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Département de Relations Internationales


Cours d'Introduction à la science politique
Licence I 2021-2022
Lundi 9h-12h

Chapitre 1. Pouvoir, légitimité, Etat

1er novembre 2021 Séance 5 : Section 3. Les genèses de l’Etat

I. Le double monopole fiscal et militaire

A / La sortie de la féodalité : conséquence du mécanisme du monopole


1/ Présentation de la loi du monopole.
La monopolisation c´est le processus de centralisation du pouvoir militaire et fiscal par une
seule unité de domination dans l´ensemble d´un territoire. Le monopole de la contrainte
physique et le monopole de la fixation et recollection des impôts sont la condition de l
´existence de la domination politique.
2 /L´étape de féodalisation : la libre concurrence entre maisons guerrières. XI-XIIs
Après la chute de l´empire carolingien s´ouvre une étape où la domination est éparpillée.
On assiste à une concurrence libre entre les maisons guerrières ou dynasties pour étendre le
monopole qu´ils possèdent dans un territoire plus vaste.
Le monopole est de nature privée.
Exemple : la conquête des îles britanniques par les Normands
3/ La consolidation du royaume sur la lutte contre les forces centrifuges. XIVs.
La maison des Capétiens devient la dynastie hégémonique sur le territoire de l´ancien
royaume franc d´Occident. Cependant un phénomène de désintégration apparaît en raison des
apanages. La concurrence continue jusqu´à François I et l´apparition de l´absolutisme.

B / L ´explication de la cristallisation de l´État par la division croissante des fonctions


sociales.

1/Le renforcement de la chaîne d´interdépendances. XV XVIs


La France assiste à la division croissante des fonctions sociales produite par le développement
des villes et de nouvelles couches sociales spécialisés dans le commerce. La concurrence
entre groupes sociaux (noblesse et bourgeoisie) est maintenant fermée et pacifique. L
´interdépendance fonctionnelle est la base de l´ordre social.
2/La nécessité d´une administration centralisée : la monarchie absolue. XVIIs.
Le maintien du monopole implique la centralisation du pouvoir au sein d´un organe suprême
de régulation et coordination : la cour. Création d´une administration avec des exécutants
spécialisés tirés des nouvelles couches sociales. Déplacement progressif du centre de gravité
du pouvoir de la noblesse de cour vers la bourgeoisie.
3/ L´aboutissement du double processus : L´État français moderne.
Processus de socialisation du monopole : le monopole privé se transforme en monopole
public. La révolution française marque un énorme pas en avant dans ce processus.
Un État moderne et dépersonnalisé apparaît, de pair avec l´habitus de l´homme civilisé.
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II. Les origines culturelles de l’Etat moderne

Outre le monopole fiscal et militaire, les structures et conceptions culturelles ont joué un rôle
important. Les systèmes symboliques et religieux ont eu une fonction essentielle. L’Etat
s’autonomise progressivement de l’Eglise, il s’en différencie, on parle de sécularisation. Ce
processus est long et pas totalement achevé. La religion a également séparé le spirituel du
temporel et donc a contribué à cette autonomie du politique. L’Etat s’inspire de la structure
hiérarchique de l’Eglise pour organiser sa bureaucratie, pour codifier la monarchie. La
doctrine des deux corps du roi est d’origine religieuse mais dans une forme sécularisée : le roi
possède deux corps, l’un mortel et l’autre immortel. Cela signifie que le pouvoir existe
indépendamment des individus qui l’incarnent (cf. les funérailles le roi est mort vive le roi).
Voir Ernst Kantorowicz (notion de personne fictive). La dynastie incarne cette permanence du
pouvoir. Machiavel considère que le pouvoir d’Etat est spécifique au sein de la sphère sociale.
La notion de souveraineté (Jean Bodin 16ème siècle) est absolue, indivisible, continue et
impersonnelle.

III. La construction d’un appareil administratif

Le pouvoir central se distingue de la société. Il dispose d’un appareil politique qui dépossède
progressivement le roi de son pouvoir au profit de la bureaucratie qui impose ses règles
durables et impersonnelles. On sépare les ressources publiques du patrimoine du gouvernant.
La bureaucratie repose progressivement sur une légitimité légale rationnelle. Les
fonctionnaires accèdent à leur poste par voie de concours et d’examens, organisée
hiérarchiquement, correspondant à leurs compétences, placés sous l’autorité d’un supérieur.
La bureaucratie moderne inspire confiance dit Max Weber, car elle agit selon les règles de
droit (plus d’arbitraire), le travail se rationalise (on passe de 50 000 à 250 000 bureaucrates
après 1789). A partir de la révolution un fonctionnaire n’est plus propriétaire de son poste.

IV. Genèse de l’Etat-nation

Voir le texte de Pierre Rosanvallon les 4 visages de l’Etat.


L’Etat coïncide progressivement avec la nation. Cela est possible car l’Etat entreprend un
travail d’homogénéisation de la population présente sur le territoire, par l’apprentissage d’une
langue commune, par l’enseignement de références historiques communes (mémoire
commune), par les symboles (hymne, drapeau, devise, fêtes), par la monnaie, la désignation
d’un ennemi extérieur. La nation se construit, elle n’existe pas en tant que telle. Ernest
Gellner montre le rôle de l’Etat dans la construction de la nation, l’école est une des
« fabriques » de la nation. Benedict Anderson considère la nation comme une « communauté
imaginée » on réunit mentalement des personnes qui ne se connaîtront jamais grâce à la
langue, la presse. La citoyenneté (droits et devoirs civiques et politiques) contribue à
entretenir un sentiment d’allégeance civique au profit de l’Etat-nation.

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