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COURS DE POLITIQUE

ECONOMIQUE

Niveau Licence 3

Parcours : Economie monétaire et


financière

Chapitre I : Initiation à la politique


économique

Prof. Antoine N’GAKOSSO


Faculté des Sciences Economiques
Laboratoire d’Economie et de Management (LEM)
Brazzaville-Congo
Pr Antoine
NGAKOSSO 1
Ce premier thème concerne les prérequis nécessaires à l’étude de la politique
économique.
Section 1 : Qu’est-ce que la politique économique ?
Dans un premier temps, on s’intéresse aux problèmes que la politique
économique est censée apporter les réponses, à la définition des concepts et à
l’objet de la politique économique. Dans un deuxième temps, on présentera
les principales théories de la politique économique.
1.1. Problèmes et objet de la politique économique
Que faire lorsque dans une économie donnée, il y a d’une part, des
perturbations conjoncturelles telles que le chômage, une faible croissance
économique, une inflation élevée et le déséquilibre de la balance des
transactions courantes notamment le déficit extérieur, et/ou d’autre part, un
mauvais fonctionnement des structures du marché, une mauvaise
organisation des institutions, ou l’inadaptation des structures économiques
aux besoins économiques réels ?
L’analyse des problèmes soulevés par la question qui précède, et surtout la
recherche de leurs solutions, constituent l’objet de la politique économique.
Les politiques économiques c’est-à-dire les interventions de l’Etat dans
l’économie font désormais partie intégrante du fonctionnement des économies
de marché, quel que soit le degré de libéralisme ou de keynésianisme des
gouvernements en place. En effet, les marchés ne peuvent fonctionner sans
cadre institutionnel.
Les institutions touchent directement au fonctionnement des marchés et
influencent l’efficacité des instruments de la politique économique. En effet,
laisser les marchés à l’initiative du secteur privé connaît des défaillances. Ce
qui justifie l’intervention de l’Etat chez les économistes libérales qui s’opposent
aux politiques interventionnistes keynésiennes qui sont fondées sur la relance
économique par la demande en cas d’une crise économique qui émane d’une
faible demande.
1.2. Définition et dimensions du concept de « politique »
Etymologiquement, le mot politique se rattache au mot grec « politikos », qui
veut dire « de la cité ». Ainsi, la politique est donc l’art et la pratique de
gouverner les sociétés humaines. Dans une acception plus moderne, une
politique est une « manière concertée de mener une affaire » donc de mettre en
œuvre des moyens adéquats en vue d’atteindre des objectifs précis (Tinbergen,
1961).
 Le concept de politique a deux dimensions:
- la dimension économique;

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- la dimension sociale.
La dimension « économique » de la politique se réfère aux interventions
qui touchent à la production, à la distribution ou à la consommation des
richesses (Deiss, 1998).
La dimension sociale de la politique quant à elle, se réfère à l’amélioration
du bien-être des populations. Il s’agit de la réalisation des objectifs sociaux
dans un pays donné dont la finalité est l’amélioration du bien-être des
populations.
Parmi les objectifs sociaux, on peut mentionner : la bonne santé de la
population, le haut niveau de l’éducation, les logements décents à la
population, les infrastructures sociales de base viables, accès des populations
à l’eau potable, à l’électricité et aux nouvelles technologies de l’information et
de la communication, la bonne nutrition des populations, lutter contre la
pauvreté, la bonne qualité des transports en commun, etc.
La réalisation des objectifs sociaux concourt à la stabilité économique et
politique d’un pays, et permet ainsi d’atteindre les objectifs de la politique
économique. En revanche, la réalisation des objectifs économiques permet
ainsi d’atteindre les objectifs sociaux. Il s’ensuit finalement que les objectifs
économiques et sociaux de la politique sont intimement liés et sont imbriqués.
1.3. Définition de la politique économique
La politique économique se définit comme un ensemble des interventions des
pouvoirs publics visant à agir sur les variables économiques et extra
économiques en vue d’atteindre des objectifs relatifs à la situation économique
d’un pays, à l’aide de divers instruments , et en tenant compte d’un certain
nombre de contraintes.
Autrement dit, la politique économique consiste en la manipulation de
certains instruments de politique économique par la puissance publique afin
d’atteindre les objectifs économiques et sociaux qu’elle s’est fixée.
Pour mettre en place une politique économique dans un pays il faut avoir des
objectifs, les instruments et les institutions.

La politique économique est donc une combinaison d’objectifs, d’instruments


et d’institutions.
S’agissant des objectifs, on distingue les objectifs conjoncturels (court terme)
et les objectifs structurels (long terme).
Ensuite, pour atteindre ces objectifs, les pouvoirs publics mobilisent un
certain nombre d’instruments. On distingue les instruments
microéconomiques et les instruments macroéconomiques.

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Les instruments macroéconomiques concernent notamment le niveau des
dépenses publiques, des prélèvements obligatoires, la fixation des taux
d’intérêt directeurs, etc. Ces instruments servent à agir sur le rythme et la
dynamique d’ensemble de l’économie.
Les instruments microéconomiques concernent principalement les diverses
réglementations sur la concurrence, sur le respect des contrats, l’organisation
des faillites, les normes sanitaires à respecter dans la production de tel ou tel
bien, les subventions versées à certains secteurs ou entreprises, les choix
d’orientation des dépenses publiques, la structure des prélèvements
obligatoires, etc. Les instruments microéconomiques agissent sur les marchés
spécifiques.
Enfin, l’utilisation des instruments de politique économique pour atteindre tel
ou tel objectif doit s’inscrire dans un cadre institutionnel.
Les institutions constituent l’organisation juridique, réglementaire et sociale
des activités productives. A cet effet, elles sont des règles dans la société, ou
plus formellement, les contraintes (formelles et informelles) créées par les
hommes qui régissent les interactions humaines. A la suite de Coase, l’accent
a été mis sur les coûts de transactions qu’introduit un environnement
institutionnel de faible qualité, ce qui met en avant l’importance de la sécurité
des contrats. A titre d’exemple, les précautions qu’exige un investissement
sont d’autant plus grandes que l’environnement juridique, fiscal et social est
incertain. Les institutions sont donc créatrices de marché dans la mesure où
leur absence ou leur inefficacité se traduit par un environnement défavorable
à l’investissement, à l’emploi, à la croissance et au développement.
Les institutions renvoient donc à l’Etat de droit dans sa mission de définition
et de sanction des règles (système judiciaire). Ainsi, l’Etat garantit les droits
de propriété, car ils constituent une condition d’efficacité économique dans le
cadre d’un marché concurrentiel. Dans ces conditions, les institutions jouent
un rôle par rapport au marché. Par rapport au marché, on distingue trois
types d’institutions :
- les institutions de régulation des marchés dont l’objet est de réduire
l’asymétrie d’information entre le vendeur et le consommateur ou de
défendre le libre jeu de la concurrence ;
- les institutions de stabilisation des marchés dont l’activité est orientée vers
la réalisation des grands équilibres et l’évitement des crises financières ;
- les institutions de légitimation des marchés qui participent à la protection
sociale et réduisent ainsi les conflits économiques et sociaux. On peut citer
à titre d’exemple les conventions collectives qui réunissent les
représentants des salariés et des employeurs afin de déterminer le niveau
légal des rémunérations, les caisses de retraites ou les dispositifs
d’assurance chômage.

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Le cadre institutionnel doit être flexible (Acemoglu et al. (2006), car les institutions
comptent à chaque étape du développement, mais doivent s’adapter à ces différentes
étapes, d’où l’importance, pour les institutions internationales, d’affiner leurs
recommandations aux pays en développement. Dans ce sillage, le développement
est perçu comme un processus de transition entre institutions (North, Wallis et
Weingast, 2009).

1.4. Les volets de la politique économique


Afin de faciliter leur analyse, les économistes ont présenté une grille de lecture
permettant de classer les politiques économiques. Il s’agit d’une classification
basée sur les modalités d’actions des pouvoirs publics. On distingue à cet
effet, les actions sur la conjoncture et les actions sur les structures de
l’économie. A cet effet, la politique économique comprend deux grands volets,
à savoir la politique économique conjoncturelle et la politique économique
structurelle.
1.4.1. La politique économique conjoncturelle
La politique économique conjoncturelle a pour objet la stabilisation
macroéconomique qui est un objectif de court terme.
La stabilisation conjoncturelle de l’économie suppose une intervention
par la politique monétaire et/ou la politique budgétaire, voir même par la
politique de change afin de lisser les fluctuations économiques ( de court
terme). Les objectifs de la politique économique conjoncturelle sont présentés
dans le carré magique de Nicholas Kaldor. Il s’agit de la recherche d’une
croissance soutenue permettant de limiter le taux de chômage, sans accélérer
l’inflation et compatible avec un solde des comptes extérieurs proche de zéro,
c’est-à-dire une balance des transactions courantes équilibrée.
La politique économique conjoncturelle est d’inspiration keynésienne et
s’appuie donc sur la doctrine selon laquelle c’est la demande qui détermine
l’offre, c’est-à-dire le niveau de la production. A cet effet, la régulation, c’est-
à-dire la stabilisation de l’activité économique doit passer par l’action sur la
demande globale à travers ses différentes composantes : la consommation
privée, la consommation publique, l’investissement privé, l’investissement
public et les exportations. La demande globale est instable, ainsi l’Etat doit
intervenir pour stabiliser l’économie. Les politiques conjoncturelles agissent
sur la demande globale pour modifier l’économie dans un contexte donné.
Avec les avancées théoriques des années 90, on distingue les politiques
économiques conjoncturelles d’inspiration keynésienne et les politiques
économiques conjoncturelles de la Nouvelle Economie Keynésienne (NEK).
Les politiques économiques conjoncturelles d’inspiration keynésienne sont
encore appelées les politiques économiques conjoncturelles discrétionnaires
ou délibérées alors que les politiques économiques conjoncturelles de la NEK

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sont des politiques de règle à l’instar de la règle de Taylor en matière de
politique monétaire et des règles budgétaires.
Les politiques économiques conjoncturelles regroupent les interventions
publiques de court terme visant à éliminer les fluctuations économiques.
Ces fluctuations économiques concernent principalement les fluctuations du
PIB (production), des prix, de l’emploi, des soldes extérieurs et des soldes
publics. Les politiques conjoncturelles agissent sur la demande globale.
Pour agir sur la conjoncture économique, on dispose de deux instruments à
manipuler éventuellement combinables : la politique monétaire et la
politique budgétaire. Ces deux politiques sont liées à l’identification de cycles
dans l’économie, la conjoncture correspondant à telle ou telle phase dans ce
cycle.
La conjoncture est, par essence, liée à l’existence de cycles économiques.
Un cycle économique comprend 4 phases: crise, dépression, reprise, et
expansion.
La crise correspond à la phase de retournement du cycle où la production
cesse de croître et commence une phrase de décroissance.
La dépression est une phase descendante du cycle.
La reprise marque un nouveau retournement de la conjoncture. C’est la phase
la plus basse du cycle lorsque la production recommence à augmenter.
L’expansion est une phase ascendante du cycle.
Le cycle économique se présente schématiquement comme le montre le
schéma 1 suivant.

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L’existence des cycles pose un problème en ce qui concerne la formulation des
anticipations des agents. C’est pourquoi la politique conjoncturelle a pour
objet de lisser les cycles économiques afin de permettre de formuler des
anticipations avec plus de sérénité.
Le schéma 2 ci-après, montre les effets de la politique de stabilisation, c’est-
à-dire les effets sur la conjoncture de la politique de relance et ceux de la
politique de rigueur.

En s’appuyant sur le « principe de l’entonnoir commun » de Tobin (1982), la


politique budgétaire et/ou la politique monétaire peuvent être utilisées pour
stabiliser l’économie. En effet, les deux instruments de la politique
économique transitent par le même canal, celui de la demande globale. Il
s’ensuit qu’il est équivalent d’affecter la politique monétaire ou la politique
budgétaire à la lutte contre l’inflation ou à la lutte contre le chômage.
Dans une union monétaire, les actions de la politique économique
conjoncturelle se font selon les deux types de chocs à savoir les chocs
symétriques et les chocs asymétriques.
Pour les chocs symétriques, c’est la politique monétaire commune qui est
l’instrument privilégié. Mais en cas d’existence d’hétérogénéités entre les
économies de l’union monétaire, l’action de la politique monétaire devient
insuffisante et elle doit-être complétée par les politiques budgétaires
nationales.
En revanche, pour les chocs asymétriques, ils relèvent entièrement de l’action
des politiques budgétaires nationales.

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1.4.2. Liens entre politique économique conjoncturelle et la
macroéconomie
La question fondamentale en macroéconomie porte sur la nature des rôles
respectifs de l’Etat et des mécanismes du marché dans le fonctionnement de
l’économie. La macroéconomie est la branche de l’économie qui étudie la
structure, le fonctionnement et les résultats de l’économie globale. Or, les
résultats de l’économie prise dans son ensemble sont indiscutablement liés
aux politiques macroéconomiques conjoncturelles mises en œuvre par les
responsables politiques en vue de répondre à l’ensemble des besoins des
agents économiques. Ces derniers doivent utiliser avec justesse la théorie
macroéconomique, car celle-ci sert de fondement à l’élaboration et à la mise
en œuvre des politiques macroéconomiques conjoncturelles.
1.4.3. Les Objectifs de la politique économique conjoncturelle
Parmi les trois grandes fonctions que Musgrave (1959) a assignées à l’Etat, la
fonction de stabilisation constitue l’objectif poursuivi par les politiques
conjoncturelles
La politique économique conjoncturelle vise la stabilisation conjoncturelle
de l’économie (Keynes, 1931), c’est-à-dire la réduction des fluctuations
conjoncturelles de l’économie. Il s’agit de la recherche des équilibres
économiques à court terme notamment une expansion du PIB (ou une forte
croissance économique), un faible niveau d’inflation (la stabilité des prix), un
faible niveau de chômage(ou plein emploi) et l’équilibre de la balance des
transactions courantes (Equilibre extérieur). Xavier Greffe ajoute à ces
quatre objectifs, un cinquième objectif, celui de la stabilité du taux de change
ou encore d’une faible variabilité du taux de change.
La politique conjoncturelle vise à rapprocher la croissance effective du PIB de
son niveau potentiel.
De façon générale, la politique économique conjoncturelle vise la réalisation
des quatre objectifs du carré magique de Nicholas Kaldor (1971).
Par leurs actions, en visant ces quatre objectifs, les pouvoirs publics, doivent
atteindre une situation la plus proche du meilleur état de l’économie.
D’un point de vue statique, la politique économique a fondamentalement pour
objectif, la réalisation du bien-être social, et d’un point de vue dynamique la
maximisation de la croissance. La réalisation de ces objectifs se heurte à des
difficultés qui tiennent à l’efficacité limitée des instruments, ainsi qu’à la
complexité des interactions entre variables objectifs et instruments.
Les interdépendances entre ces objectifs sont nombreuses parmi lesquelles on
distingue les conflits entre certains objectifs d’une part, et la compatibilité
entre certains objectifs d’autre part.

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Le carré de Nicholas Kaldor (1971) est qualifié de magique parce qu'il est
impossible d’atteindre simultanément ces quatre objectifs .En effet, les
objectifs macroéconomiques sont interdépendants et la poursuite prioritaire
de l’un d’entre eux peut compromettre la réalisation d’un autre. Le carré
magique de N. KALDOR se présente ainsi qu’il suit.
Schéma n°3

Comme ces objectifs ne peuvent pas être réalisés simultanément, les pouvoirs
publics donnent de plus souvent, la priorité à certains d’entre eux, au
détriment des autres. Il revient donc à viser simultanément les objectifs
compatibles.
Lorsque les indicateurs de croissance et de balance courante sont à leur
niveau le plus élevé et que les indicateurs d’inflation et de chômage sont à leur
niveau le plus faible, les équilibres macroéconomiques sont réalisés. Cette
situation correspond à celle où la surface de la figure est maximale et régulière
(diagramme en pointillé). Par contre, dans le diagramme en trait plein, la
croissance du PIB est faible (2%), la balance des transactions courantes est
déficitaire (1% du PIB), le taux de chômage est élevé (10% de la population
active) et les prix sont stables (inflation faible autour de 2%). Il s’agit du cas
d’un pays qui connait des déséquilibres macroéconomiques.

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A/- Conflits potentiels des objectifs du carré de N. Kaldor (1971)

CHÔMAGE CROISSANCE

La baisse du La croissance La croissance est


chômage est souvent génératrice
peut générer inflationniste d’importations
l’inflation

INFLATION ÉQUILIBRE DU SOLDE COURANT

Schema n°4

B/- Objectifs compatibles du carré de Nicholas Kaldor (1971)


Schema n°5

CROISSANCE
Baisse du
CHÔMAGE

DESINFLATION
ÉQUILIBRE DU SOLDE COURANT
(Les exportations
augmentent et/ou les
importations baissent)

La désinflation améliore la compétitivité

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1.4.4. Les modalités d’action de la politique économique conjoncturelle
discrétionnaire
La politique conjoncturelle peut être utilisée soit pour la relance économique
(politique de relance) ou pour le freinage, c’est-à-dire pour l’austérité
économique (politique de rigueur ou restrictive ou d’austérité).
Une politique de relance est une politique économique qui a pour but de
relancer l’activité économique, c'est-à-dire l’expansion de l’activité et donc
l’emploi, par un soutien à la demande des ménages et des entreprises. Elle
repose sur des politiques monétaire et budgétaire expansionnistes.
En revanche, la politique de stabilisation accorde une priorité à la lutte contre
l’inflation et au rétablissement des équilibres extérieurs et publics : la
recherche d’un équilibre budgétaire, une politique monétaire restrictive, une
politique de ralentissement de la croissance des revenus sont mis en œuvre
pour restreindre la croissance de la demande. A cet et effet, l’inflation recule
(désinflation) et les comptes extérieurs peuvent s’améliorer. Cependant, la
politique de rigueur peut induire une récession de la demande et donc un
ralentissement de l’expansion et une hausse du chômage. Elle repose sur des
politiques monétaire et budgétaire restrictives.
Les politiques économiques conjoncturelles de type keynésien sont des
politiques contracycliques car elles visent à contrecarrer la tendance du cycle
c’est-à-dire elles visent à lisser les fluctuations de l’économie. Ces politiques
n’ont d’effet qu’à court terme et ne permettent pas d’augmenter la croissance
potentielle d’un pays.
1.4.5. Tableau récapitulatif des mécanismes d’actions de la politique
budgétaire conjoncturelle discrétionnaire.
Schéma 6 : Le fonctionnement de la politique budgétaire.

Politique budgétaire Politique budgétaire


de relance de rigueur

Dépenses publiques Hausse des dépenses Baisse des dépenses

Recettes fiscales Baisse des impôts Hausse des impôts

Solde budgétaire Déficit budgétaire Excédent budgétaire

Effet sur l’activité Augmentation de la Baisse de la


économique consommation, de la consommation et
production, création diminution des prix
d’emplois et (baisse de l’inflation)
diminution du
chômage

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1.8.2. Mécanismes d’action de la politique monétaire conjoncturelle
discrétionnaire
Schéma n°7 :

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1.4.6. Policy-mix
Lorsqu’un pays combine à la fois la politique budgétaire et la politique
monétaire en vue d’atteindre un objectif donné, on parle alors d’un policy-mix.
1.5. La politique économique structurelle
La politique structurelle vise la modification ou l’infléchissement des
structures en place afin de permettre la réalisation des objectifs économiques
et sociaux. Il s’agit des objectifs de long terme tels que la redistribution
équitable des revenus et l’allocation des ressources. La politique structurelle
consiste à réformer et à adapter les institutions et les structures de l’économie
pour augmenter la croissance potentielle du PIB.
Les politiques structurelles concernent généralement les politiques de
réglementations et de déréglementations, la politique industrielle, la politique
technologique, c’est-à-dire de l’innovation, la politique d’aménagement du
territoire, la politique institutionnelle et la politique sociale. Ces politiques ont
pour effet la restructuration de l’appareil productif, la protection sociale, la
réduction des inégalités et l’adaptation des structures de l’économie, et
l’évolution des institutions en vue de l’amélioration de leur qualité.
Les réformes structurelles visent à modifier les arbitrages de politique
économique en changeant les institutions sous-jacentes. Autrement dit, les
politiques structurelles agissent sur l’offre en augmentant la productivité,
l’investissement et l’emploi afin d’accroître le potentiel de croissance d’une
économie. Les politiques économiques structurelles sont des politiques de
l’offre. Elles sont davantage sollicitées pour soutenir la compétitivité des
entreprises dans la mondialisation et pour élever le niveau de la croissance
potentielle de l’économie, par des réformes. Ces politiques permettent
l’indépendance nationale et le développement économique des pays.

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Schéma n°8 : Tableau récapitulatif de la politique économique.

Politiques Politiques
conjoncturelles
structurelles

Horizon Court terme Long terme

Objectifs Maintenir ou rétablir les Réformer les institutions


équilibres économiques et adapter les structures
et financiers de l’économie aux
besoins de la société

Effets Quantitatifs Qualitatifs

Les politiques structurelles sont les politiques d’offre car elles touchent
l’appareil productif comme la fiscalité de l’entreprise (impôt sur les bénéfices),
la baisse des cotisations sociales (notamment sur les bas salaires), les crédits
d’impôt pour améliorer la compétitivité des entreprises, le progrès technique
(qui améliore la productivité des facteurs), les variations des prix des matières
premières, etc.
Schématiquement, la distinction entre les deux volets de la politique
économique se présente comme suit : Schéma n°9.

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Schéma n°9 :
Politique Economique

Politique économique Politique économique


conjoncturelle dont structurelle dont
l’horizon est de court l’horizon est de long
terme terme

Instruments : Instruments

Politique budgétaire ;  Politique sociale


 Politique industrielle
Politique monétaire ;  Politique de l’innovation
 Politique de la concurrence
Politique de change
(Réglementation et
déréglementation)
 Politique institutionnelle
 Politique d’aménagement
du u de du territoire ;
Modalité d’action

Action sur la
demande globale

Modalité d’action
Effet attendu
Action sur l’offre, c’est-
Lisser les fluctuations de la à-dire Action sur la
conjoncture afin de structure économique
retrouver les équilibres
macro-économiques

Effet attendu
Croissance
Stabilité des prix
élevée  Augmenter la croissance
potentielle
Plein emploi Equilibre  Réformer et adapter les
extérieure institutions et les
structures économiques

Restructuration Protection Réduction des


de l’appareil sociale inégalités
productif

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1.6. Les acteurs ou les ordonnateurs de la politique économique
On distingue plusieurs ordonnateurs de la politique économique, à savoir :
- les pouvoirs publics qui définissent l’orientation des politiques
budgétaires;
- les banques centrales qui définissent les politiques monétaires ;
- les collectivités locales qui définissent les politiques d’attractivité de
leurs territoires
- les organismes supranationaux tels que la CEMAC, UEMOA, etc.;
- Les institutions internationales dont:
• l’organisation mondiale du commerce (OMC) qui encadre les politiques
commerciales en restreignant les pratiques protectionnistes ;
• Le FMI qui surveille le taux de change.
Au total, la conduite de la politique économique apparaît comme une
polyphonie face à laquelle l’intervention de l’Etat semble nécessaire pour éviter
la cacophonie .En effet, l’Etat joue le rôle d’un chef d’orchestre pour éviter que
chacun ne joue sa partition séparément.
1.7. Politique économique et les fonctions de l’Etat
a) Les fonctions de l’Etat
Par la politique économique, l’Etat intervient dans le domaine économique et
social. Pendant longtemps, l’intervention de l’Etat s’est limitée à ses fonctions
régaliennes (armée, police, justice): c’est la conception de l’Etat gendarme.
Au cours de la première moitié du XXième siècle, les fonctions économiques
et sociales de l’Etat se sont développées .Elles ont pris une importance plus
grande après la seconde Guerre mondiale avec l’apparition de l’Etat
providence (Welfare state).
Dans une économie du marché, l’intervention économique de l’Etat se justifie
d’une part, par les limites de la régulation économique par les marchés, c’est-
à-dire les défaillances du marché, et d’autre part, par les théories de la
croissance endogène qui réhabilitent le rôle de l’Etat en tant que producteur
d’externalités positives dans le domaine de la recherche, de l’éducation, etc.
En tenant compte des différentes formes et circonstances d’interventions
économiques de l’Etat, Richard Musgrave (1959), a assigné à l’Etat trois
fonctions principales :
- fonction d’allocation des ressources (production ou financement des
biens et services collectifs);

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- fonction de régulation, c’est-à-dire la stabilisation économique ;
- fonction de redistribution (transferts entre agents économiques).
b) Relations entre politique économique et fonction de l’Etat
La politique économique est en relation avec les trois fonctions de l’Etat
définies par Richard Musgrave (1959), à savoir l’allocation des ressources, la
stabilisation ou la régulation économique et la redistribution des revenus. Elle
peut chercher à infléchir l’allocation des ressources productives réalisée par
le marché (fonction d’allocation), à réguler l’activité économique à court terme
(fonction de régulation ou de stabilisation économique) ou à modifier la
répartition des revenus primaires, jugée trop inégalitaire (fonction de
redistribution).
L’allocation des ressources se fait à travers les investissements publics, les
subventions et la taxation (les mesures d’incitations fiscales) et la
réglementation des activités privées.
La redistribution des revenus se fait au moyen de la fiscalité (imposition des
revenus des personnes physiques par un barème progressif) et des transferts
sociaux.
La stabilisation de la conjoncture se fait par la manipulation des instruments
de la politique budgétaire, de la politique monétaire et de la politique de
change.
Le champ des politiques structurelles couvre deux fonctions, à savoir une
fonction d’allocation des ressources et une fonction de redistribution des
revenus.
La fonction d’allocation des ressources correspond au domaine couvert par
l’Etat en matière de fourniture de biens publics et de fixation des règles
concernant l’allocation des biens privés sur le marché.
La fonction de redistribution concerne la redistribution des revenus issus de
la répartition primaire. En effet, une fois écoulée la production et établie la
distribution primaire des revenus entre les participants à la création du
surplus, l’Etat peut chercher à infléchir la structure de répartition des revenus
existants par la fiscalité et les transferts.
En revanche, le champ de la politique conjoncturelle couvre la fonction de la
stabilisation conjoncturelle. Toutefois, une politique conjoncturelle peut aussi
avoir les effets structurels à moyen et long termes.
1.8. Principes de conduite des politiques économiques
 Deux grands principes caractérisent la conduite des politiques
économiques : le principe de cohérence de Tinbergen et le principe
d’efficience de Mundell.

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 Selon la règle de Tinbergen (1952) et la règle de Mundell (1961), les
instruments de la politique économique doivent être cohérents entre eux
et cohérents avec ses objectifs.
 Pour J.Tinbergen, il faut choisir autant d’instruments qu’il y a
d’objectifs. En effet, pour qu’un ensemble d’objectifs fixes puisse être
réalisé, il convient que le nombre d’instruments indépendants soit au
moins égal au nombre d’objectifs fixes indépendants. Ces objectifs
doivent être quantifiés, par exemple : un taux de d’inflation de 3%, un
taux de chômage de 2,5%.
 Pour Mundell, il faut affecter chaque instrument de politique
économique à la réalisation de l’objectif pour lequel il est plus efficace.
1.9. Comment résoudre un problème par la politique économique?
Pour résoudre un problème économique, c’est-à-dire pour atteindre un objectif
donné, le décideur de la politique économique doit définir les variables
instruments qu’il conviendra d’agir directement. Les variables instruments
sont les variables à manipuler afin d’atteindre l’objectif ou les objectifs visés.
Leurs manipulations ont des effets directement sur les variables
intermédiaires qui vont permettre d’atteindre l’objectif ou les objectifs visé(s).
 La formulation d’une politique économique commence par
l’identification d’un problème ou des problèmes qu’il convient de
résoudre à court terme, à moyen terme ou à long terme.
 Généralement, on part d’un problème principal pour déboucher sur des
problèmes spécifiques.
 Après l’identification du ou des problèmes, on doit par la suite analyser
chacun de ces problèmes.
 L’analyse des problèmes est l’établissement des relations de causes à
effets entre des facteurs négatifs d’une situation existante. Cette analyse
permet de fixer les objectifs notamment l’objectif principal et les objectifs
spécifiques.
 L’objectif principal traduit la raison d’être d’une politique.
 Les objectifs spécifiques traduisent la situation attendue ou les effets
escomptés.
 Pour atteindre les objectifs fixés, on doit disposer d’un certain nombre
d’instruments qu’il convient de manipuler.
 Les instruments sont des variables exogènes, par contre les objectifs
sont des variables endogènes ou expliquées.

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 On peut citer comme variables instruments (instrumentales) ou
variables exogènes ou variables explicatives ou variables
indépendantes, ou régresseurs, ou non aléatoires ou déterminantes :
- le niveau des dépenses publiques ;
- les taux d’impôt ;
- la quantité de monnaie ;
- les taux de change ;
- etc.
Et comme variables objectifs (ou variables endogènes) ou variables expliquées,
ou variables régressant, ou variables dépendantes ou aléatoires ou variables
induites :
- baisse du taux de chômage ;
- plein-emploi ;
- niveau du solde extérieur ;
- baisse du taux d’inflation.
Les variables endogènes sont celles qui prennent naissance à l’intérieur du
système. Elles peuvent prendre différentes valeurs avec des probabilités
données.
Les variables exogènes sont celles qui ne varient pas, mais elles font varier
d’autres variables. Elles sont des variables qui proviennent de l’extérieur.
Entre les variables instruments et les variables objectifs, il existe les variables
intermédiaires.
L’intérêt essentiel de la théorie économique pour le décideur de politique
économique est qu’elle permet de connaître les liens qui unissent les variables
instruments, c’est-à-dire celles que le décideur de la politique économique
désire modifier ou atteindre.
Par exemple si un gouvernement décide de baisser le chômage, on a la
séquence suivante :

De façon générale, le lien entre l’action de l’Etat et les objectifs ultimes de


politique économique se schématise de la manière suivante :

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NGAKOSSO 19
Pour reprendre Keynes, l’économiste doit être « mathématicien, historien,
homme d’Etat, philosophe, dans une certaine mesure … aussi au-dessus de
la mêlée et incorruptible qu’un artiste et pourtant, parfois aussi proche de la
réalité qu’un dirigeant politique » : ce sont ces facultés qui vont lui permettre
de formuler les séquences d’une politique économique donnée.
1.10. Comment formuler une politique économique?
 La formulation de la politique économique passe par une modélisation.
La modélisation est une représentation simplifiée de l’activité qui met
en évidence les instruments sur lesquels les responsables pourront agir
et les objectifs qu’ils cherchent à atteindre.
 Selon Hal R. Varian (2003), la science économique élabore des modèles
de phénomènes sociaux. Le modèle est la représentation simplifiée
d’une réalité. La puissance d’un modèle découle de l’élimination des
détails non pertinents, ce qui permet à l’économiste de se concentrer
sur les aspects essentiels de la réalité économique qu’il essaie de
comprendre.
 La quasi-totalité des approches économiques dominantes s’appuie sur
les modèles formalisés pour comprendre le système économique. On
distingue la démarche hypothético-déductive et la démarche inductive.
 On parle d’une démarche hypothético-déductive lorsque l’on part d’une
théorie pour essayer d’expliquer le monde. Par contre, l’on parle d’une
démarche inductive lorsque l’on part de la description du monde pour
essayer d’en déduire une théorie.
Tout modèle de politique économique comprend trois séries de variables et de
relations :
― des variables exogènes données dont la valeur est fixée d’emblée et
susceptible de changer sous l’effet des décisions de politique
économique (taux de croissance des économies externes) ;
― des variables exogènes instrumentales dont la valeur peut être modifiée
par les centres de décision de politique économique (taux d’imposition) ;
― des variables endogènes ou objectifs dont la valeur résultera de la
conjonction des variables précédentes et dont le niveau ou le taux de
variation seront considérés comme plus ou moins souhaitables pour la
société (plein emploi, solde extérieur, etc.).
Exemple: T = tY + To

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NGAKOSSO 20
Parmi les relations ou équations qu’un modèle de politique économique est
susceptible d’intégrer, on distingue :
— les identités ou relations de définition. Elles définissent des
équivalences du fait même de la définition des variables distinguées
(détermination du déficit budgétaire, détermination du revenu
disponible, etc.). A titre d’exemple :
Y = C + I + G + X - M ; Yd = Y - T ; S = Yd - C
― les équations techniques qui décrivent des relations de types
technologique ou institutionnel et que l’on testera à partir d’un
ensemble de données empiriques (fonction de production, pression
fiscale, etc.) ;
― les équations de comportement qui décrivent la position des agrégats en
fonction d’un ensemble de variables ; on cite :
a) les fonctions de comportement au sens strict telles que les fonctions de la
demande au niveau macroéconomique.
C = Co+cYd ; T = tY + To; M = Mo +mY; I = Io ; G = Go ; X = Xo.
b) les fonctions de préférence ou de satisfaction exprimant les variations de
l’utilité en fonction de différents états possibles de l’économie.
c) les relations d’équilibre qui sont par hypothèse des relations spécifiques. Il
peut s’agir de relations d’équilibre physique, budgétaire, financier, etc.
 Les économistes établissent des relations fonctionnelles et des
corrélations entre les variables, soit en éliminant la dimension
temporelle, soit en introduisant explicitement le temps. Dans le premier
cas, on parle de modèle statique. La statique comparative considère,
quant à elle, la variation intervenant entre deux positions d’équilibre,
mais n’étudie pas la dynamique du passage d’un ensemble de valeurs
d’équilibre à un autre.
 L’introduction explicite du temps sous forme de décalages temporels
dans l’évolution des diverses variables prises en compte conduit à la
construction de modèles dynamiques. L’analyse statique a pour objet
d’établir l’existence ou la non existence d’un équilibre indépendamment
de ce qui s’est produit avant, et de ce qui se produira après.
 L’analyse dynamique a pour objet de découvrir comment l’économie
évolue dans le temps en utilisant des variables se référant à différentes
dates. Il s’agit d’établir une relation entre le passé et l’avenir.
 En politique économique se pose la question du degré d’intervention de
l’Etat. On distingue à cet effet, deux grandes tendances des politiques,
à savoir les politiques d’inspiration keynésiennes et les politiques

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NGAKOSSO 21
d’inspiration néoclassiques. Actuellement, les deux grands courants
sont la Nouvelle Economie Classique (NEC) et la Nouvelle Economie
Keynésienne (NEK).
 Pour les keynésiens, l’Etat doit intervenir pour relancer l’économie par
la création d’un déficit budgétaire qui sera financé par emprunt.
 Pour les néoclassiques, l’intervention de l’Etat est strictement limitée et
encadrée. A cet effet, il doit intervenir dans le cas précis de défaillances
du marché, à savoir le monopole naturel, les biens collectifs et les
externalités. La nouvelle économie keynésienne ajoute à ces défaillances
du marché, le défaut d’information c’est-à-dire l’asymétrie d’information
Conclusion
L’objet de ce chapitre introductif a été de de faire acquérir aux apprenants les
prérequis nécessaires à l’étude de la politique économique. Le décideur de
politique économique étant au centre de cette discipline, nous précisons ici
les principales tâches qui lui incombent.
Les tâches du décideur de politique économiques peuvent être classées en six
catégories (Bénassy-Quéré, et al, 2021) :
- Définir et appliquer les règles du jeu économique. Il s’agit de la
régulation économique qui consiste à fixer les normes et de les faire
appliquer afin de façonner la structure des marchés ;
- Prélever l’impôt et dépenser ;
- Emettre et gérer la monnaie. Il s’agit du choix d’un régime monétaire et
de change ;
- Assurer la responsabilité dans la production des biens et services
notamment les biens publics, la fourniture des soins de santé, assurer
la responsabilité du système éducatif, etc. ;
- Résoudre les problèmes ou influencer les décisions privées ;
- Négocier les accords avec les autres pays.

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