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INTRODUCTION

1
« La nécessité d’un pouvoir disciplinaire est plus impérieuse dans le secteur public que
dans l’entreprise privée. C’est la garantie de la bonne exécution du service public, de
l’efficacité administrative, d’une saine administration et enfin ce qui est primordial et si rare
aujourd’hui, de la confiance du public dans l’Administration »1. Pour éviter que l’exécution
du service public soit souvent interrompue de façon volontaire ou involontaire dans les
administrations, faisant par-là obstacle à la satisfaction de l’intérêt général, il revient donc
aux détenteurs du pouvoir disciplinaire de veiller à ce que l’application du droit disciplinaire
de la fonction publique qui a pour objet « d’assurer, maintenir et, si besoin est, de rétablir
l’ordre au sein »2 de la fonction publique soit effective. Si « la discipline est mère du
succès »3, encore faut-il pouvoir la faire respecter. C’est pourquoi la sanction reste la
principale solution pour instaurer ce respect. La sanction est une punition, une peine infligée
par une autorité à l’auteur d’une faute. C’est dans ce sens que Jacques-Henri Robert considère
la sanction comme « un mal infligé à une personne comme conséquence d’un acte contraire
au droit »4. Pour le Dictionnaire Larousse, la sanction est « une mesure répressive infligée par
une autorité pour l’inexécution d’un ordre, l’inobservation d’un règlement, d’une loi »5. La
sanction est disciplinaire lorsqu’elle se rapporte à la « discipline d’un corps, d’une profession
ou d’une entreprise »6, et surtout lorsque le travailleur au sens large transgresse « des
obligations professionnelles résultant de la discipline qui le régit »7. Ainsi, la sanction
disciplinaire « est considérée comme un instrument en vue, non seulement d’assurer la
répression d’une infraction disciplinaire, mais aussi de corriger en enlevant l’envie de la
récidive »8.

Dans l’Administration, il existe plusieurs sanctions disciplinaires qui dépendent souvent


de la fonction publique d’appartenance et de la faute commise. Au sein de la fonction
publique de l’Education, compte tenu du caractère spécifique de la mission qui leur est
dévolue, les fonctionnaires sont exposés le plus souvent aux sanctions majeures pour des
fautes que les autres fonctions publiques réprimandent par des sanctions mineures. Ces
sanctions majeures encourues par les fonctionnaires du secteur éducation sont l’abaissement

1
FOUGÈRE (L), La Fonction Publique, Bruxelles, Institut international des sciences administratives, 1966, p.
341
2
GARANT (P), « Le droit disciplinaire de la fonction publique », Relations industrielles, Vol.27, nº3, 1972,
p.457
3
Eschyle, Les sept contre Thèbes, trad. Grosjean, in Théâtre, Gallimard, 1967
4
ROBERT (J-H), Droit pénal général, Paris, PUF, 6ème éd., 2005, p. 54
5
Cornu (G), Vocabulaire juridique, 12e éd., PUF, 2018
6
Ibid.
7
Ibid.
8
GARANT (P), op. cit., p.457

2
de l’échelon, l’abaissement de grade, l’abaissement de classe, l’abaissement de hiérarchie, la
révocation sans suspension des droits à pension, la révocation avec suspension des droits à
pension et l’exclusion temporaire de fonctions qui est privative des droits à la rémunération 9.
Quand on parle de la privation des droits à la rémunération, on fait tout simplement allusion à
la suspension de la solde des fonctionnaires.

La définition des concepts est une nécessité dans toute investigation scientifique afin de
lever toute équivoque. C’est pourquoi Emile Durkheim souligne que « la première démarche
du sociologue doit donc être de définir les choses dont il traite, afin que l’on sache et qu’il
sache bien de quoi il est question »10. Ainsi, nous allons clarifier les concepts suivants :
Suspension, Solde et Fonctionnaires.

Dans le langage courant, le terme fonctionnaire désigne l’ensemble du personnel de


l’administration publique. Mais en réalité, les fonctionnaires ne représentent qu’une partie des
agents de l’administration. Un fonctionnaire est titulaire de son grade et il participe de façon
permanente à l’exécution du service public. Pour l’article premier du statut général des
fonctionnaires11, ces derniers sont toutes les personnes qui, intégrées dans un corps de la
hiérarchie administrative et nommées dans un emploi permanent, concourent au
fonctionnement d’un service public de l’Etat. En d’autres termes, on entend par fonctionnaire,
tout agent de l’Etat ou d’une autre personne morale de droit public, nommé dans un emploi
permanent et titularisé dans un grade de la hiérarchie des cadres d’une administration. Les
fonctionnaires dont il s’agit ici sont notamment certains agents civils de l’Etat, les agents
civils de la Fonction publique parlementaire, de la Fonction publique hospitalière, de la
Fonction publique de l’Education nationale et de la Fonction publique locale. Le personnel
militaire, les magistrats, le personnel de la sécurité pénitentiaire et les agents contractuels de
l’Etat sont à exclure du champ de cette étude. On peut donc dire que les enseignants des
établissements scolaires publics sont des fonctionnaires.

Pour comprendre ce qu’est la solde, nous devons nous référer à la notion de solde de
base. La solde de base et ses accessoires sont les composantes de la rémunération ou encore le
traitement du fonctionnaire comme le précise l’alinéa 2 de l’article 2 du décret
nº0404/PR/MBCP/MFPRA du 20/08/2015 fixant le régime de rémunération des agents civils

9
Direction Générale de l’Administration et de la Fonction Publique, La discipline dans la fonction publique de
l’Etat, Paris, La Documentation française, 1998, p.49
10
DURKHEIM (E), Les règles de la méthode sociologique, Paris, PUF, 1983, p. 127
11
Loi nº8/91 du 26 septembre 1991 portant statut général des fonctionnaires

3
de l’Etat et portant reclassement12. La solde est donc la paie octroyée aux fonctionnaires
civils. Elle est assimilée au salaire que perçoit un travailleur du secteur privé. Pour dire
simple, la solde est la contrepartie financière d’un travail ou d’un service effectué.

Le terme suspension, quant à lui, signifie interrompre quelque chose ou encore cesser
momentanément de faire quelque chose. La suspension de la solde désigne alors le fait de
cesser momentanément le versement de la paie d’un fonctionnaire. De ce fait, il est donc privé
de sa solde pour un moment.

La suspension de la solde est la sanction disciplinaire qui est le plus souvent prononcée
pour réprimander les comportements fautifs des fonctionnaires grévistes et surtout pour
ramener l’ordre dans l’administration. Cependant, cette suspension qui doit se faire pour un
temps bien déterminé13 devient souvent presque éternelle. Ce qui engendre des conséquences
sur la situation sociale et financière des fonctionnaires. Face aux incompréhensions relatives à
durée de la suspension de leurs soldes, les fonctionnaires décident souvent d’utiliser à
nouveau la grève pour revendiquer leurs droits à la rémunération14. Ainsi, la suspension de la
solde qui est prononcée pour sanctionner les « mauvais » grévistes peut devenir l’origine
d’une grève. Le fonctionnement de l’administration revient alors à être perturbé et la bonne
exécution du service public interrompue. C’est au regard des enjeux relatifs à la suspension de
la solde de ces agents publics que nous avons voulu réaliser cette étude.

Historiquement, au Ministère de l’Education nationale où nous avons effectué notre


stage d’une durée de trois mois, la suspension de la solde a toujours été prononcée contre les
agents grévistes. C’est ce qui avait été fait le 30 janvier 2017 où, pour faire face à une grève
dans laquelle les grévistes avaient perturbé l’année scolaire15, le ministre Florentin
Moussavou prenait une note circulaire dans laquelle il avait prescrit la suspension immédiate
de solde de ceux-ci. De même, Le ministre Patrick Mouguiama-Daouda avait précisé dans le
12
Annexe I
13
Article 130 de la Loi nº08/91 du 26 septembre 1991 portant statut général des fonctionnaires : « L’exclusion
temporaire de fonction est privative de toute la rémunération. Toutefois, durant cette période le fonctionnaire
continue à bénéficier des prestations familiales.
Dans le cas des sanctions mineures, l’exclusion temporaire de fonction ne peut être prononcée que pour une
durée de un à deux mois.
Dans le cas des sanctions majeures, elle ne peut être prononcée que pour une durée de trois à six mois. La
période de l’exclusion temporaire de fonction n’est pas prise en compte pour l’avancement ».
14
Ivembe, Sydney, « Pour suspension non justifiée de leurs soldes les enseignants du Centre International
d’enseignement professionnels de Nkok rentrent en grève », gabonactu.com, 29 juin 2022,
https://gabonactu.com/pour-suspensin-non-justiffiée-de-leurs-soldes-les-enseignants-du-centre-internationnal-
denseignement-professionnels-de-nkok-rentrent-en-greve/, (consulté le 27 février 2023).
15
Dzonteu, Désiré-Clitandre, « Education nationale : Florentin Moussavou passe à la sanction »,
Gabonreview.com, 1 février 2017, https://www.gabonreview.com/education-nationale-florentin-moussavou-
passe-a-la-sanction/ (consulté le 27 février 2023).

4
communiqué du 6 décembre 2021 que « seuls les enseignants en poste recevront leurs
salaires. Les autres seront en fonction de leurs positions traités ainsi qu’il suit : les enseignants
en grève, paiement des allocations familiales et la prime de logement. Les enseignants n’ayant
pas regagné leurs postes d’affectation, suspension de la solde. Les enseignants absents depuis
au moins 3 mois, lancement de la procédure de radiation ». Encore un peu plus en arrière, en
2015, La même sanction disciplinaire avait été aussi infligée aux fonctionnaires grévistes par
le gouvernement. En effet, à l’occasion d’une conférence de presse donnée par le porte-parole
de la présidence de cette époque, il avait été annoncé la suspension des salaires de
fonctionnaires grévistes, particulièrement ceux de l’Education nationale16 qui avaient
déclenché une grève illimitée.

La suspension de la solde est une sanction disciplinaire d’origine légale. C’est le statut
général des fonctionnaires qui (Loi nº8/91 du 26 septembre 1991) la prévoit en son article 11
alinéa 2. Cet article dispose que « le fonctionnaire contrevenant aux dispositions ci-dessus
s’expose à la privation de son traitement dans les conditions et selon les modalités précisées
par voie réglementaire ». Suite à cette volonté du législateur de sanctionner les
comportements fautifs des fonctionnaires par la suspension de leurs soldes, le gouvernement
a pris deux décrets pour encadrer cette sanction. Le premier c’est le décret
nº254/PR/MFPRA/MFBP du 1er mars 199417. Ce décret a pour objet de réglementer les
conditions et les modalités de privation de la rémunération des personnels de l’Etat en cas
d’inobservation de certaines obligations de service. Le second décret, le décret
nº216/PR/MFPMSPRE/MBCP18, quant à lui a été adopté le 17 septembre 2018 pour
règlementer les modalités de privation de la rémunération d’un agent de l’Etat.

L’intérêt de notre étude est double. D’abord sur sa dimension théorique, cette étude
apportera plus amples explications sur le régime juridique de la suspension de la solde. En
l’état actuel de la doctrine gabonaise sur la question, notre étude demeure unique. Elle
pourrait être alors une référence pour des travaux futurs relatifs à cette thématique. Et ensuite,
sur sa dimension pratique, les résultats de notre étude pourraient être assez utiles aux
détenteurs du pouvoir disciplinaire pour le renforcement de leurs connaissances sur la
question et surtout aux fonctionnaires pour les aider à mieux comprendre les mécanismes de

16
Laura, « Gabon : le gouvernement décide de suspendre les salaires des fonctionnaires grévistes »,
french.china.org.cn, 25 mars 2015, https://:french.china.org.cn/foreign/txt/2015-03/25/content_35145946.htm
(consulté le 27 février 2023).
17
Annexe II
18
Annexe III

5
la mise en œuvre de la suspension de leurs soldes, puis connaitre les moyens qui sont les
leurs pour mieux se défendre.

Ainsi, il nous revient de se demander quelle est la procédure de la suspension de la


solde des fonctionnaires à l’Education Nationale ? Est-ce qu’elle présente des garanties aux
fonctionnaires ? Si non, comment peut-elle être contestée ?

Pour tenter de répondre à notre problématique, il a été formulé l’hypothèse selon


laquelle la suspension de la solde est encadrée par une procédure légale qui présente des
garanties de défense aux fonctionnaires.

Pour traiter le sujet et répondre aux questionnements émis, une recherche documentaire
a été menée. Celle-ci a été caractérisée par une certaine difficulté à accéder aux documents
officiels.

L’objectif de cette recherche était de mettre en lumière la façon dont la suspension de la


solde des agents publics du Ministère de l’Education Nationale est mise en œuvre.

Il sera vu dans un premier temps que la suspension de la solde d’un fonctionnaire doit
obéir à une procédure (Première partie) et que, dans le second temps, lorsque cette procédure
n’est pas respectée, un contentieux nait (Deuxième Partie).

6
PREMIERE PARTIE : LA PROCEDURE DE LA SUSPENSION DE LA SOLDE

7
En son sens strict, le terme "procédure" désigne : un « Ensemble des règles ayant pour
objet l’examen par un organe des questions qui lui sont soumises et qui décrivent la manière
de procéder et les formalités à remplir »19. Pour dire simple, une procédure est une série de
formalités requises pour la validité d’un acte. En effet, la suspension de la solde étant une
décision disciplinaire et donc un acte administratif, elle est actée au terme de
l’accomplissement d’une procédure prévue par les textes législatifs et règlementaires en
vigueur. Cette décision disciplinaire n’est envisagée que dans la mesure où certains faits ont
été réalisés. Il s’agit des faits générateurs de la suspension de la solde (chapitre 1) qui
déclenche la mise en œuvre de sa procédure (chapitre 2).

CHAPITRE 1 : LES FAITS GENERATEURS DE LA SUSPENSION DE LA SOLDE

19
Salmon (J), Dictionnaire de droit international public, Bruxelles, 2001, p. 886.

8
L’article 17 de la loi nº8/91 du 26 septembre 1991 portant statut général des
fonctionnaires dispose que « Toute faute commise par un fonctionnaire dans l’exercice de ses
fonctions, ainsi que toute condamnation judiciaire en matière pénale, l’expose à des sanctions
disciplinaires ». En clair, une sanction disciplinaire telle que la suspension de la solde ne doit
être prononcée contre un fonctionnaire que si ce dernier commet une faute à l’occasion de son
service (section 1). La suspension de la solde peut également résulter de la suspension des
fonctions (section 2).

Section 1 : La commission d’une faute disciplinaire

La commission d’une faute disciplinaire est constatée lorsque le fonctionnaire adopte


des comportements matérialisant un manquement à des obligations professionnelles
(paragraphe 1) préexistantes prévues par le Statut général, le statut particulier, une charte de
déontologie ou considérée par le juge administratif comme étant une faute suffisamment
grave pour justifier une procédure disciplinaire20. L’exercice du droit de grève peut également
constituer une faute disciplinaire (paragraphe 2) lorsque le principe de continuité du service
public et le principe de la liberté du travail sont entravés.

Paragraphe1 : Les manquements aux obligations professionnelles

Les manquements aux obligations professionnelles liées à la qualité d’agent public (A)
et celles liées à l’exécution du service (B) constituent des fautes disciplinaires.

A. Les manquements aux obligations liées à la qualité d’agent public

20
AUBIN (E) et NIVERT (N), Le droit disciplinaire dans la fonction publique, 1er éd., Paris, Gualino-lextenso,
2021, p.17

9
Aux termes de l’article 7 de la loi nº001/2005 du 4 février 2005 portant statut général
de la fonction publique « Ont qualité d’agent public, les personnes recrutées pour exercer une
ou plusieurs activités d’intérêt général (..) ». C’est pour cette raison que l’agent public ne doit
pas être considéré comme tout autre travailleur. En effet, la qualité d’agent public est assortie
de certaines obligations telles que l’obligation de ponctualité et l’obligation d’assiduité. La
ponctualité consiste à respecter les horaires de travail, c’est-à-dire arriver et quitter son
service aux heures réglementaires. C’est ainsi que l’article 42 alinéa 2 de la loi nº001/2005
prévoit que l’agent public est tenu « de respecter les horaires de travail, sous réserve des
nécessités de services l’obligeant à travailler au-delà des horaires réglementaires ». C’est aussi
dans ce sens que s’oriente l’article 38 alinéa 1er de la loi nº14/2005 du 8 aout 2005 portant
code de déontologie de la fonction publique lorsqu’il dispose que : « l’agent public a
l’obligation de respecter les horaires de service, d’observer les devoirs liés à sa fonction et
d’avoir un grand intérêt pour le service public ». Cumulativement à cette obligation de
ponctualité, l’agent public est aussi astreint à être assidu. C’est-à-dire qu’il doit être
régulièrement présent au poste.

Le fait d’être tout le temps absent et d’arriver régulièrement en retard à son poste de
travail constitue une faute, une carence professionnelle comme l’indique l’article 55 de la loi
nº20/92 du 8 mars 1993 fixant les statuts particuliers des fonctionnaires du secteur Education.
Pour ses absences et ses retards répétés et injustifiés la loi nº08/91 prévoit en son article 129
l’exclusion temporaire de fonction comme sanction disciplinaire pouvant être infligée au
fonctionnaire. C’est d’ailleurs la même sanction qui avait été infligée à un agent d’entretien
ayant commis des retards répétés et ayant eu un comportement général inadapté persistant en
dépit de nombreuses mises en garde21. L’article 130 du Statut général des fonctionnaires
précise que l’exclusion temporaire de fonctions est privative de toute la rémunération. En un
mot, lorsque les obligations de ponctualité et d’assiduité ne sont pas observées, une faute
disciplinaire est commise. Par conséquent, le fonctionnaire s’expose à une sanction
disciplinaire qui peut être la suspension de sa solde. Mais en dehors de ces deux obligations
professionnelles, d’autres obligations qui sont liées à l’exécution du service entrainent
également la suspension la solde lorsqu’elles ne sont pas respectées.

B. Les manquements aux obligations liées à l’exécution du service

21
CAA Bordeaux, 1er décembre 2015, Mme B., 14BX02812

10
« Ont qualité d’agent public permanent, les personnes nommées à un emploi permanent
ou non permanent d’un service public et titularisées dans un corps de la hiérarchie statutaire,
pour assurer à titre permanent et à temps complet ou partiel, directement et personnellement,
une tâche relevant d’une mission de service public, conformément au statut dont elles
relèvent ». Il résulte clairement de ces dispositions citées de l’article 10 de la loi nº001/2005
que les fonctionnaires sont recrutés pour exercer une ou plusieurs activités du service public
et, pour bien le faire ils sont contraints d’observer certaines obligations car ils sont dans un
cadre statutaire. Ainsi, pour la bonne exécution du service public, le fonctionnaire doit
occuper l’emploi auquel il est nommé et son poste d’affectation et remplir personnellement
les charges de son emploi. En effet, comme tout travailleur, le fonctionnaire recruté dans un
poste de travail doit l’occuper continuellement et effectuer, personnellement, ses tâches. Un
fonctionnaire qui n’occupe pas, pendant longtemps, son emploi, ou qui refuse de rejoindre son
poste commet une faute disciplinaire. Par conséquent, il s’expose à la suspension de sa solde
pour abandon de poste comme le prévoit l’article 11 de la Loi nº8/1991 du 26 septembre
1991. Le décret nº254/PR/MFPRA/MFBP du 1er mars 1994 réglementant les conditions et
modalités de privation de la rémunération des personnels de l’Etat en cas d’inobservation de
certaines obligations de service conforte les dispositions de l’article précédemment cité en
prévoyant que l’inobservation des obligations de service telles que l’obligation de rejoindre,
dès sa nomination à un emploi permanent de la fonction publique ou à une fonction de
responsabilité, son poste d’affectation et l’obligation d’assurer personnellement de façon
permanente son service, est sanctionnée par une privation de toute la rémunération (art. 2).

De même, l’article 2 alinéa 1 du décret nº216/PR/MFPMSPRE/MBCP du 17 septembre


2018 réglementant les modalités de privation de la rémunération d’un agent public dispose
que « L’agent public doit rejoindre, dès sa nomination, son poste d’affectation et assurer
personnellement de façon permanente son service ». Et, il prévoit en son alinéa 2 que
« L’agent public contrevenant aux dispositions de l’alinéa ci-dessus s’expose à la privation de
son traitement dans les conditions fixées par le présent décret ». C’est ainsi que, dans une
ordonnance de référé du conseil d’Etat gabonais22, le juge a estimé que le fonctionnaire qui
avait déserté son poste de travail depuis plus de trois ans et qui n’avait toujours pas repris son
service ne pouvait prétendre à une juste rémunération et que c’était à bon droit que l’Etat
gabonais avait pris la mesure de le priver de sa solde.
On retient alors que la suspension de la solde d’un fonctionnaire est envisageable lorsque ce

22
CE, juge des référés, 16 juin 2017, nº007/2016-2017, TOPE c/ l’Etat gabonais

11
dernier manque à ses obligations professionnelles en cumulant des absences répétées et
injustifiées ou encore en abandonnant son poste. Ces motifs de la suspension de la solde ne
sont pas les seuls car la participation à un mouvement de grève peut aussi constituer une faute
disciplinaire lorsqu’il ne respecte pas certaines conditions.

Paragraphe 2 : la participation à un mouvement de grève

Au Gabon comme partout ailleurs, les fonctionnaires grévistes peuvent encourir des
sanctions disciplinaires (B) à l’occasion de l’exercice de leur droit de grève (A).

A. L’exercice du droit de grève dans la fonction publique.

Selon André Maurin, la grève « est une cessation collective du travail en vue de soutenir
une (ou des) revendication(s) professionnelle(s) »23. Pour la loi nº18/92 du 18 mai 1993 fixant
les conditions de constitution et le fonctionnement des organisations syndicales des agents de
l’Etat (art. 18), « Est qualifié de grève, tout arrêt collectif et concerté du travail, tout
comportement collectif de nature à perturber le fonctionnement normal d’un service, décidés
pour défendre une revendication professionnelle ».

Mais il nous est important de mentionner que l’exercice du droit de grève des
fonctionnaires était, autrefois, condamné par la doctrine et la jurisprudence.24 En effet, les
textes juridiques de cette époque étaient muets sur le problème. André Maurin précisait
également que « Pendant la première moitié du XXe siècle, la grève est illicite »25. Et, le juge
administratif de cette époque considérait le fait de grève à un abandon de poste collectif26.
C’est par exemple le cas, en France, des fonctionnaires qui avaient été révoqués pour avoir
participé à la grande grève des postes de mai 1909 et celle 1934 (CE 7 août 1909, Winkell ;
CE 22 octobre 1937, Dlle Minaire et autres)27. La jurisprudence Winkell considérait que
23
MAURIN (A), Droit administratif, Paris, Dalloz-Sirey, 2018, p.318
24
Guillien (R) et VINCENT (J), Lexique des termes juridiques, 17e éd., Paris, Dalloz, 2010, p.359 et 360
25
MAURIN (A), Droit administratif, Paris, Dalloz-Sirey, 2018, Chap. 4, La carrière dans la fonction publique ;
p. 306-358
26
CLOUZOT (L), « l’abandon de poste en droit de la fonction publique », R.F.D.A. janvier-février 2104, p.123
et suivant.
27
CE 7 août 1909, Winkell, Lebon 826 ; CE 22 octobre 1937, Dlle Minaire et autres, concl.Lagrange : la haute
assemblée rejette la demande qui lui est faite d’annuler un arrêté du sous-secrétaire d’Etat des Postes et

12
l’agent qui se mettait en grève s’excluait par là même du service. Ce problème fut solutionné
avec le Préambule de la Constitution française du 27 octobre 1946, d’après lequel « Le droit
de grève s’exerce dans le cadre des lois qui le réglementent ». De même, il est admis, au
Gabon, dans les dispositions du préambule de la Constitution du 26 mars 1991 que le droit de
former des syndicats est garanti à tous dans les conditions fixées par la loi. Ainsi, aux termes
de l’article 68 du Statut général de le Fonction publique, l’exercice du droit de grève est
reconnu aux agents publics dans les limites fixées par les textes en vigueur à l’exclusion des
agents occupant des emplois hiérarchiques, des militaires des forces de défense, des agents
des forces de sécurité et des agents de l’administration pénitentiaire. A la lumière de cet
article on peut retenir que l’exercice du droit de grève dans la fonction publique a des limites.
La circulaire nº0144/MEFPTFP/CAB-M du 2 mars 2021 sur l’exercice du droit de grève 28
précise que « Quoique la liberté syndicale soit constitutionnellement protégée, ce droit n’est
pas absolu dans le secteur public, il peut souffrir de limitations ou de restrictions dérogatoires
dans la limite de la finalité de l’action publique ». Des limites à l’exercice du droit de grève, il
y a tout d’abord le préavis de grève qui est un avertissement donné au ministre responsable.

Ainsi, la grève, avant qu’elle ne soit commencée, un avertissement doit être donné à
l’autorité responsable de l’administration. C’est ce que précise l’article 19 de la loi nº18/92 en
disposant que : « Tout usage du droit de grève doit être précédé d’un préavis émanant d’une
ou de plusieurs organisations syndicales ». Ce préavis est donné en vue de garantir l’intérêt
général et de mettre en place un service minimum (art.69 al. 1 de la loi nº001/2005).

Le service minimum est la seconde limite de l’exercice du droit de grève. En effet,


lorsqu’il y a grève dans la fonction publique, il ne doit pas y avoir un arrêt total du travail. Un
service minimum doit être mis en place comme le prévoit l’article 22 de la loi nº18/1992.
Tout ceci en respect du principe de continuité du service public énoncé par l’article 7 alinéa 2
de la loi nº14/2005 qui dispose en substance que le droit de grève ne doit pas, dans son

Télégraphes concernant un conducteur de perforeuses gréviste, lequel comme plusieurs centaines de ces
collègues, avait été révoqué sans communication de son dossier. Le juge administre de cette époque assimile
alors le fait de grève à un abandon de poste collectif et considère que ceux qui s’y livrent commettent une faute
individuelle d’une telle gravité qu’elle peut être sanctionnée, y compris par la révocation, sans les garanties
d’une quelconque procédure disciplinaire. La motivation de cette décision explicite deux arguments à ce refus
d’admettre la licéité de la grève dans les services publics : d’une part, la singularité des agents publics et leur
soumission hiérarchique, d’autre part, les nécessité d’une « continuité essentielle à la vie nationale » laquelle,
implicitement mais sûrement, est alors conçue comme absolue et consubstantielle à l’idée même de service
public lequel, par nature , ne pourrait admettre quelque interruption que ce soit ; CE, 22 octobre 1937, Dlle
Minaire et autres : « en se mettant en grève, les agents ne commettent pas seulement une faute individuelle mais
ils se placent eux même par un acte collectif en dehors de l’application des lois et règlements édictés afin de
garantir l’exercice des droits qui leur appartiennent à l’égard de la puissance publique ».
28
Annexe IV

13
exercice, provoquer une interruption totale ou complète du service public. Comme on peut le
voir dans l’annexe V, le Conseil d’Etat gabonais a considéré que le fait de ne pas avoir mis
en place un service minimum lors d’une grève constitue une faute disciplinaire.

En dernier lieu nous avons le principe de la liberté du travail d’autrui. En effet, en vertu
de ce principe, chaque travailleur a le droit d’exercer ses tâches sans être perturbé. Le
travailleur a également le droit de ne pas prendre part au mouvement de grève et, les grévistes
doivent respecter son choix. C’est en ce sens que l’article 24 de loi nº18/1992 dispose que «
Les agents en grève doivent respecter le principe de la liberté du travail. Ils ne doivent en
aucun cas empêcher l’accès aux lieux de travail des personnels non-grévistes et ceux chargés
d’assurer le service minimum ». Le non-respect de toutes ces exigences légales et
l’observation de certains comportements malveillants durant la grève engendrent des
conséquences.

B. Les conséquences des agissements observés dans la grève

Les conséquences de la participation à la grève et du non- respect des exigences de


l’exercice du droit de grève s’observent respectivement au niveau de la rémunération du
gréviste et sur le plan disciplinaire.

S’agissant de la rémunération, il faut tout d’abord rappeler qu’un fonctionnaire ne peut


la percevoir en totalité que s’il a accompli convenablement et sans interruption les tâches qui
lui ont été données comme le dit clairement l’article 78 de la loi nº001/2005 : « L’agent public
a droit, après service fait, à une juste rémunération ». À travers les dispositions de cet article,
on en déduit que, les grévistes, en s’abstenant de tout travail, ne devraient percevoir aucune
rémunération pendant les jours de grève. En effet, « Les journées de grève ne sont pas
rémunérées. Seuls sont versés aux agents en grève les prestations familiales, les suppléments
pour charge de famille et l’aide au logement » (art. 25 de la loi nº18/92).

Pour les conséquences du non-respect des exigences du droit de grève, des sanctions
disciplinaires peuvent être infligées aux contrevenants. En effet, les fonctionnaires grévistes
sont sanctionnés lorsque leurs comportements et leurs agissements peuvent être constitutifs
d’une faute grave pour manquement aux règles relatives à la déontologie et l’éthique qui leur
incombent. Ici, la faute grave se définit comme une faute d’une gravité particulière, qui révèle

14
l’intention de nuire de son auteur. Aux termes de la circulaire nº0144/MEFPTFP/CAB-M du
2 mars 2021, la faute grave peut revêtir les cas suivants : Entrave à la liberté de travail ;
Obstruction de l’accès du lieu de travail ; Sabotage de l’outil de travail ; Destruction ou
dégradation de biens ; Communication d’informations confidentielles ; Troubles à l’ordre
public ; Participation à une grève déclenchée en dehors des règles de forme ; Mise en danger
de la vie d’autrui ; etc. La même circulaire précise que la faute grave est passible de sanction
majeure infligée sans préjudices des poursuites judiciaires éventuelles.

Parmi les sanctions majeures prévues à l’article 129 de la loi nº8/91 l’exclusion
temporaire des fonctions pour une durée de trois à six mois en fait partie. Et nous savons que
pendant l’exclusion temporaire de fonctions, le fonctionnaire est privé de toute sa
rémunération comme le précise l’article 130 de la loi précité qui dispose que : « L’exclusion
temporaire de fonctions est privative de toute la rémunération.

Toutefois, durant cette période le fonctionnaire continue à bénéficier des prestations


familiales ». En un mot, la solde d’un fonctionnaire gréviste peut être suspendue lorsque ce
dernier ne respecte pas les exigences relatives à l’exercice du droit de grève. En somme, la
participation à une grève peut être source d’une suspension de la solde tout comme la
suspension des fonctions.

Section 2 : La suspension des fonctions

La suspension des fonctions n’est pas à confondre avec l’exclusion temporaire de


fonctions qui est une sanction disciplinaire. La suspension des fonctions est « une mesure
conservatoire prise dans l’intérêt du service et destinée à écarter temporairement un
fonctionnaire du service en attendant qu’il soit statué disciplinairement ou pénalement sur sa
situation»29.
L’étude de la suspension implique au préalable d’en préciser les conditions d’application
(paragraphe 1) et ensuite voir ses effets (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Les conditions d’application de la suspension

29
CE, ass, 13 juillet 1966, Féd. Édu. Nat. Et synd. Gén. Nat. (CFTC) : Lebon, p.497 ; AJDA 1967, p.51, concl.
Rigaud

15
La suspension des fonctions est prononcée lorsque les faits reprochés au fonctionnaire
présentent un caractère suffisant de vraisemblance (A) et de gravité (B).

A. La vraisemblance des faits

Pour suspendre un agent public de ses fonctions, il faut nécessairement que les faits qui
lui sont reprochés aient un caractère de vraisemblance. La vraisemblance désigne le caractère
ou la force de ce qui est vraisemblable. Est vraisemblable ce qui semble vrai, sauf preuve de
contraire, ce qui parait être conforme à la vérité ou qui en comporte toutes les apparences. La
suspension des fonctions ne doit être prononcée contre un fonctionnaire que si les faits qu’on
lui reproche semblent vrais. La faute pour laquelle la décision a été prise ne peut résulter de
simples rumeurs30. C’est ainsi que le Conseil d’Etat français, en 2018, avait considéré que
compte tenu du retentissement des allégations au sein d’une université, les faits de
harcèlement moral et sexuel reprochés à un professeur des Universités étaient vraisemblable
et donc la décision de sa suspension demeurait légale31.

De plus, comme le précise Emmanuel AUBIN et Nirmal NIVERT, « La vraisemblance


des faits à l’origine de la suspension doit avoir un caractère suffisant »32. En effet, il ne suffit
pas que les faits reprochés à un fonctionnaire aient un caractère de vraisemblance pour qu’il
soit suspendu. Il faut absolument que ce caractère de vraisemblance soit vraiment suffisant.
Raison pour laquelle le Conseil d’Etat français avait rejeté la demande d’une commune
tendant à l’annulation d’un jugement qui avait annulé l’arrêté suspendant une secrétaire de
mairie. Les griefs articulés à son encontre ne présentaient pas un caractère de vraisemblance
suffisant33. Par contre, dans une autre affaire, le ministre de l’intérieur avait eu raison de
suspendre un contrôleur principal des transmissions de ses fonctions car « les faits relevés à sa
charge présentaient, contrairement à ce qu’il affirme, un caractère suffisant de vraisemblance
et de gravité pour justifier une telle mesure »34. Donc la suspension d’un fonctionnaire
nécessite que les faits qui lui sont reprochés aient un caractère suffisant de vraisemblance.
Mais il faut également que ces faits présentent une certaine gravité.

30
CE, 7 septembre 1945, Morrie
31
CE 1er et 4e ch.-r., 18 juillet 2018, nº418844, publié au recueil Lebon
32
Aubin (E) et Nivert (N), Le Droit disciplinaire dans la fonction publique, op. cit, p. 105
33
CE, 2 mars 1979, Cne d’Asinières-sur-Oise : Lebon, p.92
34
CE, 11 juin 1997, nº142167, Nevez : Lebon, Tables, p.905

16
B. La gravité des faits

Un fonctionnaire ne peut être suspendu de ses fonctions que si les faits qui lui sont
reprochés revêtent un caractère grave. En effet, lorsque la faute commise par un fonctionnaire
est d’une certaine gravité et que celle-ci perturbe le bon fonctionnement du service, son
maintien dans ledit service est alors remis en cause. Par conséquent, la suspension de ses
fonctions reste la solution envisagée en attendant qu’une décision disciplinaire soit prononcée
contre lui. C’est ce qui résulte de l’article 131 du statut général des fonctionnaires lorsqu’il
dispose que « En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu’il s’agisse d’un
manquement à ses obligations professionnelles ou d’une infraction de droit commun, et s’il
est estimé que le maintien en service de l’intéressé est inopportun ou peut provoquer des
perturbations, celui-ci, en attendant sa comparution devant un conseil de discipline, peut être
immédiatement suspendu de ses fonctions par décision du ministre responsable, du
gouverneur de province ou du chef de mission diplomatique ou consulaire ».

A la lumière de cet article, la faute grave commise par l’agent public peut s’agir de
manquements aux obligations professionnelles comme le fait par exemple « de s’être à
plusieurs reprises absenté du service sans autorisation et d’avoir, par deux fois, refusé
d’exécuter les tâches qui lui étaient confiées »35 ou d’une infraction de droit commun. Dans ce
dernier cas, on relève par exemple, dans un arrêt du Conseil d’Etat gabonais (voir annexe VI),
qu’un Inspecteur des Douanes avait été suspendu de ses fonctions parce qu’il avait détourné
les deniers publics36. On retient finalement qu’un fonctionnaire ne peut être suspendu de ses
fonctions que s’il a commis une faute grave37 mais aussi que si celle-ci revêt un caractère
suffisant de vraisemblance. A la suite de la suspension des fonctions des effets sont produits.
35
CE, 7nov. 1986, nº59373, Edwige : AJDA 1987, p. 286
36
CE, 26 avril 2019, Léon GWA c/ Etat gabonais
37
CAA Douai, 31 janvier 2019, req. nº 17DA00621 : Un adjoint technique territorial au sein d’une région a été
suspendu de ses fonctions en raison de son comportement dangereux lors d’un déplacement professionnel et
pour avoir abandonné le véhicule de service sur la voie d’arrêt d’urgence d’une autoroute. Or, l’article de la loi
du 13 juillet 1983 qui prévoit la possibilité de suspendre un fonctionnaire auteur d’une faute grave, s’applique
seulement si les faits imputés à l’intéressé présentent un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité à la
date de la mesure de suspension. En l’espèce, le premier reproche fait à l’agent et qui concernait sa manière de
conduire un véhicule de service, ne présentait pas, en tout état de cause, un degré de gravité justifiant le
prononcé d’une suspension. S’agissant du second reproche, à savoir l’abandon par l’agent d’un véhicule de
service sur le bord d’une autoroute, celui-ci avait alerté l’administration, dès son retour à son domicile, de la
panne de la voiture. S’il n’a pas verrouillé ce véhicule et a laissé la clé sur le contact, cette négligence ne
pouvait, dans les circonstances de l’espèce, constituer une faute d’une gravité suffisante pour justifier une
suspension. Ainsi, litigieuse s’avère illégale et engage, par conséquent, la responsabilité de la région.

17
Paragraphe 2 : Les effets de la suspension des fonctions

La suspension d’un fonctionnaire ne rend pas son emploi vacant38. C’est-à-dire que son
emploi est toujours maintenu et qu’il peut revenir à tout moment. Cependant, sa suspension
produit certains effets sur sa situation administrative (A) et sur son traitement (B).

A. La situation administrative du fonctionnaire suspendu

Suite à la suspension de ses fonctions, des questions concernant la situation du


fonctionnaire dans l’Administration se soulèvent : Pour combien de temps est-il suspendu ?
Que devient-il ? La suspension des fonctions n’a jamais été ad vitam aeternam, elle revêt un
caractère provisoire. En d’autres termes, la suspension est infligée au fonctionnaire pour un
temps bien déterminé dans lequel les enquêtes et la sanction disciplinaire devraient être
prononcés. La suspension des fonctions est infligée pour un délai de quatre mois. L’article
131 alinéa 3 De la loi nº8/91 dispose en substance que la situation du fonctionnaire suspendu
doit faire l’objet d’une décision dans un délai de quatre mois à compter du jour de la prise
d’effet de la suspension. La même loi, en son article 131 alinéa 6 dispose que « En aucun cas,
le fonctionnaire ne pourra, durant sa suspension, être utilisé par l’administration ». Cela
signifie que l’Administration ne peut pas faire travailler le fonctionnaire suspendu. Ce dernier
n’a pas le droit d’exercer une activité administrative car il a été mis à l’écart provisoirement.

Mais si aucune sanction disciplinaire n’est prononcée contre lui à l’expiration du délai
de sa suspension, le fonctionnaire a l’obligation de reprendre son service et l’Administration
est tenue de le recevoir (art. 131 al.3 de la loi nº8/91). Nonobstant la mise à l’écart, il existe
toujours un lien entre le fonctionnaire suspendu et l’Administration. Il continu d’être lié au
service public (CE, Sect. 17 décembre 1965, Dartigue-Peyrou). La doctrine française énonce
que « le fonctionnaire suspendu est assimilé au fonctionnaire en activité »39par conséquent,
« Il continue de bénéficier des droits reconnus par le statut »40 (sauf en matière de
rémunération). « Le fonctionnaire suspendu reste également soumis à l’ensemble des

38
Direction Générale de l’Administration et de la Fonction Publique, op. cit., p. 36
39
Direction Générale de l’Administration et de la Fonction Publique, op. cit., p. 37
40
ibid., p. 37

18
obligations prévues par son statut (sauf, bien entendu, l’obligation de servir) »41. Si la
suspension des fonctions empêche le fonctionnaire de poursuivre l’exercice de ses fonctions
alors une conséquence va se produire sur son traitement.

B. La conséquence de la suspension des fonctions sur le traitement

Comme énoncé précédemment, le fonctionnaire suspendu demeure dans l’impossibilité


de poursuivre l’exercice de ses fonctions. Par conséquent, il ne peut prétendre à aucune
rémunération conformément à la règle du service fait qui prévaut dans l’Administration
publique comme l’envisage le statut Général de la Fonction Publique. En effet, son article
78 dispose que « L’agent public a droit, après service fait, à une juste rémunération ». Lorsque
le fonctionnaire est suspendu de ses fonctions, c’est sa solde qui est également suspendue.
C’est d’ailleurs ce que prévoit l’article 131 en son alinéa 2 de la loi nº8/91 lorsqu’il dispose
que « Durant la suspension, le fonctionnaire perd son droit au traitement à l’exclusion des
prestations familiales ». D’ailleurs, le Conseil d’Etat gabonais a estimé que durant la
suspension des fonctions d’un Inspecteur des Douanes, l’Administration l’avait justement
privé de son traitement en raison de l’absence du service fait conformément aux dispositions
légales ( voir Annexe VI).
En somme, la suspension de la solde est justifiée lorsque ses faits générateurs légaux sont
constatés. Par exemple le refus de rejoindre son poste d’affectation, l’abandon de poste, les
absences et les retards injustifiés, le non-respect des exigences de l’exercice du droit de grève
ou encore le fait d’être suspendu de ses fonctions pour une faute grave. Mais il ne suffit pas
que les motifs de la suspension de la solde prévus par les textes en vigueur soient établis pour
qu’elle soit légale. Il faut encore que son prononcé soit précédé de la mise en œuvre d’une
procédure à respecter.

41
ibid., p. 37

19
CHAPITRE 2 : LA MISE EN ŒUVRE DE LA PROCEDURE

Pour que la suspension de la solde d’un fonctionnaire envisagée pour répondre à une
faute disciplinaire soit régulière, un certain processus doit être respecté (section 2) et aussi,
seules certaines autorités peuvent intervenir dans la procédure (section1).

Section 1 : Les autorités intervenant dans la procédure de la suspension de la solde

Aux termes de l’article 88 du statut général de la fonction publique (loi nº001/2005) le


pouvoir de sanction disciplinaire appartient à l’organe de décision. C’est ainsi que dans la
procédure de la suspension de la solde, les autorités intervenant sont naturellement les
autorités administratives investies du pouvoir disciplinaire (paragraphe 1) qui sont assistées
d’un organe consultatif appelé conseil de discipline (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Les autorités investies du pouvoir disciplinaire

« Il appartient à l’autorité investie du pouvoir disciplinaire, en principe celle qui détient


le pouvoir de nomination, d’apprécier si tel fait, telle action ou abstention, imputable à un
fonctionnaire, constitue, au regard des obligations qui pèsent sur lui, une faute de nature à
justifier la mise en œuvre de l’action disciplinaire »42. En principe, le pouvoir de nomination
appartient au Président de la République et au Premier Ministre. Mais ce pouvoir peut aussi
appartenir, par délégation, dans certains cas, au ministre responsable du fonctionnaire (A), au
gouverneur et chef de mission diplomatique ou de poste consulaire (B).

A. Le ministre responsable du fonctionnaire

La mise en œuvre de la procédure et le prononcé de la suspension de la solde est fait par


le ministre responsable du fonctionnaire. En effet, dans un département ministériel le
détenteur du pouvoir de nomination est le ministre responsable car il a la capacité de recruter
42
Lachaume (J-F), Virot-Landais (A), La fonction publique, 4e éd. Paris, Dalloz, coll. « Connaissance du droit »,
2017, p.105

20
des agents pour l’accomplissement d’une activité de service public. C’est dans ce sens que
l’article 59 de la loi nº001/2005 du 4 février 2005 dispose que « Les affectations et mutations
des fonctionnaires à l’intérieur d’un département ministériel sont prononcées par le ministre
responsable. Néanmoins, elles doivent être portées dans un délai d’un mois à la connaissance
du ministre de la Fonction Publique et du ministre des Finances ». Ainsi, il est clair que c’est
le ministre seul qui détient le pouvoir disciplinaire au sein de son département ministériel
dans la mesure où c’est lui qui décide. Par conséquent, ni un directeur général, ni un chef de
service ne dispose d’aucun pouvoir pour infliger une sanction disciplinaire à un fonctionnaire
fautif, et donc moins pour suspendre sa solde. Par contre, ces derniers ont le devoir d’informer
le ministre des fautes disciplinaires commises par les fonctionnaires qui sont sous leur
subordination. En dehors du ministre qui décide dans son département, il y a deux autres
autorités administratives qui peuvent suspendre la solde des fonctionnaires fautifs. Ce sont le
gouverneur et le chef de mission diplomatique.

B. Le gouverneur de province et le chef de mission diplomatique

Comme le ministre responsable d’un département ministériel, le gouverneur de province


et le chef de mission diplomatique ou de poste consulaire peuvent aussi décider de suspendre
la solde des fonctionnaires fautifs mis à leur disposition puisqu’ils détiennent eux aussi le
pouvoir disciplinaire. En effet, ces deux autorités administratives sont responsables des
fonctionnaires qui sont sous leur subordination. A ce titre, elles prennent les décisions ou
donnent des ordres et instructions et en veillant à leur application. Le gouverneur qui peut à
l’intérieur de la province affecter et muter un agent public (art.60 de la loi nº8/91) dispose
également du pouvoir disciplinaire. La privation de la solde d’un fonctionnaire fautif
découlant d’une sanction mineure telle que l’exclusion temporaire de fonction dont la durée
est d’un à deux mois est infligée immédiatement par la décision du ministre ou de l’autorité
responsable, après, bien sûr, demande d’explication suivie d’une réponse de l’intéressé
(art.133 du statut général des fonctionnaires, loi nº8/91). Mais pour les décisions majeures,
l’avis du conseil de discipline est requis.

Paragraphe 2 : Le conseil de discipline

21
Aux termes de l’article 88 alinéa 2 du statut général de la fonction publique, le conseil
de discipline est une instance consultative chargée, après instruction du dossier, de proposer,
s’il y a lieu, une sanction. Avant de voir les garanties de défense du fonctionnaire (B) devant
le conseil de discipline, il serait logique de montrer d’abord comment elle est saisie et
composée (A).

A. La saisine et la composition du conseil de discipline

Avant tout, il est à préciser que la mise en place du conseil de discipline est requise pour
les sanctions majeures comme le prévoient les dispositions de l’article 134 du statut général
des fonctionnaires énoncés en ces termes : « Les sanctions majeures ne peuvent être
prononcées qu’après consultation d’un conseil de discipline qui émet un avis sur la sanction à
appliquer ». Parmi les sanctions majeures, l’exclusion temporaire de fonction d’une durée de
trois à six mois qui est privative de toute la rémunération en fait partie.

Les autorités habilitées à saisir le conseil de discipline de leur administration, organisme


ou établissement sont notamment le Secrétaire Général de la Présidence de la République ; le
Secrétaire Général de la Primature ; le Ministre responsable ; le Gouverneur de province ; le
Chef de mission diplomatique ou consulaire et le responsable de l’organisme ou de
l’établissement d’accueil (art. 7 du décret nº000375/ PR/MFPRAME du 26 mai 2000 fixant la
composition, l’organisation et le fonctionnement des conseils de disciplines43). Le conseil de
discipline est donc saisi sur requête des autorités visées ci-dessus accompagnée d’un rapport
détaillé des faits établis par le chef hiérarchique de l’agent et de toutes les pièces
justificatives, notamment, les éléments de preuve à charge et à décharge (art. 8 du. Décret
nº000375/PR/MFPRAME du 26 mai 2000). Il faut préciser qu’en principe les sanctions
majeures sont infligées par le Premier Ministre (art. 134 al. 2 du statut général des
fonctionnaires). Mais il peut déléguer cette prérogative au Ministre de la Fonction Publique
ou à tout autre ministre intéressé (art.22 du statut général des fonctionnaires).

Le conseil de discipline est composé de neuf membres, conformément à l’article 4 du


décret nº000375/PR/MFPRAME susmentionné. Il y a donc un président désigné par les
responsables de la gestion du personnel du département concerné ; trois membres représentant

43
Voir Annexe VII

22
le personnel, choisi parmi les fonctionnaires de même catégorie que le fonctionnaire en cause
ou d’une catégorie supérieure, dont un en poste dans le même service que l’agent concerné;
trois membres représentant l’administration, choisis parmi les fonctionnaires de même
catégorie que le fonctionnaire en cause ou d’une catégorie supérieure dont un en poste dans le
même service que l’agent concerné ; un rapporteur ; un secrétaire de séance. Le même article
prévoit que la composition de chaque conseil de discipline est fixée par décision de l’autorité
dont relève le conseil de discipline concerné. Une fois traduit devant le conseil de discipline
qui va instruire son dossier, l’agent fautif bénéficie des garanties nécessaires à sa défense.

B. Les garanties de la défense du fonctionnaire

Selon la doctrine, il est de principe absolu que tout fonctionnaire a toujours le droit de
se défendre même en l’absence de tout texte44. Pour se faire, l’autorité administrative qui
envisage de le sanctionner doit au préalable l’informer de son initiative par une lettre
recommandée avec demande d’avis de réception (CAA de Paris 1er avril 1996, Ebreuil,
nº94PA00837). Celle-ci doit indiquer clairement au fonctionnaire qu’une procédure
disciplinaire est susceptible d’être engagée en son encontre ainsi que la nature et la
formulation des griefs retenus contre lui (CE, 10 mars 1989, bureau d’aide sociale de la ville
de Nice c/Melle Micheletti, req. nº66319). Ce document doit également contenir l’indication
des droits de l’intéressé : le droit d’obtenir la communication intégrale de son dossier et de
tous les documents annexes et la possibilité de se faire assister par un défenseur de son choix
(article 138 loi nº8/91 du 26 septembre 1991). Le non-respect de ces exigences constitue un
vice substantiel de procédure (CE, 17 juin 1988, Labrosse, req. nº81 815 : l’omission de
l’indication que le fonctionnaire peut se faire assister par un ou plusieurs défenseurs de son
choix vicie la procédure, même si la sanction envisagée ou prononcée est celle de
l’avertissement ou du blâme).

Lorsqu’il est traduit devant le conseil de discipline, le fonctionnaire doit recevoir la


communication de son dossier. C’est comme l’a pu dire Pierre Coutant lorsqu’il écrit que : «
Tous les fonctionnaires, agents et ouvriers des administrations publiques de l’Etat ou des
collectivités locales, civils et militaires, doivent recevoir préalablement au prononcé d’une

44
Carcelle, (P) et Mas, (G). Les principes généraux applicables dans la fonction publique, (Décembre –
Novembre 1958), La Revue administrative, vol.11, nº66, p.621

23
sanction disciplinaire, communication de leur dossier »45. D’ailleurs, cette règle est prévue par
l’article 138 de la loi nº8/91 du 26 septembre 1991. Mais il faut préciser que c’est au
fonctionnaire de demander cette communication (CE, Ass, du 3 décembre 1971, Sieur
Branger) et qu’il n’y a pas vice de procédure si ce dernier, bien qu’ayant été invité à prendre
connaissance du dossier, s’abstienne de le faire (CE, 1er mars 1989, commune de Bart
c/Chassery, req. nº74 967). La communication du dossier au fonctionnaire lui permet de
préparer et d’organiser utilement sa défense devant le conseil de discipline. Pour ce faire il
doit avoir un délai raisonnable et cela « dépend des circonstances de l’affaire et est apprécié,
eu égard au nombre, à la nature et à la complexité des faits et, le cas échéant, à la nécessité de
se déplacer pour consulter les documents (CE, 3 juillet 1901, Jacquens, p.294) »46. Il est à
retenir qu’il ressort de la procédure de la suspension de la solde les règles relatives à la
compétence de l’autorité qui doit décider de la suspension et les droits de défense accordés
aux fonctionnaires. La décision de suspendre la solde est donc prise à l’issue de
l’accomplissement de cette procédure. De là, le processus de la suspension de la solde est
déclenché.

Section 2 : Le processus de suspension de la solde

L’exécution de la suspension de la solde (paragraphe 2) est conditionnée par une


décision administrative préalable (paragraphe 1).

Paragraphe 1 : La décision administrative préalable à la suspension de la solde

Comme l’a considéré le Conseil d’Etat gabonais dans une de ses décisions (voir Annexe
VIII), la privation de la solde d’un fonctionnaire est irrégulière dans la mesure où elle a été
faite sans aucune décision administrative préalable47. Dans une autre de ses décisions (voir
Annexe IX), le Conseil d’Etat précise que l’Administration s’est « placée délibérément en
dehors du cadre d’action prévu par la réglementation »48 dans la mesure où la suspension de la
solde de l’enseignant n’avait fait l’objet « de sanction devant servir de support aux saisies
45
Coutant, (P). Une institution particulière du droit disciplinaire de la Fonction Publique: La communication du
dossier. (Juillet – Aout 1955), La Revue administrative, Vol.11, nº46, p. 399
46
Direction Générale de l’Administration et de la Fonction Publique, op. cit., p.72
47
CE, 8 juillet 2016, Mme Solange c/ Etat gabonais
48
CE, 24 juin 2016, nº171/2015-2016, Sieur Fap KOLO c/ l’Etat gabonais

24
opérées . Par conséquent, il faut comprendre que la suspension de la solde est faite sur la base
d’une décision administrative préalable. Il s’agit d’une décision exécutoire. Maurice Hauriou
la définit comme « Toute déclaration de volonté en vue de produire un effet de droit vis-à-vis
des administrés, émise par une autorité administrative […] dans une forme exécutoire, c’est-à-
dire qui peut entraîner l’exécution d’office »49. Pour être recevable, la décision doit être
justifiée (B) et doit également obéir à un certain formalisme (A).

A. La forme de la décision administrative

Dans le cas d’une éventuelle suspension de la solde, une décision administrative doit
être prise au préalable pour « servir de support aux saisies opérées »50. Celle-ci ne doit pas être
faite de façon verbale si elle doit servir de support même si la décision ou encore l’acte
administratif décisoire peut être purement verbal51. La décision se présente le plus souvent
sous la forme d’un écrit pour lequel le respect de certaines formes est obligatoire. La décision
peut être annulée si elle ne comporte pas certaines mentions substantielles. Les deux
premières mentions obligatoires qui doivent impérativement figurer sur la décision sont le
nom et la signature de l’autorité qui édicte l’acte. En effet, l’autorité disciplinaire qui prend la
sanction doit forcément indiquer son nom et apposer sa signature pour servir de preuve et
donner l’existence juridique à l’acte. En l’absence de signature, l’acte n’existe pas et ne peut
produire d’effet de droit52. En plus de ces deux obligations d’ordre formel, il y a le visa des
textes servant de base à la décision. En effet, l’autorité qui prend la décision de suspendre la
solde doit mentionner dans celle-ci les lois et règlements sur lesquels il s’appuie pour la
prendre. Ainsi donc, tout acte administratif décisoire c’est-à-dire celui qui fait grief, celui qui
modifie l’ordonnancement juridique en créant des droits et/ou des obligations nouvelles, doit
revêtir la forme de l’écrit dans le but de connaitre son auteur via sa signature et de référencer
le visa des textes servant de base à la décision mais aussi de demeurer une preuve en toutes
circonstances. Au titre des mentions obligations de la décision, il faut ajouter l’énoncé des
motifs de la décision qui permettent de justifier la décision.

49
Hauriou, (M), Précis de droit administratif et du droit public, 11e éd. Paris, Sirey, 1927, p.356
50
CE, 24 juin 2016, nº171/2015-2016, Sieur Fap KOLO c/ l’Etat gabonais
51
CE, sect., 9 janv. 1931, Abbé Cadel, S. 1931.3.41, note Bonnard
52
CE, 26 janv. 1951, Galy : S. 1951, 3, p. 52, concl. R. Odent

25
B. La justification de la décision

Toute décision administrative individuelle défavorable ou dérogatoire qui,


naturellement, modifie l’ordonnancement juridique doit impérativement être motivée, c’est-à-
dire justifiée. La suspension de solde étant une mesure disciplinaire donc une décision
individuelle défavorable, cette mesure doit, par conséquent « comporter l’indication des
motifs qui ont présidé à sa naissance »53. En effet, selon l’avocat Guillaume Blanc les motifs
sont tous les éléments de faits et de droit qui expliquent la décision administrative54. C’est
d’ailleurs dans ce sens que les dispositions de l’alinéa 1 de l’article 90 de la loi nº001/2005 du
février 2005 prévoient que « La proposition de sanction du conseil de discipline et la sanction
de l’organe de décision doivent expressément mentionner l’obligation violée, les faits et les
circonstances dans lesquelles ils ont été commis ainsi que les voies de recours, s’il y a lieu ».
L’autorité décisionnelle doit énoncer des motifs clairs et suffisants à défaut le juge peut
annuler la décision émise55. Nous devons comprendre que lorsqu’il est infligé à un agent
public une sanction défavorable, il serait judicieux d’expliquer à celui-ci les raisons factuelles
et les sources légales qui ont conduit à le sanctionner. Ce n’est qu’ainsi que la décision de
suspendre la solde, bien motivée, peut être exécutée convenablement.

Paragraphe 2 : L’exécution de la suspension de la solde

Après que, la décision de suspendre la solde du fonctionnaire fautif ait été prononcée et
justifiée, il revient donc à la Direction de la solde de l’exécuter (A). Cette suspension est faite
pour une certaine durée et, produit des effets (B).

A. L’exécution de la suspension par la direction de la solde

53
Blanc, (G), Motifs et motivations des décisions administratives, (Juillet - Aout 1998), La Revue
administrative, Vol.51, nº304, p.495
54
Blanc, (G), op.cit., p. 496
55
CE, 19 décembre 1990, Kromwell : Lebon, T.546 : annulation d’un arrêté qui s’est borné à indiquer, sans
aucune autre précision, que le licenciement de l’enseignant était fondé sur son insuffisance professionnelle.

26
Une fois décidée par l’autorité administrative compétente, la suspension de la solde est
exécutée par la Direction de la Solde. Cette exécution n’est autorisée que par le ministre
chargé des finances. En effet, l’autorité administrative compétente qui décide de priver le
fonctionnaire fautif de sa solde doit saisir le ministre chargé des finances d’une demande de
suspension de la solde. Cette demande est constituée d’un rapport détaillant les noms et
prénoms, matricule et l’emploi de l’agent public en cause ainsi que les indications sur la
période dans laquelle les fautes ont été commises (art.4 al.4 du décret
nº254/PR/MFPRA/MFBP du 1er mars 1994). Ce rapport doit également être transmis au
ministre chargé de la fonction publique. L’analyse et l’exécution de cette demande sont
confiées à la Direction Générale du Budget et des Finances Publiques ainsi qu’à la Direction
Générale de l’Informatique sur instruction du ministre chargé des finances. C’est par l’un des
services centraux de la Direction Générale du Budget et des Finances Publiques : la Direction
de la Solde, que la solde va être suspendue.

La Direction de la Solde a pour mission principale la gestion de la situation salariale des


agents publics de l’Etat. C’est donc elle qui traite, vérifie et paie la solde mensuelle des
fonctionnaires. Le mode principal du paiement de la solde est le virement bancaire. Par contre
le « bon de caisse », second mode de paiement, est un paiement sur titre de la solde. Il est
établi par la Direction de la Solde à la demande du ministre responsable de l’agent public. Il
existe deux types de « bon de caisse » : le simple et le litigieux.

Le « bon de caisse » simple est émis pour régler certaines créances des organismes ou
personnes ayant effectué un service pour le compte de l’Etat. C’est le cas par exemple du
paiement des salaires des auxiliaires de sécurité postés à l’intérieur et à l’extérieur des
établissements publics secondaires qui se fait par « bon de caisse ».

Le « bon de caisse » litigieux quant à lui est demandé lorsque l’agent public s’est par
exemple longtemps absenté de son poste de travail. La récupération du bon de caisse litigieux
auprès de l’autorité par l’agent public fautif est conditionnée par la justification de son
absence. Ce « bon de caisse » est conservé durant quatre mois dès la date de son émission.
Passé ce délai, la solde du fonctionnaire sera suspendue.

Alors, nous comprenons que la mise sous « bon de caisse » du type litigieux n’est pas
une suspension de la solde. La suspension de la solde consiste à ne pas payer totalement ou
partiellement la solde d’un fonctionnaire pendant une certaine durée.

27
B. La durée et les effets de la suspension de la solde

Aux termes de l’article 130 de la loi nº8/91 du 26 septembre 1991, l’exclusion


temporaire de fonction prononcée dans le cadre des sanctions majeures a une durée de trois
(3) à six (6) mois, et dans le cadre des sanctions mineures, elle ne peut être prononcée que
pour une durée d’un (1) à deux (2) mois. Selon le même article, l’exclusion temporaire de
fonction est privative de toute la rémunération. Ainsi, la durée de la suspension de la solde est
à confondre avec celle de l’exclusion temporaire de fonction. Lorsque la solde est suspendue,
c’est toute la rémunération qui est suspendue sauf les prestations familiales (art. 130 al. 1 de
la loi nº8/91 du 26 septembre 1991) et les suppléments pour charge de familles qui restent dus
à l’agent public (art.2 al.1 du décret nº254/PR/MFPRE/MFBP du 1er 1994).

La rémunération du fonctionnaire comprend la solde indiciaire, les indemnités et les


primes. Donc, durant la suspension de sa solde, le fonctionnaire ne bénéficiera non plus de ses
primes et des indemnités. Mais il reste à préciser que, conforment au principe du parallélisme
des formes, le rétablissement de la solde ne peut être fait que dans les mêmes formes que sa
suspension. En d’autres termes, c’est à l’autorité demanderesse de la suspension de la solde
que revient le devoir de demander également le rétablissement de la solde dans les délais
réglementaires. S’il arrive que les règles procédurales de la suspension de la solde ne soient
pas respectées ou encore, qu’au terme du délai de la suspension le rétablissement de la solde
n’a pas été effectué, l’agent public a le droit de contester la suspension de sa solde qui est
devenu illégal. De là, il va naitre le contentieux de la suspension de la solde.

28
DEUXIEME PARTIE : LE CONTENTIEUX DE LA SUSPENSION DE LA SOLDE

29
Au sens large du terme, un contentieux désigne un conflit, une contestation ou encore
un litige qui est né de l’opposition de deux prétentions. En son sens strict, un contentieux est
une procédure dont le but est de faire juger ou résoudre un litige existant entre un particulier
et l’Etat devant la justice. Donc, on comprend aisément que « aller en contentieux » signifie
qu’un particulier ou une organisation entend porter le litige devant la juridiction compétente.
Le contentieux de la suspension de la solde désigne donc le fait qu’un fonctionnaire privé
injustement de sa solde saisisse la justice pour résoudre le litige. Mais avant d’entamer la
procédure menant à la résolution du contentieux (Chapitre 2), le fonctionnaire devrait d’abord
déterminer la nature dudit contentieux (Chapitre1).

30
CHAPITRE 3 : LA NATURE DU CONTENTIEUX DE LA SUSPENSION DE LA
SOLDE

Lorsque la suspension de la solde est contestée par un fonctionnaire, la contestation


porte le plus souvent sur la légalité de la décision. C’est donc le contentieux de la légalité
(section 1). A cette suspension, il va s’en suivre un préjudice qui devra être réparé. La victime
devra faire endosser la responsabilité du préjudice sur la personne qui va la réparer. C’est
donc le contentieux de la responsabilité (section 2).

Section 1 : Le contentieux de la légalité

L’élaboration des actes administratifs est gouvernée par le principe de légalité. Tous les
actes de l’administration doivent être faits en respect des lois et textes réglementaires en
vigueur. Lorsque les dispositions légales qui encadrent la suspension de la solde sont
manifestement violées (paragraphe 2), et que sa mise en œuvre est faite en dehors des règles
procédurales (paragraphe 1), on ne doit pas être surpris de voir naitre des contestations
relatives à sa légalité.

Paragraphe 1 : Les manquements observés dans la procédure

Il est constaté que certaines suspensions de la solde sont quelques fois faites par des
autorités incompétentes (A). Aussi, il y a des suspensions de la solde qui sont directement
effectuées sans qu’il ait eu au préalable une décision administrative (B).

A. L’intervention des autorités incompétentes dans la procédure

Au Ministère de l’Education Nationale, certaines autorités administratives sont à


l’initiative des suspensions de la solde des agents publics ayant commis des fautes
disciplinaires alors même qu’elles n’ont pas le pouvoir disciplinaire. En effet, il a été constaté

31
que certaines suspensions de la solde des agents publics du ministère de l’Education Nationale
n’ont pas été décidées par l’organe disciplinaire habilité, c’est-à-dire celui qui a le pouvoir de
décision. Il est prévu dans les dispositions de l’article 88 de la loi nº001/2005 du 4 février
2005 que « Sous réserve des délégations aménagées par les textes en vigueur, le pouvoir de
sanction disciplinaire appartient à l’organe de décision ».

Mais, on a pu voir, dans une décision du Conseil d’Etat gabonais, que cette disposition
n’a pas été respectée par le Directeur de la Solde qui a pris unilatéralement la décision de
priver un enseignant chercheur de la Faculté de Droit et des Sciences Economiques de
l’Université Omar Bongo de sa rémunération pendant quarante-six (46) mois en lieu et place
de l’autorité habilité56. Ce fait constitue un vice de procédure car c’est à l’organe de décision
du ministère dont relève l’agent qu’appartient le pouvoir de sanction disciplinaire. Donc,
c’était au Ministre de l’Enseignement Supérieur de prendre la mesure. Il est encore relevé
dans un autre cas jugé par le Conseil d’Etat gabonais (voir Annexe X) qu’un fonctionnaire en
service au Lycée Paul IDJENDJET NGOUNDJOUT avait vu sa solde et les autres éléments
constitutifs de sa rémunération être suspendus par des mesures disciplinaires qui ont été
« décidées et appliquées en dehors de toute saisine de l’organe disciplinaire habilité »57.

L’intervention non autorisée de certaines autorités dans la procédure de suspension la


solde est illégale. Le rôle des responsables des différentes directions du ministère est de
remonter les informations relatives aux fautes commises par les agents jusqu’au Ministre. La
procédure disciplinaire ne pourra débuter que par son souhait de déclencher le processus de
répression de ces fautes58. L’intervention de ces personnes incompétentes dans le processus de
la suspension de la solde engendre des contestations et, c’est également le cas lorsque la
suspension de la solde est faite en l’absence d’une décision administrative devant lui servir de
support.

B. L’absence de décision administrative servant de support à la suspension de


la solde

56
CE, 24 juin 2016, nº171/2015-2016, Sieur L.B c/ l’Etat gabonais
57
CE, 29 avril 2016, Sieur Pol KEMBO c/ Etat gabonais
58
Aubin (E) et Nivert (N), op. cit., p.68

32
Au Ministère de l’Education Nationale, certaines soldes sont suspendues sans qu’une
décision administrative n’ait été prise au préalable pour leur servir de support. En effet, il y a
des autorités administratives mais aussi des responsables de certains services dans
l’administration de l’Education nationale qui saisissent directement la direction de la solde
pour demander la suspension de la solde des agents qui se seraient mal comportés vis-à-vis
d’eux. Et, dans le désir de voir la solde être suspendue immédiatement, ces agents publics
s’empressent d’exercer une pression sur les agents de la direction de la solde en faisant fi des
exigences des règles de procédure. De ce fait, on peut estimer qu’ils font dans l’abus
d’autorité qui est considérée comme une contrainte morale exercée sur quelqu’un par une
personne qui se sert de son autorité de fait ou de droit, pour l’obliger à accomplir un acte
contraire à ses intérêts. En d’autres termes ils font du trafic d’influence qui est punissable par
la loi pénal gabonaise59.

En agissant ainsi, ces responsables administratifs, ne souhaitent pas donner les motifs
réels de la sanction alors que sa motivation sérieuse est une exigence jurisprudentielle60.
Ainsi, elles refusent volontairement d’élaborer une décision administrative servant de support
à la suspension de la solde. Dans une de ses décisions, le Conseil d’Etat gabonais considère
que le fait d’un chef de service de priver madame X, professeure d’enseignement du second
degré général, de sa rémunération pendant dix mois sans qu’aucune décision administrative
préalable n’ait été prise constitue une faute61. Cette façon de faire montre clairement que ce
responsable de service a fait preuve d’abus d’autorité. C’est ce qui ressort du rapport de
l’affaire précité qui expose que, selon madame X, la véritable raison du nouveau Chef de
service logement était de retenir ses bons de caisse afin de l’expulser pour confier cet
appartement à une de leur concubine. C’est pourquoi le chef de service, sans saisir l’organe de
décision habilité, mais plutôt en faisant abus de son autorité, a su obliger le Directeur de la
solde à produire des bons de caisse « litiges » à l’encontre de madame X. Dans une autre
décision du même Conseil d’Etat rendue le 24 juin 2016, les hauts juges ont estimé que

59
Loi n°006/2020 du 30 juin 2020 portant modification de la loi n°042/2018 du 05 juillet 2019 portant Code
Pénal de la République Gabonaise prévoit en son article 135 qu’ « Est puni de dix ans d’emprisonnement au plus
et de 50.000.000 de francs d’amende au plus le fait, par quiconque, de solliciter ou d’agréer, à tout moment,
directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques,
pour lui-même ou pour autrui pour abuser ou avoir abusé de son influence réelle ou supposée en vue de faire
obtenir d’une autorité ou d’une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre
décision favorable ».
60
T.A.23 mai 1968, N’DONGO
61
CE, 28 juillet 2016, Mme Solange c/ Etat Gabonais

33
l’Administration avait commis une faute en privant un enseignant chercheur de sa
rémunération car les faits punissables qui lui ont été reprochés « n’ont fait l’objet ni de
procédure disciplinaire expresse, ni de décision devant servir de support aux saisies opérées
en la cause »62.

Il y a donc contestation de la légalité de la suspension de la solde lorsqu’elle est


décidée par une personne qui n’est pas habilitée à le faire ou encore lorsque cette suspension
est prise sans aucune décision administrative devant lui servir de support. Il y a également
contestation de la légalité de la suspension de la solde lorsqu’il y a violation direct de
dispositions de la loi.

Paragraphe 2 : La violation direct des dispositions légales.

Il y a violation directe de la loi lorsque la suspension de la solde est appliquée sans


qu’aucune faute disciplinaire prévue par les textes en vigueur n’ait été commise (A) mais
aussi lorsque les prestations familiales sont retenues (B).

A. La suspension de la solde sans juste motif

Selon les dispositions de l’article 17 de la loi nº08/91, « Toute faute commise par un
fonctionnaire dans l’exercice de ses fonctions, ainsi que toute condamnation judiciaire en
matière pénale, l’expose à des sanctions disciplinaires ». Il est donc à retenir de ces
dispositions, de façon substantielle, qu’aucune sanction disciplinaire ne doit être infligée à un
fonctionnaire s’il n’a pas commis une faute disciplinaire. En effet, la privation ou la
suspension de la solde d’un fonctionnaire ne peut être légale et donc réalisable que si le
fonctionnaire commet l’une des fautes mentionnées au premier chapitre. Par exemple le refus
de rejoindre son poste malgré une mise en demeure (l’article 5 du décret
nº000216/PR/MPMSPRE/MBCP du 17/09/2018 réglementant les modalités de privation de la
rémunération d’un agent public et l’article 54 de la loi nº20/92 du 8 mars 1993 fixant les
statuts particuliers des fonctionnaires du secteur Education) ; les absences sans autorisation ni
excuse valable (art. 10 du décret précité) ; la participation à un mouvement de grève (article
62
CE, 24 juin 2016, nº171/2015-2016, Sieur Fap KOLO c/ l’Etat Gabonais

34
25 de la loi n° 18/92 du 18 mai 1993 fixant les conditions de constitution et le fonctionnement
des organisations syndicales des agents de l’Etat).

C’est donc la commission d’une faute disciplinaire, c’est-à-dire le non-respect des


obligations professionnelles du fonctionnaire qui est la cause légale de la suspension de la
solde. Lorsque la suspension de la solde est faite sans que le fonctionnaire n’ait commis une
faute, sa légalité est remise en cause. C’est ce qui s’est passé dans l’affaire Waly MARS,
professeur de l’enseignement technique, où le Conseil d’Etat Gabonais (voir Annexe XI) avait
estimé qu’en libérant sa rémunération entre les mains d’une tierce personne, l’Administration
l’avait privé de sa rémunération sans juste motif63. Cette situation ne pouvait qu’obliger Sieur
Waly MARS à saisir le juge pour contester la légalité de cette privation et demander la
réparation du préjudice subi. Dès qu’il y a eu commission de certaines fautes disciplinaires, la
privation de la solde seulement peut être infligée au fonctionnaire. Mais on constate que cette
privation s’étale jusqu’aux prestations familiales.

B. La rétention abusive des prestations familiales

Nonobstant l’application des mesures disciplinaires portant privation de la


rémunération, les prestations familiales ou suppléments pour charges de famille doivent
toujours être versés au fonctionnaire. Cette règle est prévue dans plusieurs textes de loi. C’est
par exemple le cas du Statut Général de la Fonction Publique (loi nº001/2005 du 4 février
2005) qui dispose en son article 71 que « Sans préjudice des prestations familiales ou
suppléments pour charge de famille, les journées de grève ne sont pas rémunérées sauf
lorsque la grève résulte du non-paiement de la rémunération due ». Mais elle n’est pas
souvent respectée dans l’Administration du secteur de l’Education Nationale. En suspendant
la solde des fonctionnaires fautifs, l’administration retient également leurs prestations
familiales.
Dans l’affaire qui opposait Sieur YENO Lam à l’Etat gabonais, l’Etat par l’entremise du
ministère de l’Education Nationale avait retenu abusivement ses prestations familiales (voir
l’Annexe XII). Dans l’arrêt du Conseil d’Etat gabonais rendu le 26 mai 2017 (voir Annexe
XIII), il ressort qu’à la suite de sa participation à un mouvement de grève observé par les
enseignants de la CONASYSED, la solde de Madame KANI a été suspendue durant trois (3)
63
CE, 28 avril 2017, Sieur Waly MARS c/ Etat gabonais

35
mois. Cette dernière a saisi les hauts juges pour demander le paiement des dommages et
intérêts pour réparer le préjudice résultant de la suspension illégale de sa solde. Les hauts
juges ont alors considéré que les mesures disciplinaires infligées à Madame KANI « ont porté,
pour certaines, sur les éléments du salaire qui ne peuvent pas faire l’objet de retenue au sens
de l’article 71 du statut général de la Fonction Publique »64.

La rétention abusive des prestations familiales dans la décision de suspension de la


solde entraine l’illégalité de la décision et cause par la suite des préjudices aux fonctionnaires.
Ces derniers doivent rechercher la responsabilité de la personne qui devra réparer leurs
préjudices.

Section 2 : Le contentieux de la responsabilité

Le fonctionnaire qui a subi une suspension illégale de sa solde doit rechercher soit la
responsabilité personnelle de l’auteur de la décision dommageable (paragraphe 1), soit la
responsabilité administrative de l’Etat (paragraphe 2) pour demander la réparation.

Paragraphe 1 : La détermination de la responsabilité personnelle

La responsabilité personnelle est engagée lorsqu’il y a commission d’une faute


personnelle (A). Dans ce cas, c’est le juge judiciaire qui reste compétent (B) pour ordonner la
réparation du préjudice.

A. La commission d’une faute personnelle

D’après les conclusions faites par le Commissaire du Gouvernement Édouard Laferrière


dans une décision du Tribunal des Conflits français, il y a faute personnelle lorsque l’acte
dommageable révèle « un homme avec ses faiblesses, ses passions, ses imprudences »65. En

64
CE, 26 mai 2017, Mme KANI Bonprix c/ Etat gabonais
65
T.C 5 mai 1877, Laumonnier-Carriol

36
d’autres termes, la faute personnelle est perçue dans l’intention de son auteur de nuire
volontairement à autrui (CE 11 mai 1953, Oumar Samba, Lebon 218 : gardien s’associant à
des détenus pour commettre des vols, au cours des corvées à l’extérieur de la prison). Aussi,
une faute commise à l’occasion du service peut être qualifiée de personnelle lorsqu’elle est
grave. C’est ce que pense André Maurin lorsqu’il écrit que « une faute même involontaire
commise dans le service sera considérée comme une faute personnelle si elle dépasse la
moyenne des fautes auxquelles on peut s’attendre (T. confl, 9 juill. 1953, 2 esp., Delaitre et
Dame Bernadas, JCP II, 7797 note J. Rivero : coup de poing assené par un agent de police à
un facteur au domicile duquel un manifestant s’était réfugié; poltronnerie d’un commissaire
de police) »66.

L’autorité administrative qui prend la décision de suspendre une solde juste pour nuire
volontairement à un fonctionnaire en faisant fi des règles établies, commet donc une faute
grave qu’on qualifiera de personnelle. Etant donné qu’elle dispose du pouvoir disciplinaire,
on pourrait dire qu’elle fait preuve d’abus d’autorité67. Ainsi, c’est sa responsabilité
personnelle qui devrait être engagée devant le juge judiciaire.

B. Le juge judicaire, juge de la faute personnelle

Lorsque la responsabilité personnelle de l’autorité qui a pris la décision est mise en


cause, elle doit être mise en jeu devant la juridiction judiciaire qui est seule compétente pour
connaître des actions dirigées contre l’agent. En effet, un préjudice causé par quiconque, de
son propre fait, l’oblige à le réparer. C’est ce que prévoit l’article 1240 du code civil ancien
lorsqu’il dispose que : « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage,
oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Compte tenu du fait que cette règle
ressort du code civil, la réparation du dommage causé par une faute personnelle ne peut donc
être ordonnée que par le juge qui applique les règles du droit civil c’est-à-dire le juge civil

66
Maurin (A), op. cit., p. 141
67
En droit gabonais, l’abus d’autorité est assimilé au trafic d’influence qui est puni par la loi pénal. En effet, la
Loi n°006/2020 du 30 juin 2020 portant modification de la loi n°042/2018 du 05 juillet 2019 portant Code Pénal
de la République Gabonaise prévoit en son article 135 qu’ « Est puni de dix ans d’emprisonnement au plus et de
50.000.000 de francs d’amende au plus le fait, par quiconque, de solliciter ou d’agréer, à tout moment,
directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques,
pour lui-même ou pour autrui pour abuser ou avoir abusé de son influence réelle ou supposée en vue de faire
obtenir d’une autorité ou d’une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre
décision favorable ».

37
lorsque l’action intentée est civile. Lorsque la faute personnelle est commise et que cette faute
concerne la violation d’une règle pénale, c’est bien sûr le juge pénal qui demeure compétent
pour sanctionner son auteur.

Aux termes de ce qui précède, on doit retenir que lorsque la responsabilité personnelle
de l’autorité administrative est retenue pour des faits caractérisés par une certaine gravité,
c’est bien le juge judiciaire qui doit être saisi pour sanctionner les faits répréhensibles. C’est
par exemple le cas où deux agents du Conseil économique et social s’étaient considéré
« victimes collatérales des abus d’autorité » de la part de la présidente de l’institution. Leurs
soldes ont été suspendues par le directeur de la solde qui aurait agi sous ordre de ladite
présidente sans suivre la procédure. L’abus d’autorité étant une infraction pénale (art. 135 du
code pénal) les victimes ont tout naturellement le droit de saisir le juge pénal.68

Lorsque l’agent public qui a subi un préjudice souhaite demander la réparation, il peut
saisir le juge judiciaire si la responsabilité personnelle de l’auteur de la faute est démontrée.
La victime peut également mettre en cause la responsabilité administrative de l’entité à
laquelle appartient le fautif.

Paragraphe 2 : La responsabilité administrative de l’Etat

La responsabilité administrative de l’Etat est engagée lorsqu’une faute de service est


commise (A). De ce fait, c’est la compétence de la juridiction administrative qui est requise
(B) pour solliciter la réparation du préjudice subi.

A. La commission d’une faute de service

Il y a faute de service lorsque, selon Edouard Laferrière, l’acte dommageable est


impersonnel, et donc, lorsqu’elle « révèle un administrateur… plus ou moins sujet à erreur, et
non un homme avec ses faiblesses, ses passions et ses imprudences »69. La faute de service est
celle qui est commise dans l’exercice des fonctions, c’est-à-dire pendant le service, avec les
68
BOUSSOUGOU Camille, « Le directeur de la solde mis en examen pour suspension injuste des salaires des
agents du CES », Gabonactu.com, 15 août 2017, https://gabonactu.com/le-directeur-de-la-solde-mis-en-examen-
pour-suspension-injuste-des-salaires-des-agents-du-ces/ (consulté 13 août 2021)
69
T.C, 5 mai 1877, Laumonnier-Carriol

38
moyens du service, et en dehors de tout intérêt personnel70. Il y a donc faute de service
lorsqu’un agent, à l’occasion de l’exécution de son service, cause un dommage à un autrui par
un agissement non voulu. La commission d’une faute de service engage inévitablement la
responsabilité de la puissance publique. La faute de service peut être constituée lorsqu’une
décision a été adoptée en dehors des règles procédurales établies par la loi. C’est le cas par
exemple d’une Administration qui avait suspendu la solde de son agent en lui imputant des
griefs répréhensibles sans suivre la procédure disciplinaire imposée par les textes en vigueur.
Par ce fait, elle avait donc commis une faute qui avait engagé la responsabilité de l’Etat.71
C’est devant un juge spécial que ce dernier doit répondre de ces actes.

B. Le juge administratif, juge de la faute de service

Selon le principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires, dès que la


responsabilité administrative de l’Etat est constatée, c’est le juge administratif qui doit être
saisi impérativement. Le juge administratif est compétent pour connaître de tous les litiges
impliquant l’Administration. En effet, toutes les questions et tous les problèmes juridiques qui
se rapportent à l’administration doivent être traités par son juge c’est-à-dire le juge
administratif. C’est d’ailleurs dans ce sens qu’une jurisprudence du Tribunal des Conflits
français rendu en 187372 considère que « la responsabilité, qui peut incomber à l’Etat pour les
dommages causés aux particuliers par le fait des personnes qu’il emploie dans le service
public, ne peut être régie par les principes qui sont établis dans le Code civil » et que, la
juridiction administrative « est seule compétente pour en connaître… ». Face au contentieux
de la suspension de la solde, la seule chose que souhaite profondément le fonctionnaire c’est
sa résolution.
70
T.C, 19 octobre 1998, 03131, mentionné au aux tables du recueil Lebon : « que la faute ainsi commise par
M.Y…qui n’était animé par aucun intérêt personnel, l’a été dans l’exercice de ses fonctions et avec les moyens
du service ; que quelle que soit sa gravité elle ne saurait être regardée comme une faute personnelle détachable
du service »
71
CE, 24 juin 2016, nº171/2015-2016, Sieur L.B c/ l’Etat gabonais : « Considérant, sur la responsabilité de
l’Etat, que le Conseil d’Etat observe d’emblée que l’Administration, qui impute à son agent un certain nombre de
griefs répréhensibles, selon elle sur le plan disciplinaire, n’a pas, comme le lui imposent les textes en vigueur,
donné une suite régulière à ces faits ; Que notamment ces faits litigieux n’ont fait l’objet ni de procédure
disciplinaire expresse, ni de décision devant servir de de support aux saisies opérées en cause ». L’attitude
adoptée par cette Administration face aux exigences des textes en vigueur conduit à la qualifier de fautive :
« Considérant que s’étant ainsi placée délibérément en dehors du cadre d’action prévu par la réglementation
qu’elle a elle-même mise en place à dessein, l’Administration a commis une faute qui engage sa responsabilité ».
72
TC, 8 février, 1873, BLANCO

39
40
CHAPITRE 4 : LA PROCEDURE DU CONTENTIEUX DE LA SUSPENSION DE LA
SOLDE

Aucun problème, aucun contentieux ne peut perdurer pendant très longtemps. On finit
toujours par trouver sa solution. Et, pour régler le contentieux de la suspension de la solde,
différentes voies sont admises (Section 1). Résoudre un contentieux n’est pas toujours chose
facile. Le traitement de certains contentieux très complexes nécessite souvent de nombreux
jours de réflexion et des nuits blanches qui épuisent. Cela freine quelque fois l’avancement
dans le traitement d’autres dossiers courants. Pour échapper à tout ceci, il serait bien
d’envisager certaines perspectives afin d’éviter ce contentieux (Section 2).

Section 1 : Les voies du règlement du contentieux de la suspension de la solde

Pour résoudre le contentieux qui porte sur la suspension de sa solde, le fonctionnaire


devrait tout d’abord saisir l’autorité administrative qui a pris la décision par un recours
administratif préalable (Paragraphe 1). Le rejet de sa demande conduira à la saisine du juge
administratif (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Le recours administratif préalable

La contestation de la suspension de la solde se fait tout d’abord en saisissant l’autorité


administrative (A) qui doit répondre (B) avant le terme d’un délai légal.

A. La saisine de l’autorité administrative

Lorsqu’un fonctionnaire souhaite contester une décision qu’il juge illégale, il doit saisir
l’autorité administrative soit par un recours gracieux, soit par un recours hiérarchique dans

41
l’objectif de demander son retrait73, son abrogation74 ou sa modification. Le recours gracieux
s’adresse à l’auteur de la décision contestée. Le recours hiérarchique est par contre adressé au
supérieur hiérarchique de l’auteur de la décision. Une sanction disciplinaire ne peut être prise
que par l’autorité administrative bénéficiant du pouvoir de nomination c’est-à-dire le ministre.
Par conséquent, toute suspension de la solde ne peut être contestée qu’en exerçant un recours
gracieux.

Ce recours doit être effectué par écrit et il doit être rédigé en langue française sur papier
libre. Le fonctionnaire doit motiver son recours. C’est-à-dire qu’il doit expliquer les raisons
de droit et les faits qui l’ont conduit à contester la décision. La copie de la décision contestée
est à joindre à la lettre, ainsi que tous les documents jugés nécessaires pour faire valoir ses
prétentions. Le recours doit être déposé au service courrier de l’administration et recevoir un
accusé de réception pour conserver une preuve du dépôt. Aux termes de l’article 42 du Code
des juridictions administratives (Loi nº17/84 du 29/12/1984), le recours gracieux doit être
introduit dans un délai de trois (3) mois à compter de la notification ou la publication de la
décision contestée. Une fois le recours reçu par le ministre, celui-ci doit répondre au
fonctionnaire qui l’a saisi.

B. La réponse de l’autorité administrative

Ayant reçu et examiné le recours gracieux dans les délais réglementaires, l’autorité
administrative doit donner une réponse aux demandes de l’agent public. Devant le recours
gracieux qui lui a été adressé, le ministre peut donner une réponse favorable. En effet, si
l’autorité administrative reconnait avoir commis des erreurs dans sa décision, il devrait
répondre favorablement aux demandes du fonctionnaire. Dans son recours, le fonctionnaire
peut demander la modification ou l’abrogation de la décision portant suspension de sa solde.
Le ministre doit alors abroger ou modifier la sanction. C’est ce qui est constaté dans la
jurisprudence Houlbreque dans laquelle le Conseil d’Etat français considère que « l’exercice

73
Dictionnaire de droit administratif, 7e éd., Paris, Dalloz, 2015, p.415 : « Le retrait d’un acte équivaut à
l’annulation de cet acte par l’autorité administrative : opérant ab initio, il anéanti l’acte dès l’origine et supprime
ses effets aussi bien passés que futures. L’acte retiré -ou « rapporté » - disparaît totalement de l’ordonnancement
juridique ».
74
Dictionnaire de droit administratif, 7e éd., Paris, Dalloz, 2015, p.1 : « L’abrogation est l’acte par lequel
l’autorité administrative compétente décide, explicitement ou implicitement, de mettre fin à l’existence de tout
ou partie d’un acte antérieur. Elle n’a d’effets que pour l’avenir contrairement au retrait ».

42
du recours administratif préalable … a pour but de permettre à l’autorité administrative, dans
la limite de ses compétences, de remédier aux illégalités dont pourrait être entachée la
décision initiale, sans attendre l’intervention du juge »75.

Cependant, le ministre peut aussi donner une réponse défavorable aux demandes
formulées dans le recours gracieux. En effet, le ministre, en estimant que les arguments du
fonctionnaire ne sont pas suffisants, rejette totalement les prétentions mentionnées dans le
recours de ce dernier. Dans ce cas, la suspension de la solde reste maintenue.

Il faut aussi préciser que la décision contestée va demeurer en l’état si le ministre ne


donne pas de réponse après quatre (4) mois au recours gracieux car son silence vaut rejet
implicite du recours. C’est ce qui ressort des dispositions de l’article 43 du Code des
juridictions administratives de 1984 en son alinéa premier : « Le silence gardé plus de quatre
mois au recours administratif préalable par l’autorité compétente prévue à l’article précédent
vaut rejet implicite ». Devant la décision de rejet du ministre, le fonctionnaire lésé dispose
d’un droit pour l’attaquer devant le juge.

Paragraphe 2 : Le recours juridictionnel

Pour la résolution juridictionnelle du contentieux de la suspension de la solde, une seule


juridiction, dans l’ordre administrative, reste compétente en premier et dernier ressort (A). En
saisissant cette juridiction, le fonctionnaire devra, dans sa requête, formuler le type de recours
à introduire (B).

A. La détermination de la juridiction compétente

Même si le juge judiciaire intervient souvent dans les litiges impliquant une personne
publique (CE, 31 juillet, 191, Société des granits porphyroïdes des vosges), le juge
administratif reste en principe le juge de l’administration et de ses actes. Cette compétence a
été pour l’essentiel déterminée par les lois nº17/84 portant code des juridictions
administratives, nº5/2002 sur le Conseil d’Etat et nº7/94 portant organisation de la justice.
Il faut aussi préciser que dans l’ensemble des juridictions administratives, les compétences
75
CE, 18 novembre 2005 : Rec. CE p.513

43
sont partagées. Les recours pour excès de pouvoir formés contre les actes individuels des
autorités administratives à compétence nationale, les recours en annulation dirigés contre des
décisions administratives et disciplinaires prises par les organismes collégiaux à compétence
nationale et des actions en responsabilité contre l’Etat ou ses établissements publics, pour ne
citer que ceux-ci, sont, aux termes des dispositions de l’article 38 de la loi nº 5/2002, de la
compétence exclusive du Conseil d’Etat. C’est donc devant la haute juridiction administrative
que le fonctionnaire devra introduire sa requête car c’est une action en responsabilité contre
l’Etat qui doit être exercée. Dans la mesure où la décision attaquée a fini par causer un
préjudice au fonctionnaire, il serait judicieux pour lui de former un recours de pleine
juridiction.

B. Le recours de pleine juridiction

Le recours de pleine juridiction ou encore le recours de plein contentieux se caractérise


par l’étendue des pouvoirs reconnus au juge administratif. En effet, il est un recours par lequel
il est possible de demander au juge, la validation ou l’annulation d’un acte administratif, mais
également de le reformer, de lui en substituer un nouveau ou encore de condamner l’Etat au
paiement d’une somme d’argent. Ici, le juge a le devoir de rétablir le requérant dans son droit
méconnu par l’administration. C’est par exemple le cas où le Conseil d’Etat gabonais, dans
son arrêt rendu le 26 avril 2019 avait condamné l’Etat gabonais au paiement de la somme de
vingt-cinq millions de francs CFA (25.000.000) à titre de dommages-intérêts76. C’est ainsi,
également, que les hauts juges de cette même juridiction avait condamné l’Etat gabonais à
payer à Sieur B la somme de deux millions de francs CFA (2.000.000) à titre de dommages-
intérêts pour réparer son préjudice subi lors de la suspension illégale de sa solde77.

Lorsque la décision portant suspension de la solde est estimée irrégulière, le


fonctionnaire a le droit de saisir le Conseil d’Etat au sortir d’un recours administratif
défavorable. Devant le juge, il doit former un recours de pleine juridiction pour faire retenir la
responsabilité de l’Etat qui conduira à sa condamnation au paiement des dommages-intérêts.

76
CE, 26 avril 2019, Léon GWA c/ Etat Gabonais
77
CE, 24 juin 2016, nº171/2015-2016, Sieur Fap KOLO c/ l’Etat Gabonais

44
A cause de ces nombreuses condamnations, l’Etat perd de grandes sommes d’argent.
C’est d’ailleurs ce que révèle, en 2015, le Directeur des Affaires Juridiques du Ministère de
l’Education Nationale et de l’Enseignement Technique.

Pour lui, « chaque année, pour tout procès perdu, l’Etat dépense des sommes
importantes en paiement de dommages et intérêts, ce qui explique le coût sans cesse croissant
du contentieux relatif à la rémunération des agents publics qui est de l’ordre de deux cent
millions de francs CFA (200.000.000) pour l’année 2011 » (voir l’annexe XIV). Pour atténuer
la fréquence du contentieux relatif à la suspension de la solde des fonctionnaires, il faudrait
envisager certaines perspectives permettant de l’éviter.

Section 2 : Les perspectives de l’évitement du contentieux de la suspension de la solde

Comme on a pu le voir, le contentieux de la suspension de la solde a de véritables


conséquences sur les finances de l’Etat. Pour l’éviter, il faudrait prendre des sanctions contre
les auteurs des suspensions illégales des soldes (paragraphe 1) et aussi vulgariser le régime
disciplinaire de la fonction publique (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La prise des sanctions contre les autorités administratives

Sanctionner une personne permet à ce qu’elle ne puisse plus reproduire la même faute,
la sanction a un effet dissuasif, c’est pourquoi l’Etat devrait exercer une action récursoire (A)
contre une autorité administrative ou la rétrograder (B) lorsqu’elle méconnait les règles
disciplinaires.

A. L’exercice de l’action récursoire

Lorsque l’Etat paye des sommes en réparation des préjudices subis par des
fonctionnaires du fait des fautes personnelles pouvant se cumuler avec les fautes de services
commises par des autorités administratives, il devrait exercer une action récursoire contre
celles-ci.

45
En effet, dans le cadre du cumul de responsabilités, la victime a le choix d’engager la
responsabilité du plus solvable. Naturellement, c’est souvent l’Etat qui paye pour le compte
d’un de ses agents publics ou d’un de ses représentants, auteur de la faute personnelle non
détachable du service. Dans ce cas, l’Etat a le droit de se retourner en justice contre ces
derniers pour demander le remboursement des sommes dépensées. C’est ainsi que l’article 2
du décret nº00098/PR/MBCP du 19 mars 2018 fixant les modalités de mise œuvre de l’action
récursoire de l’Etat dispose en substance que l’action récursoire a pour finalité l’obtention du
remboursement total ou partiel des sommes effectivement payées à des tiers par
l’Administration, en réparation des faits dommageables à ceux causés par tout agent public,
préposé ou mandataire de l’Administration, lorsque ces faits sont imputables à une faute
personnelle.

Il est constaté, dans le secteur de l’Education Nationale, qu’il y a des autorités qui
prennent des sanctions disciplinaires en lieu et place des personnes habilitées dans le but de
satisfaire un intérêt personnel. On peut voir ce cas dans une décision juridictionnelle où le
Conseil d’Etat a pu estimer que « les mesures disciplinaires dont se plaint le requérant ont été
décidées et appliquées en dehors de toutes saisine de l’organe disciplinaire habilité »78. Ainsi,
par cet acte, il est perçu une intention volontaire de l’auteur de la suspension de la solde de
nuire. C’est à ce type de personne que l’Etat devrait donc exercer une action récursoire dans le
but de sanctionner mais surtout de prévenir une autre faute de ce genre. A côté de cette
sanction pécuniaire, l’Etat devrait aussi envisager la rétrogradation de ces autorités
administratives malfaisantes.

B. La rétrogradation des autorités administratives malfaisantes

Les autorités administratives malfaisantes, c’est-à-dire celles qui ordonnent les


suspensions des soldes dans le but de satisfaire un intérêt personnel tout en ne respectant pas
le régime disciplinaire, commettent une faute grave et devraient, par conséquent, subir une
destitution de leurs fonctions voire une rétrogradation pour incompétence. En effet, il ne
devrait être laissé impuni toute personne qui par son fait cause à une autre un préjudice. Ces
autorités administratives occasionnent par leurs fautes des dépenses énormes à l’Etat dans le

78
CE, 26 mai 2017, Mme K c/ Etat gabonais

46
cadre du paiement des dommage-intérêts. On peut le voir par exemple dans une affaire79 citée
plus haut où le Conseil d’Etat a condamné l’Etat à payer la somme de vingt-cinq millions de
francs CFA (25.000.000) à titre de dommage-intérêts. Ainsi, ces faits qui revêtent une
certaine gravité doivent inciter l’Etat à destituer ces autorités ou de les rétrograder.

Réaliser une destitution consistera à déposséder l’autorité administrative ayant un statut


spécial de sa fonction. C’est par exemple le cas où, dans un communiqué de la primature
gabonaise du 12 septembre 202280, le Président de la République, par un décret, avait dissout
le Ministère des Travaux Publiques, de l’Equipement et des Infrastructures pour exprimer sa
colère par rapport aux lenteurs, constamment observées et dénoncées par lui, dans la
réhabilitation du réseau routier national.

Prévue au nombre des sanctions majeures par le Statut Général des fonctionnaires en
son article 129, la rétrogradation quant à elle va consister à placer l’autorité fautive dans un
grade inférieur à celui qu’elle détenait. Une fois rétrogradé, l’autorité administrative n’aura
plus vocation à exercer les mêmes fonctions qu’auparavant. Il peut faire l’objet d’un
changement d’affectation lorsque les fonctions qu’il exerçait ne sont plus compatibles avec
son nouveau grade. Sanctionner une autorité administrative qui méconnait la procédure de la
suspension de la solde par une action récursoire ou par une rétrogradation reviendrait à
prévenir le contentieux de la suspension de la solde. Ces sanctions ne demeurent pas les seuls
moyens de prévention du contentieux. La vulgarisation du régime disciplinaire de la fonction
publique peut également le prévenir.

Paragraphe 2 : La vulgarisation du régime disciplinaire

La vulgarisation est une forme de diffusion pédagogique des connaissances à un grand


public. Ici le public concerné reste les autorités administratives. L’Etat doit organiser, pour
prévenir des éventuels contentieux relatifs à la suspension de la solde, des séminaires (A) qui
permettront aux autorités de prendre connaissance du régime disciplinaire appliqué dans la
fonction publique ou encore les mettre en stage de formation (B).

79
CE, 24 juin 2016, nº171/2015-2016, Sieur L.B c/ l’Etat Gabonais
80
Gabon Matin. (13 septembre 2022), « Dissolution des Travaux publics au Gabon : Communiqué de la
primature du 12 septembre 2022 », Gabonmatin.com, 13 septembre 2022, https://gabonmation.com/dissolution-
des-travaux-publics-au-gabon-communiqué-de-la-primature-du-12.html (consulté le 11 janvier 2023)

47
A. L’organisation des séminaires de formation

Pour prévenir un éventuel contentieux relatif à la suspension de la solde, l’Etat devrait


organiser, pour toute autorité administrative détentrice du pouvoir disciplinaire, des
séminaires de formation portant sur le régime disciplinaire de la fonction publique.
En effet, en s’appuyant sur le principe « nul n’est censé ignorer la loi », ces autorités doivent à
tout prix prendre connaissance des règles et sanctions prévues dans le cadre disciplinaire de la
fonction publique à travers des séminaires de formation.

Un séminaire consiste à organiser des sessions de formations c’est-à-dire des


enseignements au sein d’un groupe de personnes bien distinguées. Ainsi, le séminaire aura
pour but de développer le savoir-faire, les compétences professionnelles et personnelles des
autorités afin de les rendre plus efficaces et plus performants. C’est ce qu’avait fait, par
exemple, en avril 2010, le ministère de l’Education Nationale. Dans un communiqué il
informait « les Inspecteurs Délégués d’Académie de ce qu’il organise à leur intention, (…),
un séminaire, entrant selon toute vraisemblance, dans le réglage de la tenue prochaine des
Etats généraux de l’Education »81.

Comme on peut le voir, l’organisation d’un séminaire est très utile et surtout bénéfique
pour les participants car ils sortent de là très enrichis. Grâce à ces séminaires, les autorités
disciplinaires de l’Education Nationale n’auront plus d’excuses pour justifier leurs éventuelles
fautes commises dans l’application des règles relatives à la suspension de la solde. Mais cela
ne devrait pas être fait seulement pour les autorités administratives. Les séminaires portant sur
l’enseignement du régime disciplinaire de la fonction publique devraient également inclure
l’ensemble des agents publics de l’Education Nationale car beaucoup d’entre eux
méconnaissent les règles disciplinaires. A côté des séminaires très enrichissants, il faudrait
aussi envisager la mise en stage de certaines autorités administratives.

B. La mise en stage

81
Mandian Sidibe, « Le ministère de l’Education Nationale organise un séminaire à l’intention des Inspecteurs
Délégués d’Académie et autres hauts cadres du département ». fr.allafrica.com, 22 avril 2010,
https://fr.allafrica.com/stories/201001221018.html (consulté le 13 janvier 2023)

48
Dans l’Administration gabonaise, il est souvent constaté que certaines personnes sont
promues à des postes de décisions alors même que leurs profils n’y correspondent pas. C’est
la raison pour laquelle, on observe quelque fois une lenteur dans l’exécution du service
public. Certains dossiers administratifs prennent beaucoup de temps avant d’être traités parce
que certaines autorités administratives nouvellement nommées ne maitrisent pas encore les
techniques relatives au traitement de ceux-ci. C’est donc ce genre de personnes, face à un
problème nécessitant une réponse urgente comme la grève, qui prennent souvent des décisions
hâtives tout en méconnaissant les règles procédurales. Ce sont ces autorités qu’il faudra
envoyer en stage après leur nomination.

En effet, si un stage a pour objectif premier de mettre en pratique des connaissances


théoriques, il a aussi pour objectif d’acquérir une expérience professionnelle. L’article 55 du
Code de déontologie de la fonction publique dispose en substance que l’agent public doit faire
preuve de professionnalisme par son comportement au travail et par l’effort constant à se
perfectionner, à approfondir et actualiser ses connaissances. D’où l’utilité d’aller en stage
pour se former et se perfectionner car c’est un droit et un devoir pour le fonctionnaire (Art.
145 du Statut général de la fonction publique). L’article 146 du même Code précise quant à
lui que le stage de formation est accordé par l’autorité compétente. Ainsi donc, une personne
nommée au poste de directeur général qui n’a pas des aptitudes pour exercer le poste doit être
envoyée en stage. C’est par ce moyen que les autorités administratives qui méconnaissent le
régime disciplinaire de la fonction publique pourront désormais mieux appréhender la
matière ; les suspensions de la solde seront moins controversées et les dépenses de l’Etat dans
le cadre du paiement des dommages et intérêts seront moindres.

CONCLUSION

49
Ce mémoire de fin d’études a eu pour objectif de répondre à la question de savoir si la
suspension de la solde a une procédure qui présente des garanties aux fonctionnaires du
Ministère de l’Education Nationale. La suspension de la solde étant une décision disciplinaire,
celle-ci est bien évidement préparée dans le cadre d’une procédure disciplinaire dans laquelle
les fonctionnaires qui doivent la subir bénéficient des garanties pour leur défense. Cette
réponse est confortée par des arguments plausibles issus du fruit de nos recherches.

Pour que la suspension de la solde soit faite, des étapes doivent être correctement
accomplies. C’est en cela que l’effectivité de cette sanction disciplinaire obéit à une
procédure. En effet, elle commence lorsque des fautes disciplinaires sont constatées et surtout
dès que les poursuites disciplinaire sont entamées par les autorités administratives investies du
pouvoir disciplinaire. Ce sont elles qui, selon le statut général de la fonction publique en son
article 88, ont le pouvoir de sanction. Lorsque la sanction prévue est majeure, c’est-à-dire que
la suspension de la solde est envisagée pour une durée de six mois, le conseil de discipline
doit être saisi par l’autorité qui prépare la décision pour obtenir son avis comme prévu par
l’article 88 précité. Une fois l’instruction du dossier achevée, l’autorité détentrice du pouvoir
disciplinaire prend une décision préalable à la suspension de la solde dans laquelle il est
demandé, avec justification, au ministre en charge des finances et des comptes publics de
suspendre la solde des fonctionnaires. L’exécution de cette suspension est faite par la
direction de la solde.

Mais avant qu’il ne soit finalement décidé de suspendre la solde, les fonctionnaires
devront tout d’abord se défendre devant les autorités disciplinaires car ils bénéficient des
garanties de défense dans cette procédure. En effet, lorsque la solde est susceptible d’être
suspendue, les autorités disciplinaires doivent d’abord informer les fonctionnaires fautifs de
l’ouverture de la procédure ainsi que la nature et la formulation des griefs retenus contre eux.
Dans cette information, il doit être indiqué que les fonctionnaires peuvent être assistés par un
défenseur de leur choix. Pour mieux se préparer pour leur défense devant les autorités
disciplinaires, les fonctionnaires doivent recevoir communication de leur dossier. Cette règle
est impérative car est d’origine légale. La suspension de la solde des fonctionnaires est donc
encadrée par des règles de procédure et de garanties de défenses.

Cependant, ces règles sont totalement méconnues en pratique. La procédure est souvent
viciée et les garanties des fonctionnaires méprisées. En effet, il est constaté que dans la

50
procédure de la suspension de la solde, il y a des autorités non habilités qui interviennent. Le
plus grave c’est qu’il existe des suspensions de solde prononcées sans justes motifs. Les griefs
retenus contre certains fonctionnaires ne sont pas souvent prouvés. Cela montre qu’il y a des
autorités détentrices du pouvoir disciplinaire qui font preuve d’abus d’autorité. Souvent,
même lorsqu’il existe bel et bien une faute disciplinaire imputable à son auteur, les autorités
disciplinaires préfèrent se passer de la procédure légale. Elles saisissent directement la
direction de la solde en faisant fi de la tutelle, c’est-à-dire le ministère budget et des comptes
publics. En méconnaissant volontairement les règles de la procédure menant à la suspension
de la solde, ce sont les garanties de défenses des fonctionnaires qui alors rejetées.

Le mépris de ces garanties qui figurent dans la procédure de la suspension de la solde


entraine de facto un contentieux dont la résolution part en faveur des fonctionnaires si et
seulement s’ils parviennent à bien suivre la procédure contentieuse. Elle commence par un
recours administratif préalable qui va déboucher sur la saisine du Conseil d’Etat au cas où la
réponse de l’autorité administrative est défavorable.

En somme, la suspension de la solde des fonctionnaires est faite suivant une procédure
bien déterminée par les textes en vigueurs. Dans cette procédure, les fonctionnaires
bénéficient de garanties pour leur défense. S’il arrivait que celles-ci ne soient pas respectées,
le contentieux qui en découlera fera inéluctablement perdre de l’argent à l’Etat.

Le résultat de ce travail est issu d’une recherche qui n’a porté que sur un pan de la
Fonction publique qui est celui de l’Education. Son impact serait certainement tout autre s’il
était poursuivi dans les autres secteurs de la Fonction publique.

BIBLIOGRAPHIE

I. Ouvrages

51
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éd., Paris, Gualino-Lextenso, Coll. « Fonction publique », 2021
Direction Générale de l’Administration et de la Fonction Publique, La discipline dans la
fonction publique de l’Etat, Paris, La Documentation Française, 1998
DURKHEIM Émile, Les règles de la méthode sociologique, Paris, PUF, 1983

FOUGÈRE Louis, La Fonction Publique, Bruxelles, Institut international des sciences


administratives, 1966
HAURIOU Maurice, Précis de droit administratif et du droit public, 11e éd. Paris, Sirey, 1927
LACHAUME Jean-François et Virot-Landais Aurélie, La fonction publique, 4e éd. Paris,
Dalloz, coll. « Connaissance du droit », 2017
MAURIN André, Droit administratif, Paris, Dalloz-Sirey, 2018
ROBERT (J-H), Droit pénal général, Paris, PUF, 6ème éd., 2005

II. Articles

BLANC Guillaume, « Motifs et motivations des décisions administratives », La Revue


administrative, Volume 51, nº304 (Juillet - Aout 1998), p.495 à 500
CARCELLE Pierre et MAS Georges, « Les principes généraux du droit applicables à la
fonction publique », La Revue administrative, nº66 (Novembre-Décembre 1958), pages 606 à
623
CLOUZOT Ludivine, « l’abandon de poste en droit de la fonction publique », R.F.D.A.
janvier-février 2104, p.123 et suivant.

COUTANT Pierre, « Une institution particulière du droit disciplinaire de la fonction


publique : la communication du dossier », La Revue administrative, nº46 (Juillet-Août 1955),
pages 398 à 400
GARANT Patrice, « Le droit disciplinaire de la fonction publique », Relations industrielles,
Volume 27, nº3, 1972

III. Lois et règlements

Lois
Constitution française du 27 octobre 1946.
Constitution gabonaise du 26 mars 1991.

52
Loi nº17/84 du 29 décembre 1984 portant Code des juridictions administratives.
Loi nº8/91 du 26 septembre 1991 portant Statut général des fonctionnaires.
Loi nº20/92 du 8 mars 1993 fixant les statuts particuliers des fonctionnaires du secteur
Education.
Loi nº18/92 du 18 mai 1993 fixant les conditions de constitution et le fonctionnement des
organisations syndicales des agents de l’Etat.
Loi organique nº5/2002 du 27 novembre 2002 fixant l’organisation, la compétence et le
fonctionnement du Conseil d’Etat.
Loi nº001/2005 du 4 février 2005 portant statut général de la fonction publique.
La loi nº14/2005 du 8 aout 2005 portant code de déontologie de la fonction publique.
Loi n°042/2018 du 05 juillet 2019 portant Code Pénal de la République Gabonaise.

Décrets
Décret nº254/PR/MFPRA/MFBP du 1er mars 1994 réglementant les conditions et modalités de
privation de la rémunération des personnels de l’Etat, en cas d’inobservation de certaines
obligations de service.
Décret nº000375/ PR/MFPRAME du 26 mai 2000 fixant la composition, l’organisation et le
fonctionnement des conseils disciplines.
Décret nº29/PR/MJGSDHRIC du 16 janvier 2013 portant création et organisation d’une
direction centrale des affaires juridiques dans les ministères.
Décret nº0404/PR/MBCP/MFPRA du 20/08/2015 fixant le régime de rémunération des agents
civils de l’Etat et portant reclassement.
Décret nº00098/PR/MBCP du 19 mars 2018 fixant les modalités de mise œuvre de l’action
récursoire de l’Etat.
Décret nº216/PR/MFPMSPRE/MBCP du 17 septembre 2018 réglementant les modalités de
privation de la rémunération d’un agent public.

Circulaire
Circulaire nº0144/MEFPTFP/CAB-M du 2 mars 2021 sur l’exercice du droit de grève.

IV. Sites internet

AllAfrica : https://fr.allafrica.com/stories/201001221018.html

53
Gabonactu : https://gabonactu.com/pour-suspensin-non-justiffiée-de-leurs-soldes-les-enseignants-du-
centre-internationnal-denseignement-professionnels-de-nkok-rentrent-en-greve/

Gabonactu : https://gabonactu.com/le-directeur-de-la-solde-mis-en-examen-pour-suspension-injuste-
des-salaires-des-agents-du-ces/
French.china.org.cn : https://:french.china.org.cn/foreign/txt/2015-03/25/content_35145946.htm

Gabon Matin : https://gabonmation.com/dissolution-des-travaux-publics-au-gabon-communiqué-de-


la-primature-du-12.html

GabonReview : https://www.gabonreview.com/education-nationale-florentin-moussavou-passe-a-la-
sanction/

V. Jurisprudence

Conseil d’État

CE 5 mai 1877, Laumonnier-Carriol

CE 7 août 1909, Winkell, Lebon 826

CE 22 octobre 1937, Dlle Minaire et autres, concl.Lagrange

CE, sect., 9 janv. 1931, Abbé Cadel, S. 1931.3.41, note Bonnard

CE, 7 septembre 1945, Morrie

CE, ass, 13 juillet 1966, Féd. Édu. Nat. Et synd. Gén. Nat. (CFTC) : Lebon, p.497 ; AJDA
1967, p.51, concl. Rigaud
CE, 2 mars 1979, Cne d’Asinières-sur-Oise : Lebon, p.92

CE, 7 novembre, 1986, nº59373, Edwige : AJDA 1987, p. 286

CE, 11 juin 1997, nº142167, Nevez : Lebon, Tables, p.905

CE, 18 novembre 2005 : Rec. CE p.513

CE, 29 avril 2016, Pol KEMBO c/ Etat gabonais

CE, 24 juin 2016, nº171/2015-2016, Fap KOLO c/ l’Etat gabonais


CE, 28 juillet 2016, SOLANGE c/ Etat gabonais

54
CE, 28 avril 2017, WALY Mars c/ Etat gabonais
CE, 26 mai 2017, KANI BONPRIX c/ Etat gabonais
CE, juge des référés, 16 juin 2017, nº007/2016-2017, TOPE c/ l’Etat gabonais

CE 1er et 4e ch.-r., 18 juillet 2018, nº418844, publié au recueil Lebon

CE, 23 avril 2019, GWA Léon c/ Etat gabonais

Cour administrative d’appel

CAA Bordeaux, 1er décembre 2015, Mme B., 14BX02812

CAA Douai, 31 janvier 2019, req. nº 17DA00621

Tribunal des conflits


TC, 8 février, 1873, BLANCO

T.C, 5 mai 1877, Laumonnier-Carriol

T.C, 19 octobre 1998, 03131, mentionné au aux tables du recueil Lebon

Tribunal administratif
T.A.23 mai 1968, N’DONGO

ANNEXES

Annexe I : Décret nº0404/PR/MBCP/MFPRA du 20/08/2015 fixant le régime de


rémunération des agents civils de l’Etat et portant reclassement.

55
Annexe II : Décret nº254/PR/MFPPRA/MFBP du 1er mars 1994 réglementant les
conditions et les modalités de privation de la rémunération des personnels de l’Etat en
cas d’inobservation de certaines obligation de service.

Annexe III : Décret nº216/PR/MFPMSPRE/MBCP du 17 septembre 2018 réglementant


les modalités de privation de la rémunération d’un agent public.

Annexe IV : Circulaire nº0144/MEFPTFP/CAB-M du 2 mars 2021 sur l’exercice du


droit de grève.

Annexe V : Décision du Conseil d’Etat, juge des référés, 16 juin 2017, nº007/2016-2017,
TOPE c/ l’Etat gabonais.

Annexe VI : Décision du Conseil d’Etat, 26 avril 2019, Sieur GWA Léon c/ Etat
gabonais.

Annexe VII : Décret n°375/PR/MFPRAME du 26 mai 2000 fixant la composition,


l’organisation et le fonctionnement des conseils de discipline.
Annexe VIII : Décision du Conseil d’Etat, 8 juillet 2016, SOLANGE c/ Etat gabonais.
Annexe IX : Décision du Conseil d’Etat, 24 juin 2016, nº171/2015-2016, Sieur L.B c/
l’Etat gabonais.
Annexe X : Décision du Conseil d’Etat, 29 avril 2016, Pol KEMBO c/ Etat gabonais.
Annexe XI : Décision du Conseil d’Etat, 28 avril 2017, WALY Mars c/ Etat gabonais.
Annexe XII : Fiche Technique du Directeur des Affaires Juridiques à l’attention de
Monsieur le Secrétaire Général du Ministère de l’Education Nationale et de
l’Enseignement Technique.

Annexe XIII : Décision du Conseil d’Etat, 26 mai 2017, KANI BONPRIX c/ Etat
gabonais

TABLES DES MATIERES

INTRODUCTION................................................................................................................................1
PREMIERE PARTIE : LA PROCEDURE DE LA SUSPENSION DE LA SOLDE......................7

56
CHAPITRE 1 : LES FAITS GENERATEURS DE LA SUSPENSION DE LA SOLDE............9

Section 1 : La commission d’une faute disciplinaire..................................................................9


Paragraphe1 : Les manquements aux obligations professionnelles......................................9
A. Les manquements aux obligations liées à la qualité d’agent public........................10
B. Les manquements aux obligations liées à l’exécution du service.............................11
Paragraphe 2 : la participation à un mouvement de grève..................................................12
A. L’exercice du droit de grève dans la fonction publique...........................................12
B. Les conséquences des agissements observés dans la grève.......................................14
Section 2 : La suspension des fonctions.....................................................................................15
Paragraphe 1 : Les conditions d’application de la suspension............................................16
A. La vraisemblance des faits.........................................................................................16
B. La gravité des faits......................................................................................................17
Paragraphe 2 : Les effets de la suspension des fonctions.....................................................18
A. La situation administrative du fonctionnaire suspendu...........................................18
B. La conséquence de la suspension des fonctions sur le traitement............................19
CHAPITRE 2 : LA MISE EN ŒUVRE DE LA PROCEDURE.................................................21

Section 1 : Les autorités intervenant dans la procédure de la suspension de la solde...........21


Paragraphe 1 : Les autorités investies du pouvoir disciplinaire.........................................21
A. Le ministre responsable du fonctionnaire.................................................................21
B. Le gouverneur de province et le chef de mission diplomatique...............................22
Paragraphe 2 : Le conseil de discipline.................................................................................23
A. La saisine et la composition du conseil de discipline................................................23
B. Les garanties de la défense du fonctionnaire............................................................24
Section 2 : Le processus de suspension de la solde...................................................................25
Paragraphe 1 : La décision administrative préalable à la suspension de la solde..............25
A. La forme de la décision administrative.....................................................................26
B. La justification de la décision.....................................................................................27
Paragraphe 2 : L’exécution de la suspension de la solde.....................................................27
A. L’exécution de la suspension par la direction de la solde........................................28
B. La durée et les effets de la suspension de la solde.....................................................29
DEUXIEME PARTIE : LE CONTENTIEUX DE LA SUSPENSION DE LA SOLDE...............30
CHAPITRE 3 : LA NATURE DU CONTENTIEUX DE LA SUSPENSION DE LA SOLDE.32

Section 1 : Le contentieux de la légalité....................................................................................32


Paragraphe 1 : Les manquements observés dans la procédure...........................................32
A. L’intervention des autorités incompétentes dans la procédure...............................32

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B. L’absence de décision administrative servant de support à la suspension de la
solde.....................................................................................................................................34
Paragraphe 2 : La violation direct des dispositions légales.................................................35
A. La suspension de la solde sans juste motif................................................................35
B. La rétention abusive des prestations familiales........................................................36
Section 2 : Le contentieux de la responsabilité.........................................................................37
Paragraphe 1 : La détermination de la responsabilité personnelle.....................................37
A. La commission d’une faute personnelle....................................................................37
B. Le juge judicaire, juge de la faute personnelle.........................................................38
Paragraphe 2 : La responsabilité administrative de l’Etat..................................................39
A. La commission d’une faute de service.......................................................................39
B. Le juge administratif, juge de la faute de service.....................................................40
CHAPITRE 4 : LA PROCEDURE DU CONTENTIEUX DE LA SUSPENSION DE LA
SOLDE............................................................................................................................................42

Section 1 : Les voies du règlement du contentieux de la suspension de la solde....................42


Paragraphe 1 : Le recours administratif préalable..............................................................42
A. La saisine de l’autorité administrative......................................................................42
B. La réponse de l’autorité administrative....................................................................43
Paragraphe 2 : Le recours juridictionnel..............................................................................44
A. La détermination de la juridiction compétente........................................................44
B. Le recours de pleine juridiction.................................................................................45
Section 2 : Les perspectives de l’évitement du contentieux de la suspension de la solde.......46
Paragraphe 1 : La prise des sanctions contre les autorités administratives.......................46
A. L’exercice de l’action récursoire................................................................................46
B. La rétrogradation des autorités administratives malfaisantes................................47
Paragraphe 2 : La vulgarisation du régime disciplinaire....................................................48
A. L’organisation des séminaires de formation.............................................................49
B. La mise en stage..........................................................................................................50
BIBLIOGRAPHIE.............................................................................................................................53
ANNEXES...........................................................................................................................................57

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