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L’art
Le sens moderne du mot « art » au 18ème siècle : la tradition des « Beaux-Arts » a ossifié 6
pratiques (peinture, gravure, sculpture, architecture, musique, danse). L’émergence d’un marché
de l’art européen à cette époque a fait naître un nouveau besoin de distinguer les œuvres d’art
des autres marchandises. Des concepts tels que le « génie », le « chef-d’œuvre » et l’image
romantique de l’artiste sont devenus des mécanismes de plus en plus importants pour justifier le
caractère unique, la désirabilité et les prix exorbitants des « beaux-arts » , en particulier de la
peinture, qui reste la forme d’art la plus commerciale.
Au Moyen âge, appellation d’arts libéraux : disciplines intellectuelles telles que la grammaire, la
dialectique, la rhétorique, la géométrie, l’astronomie...
Définition : L’art, du latin « ars » est un savoir-faire et désigne une aptitude ou un talent ; parce
qu’il tend vers une fin, à visée esthétique
Du grec « technè », il est assimilé à une technique = aucune distinction entre artiste et artisan
Cette distinction apparaît au 18ème siècle lorsque l’Académie a distingué l’ordre des arts
mécaniques, l’artisanat, de l’ordre des Beaux-Arts, l’art.
- Un objet technique a une utilité, c’est un moyen pour une fin (outil, marteau)
- Une œuvre d’art ne sert à rien, elle est inutile, c’est une fin en soi
= dimension esthétique : censée susciter des émotions, ce qui n’est pas l’essence de l’objet
technique
Depuis, le terme a délaissé sa seule acception technique au profit d’un sens esthétique : il renvoie
au domaine des beaux-arts et à la recherche du beau
Artiste et artisan
Alain : différence qui repose sur le rapport entre l’idée et son exécution
- l’artiste est artisan d’abord = l’origine de la création artistique n’est pas l’imagination qui se met
en mouvement seule DONC l’origine de la création est l’observation = c’est l’observation de la
matière que l’artiste va transformer
Ex : pour le sculpteur, c’est le bloc de marbre qu’il va transformer
- cette matière va servir de matériau à l’imagination et va la stimuler = l’artiste travaille d’abord une
matière ce qui fait de lui d’abord un artisan DONC on n’invente qu’en travaillant
- l’artiste n’est pas qu’artisan, il est + : chez l’artisan, l’idée précède ce qu’il va faire et règle
l’exécution ≠ chez l’artiste, l’idée vient en faisant et est contemporaine de l’exécution
Ex : qd un cordonnier se met à travailler, il a en tête toutes étapes pour réaliser une chaussure ≠
un portraitiste n’a pas, avant de commencer, toutes les étapes, par exemple toutes les couleurs
- l’artiste est spectateur de son œuvre, comme si l’œuvre entrain de naître est la réalisation de
l’œuvre elle-même = l’auteur s’inspire de ce qu’il est en train de faire
L’artisan est celui qui recherche « l’Idée » de l’objet qu’il fabrique. L’artiste-peintre a pour objectif
de reproduire simplement l’apparence des objets tels qu’ils existent dans le monde sensible.
L’artiste est uniquement dans la copie imitative et l’apparence. L’artisan, qui fabrique des
choses réelles, est donc plus proche de la vérité.
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I. La représentation artistique
L’art est essentiellement mimétique, ce qui signifie que son objectif 1er est de représenter une
réalité extérieure et plus authentique. Du latin « mimesis » : refléter, représenter, imiter
Platon, La République
- art n’est pas une simple imitation des Formes idéales – concepts abstraits et purs comme la
beauté, la vertu et la vérité = les Formes ne peuvent être connues que des Dieux = illusion CAR
copie la représentation matérielle d’un concept
DONC l’art peut les indexer mais jamais les égaler en raison de l’imperfection des êtres humains
- art représente des objets et actions du monde existant qui ne sont que des imitations de Formes
idéales = art mimétique représente une copie éloignée des Formes, l’un des ordres les + bas de la
connaissance
- caractéristique problématique de l’art : suscite nos émotions ; son affectivité nous pousse à agir
de manière non rationnelle = l’art est puissant, corrupteur, donc dangereux
Aristote, La Poétique
- art ne se contente pas d’imiter la réalité, mais l’accentue
- les compétences créatives de l’artiste peuvent nous en apprendre + sur la nature de la réalité
- l’émotion à l’expérience de l’art = fonctionne comme une forme de libération cathartique pour le
public = aide à purger sentiments négatifs
beauté artistique est supérieure à la beauté naturelle
On dit d’un artiste qu’il est « créatif ». Ce terme désigne une capacité à produire quelque chose
d’entièrement nouveau, qui ne se réduit à rien de ce qui l’a précédé. Selon le peintre Paul Klee,
« l’art rend visible l’invisible ». On peut donc dire que l’art possède un rapport à la vérité. Mais il
s’agit + de montrer le réel sous un angle nouveau, que de reproduire une vérité déjà connue. Un
artiste ne se contente pas de reproduire la beauté naturelle, mais tente d’en proposer
une expression jamais vue auparavant.
Kant définit le « génie » comme l’artiste qui ne se contente pas d’imiter la nature par obéissance à
des règles fixes ≠ celui à travers lequel la nature s’exprime authentiquement, et donne à l’art de
nouvelles règles. Cette identification du véritable artiste au « génie » est une figure romantique qui
voit dans l’art le moyen de modifier, voire de révolutionner notre perception des choses.
Au 18ème siècle s’installe la définition de l’art comme recherche d’un certain idéal de beauté. C’est
ce que l’on nomme l’esthétique, qui correspond au domaine des beaux-arts, caractérisés par leur
désintéressement relativement à une quelconque utilité.
Le terme esthétique (du grec « aisthèsis ») signifie sensation, désigne tout ce qui s’apparente à la
beauté. Dans le langage courant, on dit que ce qui n’est pas beau n’est pas esthétique.
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D’où vient la création artistique ?
Ex : film Amadeus de Milos Forman = met en scène la vie de Mozart, son talent, son génie = joue
piano avec mains inversées ou sans voir le clavier / originalité le génie artistique est inné,
surnaturel = don de Dieu, l’artiste est différent des autres
Kant : définition du beau comme ce qui plaît universellement sans concept = dimension
universelle du goût
- distingue le beau et l’agréable : agréable est ce que je ressens à titre subjectif, et qui est
particulier et relatif à ma constitution ≠ quand je dis de qlq chose qu’il est beau, je sous-entends
que tout le monde devrait éprouver ce même plaisir = universalité du goût
Nietzsche, Humain trop humain : « l’art doit avant tout embellir la vie »
- faculté de créer de belles choses = embellir ce qui était laid ou « transformer la boue en or »
Le relativisme esthétique
Le goût s’éduque
Pourtant, certaines œuvres d’art, les « classiques », résistent à cette idée : elles ont traversé les
siècles. Il y a donc des œuvres que tout le monde reconnaît, en tout temps et en tout lieu, comme
magnifiques et supérieures à d’autres. Cela voudrait donc dire que le beau existerait malgré tout,
malgré la diversité des goûts et bien que l’art puisse être utilisé comme outil de distinction sociale.
Pour concilier ce paradoxe, il faut défendre que le goût s’éduque.
seuls ceux qui possèdent ces qualités peuvent ériger leurs sentiments en norme du goût.
Nous considérons comme « utile » tout ce qui correspond à la satisfaction d’un besoin.
DONC les outils, les machines, le commerce, l’argent sont « utiles » ≠ la chose belle, elle, ne sert
à rien. Léonard De Vinci disait de l’art qu’il était une « cosa mentale », une chose mentale : l’art
appartient au domaine de l’esprit. Il serait davantage spirituel que matériel.
o La matérialité de l’art
Une œuvre d’art est bien « matérielle », dans la mesure où elle existe comme objet. Le David de
Michel-Ange ou la Pyramide de Khéops ont une existence avant tout physique et occupent un
espace. L’architecte, le sculpteur ou le peintre se trouvent confrontés à des problèmes matériels,
très concrets, dans la réalisation de leur œuvre = l’œuvre d’art n’est donc pas uniquement une
« cosa mentale ».
Mais paradoxe : si les œuvres d’art ne rentrent pas dans la catégorie des choses utiles, certaines
d’entre elles ont une immense valeur = si une œuvre d’art possède une valeur économique, elle
rentre dans le domaine du commerce, et donc, indirectement, de l’utilité.
L’attitude esthétique
Pour s’intéresser correctement à l’art, nous devons adopter une forme particulière de distanciation
ou de désintéressement = art est jugé en dehors de l’influence du désir subjectif ou des
motivations ultérieures
Il faut se mettre dans un état spécial de réceptivité esthétique = désintéressement condition
nécessaire à l’expérience de l’art
L’attention désintéressée : on se concentre sur les objets d’art + longtemps que sur les objets du
monde réel / on les rencontre pour leur seul intérêt
Distance psychique : le moi quotidien est nié afin de créer un espace pour rencontrer le monde
d’un point de vue esthétique
Ex : un palais ne peut être apprécié esthétiquement ni par son propriétaire, en raison de sa vanité
possessive, ni par ceux qui l’ont construit, en raison de leur connaissance du sang et de la sueur
dépensés pour sa construction
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Critique :
Bourdieu, la Distinction : le désintéressement esthétique est une illusion bourgeoise, accessible
uniquement à ceux dont la situation fianncière privilégiée leur permet le luxe du temps, ou la
distance illusoire, pour une telle contemolation
DONC l’attitude esthétique est l’attitude de la classe dominante = infériorité de la culture populaire
de la classe ouvrière
L’art rémunérateur
L’art véritable doit être distingué de l’art rémunérateur, dont l’attrait résulte partiellement, voire
totalement, d’une récompense financière associée.
Une œuvre n’est pas artistique parce qu’elle est belle. Il existe une esthétique du laid :
la catharsis se produit face à ce qui produit en nous terreur et pitié : permet de « purger nos
passions ». De plus, on peut être artiste sans produire un chef-d’œuvre
L’esthétique du bizarre de Baudelaire : modernité, beauté du mal = déstabiliser public, l’art n’est
pas un message qui serait facilement lu et compris = doit se poser comme un problème
Un chef-d’œuvre n’a pas nécessairement pour qualité essentielle d’être beau. La portée
d’une œuvre d’art se mesure autant à son impact intellectuel, moral ou symbolique qu’à sa
beauté supposée. Cet impact est directement lié au fait que l’œuvre d’art est
une représentation, c’est-à-dire quelque chose qui « présente à nouveau », sous un autre
angle, et non une chose existant de la même façon qu’un objet naturel.
Kant évoque par exemple la catégorie du sublime, pour montrer que notre émotion
esthétique ne se limite pas à l’agrément produit par la beauté : le sublime nous frappe
parce que sa représentation excède ce que notre entendement peut mesurer, et nous
renvoie à notre propre finitude. Lorsque je contemple les pyramides d’Égypte, le ciel étoilé,
ou la mer déchaînée, je prends conscience de dimensions qui nous dépassent infiniment
(aussi bien dans l’espace que dans le temps).
Si l’art ne se définit pas essentiellement par la visée du beau, c’est la visée du sens qui le
caractérise le plus nettement. Toute œuvre d’art tend à faire sens, à frapper le spectateur
par la richesse ou la profondeur de l’expérience qu’elle lui donne à éprouver.
Dans l’art engagé, l’art possède une fin qui ne dépend pas uniquement de sa beauté : faire
passer un message, réveiller les consciences en les frappant par sa représentation. Nous
ne sommes plus dans l’optique d’un art « désintéressé », mais dans celle d’un art où les
qualités de l’artiste sont mises au service d’une cause précise.
Que l’art soit sa propre fin, ou qu’il serve une finalité sociale ou politique, sa valeur ne tient
pas à ce qu’il représente, mais à la qualité de la représentation elle-même. Kant rappelle
qu’une belle œuvre n’est pas la représentation d’une belle chose, mais la belle
représentation d’une chose. Le sens de l’œuvre n’est donc pas dans son sujet, mais au
sein de la démarche artistique.
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III. La théorie institutionnelle de l’art
George Dickie : l’art est simplement tout artefact ou activité qu’un représentant du monde de l’art
a désigné comme étant de l’art. Cela ne veut pas dire que les pratiques artistiques ne peuvent pas
exister en dehors du monde de l’art, comme les activités des peintres amateurs ou des étudiants-
artistes, mais que ces activités ne seront pas reconnues comme de l’art sans leur reconnaissance
institutionnelle officielle.
Critique institutionnelle : le pouvoir absolu du monde de l’art d’agir en tant qu’arbitre de ce qui est
de l’art et de ce qui ne l’est pas est problématique :
- Pratiques artistiques radicales ont cherché à saper son autorité = stratégie récurrente de
« l’avant-garde » consiste à créer des expositions indépendantes à la périphérie du monde de
l’art, où des pratiques alternatives et oppositionnelles peuvent émerger.
- À partir des années 1960, des artistes ont tenté ce qu’on appelle la « critique institutionnelle »
des pratiques d’exclusion et d’élitisme du monde de l’art.
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Conclusion :
Des définitions de l’art basées sur la représentation, la forme, l’expression ou l’appartenance à
une attitude esthétique spécifique ou à un cadre institutionnel, nous avons développé une position
qui insiste sur le fait que ces critères sont mutables et historiquement contingents. La seule
affirmation universelle que nous pouvons faire pour l’art est qu’il s’agit d’une forme de pratique.
On a reproché à l’attitude esthétique de suggérer une expérience universelle de l’art moderne, en
dehors de référence national, politique, historique ou culturel, et de masquer le caractère
principalement blanc, bourgeois, occidental, patriarcal des discours et des bases de pouvoir du
monde de l’art.
Les fonctions intrinsèques de l’art (représentation, forme et expression) coexistent avec des
déterminants extrinsèques (attitude esthétique et institutionnalité)