé longtemps après de régénérer les cépages atteints, sur l’utilisation de bois I n dex
avoir été malade. Par contre, en Corse, sur Nielluccio, la et de plants sains, certifiés grâce à la détection sérologi-
maladie montre des symptômes généralisés qui évoluent que du virus avant commercialisation et enfin sur la lutte
jusqu’à la mort par dessèchement du cep en été. contre les nématodes. Cette dernière n’est possible
Le responsable est un mycoplasme (21) qui vit dans les qu’avant plantation par désinfection du sol. Elle n’est pas
vaisseaux du liber. Il est transmis par une cicadelle, Sca- nécessaire si la parcelle n’a pas porté de vigne ou d’arbres Glossaire
phoideus littoralis, importée accidentellement du fruitiers depuis plus de 5 ans.
Canada. Cet insecte a trouvé des conditions favorables à
sa reproduction dans les régions à été chaud, mais à hiver VII. MALADIES DES ARBRES FRUITIERS
suffisamment froid pour lever la diapause des œufs. En À PÉPINS ET À NOYAUX
Corse, où les hivers sont doux, la levée de la diapause est
imparfaite, si bien que les éclosions s’étalent sur plusieurs A. Mycoses en cours de végétation
mois, alors que cette période est réduite à un mois et
demi dans le Sud-Ouest. Scaphoideus n’a qu’une généra- 128.– Elles sont très nombreuses. Nous ne ferons état que
tion par an (5 stades larvaires, adultes en juillet-août) et des principales, rappelées dans le tableau de la figure 30.
son cycle se déroule entièrement sur la vigne. En raison
des exigences thermiques de la cicadelle, la maladie est, 1. Les Tavelures
en France, nécessairement localisée à une certaine zone 129.– Ce sont les maladies les plus graves du pommier et
climatique et n’est susceptible d’envahir que les vignobles du poirier. Elles nécessitent de fréquents traitements
situés au sud d’une ligne allant de Cognac à Lyon. Une pour la production de fruits de qualité, notamment dans
fois implantée dans une région, cette cicadelle est très les régions à climat atlantique.
difficile à détruire. Notons que le mycoplasme est transmis Les symptômes (fig. 31 et 32 et cf. fasc. 2362) visibles
comme certains virus selon le mode persistant (26) et doit d’abord sur les jeunes feuilles, sont des taches sombres,
nécessairement se multiplier dans la cicadelle pour être fumeuses, aux contours flous, de quelques millimètres de
infectieux sur la vigne. Les cicadelles ne sont infectieuses diamètre. Sur pommier, les taches provoquent de légères
que 3 semaines à 1 mois après le repas d’acquisition (26). cloques des limbes et se forment surtout à la face supé-
La lutte nécessite la sélection des bois et des plants de vigne rieure des feuilles, alors que sur le poirier, c’est à la face
indemnes de flavescence et n’hébergeant pas d’œufs de la inférieure qu’elles sont les plus fréquentes. Les très jeunes
cicadelle sous les écorces. Les vignes abandonnées doivent fruits montrent des symptômes semblables. Ils sont sou-
être détruites. Les traitements d’hiver contre les œufs permet- vent déformés et chutent parfois si les pédoncules sont
tent de réduire les populations du vecteur. En cours de végé- atteints. Sur les fruits en pleine croissance, les taches de
tation, les traitements insecticides doivent débuter 1 mois tavelure entraînent des cicatrices liégeuses de dimensions

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2361TA MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE

Maladies Nom du parasite Place dans la classification


Tavelures:
Pommier Venturia inaequalis Ascomycète — Sphaeriale
Poirier Venturia pirina Ascomycète — Sphaeriale
Monilioses:
Tous arbres fruitiers Monilia fructigena Ch. Imparfait —Moniliale
Surtout A. f. à noyau Monilia laxa Ch. Imparfait —Moniliale
Oidiums:
Pommier et poirier Podosphaera leucotricha Ascomycète—Erysiphale
Pêcher Sphaerotheca pannosa Ascomycète—Erysiphale
Cloques:
Pêcher Taphrina deformans Ascomycète—Taphrinale
Prunier Taphrina pruni Ascomycète—Taphrinale
Cerisier Taphrina cerasi Ascomycète—Taphrinale
Rouilles:
R. grillagée du poirier Gymnosporangium sabinae Basidiomycète—Urédinale
Liste Prunier et abricotier Tranzschelia pruni-spinosae Basidiomycète —Urédinale
Criblure Coryneum Beijerinckii Ch. Imparfait —Mélanconiale
(A. f. à noyau)
Chancre européen du pommier Nectria galligena Ascomycète — Hypocréale
Ta b l e Plomb:
Surtout A. f. à noyau Stereum purpureum Basidiomycète—Aphyllophorale
Fig. 30. – Principales mycoses des arbres fruitiers en cours de végétation

souvent étendues, entourées d’une zone foncée où le


Index champignon est en croissance active. Les fruits tavelés se
déforment, se crevassent et demeurent fréquemment de
taille réduite. Les jeunes rameaux, surtout chez le poirier,
montrent des lésions qui évoluent en pustules puis en
chancres au fur et à mesure de l’aoûtement de l’écorce.
Glossaire Les champignons responsables (Venturia inaequalis et V.
pirina) ont des biologies très voisines. Ils hivernent par leurs
périthèces (16) qui se forment en automne à l’intérieur des
feuilles parasitées, ainsi que par du mycélium et des coni-
dies dans les chancres des rameaux. Au printemps, les
périthèces émettent des quantités considérables d’ascospo-
res qui, conjointement aux conidies libérées par les chan-
cres (chez le poirier), initient les contaminations primai-
res, principalement en avril-mai lors des périodes
pluvieuses. Les taches issues des contaminations primaires
produisent à leur tour en une dizaine de jours d’énormes
quantités de conidies à partir desquelles s’effectuent les
contaminations secondaires. Ainsi, à la faveur des pluies et
des périodes fraîches (optimum voisin de 18 °C pour la Fig. 31. – Tavelure du pommier sur fruits (Photo G. Raynal)
contamination), entrecoupées de périodes plus chaudes et
sèches (favorables à la libération des conidies), la maladie tissements pour les tavelures. Les observations (durée
progresse rapidement dans le verger. . d’humectation du feuillage, pluviométrie, hygrométrie,
L’épidémiologie des tavelures, très étudiée, a notamment température), faites généralement par les arboriculteurs
abouti à l’établissement de tables et d’abaques (tables et eux-mêmes, sont centralisées et analysées par les spécia-
courbes de Mills) qui permettent de relier les facteurs cli- listes des stations d’avertissements agricoles. Des conseils
matiques au développement des Venturia et donc de pré- de traitement sont ensuite diffusés en fonction des ris-
ciser les risques de contamination. En réalité, ces tables ques réels de chaque verger. On estime qu’ainsi, on peut,
sont difficiles à interpréter directement par les arboricul- les années peu favorables aux tavelures, éviter entre le
teurs. D’autre part, le développement des tavelures tiers et la moitié des interventions, par rapport aux trai-
dépend de multiples facteurs microclimatiques, ce qui tements systématiques d’assurance. Dans un proche ave-
rend peu réalistes les prévisions globales à l’échelle d’une nir, la collecte des données et la diffusion des informa-
région. Ceci a nécessité la constitution de réseaux d’aver- tions sera possible grâce à la télématique. Ajoutons qu’il

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MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE
TA 2361
2. Les Monilioses
131.– Les monilioses affectent tous les arbres fruitiers et
particulièrement ceux à noyau. Les symptômes sont bien
visibles sur les bouquets floraux, qui flétrissent brutale-
ment et brunissent, et sur les fruits qui pourrissent ou au
contraire se dessèchent et se momifient (cf. fasc. 2362). Les
rameaux montrent des chancres et des dessèchements.
Les attaques des Monilia sont particulièrement redouta-
bles au moment de la récolte. En effet, ces parasites s’ins-
tallent rapidement sur les fruits blessés ou simplement
heurtés. Les pourritures caractéristiques progressent alors
très vite, surtout en atmosphère humide. On observe des
coussinets gris disposés irrégulièrement (Monilia laxa) ou
fauves, en cercles concentriques (Monilia fructigena). Ces
coussinets portent de nombreuses conidies.
Les Monilia hivernent dans les fruits momifiés tombés sur le
sol ou restés en place sur les rameaux et par des sclérotes
formés sous les écorces. Au printemps, ces organes émet-
Fig. 32. – Tavelure du poirier sur fruits (Photo G. Raynal) tent des conidies qui sont disséminées par la pluie et le Liste
vent. Les attaques sont très rapides si les conditions sont
existe des appareils autonomes qui, grâce à un micro-
favorables (forte humidité, température douce, blessures).
ordinateur pré-programmé, analysent les données du
verger et permettent à l’arboriculteur de prendre lui- La lutte est difficile. Il faut éliminer en hiver les fruits
même les décisions de traitement. momifiés et les rameaux malades. Il convient de limiter les Ta b l e
risques de blessures des fruits, notamment par les insectes
130.– La lutte repose essentiellement sur l’utilisation de (traitements insecticides) et en prenant des précautions
fongicides. De nombreuses matières actives, préventives lors de la cueillette. Les traitements fongicides, particuliè-
et curatives, sont disponibles pour les traitements en rement chez les arbres fruitiers à noyau, les plus sensibles,
cours de végétation. Cependant, en raison de l’apparition sont à faire en prédébourrement (produits cupriques) puis I n dex
de souches de Venturia résistantes aux benzimidazoles et à principalement à la floraison (produits organiques). Par la
la doguadine (46 et 52), l’usage des produits curatifs doit suite, il peut être nécessaire de protéger les fruits blessés,
être fait avec une grande prudence. Il est conseillé d’utili- par exemple à la suite de chutes de grêle.
ser alternativement ou en mélange les deux types de pro-
3. Les Oïdiums Glossaire
duits, les curatifs devant intervenir principalement pour
rattraper des situations où, par suite de conditions clima- 132.– Les oïdiums, ou « blancs » sont provoqués par dif-
tiques difficiles, les produits préventifs n’ont pu être férents champignons dont les biologies présentent de
appliqués à temps. Rappelons en effet que les produits grandes analogies, de même que les méthodes de lutte. Ils
préventifs n’agissent que sur les conidies en cours de ger- sont favorisés par une atmosphère assez humide, mais
mination, avant la contamination des organes, soit dans sans pluie, et par des températures élevées.
un délai d’une dizaine d’heures après la pluie contamina-
Le pêcher et l’abricotier (dans les régions méridionales),
trice, alors que les produits curatifs sont efficaces après
ainsi que le poirier peuvent être attaqués par l’oïdium,
des délais plus longs, sur le mycélium installé dans les tis- mais c’est le plus souvent sur le pommier que cette mala-
sus (44). Les années très favorables aux tavelures, il peut die est la plus dommageable. Les feuilles, les jeunes
être dangereux de diminuer le nombre de traitements, en rameaux, les bourgeons, les fleurs, les jeunes fruits, se
se fiant aux indications de la lutte raisonnée vue précé- recouvrent de taches blanches farineuses. Les feuilles
demment. Il peut être ainsi nécessaire d’effectuer 15 trai- malades montrent un limbe étroit et se dessèchent. Les
tements par an pour assurer la protection des vergers inflorescences attaquées avortent, les jeunes fruits se
dans les régions très exposées, telles que le Val de Loire. déforment (cf. fasc. 2362).
Après la cueillette, l’application d’urée sur le feuillage per- Les oïdiums hivernent sous les écailles des bourgeons et
met d’accélérer la chute et la dégradation des feuilles. On sont disséminés par le vent à partir des jeunes pousses
limite ainsi la formation des périthèces et l’inoculum oïdées. Leur multiplication est rapide.
ascosporé du printemps suivant. A cause des risques La lutte nécessite d’éliminer et de détruire, lors de la taille
d’apparition de souches résistantes, l’application autom- d’hiver et ensuite au printemps, les pousses et organes
nale des benzimidazoles, sur lesquels on fondait de oïdés. Dès le départ de la végétation, on doit utiliser des
grands espoirs, est fortement déconseillée. fongicides anti-oïdium, tels que le soufre, à des fréquen-
ces qui varient selon les espèces d’arbres. Par exemple,
Signalons enfin que des variétés de pommier résistantes à pour le pommier, les traitements sont effectués tous les
la tavelure existent depuis peu en France. 10 jours, du débourrement jusqu’au milieu de l’été.

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2361TA MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE

4. Les Cloques 6. La Criblure


133.– Les champignons responsables de ces maladies 135.– Cette mycose affecte tous les arbres fruitiers à
entraînent des déformations foliaires (« Cloque » du noyau qui montrent principalement des taches foliaires
pêcher), des fruits anormaux, sans noyau (« pochettes » grises auréolées de violet. En se desséchant les tissus
du prunier) et des proliférations buissonnantes des malades se détachent, si bien que la feuille se perfore, se
rameaux (« balais de sorcière » du cerisier). déchiquette et finit par tomber précocement (figure 33).
Les fruits (surtout les abricots) portent des taches violet-
La cloque du pêcher est la plus répandue et la plus préju- tes. Sur les rameaux verts (surtout des pêchers et des
diciable. Elle sévit également sur les brugnoniers et les amandiers) se forment des taches pourpres qui évoluent
amandiers. Les symptômes sont sans ambiguïté. Les jeu- parfois en petits chancres en automne. En cas d’attaque
nes feuilles se déforment, s’épaississent et prennent une sévère, les bouquets floraux se dessèchent.
teinte violacée (cf. fasc. 2362). Très souvent, les feuilles
malades tombent. Les jeunes pousses peuvent être égale- La conservation hivernale a lieu par les conidies présen-
ment attaquées, de même que les jeunes fruits dont la tes sur les écorces et dans les chancres ou même dans les
croissance est alors perturbée. Le parasite se conserve en bourgeons. Les contaminations démarrent très tôt au
hiver sous les écailles des bourgeons. La maladie est favo- printemps. Elles sont favorisées par la pluie et le vent qui
risée par des printemps humides et froids. Son dévelop- dispersent les conidies.
pement s’arrête dès le début de l’été. La lutte demande l’application de traitements fongicides:
La taille des rameaux malades et l’emploi de variétés peu produits cupriques à la chute des feuilles et au gonfle-
Liste sensibles permet de diminuer l’importance de la maladie. ment des bourgeons, produits organiques pour protéger
Les traitements sont à réaliser dès le gonflement des les inflorescences avant et après la floraison.
bourgeons, de préférence avec des produits cupriques, en
prenant soin de les effectuer au moins 10 jours après la
taille, à cause d’une phytotoxicité possible du cuivre
Ta b l e
pénétrant dans les rameaux par des plaies de taille non
cicatrisées. Un second traitement avec un fongicide orga-
nique homologué doit être effectué au moment du
débourrement des bourgeons à bois, afin de protéger les
jeunes feuilles. Dans les vergers très attaqués, un traite-
Index ment d’automne peut être réalisé après la chute des
feuilles à l’aide d’un fongicide cuprique.

5. Les Rouilles
Glossaire
134.– Deux espèces d’Urédinales (15) attaquent les poiriers,
les pruniers et les abricotiers et ont un cycle complexe. Fig. 33. – Criblure de l’abricotier (Photo G. Raynal)
Chez le poirier, la rouille grillagée, fréquente en régions
méridionales, forme en été des écidies sur les jeunes 7. Le Chancre européen du Pommier
rameaux, les jeunes fruits et surtout les feuilles, à la face
inférieure. Ce sont des pinceaux blanc crème, découpés 136.– Il s’agit d’une maladie en recrudescence en France,
en lanières, qui produisent des écidiospores. Ces derniè- connue dans le monde entier et pas seulement en
res contaminent les genévriers dont les rameaux gonflés Europe, qui apparaît à la suite de blessures sur les
forment à la fin de l’hiver des colonnettes de couleur rameaux et les branches. Le champignon responsable
fauve qui différencient des téleutospores. Les basidiospo- provoque dans un premier temps des craquelures de
res libérées par celles-ci au printemps contaminent les l’écorce puis des réactions de cicatrisation et des chancres
poiriers situés dans le voisinage. La seule méthode de lutte de plus en plus profonds. Les symptômes démarrent sou-
est l’arrachage des genévriers dans un rayon de 500 m vent autour d’un bourgeon ou de l’insertion d’un jeune
autour des vergers de poiriers. rameau sur une branche. Lorsque les rameaux et les
branches sont entourés par les chancres, leur extrémité
Les pruniers et abricotiers montrent en été des pustules dépérit (fig. 34).
foliaires pulvérulentes de couleur rousse, produisant des
Le parasite fructifie et se conserve sur les parties mortes
urédospores. Si elles sont trop nombreuses, ces pustules
des chancres. Il produit des coussinets conidifères fauves
entraînent le jaunissement et la chute prématurée des
(forme asexuée Cylindrocarpon mali) et de nombreux
feuilles et parfois une diminution de la production en
périthèces, bien visibles en automne, de couleur rouge vif.
fruits. Les pruniers et abricotiers ne sont attaqués que s’il
existe dans le voisinage des anémones sauvages ou culti- La lutte est difficile. Il faut éliminer les rameaux malades,
vées qui portent au printemps les écidies du parasite, à cureter les chancres des grosses branches et appliquer un
partir desquelles les arbres sont attaqués. La lutte consiste mastic fongicide sur les plaies fraîches. A la chute des
si possible à détruire les anémones. En cas de vergers feuilles et éventuellement au gonflement des bourgeons,
régulièrement atteints, des traitements fongicides au des traitements cupriques avec des bouillies concentrées
printemps et au début de l’été réduisent la maladie. limitent les risques d’attaque.

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MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE
TA 2361
jusque dans les racines. Les façons culturales qui blessent
les racines favorisent alors la contamination des arbres
sains voisins. Notons que Stereum purpureum est poly-
phage. Il peut attaquer tous les arbres fruitiers et de nom-
breuses essences forestières et ornementales, ce qui rend
la lutte d’autant plus délicate. La lutte n’est que préven-
tive. Il convient d’abord d’éliminer tous les foyers de con-
tamination (branches et arbres morts). Les instruments
de taille doivent être désinfectés, de même que les plaies.
Il existe à cet effet des sécateurs qui pulvérisent diverses
peintures fongicides ou des micro-organismes antago-
nistes du Stereum (tels que les Trichoderma), ce qui per-
met de protéger immédiatement les plaies de taille.
Fig. 34. – Chancre européen du pommier (Photo G. Raynal)
B. Mycoses des fruits en cours de conservation
8. Le Plomb 138.– Après la récolte, les fruits sont l’objet d’attaques de
137.– L’aspect «plombé » du feuillage des arbres fruitiers, champignons. C’est le cas des fruits à noyau qui se conser-
surtout à noyau, peut avoir des origines diverses. La vent peu de temps et chez lesquels les Monilia, en particu-
Liste
maladie du « plomb », due à Stereum purpureum, provo- lier, provoquent des pertes importantes par pourriture.
que un décollement de l’épiderme des limbes sous lequel
s’introduit de l’air, ce qui donne des reflets plombés aux Dans le cas des pommes et des poires, susceptibles d’être
feuilles. Les symptômes apparaissent dès la sortie des conservées longtemps en entrepôt frigorifique, les pertes
feuilles et les arbres malades sont disséminés dans le ver- par pourriture peuvent également être très dommageables. Ta b l e
ger. Le plomb s’accentue sur un même arbre au cours des
années. Les jeunes feuilles finissent par se nécroser, les Selon les parasites (plus de 40 espèces de champignons
rameaux restent chétifs, se dessèchent et l’arbre meurt. en cause), les symptômes des pourritures se différencient
Le parasite fructifie sur les organes morts restés en place par leur couleur, leur consistance, leur forme, leur évolu-
et sur les bois abattus, en automne et en hiver (fig. 35). tion dans le temps. Selon le mode de pénétration et de I n dex
localisation des parasites, on distingue des parasites de
blessure, des lenticelles, des pédoncules, des carpelles, de
l’œil (dépression du calice).

Le tableau de la figure 36 répertorie les principales carac- Glossaire


téristiques de quelques espèces parmi les plus fréquentes .

Les parasites de blessures pénètrent dans les fruits à la


faveur des lésions provoquées au cours des opérations de
cueillette, transport, triage, stockage. Ils sont présents au
verger et, pour certains (Penicillium, Rhizopus), dans les
locaux de stockage. Leur évolution est généralement
rapide et les contaminations d’un fruit à l’autre sont fré-
quentes. Par contre, les parasites lenticellaires (Gloeospo-
rium), absents des locaux mais présents au verger sur les
rameaux et les bourgeons, sont latents sur les fruits au
moment de la récolte. Ils ne se manifestent que plusieurs
mois plus tard, au cours de l’entreposage (fig. 37).

Notons enfin que les tavelures (129) peuvent favoriser


certains agents de pourritures (Trichothecium).
Fig. 35. – Fructifications de Stereum (Photo G. Raynal) La lutte contre ces champignons n’est pas aisée. Elle com-
mence au verger par des traitements fongicides en cours de
Les carpophores du champignon sont des lames coriaces végétation (Monilia, Botrytis). Quelques jours avant la
ou élastiques selon l’humidité, de teinte gris violacé, qui cueillette, une application de benzimidazoles (46) limite
se forment en plaques sur leurs supports. Les spores sont les parasites lenticellaires, de même qu’un bain fongicide
produites en grande quantité par temps humide et sont des fruits après récolte, à l’aide de thiophanates (46).
dispersées par le vent. La contamination des arbres a lieu
à la faveur de blessures diverses et en particulier des Les manipulations des fruits doivent prendre en compte
plaies de taille, principalement en hiver et au printemps. les risques de blessure. Enfin, la désinfection et le dépoussié-
De plus, le parasite progresse à partir des organes aériens rage des caisses et des emballages sont fortement conseillés.

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2361TA MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE

Pénétration par : Type de symptôme


:Parasite Pourriture
Blessure Lenticelles Pédoncule Carpelles Œil Autres caractères
Molle Dure
Monilia x x Pourriture noire
Penicillium x x x Chair liquéfiée
Gloesporium x Taches nécrotiques fauves autour des lenticelles
Rhizopus x x x Chair liquéfiée
Botrytis x x x x Feutrage gris
Trichothecium x x x x Pourriture amère
Fig. 36. – Caractéristiques des champignons parasitant les pommes et les poires en cours de conservation

Sur cerisier, un Pseudomonas voisin, Ps. morsprunorum,


entraîne également des nécroses des bourgeons et des
rameaux, ainsi que des chancres plats des branches, les-
quelles se dessèchent. Les feuilles se nécrosent par taches
qui, en se flétrissant, provoquent une criblure.
La lutte repose sur un ensemble de mesures visant à dimi-
nuer l’inoculum primaire et à freiner par la suite son déve-
loppement. Notamment, les plaies pétiolaires doivent être
protégées par des traitements avec des produits cupriques, à
Liste la chute des feuilles. Les traitements sont poursuivis au prin-
temps (cerisier et poirier), au débourrement, puis avant et
après la floraison, en prenant garde aux risques de phyto-
toxicité. Pendant les opérations de taille, il est nécessaire de
désinfecter les outils à l’alcool entre chaque arbre. De même,
Ta b l e
une protection efficace contre le gel doit être assurée.

Fig. 37. – Gloeosporium perennans sur pomme (Photo G. Raynal) 2. Le Crown-gall


140.– Cette maladie, répandue dans le monde entier sur de
Index C. Les Bactérioses nombreuses espèces ligneuses et herbacées, est due à Agro-
bacterium tumefaciens. Elle est très dommageable,
1. Les Bactérioses à Pseudomonas notamment en pépinières. Le crown-gall se manifeste par
des tumeurs souvent volumineuses au collet des plantes,
139.– Les bactérioses des cultures fruitières sont variées. qui entraînent leur dépérissement. La bactérie est présente
Glossaire Tous les genres de bactéries pathogènes (19), sauf Cory- dans le sol et véhicule un plasmide (19) responsable des
nebacterium, peuvent être rencontrés. Elles compromet- désordres cellulaires que traduisent les tumeurs. Elle pénè-
tent la pérennité des arbres, allant jusqu’à leur mort, et tre à la faveur des blessures, notamment chez les boutures.
déprécient les récoltes. La dissémination de la maladie se fait essentiellement par
les arbres et arbustes transplantés, porteurs de tumeurs.
Les plus fréquentes sont les maladies à Pseudomonas sur
poirier, cerisier et en certaines régions sur pêcher. Ces Outre le fait d’éviter les blessures des collets et des racines
bactéries pullulent naturellement à la surface de tous les et de détruire les jeunes sujets atteints, la lutte repose
organes qu’elles envahissent à la suite de blessures diver- principalement sur l’utilisation d’une bactérie voisine
ses (taille, gel, plaies pétiolaires à la chute des feuilles, antagoniste, Agrobacterium radiobacter, non pathogène,
etc.). Elles se conservent en hiver dans les chancres dont une souche particulière (K 84) synthétise une subs-
qu’elles provoquent. tance appelée bactériocine capable d’inhiber l’action du
plasmide d’A. tumefaciens. La souche K 84 s’emploie pré-
Sur poirier, les dégâts se font sentir surtout à la suite du ventivement en suspension aqueuse par trempage des
gel. La bactérie, Pseudomonas syringae, pénètre alors boutures, semis, graines, avant leur repiquage. La protec-
dans les blessures et provoque des nécroses des écorces, tion obtenue est excellente.
des bourgeons, des feuilles, puis plus tard des bouquets
foliaires et des jeunes fruits. 3. Le Feu bactérien
Sur pêcher, Ps. syringae entraîne le « dépérissement bacté- 141.– Cette redoutable bactériose attaque toutes les
rien », particulièrement grave dans la vallée du Rhône, Pomoïdées (Rosacées), en particulier les poiriers, pom-
où plusieurs milliers d’arbres ont dû être arrachés depuis miers, cognassiers, sorbiers, aubépines, cotoneasters et
1966, année de son apparition. On observe des lésions pyracanthas. Comme depuis longtemps aux Etats-Unis,
noires, vitreuses ou huileuses, d’abord autour des bour- elle a fait son entrée en Europe en 1957 et en France en
geons. Puis les rameaux et les branches se dessèchent et 1972 dans le département du Nord. Depuis, elle a été déce-
montrent des chancres qui exsudent des gommes. Les lée dans plusieurs départements du Sud-Ouest, du Val de
arbres dépérissent souvent par parties qui restent dénu- Loire, de la Région Parisienne et du Centre. Son extension
dées. Les attaques sont parfois brutales au printemps et semble inévitable et constitue une menace importante
entraînent la mort de tout ou partie de l’arbre. pour les vergers et les cultures d’arbustes ornementaux.

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MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE
TA 2361
Erwinia amylovora, bactérie responsable du feu bactérien, D. Maladies de dépérissement dues aux
provoque des noircissements et des nécroses de tous les Virus et Mycoplasmes
jeunes organes, comme s’ils avaient été grillés par le feu:
jeunes pousses qui se recourbent en crosse, feuilles mar- 142.– Les arbres fruitiers sont largement contaminés par de
rons ou noires, flasques, qui ne chutent pas en automne, nombreux virus, isolés ou fréquemment en complexes et
bouquets floraux et jeunes fruits détruits et momifiés. Sur par des mycoplasmes, eux-mêmes souvent en complexes
les tissus récemment envahis sourdent parfois des goutte- avec des virus (fig. 38). L’importance économique de ces
lettes muqueuses de couleur ambrée, dans lesquelles proli- maladies est variable et souvent difficile à préciser, en raison
fère E. amylovora. En automne et en hiver apparaissent sur de la difficulté du diagnostic. Pour les mieux connues, on a
les branches des craquelures des écorces ainsi que des pu montrer que les dépérissements affectent particulière-
chancres. Le bois prend une teinte rougeâtre caractéristi- ment la reprise des greffons, la croissance des jeunes arbres,
que. Finalement, la maladie conduit à la mort des char- qui peut être réduite de 10 à 50 %, ainsi que la production
pentières, puis de l’arbre ou de l’arbuste. de fruits (diminution jusqu’à 50 %) et leur qualité.
Les symptômes peuvent être aisément confondus avec Les symptômes sont variés, allant de l’absence de symp-
ceux dus aux Pseudomonas (139) ou d’autres agents tôme visible (maladies latentes) à la mort des arbres
pathogènes, ou même des insectes. En cas de doute, les atteints dans les cas les plus graves. Ils sont rarement suffi-
services spécialisés de l’INRA et de la Protection des Végé- sants pour caractériser à eux seuls l’agent pathogène en
taux doivent être consultés. cause, car ils dépendent de nombreux facteurs et sont sou-
mis à de multiples interactions: souche de virus ou de
La dissémination d’E. amylovora a lieu grâce aux goutte- mycoplasme, action de complexes viraux, effets du culti-
lettes qui exsudent à la surface des organes malades. Elles Liste
var, du porte-greffe, du greffon, du climat, de la nutrition,
sont dispersées par l’eau (pluie, irrigation), le vent, les etc. Il est donc dans tous les cas nécessaire de préciser le
oiseaux, les insectes (pollinisateurs et ravageurs), diagnostic par l’indexage (24), c’est-à-dire l’observation de
l’homme. Les plantes sont particulièrement sensibles plantes-test ligneuses ou herbacées inoculées par greffage
dans les premiers stades de la floraison et lors de la florai- d’un fragment de l’arbre à tester ou par frottis avec un Ta b l e
son secondaire, notamment le poirier et l’aubépine, mais broyat de cet arbre. Lorsque cela est possible, la sérolo-
les contaminations peuvent s’échelonner durant toute la gie(24) constitue un outil de choix pour le diagnostic.
période de végétation. Les conditions climatiques (plu-
viométrie et humidité printanières élevées, températures Selon les virus, on distingue par exemple sur les feuilles des
douces), constituent un des facteurs majeurs agissant sur taches et anneaux chlorotiques, des mosaïques, des arabes-
l’intensité de la maladie. ques, des marbrures, des déformations, des enroulements. I n dex
Ces symptômes sont souvent fugaces. Ils peuvent être mas-
En l’absence de produits de traitements curatifs, la lutte
qués par les températures élevées. Les entre-nœuds peuvent
s’avère très difficile sur les vergers et les arbustes actuelle-
être courts, avec des méplats. Sur les écorces apparaissent
ment en place. Rappelons que les antibiotiques à usage
des nécroses, des craquelures, des fentes longitudinales, des
agricole sont pour l’instant interdits en France. Les pro- Glossaire
chancres. Le bois peut être atteint et montrer une mauvaise
duits cupriques, préventifs, freinent le développement de
lignification et des nécroses sous les écorces. Les bourgeons
la maladie, mais leur emploi est délicat près de la florai-
se nécrosent, chutent en grand nombre, forment des roset-
son. Le curetage des chancres, la taille sévère des organes
tes anormales de feuilles. Les fruits peuvent être déformés,
malades ne font que ralentir la progression des symptô-
bosselés, tachés, atteints de gravelle (poires). Enfin, les jeu-
mes et assurent rarement la guérison. L’éradication des
nes plants greffés ont fréquemment des difficultés de
aubépines autour des vergers, la destruction de dizaines
reprise, voire de survie, et une mauvaise croissance.
de milliers de poiriers a retardé l’extension de la maladie.
D’autres mesures prophylactiques sont préconisées: Les Mycoplasmes provoquent des proliférations des jeu-
désinfection des caisses et matériels provenant des nes pousses, des balais de sorcière, des rosettes de feuilles,
régions contaminées, interdiction du transfert de ruches des transformations de fleurs en organes foliacés (phyllo-
en provenance de vergers malades, suppression des arro- dies), des corolles doubles. Les fruits demeurent de petit
sages sur frondaison, limitation de la fumure azotée, éli- calibre, avec parfois des anomalies de forme. Les greffons
mination des fleurs secondaires. reprennent mal. Dans certains cas, on constate un ramol-
lissement ou un aplatissement des rameaux (bois caout-
Des différences de résistance variétale existent chez le poirier,
chouc ou bois souple).
le pommier et les arbustes ornementaux. L’implantation de
variétés peu sensibles s’impose donc dans les zones à risques Ces symptômes, qui doivent attirer l’attention de l’arbo-
dont la cartographie est en cours d’établissement. riculteur, peuvent être dus à de nombreuses causes phy-
Sur le plan national, des mesures de lutte obligatoire ont été siologiques et parasitaires et conduire à des confusions.
arrêtées par le Ministère de l’Agriculture (J.O. du 16 janvier Un des critères de la présence d’une virose ou d’une
1983). Il est en particulier interdit, sauf dérogation parti- mycoplasmose est que ces maladies sont transmises ou
culière, d’importer, de multiplier, de commercialiser et de révélées par la greffe. On peut ainsi mettre en évidence des
planter certaines espèces et variétés très sensibles. La décla- virus latents, qui sont sans doute parmi les plus impor-
ration de la découverte du feu bactérien est obligatoire afin tants chez les arbres fruitiers.
de combattre la progression de la maladie. Les zones con- 143.– Les Viroses et Mycoplasmoses des arbres fruitiers sont
taminées sont définies par arrêté, afin de prendre les transmises par la multiplication végétative (boutures, mar-
mesures d’éradication et de protection nécessaires. cottes, greffes, porte-greffes), rarement par la semence et

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2361TA MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE

Viroses Mycoplasmoses
Répandues et graves Moins graves Parfois graves peu fréquentes
Pommier Fruits verruqueux sur fruits : craquelure étoilée Prolifération
Bois strié Rugosité annulaire Bois caoutchouc
Poirier Mosaïque Chancres Dépérissement
Jaunissement des nervures Chute des bourgeons
Ring spot Gravelle des fruits
Prunier Sharka Mosaïque
Fentes de l’écorce
Abricotier, pêcher Sharka Mosaïque
Cerisier Ring spot
(taches en anneau)
Fig. 38. – Principales maladies à virus et à mycoplasmes des arbres fruitiers

quelquefois par le pollen (Prunus Ring Spot). La transmis- VIII. MALADIES DES CULTURES LÉGUMIÈRES
sion par des vecteurs animaux n’est connue que dans le cas ET FLORALES
de la Sharka (virose), du dépérissement et de la proliféra-
tion du pommier et du poirier (mycoplasmoses). Pour ces 145.– Etant donné la grande diversité des cultures légu-
derniers, le Psylle du poirier et une cicadelle du pommier mières et florales, il est impossible de détailler ici les
sont responsables de la dissémination des mycoplasmes et maladies de chaque production. C’est pourquoi nous
Liste
de la contamination des arbres sains. Dans le cas de la nous limiterons aux affections les plus représentatives de
Sharka, très importante en Europe centrale et de l’Est, la la pathologie horticole.
dissémination naturelle des diverses souches de virus est La pathologie des plantes horticoles revêt un aspect assez
l’œuvre de plusieurs espèces de pucerons, qui assurent particulier, en raison des conditions de culture
Ta b l e l’extension rapide de la maladie, d’où sa gravité poten- spécifiques à telle ou telle production. C’est ainsi que de
tielle. Introduite en France en 1970 avec du matériel con- plus en plus, les productions horticoles sont spécialisées et
taminé, elle fait actuellement des dégâts dans le sud-est de intensives, au champ et plus encore sous serre. Ceci signifie
la France sur les abricotiers. Elle est bien entendu trans- l’absence de rotations culturales, des cultures à contre-sai-
mise également par le matériel végétal, porte-greffes et son, de fortes densités de plantation, l’emploi de fumiers et
Index variétés. Rappelons qu’elle est susceptible d’attaquer de substrats (tourbes, laine de roche, argiles expansées...)
l’abricotier, le prunier et le pêcher. La vigueur des arbres avec les implications sanitaires que nous verrons. De plus,
n’est pas, ou peu, affectée, par contre les fruits mûrissent l’irrigation, la brumisation, les conditions climatiques des
mal, sont déformés et montrent des taches annulaires serres, sont souvent très favorables aux maladies. Celles-ci
caractéristiques. Les pertes sont très importantes. sont souvent dues à des parasites apportés dans l’exploita-
Glossaire tion par des organes de propagation végétative en prove-
144.– La lutte ne peut être que préventive dans la plupart
des cas. La règle absolue est d’utiliser du matériel sain nance d’établissements spécialisés et dont l’état sanitaire
pour l’implantation des vergers. En effet, les jeunes plants peut être défectueux. Par la suite, les multiples opérations
sont très sensibles aux viroses et mycoplasmoses. Avec culturales entraînent de nombreuses possibilités de conta-
l’âge, ils acquièrent une certaine résistance, mais si dès le mination. Etant donné la grande valeur et la productivité
départ ils sont contaminés, la production et la longévité élevée des plantes horticoles, toute perte est lourdement res-
du verger sont compromises. L’obtention de matériel sentie. Il faut donc assurer une excellente protection phyto-
sain est possible grâce aux techniques d’indexage (porte- sanitaire, tout en tenant compte du danger que peuvent pré-
greffes et variétés). La thermothérapie (traitement de jeu- senter pour le consommateur des résidus toxiques présents
nes plants à 37-38 °C pendant 4 à 6 semaines) permet dans et sur les plantes au moment de la récolte.
dans la plupart des cas de débarrasser les plants de base Les méthodes de lutte seront donc sophistiquées, par des
de leurs virus et mycoplasmes et de régénérer les variétés. procédés qui ne peuvent être envisagés pour les autres
Chez le pêcher, des résultats identiques sont obtenus par cultures en raison de leur coût: désinfection des sols et
la culture de méristèmes (61) et le microgreffage. des substrats, régulation climatique précise des serres,
lutte biologique, plantes prémunies, plantes greffées sur
Dans les cas de transmission par des insectes (pucerons),
des porte-greffes résistants, etc. Dans tous les cas, les
la protection aphicide des vergers s’impose dans les zones
mesures prophylactiques reposant sur des pratiques cul-
à risque.
turales rigoureuses sont très recommandées. Enfin, sou-
Enfin, comme il n’existe pour l’instant aucune méthode vent, il faut avoir recours aux spécialistes pour les analy-
de lutte curative sur les arbres en place, il peut être néces- ses sanitaires qui permettent de définir les méthodes de
saire de procéder à l’arrachage et à la destruction des lutte les plus appropriées.
arbres pour tenter d’enrayer les épidémies. C’est ainsi
que 15 millions d’arbres à noyau ont été détruits en You-
goslavie en 20 ans pour s’opposer à la progression de la
Sharka. Près de 50 000 pêchers et 25 000 abricotiers ont
dû, dans le même but, être arrachés dans les zones méri-
dionales françaises depuis 10 ans.

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MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE
TA 2361
A. Maladies provoquées craindre dans les sols où l’on produit de façon intensive la
par les Champignons du sol tomate et les cucurbitacées. Elle se manifeste par des man-
chons liégeux sur les racines, qui entraîne un flétrissement
146.– Les champignons parasites vivant dans le sol, sus- des parties aériennes et une mauvaise production.
ceptibles de faire des dégâts en serre ou au champ, sont
principalement les suivants: Fusarium spp. et notam- 147.– La conservation de ces champignons a lieu dans le
ment Fusarium oxysporum, Verticillium dahliae, Rhizoc- sol, souvent profondément, grâce à divers organes doués
tonia violacea, Phytophthora spp., Pythium spp., Pyre- d’une capacité de survie généralement longue, qui se for-
nochaeta lycopersici. ment sur les débris enfouis de végétation. L’absence de
rotations ou la succession de cultures sensibles accrois-
Les Fusarium oxysporum, agents des fusarioses vasculai- sent la quantité de ces organes jusqu’au moment où la
res, sont de graves agents de flétrissement chez de nom- culture devient non rentable, voire impossible.
breuses cultures, dont le melon, la tomate, le pois,
L’utilisation de certains substrats, tels que des tourbes,
l’œillet, le cyclamen. Ces Fusarium, contrairement aux
favorise les Fusarium oxysporum, Phytophthora, Rhizocto-
Fusarium agents de pourritures, provoquent des trachéo-
nia, Pythium. Certains sols de pleine terre et certains
mycoses. Ils s’installent en effet dans les vaisseaux du bois
substrats montrent une grande réceptivité aux fusarioses
des plantes, lesquelles réagissent par des gommes et des
vasculaires et aux Pythium. D’autres, par contre, s’avè-
bouchons qui obstruent ces vaisseaux et provoquent des
rent résistants, c’est-à-dire que l’on n’y observe jamais de
jaunissements, des dépérissements et des nécroses vascu-
graves symptômes, même si on les contamine avec des
laires. La progression de la maladie entraîne la mort des
doses massives d’inoculum (ex.: certains sols de la vallée
plantes. Ces Fusarium sont très spécialisés. Il existe ainsi
de la Durance et de la région de Fréjus pour les fusarioses Liste
de multiples formes spéciales ne se différenciant que par le
vasculaires). L’étude de l’origine de cette « résistance » est
type de plante qu’elles sont capables d’infecter. Par exem-
en cours. Elle semble être de nature microbiologique.
ple, les formes spéciales melonis, lycopersici, pisi et dian-
Elle permettra peut-être la mise en œuvre de méthodes
thi, attaquent respectivement seulement le melon, la
de lutte biologique afin de rendre résistants des sols et des
tomate, le pois et l’œillet. De plus, pour certaines cultures Ta b l e
substrats particulièrement « sensibles ».
(melon, pois, tomate par exemple), la sélection de varié-
tés possédant des systèmes monogéniques de résistance a Enfin, des fatigues de sol peuvent être observées à la suite
provoqué l’apparition de races capables de rendre ineffi- de monocultures. Les rendements baissent progressive-
caces les gènes de résistance en cause (38). ment, sans que l’on puisse nettement en définir l’origine.
Des analyses particulières sont alors nécessaires afin de
La verticilliose, due à Verticillium dahliae est également I n dex
préciser la ou les causes de la fatigue.
une trachéomycose qui se traduit par des flétrissements
et des nécroses vasculaires, par exemple chez les Solanées 148.– La lutte contre les champignons du sol fait appel à
(aubergine, poivron, tomate). Cette verticilliose est fré- des moyens variés, souvent coûteux.
quente en serre, où elle provoque une forte diminution La désinfection des sols en place et des substrats par la
de la production. chaleur et les fumigants n’est pas toujours efficace. C’est Glossaire
Le rhizoctone violet est particulièrement nuisible dans les ainsi que les Fusarium oxysporum, capables de se conser-
aspergeraies où il entraîne à la longue une absence de ver à grande profondeur, sont peu affectés et peuvent
végétation. Le champignon responsable, Rhizoctonia même recoloniser de façon explosive un sol désinfecté.
violacea, très polyphage, prolifère sur les griffes des De plus, les fumigants peuvent être inactivés par adsorp-
asperges sur lesquelles il forme des manchons violets et tion sur la matière organique lorsque les sols en sont trop
dont il entraîne la mort. riches. On est alors de plus en plus conduit à pratiquer
des cultures hors sol, en bacs de ciment, plus faciles à
Les Pythium sont surtout des agents de manques à la désinfecter complètement. Mais il faut toujours faire très
levée et de fontes de semis ou de pourriture des jeunes attention aux possibilités de recontamination: plants
plants et des organes de propagation végétative fraîche- malades, particules de terre infectée, eaux d’arrosage,
ment repiqués. Ils sont fréquents par températures basses solutions nutritives, etc.
dans les sols et les substrats humides.
L’état sanitaire des substrats, terreaux, fumiers, devrait
Les Phytophthora, voisins des Pythium, sont également être garanti, de même que celui des plants surtout s’ils
des agents de pourriture des racines et des collets. Ils sont sont multipliés par des établissements spécialisés. La lon-
bien connus chez les cultures ornementales (ex.: conifè- gue période d’incubation des maladies vasculaires laisse
res, saintpaulia). Chez le fraisier, une espèce particulière, passer inaperçus les symptômes visuels sur les plants et
P. fragariae, provoque la « maladie du cœur rouge », très conduit plus tard à la généralisation de ces maladies chez
grave dans les zones humides et froides. Les symptômes les plantes adultes. La désinfection des plants par des
se caractérisent par des racines sans radicelles, en « queue fongicides ou des bains antiseptiques est recommandée
de rat », montrant un cylindre central rouge sang. La avant plantation (ex.: trempage des fraisiers dans une
contamination des plantes a lieu en automne et en hiver. suspension d’éthylphosphite d’aluminium pour lutter
Les plantes flétrissent, dépérissent et finissent par mourir contre le « cœur rouge », désinfection des griffes
dès le début de la mise à fruits. d’asperge à l’eau de Javel pour les débarrasser du rhizoc-
Enfin, chez la tomate, Pyrenochaeta lycopersici provoque la tone violet).
maladie des « racines liégeuses » (corky-root). Cette mala- Lorsqu’elles sont disponibles, les variétés résistantes sont
die, grave en serre, est en extension en plein champ. Elle est à très intéressantes, malgré le risque d’apparition de nou-

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2361TA MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE

velles races virulentes des parasites. Dans certains cas, on ces appartenant au même groupe systématique (14).
utilise des porte-greffes résistants aux parasites du sol. Nous avons déjà étudié deux exemples sur pomme de
On greffe ainsi les aubergines et les tomates sur une terre et sur vigne (93 à 95, 109 à 112), qui donnent une
tomate hybride (KNVF) résistante à plusieurs agents idée de l’épidémiologie et des méthodes de lutte applica-
pathogènes du sol, dont les nématodes, pour lutter con- bles contre les mildious.
tre la verticilliose (aubergine) et le corky-root (tomate). Phytophthora infestans, responsable du mildiou de la
pomme de terre, attaque également la tomate et l’auber-
B. Pourriture grise et Sclérotiniose gine. La contamination des tomates, sous abri et surtout
149.– Botrytis cinerea, agent de la pourriture grise, ou « en plein champ, est généralement tardive, lorsque le mil-
toile » et Sclerotinia sclerotiorum, un des responsables de diou a déjà acquis un certain développement sur pomme
la Sclérotiniose, sont des champignons qui provoquent de terre. Les dégâts sur tomate peuvent alors être catastro-
des pourritures à évolution rapide de tous les organes au- phiques, en raison de la rapidité de développement de la
dessus et au niveau du sol, chez de nombreuses cultures, maladie sur cette culture. Sur les feuilles, les tiges et les
horticoles ou non. Tous les deux sont favorisés par une fruits verts apparaissent des taches brunâtres diffuses. Les
humidité élevée, une végétation dense, des blessures, des fruits, très sensibles, sont souvent bosselés et mûrissent
pièces florales mortes restant sur les organes vivants, par- mal. Les feuilles se dessèchent. Les traitements, avec diver-
ticulièrement les fruits. ses matières actives, sont heureusement très efficaces.
Le Botrytis est capable d’attaquer pratiquement toutes les Le mildiou du concombre, dû à Pseudoperonospora cubensis,
cultures légumières et florales, aussi bien les plantes adul- est susceptible d’envahir rapidement les cultures de concom-
Liste tes que les semis. Il provoque des pourritures molles qui se bre et de melon sous serre. Des taches anguleuses vert-pâle
recouvrent d’un feutrage gris caractéristique. Le champi- apparaissent sur les feuilles qui se dessèchent, entraînant le
gnon se conserve par du mycélium et des sclérotes dans les dépérissement des plantes. Lorsque la maladie est déclarée,
sols et les substrats ainsi que sur les débris végétaux. les traitements sont inefficaces. On doit donc l’enrayer dès
son début, par des pulvérisations de mancozèbe.
Ta b l e Le Sclerotinia fait des dégâts surtout sur aubergine, haricot,
pois, carotte, endive. Les organes nécrosés se recouvrent Le mildiou de la laitue, provoqué par Bremia lactucae,
d’un feutrage blanc pur à partir duquel prennent nais- qui parasite également d’autres composées comme l’arti-
sance des masses noires assez volumineuses (jusqu’à 10-15 chaut, peut être très dommageable, en raison de la rapi-
mm), les sclérotes, qui se conservent à faible profondeur dité de son développement à tous les stades de la culture.
Index dans les sols et substrats. Ces sclérotes germent en donnant Les feuilles montrent des taches d’abord claires, qui se
soit des apothécies (16, 103, 106) qui libèrent des ascospo- couvrent d’une farine blanche à la face inférieure, puis se
res contaminantes, soit du mycélium pathogène. Chez la nécrosent et se dessèchent (fig. 39). Les traitements (pos-
laitue existe une espèce particulière de Sclerotinia à très sibilité de nombreuses matières actives) doivent être faits
petits sclérotes ne produisant pas d’apothécies sous le cli- depuis la levée, toutes les semaines, et au plus tard
Glossaire mat français. Il s’agit de S. minor, bien plus fréquent sur jusqu’au stade 18-20 feuilles, afin de diminuer le plus
laitue que S. sclerotiorum et qui provoque des pertes possible les risques de résidus toxiques au moment de la
importantes, notamment dans les régions méridionales. récolte. Des variétés résistantes existent, mais le Bremia
est très variable et l’on doit se méfier de l’apparition de
150.– La lutte contre ces deux parasites est d’abord pro-
nouvelles races virulentes.
phylactique. Il faut éviter les semis denses, les fumures
azotées trop importantes favorisant une végétation luxu- Pour tous les mildious, favorisés par une forte humidité
riante, les arrosages trop fréquents, la brumisation. Il faut et de l’eau qui reste à la surface des plantes et du sol, il est
aérer les serres et les abris, régler le chauffage pour éviter conseillé d’aérer les serres et les abris, de faire en sorte
une trop forte humidité, éliminer les plantes malades, que les plantes se ressuyent rapidement après les arrosa-
butter ou pailler les plantes pour que les apothécies du ges et, pour les cultures qui s’y prêtent, de tuteurer les
Sclerotinia ne puissent se former. plantes afin de maintenir les organes aériens aussi loin
que possible du sol.
La désinfection du sol permet de détruire les organes de
conservation des deux champignons. Contre les scléroti-
nioses, l’arrosage du sol avec de l’iprodione est efficace,
de même que l’incorporation d’iprodione ou de vinchlo-
zoline aux terreaux au moment de leur fabrication (cas
de la Sclérotiniose de la laitue).
En cours de végétation, des traitements fongicides (ipro-
dione, procymidone, vinchlozoline...) peuvent s’avérer uti-
les. C’est ainsi qu’il est nécessaire d’effectuer 3 à 4 traite-
ments pour protéger les fraisiers de la pourriture grise, entre
le début de la floraison et l’apparition des premiers fruits.

C. Mildious et Oïdiums
151.– On connaît une quinzaine de mildious chez les cul-
tures horticoles. Ils sont provoqués par différentes espè- Fig. 39. – Mildiou de la laitue (Photo G. Raynal)

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MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE
TA 2361
152.– Les oïdiums ou « blancs » sont également nombreux Cucurbitacées, et surtout sur courgette, il faut intervenir très
(au moins une dizaine) chez les productions légumières rapidement en cas de pluies orageuses qui font baisser les
et florales. Ils sont dus à un ordre particulier d’Ascomy- températures, avec une association triforine + manèbe.
cètes (16) se caractérisant par une vie parasitaire obliga- 154.– Les Anthracnoses, dues à des Ascochyta et des Colle-
toire à la surface des organes des végétaux. Leur biologie totrichum se manifestent sur les fruits, les gousses, les
et leur épidémiologie ont déjà été rapportées en se réfé- semences, les tiges, par des taches nécrotiques déprimées
rant à diverses espèces attaquant d’autres types de cultu- sur lesquelles se forment des pycnides ou des acervules,
res (68, 85, 113 à 115, 132). Tous se développent bien à petits organes qui produisent des spores dans un mucus.
une humidité comprise entre 70 et 100 % et tolèrent une L’anthracnose du haricot (fig. 40) qui provoquait de gra-
grande sécheresse de l’air. Par contre, la pluie leur est ves dégâts il y a une vingtaine d’années, est maintenant
néfaste. Leur développement est actif entre 20 et 30 °C. bien combattue par les variétés résistantes et par l’utilisa-
Ces conditions sont facilement réalisées en serre et, en tion de semences saines, de même, si nécessaire, que par
régions méridionales, en plein champ. des traitements fongicides.
Parmi les oïdiums observables en horticulture, l’oïdium Les septorioses (ex. sur céleri), provoquées par des Septo-
du rosier, dû à Sphaerotheca pannosa var. rosae, peut être ria entraînent la formation de taches sur le feuillage qui
très préjudiciable. Les symptômes sont des taches blan- se dessèche. La pluie, le vent, les arrosages, les instru-
ches, farineuses, sur les feuilles, les jeunes tiges, les bour- ments, disséminent les spores. Des traitements de semen-
geons, et les fleurs. Les organes sont déformés et la florai- ces et en cours de végétation sont conseillés.
son est réduite. En serre, où la maladie est présente en
permanence, l’utilisation de vapeurs de soufre émises par Les alternarioses, très nombreuses, ont pour origine diver-
ses espèces d’Alternaria. Elles provoquent des taches Liste
des évaporateurs se montre très efficace. En plein air, de
nombreux traitements s’avèrent nécessaires (au moins 10 nécrotiques noires, souvent zonées, sur les feuilles, les tiges
par campagne) avec divers produits anti-oïdium. et les fruits, lesquels peuvent être atteints de pourritures.
L’oïdium des Cucurbitacées est bien connu des maraî-
chers. C’est la maladie la plus fréquente des organes Ta b l e
aériens des concombres, melons et courgettes. Quatre
espèces sont en réalité responsables de cet oïdium: Erysi-
phe polygoni, E. cichoracearum forme spéciale cucurbitae
(la plus commune), E. polyphaga et Sphaerotheca fuligi-
nea. Les symptômes sont visibles surtout sur les feuilles, I n dex
d’abord à la face inférieure, sous la forme d’une farine
blanche. Les organes attaqués finissent par jaunir et se
dessécher. L’application de fongicides anti-oïdium per-
met de combattre la maladie. De plus, chez le melon exis-
tent des variétés résistantes. Glossaire

D. Quelques exemples d’autres mycoses


des parties aériennes
153.– Les cladosporioses provoquent d’importants dégâts
chez les Cucurbitacées (courgette notamment), où elles
sont connues sous le nom de « nuile grise ». Chez ces cul-
tures, elles sont dues à Cladosporium cucumerinum.
Chez la tomate, une autre espèce (C. fulvum) est suscep-
tible de proliférer rapidement en serre. Ces maladies se
développent à des humidités élevées, à température fraî-
che (15-18 °C) chez les Cucurbitacées et au contraire
entre 20 et 25 °C chez la tomate.
C. cucumerinum provoque des taches grises et vitreuses
sur les feuilles et les fruits qui montrent des nécroses plus
ou moins profondes. Chez la courgette, les dégâts peu-
vent se poursuivre sur les fruits après la récolte. Chez la
tomate, C. fulvum se manifeste par des taches jaunâtres à
la face supérieure des feuilles et gris-verdâtre à la face Fig. 40. – Anthracnose du haricot (Photo G. Raynal)
inférieure. Les feuilles jaunissent et se dessèchent.
La lutte contre les cladosporioses est difficile. En serre, E. Les Bactérioses
l’aération permet de limiter la maladie sur tomate. Sur cette 155.– Là encore, elles sont extrêmement diverses. Nous
culture, l’application de triforine, très efficace, a le grave nous bornerons à indiquer très schématiquement les
inconvénient de tuer les hyperparasites de l’Aleurode des divers types de maladies, en ayant à l’esprit que les con-
serres. La résistance variétale se heurte à la grande variabilité vergences de symptômes sont nombreuses, d’où des
de C. fulvum. En ce qui concerne la cladosporiose des erreurs possibles de diagnostic visuel.

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2361TA MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE

On distingue des pourritures molles et des nécroses dues à rabougrissements, des mosaïques, des jaunisses, des
diverses espèces d’Erwinia, de Pseudomonas et de Xantho- stries chlorotiques, des nécroses, de mauvais enracine-
monas (par ex., sur laitue, chicorée, endive, poireau, ail, ments des boutures, une faible production de fruits, de
arum, iris, orchidées, œillet, cyclamen, saintpaulia, dieffen- fleurs ou d’organes végétatifs. La transmission des viro-
bachia, etc.). Ces pourritures sont très répandues, notam- ses s’effectue selon les cas par des microlésions au
ment chez les productions florales, en raison du commerce moment des manipulations, par des vecteurs animaux,
international et des techniques utilisées dans les serres par les semences et de façon massive par la propagation
(substrats, brumisation, irrigation, chauffage excessif). végétative. Quelques exemples illustreront ces maladies.
D’autres bactéries provoquent des taches ou des stries Les Cucurbitacées sont toutes attaquées par le virus I de
graisseuses et des flétrissements (graisses du poireau—cf. la mosaïque du concombre, très polyphage (plus de 300
fasc. 2362—et du haricot, dues respectivement à Pseudo- espèces de plantes peuvent héberger ce virus) et transmis
monas syringae var. porri et P. phaseolicola). On observe selon le mode non persistant (26) par de nombreuses
également des flétrissements et des chancres dus à la pro- espèces de pucerons. Cette maladie est grave sur melon,
lifération des bactéries dans les vaisseaux (Corynebacte- concombre et courgette, dont les cultures de plein champ
rium michiganense sur tomate), des taches sur les fruits sont infectées en totalité dès le début de l’été, particuliè-
(moucheture de la tomate à Pseudomonas syringae var. rement lorsque la température est un peu basse.
Tomato), des nervures ou des tumeurs à la base des plan- Les Solanées (tomate, aubergine, poivron) montrent des
tes (Corynebacterium fascians et Agrobacterium tumefa- viroses de type mosaïque, parfois très graves, comme la
ciens) et bien d’autres affections. mosaïque du tabac sur tomate. Cette maladie, dont les
Liste Les bactérioses des cultures légumières et florales sont symptômes sont variables (mosaïques, feuilles filiformes),
certainement en recrudescence, pour les mêmes raisons entraîne une baisse importante de la vigueur des plantes et
que nous avons exposées pour les autres cultures. En de leur production. Elle est transmise par contact au cours
plus, les multiples manipulations que subissent ces pro- des manipulations et à la surface des semences. La mosaïque
ductions, leur multiplication souvent végétative, leur commune du haricot, transmise par la semence et par des
Ta b l e pucerons, est fréquente. Elle entraîne une mosaïque du
large diffusion internationale, le micro-climat particulier
des serres, l’inobservation de règles prophylactiques sim- feuillage accompagnée de nanisme. Les viroses du pois, le
ples mais nécessitant de la main d’œuvre, font que ces plus souvent des mosaïques, sont transmises par des vec-
maladies peuvent aisément proliférer. teurs (pucerons, nématodes) et par la semence.
Index 156.– La lutte est toujours difficile et, en l’absence d’anti- Chez la laitue, on observe une dizaine de viroses, dont
biotiques utilisables sans danger (19, 42), les méthodes deux jaunisses, l’une, commune, transmise par pucerons,
reposent essentiellement sur des pratiques culturales, l’autre, potentiellement plus grave, inoculée par l’Aleu-
d’autant plus que les fongicides cupriques, qui ont une rode des serres.
action au moins bactériostatique, sont actuellement peu Le fraisier est porteur de nombreux virus, dont ceux qui
Glossaire utilisés en horticulture. Ils sont cependant recommandés provoquent la mosaïque, la marbrure (le plus important)
en traitements préventifs pour lutter par exemple contre et la frisolée. Ces maladies sont transmises par des puce-
les bactérioses de la tomate. rons et des nématodes.
La sélection sanitaire des semences et des organes de pro- Parmi les cultures florales, l’œillet souffre de viroses dis-
pagation végétative est une nécessité. Elle est réalisée par séminées par les boutures et (ou) transmises par des
des tests de laboratoire qui aboutissent au tri pucerons. La marbrure et la bigarrure sont les plus com-
de lots de semences très peu ou pas contaminés ainsi munes et provoquent des pertes très sensibles de produc-
qu’à la multiplication et la commercialisation d’organes tion de fleurs et d’enracinement des boutures. Enfin, les
sains. Bien entendu, les plantes malades et les débris de Orchidées, cultivées en multiplication accélérée, sont
culture doivent être éliminés, les outils, les locaux, les sols également très atteintes par les viroses qui abaissent le
et les substrats soigneusement désinfectés. rendement et déprécient la qualité des fleurs (mosaïque
du Cymbidium, ringspot de l’Odontoglossum).
Enfin on tente de plus en plus de sélectionner des variétés
résistantes. C’est ainsi que l’on combat actuellement de 158.– Le dépistage des viroses, la sélection sanitaire, la régé-
façon efficace la graisse du haricot. nération des variétés, par les méthodes déjà exposées (59 à
61), ainsi que la multiplication des pieds-mères ou des
jeunes plants à l’abri des contaminations par les vecteurs,
F. Les Viroses ont permis de faire des progrès considérables. C’est ainsi
157.– Elles sont tout aussi nombreuses, sinon plus que les que les fraisiers traités par thermothérapie (15 à 21 jours
mycoses et les bactérioses et encore plus difficiles à étu- à 38 °C) sont commercialisés indemnes de virus et voient
dier, car elles interviennent fréquemment en complexes. leur production fortement accrue. Les œillets, dont les
De plus, on rencontre des virus latents impossibles à variétés anciennes étaient toutes infectées, sont mainte-
détecter par les symptômes, bien que répandus et suscep- nant régénérés par culture de méristèmes et par thermo-
tibles d’aggraver les dégâts dus à d’autres virus. D’autre thérapie. Une sélection sanitaire sévère, basée sur des
part, les symptômes peuvent varier ou passer inaperçus, contrôles sérologiques, permet de commercialiser des
notamment en fonction des conditions climatiques et de boutures ayant un faible taux d’infection par les virus
la virulence des souches. Les symptômes, parfois très dis- plus graves (marbrure). De la même façon, on régénère
crets, se manifestent par des baisses de vigueur, des et on sélectionne par des méthodes sérologiques de nom-

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MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE
TA 2361
breuses autres productions (dahlias, orchidées par exem- dues à des champignons polyphages du sol ou présents avec
ple). Ces techniques s’appliquent aux plants et semences les semences (Fusarium, Phoma, Pythium, Rhizoctonia...).
produits en France, mais permettent également de con- Les résineux et le hêtre y sont particulièrement sensibles.
trôler ceux qui sont importés, ces derniers étant fré- Chez les jeunes plants, on note des attaques de feuilles, de
quemment porteurs de nombreuses viroses. Les horticul- rameaux et de racines par des champignons les plus divers,
teurs peuvent ainsi se procurer en France des semences et par exemple Oïdium sur chêne, Dothichiza sur peuplier,
des organes de propagation végétative certifiés indemnes Gnomonia sur platane, Armillaria sur conifères, etc. Ces
de virus. Ceci mérite d’être souligné, car une telle possi- maladies peuvent entraîner l’affaiblissement, le dessèche-
bilité est rare dans les autres pays. ment et la mort des jeunes plants. Chez les arbres adultes,
Les traitements contre les vecteurs, surtout en pépinières on observe des dépérissements, des pourridés, des défor-
ou sur les jeunes plantes repiquées, réduisent notable- mations et des chancres des rameaux, des maladies du
ment les risques d’infection. L’utilisation des variétés feuillage et enfin des altérations des arbres abattus. Quel-
résistantes est prometteuse. La mosaïque commune du ques exemples illustreront les cas les plus importants.
haricot a pratiquement disparu grâce à de telles variétés. Si le diagnostic d’une maladie sur un arbre pris isolément
De même, des variétés de tomates résistantes à la mosaï- n’est pas toujours aisé, l’estimation des dégâts au niveau du
que du tabac sont utilisées avec succès. peuplement est encore plus difficile, pour peu que le massif
Enfin, la prémunition des variétés par des souches hypoviru- forestier soit étendu, le relief accidenté et le couvert végétal
lentes est possible dans certains cas, par exemple pour proté- dense. C’est pour cela que la télédétection par des moyens et
ger les tomates contre le virus de la mosaïque du tabac (56). des techniques divers (avions, satellites, photographies,
radiométrie), associés aux indispensables vérifications sur le Liste
IX. ÉLÉMENTS DE PATHOLOGIE FORESTIÈRE terrain permettra sans doute de mieux évaluer la progres-
sion des maladies dans le temps et l’espace afin de mieux
comprendre leur épidémiologie, pour tenter de les limiter.
A. Généralités
La lutte contre les maladies n’est le plus souvent possible
159.– Bien que la forêt française, en occupant le quart du Ta b l e
que dans les pépinières et les jeunes plantations, par
territoire national, équivale à près de la moitié de la sur- exemple en protégeant les plants et les jeunes arbres par
face boisée des pays de la CEE et que le reboisement con- des applications de fongicides. Chez les arbres adultes, les
tinue à être actif, les études sur les maladies des essences maladies sont pratiquement impossibles à combattre.
forestières et ornementales sont relativement peu abon- Pour les plus graves, on doit alors abattre les arbres pour
dantes dans notre pays, pour de multiples raisons. Nous réduire la progression des parasites. Pour certaines essen- I n dex
ne ferons donc que signaler le vaste domaine de la Patho- ces à croissance rapide, on a pu sélectionner des clones
logie forestière, grâce à quelques exemples, en précisant résistants, comme par exemple chez le peuplier vis-à-vis
toutefois que de nombreux travaux ont été effectués dans du chancre bactérien, des rouilles et du Marssonina.
d’autres pays, notamment en Amérique du Nord.
Sous sa robustesse et son immuabilité apparentes, la forêt Glossaire
B. Maladies de dépérissement
est en fait très vulnérable. Ceci est dû en particulier à ce
que de nombreuses essences ont été implantées, souvent 160.– Tout le monde a entendu parler du dépérissement
de façon monospécifique, dans des régions fort différen- de l’orme ou graphiose, provoqué par un champignon
tes de leurs aires d’origine, voire importées de divers con- Ascomycète, Ceratocystis ulmi, qui entraîne la mort de la
tinents afin d’en exploiter le bois ou pour bénéficier de plupart des espèces d’ormes d’ornement dans le monde
leurs qualités ornementales. Elles ne se trouvent donc pas entier depuis une vingtaine d’années. Le parasite colonise
forcément dans des conditions idéales de développement les vaisseaux du bois de l’aubier et diffuse une toxine qui
et peuvent alors être la proie de nombreux parasites « entraîne le flétrissement du feuillage et à terme la mort des
d’équilibre » ou de « faiblesse ». D’autre part, des affec- rameaux, puis de l’arbre. La transmission de la maladie
tions endémiques ou chroniques, habituellement peu d’un arbre à son voisin s’effectue par les anastomoses raci-
graves, peuvent devenir brutalement catastrophiques, naires, fréquentes chez les ormes. A plus longue distance,
par exemple à la suite de conditions climatiques particu- les Scolytes de cette essence disséminent la maladie. Ils
lières (sécheresse et dépérissement du chêne pédonculé) effectuent leur développement larvaire dans des galeries
ou de la survenue de souches nouvelles, virulentes, de qu’ils creusent sous les écorces des arbres affaiblis, notam-
parasites (dépérissement de l’orme). Enfin, les échanges ment ceux qui sont parasités par Ceratocystis. Les adultes, à
commerciaux, autant que pour les autres productions, leur sortie, portent sur le corps les spores du stade asexué
disséminent largement les parasites et ont parfois de gra- du champignon (Graphium ulmi) qui se forment dans les
ves conséquences sur l’état sanitaire, la production et la galeries. Les insectes contaminent le jeune feuillage des
survie des arbres forestiers. ormes sains lors de leurs premiers repas.
Les bactérioses, mycoplasmoses et viroses sont mal con- La lutte est extrêmement difficile, car il est pratiquement
nues. Les plus étudiées sont celles des peupliers (chancre impossible de détruire les Scolytes. Dès que l’on constate
bactérien ou suintant à Aplanobacter populi, mosaïque qu’un orme a plus du cinquième de son feuillage malade,
virale, par exemple). Par contre, les mycoses, très nombreu- il faut l’abattre impitoyablement pour éviter la multipli-
ses, ont depuis longtemps fait l’objet de multiples travaux. cation ultérieure des Scolytes et la dissémination de la
Elles affectent les jeunes semis, chez lesquels elles sont res- maladie aux arbres encore sains. L’écorçage et la destruc-
ponsables de mauvaises levées et de fontes. Elles sont alors tion des écorces sont indispensables. Pour les arbres peu

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2361TA MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE

atteints, la suppression des parties malades et la protec- C. Les Pourridiés


tion des plaies recule l’échéance. Des traitements préven-
tifs tous les ans en mai-juin, par injection dans le tronc 162.– Les pourridiés sont des maladies dues à des cham-
ou les racines de fongicides actifs (chlorhydrate de car- pignons vivant dans le sol, qui provoquent des affections
bendazime, thiabendazole en solution), permettent de des racines et des collets, se traduisant par le dépérisse-
protéger les arbres sains des contaminations éventuelles. ment et la mort des parties aériennes.
161.– Moins connu est le dépérissement du hêtre dévasta- Les Armillaires, champignons Basidiomycètes (Armillaria
teur en Amérique du Nord, qui sévit en France particuliè- mellea sur feuillus, A. obscura sur conifères) sont les plus
rement en Normandie. Cette maladie est provoquée par répandus et ont une grande importance économique, en
l’action conjuguée d’un Ascomycète, Nectria coccinea et particulier chez les conifères. Dans les Landes, 60 % de
d’une cochenille inféodée au hêtre, Cryptococcus fagi. dépérissements des pins maritimes (très sensibles) sont dus
L’évolution est lente. Les symptômes se remarquent sur à l’Armillaire. Les symptômes sont très lents à apparaître.
des arbres âgés de plus de 25 ans. On observe des fissures Après plusieurs années d’affaiblissement, les arbres meu-
des écorces sur les troncs et les grosses branches. Dans un rent, surtout après une période de sécheresse. On distingue
premier stade, les feutrages cireux blancs de la cochenille alors sous les écorces des racines et de la base du tronc (par-
apparaissent à partir des fissures. Puis des suintements fois jusqu’à 3 m de haut), des palmettes mycéliennes de cou-
bruns se manifestent, trahissant la nécrose des tissus sous- leur chamois-clair. Dans le sol et sur les souches pourrissan-
corticaux (fig. 41). A ce stade, on observe en automne les tes, des rhizomorphes noirs, caractéristiques, en forme de
périthèces rouges caractéristiques du Nectria et du prin- lacets de plusieurs mètres de long sont nettement visibles.
temps à l’automne les coussinets beiges du stade asexué En automne, des carpophores (« chapeaux »,) se forment en
Liste touffes à la base des arbres et sur les souches (fig. 42).
Cylindrocarpon. Les ascospores et les conidies dispersent le
parasite toute l’année. Son installation sous les écorces La propagation du champignon a lieu grâce aux rhizo-
serait facilitée par la cochenille. La maladie est surtout morphes. Les basidiospores émises par les carpophores
grave en sols filtrants à la suite de périodes de sécheresse. ne semblent pas jouer un grand rôle.
Ta b l e Pour l’instant, aucune méthode directe de lutte contre le La lutte, loin d’être au point, consiste à dévitaliser les sou-
champignon ou la cochenille n’est possible. ches et à retirer après la coupe tous les débris végétaux, à
tenter d’isoler les foyers de maladie par de profonds fossés
qui limitent la progression des rhizomorphes et à désinfec-
ter avant plantation les sols des pépinières.
Index
163.– Fomes annosus (= Ungulina annosa), Basidiomy-
cète, est un autre agent très important de pourridié chez
les conifères tels que les pins et surtout les épicéas. Chez
ces derniers, il provoque la maladie du .« cœur rouge »,
Glossaire due à la progression d’une pourriture fibreuse brune
profonde à l’intérieur du tronc, jusqu’à 7 ou 8 m de hau-
teur. Les racines sont de même infectées de façon interne.
Chez les pins, l’écorce des racines se nécrose et se déta-
che facilement. Sous les écorces, le champignon forme
un mycélium blanc très fin. Lorsque l’infection racinaire
est généralisée, les arbres meurent brutalement.

Fig. 42. – Armillaire à la base d’un tronc (Photo G. Raynal)


Fig. 41. – Dépérissement du hêtre (Photo G. Raynal)

Contrairement à l’Armillaire, F. annosus ne forme jamais


de rhizomorphes. Les carpophores sont des polypores de
forme irrégulière, en croûtes brunes aux marges blan-

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MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE
TA 2361
ches, imbriqués entre eux, de dimensions atteignant plu- plète l’action des inoculations. On accélère ainsi très for-
sieurs dizaines de centimètres. Ces carpophores se for- tement le phénomène de guérison naturelle.
ment à la base des troncs et sur les souches.
La propagation de la maladie à partir d’un foyer se fait par E. Principales Rouilles des Conifères
le mycélium souterrain et grâce aux intrications racinaires. et des Peupliers
Le parasite s’étend alors de façon circulaire (« maladie du
rond »). Les basidiospores formées par les polypores sont 1. Rouilles des Conifères
dispersées très loin par le vent et vont coloniser les souches
des arbres abattus, notamment au cours des opérations 165.– De nombreuses Urédinales (15) attaquent les conifè-
d’éclaircissement. Ces souches constituent les foyers à par- res, lesquels portent le stade écidien (15) du parasite. Les
tir desquels le mycélium attaque les arbres sains. stades à urédosores et téleutosores (l5) se forment sur
d’autres plantes, dites hôtes secondaires ou alternants.
La lutte vise à empêcher la colonisation des souches après
• Sur sapin, Melampsora caryophyllacearum provoque
l’abattage, par badigeonnage immédiat de la surface de
dans l’est de la France (Jura, Vosges) la maladie de la «
coupe avec une suspension aqueuse de spores d’un
dorge » ou du « chaudron ». Les tiges sont renflées, cre-
champignon antagoniste (Peniophora gigantea) ou par
vassées, leur extrémité se dessèche. Des rameaux en
traitement chimique (créosote, urée, borax). Le creuse-
balais de sorcière se forment, dont les aiguilles portent les
ment de fossés autour des zones malades défavorise la
écidies. Les hôtes secondaires sont de petites Caryophyl-
progression du mycélium.
lacées très communes appartenant à plusieurs espèces,
malheureusement très difficiles à détruire. Liste
D. Le Chancre de l’écorce du Châtaignier
La seule méthode de lutte consiste à éliminer les balais de
164.– La châtaigneraie française a subi par le passé plu- sorcière des arbres malades, au cours des éclaircies.
sieurs attaques de maladies graves qui ont contribué à • Sur pins, les rouilles les plus importantes sont les rouilles
son déclin. Depuis une trentaine d’années, un champi- vésiculeuses des écorces, dues à Cronartium flaccidum sur Ta b l e
gnon Ascomycète, Endothia parasitica, y provoque le pins à 2 feuilles et surtout Cronartium ribicola sur pins à
chancre de l’écorce. Cette maladie a fait jusqu’au début 5 feuilles, ainsi que la rouille courbeuse des rameaux
de ce siècle des ravages aux USA, sur plusieurs centaines (Melampsora pinitorqua). Ces rouilles, si elles s’attaquent
de milliers d’hectares et plus récemment a provoqué de façon répétée à de jeunes peuplements, peuvent
d’importants dommages en Italie. entraîner leur mort et d’une façon générale nuisent au I n dex
Le champignon s’installe dans les écorces qui réagissent développement normal des tiges. Les atteintes des arbres
en produisant des chancres. Ceux-ci finissent par ceintu- plus âgés se limitent à la mort de quelques branches.
rer les branches dont la partie supérieure meurt. De jeu- Les rouilles vésiculeuses entraînent le gonflement des
nes pousses rejettent au-dessous de la zone chancreuse, rameaux, sur lesquels apparaissent au printemps des éci-
donnant ainsi l’aspect buissonnant typique de la mala- dies, vésicules blanchâtres qui font éclater les écorces. Glossaire
die. Les arbres s’affaiblissent et finissent par mourir. Dans le cas de C. flaccidum, les hôtes secondaires sont
Parmi les différentes méthodes de lutte envisagées et nombreux. Le plus commun est le dompte-venin qui
essayées (éradication des arbres malades, curetage des prolifère dans certains sous-bois. Pour C. ribicola, les
chancres, sélection de matériel résistant, lutte biologi- hôtes secondaires sont des groseilliers et des cassissiers, le
que), seule la lutte biologique a donné des résultats satis- plus souvent sauvages.
faisants et est appliquée à grande échelle. La rouille courbeuse des rameaux forme ses écidies jau-
nes et pulvérulentes au printemps sur les jeunes rameaux
On a en effet observé, d’abord en Italie, une régression natu-
qui prennent une courbure en S et parfois se dessèchent.
relle, mais lente, de la maladie. Ce phénomène est dû à
Elle est commune en France. Les hôtes secondaires sont
l’existence de souches hypovirulentes qui ont la particularité
des trembles et des peupliers blancs.
de supplanter les souches pathogènes installées (hypoviru-
lence exclusive). Les chancres se cicatrisent et ne sont plus Dans tous les cas, la lutte n’est que préventive. Lorsque cela
recontaminés par les souches pathogènes. Les travaux de est possible, on détruit l’hôte alternant ou on évite sa trop
chercheurs français ont permis d’isoler divers types de sou- grande proximité avec les plantations de pins. En cas de
ches hypovirulentes capables d’inhiber les types virulents zones très favorables à ces rouilles, il faut planter des pins
correspondants. Ces recherches ont abouti à la mise au résistants ou peu sensibles et cloisonner les plantations de
point d’une technique de lutte particulièrement efficace. pin de Weymouth, très sensible à la rouille vésiculeuse, par
des conifères résistants (épicéa), faisant barrage au parasite.
Les chancres sont d’abord délimités, puis on perce une
série de trous à leur périphérie, dans les tissus sains. On
injecte ensuite dans les trous une pâte contenant la sou- 2. Rouilles des Peupliers
che hypovirulente appropriée. On commence par traiter 166.– Ce sont des maladies répandues et souvent graves,
les châtaigniers situés au centre des zones malades. Leur dues à diverses espèces de Melampsora. Au début de l’été
guérison a lieu après 1 ou 2 applications (avril-mai et se forment à la face inférieure des feuilles des pustules
septembre-octobre). On procède ainsi de proche en pro- poudreuses orangées (urédosores) qui entraînent le jau-
che au cours des années. La dissémination naturelle des nissement des limbes et plus tard la chute précoce des
souches hypovirulentes à partir des arbres traités com- feuilles. En fin d’été, les téleutospores apparaissent

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2361TA MALADIES DES PLANTES CULTIVÉES ET MÉTHODES DE LUTTE

comme des ponctuations noires entre les petites nervu- temps, sous forme de petites vésicules jaunes, sur les
res. Les téleutospores sont enfouies sous les épidermes et aiguilles du mélèze d’Europe. Les écidiospores sont à leur
émettent des basides au printemps suivant, après que les tour pathogènes pour les peupliers.
feuilles aient été dégradées au cours de l’hiver. La méthode de choix pour lutter contre ces rouilles est la
Les basidiospores attaquent de nombreux hôtes secondai- plantation de clones résistants ou peu sensibles. Lorsque
res qui forment alors des écidies. Ces hôtes peuvent être, cela n’est pas possible, on doit veiller à supprimer les
selon les espèces de Melampsora, des plantes herbacées hôtes alternants dans les peupleraies, à enfouir les feuilles
(Arum, Allium, Chelidonium, Fumaria, Mercurialis, Mus- tombées sur le sol pour inactiver les téleutospores et à
cari, etc.) ou des conifères (Larix, Pinus, Pseudotsuga). éviter les carences en potassium et les excès d’azote qui
sensibilisent les peupliers. Enfin dans les jeunes planta-
On trouve en France 8 espèces de Melampsora, dont les tions, des traitements fongicides sont possibles avec
symptômes sont identiques. Leur détermination, diffi- diverses matières actives.
cile, ne peut se faire que par l’observation microscopique
des spores. Melampsora larici-populina est la plus répan-
due en toutes régions. Elle produit ses écidies au prin-

Liste

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Index

Glossaire

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