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Aménorrhée
L Savey
J Nizard
Résumé. – L’aménorrhée n’est pas une maladie mais un symptôme, et à ce titre elle fait partie de la
sémiologie de nombreuses pathologies. La cause la plus fréquente d’aménorrhée primaire est le simple retard
pubertaire. L’aménorrhée secondaire est, quant à elle, souvent d’origine iatrogène. L’abord d’un tel
symptôme est simple dans la majorité des cas. On recherche, devant une aménorrhée primaire, la présence et
le niveau de développement des caractères sexuels secondaires, s’orientant vers une cause générale. Devant
une aménorrhée secondaire, on analyse plutôt la liste des traitements en cours ou passés, ainsi que le tractus
génital, organe par organe. Le traitement de l’aménorrhée doit d’abord être étiologique.
© 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Savey L et Nizard J. Aménorrhée. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Gynécologie, 156-A-10, 2001, 10 p.
156-A-10 Aménorrhée Gynécologie
CYCLES MENSTRUELS
¶ Absence d’extériorisation des règles par obstacle
mécanique
Ils vont, par la suite, être mensuels, d’une durée de 28 jours en
moyenne, rythmés par l’ovulation au 14e jour du cycle. Dans la Imperforation hyménéale
première moitié du cycle, appelée phase folliculaire, sous l’influence
principalement de la FSH, il va y avoir recrutement des follicules Découverte à l’examen physique, elle est suspectée devant des
puis sélection du follicule dominant. L’augmentation de l’œstradiol douleurs pelviennes cycliques chez une jeune fille après la puberté.
va induire le pic de LH, lui-même responsable 36 à 40 heures plus Elle peut cependant être parfois asymptomatique. C’est un
tard de l’ovulation. La seconde moitié du cycle menstruel est sous diagnostic rarement fait à la naissance, en dehors d’exceptionnelles
l’influence de la progestérone sécrétée par le corps jaune. En hydrométrocolpos.
l’absence de fécondation et de nidation, il y a chute de la Cliniquement, l’hymen est tendu, violacé et parfois bombant.
progestéronémie, déclenchant les règles (fig 1). L’échographie pelvienne recherche une distension vaginale ou
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Gynécologie Aménorrhée 156-A-10
utérine, voire un hémopéritoine. Le traitement chirurgical simple par épreuve à la progestérone. Cette entité est rare, mais elle a modifié
incision de l’hymen doit être réalisé pour éviter l’extension de la conception de la physiologie du cycle menstruel sur les rôles
l’hématocolpos en amont (hématométrie et hématosalpinx) et peut- respectifs de LH et FSH sur la stéroïdogenèse, le développement
être le risque d’endométriose. pubertaire et l’ovulation.
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d’atteinte sont possibles, de l’absence totale de symptôme à par polymerase chain reaction (PCR) peuvent se faire dans le liquide
l’aménorrhée primaire. Le traitement repose sur la substitution amniotique pour un diagnostic prénatal. Le dosage du 21-
œstroprogestative permanente afin d’améliorer le pronostic statural, désoxycortisol permet de dépister les patientes hétérozygotes
de provoquer et de compléter le développement pubertaire. (porteuses) dans une famille, lorsqu’un bloc en 21-hydroxylase est
diagnostiqué. Le traitement repose sur la corticothérapie qui freine
• Autres dysgénésies ovariennes l’hyperandrogénie et permet d’obtenir des grossesses. Cependant, la
régression des signes d’hyperandrogénie déjà présents avant
Elles sont plus rares que le syndrome de Turner et sont caractérisées
l’instauration du traitement est inconstante.
par la présence de matériel génétique appartenant au chromosome
Y. Ce fragment de chromosome Y, avec parfois le chromosome Pour mémoire, les tumeurs sécrétantes et l’hypercorticisme iatrogène
complet, implique la présence de tissu testiculaire comportant un peuvent être inclus dans ce paragraphe.
risque de cancérisation. Il s’accompagne d’ambiguïté sexuelle à
différents degrés. La dygénésie gonadique pure est caractérisée par ¶ Pseudohermaphrodisme masculin
l’absence de gonades chez un sujet de taille normale, sans anomalie
Ce sont des individus de génotype 46, XY porteurs de testicules et
associée. Il s’agit souvent de formes familiales. Le caryotype est 46,
de phénotype féminin ou ambigu.
XX ou 46, XY. Dans les cas où le génotype est masculin, le risque de
dysgerminome fait classiquement porter l’indication de résection Deux types de mécanismes expliquent ces phénomènes.
gonadique prophylactique. Cette dysgénésie gonadique peut – La testostérone est synthétisée en quantité insuffisante.
également être en rapport avec une mosaïque 45 XO/46 XY. Le Les rares cas de déficits en 17-hydroxylase ou 17-20-desmolases
phénotype peut alors être masculin, féminin ou ambigu. entraînent une féminisation complète, sans développement de
caractères sexuels secondaires féminins.
¶ Hypogonadisme hypogonadotrope
– La synthèse de testostérone est normale mais associée à un trouble de
Les formes acquises responsables d’aménorrhée primaire sont la réceptivité aux androgènes.
expliquées par les antécédents : radiothérapie ou chirurgie de la
région hypothalamohypophysaire, tumeur, etc [44]. – Anomalie des récepteurs : le déficit en récepteurs à la
testostérone dans les tissus-cibles entraîne une insensibilité aux
Ce sont les formes congénitales qui sont plus difficiles à androgènes. Il s’agit d’une anomalie génétique liée à l’X. La
diagnostiquer. On peut citer le syndrome de Kallman-Demorsier testostérone sécrétée in utero induit une inhibition du
(qui associe une agénésie de l’hypothalamus antérieur et des lobes développement des canaux de Müller, d’où une absence d’organes
olfactifs entraînant une anosmie), différentes mutations génitaux internes féminins. Le développement phénotypique reste
génotypiques (inhibitrices du récepteur de la GnRH, de certaines féminin car la testostérone n’est pas reconnue par les tissus
sous-unités des gonadotrophines), les associations avec d’autres périphériques. La production d’œstrogènes par les surrénales et
endocrinopathies (hypoplasie congénitale des surrénales, obésité les testicules intra-abdominaux ou partiellement descendus est
morbide par mutation du gène de la leptine ou de son récepteur) ou par ailleurs faible. L’absence de tractus génital féminin et la
d’autres atteintes neurologiques (syndromes de Willi-Prader- position des testicules sont confirmées par l’échographie
Labhart, de Laurence-Moon-Biedl-Bardet) [44]. abdominale. Le développement mammaire est normal, la pilosité
Elles se révèlent toutes par un impubérisme total, qui peut être pubienne et axillaire éparse. Le risque de transformation maligne
parfois partiel avec un développement mammaire. Il s’y associe une des testicules justifie une castration. Le dépistage anténatal est
aménorrhée primaire quasi constante [12]. S’il n’est par reconnu à possible dès lors qu’il y a un cas index dans la famille. Il existe
l’adolescence, l’hypogonadisme hypogonadotrope est responsable des formes incomplètes avec un développement phénotypique
de carence œstrogénique associée à l’aménorrhée primaire. masculin plus ou moins prononcé.
Les taux plasmatiques d’œstradiol, d’inhibine B, de LH et de FSH – Déficit en 5-a-réductase : il ne se pose pas devant une
sont bas. Les taux d’androgènes sont également bas par absence de aménorrhée primaire car il y a toujours un certain degré de
production ovarienne. Les ovaires ont un aspect prépubertaire, de virilisation dès la naissance. Ce déficit bloque la transformation
petite taille et sans follicules. de la testostérone en dihydrotestostérone active dans les tissus
Le traitement repose sur une substitution œstroprogestative afin de périnéaux.
permettre un développement pubertaire satisfaisant et une bonne
imprégnation œstrogénique par la suite. Pour obtenir une ovulation,
on peut utiliser une administration pulsatile de GnRH si l’origine
est hypothalamique ou une stimulation ovarienne directe par
Aménorrhée secondaire
administration de gonadotrophines.
Le contexte est différent. Plus encore que pour l’aménorrhée
Lorsqu’un hypogonadisme hypogonadotrophique est diagnostiqué,
primaire, la grossesse doit être éliminée en premier lieu. Il faut
il faut évoquer le diagnostic de panhypopituitarisme, et explorer
ensuite retenir les origines nutritionnelles, le syndrome des ovaires
toutes les fonctions hypothalamiques et hypophysaires.
polykystiques (OPK) et les hyperprolactinémies. Les autres causes
sont à connaître mais sont plus rares. La démarche diagnostique doit
¶ Pseudohermaphrodisme féminin
être conduite organe par organe.
Ces patientes, de génotype 46, XX, ont des signes cliniques de
virilisation. Ce sont des blocs enzymatiques : déficit en 21-
hydroxylase (de loin le plus fréquent), 11 bêta-hydroxylase, 3 bêta- ORIGINE CERVICALE
OH-déshydrogénase. Ces blocs sont responsables de signes cliniques Ce sont les sténoses du col utérin. La persistance de l’activité
de virilisation majeure. Ces anomalies sont diagnostiquées le plus cyclique ovarienne est responsable d’une hématométrie, avec,
souvent dès la naissance, du fait de l’importance des signes comme pour les cas d’imperforation hyménéale, des douleurs
cliniques. En revanche, les mutations autosomiques récessives pelviennes cycliques associées à une aménorrhée. Ces sténoses
concernant le gène de la 21-hydroxylase sont des blocs enzymatiques cervicales sont iatrogènes, secondaires le plus souvent à une
parfois moins francs, à révélation tardive. Ils sont responsables de 1 conisation, électrocoagulation, cryochirurgie ou traitement par laser.
à 10 % des hirsutismes féminins [35]. On peut observer des signes Les conisations au bistouri électrique suivies de sutures sont les plus
cliniques d’hyperandrogénie comme l’hirsutisme, l’acné ou sténosantes. Le diagnostic est clinique et échographique visualisant
l’hypertrophie clitoridienne. L’élévation des taux plasmatiques l’hématométrie (image hypoéchogène régulière et homogène
d’androgènes et de 17-hydroxyprogestérone confirme le diagnostic. soufflant la cavité endométriale, associée parfois à un épanchement
Le dosage de la 17-hydroxyprogestérone et l’analyse de l’ADN fœtal péritonéal).
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Gynécologie Aménorrhée 156-A-10
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156-A-10 Aménorrhée Gynécologie
Anorexie mentale
ORIGINE SUPRAOVARIENNE
L’anorexie mentale est une pathologie psychiatrique associant des
¶ Hypophysaire conduites alimentaires pathologiques et des conséquences
somatiques de cette conduite comme l’amaigrissement et
Hyperprolactinémie l’aménorrhée (le tout formant la triade classique : anorexie,
amaigrissement et aménorrhée). L’anorexie mentale touche 1 à 2 %
L’hyperprolactinémie est une cause fréquente d’hypogonadisme
des adolescents, avec une très nette prévalence féminine [4]. Les
hypogonadotrope. L’aménorrhée est très fréquente et la galactorrhée
troubles du comportement alimentaire ne sont pas tant l’anorexie
est plus classique que constante. L’hyperprolactinémie est soit
qu’une restriction active de l’alimentation. Les patientes
iatrogène, soit organique.
commencent par faire des régimes, trient leurs aliments, nient avoir
Les hyperprolactinémies iatrogènes sont la conséquence de faim, se font vomir après les repas ou utilisent des laxatifs avec tous
traitements psychotropes comme les neuroleptiques par exemple. Il leurs effets secondaires métaboliques. Elles ont peur de grossir et
est donc difficile d’arrêter le médicament en cause afin de traiter désirent maigrir. Sont parfois également associées des conduites
l’hyperprolactinémie. Pour faire la différence entre les causes boulimiques suivies de vomissements provoqués. L’aménorrhée est
iatrogènes et organiques, on s’aide de l’imagerie par le scanner le plus souvent secondaire. Les cas d’aménorrhée primaire dans
hypophysaire ou l’imagerie par résonance magnétique (IRM) et le l’anorexie mentale concernent des formes très précoces, rares et plus
test à la thyrotrophin releasing hormone (TRH). Dans le cas d’une sévères. Ces adolescentes ou jeunes femmes ont un profil
hyperprolactinémie iatrogène, l’imagerie ne retrouve pas d’anomalie psychologique particulier. Elles sont dynamiques, sportives,
et le test à la TRH montre une réponse caractérisée par une élévation studieuses et ont de bons résultats scolaires (d’où leur fréquence à
de la prolactine. Les adénomes à prolactine sont les tumeurs l’université). De plus, elles banalisent leurs symptômes. L’examen
hypophysaires les plus fréquentes. Leur répercussion sur le reste de physique est marqué par un amaigrissement, initialement faible et
la fonction hypophysaire est fonction de leur taille, pouvant, dans souvent dissimulé sous des habits amples. Les traits sont tirés, les
les volumineux macroadénomes, comprimer la totalité de yeux enfoncés dans les orbites, les cheveux secs et ternes, les ongles
l’hypophyse. Dans les hyperprolactinémies par adénome à cassants et l’on peut observer une hypertrichose avec un lanugo sur
prolactine, l’imagerie peut visualiser l’adénome et le test à la TRH le visage. Elles ont une pâleur, une froideur et une cyanose des
est dit bloqué. extrémités avec hypotension artérielle et parfois une amyotrophie
L’hyperprolactinémie peut être physiologiquement associée à une qui est alors tardive. Le rôle de la mère est primordial.
aménorrhée au cours de l’allaitement maternel. La durée de cette Omniprésente, elle a le plus souvent une personnalité
aménorrhée semble être en rapport avec plusieurs facteurs comme anxiophobique [4]. L’évolution de l’anorexie mentale est marquée par
l’importance du stimulus mamelonnaire (allaitement maternel une importante morbidité à long terme. Elle peut se faire vers les
exclusif, durée de l’allaitement au cours de la journée), la précocité troubles de l’humeur, les troubles névrotiques comme les phobies
de la première mise au sein après la naissance, la parité (avec une ou les troubles obsessionnels compulsifs. On observe 50 % de
aménorrhée plus longue chez les multipares), l’index de masse rechutes [4] et 7 % de décès par dénutrition ou suicide. Le traitement
corporelle (body mass index [BMI]) à la fin de la période de est nécessairement long, pouvant nécessiter de longues périodes
postpartum (avec une aménorrhée plus longue si l’index est bas) [43]. d’hospitalisation, ce qui représente un facteur péjoratif. Il ne faut
pas confondre l’anorexie mentale de l’adolescente avec l’anorexie
Autres causes non tumorales chez des patientes souffrant d’autres troubles psychiatriques, qu’ils
soient d’ordre névrotique ou psychotique.
Ce sont les séquelles de chirurgie hypophysaire et de
l’exceptionnelle nécrose hypophysaire dans le syndrome de L’aménorrhée est souvent le premier motif de consultation. Il y a
Sheehan, responsable d’un panhypopituitarisme. Il y a également une relation directe entre le cycle menstruel et l’état nutritionnel.
les envahissements hypophysaires, comme par exemple dans les On sait qu’une diminution calorique de 5 jours suffit à baisser la
hypophysites lymphocytaires, et les pathologies rares comme la pulsatilité de la LH et des concentrations plasmatiques d’œstradiol
sarcoïdose, l’hémochromatose et l’hystiocytose X. et de leptine [5]. L’état de maigreur s’accompagne d’une réduction
de la concentration de leptine qui a probablement des effets
Il faut rechercher également des séquelles de radiothérapie sur la
gonadotropes et ovariens. La leptine serait peut-être un lien
région sellaire.
important entre l’état nutritionnel et la régulation ovarienne [5]. Sont
évocateurs de l’origine nutritionnelle de l’aménorrhée la frilosité en
Autres causes tumorales
dehors des périodes d’activité physique, des troubles vasomoteurs
Ce sont les tumeurs hypophysaires autres que les adénomes à des extrémités, des signes d’hypœstrogénie (non spécifiques) et une
prolactine. Les adénomes somatotropes, corticotropes, thyréotropes, diminution de la vitesse de croissance si l’on est en période
gonadotropes, et les adénomes non sécrétants sont souvent pubertaire. Au niveau biologique, on observe une baisse de
également responsables d’une aménorrhée. L’ensemble des atteintes l’œstradiol, de la LH, de la FSH (baisse tardive car elle reste
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Gynécologie Aménorrhée 156-A-10
Stress
Le stress a été accusé d’être responsable, dans certaines situations
graves, de perturbations du cycle ovarien allant jusqu’à
l’anovulation avec une aménorrhée. La théorie physiopathologique
repose sur une activation très importante de l’axe hypothalamo-
hypophyso-surrénalien inhibant l’axe hypothalamo-hypophyso-
ovarien [18]. Ces théories n’ont pas encore été démontrées chez la
femme et reposent sur des données animales pour l’instant non
reproductibles [18].
Aménorrhée postpilule
C’est une situation très fréquente définie par l’absence de retour des
règles 3 mois après l’arrêt de la contraception orale. Il convient
initialement d’éliminer une grossesse et une hyperprolactinémie. Si
tout est normal, on rassure la patiente et on réalise un test à la
progestérone pour s’assurer de la bonne imprégnation œstrogénique
de l’endomètre. En cas d’hyperœstrogénie, on prescrit un traitement
progestatif séquentiel, et si les cycles ne reprennent pas, on peut
s’aider de la prescription de citrate de clomifène.
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¶ Examens complémentaires
Ils ont trois objectifs : confirmer l’intégrité anatomique, évaluer l’âge
osseux et situer le niveau de dysfonctionnement hormonal.
Échographie pelvienne.
Réalisée par voie sus-pubienne ou endovaginale si possible, elle
recherche la présence de l’utérus et des ovaires, les mesure et
apprécie certains paramètres comme la présence et la taille des
follicules sur les ovaires ou l’épaisseur de la muqueuse utérine.
Radiographies de squelette.
Elles permettent de déterminer l’âge osseux des patientes en s’aidant
d’atlas adaptés.
Explorations endocriniennes.
– La courbe ménothermique est rarement utile ici.
– Les dosages hormonaux utiles sont ceux de l’œstraliolémie, de la
progestéronémie et de la testostéronémie.
– Le dosage des gonadotrophines : LH et FSH.
– La TSH et la prolactinémie.
– Selon le contexte, on pratique en plus des dosages comme la delta-
4-androstènedionémie et la 17-OH-progestéronémie en cas de
virilisation.
– Le caryotype doit être facile en cas d’aménorrhée primaire.
Dans certains cas, on peut s’aider d’une cœlioscopie pour visualiser
l’utérus et les annexes, ou d’une urographie intraveineuse pour
rechercher des anomalies de l’arbre urinaire.
3 Stratégie d’exploration d’une aménorrhée secondaire.
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Gynécologie Aménorrhée 156-A-10
Les tests dynamiques hypophysaires ou hypothalamiques sont plus 50 % des femmes anorexiques ont une ostéodensité à − 2 déviations
rarement employés et utilisent les œstrogènes ou le citrate de standards pour leur âge [31]. Là encore, la perte osseuse est surtout
clominophène, le GnRH ou le TRH. trabéculaire et la gravité de l’ostéoporose est en rapport avec la
En cas de suspicion de ménopause précoce, on réalise : durée de l’aménorrhée et l’âge de début. Les rôles de
l’hypercorticisme, de la carence en calcium et vitamine D et de
– un caryotype (mosaïque, délétion/translocation du X, présence de l’exercice ne sont pas claires dans l’anorexie mentale. La densité
matériel appartenant au chromosome Y et nécessitant alors une osseuse augmente avec la prise de poids et le retour des règles, mais
gonadectomie afin d’éviter un gonadoblastome) ; ces patientes ne récupèrent pas toutes une densité osseuse normale.
– une échographie pelvienne pour s’assurer de la présence d’un ou
de deux ovaires ainsi que leurs caractéristiques et celle de l’utérus ;
DÉFICITS IATROGÉNIQUES EN GONADOTROPHINES
– un dosage plasmatique de la TSH ultrasensibilité (us) pour
Le traitement par les analogues en GnRH sont ostéopéniants après
éliminer l’hypothyroïdie car elle est souvent associée à l’insuffisance
ovarienne ; 6 mois de traitement, phénomène un peu diminué par l’add-back
therapy. Dans les aménorrhées induites par les progestatifs à
– une glycémie plasmatique à jeun à la recherche d’un diabète libération prolongée, l’ostéoporose est ici encore présente et en
insulinodépendant ; rapport avec la durée de l’aménorrhée et l’index de masse osseuse [9].
– un test au Synacthènet ordinaire car l’insuffisance surrénalienne
peut précéder l’insuffisance ovarienne ;
INSUFFISANCES OVARIENNES PRÉMATURÉES
– et enfin, la biopsie ovarienne, qui ne doit pas être systématique
Toutes les causes d’IOP sont responsables d’ostéoporose. Ces cas
dans ce contexte [8].
sont en augmentation avec l’augmentation des IOP par
chimiothérapie anticancéreuse. L’obésité semble être ici aussi une
légère protection contre cette carence œstrogénique. Cette carence
Conséquences de l’aménorrhée est améliorée par un apport en œstrogènes. Il est important de savoir
que ces IOP sont associées à plus de mortalité par maladie
Au niveau osseux, la carence œstrogénique est caractérisée par un cardiovasculaire, accident vasculaire cérébral et cancer [8].
déséquilibre dans la formation osseuse avec une plus grande
résorption par rapport à la formation. Le phénomène affecte plus
l’os trabéculaire que l’os cortical. AMÉNORRHÉES AU COURS DE LA LACTATION
Les cas d’hyperprolactinémie, d’exercice intense, de stress, de Les femmes qui allaitent ont une perte osseuse plus importante que
dénutrition, d’anorexie mentale et de traitement par les agonistes de les femmes qui utilisent un allaitement artificiel ou celles qui
la GnRH sont responsables d’un déficit acquis en GnRH qui va n’allaitent pas. Cette ostéopénie est temporaire, mais le niveau
diminuer le plus souvent la pulsatilité de la LH, diminuer la d’ostéopénie plusieurs mois après l’arrêt de l’allaitement ne dépend
folliculogenèse, entraîner l’anovulation, la chute des stéroïdes pas de la durée de l’allaitement. Laskey et al [27] concluent que ce
sexuels et finalement être responsable d’une ostéoporose. niveau variable d’ostéopénie après l’allaitement maternel est
probablement plus en rapport avec la grossesse en elle-même
qu’avec l’allaitement maternel. Dans leur étude sur les variations de
HYPERPROLACTINÉMIE densité osseuse au cours et après l’allaitement maternel, Polatti et
La perte osseuse est principalement trabéculaire, avec une intensité al [36] ont suivi plus de 300 femmes qui ont allaité pendant 6 mois et
proportionnelle à la durée de l’aménorrhée et pas au taux de ont été suivies jusqu’à 18 mois après l’accouchement. Au bout de
prolactinémie [31]. Il est probable que l’obésité soit une protection ces 18 mois, ils ont trouvé qu’il n’y avait pas de différence entre les
(relative) contre l’ostéoporose, probablement grâce à l’aromatisation femmes qui avaient allaité et celles qui avaient utilisé un allaitement
des androgènes dans le tissu adipeux. Le traitement de artificiel. Ces femmes ont toutes eu une supplémentation en calcium
l’hyperprolactinémie par les agonistes dopaminergiques et le au cours de l’étude.
rétablissement des cycles menstruels permettent de corriger en
partie l’ostéoporose. La plus grande partie de la correction de
l’ostéopénie se fait au cours de 12 premiers mois de traitement [31]. Traitement
Néanmoins, certaines patientes n’ont pas d’amélioration de leur
ostéoporose malgré une prolactinémie rétablie. Il faut donc
considérer ces femmes, quand elles seront physiologiquement Il n’est à évoquer qu’après avoir éliminé une grossesse. Le
ménopausées, comme à risque accru de fractures. traitement est alors spécifique de l’étiologie de l’aménorrhée.
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156-A-10 Aménorrhée Gynécologie
aussi vite une fertilité normale, car il peut persister des anomalies ANOMALIES CONGÉNITALES DU VAGIN
lutéales [4]. Les buts du traitement sont à court terme d’améliorer le Elles sont traitées chirurgicalement.
confort de la patiente en restaurant des cycles réguliers et une bonne
imprégnation hormonale, et à long terme d’arrêter ou d’éviter HYPERPROLACTINÉMIES
l’ostéoporose.
La prise en charge dépend de l’origine du trouble. Les causes
iatrogènes ou fonctionnelles sont identifiées et si possible corrigées.
SYNÉCHIES UTÉRINES Dans le cadre des causes organiques, se pose alors le problème de la
Le traitement repose sur la levée chirurgicale de la synéchie ; celle-ci chirurgie ou du traitement médicamenteux.
peut en général se faire sous hystéroscopie. Les suites sont Le traitement chirurgical utilise le plus souvent la voie
d’ordinaire simples mais peuvent être souvent marquées par l’échec transphénoïdale. Le traitement médicamenteux repose sur la
et la récidive, lorsque la synéchie est d’origine tuberculeuse [6]. bromocriptine.
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