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LA « GARDE À VUE » DANS LA LÉGISLATION AUTRICHIENNE

André Giudicelli, Christina Juhász

Dalloz | « Revue de science criminelle et de droit pénal comparé »

2011/1 N° 1 | pages 59 à 68
ISSN 0035-1733
DOI 10.3917/rsc.1101.0059
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-de-science-criminelle-et-de-droit-penal-
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VARIÉTÉS
La « garde à vue » dans la

législation autrichienne 1

par André GIUDICELLI


Professeur de droit privé et sciences criminelles,
Doyen de la Faculté de droit, de science politique et de gestion,
Co-directeur du CEJEP (EA 3170), Université de La Rochelle
& Christina JUHÁSZ
Universitätsassistentin,
Dissertantin und wissenschaftliche Mitarbeiterin,
Strafrecht und Strafverfahrensrecht, Universität Salzburg

Dans les rapports et études disponibles en France et présentant dans une approche com-
paratiste les règles applicables à la garde à vue dans différents pays européens, il est très peu
fait référence à l’Autriche 2. Pourtant, le code de procédure pénale autrichien de 1873, déjà
re-promulgué en 1975, a fait l’objet, en 2004, d’une réforme complète qui n’est entrée en
vigueur que le 1er janvier 2008 3. Le juge d’instruction a été supprimé, l’enquête confiée à
la direction du parquet 4 et les mesures de contrainte qu’elle peut comporter ont été rema-
niées. Cette évolution, somme toute récente, éveille la curiosité du juriste français confronté
à la réforme du code de procédure pénale, à commencer par celle des règles relatives à la
garde à vue.
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Stricto sensu, le droit autrichien n’utilise pas l’expression « garde à vue », et quand il le fait
c’est parfois pour désigner le droit d’arrestation « citoyen » 5 , tel que le connaît le code de
procédure pénale français à l’article 73. Cependant, le code de procédure pénale autrichien
(Strafprozessordnung 6, ci-après StPO) connaît une privation de liberté consécutive à l’arresta-
tion d’un suspect que l’on peut apparenter à la garde à vue française, même si les deux dis-
positifs présentent certaines différences. À cet égard, la notion qui se rapproche le plus de
ce moment procédural que constitue la garde à vue est celle de « Anhaltung » qui signifie
de manière générale « détention » et, plus précisément, dans le contexte de l’enquête de
police, « arrestation provisoire ».

(1) Nos remerciements à Alfred Knapp, professeur d’allemand à l’Université de La Rochelle, pour son concours
à la traduction de certains textes.
(2) Ainsi, rien dans le document de travail du Sénat sur La garde à vue (série Législation comparée, n° LC 204,
déc. 2009) ; de brèves indications dans l’Étude d’impact relative au projet de loi relatif à la garde à vue du 12 oct.
2010 (annexe 3, p. 47).
(3) BGBl 2004/19. Pour une présentation de toute la réforme, V. K. Schmoller, Neues Strafprozessrecht in Öster-
reich, Goltdammer’s Archiv für Strafrecht (GA), 2009, 505-528.
(4) § 20 (1) StPO: Die Staatsanwaltschaft leitet das Ermittlungsverfahren; ihr allein steht die Erhebung der öffentlichen Ank-
lage zu (...). ; § 101 (1) StPO: Die Staatsanwaltschaft leitet das Ermittlungsverfahren und entscheidet über dessen Fortgang
und Beendigung. V. Ch. Bertel/A. Venier, Strafprozessrecht4 (2010), 60 ; St. Seiler, Strafprozessrecht11 (2010), 41.
(5) Privates Anhalterecht, § 80 (2) StPO: « Wer aufgrund bestimmter Tatsachen annehmen kann, dass eine Person eine straf-
bare Handlung ausführe, unmittelbar zuvor ausgeführt habe oder dass wegen der Begehung einer strafbaren Handlung
nach ihr gefahndet werde, ist berechtigt, diese Person auf verhältnismäßige Weise anzuhalten, jedoch zur unverzüglichen
Anzeige an das nächst erreichbare Organ des öffentlichen Sicherheitsdienstes verpflichtet ». (Celui qui peut présumer,
à cause de certains faits, qu´une personne est en train de commettre ou vient de commettre un acte punis-
sable, ou encore qu´elle est recherchée pour avoir commis un tel acte, a le droit de l´arrêter d´une manière
proportionnée, mais est obligé d´en informer sans délai la plus proche institution de sécurité et de sûreté).
V. Ch. Pilnacek et W. Pleischl, Das neue Vorverfahren, (2005), 143 ; V. encore Ch. Bertel et A. Venier, Straf-
prozessrecht4 (2010), 56 ; St. Seiler, Strafprozessrecht11 (2009), 148 s.
(6) BGBl 1975/631 (version originale).

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Comme en droit allemand 7, la terminologie pour désigner l’accusé diffère selon les phases
de la procédure et donc aussi avec le degré de mise cause. Le § 48 du StPO, intitulé « Défi-
nitions », distingue ainsi le Beschuldigter (à savoir toute personne qui est concrètement sus-
pecte sur la base de certains faits d’avoir commis une action punissable, aussitôt qu´à cause
de ce soupçon une enquête est ouverte ou la contrainte exercée contre elle 8) et le Angek-
lagter (à savoir la partie défenderesse à la procédure, contre laquelle l’accusation a été for-
malisée 9). En s’appuyant sur l’étymologie de Beschuldigter (Schuld signifiant d’abord
« faute »), on peut proposer de nommer celui-ci « l’inculpé », réservant de la sorte le mot
« accusé » à l’Angeklagter. Plus simplement, nous utiliserons aussi le mot « suspect ».

Dans le cadre de cette courte étude, qui a pour seule ambition de présenter les principales
sources textuelles autrichiennes en la matière, nous nous attacherons, d’une part, aux élé-
ments de la privation de liberté policière (I) et, d’autre part, au statut de la personne rete-
nue par la police (II).

◆ I. LES ÉLÉMENTS DE LA PRIVATION DE LIBERTÉ POLICIÈRE

On ne saurait négliger, dès lors qu’il est question de privation de liberté, l’importance de la
Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales qui a valeur
de loi constitutionnelle en Autriche. Cela étant, l’article 5 de la Convention européenne est
bien connu des juristes français et donc nous nous attacherons à présenter les normes
internes autrichiennes qui lui font écho. Dans cette perspective, c’est d’abord vers la loi
constitutionnelle du 29 novembre 1988 relative à la protection de la liberté de la personne (Pers-
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FrG) 10 qu’il convient de se tourner car c’est a priori tout autant dans son respect que dans
celui du texte conventionnel qu’ont été définis les cas et les conditions de la privation de
liberté policière par le code de procédure pénale autrichien.

J A. Dans la norme constitutionnelle autrichienne


Selon l’article 2, alinéa 1, paragraphe 2, de la PersFrG, « la liberté individuelle peut être
retirée (...) à une personne [quand celle-ci est] soupçonnée d’un délit passible d’une peine
prononcée par un tribunal ou une administration fiscale [notamment] :
a) pour mettre fin à une agression ou pour permettre d’établir les faits, dans la mesure où
le soupçon apparaît dans un contexte chronologique étroitement lié au délit ou s’explique
par le fait que la personne soupçonnée détient un certain objet;
b) pour l’empêcher de se soustraire à une procédure judiciaire ou de détériorer des preuves;
c) pour l´empêcher, lors de la commission d´un acte passible d´une peine significative,
d´accomplir cet acte ou de commettre un acte similaire ».

Les conditions de l’arrestation sont ensuite précisées par l’article 4. Tout d’abord, dans les
cas envisagés au point b) et c) précités, l’arrestation n’est autorisée que sur ordre motivé du
juge, ordre qui doit être présenté à la personne concernée lors de l’arrestation ou au plus

(7) V. M. Delmas-Marty (dir.), Procédures pénales d’Europe, PUF, 1995. 77.


(8) § 48 (1) StPO [Definitionen] « Im Sinne dieses Gesetzes ist 1. ,Beschuldigter’ jede Person, die auf Grund bestimmter Tat-
sachen konkret verdächtig ist, eine strafbare Handlung begangen zu haben, sobald gegen sie wegen dieses Verdachts ermit-
telt oder Zwang ausgeübt wird »
(9) § 48 (1) StPO [Definitionen] (...) 2. ,Angeklagter’ jeder Beschuldigte, gegen den Anklage eingebracht worden ist.
(10) Bundesverfassungsgesetz über den Schutz der persönlichen Freiheit, (PersFrG), BGBl 1988/684.

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tard dans les 24 heures qui suivent celle-ci. Ensuite, si dans le cadre d’un danger imminent
envisagé au a) du même texte 11, une personne peut être arrêtée sans un tel ordre, elle doit
être remise en liberté lorsqu’il s’avère qu’il n’y a plus lieu de la maintenir en état d’arres-
tation et, dans le cas inverse, être présentée au tribunal compétent dans un délai de 48
heures au maximum. Enfin, la personne transférée au tribunal doit, sans délai, être inter-
rogée par le juge sur les faits et les raisons de son arrestation.

J B. Dans le code de procédure pénale autrichien


Comme l’invite à le faire la norme constitutionnelle, nous distinguerons l’arrestation elle-
même de la période de détention par la police.

1. L’arrestation (Festnahme)

Selon l’alinéa 1erdu § 170 du StPO, l’arrestation d’une personne soupçonnée d’avoir com-
mis une infraction est admissible dans quatre cas :
- si elle est prise en flagrant délit ou si elle est, immédiatement après, accusée de manière
digne de foi d’avoir commis l’infraction, ou est surprise avec sur elle des objets qui indiquent
sa participation à l’infraction ;
- si elle est en fuite, si elle se cache ou s’il y a le danger, à cause de certaines circonstances,
qu’elle cherchera à s’enfuir ou à se cacher ;
- si elle tente d’influencer des témoins, des experts ou des co-accusés, d’éliminer les traces de
l’infraction ou, s’il y a le danger, à cause de certaines circonstances, qu’elle tentera de le faire ;
- si l’infraction concernée est punie d’une peine supérieure à 6 mois d’emprisonnement et
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s’il est à craindre, à cause de certaines circonstances, que le suspect commette une infrac-
tion de même nature ou qu’il tente d’accomplir l’infraction déjà entreprise ou qu’il avait
menacé (...) de commettre 12.

Le § 170 du StPO, alinéa 2, précise encore que lorsque l’infraction constatée est punie d’une
peine minimum égale ou supérieure à 10 ans d’emprisonnement, il est obligatoire d’or-
donner l’arrestation de la personne soupçonnée, à moins que l’on puisse considérer, en rai-
son de certaines circonstances, qu’aucun des motifs d’arrestation de l’alinéa 1er du même
texte ne trouve à s’appliquer 13. Le même texte s’achève en posant que l’arrestation et la
détention ne sont pas admissibles si elles ne sont pas proportionnées à l’importance de l’af-
faire 14, appliquant ce faisant un principe général de proportionnalité qui gouverne toute
mesure prise par la police judiciaire, la parquet ou le juge, énoncé au § 5 du StPO. 15

(11) Art. 2 (1) § 2a PersFrG.


(12) § 170 (1) StPO : « Die Festnahme einer Person, die der Begehung einer strafbaren Handlung verdächtig ist, ist zuläs-
sig, 1. wenn sie auf frischer Tat betreten oder unmittelbar danach entweder glaubwürdig der Tatbegehung beschuldigt oder
mit Gegenständen betreten wird, die auf ihre Beteiligung an der Tat hinweisen, 2. wenn sie flüchtig ist oder sich verbor-
gen hält oder, wenn auf Grund bestimmter Tatsachen die Gefahr besteht, sie werde flüchten oder sich verborgen halten, 3.
wenn sie Zeugen, Sachverständige oder Mitbeschuldigte zu beeinflussen, Spuren der Tat zu beseitigen oder sonst die Ermitt-
lung der Wahrheit zu erschweren versucht hat oder auf Grund bestimmter Tatsachen die Gefahr besteht, sie werde dies ver-
suchen, 4. wenn die Person einer mit mehr als sechs Monaten Freiheitsstrafe bedrohten Tat verdächtig und auf Grund
bestimmter Tatsachen anzunehmen ist, sie werde eine ebensolche, gegen dasselbe Rechtsgut gerichtete Tat begehen, oder die
ihr angelastete versuchte oder angedrohte Tat (§ 74 Abs. 1 Z 5 StGB) ausführen. »
(13) § 170 (2) StPO : « Wenn es sich um ein Verbrechen handelt, bei dem nach dem Gesetz auf mindestens zehnjährige Frei-
heitsstrafe zu erkennen ist, muss die Festnahme angeordnet werden, es sei denn, dass auf Grund bestimmter Tatsachen
anzunehmen ist, das Vorliegen aller im Abs. 1 Z 2 bis 4 angeführten Haftgründe sei auszuschließen. »
(14) § 170 (3) StPO : « Festnahme und Anhaltung sind nicht zulässig, soweit sie zur Bedeutung der Sache außer Verhältnis
stehen (§ 5). »

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Dans le principe, l’arrestation est ordonnée par le procureur sur la base d’un agrément judi-
ciaire et est exécutée par la police judiciaire 16. Cependant, la police judiciaire est autorisée
à prendre l’initiative d’arrêter un suspect dans des conditions qui varient selon la situation
dans laquelle on se trouve au regard des quatre motifs d’arrestation visés au § 170 alinéa 1er.
En effet, si le motif de la flagrance suffit à lui seul à justifier l’intervention la police, dans
les trois autres cas envisagés par le texte, l’arrestation d’initiative policière ne sera admissible
que lorsqu’il est impossible, à cause d’un danger imminent, d’obtenir l’ordre du parquet. 17

2. La détention par la police (Anhaltung)

À la suite de l´arrestation se déroule la détention du suspect par la police qui matérielle-


ment correspond à la garde à vue française. Avant d’en voir les détails, il convient d’en pré-
senter l’architecture. La détention doit être aussi brève que possible et ne peut jamais dépas-
ser 96 heures : 48 heures auprès de la police judiciaire et 48 heures supplémentaires, auprès
du tribunal, dans un établissement pénitentiaire. 18 On ne trouve pas de régime de « garde
à vue » dérogatoire fondé sur la nature des faits poursuivis comme cela existe dans le code
de procédure pénale français en matière de terrorisme et de criminalité organisée 19. La
détention policière se termine soit par la libération de suspect, soit par le placement en
détention provisoire ou par le prononcé d´une autre mesure limitative de liberté.

Quand la police judiciaire a agi sur ordre du procureur, elle a l’obligation d’informer sans
délai le parquet de l’exécution de l’ordre d´arrestation, le parquet devant à son tour en
informer le juge 20. Le suspect doit être remis sans délai à l’établissement pénitentiaire se
trouvant dans le ressort du tribunal compétent ou, au cas où il serait malade, à l’hôpital, au
plus tard dans les 48 heures après l’arrestation 21.
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Dans le cas où la police judiciaire a pris l’initiative d’arrêter et de retenir le suspect, elle a
l’obligation de l’interroger sans délai sur les faits, sur le soupçon et sur les motifs de l’ar-
restation. Elle doit le libérer dès lors qu’il s’avère qu’il n’y a plus de raison de le garder. Les
résultats de l’enquête sont à transmettre au parquet dans les 48 heures à compter de l’ar-
restation. Dans le même délai, si le suspect n’est pas libéré, la police judiciaire doit, là
encore, le remettre à l’établissement pénitentiaire du tribunal compétent ou, au cas où il
serait malade, à l’hôpital. Elle doit cependant en informer le procureur et dans le cas où
celui-ci ne demande pas le placement en détention provisoire, l’intéressé doit être immé-
diatement remis en liberté 22.

Dès lors qu’elle a été conduite dans les 48 heures de son arrestation dans un établissement
pénitentiaire (ou dans un hôpital), toute personne arrêtée doit être entendue sans délai par
le juge. Ce dernier peut, à la suite, effectuer lui-même ou ordonner des mesures d’instruc-
tion s’il apparaît que les résultats de celles-ci sont susceptibles d’influer sur sa décision quant
au soupçon ou au motif de la détention. En toute hypothèse, le juge doit prendre sa déci-

(15) § 5 (1) StPO : « Kriminalpolizei, Staatsanwaltschaft und Gericht dürfen bei der Ausübung von Befugnissen und bei der
Aufnahme von Beweisen nur soweit in Rechte von Personen eingreifen, als dies gesetzlich ausdrücklich vorgesehen und
zur Aufgabenerfüllung erforderlich ist. Jede dadurch bewirkte Rechtsgutbeeinträchtigung muss in einem angemessenen
Verhältnis zum Gewicht der Straftat, zum Grad des Verdachts und zum angestrebten Erfolg stehen. »
(16) § 171 (1) StPO.
(17) § 171 (2) StPO.
(18) § 172 (1), (3) et § 174 (1) StPO.
(19) C. pr. pén., art. 706-73 s., spéc. 706-88.
(20) § 172 (1) StPO : « Vom Vollzug einer Anordnung auf Festnahme hat die Kriminalpolizei die Staatsanwaltschaft und
diese das Gericht unverzüglich zu verständigen. »
(21) § 172 (1) StPO.
(22) § 172 (2) et (3) StPO.

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sion quant à la libération ou la détention provisoire (Untersuchungshaft) dans les 48 heures
de la remise. 23

◆ II. LE STATUT DE LA PERSONNE RETENUE

La personne retenue a des droits (1) dont la méconnaissance ouvre droit à recours (2).

J A. Les droits de l’inculpé


Différents textes du StPO apparaissent ici essentiels: nous pensons aux §§ 49, 59 et 164. Le
premier de ces textes décline les droits du Beschuldigter ; les deux autres précisent leur mise
en œuvre tant en ce qui concerne le droit à l’assistance de l’avocat que le déroulement des
interrogatoires.

1. L’énoncé des droits

Selon le § 49 du StPO, l’accusé a le droit, en particulier :


- d’être renseigné sur le soupçon à son égard ainsi que sur les droits principaux dont il dis-
pose au cours de la procédure (§ 50),
- de choisir un défenseur (§ 58) ou de se voir attribuer un défenseur au titre de l’aide juri-
dique (§§ 61 et 62),
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- de consulter le dossier (§§ 51 à 53),
- de se prononcer par rapport au reproche ou de se taire ainsi que de consulter, sous le
régime des articles 58, 59 alinéa 1 et 164 alinéa 1, un défenseur et de conférer avec ce
dernier,
- d’être assisté d’un défenseur lors de son interrogatoire conformément à l’article 164,
alinéa 2,
- de demander une mesure d’instruction,
- de former un recours pour violation de ses droits subjectifs (§ 106),
- de former un recours contre l’agrément judiciaire à l’exercice de mesures coercitives (§
87),
- de demander que soit mis un terme à l’enquête
- de participer à l’audience principale, à une confrontation avec des témoins ou coaccusés
(§ 165 alinéa 2) et à un reconstitution des faits sur les lieux de l’infraction,
- de faire appel et soulever des recours,
- d’obtenir l’aide d’un interprète. 24

(23) § 174 (1) StPO : « Jeder festgenommene Beschuldigte ist vom Gericht unverzüglich nach seiner Einlieferung in die Jus-
tizanstalt zu den Voraussetzungen der Untersuchungshaft zu vernehmen. Das Gericht kann aber vor seiner Entscheidung
sofortige Ermittlungen vornehmen oder durch die Kriminalpolizei vornehmen lassen, wenn deren Ergebnis maßgebenden
Einfluss auf die Beurteilung von Tatverdacht oder Haftgrund erwarten lässt. In jedem Fall hat das Gericht längstens bin-
nen 48 Stunden nach der Einlieferung zu entscheiden, ob der Beschuldigte, allenfalls unter Anwendung gelinderer Mit-
tel (§ 173 Abs. 5), freigelassen oder ob die Untersuchungshaft verhängt wird. »
(24) § 49 StPO : « Der Beschuldigte hat insbesondere das Recht,
- vom Gegenstand des gegen ihn bestehenden Verdachts sowie über seine wesentlichen Rechte im Verfahren informiert zu
werden (§ 50),
- einen Verteidiger zu wählen (§ 58) und einen Verfahrenshilfeverteidiger zu erhalten (§§ 61 und 62),
- Akteneinsicht zu nehmen (§§ 51 bis 53),

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La loi constitutionnelle du 29 novembre 1988 relative à la protection de la liberté de la personne


(PersFrG), déjà citée, permet de préciser certains des droits ainsi énoncés. Tout d’abord,
« toute personne arrêtée doit être informée dans une langue compréhensible et claire des
raisons de son arrestation », et ce dans le respect des droits des minorités linguistiques
accordés au niveau fédéral 25. Ensuite, elle a aussi « le droit d’informer un membre de sa
famille ainsi qu’un avocat » 26.

2. Leur mise en œuvre lors de la détention policière :

Avant tout interrogatoire, l’inculpé doit être informé de la nature des faits dont il est
soupçonné. Il doit encore être porté à sa connaissance qu’il a le droit de se prononcer sur
le fond ou bien de se taire, son attention devant être attirée sur le fait que sa déposition
peut servir à sa défense mais qu’elle pourra également être utilisée comme preuve en sa
défaveur 27. Enfin, il doit être informé qu’il a le droit de s’entretenir préalablement avec un
avocat, entretien qui peut toutefois être restreint par application des dispositions du § 59 du
StPO. 28

Cette possibilité de restreindre le droit d’entretien avec l’avocat appelle des précisions.
L’alinéa 1er du § 59, après avoir posé que le suspect arrêté doit avoir la possibilité d´entrer
en contact avec un avocat et de le mandater, prévoit que ce contact peut être surveillé et
également être restreint à un niveau d’information juridique général si cela parait néces-
saire pour empêcher une mise en danger de l´enquête ou une détérioration des preuves.
L’alinéa 2 du même texte précise les conditions de la mise en œuvre de la surveillance des
entretiens. Le texte se fonde sur un danger de fuite, de collusion ou de manipulation et sur
le risque qu’à cause de certaines circonstances le contact avec le défenseur puisse aboutir à
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une détérioration de preuves. La surveillance est ordonnée par le parquet. Elle ne peut être
effectuée que si le suspect et son avocat en ont connaissance et ne peut durer plus de deux
mois ; elle doit en toute hypothèse prendre fin après la mise en accusation. On mesure que
de telles dispositions peuvent servir de porte d’entrée à des restrictions illégales aux droits
de la défense. Elles doivent donc être appliquées très restrictivement car la communication

- sich zum Vorwurf zu äußern oder nicht auszusagen sowie nach Maßgabe der §§ 58, 59 Abs. 1 und 164 Abs. 1 mit
einem Verteidiger Kontakt aufzunehmen und sich mit ihm zu besprechen,
- gemäß § 164 Abs. 2 einen Verteidiger seiner Vernehmung beizuziehen,
- die Aufnahme von Beweisen zu beantragen (§ 55),
- Einspruch wegen der Verletzung eines subjektiven Rechts zu erheben (§ 106),
- Beschwerde gegen die gerichtliche Bewilligung von Zwangsmitteln zu erheben (§ 87),
- die Einstellung des Ermittlungsverfahrens zu beantragen (§ 108),
- an der Hauptverhandlung, an einer kontradiktorischen Vernehmung von Zeugen und Mitbeschuldigten (§ 165 Abs. 2)
und an einer Tatrekonstruktion (§ 150) teilzunehmen,
- Rechtsmittel und Rechtsbehelfe zu erheben,
- Übersetzungshilfe zu erhalten (§ 56). »
(25) Art 4 (6) PersFrG.
(26) Art 4 (7) PersFrG.
(27) § 164 (1) StPO.
(28) § 59 StPO : « (1) Dem festgenommenen Beschuldigten ist zu ermöglichen, Kontakt mit einem Verteidiger aufzunehmen
und ihn zu bevollmächtigen. Dieser Kontakt darf vor Einlieferung des Beschuldigten in die Justizanstalt überwacht werden
und auf das für die Erteilung der Vollmacht und eine allgemeine Rechtsauskunft notwendige Ausmaß beschränkt werden,
soweit dies erforderlich erscheint, um eine Beeinträchtigung der Ermittlungen oder von Beweismitteln abzuwenden.
(2) Der Beschuldigte kann sich mit seinem Verteidiger verständigen, ohne dabei überwacht zu werden. Wird jedoch der
Beschuldigte auch wegen Verabredungs- und Verdunkelungsgefahr angehalten und ist aufgrund besonderer, schwer wie-
gender Umstände zu befürchten, dass der Kontakt mit dem Verteidiger zu einer Beeinträchtigung von Beweismitteln füh-
ren könnte, so kann die Staatsanwaltschaft, vor Einlieferung des Beschuldigten in die Justizanstalt auch die Kriminal-
polizei, die Überwachung des Kontakts mit dem Verteidiger anordnen. Die Überwachung darf in jedem Fall nur mit
Kenntnis des Beschuldigten und des Verteidigers sowie längstens für eine Dauer von zwei Monaten ab Festnahme erfol-
gen; nach Einbringen der Anklage gegen den Beschuldigten ist sie jedenfalls zu beenden. »

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avec le défenseur ainsi que la confidentialité des informations échangées font partie du droit
à une défense efficace 29.

Lors de son interrogatoire, l’inculpé a en principe droit à la présence d’un avocat. Ce der-
nier ne peut participer à l’interrogatoire mais pourra à la fin de celui-ci poser des questions
complémentaires à l’inculpé. Pendant l’interrogatoire, l’inculpé n’a pas le droit de s’entre-
tenir avec son avocat au sujet des réponses aux questions qui lui sont posées. La présence
de l’avocat peut même être refusée dans la mesure où cela paraît nécessaire pour éviter une
mise en danger de l’enquête ou une détérioration des preuves ; dans ce cas, il doit être
procédé dans la mesure du possible à un enregistrement audio ou vidéo 30.

L’inculpé est d’abord interrogé sur sa situation personnelle. Ensuite, on lui donne l’occa-
sion de se prononcer de manière cohérente au sujet de ce qui lui est reproché. Dans le cas
de questions difficiles, qui présupposent une certaine expertise ou exigent l’avis d’un expert,
il est autorisé à fournir par écrit des renseignements complémentaires dans un délai rai-
sonnable 31.

Il est interdit d’utiliser des promesses, menaces ou autres moyens coercitifs pour pousser l’in-
culpé à un aveu ou à d’autres déclarations. Sa liberté de s’exprimer et d’exercer sa volonté
ainsi que sa capacité de se souvenir et d’entendement ne doivent être restreintes en aucune
manière, encore moins par une atteinte à son intégrité physique. Les questions posées à l’in-
culpé doivent être claires et intelligibles. Doivent être évitées les questions vagues, équivoques
et les questions pièges. Des questions qui contiennent des affirmations sur des faits dont la
véracité même doit être établie par les réponses de l’inculpé ne sont autorisées que dans le
cas où cela est nécessaire à la compréhension du contexte; de telles questions doivent être
notées verbatim dans le procès-verbal. Les questions qui présentent comme avoué un fait que
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l’inculpé n’a pas reconnu ne sont pas autorisées 32.

Il est à relever que le § 165 du StPO réglemente à la suite le déroulement d’un interroga-
toire dit « contradictoire ». Un tel interrogatoire, ainsi que les enregistrements et images
qui y sont liés, doit avoir lieu s´il est à craindre que l´interrogatoire de l´inculpé ou l’audi-
tion d´un témoin ne pourra pas être effectué lors de l´audience principale, pour des raisons
légales ou effectives. Un interrogatoire « contradictoire » doit satisfaire à des conditions sup-
plémentaires, notamment quant au droit des parties, inculpé, procureur ou victime, d’y par-
ticiper et de poser des questions 33.

J B. Les recours ouverts à l’inculpé.


Pendant la procédure d’enquête, le Beschuldigter dispose de plusieurs voies de recours selon
l´acte contesté. Comme indiqué plus haut, la répartition ordinaire des tâches pendant la
procédure d´enquête est la suivante: la police judiciaire effectue les mesures d´enquête 34,

(29) V. C. Achammer, Wiener Kommentar zur Strafprozessordnung (2009), § 59.


(30) § 164 (2) StPO.
(31) § 164 (3) StPO.
(32) § 164 (4) StPO.
(33) § 165 (1) et (2) StPO : « Eine kontradiktorische Vernehmung sowie die Ton- oder Bildaufnahme einer solchen Verneh-
mung des Beschuldigten oder eines Zeugen ist zulässig, wenn zu besorgen ist, dass die Vernehmung in einer Hauptve-
rhandlung aus tatsächlichen oder rechtlichen Gründen nicht möglich sein werde. (...) Das Gericht hat der Staatsanwalt-
schaft, dem Beschuldigten, dem Opfer, dem Privatbeteiligten und deren Vertretern die Gelegenheit zu geben, sich an der
Vernehmung zu beteiligen und Fragen zu stellen. »
(34) §§ 18 (1), 99 (1) StPO.

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La « garde à vue » dans la législation autrichienne - André GIUDICELLI & Christina JUHÁSZ

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le procureur dirige la procédure et ordonne certaines mesures d´instruction 35. Cela étant,
il existe des mesures réservées au juge et d´autres qui, le cas échéant, doivent être autorisées
par ce dernier. On distingue ainsi trois types d´actes contestables. Tout d´abord, il y a les
actes émanant de la police judiciaire et les contraintes exercées par celle-ci. En deuxième
lieu, il peut s´agir d´un ordre du parquet. Enfin, sont concernées les décisions du juge par
rapport à un ordre du parquet ou à une mesure quelconque de la police judiciaire.

Cette distinction selon l´acte contesté est d´une importance primordiale, ce qu’a rappelé une
décision récente de la Cour constitutionnelle (Verfassungsgerichtshof, ci-après VfGH) du 16
décembre 2010 36, car les voies de recours diffèrent radicalement. Tandis qu´un acte entre-
pris par la police judiciaire seule, et sans ordre du procureur ou agrément du juge, est à
contester devant une autorité administrative, les ordres du procureur font l´objet d´un
recours selon le § 106 StPO, alors que contre les décisions du juge s´ouvre le recours prévu
au § 87 StPO. 37

Tout d’abord, quand l´objet de la contestation porte sur un acte de la police judiciaire, le
Beschuldigter peut s´adresser à une autorité administrative indépendante (Unabhängiger Ver-
waltungssenat, ci-après UVS) 38 et la saisir d’un recours dénommé 39Maßnahmebeschwerde wegen
Ausübung unmittelbarer Befehls und Zwangsgewalt. C’est la loi relative à la procédure administrative
générale (Allgemeines Verwaltungsverfahrensgesetz, ci-après AVG) qui fixe la manière dont il est
possible de former un tel recours et la composition concrète des UVS 40. Ces dernières sont
des autorités administratives collégiales sui generis qui satisfont aux exigences d´un tribunal
selon les critères de l’article 6 de la Convention européenne. Leurs décisions sont soumises
au contrôle des Cours administrative et constitutionnelle. 41 L´inculpé pourra aller jusqu’à
saisir une juridiction du plus haut degré pour combattre les ordres ou contraintes exercés
par la police judiciaire.
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Quand le suspect considère que ses droits sont violés par un ordre du procureur (Staatsan-
waltschaft), il peut s´adresser au tribunal et soulever la contestation générale (Einspruch) pré-
vue au § 106 42 StPO. Très précisément, ce recours est ouvert à toute personne qui estime
que l’un de ses droits subjectifs a été méconnu, soit par un refus de l’exercice d’un droit,
soit par une mesure d´enquête ou de contrainte qui a été exécutée en violation des dispo-

(35) §§ 20 (1), 101 (1) StPO.


(36) La réforme récente de la procédure d´enquête entrée en vigueur en 2008 prévoyait que le §106 du StPO
couvrait tant les recours contre les actes de la police judiciaire que ceux contre les ordres du procureur.
L’objectif était d´unifier les voies de recours pendant la procédure d´enquête. Or, la Cour constitutionnelle
a récemment restreint le champ d´application de cette norme aux actes du procureur, rétablissant ainsi la
double voie de recours existant auparavant (VfGH, décis. 16 déc. 2010, G 259/09). Parmi les nombreuses
raisons qui ont abouti à cette abrogation partielle du § 106 du StPO pour non-conformité à la constitution
autrichienne se trouve la violation du principe de séparation des pouvoirs, car le StPO avait ainsi ouvert, afin
de contester un acte de la police judiciaire (qui représente une institution administrative), une voie de
recours devant un tribunal. La Cour a rappelé que la justice ne doit pas contrôler ni juger l´administration.
(37) Sur l’articulation des trois voies de recours, V. Ch. Bertel et A. Venier, Strafprozessrecht4(2010), 68.
(38) Art 129a (1) Bundes-Verfassungsgesetz (Loi constitutionnelle fédérale; BGBl 1930/1): « Die unabhängigen Ver-
waltungssenate in den Ländern erkennen (...) über Beschwerden von Personen, die behaupten, durch die Ausübung unmit-
telbarer verwaltungsbehördlicher Befehls- und Zwangsgewalt in ihren Rechten verletzt zu sein (...). »
(39) V. Th. Öhlinger, Verfassungsrecht6 (2005), 284 s.
(40) V. les art. 67a, para. 2 et 67c AVG.
(41) Sur la Cour administrative, V. art. 130 ss Bundes-Verfassungsgesetz; sur la Cour constitutionnelle, V. art 137 ss
Bundes-Verfassungsgesetz. V. Th. Öhlinger, op. cit., 286 s.
(42) § 106 (1) StPO : « Einspruch an das Gericht steht im Ermittlungsverfahren jeder Person zu, die behauptet, durch die
Staatsanwaltschaft in einem subjektiven Recht verletzt zu sein, weil
1. ihr die Ausübung eines Rechtes nach diesem Gesetz verweigert oder
2. eine Ermittlungs- oder Zwangsmaßnahme unter Verletzung von Bestimmungen dieses Gesetzes angeordnet oder durch-
geführt wurde.
Eine Verletzung eines subjektiven Rechts liegt nicht vor, soweit das Gesetz von einer bindenden Regelung des Verhaltens
der Staatsanwaltschaft absieht und von diesem Ermessen im Sinne des Gesetzes Gebrauch gemacht wurde. »

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VARIÉTÉS
sitions du 43 StPO. Le code de procédure pénale autrichien permet ainsi un contrôle judi-
ciaire des actes du procureur pendant la procédure d´enquête ce qui constitue une garan-
tie essentielle du point de vue de l´État de droit 44. Cependant, selon le § 107 (1) du StPO,
ce remède connaît une restriction: après achèvement de la procédure d´enquête, les contes-
tations fondées sur le § 106 (1) du StPO ne sont plus recevables. Précisons que l’inculpé peut
faire appel de la décision du tribunal devant le tribunal régional supérieur (Oberlandesge-
richt) 45.

Enfin, l´inculpé peut intenter un recours contre la décision judiciaire ayant procédé à l´agré-
ment d´un ordre du procureur relatif à une mesure d´enquête (§ 87 StPO) 46. Cette voie de
recours constitue un remède général 47 contre des décisions judiciaires qui ne constituent
pas des jugements 48.

Puisque l´arrestation et la détention par la police peuvent comprendre toute la gamme des
actes présentés, l´inculpé peut, selon l´acte qui porte atteinte à ses droits, utiliser l’une ou
l’autre des voies de recours précitées. Si la police judiciaire effectue de sa propre initiative
l´arrestation puis la détention de l´inculpé, ce qui est admissible dans les limites précisées
par le § 171 (2) du StPO, ou que ces mesures ne sont pas couvertes par un ordre valable du
procureur avec agrément du juge, l´inculpé peut combattre ces mesures violant ses droits
par un recours devant l´UVS. Si l´acte en cause est un ordre du procureur ordonnant l´arres-
tation, l´inculpé doit s´adresser au tribunal et faire une contestation. Enfin, si l´ordre du pro-
cureur, ainsi que les mesures effectuées sur la base de cet ordre sont conformes à la loi, reste
l´agrément du juge qui peut représenter une violation des droits de l´inculpé. Dans ce der-
nier cas il peut s´adresser au tribunal 49.

À côté de ces voies de recours, l´inculpé a encore d´autres possibilités pour faire valoir ses
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droits. L´une d´entre elles est la contestation pour violation du droit fondamental de la
liberté de la personne. Après épuisement des voies de recours, l´inculpé peut s´adresser à
la Cour suprême (Oberster Gerichtshof) en application des dispositions 50 de la loi relative à la
contestation pour violation du droit fondamental de liberté de la personne (Grundrechtsbeschwerde-
Gesetz 51).

(43) V. E. Fabrizy, Die österreichische Strafprozessordnung (2011), § 106.


(44) Ce droit de contestation est restreint au cas où le StPO renonce à une règlementation stricte des mesures
prises par la police judiciaire, mais les laisse à sa disposition.
(45) § 107 (3) StPO : « Der Staatsanwaltschaft und dem Einspruchswerber steht Beschwerde zu; diese hat aufschiebende Wir-
kung. Das Oberlandesgericht kann die Behandlung einer Beschwerde ablehnen, es sei denn, dass die Entscheidung von
der Lösung einer Rechtsfrage abhängt, der grundsätzliche Bedeutung zukommt, insbesondere weil das Gericht von der
Rechtsprechung des Oberlandesgerichts oder des Obersten Gerichtshofs abweicht, eine solche Rechtsprechung fehlt oder die
zu lösende Rechtsfrage in der bisherigen Rechtsprechung nicht einheitlich beantwortet wird. »
(46) § 87 (1) StPO : « Gegen gerichtliche Beschlüsse steht der Staatsanwaltschaft, dem Beschuldigten, soweit dessen Interes-
sen unmittelbar betroffen sind, und jeder anderen Person, der durch den Beschluss unmittelbar Rechte verweigert werden
oder Pflichten entstehen oder die von einem Zwangsmittel betroffen ist (...) Beschwerde an das Rechtsmittelgericht zu, soweit
das Gesetz im Einzelnen nichts anderes bestimmt. »
(47) Il n´est pourtant pas applicable à toutes les décisions judiciaires, le StPO connaît quelques exceptions expli-
citement précisées.
(48) V. A. Tipold, Wiener Kommentar zur Strafprozessordnung (2009), § 87 (spéc. n° 5 s.).
(49) Les § 88 et 89 du StPO fixent la procédure de recours dans ce cas.
(50) § 1 (1) Grundrechtsbeschwerde-Gesetz : « Wegen Verletzung des Grundrechtes auf persönliche Freiheit durch eine strafge-
richtliche Entscheidung oder Verfügung steht dem Betroffenen nach Erschöpfung des Instanzenzuges die Grundrechtsbes-
chwerde an den Obersten Gerichtshof zu. »
§ 2 (1) Grundrechtsbeschwerde-Gesetz : « Das Grundrecht auf persönliche Freiheit (Bundesverfassungsgesetz über den
Schutz der persönlichen Freiheit ..., Art. 5 der Europäischen Konvention zum Schutze der Menschenrechte und Grund-
freiheiten...) ist insbesondere dann verletzt, wenn ...bei einer Festnahme oder Anhaltung das Gesetz unrichtig angewendet
wurde. »
(51) BGBl 1992/864.

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VARIÉTÉS

Nous conclurons par quelques éléments sur le statut du parquet, question tout aussi sen-
sible en Autriche qu’en France. Les procureurs autrichiens sont des organes de la juridic-
tion qui sont chargés de missions d´enquête et de mise en accusation selon la loi constitu-
tionnelle fédérale (Bundes-Verfassungsgesetz, ci-après B-VG) 52. L´organisation du parquet et les
missions des procureurs sont ensuite définies dans la loi relative aux procureurs (Staatsanwalt-
schaftsgesetz) 53. Les compétences rationae materiae et ratione loci sont fixées dans les §§ 20 et
suivants du StPO.

Les procureurs sont des organes de la juridiction, mais ils ne sont pourtant pas des organes
indépendants 54. Comme en France, l´organisation du parquet obéit à un principe hiérar-
chique 55 et le ministre de justice détient le pouvoir de direction le plus élevé, à l´égard de
tous les procureurs. Les liens hiérarchiques se manifestent à travers une obligation de se
conformer aux directives émanant du niveau hiérarchique superposé 56. Les procureurs sont
ainsi obligés, sous certaines conditions, de s´en tenir aux instructions de l´organe superposé,
même si, dans certains cas, ils disposent d´un droit de protestation 57.

Comme en France, le pouvoir de direction du ministre de la justice est critiqué par la


majeure partie de la doctrine. Une justice susceptible d´être influencée par le pouvoir poli-
tique et d´en subir les interventions ne véhicule pas toujours une image fiable et transpa-
rente et peut semer le doute quant à son objectivité et son indépendance 58.
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(52) Art. 90a B-VG : « Staatsanwälte sind Organe der Gerichtsbarkeit. In Verfahren wegen mit gerichtlicher Strafe bedrohter
Handlungen nehmen sie Ermittlungs- und Anklagefunktion wahr. Durch Bundesgesetz werden die näheren Regelungen
über ihre Bindung an die Weisungen der ihnen vorgesetzten Organe getroffen. »
(53) BGBl 1986/164.
(54) V. H. V. Schroll, Wiener Kommentar zur Strafprozessordnung (2009), Vor § 19 ff n° 8.
(55) Sur cette organiation hiérarchisée et les conditions applicables aux instructions, il convient de se reporter
aux § 2 et 29 de la Staatsanwaltschaftsgesetz :
§ 2 (1) Staatsanwaltschaftsgesetz : « Am Sitz jedes in Strafsachen tätigen Landesgerichts besteht eine Staatsanwalt-
schaft, am Sitz jedes Oberlandesgerichts eine Oberstaatsanwaltschaft und beim Obersten Gerichtshof die Generalprokura-
tur. Die Staatsanwaltschaften sind den Oberstaatsanwaltschaften und diese sowie die Generalprokuratur dem Bundesmi-
nister für Justiz unmittelbar untergeordnet und weisungsgebunden. »
§ 2 (2) Staatsanwaltschaftsgesetz : « Den Staatsanwaltschaften, Oberstaatsanwaltschaften und der Generalprokuratur
steht ein Leiter vor. Dieser vertritt die Behörde nach außen, beaufsichtigt die Tätigkeiten der ihm unterstehenden Organe
und erteilt ihnen erforderlichenfalls Weisungen. Er ist im Einzelfall befugt, die Amtsverrichtungen aller ihm untergeord-
neten Organe selbst zu übernehmen oder mit der Wahrnehmung staatsanwaltschaftlicher Aufgaben aus schwerwiegenden
Gründen einen anderen als den nach der Geschäftsverteilung zuständigen Staatsanwalt zu betrauen.»
§ 29 (1) Staatsanwaltschaftsgesetz : « Weisungen der Oberstaatsanwaltschaften zur Sachbehandlung in einem bes-
timmten Verfahren sind den Staatsanwaltschaften schriftlich unter Bezugnahme auf diese Gesetzesstelle zu erteilen und zu
begründen. Ist das aus besonderen Gründen, insbesondere wegen Gefahr im Verzug, nicht möglich, so ist eine mündlich
erteilte Weisung so bald wie möglich schriftlich zu bestätigen. »
(56) H. V. Schroll, Wiener Kommentar zur Strafprozessordnung (2009), Vor § 19 ff n° 26 : « Die Staatsanwaltschaft, Obers-
taatsanwaltschaft und Generalprokuratur sind weisungsgebundene Organisationseinheiten (...) Der einzelne Staatsanwalt,
Oberstaatsanwalt oder Generalanwalt ist wiederum dem Leiter der staatsanwaltschaftlichen Organisationseinheit unter-
geordnet, der seinerseits einem Weisungsrecht der vorgesetzten Dienststelle - in letzter Instanz dem Bundesminister für Jus-
tiz - unterliegt (...). »
(57) V. H. V. Schroll, Wiener Kommentar zur Strafprozessordnung (2009), Vor § 19 ff n° 34.
(58) V. H. V. Schroll, ibid., Vor § 19 ff n° 30 : « Abgesehen von der generell schiefen Optik (justice must not only be done,
it must be seen to be done ...), dass die Politik Einfluss auf das Strafverfahren nehmen kann, vermag weder die mit Wei-
sung anzustrebende Vereinheitlichung der Rechtsprechung (...) noch der Schutz einer Person des öffentlichen Interesses vor
übereilten Anklagen einen solchen Eingriff rechtfertigen (...) ». Rapp. J.-P. Jean, Le ministère public français au
regard des justices pénales d’Europe, AJ pénal mars 2011. 106, spéc. 112 : « Dans ce mouvement européen,
il reste au ministère public français à asseoir sa légitimité propre, confortée par un Conseil de la magistra-
ture aux prérogatives élargies en obtenant, sur le plan organique et fonctionnel, un renforcement des garan-
ties statutaires pour assurer au citoyen que l’autorité publique chargée de l’enquête et de la poursuite agit
de façon indépendante dès qu’une liberté individuelle est en jeu ».

68 Janvier / Mars 2011

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