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Comme la plupart des pays africains de la zone franc, la Côte d'Ivoire s'est dotée d'un
droit de la concurrence propre, bien que dérivé, à l'origine, de l'ordonnance française de 1945
qui régissait la matière en France et dans les colonies. C'est ainsi que la loi 78-633 du 28
juillet 1978 vit le jour dans un climat d'économie semi-dirigée, dont l'intitulé ne s'était pas
beaucoup démarqué de celui de l'ordonnance de 1945 ("loi relative à la concurrence, aux
prix, à la poursuite et à la répression des infractions à la législation économique"). On fera
observer que les imperfections de la rédaction de l'ordonnance de 1945, dues surtout à des
économistes de l'époque au langage juridique incertain (ou à des juristes maîtrisant mal la
science économique), se retrouvent, parfois aggravées dans le texte ivoirien actuel.
En dépit de cet intérêt pour le consommateur, on ne peut parler d'un véritable droit de
la consommation dans la mesure où sont absentes du droit positif toutes les dispositions
protectrices relatives à la formation, l'exécution ou la résiliation des contrats concernant le
consommateur (droit et délai de rétractation, droit d'être informé, interdiction des clauses
abusives, plan d'apurement des dettes, droit d'association des consommateurs, assistance
judiciaire du consommateur….). Cette lacune est en voie d'être comblée puisqu'un code
ivoirien de la consommation est en cours d'élaboration. Mais on déplore toujours l'absence
d'un véritable droit de la distribution, celui-ci se ramenant à quelques articles relatifs au
contrat de concession exclusive;
1
Ce texte est une communication faite à un colloque sur le droit de la concurrence qui s’est tenu à Ouagadougou
en février 2003.
1
Pour avoir enseigné cette matière pendant quelques années, je tire de mon expérience
personnelle qu'on peut en faire une présentation assez classique, somme toute, en distinguant,
d'une part, le droit des pratiques concurrentielles (I) et, d'autre part, celui des pratiques
anticoncurrentielles (II) dans lesquels sont mêlés les soucis d'assurer, à la fois, un ordre public
économique de protection et un ordre économique de direction.
Le principe étant celui de la libre concurrence affirmé par l'article 1 er de la loi 91-999
du 27 décembre 1991, il s'ensuit que les acteurs économiques sont libres, par le jeu de la
concurrence, de causer un préjudice légitime à leurs concurrents en se livrant à des pratiques
concurrentielles sans aucune restriction ; en effet, le principe même de la libre concurrence
n'est-il pas de permettre à tout acteur économique de prendre une part de marché au détriment
de ses concurrents? Malheureusement, le législateur est obligé d'intervenir pour éviter que de
telles pratiques dérivent vers des actes que réprouvent la morale ou les intérêts des
consommateurs. C'est pourquoi il s'est employé à réglementer:
- certaines formes de vente commerciale;
- la publicité commerciale;
- la contrefaçon des œuvres intellectuelles;
- la concurrence déloyale.
Les ventes réglementées sont : la vente avec primes; les ventes promotionnelles, les
soldes et liquidations; les ventes subordonnées; les ventes à perte.
Les dérogations à cette interdiction sont classiques et les primes sont licites si elles
consistent en :
* des produits ou services identiques à ceux faisant l'objet de l'opération principale (13
à la douzaine, carte de fidélité…);
- quant aux échantillons, bien que la loi ivoirienne ne le précise pas, ils doivent être
offerts dans des conditions de quantité ou de mesure strictement indispensables pour
apprécier la qualité du produit du fabricant;
S'agissant des primes entre professionnels, elles doivent figurer parmi les conditions de
vente communicables à tout revendeur et apparaître sur la facture émise par le fournisseur
(sans doute pour éviter les pratiques discriminatoires de vente; articles 6-4 et 9 du décret 95-
29 du 20 janvier 1995).
A vrai dire, ces ventes ne sont pas interdites mais soumises à autorisation et
subordonnées à la réunion de conditions cumulatives. Cette réglementation est destinée à
éviter que les consommateurs soient trompés sur les prix.
b-1. La vente promotionnelle (qui a remplacé la notion archaïque de vente au
déballage) n'est pas définie. On peut considérer que c'est une vente destinée à faire connaître
ou découvrir un produit ou un service en attirant sur lui l'attention par une campagne
publicitaire et en l'offrant à un prix ou à des conditions avantageuses.
Enfin, le produit en question doit être disponible durant toute la vente promotionnelle.
b-2. Il y a solde lorsque la vente de marchandises neuves (1) est faite au détail (2),
accompagnée ou précédée d'une publicité (3) présentant l'opération comme ayant un caractère
réellement ou apparemment occasionnel ou exceptionnel (4), destinée uniquement à écouler
de façon accélérée les marchandises concernées (5).
b-3. Il y a liquidation lorsque les quatre premières conditions relatives aux soldes sont
réunies, la cinquième concernant le motif de l'opération, à savoir : l'écoulement accéléré d'une
partie des marchandises à la suite d'une décision de cesser le commerce, d'en modifier les
structures ou les conditions d'exploitation, que cette décision soit volontaire ou intervenue
sous forme de vente forcée (faillite, changement de gérance, changement d'activité
commerciale…).
On regroupe, sous cette appellation, toutes les formes de vente qui obligent l'acheteur
(le consommateur) à se soumettre à une condition anormale imposée par le vendeur. En font
partie : les ventes à la boule de neige, les ventes d'une quantité minimale ou les ventes
couplées.
Est considérée comme vente à la boule de neige tout procédé consistant à offrir des
produits ou des services au public en lui faisant espérer l'obtention du produit ou du service à
titre gracieux ou contre un prix inférieur à sa valeur en subordonnant leur vente à la collecte
préalable par l'acheteur d'autres clients. L'intérêt de l'opération, pour le vendeur, est de faire
supporter à l'acheteur, la fonction de prospection et de présentation de clientèle en l'alléchant
par un appât.
Pourtant dans la réalité, surtout dans les grandes surfaces, on note que de telles ventes
se pratiquent couramment (sacs de pommes de terre de 10 kilos; plusieurs paquets de lames
ou de tablettes de chocolat ou de chewing gum…) sans que ces pratiquent cessent ou soient
dénoncées ou sanctionnées.
2
Ces "justifications paraissent convenir davantage à une société de consommation avancée qu'à un pays en voie
de développement.
- le consommateur doit avoir la possibilité de ce procurer ces articles au détail, par
unités soit dans le même magasin, soit facilement ailleurs.
Elles consistent à subordonner la vente d'un produit ou d'un service à l'achat d'un autre
produit ou service (lot de produits ou de services hétéroclites ou complémentaires (trousse
d'écolier garnie; pneus et chambres à air; vidange, graissage et lavage d'un véhicule; machine
à laver le linge plus des paquets de lessive…). Ces ventes sont dites jumelées ou couplées ou
ventes par lots.
La seule dérogation que le décret (article 22) apporte à cette interdiction est la
possibilité d'acheter chacun des articles composant le lot, sans que soit précisé si cette
possibilité doit exister dans le magasin, dans le quartier, dans la ville ou dans le pays.
La vente à perte d'un produit (et non d'un service), en l'état, est celle qui est faite à un
prix inférieur au prix d'achat effectif (articles 24 et 29 de la loi 91-99 du 27/12/1991 et article
1er du décret 95-29 du 20/1/1995). Elle est sanctionnée pénalement. L'article 24-3 de la loi
précise ce qu'il faut entendre par prix d'achat effectif.
Ne tombent pas sous le coup de cette interdiction (articles 24-4 de la loi et 1er du
décret):
On peut regretter que le législateur n'ait pas cru bon de réglementer deux
formes de vente dangereuses pour le consommateur et pour la loyale concurrence :
d'une part, la vente avec loterie, concours et jeux; d'autre part, la vente par envoi forcé.
Faisons observer qu'un projet de code ivoirien de la consommation comble cette
lacune pour la seconde forme de vente mais pas pour la première.
* La vente avec loterie consiste à faire participer les acheteurs à une loterie
uniquement s'ils ont effectué un achat (exemple : introduire une pièce d'or dans une
des boîtes de chocolat du magasin sur mille); la seule sanction encourue par les auteurs
d'une telle vente sont celles prévues par l'article 202 du code pénal 3 ; la vente avec
concours ou avec jeu est basée sur le même principe : on ne peut participer au
concours ou au jeu que si, au préalable on a acheté un bien ou un service. Le danger
est que les consommateurs, attirés par le lot ou la récompense à gagner se sentent
contraints d'acheter un produit ou un service dont ils n'ont pas besoin. De telles formes
de vente devraient être prohibées et la participation aux loteries, concours et jeux non
soumise à un quelconque achat.
** La vente par envoi forcé consiste à faire parvenir à une personne, sans
demande préalable de celle-ci, un objet quelconque accompagné d'une correspondance
indiquant qu'il peut être accepté par elle contre versement d'un prix ou renvoyé à son
expéditeur.
Le danger est que le destinataire d'un tel objet, par négligence ou par attirance,
se trouve pris au piège de cette "offre contractuelle" vicieuse et obligé d'acheter un
objet dont il n'a nul besoin ou pas les moyens de se l'offrir.
B. LA PUBLICITE COMMERCIALE.
La publicité concerne aussi bien les produits et services offerts à la vente que les prix
auxquels ils sont offerts.
Le délit est constitué dès lors que la publicité est faite, reçue ou perçue en Côte
d'Ivoire (article 4). Si on admet parfaitement cette disposition pour le cas où la publicité est
faite sur le territoire ivoirien, on peut être sceptique lorsqu'elle n'y est que reçue ou perçue.
Notons que les associations de défense des intérêts des consommateurs peuvent
exercer l'action civile pour des faits portant un préjudice direct à l'intérêt collectif des
consommateurs (article 7). Une transaction pécuniaire est possible; cette disposition de
l'article 9 incite à penser que la transaction est admise non seulement lorsque la partie civile
est une association de consommateurs mais aussi un acteur économique.
Sanctions pénales: 200 000 FCFA à 100 000 000 FCFA. Le double en cas de récidive
(dans le délai de deux ans) ou de mauvaise foi.
Le décret du 9 août 1996 qui crée et organise cet organe le charge de donner son avis
sur tous les textes relatifs à la publicité; de veiller sur le contenu des annonces publicitaires et
au respect de la législation par les professionnels de la publicité.
Le décret du 27 mars 1991 portant création de cet EPIC lui confie la régie et
l'exploitation commerciale de la publicité en exclusivité sur les écrans de la télévision et les
ondes de la radio ivoiriennes; la recherche de sponsors et la commercialisation d'émissions à
sponsoriser; la réalisation de sondages et audimats nécessaires à la commercialisation de
supports; les autres activités annexes de la publicité sur les écrans de télévision et les ondes
radio.
Rien n'a été prévu pour la publicité par les codes-barres et on note une propension des
commerçants à utiliser ceux-ci en lieu et place des procédés classiques au point que les
consommateurs sont pris au dépourvu et souvent ignorants des prix jusqu'au moment où ils
passent à la caisse.
Comme la plupart des législateurs africains, celui de la Côte d'Ivoire a été sensible à la
protection des œuvres de l'esprit contre la contrefaçon. Il s'est déchargé de cette mission en la
confiant à l'OAPI (Organisation africaine de la propriété intellectuelle) qui a été créée par la
Convention de Bangui du 2 mars 1977 4 en remplacement de l'OAMPI (Office africain et
malgache de la propriété industrielle) créé par l'accord de Libreville du 13 septembre 1962.
Bien que disposant, grâce aux Accords de Libreville et de Bangui, d'une législation sur
les droits d'auteur, la Côte d'Ivoire s'est dotée, successivement, de deux lois dans ce domaine:
la loi 78-634 du 28 juillet 1978 portant protection des œuvres de l'esprit, abrogée et remplacée
par la loi 96-564 du 25 juillet 1996 (JORCI du 26 décembre 1996, p. 1212).
Cette profusion de textes ne manque pas de poser des questions sur la compatibilité
des dispositions uniformes des Accords de Bangui avec ceux du droit interne ivoirien.
D. LA CONCURRENCE DELOYALE.
1. L'Accord de Bangui.
La première dispose qu'est illicite tout acte de concurrence contraire aux usages
honnêtes en matière industrielle, commerciale, artisanale ou agricole; elle pose le principe de
la réprobation de tout acte de concurrence qui serait malhonnête.
Le second alinéa poursuit en donnant, de façon très maladroite et en des termes très
approximatifs, des exemples d'une telle illicéité dans une liste qui n'est pas exhaustive
puisqu'elle comporte l'adverbe "notamment". Ainsi est illicite, notamment:
- tous faits quelconques de nature à créer une confusion ou une tromperie par
n'importe quel moyen avec le nom commercial, l'établissement, les produits ou les
services ou l'activité industrielle ou commerciale d'un concurrent (manœuvres de
confusion);
- les allégations fausses, dans l'exercice du commerce, de nature à discréditer
l'établissement, les produits ou l'activité industrielle ou commerciale d'un
concurrent (manœuvres de discrédit);
- en recourant à des mesures propres à faire naître une confusion avec les
marchandises , procédés ou produits, activités ou affaires d'autrui (manœuvres de confusion);
- en dénigrant les marchandises, les procédés, les activités ou les affaires d'autrui ou
en donnant sur les siens des indications inexactes ou fallacieuses afin d'en tirer un avantage au
détriment de ses concurrents (manœuvres de dénigrement et publicité mensongère ou
trompeuse).
- d'une part, seront probablement retenus les actes de concurrence déloyale selon qu'ils
constituent des manoeuvres de : dénigrement ou de discrédit ; de confusion entre deux
entreprises; de désorganisation d'une entreprise; de désorganisation du marché… sans que
cette liste soit exhaustive;
- d'autre part, les conditions d'exercice de l'action en concurrence déloyale seront sans
doute maintenues, à savoir : l'exigence d'un rapport de concurrence entre les entreprises
concernées (la victime et l'auteur); le caractère non nécessaire d'un préjudice à l'encontre de la
victime; les sanctions appropriées à la cessation du trouble causé par la manœuvre déloyale de
concurrence.
La liberté d'entreprise et de concurrence peut être gênante pour les entreprises. Aussi
sont-elles tentées de neutraliser la concurrence ou d'organiser leurs propres réseaux de
production ou de distribution par la voie contractuelle, parfois au mépris, précisément, de ces
deux libertés. Le législateur ivoirien a veillé à ce que ces pratiques anticoncurrentielles ne
dépassent pas la mesure au point de rendre ces libertés tout à fait lettres mortes.
Cette stricte vigilance s'est manifestée sur plusieurs plans, du plus étroit au plus vaste :
La liberté contractuelle postule que le vendeur soit libre de vendre à qui il veut et aux
conditions qu'il veut. Cette conception civiliste de la liberté contractuelle n'est plus de mise
lorsque le vendeur est un professionnel face à des consommateurs ou à des acteurs
économiques. Aussi le législateur a-t-il interdit : le refus de vente; le prix imposé; les
pratiques discriminatoires.
Il est interdit de refuser à un consommateur 6la vente d'un produit ou la prestation d'un
service, sauf motif légitime.
Le refus de vente, pour être répréhensible, doit réunir un certain nombre de conditions:
En principe, les prix sont librement déterminés par le jeu de la libre concurrence
(article 1-1 de la loi 91-999 du 27 décembre 1991). Les dérogations à ce principe sont
confiées au gouvernement qui peut réglementer les prix des biens et services de première
nécessité ou de grande consommation surtout lorsque la concurrence par les prix est limitée
en raison de situations de monopole ou de dispositions législatives ou réglementaires (article
2-1 de la loi).
Rien n'est dit à propos des prix imposés dans la loi. C'est le décret 95-29 du 20/1/05
(articles 3 à 5) qui traite la question 7. Ces textes interdisent à toute personne (en fait, aux
seuls professionnels de la vente, qu'ils s'agisse de dirigeants, de mandataires ou de préposés)
d'imposer directement ou indirectement, un prix minimal ou une marge bénéficiaire minimale
de vente ou de revente d'un bien ou d'un service. Peu importe le mode de fixation de ce prix
6
Bien que seul le consommateur soit visé dans cet article, on peut se demander si ce n'est pas par inadvertance
que le législateur s'est montré restrictif. En effet, dans les autres articles où il est question de refus de vente, le
mot consommateur est remplacé par l'acheteur; en outre, on ne voit pas pourquoi, seul le consommateur serait
protégé contre une telle pratique alors que l'acteur économique est recevable à en profiter aussi; enfin, dans la
liste des actes abusifs possibles d'une position dominante, le refus de vente est cité alors que l'abus de position
dominante n'est concevable, selon la loi qu'à l'égard de concurrents, c'est à dire d'acteurs économiques.
7
La loi n'ayant pas traité la question de l'interdiction du prix minimal imposé, on peut se poser deux questions :
- l'interdiction, posée par un décret, est-elle légale?
- si elle est légale, quelle en est la sanction? Celle-ci ne peut être pénale en raison du principe
"nullum crimen sine lege". A tout le moins, la sanction pourrait être contraventionnelle puisque le
pouvoir réglementaire en cette matière ; mais le décret concerné ne prévoit aucune sanction. La
sanction ne peut être que civile (nullité?).
minimal : barèmes, catalogues, étiquettes, factures, prix conseillés, ententes…Peu importe
aussi que les autorités aient imposé des prix ou des marges déterminées : la concurrence doit
pouvoir jouer librement au-dessous des prix limites.
Cette interdiction ne concerne que les prix minimaux et non les prix maximaux. Dans
cette limite, elle est totale et générale; elle ne tolère aucune dérogation, notamment, pendant
une durée limitée, pour des produits nouveaux.
Il n'y a discrimination que si les partenaires sont dans une situation économique
identique.
Les contrats organisant les réseaux de distribution sont de nature très diverse : contrat
de concession exclusive; distribution sélective; agréation; franchise…
- aucune clause du contrat de concession exclusive ne peut avoir pour effet, même
indirect, de limiter la liberté du concessionnaire de fixer lui-même, comme il l'entend, le prix
de vente du produit ou du service;
Aussi la loi ivoirienne interdit-elle et punit-elle les ententes illicites et les positions
dominantes abusives (1 et 2 ) sauf si elles sont justifiées (3). Non seulement, elle en assure la
répression mais aussi le contrôle (4).
* Selon les articles 7 de la loi 91-999 et 30 du décret 95-29 (qui n'apporte pas grand
chose à la loi), est interdite toute entente 8 ayant pour objet ou pouvant avoir pour effet
d'entraver ou de limiter la libre concurrence, notamment lorsque cette action tend à :
- faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant
artificiellement leur hausse ou leur baisse ; sur ce point on peut s'étonner que le législateur
ivoirien ait réprouvé les pratiques favorisant la baisse artificielle des prix et non celles
empêchant artificiellement leur baisse;
** On observera que l'entente est illicite si elle produit de tels résultats, que leurs
auteurs les aient voulus ou non.
8
Action concertée, convention, coalition, entente expresse ou tacite…
D'autre part, le résultat néfaste à éviter est l'entrave ou la limitation de la libre
concurrence illustrée par des exemples exprimés en termes généraux et relevés depuis fort
longtemps par la jurisprudence.
C'est sur l'abus de position dominante que les textes sont les plus confus et décevants.
Néanmoins, on peut considérer qu'ils requièrent deux conditions pour caractériser l'abus de
position dominante : un acte répréhensible et un résultat abusif.
Si on se réfère à l'article 8 de la loi 91-999, il y est dit qu'est prohibée, dans les mêmes
conditions (que celles énoncées par l'article 7 relatif aux ententes illicites), toute pratique ou
manœuvre abusive qui émane de l'entreprise dominante. Cette disposition laisse penser que la
pratique ou manœuvre est abusive dès lors qu'elle entraîne l'un des résultats d'entrave ou de
limitation de la concurrence qui caractérisent l'entente illicite (voir supra), quelle que soit la
nature, licite ou illicite de cette manœuvre.
Quelle solution choisir? En réalité, nous penchons pour l'idée que l'acte n'est abusif et
caractérise l'abus de position dominante que s'il provoque les résultats que la loi déclare
intolérables.
Il faut combiner trois articles pour définir le résultat nuisible qui caractérise l'abus de
position dominante.
1) Il faut retenir, en premier lieu, l'article 8 de la loi qui renvoie à l'article 7 ("dans les
mêmes conditions) en visant les résultats néfastes à la libre concurrence, que ces résultats
aient été recherchés ou obtenus malencontreusement, à savoir:
- limiter l'accès au marché ou le libre exercice de la concurrence par les entreprises qui
n'y sont pas engagées;
- faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant
artificiellement leur hausse ou leur baisse;
2) En outre, il faut considérer l'article 31 du décret 95-29 qui exige que les concurrents
de l'entreprise dominante soient contraints de se conformer aux conditions de celles-ci sans
avoir de solution de rechange. Bien que prévue pour caractériser la position dominante, cette
condition vaut également pour caractériser l'abus.
3) Enfin, il faut qu'il y ait un lien de causalité. C'est ce qu'exprime l'article 34 du décret
95-29 qui dispose que le délit d'abus de position dominante suppose l'existence d'un lien de
causalité entre la position dominante et une entrave apportée au bon fonctionnement du
marché par celle-ci.
Les ententes illicites et les abus de position dominante perdent leur caractère
délictuel dans les mêmes conditions, à savoir (articles 10 de la loi 91-999 et 35 du décret 95-
29) :
Le contrôle des ententes et des positions dominantes s'opère soit à titre préventif, soit a
posteriori.
10
N'est pas un texte réglementaire la volonté, manifestée par le préfet auprès de deux transporteurs de Bouaké,
de les voir s'entendre sur les tarifs pratiqués par eux (Avis n° 2 de la Commission ivoirienne de la concurrence).
a. Le contrôle a priori des concentrations économiques.
La loi 91-999 (articles 34 à 44) et le décret 95-29 (articles 36 à 43) définissent ce qu'il
faut entendre par concentration économique et les règles de contrôle d'une telle opération.
La concentration économique résulte de tous actes, quelle qu'en soit la forme, qui
emporte transfert de propriété ou de jouissance sur tout ou partie des biens, droits et
obligations d'une entreprise à une autre entreprise (c'est nous qui ajoutons au texte de l'article
35 de la loi, sans quoi, il serait incompréhensible) ou à un groupe d'entreprises, d'exercer
directement ou indirectement , sur une ou plusieurs entreprises, une influence déterminante
(articles 35 de la loi 91-999 et 36 du décret 95-29).
Les opérations entraînant une concentration économique peuvent être très variées
(relations entre société mère et filiales; prises de participation; groupements d'entreprises;
consortiums; symposiums; engagements financiers entre entreprises; contrats de fourniture ou
de sous-traitance; joint venture; accords de dépendance, de coopération ou de coordination;
contrats de réseau de distribution…).
Il en est ainsi lorsque les entreprises concernées par la concentration économique ont
réalisé, ensemble, plus de 50% des ventes, achats ou autres transactions 12 sur un marché
national 13 de biens, produits ou services substituables ou sur une partie substantielle 14 de ce
marché.
11
L'atteinte à la concurrence doit être suffisante, le caractère suffisant étant apprécié par la commission de la
concurrence (article 40 du décret).
12
L'année de référence est celle de l'exercice comptable précédant l'opération de concentration (article 37 du
décret). Le chiffre d'affaires réalisé s'entend de la différence entre le chiffre d'affaires global hors taxe de
chacune de ces entreprises et de la valeur comptabilisée de leurs exportations directes ou par mandataires vers
l'étranger (article 38 du décret).
13
La notion de marché correspond à la consommation nationale qui est égale à la production nationale en valeur
corrigée des variations des stocks, augmentée du solde net des importations et des exportations (article 39 du
décret)
14
Les textes ne définissant pas ce qu'il faut entendre par la part substantielle du marché, celle-ci est laissée,
selon nous, à l'appréciation de la Commission de la concurrence.
La Commission apprécie si le projet ou la concentration réalisée apporte au progrès
économique une contribution suffisante pour compenser les atteintes à la concurrence s'il y en
a (article 41 de la loi).
Les ententes et les positions dominantes sont soumises à un contrôle a posteriori qui se
traduit par la saisine 15 de la Commission de la concurrence et des sanctions.
La CC peut être saisie par le ministre du commerce, d'office ou par des tiers.
* Après constatation des faits incriminés par des procès verbaux d'enquête, le ministre
saisit la CC.
Il peut ordonner aux parties, soit de suspendre la pratique en cause, soit de revenir à
l'état antérieur de droit. Cette mesure conservatoire ne s'impose que si cette pratique porte une
atteinte grave et immédiate à l'économie générale, à celle du secteur intéressé, à l'intérêt des
consommateurs ou à l'entreprise plaignante (article 12 de la loi); cette mesure doit être limitée
à ce qui est strictement nécessaire pour faire face à l'urgence.
En principe, les sanctions prévues ne peuvent être infligées que si la CC a émis un avis
reconnaissant qu'il y a entente illicite ou abus de position dominante.
* La sanction civile prévue par l'article 9 de la loi est la nullité. Cette nullité est
encourue de plein droit. Elle peut être invoquée aussi bien par les parties elles-mêmes que par
les tiers. Elle ne peut être opposée aux tiers par les parties.
Elles peuvent aussi intervenir avant un tel avis (article 16 de la loi). Il en est ainsi
lorsque la CC ne s'est pas prononcée dans le délai de six mois ou s'il y a urgence ou récidive
ou flagrant délit. Dans ces cas, le ministre peut saisir le parquet pour application :
En cas d'entente illicite, il peut enjoindre, par décision motivée, à toute personne ou
entreprise reconnue coupable d'une telle entente de :
- mettre fin aux pratiques anticoncurrentielles dans un délai déterminé;
16
Le tribunal correctionnel peut ordonner que sa décision soit publiée intégralement ou par extraits dans les
journaux qu'il désigne, aux frais du condamné.
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Ces articles ne prévoient aucune sanction pénale!
18
Ce texte ne prévoit de sanction que pour le cas où la coalition (entente) a provoqué une hausse ou une baisse
artificielle des biens. En outre, les peines qu'il prévoit (2 mois à 2 ans de prison; 500 000 à 25 millions de francs
d'amende) sont différentes de celles prévues par l'article 20 de la loi 91-999 (6 mois à 5 ans de prison; 300 000 à
100 millions de francs d'amende).
19
Il y a une apparente contradiction entre une condamnation immédiate à une sanction pécuniaire et son lien
avec la reconnaissance d'une culpabilité qui ne peut être supposée que par la CC ou reconnue par le juge pénal.
20
Cette disposition est bien curieusement formulée. Pourquoi une telle différence de montant maximal et de
calcul de celui-ci? En outre, quelle différence doit-on faire et comprendre entre une entreprise et une personne
physique?
- ou lui imposer des conditions particulières destinées à rétablir l'état de la concurrence
antérieure.
En cas d'abus de position dominante reconnu, il peut, par arrêté motivé 21,enjoindre à
l'entreprise ou au groupe d'entreprises:
Si ces injonctions ne sont pas respectées, le ministre peut prononcer des sanctions
pécuniaires s'il n'en avait pas prononcé déjà.
21
On voit mal pourquoi, dans un cas, il doit se prononcer par décision motivée et, dans l'autre, par arrêté motivé.