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156-A-10

Encyclopédie Médico-Chirurgicale 156-A-10

Aménorrhée
L Savey
J Nizard
Résumé. – L’aménorrhée n’est pas une maladie mais un symptôme, et à ce titre elle fait partie de la
sémiologie de nombreuses pathologies. La cause la plus fréquente d’aménorrhée primaire est le simple retard
pubertaire. L’aménorrhée secondaire est, quant à elle, souvent d’origine iatrogène. L’abord d’un tel
symptôme est simple dans la majorité des cas. On recherche, devant une aménorrhée primaire, la présence et
le niveau de développement des caractères sexuels secondaires, s’orientant vers une cause générale. Devant
une aménorrhée secondaire, on analyse plutôt la liste des traitements en cours ou passés, ainsi que le tractus
génital, organe par organe. Le traitement de l’aménorrhée doit d’abord être étiologique.
© 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : aménorrhée primaire, aménorrhée secondaire, retard pubertaire, ovaires polykystiques,


insuffisance ovarienne précoce.

Introduction Tableau I. – Classification du développement mammaire au cours de


la puberté.
L’aménorrhée est un symptôme très fréquent. Cet article n’a pas
pour objectif de traiter toutes les maladies dont l’aménorrhée fait Stade Âge moyen Description
partie. On ne peut échapper à la distinction classique entre 1 S1 Pré-adolescence Élévation du mamelon
l’aménorrhée primaire et l’aménorrhée secondaire, mais un abord
2 S2 11 ans Début d’élévation du sein et de l’aréole qui
didactique se doit de distinguer les pathologies les plus fréquentes. s’élargit
Ces pathologies sont pour l’aménorrhée primaire le retard pubertaire
simple et pour l’aménorrhée secondaire les causes iatrogènes. 3 S3 12 ans Augmentation de volume du sein, avec l’aréole
dans le même plan que le reste du sein

4 S4 13 ans Augmentation de volume du sein, avec l’aréole


Définition surélevée par rapport au reste du sein

5 S5 15 ans Stade final : le mamelon est sur le même plan


L’aménorrhée est l’absence de règles. L’aménorrhée est dite primaire que le reste du sein
s’il y a absence d’apparition des règles à l’âge normal de la puberté.
Remarque. Certaines femmes ont un développement mammaire qui s’arrête à S4, sans que cela soit pathologique.
L’aménorrhée est dite secondaire si elle concerne la disparition des
règles depuis au moins 3 mois chez une femme antérieurement
réglée. PHYSIOLOGIE DES MÉNARCHES
En dehors de la grossesse et de la ménopause, où l’absence de règles L’hypothalamus débute la sécrétion de l’hormone de libération des
est physiologique, toute absence anormale de règles va conduire à gonadotrophines (gonadotropin releasing hormone [GnRH]) et de
rechercher le ou les facteurs responsables, de façon à mettre en l’hormone de libération des corticotrophines (corticotropin releasing
œuvre un traitement adapté. hormone [CRH]) vers l’âge de 8 ans. Les GnRH et CRH vont réactiver
les axes hypotholamo-hypophyso-ovarien et hypothalamo-
hypophyso-surrénalien, au repos depuis la période néonatale. La
Notions récentes de physiologie réponse surrénalienne au CRH est immédiate ; celle des ovaires au
GnRH est retardée d’au moins 2 ans [35]. Les ménarches sont une
Les règles ou menstruations, sont un écoulement de sang cyclique, phase tardive dans le développement pubertaire. Ce développement
spécifique de l’espèce humaine et de certains primates. Elles débute par des modifications des seins et l’apparition de la pilosité
surviennent à la fin de chaque cycle ovarien normal en l’absence de pubienne (tableaux I, II). Les ménarches surviennent en moyenne,
fécondation et de nidation. Les règles sont dépendantes d’un en Europe, à un âge osseux de 13 ans.
endomètre différencié sensible à l’action des hormones stéroïdiennes.
L’initiation de la sécrétion hypothalamique pulsatile de GnRH
Les modifications hormonales de la fin du cycle entraînent une
semble être modulée par des neurohormones telles que les
ischémie endométriale par modifications des artérioles spiralées,
endorphines et catécholamines [ 3 7 ] . La GnRH, libérée par
suivies d’une décidualisation de la muqueuse utérine.
l’hypothalamus, atteint l’antéhypophyse par le système porte
hypothalamohypophysaire. Les cellules spécifiques de
l’antéhypophyse, alors stimulées par la GnRH, sécrètent deux
Lionel Savey : Gynécologue.
Jacky Nizard : Interne.
hormones, la luteinizing hormone (LH) et la folicule stimulating
Hôpital Foch, 40 rue Worth, 92150 Suresnes, France. hormone (FSH), dans la circulation sanguine systémique. Les

Toute référence à cet article doit porter la mention : Savey L et Nizard J. Aménorrhée. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Gynécologie, 156-A-10, 2001, 10 p.
156-A-10 Aménorrhée Gynécologie

Tableau II. – Classification du développement de la pilosité pubienne Aménorrhée primaire


au cours de la puberté.
L’aménorrhée primaire est l’absence d’apparition des règles ou
Stade Âge moyen Description ménarches. Les ménarches nécessitent un axe hypothalamo-
1 P1 Pré-adolescence Pas de pilosité pubienne (même duvet sur le hypophysaire, des ovaires et un endomètre fonctionnels. Pour
pubis que sur le reste de l’abdomen) s’extérioriser, les ménarches nécessitent une perméabilité entre la
2 P2 11 ans et demi Quelques poils le long des grandes lèvres
cavité endométriale et la vulve.
On parle d’aménorrhée primaire, après avoir exclu une grossesse, si
3 P3 12 ans et demi Poils plus épais, plus foncés et plus frisés sur
la partie médiane du pubis les règles ne sont pas survenues à l’âge de 16 ans en cas de
développement pubertaire normal, ou à l’âge de 14 ans si le
4 P4 13 ans Poils de type adulte limités au pubis développement pubertaire est insuffisant ou absent [35].
5 P5 14 ans et demi Aspect et quantité de poils de type adulte. La Les causes d’aménorrhée primaire sont nombreuses, tout comme les
répartition est triangulaire à sommet inférieur
avec extension à la face interne des cuisses
outils diagnostiques disponibles. Le choix des investigations doit
(pas vers l’abdomen comme chez l’homme) donc être orienté par la clinique.
L’interrogatoire recherche des antécédents familiaux (âge de la
puberté maternelle ou notion d’hyperandrogénie), les antécédents
personnels, l’âge d’apparition des différents stades du
développement mammaire, de la pilosité pubienne et axillaire, du
développement staturopondéral, la notion de troubles du
comportement alimentaire et le mode de vie. Le stade de
développement pubertaire s’évalue grâce à la classification de
Tanner où sont analysés les pilosités pubienne et axillaire, ainsi que
le développement mammaire (tableaux I, II).
L’examen physique apprécie donc le stade de développement
mammaire, de la pilosité pubienne et axillaire. La patiente est pesée
et mesurée. L’examen gynécologique doit être attentif et adapté à la
patiente (spéculum de vierge ou toucher rectal si besoin).
Les examens complémentaires de première intention sont simples.
L’échographie pelvienne par voie sus-pubienne vérifie la présence
et les caractéristiques de l’utérus et des deux ovaires. Les
caractéristiques échographiques d’une femme pubère sont les
suivantes : la longueur de l’utérus est supérieure à 35 mm, avec une
inversion du rapport corps sur col, tant pour la longueur que pour
l’épaisseur. L’imprégnation œstrogénique de l’endomètre permet de
voir la ligne de vacuité. Les ovaires ont un grand axe supérieur à
30 mm avec présence de follicules.
Les radiographies de squelette vont déterminer l’âge osseux. On s’aide
de l’os sésamoïde du pouce gauche, et surtout d’un atlas de
croissance osseuse.
Cette étude clinique et radiologique initiale permet de classer les
aménorrhées primaires en deux catégories :
– avec développement des caractères sexuels secondaires normal ;
– avec développement des caractères sexuels secondaires absent ou
anormal.

AMÉNORRHÉE PRIMAIRE AVEC DÉVELOPPEMENT


DES CARACTÈRES SEXUELS SECONDAIRES NORMAL
1 Bref rappel de la physiologie du cycle menstruel. GnRH : « gonadotrophin ET GÉNOTYPE FÉMININ NORMAL (46, XX)
releasing hormone » ; LH : « luteinizing hormone » ; FSH : « folicule stimulating Un développement pubertaire complet et un âge osseux supérieur à
hormone ».
15 ans doivent faire considérer le fonctionnement de l’axe
hypothalamo-hypophyso-ovarien comme normal.
inhibines A et B, ainsi que l’activine A, sont des facteurs de La grossesse est éliminée par l’interrogatoire, l’examen clinique, et
régulation folliculaire produits par les ovaires et mesurables dans le les bêta human chorionic gonadotrophin (hCG) plasmatiques. On
plasma. s’oriente alors vers les causes suivantes.

CYCLES MENSTRUELS
¶ Absence d’extériorisation des règles par obstacle
mécanique
Ils vont, par la suite, être mensuels, d’une durée de 28 jours en
moyenne, rythmés par l’ovulation au 14e jour du cycle. Dans la Imperforation hyménéale
première moitié du cycle, appelée phase folliculaire, sous l’influence
principalement de la FSH, il va y avoir recrutement des follicules Découverte à l’examen physique, elle est suspectée devant des
puis sélection du follicule dominant. L’augmentation de l’œstradiol douleurs pelviennes cycliques chez une jeune fille après la puberté.
va induire le pic de LH, lui-même responsable 36 à 40 heures plus Elle peut cependant être parfois asymptomatique. C’est un
tard de l’ovulation. La seconde moitié du cycle menstruel est sous diagnostic rarement fait à la naissance, en dehors d’exceptionnelles
l’influence de la progestérone sécrétée par le corps jaune. En hydrométrocolpos.
l’absence de fécondation et de nidation, il y a chute de la Cliniquement, l’hymen est tendu, violacé et parfois bombant.
progestéronémie, déclenchant les règles (fig 1). L’échographie pelvienne recherche une distension vaginale ou

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Gynécologie Aménorrhée 156-A-10

utérine, voire un hémopéritoine. Le traitement chirurgical simple par épreuve à la progestérone. Cette entité est rare, mais elle a modifié
incision de l’hymen doit être réalisé pour éviter l’extension de la conception de la physiologie du cycle menstruel sur les rôles
l’hématocolpos en amont (hématométrie et hématosalpinx) et peut- respectifs de LH et FSH sur la stéroïdogenèse, le développement
être le risque d’endométriose. pubertaire et l’ovulation.

Diaphragme vaginal ¶ Aménorrhée d’origine hypothalamique


Il peut être situé à tous les niveaux, mais il est plus fréquent au tiers et suprahypothalamique
inférieur du vagin. Il est rarement complet et laisse le plus souvent Elle est en rapport avec une anomalie de la pulsatilité du GnRH.
un petit passage. En cas d’obstruction complète, il peut avoir les Cette pulsatilité n’est pas essentielle au développement des
mêmes conséquences en amont sur le tractus génital que caractères sexuels secondaires dépendant des œstrogènes, qui
l’imperforation hyménéale. Le diaphragme vaginal complet est peuvent donc être présents.
responsable d’un hématocolpos plus haut que l’imperforation
hyménéale. Le diagnostic est posé à l’examen au spéculum. Le
traitement est chirurgical. AMÉNORRHÉE PRIMAIRE AVEC DÉVELOPPEMENT
DES CARACTÈRES SEXUELS SECONDAIRES ANORMAL
¶ Anomalies du développement embryologique OU ABSENT
müllérien Les stades du développement pubertaire de Tanner sont inférieurs à
5 (marquant la normalité) et le phénotype est féminin. La sécrétion
Les structures issues des canaux müllériens sont les deux tiers des stéroïdes sexuels est faible ou absente (hypogonadisme). Le
supérieurs du vagin, le col et le corps de l’utérus, ainsi que les dosage plasmatique des gonadotrophines (LH et FSH) permet de
trompes. s’orienter vers les origines « hautes » ou les origines « basses ».
Quand les gonadotrophines sont élevées, on parle d’hypogonadisme
Syndrome de Rokitansky-Kuster-Hauser
hypergonadotrope. Quand les gonadotrophines sont basses, on parle
C’est une agénésie müllérienne. La patiente est de génotype et d’hypogonadisme hypogonadotrope.
phénotype féminins, mais avec une absence des structures issues
des canaux de Müller. Les ovaires, le développement des seins et de ¶ Hypogonadisme hypergonadotrope acquis
la pilosité pubienne sont normaux, mais le vagin n’est présent que
dans son tiers inférieur. Le diagnostic est évoqué dès l’examen Exceptionnel, il est la conséquence d’une castration chirurgicale ou
clinique devant une vulve normale, un hymen qui paraît normal, de lésions postradiothérapeutiques prépubertaires.
mais il n’existe qu’une cupule vestibulaire contre laquelle le doigt
ou un cathéter vient buter. L’utérus n’est pas perçu au toucher rectal. ¶ Hypogonadisme hypergonadotrope congénital
Le diagnostic est confirmé par l’échographie et si besoin par une Il concerne les atteintes de l’axe hypophyso-ovarien après la
cœlioscopie exploratrice. Il faut systématiquement rechercher des libération des gonadotrophines. Chaque étape de l’action
anomalies de l’arbre urinaire présentes dans 15 à 40 % des cas, et périphérique peut être atteinte avec les mêmes conséquences
des anomalies du squelette dans environ 12 % des cas [22]. cliniques. Nous avons déjà vu les mutations inhibitrices du
La reconstruction vaginale est accessible à la chirurgie, récepteur à la LH qui donnaient un phénotype normal. Nous allons
contrairement à la fonction de reproduction. voir maintenant les pathologies avec phénotype anormal.

Aplasie vaginale avec utérus fonctionnel Dysgénésies gonadiques


Elle est exceptionnelle et peut également être classée dans les L’atteinte ovarienne précoce pouvant donner une aménorrhée
obstacles mécaniques. primaire est le plus souvent en rapport avec une anomalie
Le diagnostic est clinique et échographique, voire cœlioscopique. Le caryotypique, qu’elle soit franche ou sous forme de mosaïque. Ces
traitement chirurgical peut parfois restaurer la capacité de anomalies caryotypiques sont fréquentes dans les aménorrhées
reproduction si l’utérus est normal. primaires, alors qu’elles ne représentent que 2 à 5 % des
aménorrhées secondaires [2].
¶ Synéchie utérine tuberculeuse
• Syndrome de Turner
Seule la tuberculose prépubertaire est responsable d’une aménorrhée
primaire. L’examen gynécologique est normal. La prise C’est une monosomie X. Il associe une petite taille, un thorax en
d’œstroprogestatifs n’induit pas d’hémorragie de privation. Les bouclier, un pterygium colli, un cubitus valgus, un allongement
dosages de FSH, LH et d’œstradiol plasmatiques sont normaux, vertical du condyle fémoral interne, un quatrième métacarpien en
prouvant l’intégrité de l’axe hypothalamo-hypophyso-ovarien. retrait avec fermeture de l’angle carpien et des anomalies viscérales.
L’hystérosalpingographie qui montrait des images en « doigts de Les malformations viscérales peuvent atteindre le rein ou le cœur
gant » doit être remplacée par l’hystéroscopie. La biopsie de (coarctations de l’aorte surtout).
l’endomètre, parfois sous hystéroscopie, fait le diagnostic. Il faut Le diagnostic peut être évoqué in utero devant l’association d’un
rechercher d’autres atteintes tuberculeuses chez la patiente et son retard de croissance intra-utérin, d’un syndrome de Bonnevie-
entourage. Cette pathologie est devenue exceptionnelle en Europe. Ullrich avec un hygroma kystique et des anomalies viscérales
décrites.
¶ Mutation inactivatrice du gène du récepteur de la LH Les dosages plasmatiques hormonaux soulignent une insuffisance
ovarienne avec des gonadotrophines (LH, FSH) élevées et des
Initialement décrite chez l’homme, cette mutation inhibe l’action
stéroïdes sexuels plasmatiques bas (œstradiol).
périphérique de la LH. Cela induit chez la femme une résistance
ovarienne à la LH. Contrairement à ce que l’on a longtemps cru, la L’utérus et le vagin sont présents mais immatures. Ils peuvent
FSH peut à elle seule induire une stéroïdogenèse suffisante pour que répondre normalement aux stimuli œstrogéniques en cas de
le développement pubertaire soit normal, voire que l’aménorrhée substitution hormonale. Les ovaires sont classiquement réduits à des
soit secondaire dans certains cas [1]. Ces patientes sont spontanément bandelettes fibreuses parfois visibles en échographie.
infertiles, leur utérus est volontiers hypoplasique, leurs ovaires de Le diagnostic est confirmé par le caryotype : monosomie X (45, XO),
taille normale ou augmentée avec de nombreux follicules au stade mais la moitié de ces patientes ont une mosaïque (45, XO/46, XX)
antral. Le taux plasmatique de LH est élevé, comme le rapport ou une anomalie de structure d’un X (délétion partielle ou X en
LH/FSH. Ces patientes ont une hémorragie de privation après anneau) [35]. Dans ces derniers cas de figure, tous les niveaux

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156-A-10 Aménorrhée Gynécologie

d’atteinte sont possibles, de l’absence totale de symptôme à par polymerase chain reaction (PCR) peuvent se faire dans le liquide
l’aménorrhée primaire. Le traitement repose sur la substitution amniotique pour un diagnostic prénatal. Le dosage du 21-
œstroprogestative permanente afin d’améliorer le pronostic statural, désoxycortisol permet de dépister les patientes hétérozygotes
de provoquer et de compléter le développement pubertaire. (porteuses) dans une famille, lorsqu’un bloc en 21-hydroxylase est
diagnostiqué. Le traitement repose sur la corticothérapie qui freine
• Autres dysgénésies ovariennes l’hyperandrogénie et permet d’obtenir des grossesses. Cependant, la
régression des signes d’hyperandrogénie déjà présents avant
Elles sont plus rares que le syndrome de Turner et sont caractérisées
l’instauration du traitement est inconstante.
par la présence de matériel génétique appartenant au chromosome
Y. Ce fragment de chromosome Y, avec parfois le chromosome Pour mémoire, les tumeurs sécrétantes et l’hypercorticisme iatrogène
complet, implique la présence de tissu testiculaire comportant un peuvent être inclus dans ce paragraphe.
risque de cancérisation. Il s’accompagne d’ambiguïté sexuelle à
différents degrés. La dygénésie gonadique pure est caractérisée par ¶ Pseudohermaphrodisme masculin
l’absence de gonades chez un sujet de taille normale, sans anomalie
Ce sont des individus de génotype 46, XY porteurs de testicules et
associée. Il s’agit souvent de formes familiales. Le caryotype est 46,
de phénotype féminin ou ambigu.
XX ou 46, XY. Dans les cas où le génotype est masculin, le risque de
dysgerminome fait classiquement porter l’indication de résection Deux types de mécanismes expliquent ces phénomènes.
gonadique prophylactique. Cette dysgénésie gonadique peut – La testostérone est synthétisée en quantité insuffisante.
également être en rapport avec une mosaïque 45 XO/46 XY. Le Les rares cas de déficits en 17-hydroxylase ou 17-20-desmolases
phénotype peut alors être masculin, féminin ou ambigu. entraînent une féminisation complète, sans développement de
caractères sexuels secondaires féminins.
¶ Hypogonadisme hypogonadotrope
– La synthèse de testostérone est normale mais associée à un trouble de
Les formes acquises responsables d’aménorrhée primaire sont la réceptivité aux androgènes.
expliquées par les antécédents : radiothérapie ou chirurgie de la
région hypothalamohypophysaire, tumeur, etc [44]. – Anomalie des récepteurs : le déficit en récepteurs à la
testostérone dans les tissus-cibles entraîne une insensibilité aux
Ce sont les formes congénitales qui sont plus difficiles à androgènes. Il s’agit d’une anomalie génétique liée à l’X. La
diagnostiquer. On peut citer le syndrome de Kallman-Demorsier testostérone sécrétée in utero induit une inhibition du
(qui associe une agénésie de l’hypothalamus antérieur et des lobes développement des canaux de Müller, d’où une absence d’organes
olfactifs entraînant une anosmie), différentes mutations génitaux internes féminins. Le développement phénotypique reste
génotypiques (inhibitrices du récepteur de la GnRH, de certaines féminin car la testostérone n’est pas reconnue par les tissus
sous-unités des gonadotrophines), les associations avec d’autres périphériques. La production d’œstrogènes par les surrénales et
endocrinopathies (hypoplasie congénitale des surrénales, obésité les testicules intra-abdominaux ou partiellement descendus est
morbide par mutation du gène de la leptine ou de son récepteur) ou par ailleurs faible. L’absence de tractus génital féminin et la
d’autres atteintes neurologiques (syndromes de Willi-Prader- position des testicules sont confirmées par l’échographie
Labhart, de Laurence-Moon-Biedl-Bardet) [44]. abdominale. Le développement mammaire est normal, la pilosité
Elles se révèlent toutes par un impubérisme total, qui peut être pubienne et axillaire éparse. Le risque de transformation maligne
parfois partiel avec un développement mammaire. Il s’y associe une des testicules justifie une castration. Le dépistage anténatal est
aménorrhée primaire quasi constante [12]. S’il n’est par reconnu à possible dès lors qu’il y a un cas index dans la famille. Il existe
l’adolescence, l’hypogonadisme hypogonadotrope est responsable des formes incomplètes avec un développement phénotypique
de carence œstrogénique associée à l’aménorrhée primaire. masculin plus ou moins prononcé.
Les taux plasmatiques d’œstradiol, d’inhibine B, de LH et de FSH – Déficit en 5-a-réductase : il ne se pose pas devant une
sont bas. Les taux d’androgènes sont également bas par absence de aménorrhée primaire car il y a toujours un certain degré de
production ovarienne. Les ovaires ont un aspect prépubertaire, de virilisation dès la naissance. Ce déficit bloque la transformation
petite taille et sans follicules. de la testostérone en dihydrotestostérone active dans les tissus
Le traitement repose sur une substitution œstroprogestative afin de périnéaux.
permettre un développement pubertaire satisfaisant et une bonne
imprégnation œstrogénique par la suite. Pour obtenir une ovulation,
on peut utiliser une administration pulsatile de GnRH si l’origine
est hypothalamique ou une stimulation ovarienne directe par
Aménorrhée secondaire
administration de gonadotrophines.
Le contexte est différent. Plus encore que pour l’aménorrhée
Lorsqu’un hypogonadisme hypogonadotrophique est diagnostiqué,
primaire, la grossesse doit être éliminée en premier lieu. Il faut
il faut évoquer le diagnostic de panhypopituitarisme, et explorer
ensuite retenir les origines nutritionnelles, le syndrome des ovaires
toutes les fonctions hypothalamiques et hypophysaires.
polykystiques (OPK) et les hyperprolactinémies. Les autres causes
sont à connaître mais sont plus rares. La démarche diagnostique doit
¶ Pseudohermaphrodisme féminin
être conduite organe par organe.
Ces patientes, de génotype 46, XX, ont des signes cliniques de
virilisation. Ce sont des blocs enzymatiques : déficit en 21-
hydroxylase (de loin le plus fréquent), 11 bêta-hydroxylase, 3 bêta- ORIGINE CERVICALE
OH-déshydrogénase. Ces blocs sont responsables de signes cliniques Ce sont les sténoses du col utérin. La persistance de l’activité
de virilisation majeure. Ces anomalies sont diagnostiquées le plus cyclique ovarienne est responsable d’une hématométrie, avec,
souvent dès la naissance, du fait de l’importance des signes comme pour les cas d’imperforation hyménéale, des douleurs
cliniques. En revanche, les mutations autosomiques récessives pelviennes cycliques associées à une aménorrhée. Ces sténoses
concernant le gène de la 21-hydroxylase sont des blocs enzymatiques cervicales sont iatrogènes, secondaires le plus souvent à une
parfois moins francs, à révélation tardive. Ils sont responsables de 1 conisation, électrocoagulation, cryochirurgie ou traitement par laser.
à 10 % des hirsutismes féminins [35]. On peut observer des signes Les conisations au bistouri électrique suivies de sutures sont les plus
cliniques d’hyperandrogénie comme l’hirsutisme, l’acné ou sténosantes. Le diagnostic est clinique et échographique visualisant
l’hypertrophie clitoridienne. L’élévation des taux plasmatiques l’hématométrie (image hypoéchogène régulière et homogène
d’androgènes et de 17-hydroxyprogestérone confirme le diagnostic. soufflant la cavité endométriale, associée parfois à un épanchement
Le dosage de la 17-hydroxyprogestérone et l’analyse de l’ADN fœtal péritonéal).

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Gynécologie Aménorrhée 156-A-10

enzymatiques comme les galactosémies, certaines infections virales


Tableau III. – Molécules pouvant être responsables d’une aménor-
et les causes auto-immunes. Les causes d’IOP iatrogènes sont la
rhée.
radiothérapie, la chimiothérapie (une des causes les plus fréquentes)
• Antidépresseurs tricycliques et la chirurgie. Cependant, la grande majorité des IOP spontanées
• Chimiothérapie anticancéreuse sont d’origine inconnue, comme le montre l’étude de Falsetti et al [16].
• Anabolisants La part de la pathologie auto-immune dans l’IOP n’est pas bien
• Médicaments responsables d’hyperprolactinémie comme les neuroleptiques
définie, bien qu’il ait été démontré que les patientes présentant une
• Amphétamines
• Antidépresseurs tricycliques IOP sont plus souvent porteuses d’autoanticorps anti-ovaires en
• Alpha-méthyldopa enzyme-liked immunosorbent assay (Elisa) que les femmes
• Réserpine normalement ménopausées ou des femmes témoins [17]. L’existence
• Inhibiteurs de la mono-oxydase d’anticorps antinucléaires semble favoriser une IOP [25]. Les causes
• Cimétidine
chromosomiques sont plus volontiers responsables d’aménorrhée
• Produits anesthésiques
• œstrogènes
primaire.
• Progestérone
¶ Syndrome des ovaires polykystiques
ORIGINE UTÉRINE
Le syndrome des OPK n’a pas de définition qui fasse l’unanimité
L’aménorrhée est alors iatrogène, intentionnelle ou non. des spécialistes. C’est le plus souvent l’association de signes
cliniques comme les troubles du cycle menstruel, l’infertilité et les
¶ Cause pharmacologique signes d’hyperandrogénie associés à des signes biologiques comme
l’insulinorésistance, l’hyperandrogénie et des anomalies dans la
En premier, les progestatifs peuvent entraîner une atrophie
cinétique des gonadotrophines [24] qui permet de porter le diagnostic
endométriale, quelle que soit la forme d’administration : formes
d’OPK. La fréquence du syndrome des OPK est mal connue mais
orales, implants sous-cutanés [32, 45], dispositif intra-utérin [41], ou
forme injectable à libération prolongée [39]. Les analogues et les estimée entre 3 et 5 % si l’on ne retient que les formes exprimées
antagonistes de la GnRH entraînent également une atrophie cliniquement [14, 15]. Les formes uniquement échographiques, avec de
endométriale en bloquant l’axe hypothalamohypophysaire. De gros ovaires sphériques et de nombreux petits follicules en
même, il semblerait que les antiprogestérones au long cours aient périphérie, peuvent atteindre 22 % de la population [19]. Les motifs
un effet clinique similaire, avec une anovulation et une de consultation les plus fréquents sont l’infertilité (avec une
aménorrhée [23]. De nombreuses autres molécules peuvent être incidence moyenne de 74 %), les troubles du cycle menstruel (avec
responsables d’une aménorrhée (tableau III). une incidence moyenne de l’aménorrhée de 51 %) et les signes
d’hyperandrogénie (avec une incidence moyenne d’hirsutisme de
¶ Cause mécanique 69 %) [21]. L’anovulation est précoce et responsable de l’infertilité [40].
Ces troubles sont la conséquence de l’anovulation par
L’aménorrhée peut être la conséquence de synéchies utérines l’hypoprogestéronémie qu’elle entraîne. Les signes
succédant aux curetages ou aux endométrites et qui peuvent ne d’hyperandrogénie chez les patientes ayant un syndrome des OPK
concerner que l’isthme utérin. Elles peuvent également être la sont principalement l’hirsutisme et l’acné. Des signes
conséquence des endométrectomies réalisées par destruction ou d’hyperandrogénie plus marquée, comme les modifications de la
résection de la muqueuse sous hystéroscopie dans le cadre du voix ou une clitoridomégalie doivent faire rechercher d’abord une
traitement des ménométrorragies. tumeur virilisante, et notamment surrénalienne. L’obésité n’est pas
constante mais concerne 60 à 70 % des femmes. En revanche,
l’insulinorésistance est plus fréquente et indépendante de l’obésité.
ORIGINE OVARIENNE
Certaines études suggèrent que l’insulinorésistance est plus une
cause qu’une conséquence des OPK et de l’hyperandrogénie. En
¶ Ménopause précoce ou insuffisance ovarienne
effet, les patientes avec des OPK chez qui on interrompt la sécrétion
prématurée d’androgènes par des analogues de la GnRH, gardent une
L’insuffisance ovarienne précoce (IOP) est définie par l’arrêt des insulinorésistance [20] . Une étude plus récente [11] utilisant des
cycles ovariens associés à une aménorrhée primaire ou secondaire analogues de la GnRH et de l’acétate de cyprotérone montre
d’au moins 4 mois et deux dosages à 1 mois d’intervalle de FSH cependant une diminution de l’insulinorésistance. En revanche,
supérieur à 40 mUI/mL avant l’âge de 40 ans [8]. Il est à noter que celles chez qui l’on réduit l’insulinorésistance par de la diazoxine,
cette définition diffère de celle de l’aménorrhée secondaire où ont une diminution des androgènes circulants [33]. Marsden et al [29]
l’aménorrhée doit être d’au moins 3 mois. Cette IOP s’accompagne, suggèrent que l’anovulation au long court est en elle-même
comme la ménopause, d’une élévation des gonodotrophines et responsable d’un certain degré d’insulinorésistance. Biologiquement,
notamment de la FSH, une chute du 17-b-œstradiol, et des signes les taux de LH circulants sont classiquement élevés, avec des taux
cliniques d’hypo-œstrogénie. Des taux circulants bas d’inhibine A et de FSH normaux et un rapport LH/FSH supérieur à 2. Berga [3] a
B sont des marqueurs de l’origine périphérique de l’aménorrhée et démontré que la cinétique de sécrétion de LH est modifiée avec une
sont en faveur d’une insuffisance ovarienne ou ménopause précoce fréquence plus élevée chez les patientes avec des OPK que chez les
si la patiente a moins de 40 ans [34]. Ces taux ne sont pas corrélés aux témoins. Ce déséquilibre hormonal augmente probablement le
taux de FSH, LH ou œstradiol circulants, ni à l’âge des patientes ou risque d’accident cardiovasculaire, du fait de l’insulinorésistance et
à la durée de l’aménorrhée. Les taux d’inhibine A et B sont de l’hyperandrogénie, sans preuve formelle.
semblables aux taux des femmes ménopausées. L’IOP est la
conséquence de l’accélération d’un processus naturel, l’atrésie ¶ Tumeurs ovariennes virilisantes
ovocytaire. L’IOP survient chez 1 à 2 % des femmes [8, 10] et est
responsable de 10 à 28 % des aménorrhées primaires et 4 à 18 % des Elles sont rares mais peuvent donner un tableau d’aménorrhée, le
aménorrhées secondaires [10, 26]. Falsetti et al [16] ont retrouvé que dans plus souvent secondaire, avec signes d’hyperandrogénie. Le
leur population, plus de 80 % des cas de ménopauses précoces diagnostic est évoqué devant les taux de testostérone et de delta-4-
spontanées survenaient entre 30 et 39 ans, et seulement 2,5 % avant androstènedione plasmatiques très élevés. Les examens d’imagerie
20 ans. Les causes d’IOP spontanées sont parfois des anomalies peuvent être négatifs si la tumeur est de petite taille. On peut alors
génétiques comme les anomalies des récepteurs à la FSH, le s’aider du cathétérisme des veines ovariennes avec mesure des
syndrome du X fragile et les anomalies chromosomiques androgènes de chaque côté et recherche d’une asymétrie de sécrétion
principalement du chromosome X [ 1 3 ] , certaines anomalies afin d’orienter l’exérèse chirurgicale.

5
156-A-10 Aménorrhée Gynécologie

AUTRES CAUSES D’HYPERANDROGÉNIE tumorales hypophysaires impose une exploration radiologique, le


Les autres causes de virilisation sont les hyperandrogénies d’origine plus souvent par IRM, et un bilan ophtalmologique avec entre autres
surrénalienne, entrant dans le cadre de l’hyperplasie bilatérale des une exploration du champ visuel.
surrénales ou les tumeurs virilisantes surrénaliennes. L’hyperplasie
bilatérale est la conséquence d’un bloc enzymatique, le plus souvent ¶ Hypothalamique et suprahypothalamique
familial. Les blocs enzymatiques les plus fréquents sont les blocs en
Chez les femmes qui ont une aménorrhée d’origine hypothalamique,
21-hydroxylase. On observe alors une accumulation de précurseurs
on observe une chute progressive des taux de testostérone,
métaboliques, avec des taux élevés de 17-hydroxyprogestérone. Il
œstradiol, dihydroépiandrostènedione et hormone de croissance
existe également des blocs en 11-hydroxylase et les précurseurs que
(growth hormone [GH]) après charge en glucose, comme chez les
l’on peut doser alors sont les 11-désoxycortisol et 11-
femmes témoins et celles avec un syndrome des OPK [38], ceci sans
désoxycorticostérone. Les tumeurs surrénaliennes virilisantes
qu’il y ait de modification des gonadotrophines. Les taux de GH
correspondent le plus souvent à des corticosurrénalomes et sont à
sont plus élevés chez les femmes avec une aménorrhée
l’origine également d’hypercorticisme.
hypothalamique, et restent plus élevés après une charge en glucose
Pour mémoire, il faut noter la prise d’anabolisants chez les athlètes que chez les femmes témoins. Ses patientes ont probablement en
qui peut donner une aménorrhée avec des signes d’hyper- plus une résistance tissulaire à la GH [38]. Elles ont des taux normaux
androgénie. d’inhibine A et B [34].

Anorexie mentale
ORIGINE SUPRAOVARIENNE
L’anorexie mentale est une pathologie psychiatrique associant des
¶ Hypophysaire conduites alimentaires pathologiques et des conséquences
somatiques de cette conduite comme l’amaigrissement et
Hyperprolactinémie l’aménorrhée (le tout formant la triade classique : anorexie,
amaigrissement et aménorrhée). L’anorexie mentale touche 1 à 2 %
L’hyperprolactinémie est une cause fréquente d’hypogonadisme
des adolescents, avec une très nette prévalence féminine [4]. Les
hypogonadotrope. L’aménorrhée est très fréquente et la galactorrhée
troubles du comportement alimentaire ne sont pas tant l’anorexie
est plus classique que constante. L’hyperprolactinémie est soit
qu’une restriction active de l’alimentation. Les patientes
iatrogène, soit organique.
commencent par faire des régimes, trient leurs aliments, nient avoir
Les hyperprolactinémies iatrogènes sont la conséquence de faim, se font vomir après les repas ou utilisent des laxatifs avec tous
traitements psychotropes comme les neuroleptiques par exemple. Il leurs effets secondaires métaboliques. Elles ont peur de grossir et
est donc difficile d’arrêter le médicament en cause afin de traiter désirent maigrir. Sont parfois également associées des conduites
l’hyperprolactinémie. Pour faire la différence entre les causes boulimiques suivies de vomissements provoqués. L’aménorrhée est
iatrogènes et organiques, on s’aide de l’imagerie par le scanner le plus souvent secondaire. Les cas d’aménorrhée primaire dans
hypophysaire ou l’imagerie par résonance magnétique (IRM) et le l’anorexie mentale concernent des formes très précoces, rares et plus
test à la thyrotrophin releasing hormone (TRH). Dans le cas d’une sévères. Ces adolescentes ou jeunes femmes ont un profil
hyperprolactinémie iatrogène, l’imagerie ne retrouve pas d’anomalie psychologique particulier. Elles sont dynamiques, sportives,
et le test à la TRH montre une réponse caractérisée par une élévation studieuses et ont de bons résultats scolaires (d’où leur fréquence à
de la prolactine. Les adénomes à prolactine sont les tumeurs l’université). De plus, elles banalisent leurs symptômes. L’examen
hypophysaires les plus fréquentes. Leur répercussion sur le reste de physique est marqué par un amaigrissement, initialement faible et
la fonction hypophysaire est fonction de leur taille, pouvant, dans souvent dissimulé sous des habits amples. Les traits sont tirés, les
les volumineux macroadénomes, comprimer la totalité de yeux enfoncés dans les orbites, les cheveux secs et ternes, les ongles
l’hypophyse. Dans les hyperprolactinémies par adénome à cassants et l’on peut observer une hypertrichose avec un lanugo sur
prolactine, l’imagerie peut visualiser l’adénome et le test à la TRH le visage. Elles ont une pâleur, une froideur et une cyanose des
est dit bloqué. extrémités avec hypotension artérielle et parfois une amyotrophie
L’hyperprolactinémie peut être physiologiquement associée à une qui est alors tardive. Le rôle de la mère est primordial.
aménorrhée au cours de l’allaitement maternel. La durée de cette Omniprésente, elle a le plus souvent une personnalité
aménorrhée semble être en rapport avec plusieurs facteurs comme anxiophobique [4]. L’évolution de l’anorexie mentale est marquée par
l’importance du stimulus mamelonnaire (allaitement maternel une importante morbidité à long terme. Elle peut se faire vers les
exclusif, durée de l’allaitement au cours de la journée), la précocité troubles de l’humeur, les troubles névrotiques comme les phobies
de la première mise au sein après la naissance, la parité (avec une ou les troubles obsessionnels compulsifs. On observe 50 % de
aménorrhée plus longue chez les multipares), l’index de masse rechutes [4] et 7 % de décès par dénutrition ou suicide. Le traitement
corporelle (body mass index [BMI]) à la fin de la période de est nécessairement long, pouvant nécessiter de longues périodes
postpartum (avec une aménorrhée plus longue si l’index est bas) [43]. d’hospitalisation, ce qui représente un facteur péjoratif. Il ne faut
pas confondre l’anorexie mentale de l’adolescente avec l’anorexie
Autres causes non tumorales chez des patientes souffrant d’autres troubles psychiatriques, qu’ils
soient d’ordre névrotique ou psychotique.
Ce sont les séquelles de chirurgie hypophysaire et de
l’exceptionnelle nécrose hypophysaire dans le syndrome de L’aménorrhée est souvent le premier motif de consultation. Il y a
Sheehan, responsable d’un panhypopituitarisme. Il y a également une relation directe entre le cycle menstruel et l’état nutritionnel.
les envahissements hypophysaires, comme par exemple dans les On sait qu’une diminution calorique de 5 jours suffit à baisser la
hypophysites lymphocytaires, et les pathologies rares comme la pulsatilité de la LH et des concentrations plasmatiques d’œstradiol
sarcoïdose, l’hémochromatose et l’hystiocytose X. et de leptine [5]. L’état de maigreur s’accompagne d’une réduction
de la concentration de leptine qui a probablement des effets
Il faut rechercher également des séquelles de radiothérapie sur la
gonadotropes et ovariens. La leptine serait peut-être un lien
région sellaire.
important entre l’état nutritionnel et la régulation ovarienne [5]. Sont
évocateurs de l’origine nutritionnelle de l’aménorrhée la frilosité en
Autres causes tumorales
dehors des périodes d’activité physique, des troubles vasomoteurs
Ce sont les tumeurs hypophysaires autres que les adénomes à des extrémités, des signes d’hypœstrogénie (non spécifiques) et une
prolactine. Les adénomes somatotropes, corticotropes, thyréotropes, diminution de la vitesse de croissance si l’on est en période
gonadotropes, et les adénomes non sécrétants sont souvent pubertaire. Au niveau biologique, on observe une baisse de
également responsables d’une aménorrhée. L’ensemble des atteintes l’œstradiol, de la LH, de la FSH (baisse tardive car elle reste

6
Gynécologie Aménorrhée 156-A-10

longtemps normal) et de la fraction libre de l’hormone thyroïdienne Exploration d’une aménorrhée


T3. La prolactine et les androgènes plasmatiques restent normaux.

Exercice physique AMÉNORRHÉE PRIMAIRE (fig 2)

Les conséquences de l’entraînement physique intense ne doivent pas ¶ Interrogatoire


être ignorées chez les athlètes féminines. Chez ces athlètes,
l’aménorrhée être le plus souvent dans la triade aménorrhée- Il reprend les antécédents familiaux d’aménorrhée primaire, de
maladie génétique ou autre anomalie dans la famille. On peut être
ostéoporose-amaigrissement reflétant la profondeur des désordres.
amené à faire un arbre généalogique, à la recherche d’un schéma
L’exercice intense fait perdre la pulsatilité physiologique de la LH et
particulier de transmission.
de la FSH. L’origine de ces troubles semble être une atteinte de la
sécrétion du GnRH avec une perte totale de la pulsatilité Au niveau personnel, on reprend les antécédents depuis la période
physiologique. L’aménorrhée primaire est rare chez les jeunes fœtale à la recherche de traitement particulier chez la mère pendant
athlètes et ne doit pas être la première cause à évoquer, mais plutôt la grossesse, puis chez la patiente, de maladies ayant nécessité une
chirurgie pelvienne, une radiothérapie ou une chimiothérapie. Dans
un diagnostic d’élimination. Les troubles menstruels peuvent
certains cas, c’est l’impossibilité d’avoir des rapports sexuels qui
commencer par un simple raccourcissement du cycle, avec parfois
amène la patiente à consulter.
un allongement de la phase folliculaire [42]. Lorsque l’on est en
présence d’une aménorrhée secondaire chez une athlète, il peut être
¶ Examen physique
parfois difficile de faire la part entre l’effet de l’exercice intense et les
troubles alimentaires. Ces athlètes ont des régimes alimentaires La patiente est pesée et mesurée. On apprécie son état nutritionnel,
particuliers, avec une perte de poids modérée mais un apport en le rapport poids/taille et la croissance lors des dernières années.
lipides bas. Le problème de la diététique est complexe chez ces L’examen est général car les causes d’aménorrhée primaire sont,
athlètes aménorrhéiques. Ce n’est pas forcément une diminution comme nous l’avons vu, plus souvent d’origine générale que locale.
trop importante des apports caloriques dans l’absolu, mais plutôt On évalue le stade de maturation pubertaire selon la classification
une inadéquation entre les apports et les besoins (élevés dans ce cas de Tanner (tableaux I, II).
particulier). On note de plus une diminution relative des apports en L’examen gynécologique apprécie l’intégrité des structures
protides et lipides. C’est ici que la leptine joue probablement un rôle anatomiques et leur degré d’imprégnation hormonale. On recherche
important. Les taux de leptine sont beaucoup plus bas (avec une une ambiguïté des organes sexuels externes, une anomalie de la
perte du rythme de sécrétion circadien) chez les athlètes de haut partie supérieure du vagin et du col utérin au toucher vaginal et au
niveau en aménorrhée que chez celles avec cycles normaux [7]. spéculum, ainsi que la présence d’un utérus et de deux ovaires au
toucher vaginal. Ces examens doivent être adaptés à l’intégrité de
Les caractéristiques de l’exercice physique influencent également la l’hymen.
survenue d’une aménorrhée. Il semble que l’exercice d’intensité
Si l’examen ne retrouve pas d’anomalie anatomique, un
progressive induise moins d’aménorrhée que l’exercice d’intensité développement pubertaire correspondant à l’âge et une bonne
élevée d’emblée [7]. imprégnation œstrogénique (taille des petites lèvres et de l’utérus,

Stress
Le stress a été accusé d’être responsable, dans certaines situations
graves, de perturbations du cycle ovarien allant jusqu’à
l’anovulation avec une aménorrhée. La théorie physiopathologique
repose sur une activation très importante de l’axe hypothalamo-
hypophyso-surrénalien inhibant l’axe hypothalamo-hypophyso-
ovarien [18]. Ces théories n’ont pas encore été démontrées chez la
femme et reposent sur des données animales pour l’instant non
reproductibles [18].

Aménorrhée postpilule
C’est une situation très fréquente définie par l’absence de retour des
règles 3 mois après l’arrêt de la contraception orale. Il convient
initialement d’éliminer une grossesse et une hyperprolactinémie. Si
tout est normal, on rassure la patiente et on réalise un test à la
progestérone pour s’assurer de la bonne imprégnation œstrogénique
de l’endomètre. En cas d’hyperœstrogénie, on prescrit un traitement
progestatif séquentiel, et si les cycles ne reprennent pas, on peut
s’aider de la prescription de citrate de clomifène.

Relation entre leptine et aménorrhée


Les mutations des gènes de la leptine et de son récepteur sont des
causes extrêmement rares d’hypogonadisme hopogonadotrophique,
probablement d’origine hypothalamique. Il existe une corrélation
entre les taux de leptine et le BMI. L’hypoleptinémie s’observe chez
les anorexiques mentales et les athlètes de haut niveau [31] qui
présentent une oligoaménorrhée. La leptine a peut-être un rôle à
jouer dans la régulation des cycles ovariens, expliquant en partie la
perturbation de ceux-ci chez les femmes obèses ou dénutries, avec
peut-être un rôle dans les perturbations du cycle dans les OPK [31]. 2 Stratégie d’exploration d’une aménorrhée primaire.

7
156-A-10 Aménorrhée Gynécologie

trophicité de la muqueuse vaginale et aspect de la glaire cervicale),


on s’oriente le plus souvent vers un simple retard pubertaire.
Dans les autres cas de figure, on s’oriente vers une malformation
anatomique ou une origine hypothalamo-hypophyso-ovarienne en
fonction des résultats.

¶ Examens complémentaires
Ils ont trois objectifs : confirmer l’intégrité anatomique, évaluer l’âge
osseux et situer le niveau de dysfonctionnement hormonal.
Échographie pelvienne.
Réalisée par voie sus-pubienne ou endovaginale si possible, elle
recherche la présence de l’utérus et des ovaires, les mesure et
apprécie certains paramètres comme la présence et la taille des
follicules sur les ovaires ou l’épaisseur de la muqueuse utérine.
Radiographies de squelette.
Elles permettent de déterminer l’âge osseux des patientes en s’aidant
d’atlas adaptés.
Explorations endocriniennes.
– La courbe ménothermique est rarement utile ici.
– Les dosages hormonaux utiles sont ceux de l’œstraliolémie, de la
progestéronémie et de la testostéronémie.
– Le dosage des gonadotrophines : LH et FSH.
– La TSH et la prolactinémie.
– Selon le contexte, on pratique en plus des dosages comme la delta-
4-androstènedionémie et la 17-OH-progestéronémie en cas de
virilisation.
– Le caryotype doit être facile en cas d’aménorrhée primaire.
Dans certains cas, on peut s’aider d’une cœlioscopie pour visualiser
l’utérus et les annexes, ou d’une urographie intraveineuse pour
rechercher des anomalies de l’arbre urinaire.
3 Stratégie d’exploration d’une aménorrhée secondaire.

AMÉNORRHÉE SECONDAIRE (fig 3)


le reste de la pilosité par exemple). La patiente est pesée afin de
¶ Interrogatoire rechercher une prise ou perte de poids récente. On recherche des
modifications de la pression artérielle ou des signes orientant vers
Les premières questions doivent s’attacher à rechercher une
des modifications métaboliques majeures.
grossesse.
L’examen physique gynécologique recherche au spéculum une cause
La démarche est ensuite différente. On peut s’aider des mêmes
mécanique d’aménorrhée (sténose du col par exemple). Le toucher
questions que pour l’aménorrhée primaire afin de rechercher des
vaginal apprécie la taille de l’utérus et des ovaires et recherche une
particularités au moment de la puberté, mais il faut centrer
autre masse pelvienne. L’examen mammaire est systématique. Le
l’interrogatoire plus particulièrement sur les événements de la vie
reste de l’examen physique est orienté par le contexte clinique.
génitale depuis la puberté. On s’attarde sur les antécédents
obstétricaux (accouchements, suites de couches) et gynécologiques
(fausses couches spontanées nécessitant un curetage ou non, ¶ Examens complémentaires
interruptions volontaires de grossesse par méthode médicale ou Une courbe ménothermique est facilement demandée, mais est
instrumentale, curetage ou endométrectomie pour une autre rarement contributive dans ce contexte.
indication), ainsi que sur les antécédents endocriniens.
Il est difficile de donner une ligne de conduite unique. Cependant,
Caractéristiques des règles : l’âge des ménarches, la régularité des l’échographie gynécologique semble incontournable, quelle que soit
cycles, les caractéristiques des règles (durée, abondance, l’étiologie.
dysménorrhée, syndrome prémenstruel).
Dans le cadre d’une origine ovarienne, l’échographie recherche soit
Mode d’installation de l’aménorrhée : début brutal ou progressif, avec des OPK, soit de petits ovaires.
délai entre le début des modifications du cycle et l’aménorrhée.
Si l’origine est utérine comme une synéchie ou une sténose du col
Signes accompagnateurs : bouffées de chaleur évoquant une carence
de l’utérus, l’échographie recherche une atteinte en amont ou des
œstrogénique, galactorrhée évoquant une hyperprolactinémie, signes
irrégularités dans l’échogénécité de l’utérus.
sympathiques de grossesse, troubles de la vue et/ou céphalées
évoquant un processus expansif hypophysaire, et finalement L’hystéroscopie remplace aisément l’hystérosalpingographie si l’on
variations pondérales importantes, stress ou troubles affectifs ou suspecte une synéchie utérine. Elle permet également de faire des
psychiatriques récents. biopsies si l’on voit des lésions de la muqueuse.
Traitement : liste des médicaments pris récemment et des traitements La cœlioscopie est rarement indiquée d’emblée.
chirurgicaux ou anticancéreux passés.
Vie sexuelle. Elle doit être explorée à l’interrogatoire : fréquence des Bilan biologique
rapports sexuels, difficultés ou dyspareunies en demandant pour Le bilan de première intention doit être simple et contributif :
chaque anomalie la date et le mode de début, ainsi que l’évolutivité. dosages de la FSH, de la LH, de l’œstradiol, de la testostérone et de
la prolactine plasmatique permettent d’apprécier l’axe hypophyso-
¶ Examen physique ovarien. Les bilans plus précis dépendent de l’étiologie vers laquelle
L’inspection recherche des signes d’imprégnation œstrogénique l’on s’oriente par la suite (bilans surrénalien, thyroïdien,
(comme la trophicité des muqueuses génitales, l’acné, l’alopécie et hypophysaire dans le cadre d’une hyperprolactinémie).

8
Gynécologie Aménorrhée 156-A-10

Les tests dynamiques hypophysaires ou hypothalamiques sont plus 50 % des femmes anorexiques ont une ostéodensité à − 2 déviations
rarement employés et utilisent les œstrogènes ou le citrate de standards pour leur âge [31]. Là encore, la perte osseuse est surtout
clominophène, le GnRH ou le TRH. trabéculaire et la gravité de l’ostéoporose est en rapport avec la
En cas de suspicion de ménopause précoce, on réalise : durée de l’aménorrhée et l’âge de début. Les rôles de
l’hypercorticisme, de la carence en calcium et vitamine D et de
– un caryotype (mosaïque, délétion/translocation du X, présence de l’exercice ne sont pas claires dans l’anorexie mentale. La densité
matériel appartenant au chromosome Y et nécessitant alors une osseuse augmente avec la prise de poids et le retour des règles, mais
gonadectomie afin d’éviter un gonadoblastome) ; ces patientes ne récupèrent pas toutes une densité osseuse normale.
– une échographie pelvienne pour s’assurer de la présence d’un ou
de deux ovaires ainsi que leurs caractéristiques et celle de l’utérus ;
DÉFICITS IATROGÉNIQUES EN GONADOTROPHINES
– un dosage plasmatique de la TSH ultrasensibilité (us) pour
Le traitement par les analogues en GnRH sont ostéopéniants après
éliminer l’hypothyroïdie car elle est souvent associée à l’insuffisance
ovarienne ; 6 mois de traitement, phénomène un peu diminué par l’add-back
therapy. Dans les aménorrhées induites par les progestatifs à
– une glycémie plasmatique à jeun à la recherche d’un diabète libération prolongée, l’ostéoporose est ici encore présente et en
insulinodépendant ; rapport avec la durée de l’aménorrhée et l’index de masse osseuse [9].
– un test au Synacthènet ordinaire car l’insuffisance surrénalienne
peut précéder l’insuffisance ovarienne ;
INSUFFISANCES OVARIENNES PRÉMATURÉES
– et enfin, la biopsie ovarienne, qui ne doit pas être systématique
Toutes les causes d’IOP sont responsables d’ostéoporose. Ces cas
dans ce contexte [8].
sont en augmentation avec l’augmentation des IOP par
chimiothérapie anticancéreuse. L’obésité semble être ici aussi une
légère protection contre cette carence œstrogénique. Cette carence
Conséquences de l’aménorrhée est améliorée par un apport en œstrogènes. Il est important de savoir
que ces IOP sont associées à plus de mortalité par maladie
Au niveau osseux, la carence œstrogénique est caractérisée par un cardiovasculaire, accident vasculaire cérébral et cancer [8].
déséquilibre dans la formation osseuse avec une plus grande
résorption par rapport à la formation. Le phénomène affecte plus
l’os trabéculaire que l’os cortical. AMÉNORRHÉES AU COURS DE LA LACTATION

Les cas d’hyperprolactinémie, d’exercice intense, de stress, de Les femmes qui allaitent ont une perte osseuse plus importante que
dénutrition, d’anorexie mentale et de traitement par les agonistes de les femmes qui utilisent un allaitement artificiel ou celles qui
la GnRH sont responsables d’un déficit acquis en GnRH qui va n’allaitent pas. Cette ostéopénie est temporaire, mais le niveau
diminuer le plus souvent la pulsatilité de la LH, diminuer la d’ostéopénie plusieurs mois après l’arrêt de l’allaitement ne dépend
folliculogenèse, entraîner l’anovulation, la chute des stéroïdes pas de la durée de l’allaitement. Laskey et al [27] concluent que ce
sexuels et finalement être responsable d’une ostéoporose. niveau variable d’ostéopénie après l’allaitement maternel est
probablement plus en rapport avec la grossesse en elle-même
qu’avec l’allaitement maternel. Dans leur étude sur les variations de
HYPERPROLACTINÉMIE densité osseuse au cours et après l’allaitement maternel, Polatti et
La perte osseuse est principalement trabéculaire, avec une intensité al [36] ont suivi plus de 300 femmes qui ont allaité pendant 6 mois et
proportionnelle à la durée de l’aménorrhée et pas au taux de ont été suivies jusqu’à 18 mois après l’accouchement. Au bout de
prolactinémie [31]. Il est probable que l’obésité soit une protection ces 18 mois, ils ont trouvé qu’il n’y avait pas de différence entre les
(relative) contre l’ostéoporose, probablement grâce à l’aromatisation femmes qui avaient allaité et celles qui avaient utilisé un allaitement
des androgènes dans le tissu adipeux. Le traitement de artificiel. Ces femmes ont toutes eu une supplémentation en calcium
l’hyperprolactinémie par les agonistes dopaminergiques et le au cours de l’étude.
rétablissement des cycles menstruels permettent de corriger en
partie l’ostéoporose. La plus grande partie de la correction de
l’ostéopénie se fait au cours de 12 premiers mois de traitement [31]. Traitement
Néanmoins, certaines patientes n’ont pas d’amélioration de leur
ostéoporose malgré une prolactinémie rétablie. Il faut donc
considérer ces femmes, quand elles seront physiologiquement Il n’est à évoquer qu’après avoir éliminé une grossesse. Le
ménopausées, comme à risque accru de fractures. traitement est alors spécifique de l’étiologie de l’aménorrhée.

AMÉNORRHÉES D’ORIGINE HYPOTHALAMIQUE MÉNOPAUSE PRÉCOCE


La perte osseuse survient principalement dans les cinq premières Le traitement repose sur la substitution hormonale, avec contrôle de
années d’aménorrhée, puis est minime. Les causes fonctionnelles, la densité osseuse. Le risque de grossesse est faible mais existe. Des
comme le sport et le stress, sont associées à une perte osseuse grossesses sont parfois obtenues par don d’ovocytes [8].
trabéculaire et à un moindre niveau cortical. Il en résulte parfois
une incompatibilité entre le niveau sportif et le risque fracturaire.
De même, le retard d’apparition des ménarches chez les jeunes AMÉNORRHÉE INDUITE PAR L’EXERCICE INTENSE
adolescentes sportives augmente le risque de fractures de stress [31]. Le cycle est régulé par un traitement hormonal, le plus souvent une
Le moment d’apparition de l’aménorrhée est donc crucial dans le contraception orale. Une supplémentation calcique est souvent
pronostic osseux. ajoutée. Une diminution de l’intensité de l’entraînement, ainsi
qu’une normalisation de l’équilibre diététique sont essentielles. Le
problème est souvent de rendre compatible la pratique du sport à
ANOREXIE MENTALE haut niveau avec le traitement du trouble du cycle. Malgré une prise
L’ostéopénie est ici plus profonde que chez les autres femmes en charge adaptée, il est également souvent difficile de corriger
souffrant de carence œstrogénique, et ceci est probablement en l’ostéoporose. Sous traitement adéquat, l’aménorrhée disparaît
rapport avec la carence nutritionnelle et le déficit en IGF 1. Jusqu’à généralement en 6 mois, mais ces athlètes ne récupèrent pas toujours

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156-A-10 Aménorrhée Gynécologie

aussi vite une fertilité normale, car il peut persister des anomalies ANOMALIES CONGÉNITALES DU VAGIN
lutéales [4]. Les buts du traitement sont à court terme d’améliorer le Elles sont traitées chirurgicalement.
confort de la patiente en restaurant des cycles réguliers et une bonne
imprégnation hormonale, et à long terme d’arrêter ou d’éviter HYPERPROLACTINÉMIES
l’ostéoporose.
La prise en charge dépend de l’origine du trouble. Les causes
iatrogènes ou fonctionnelles sont identifiées et si possible corrigées.
SYNÉCHIES UTÉRINES Dans le cadre des causes organiques, se pose alors le problème de la
Le traitement repose sur la levée chirurgicale de la synéchie ; celle-ci chirurgie ou du traitement médicamenteux.
peut en général se faire sous hystéroscopie. Les suites sont Le traitement chirurgical utilise le plus souvent la voie
d’ordinaire simples mais peuvent être souvent marquées par l’échec transphénoïdale. Le traitement médicamenteux repose sur la
et la récidive, lorsque la synéchie est d’origine tuberculeuse [6]. bromocriptine.

Références
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