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UNIVERSITE LUMIERE DE BUJUMBURA

FACULTES DES SCIENCES DE LA COMMUNICATION

COURS D’INTRODUCTION AU DROIT

INTRODUCTION GENERALE

Avant d’entamer l’étude proprement dite de notre cours, il importe dans une
première analyse de disséquer la signification du mot « droit». Le mot droit peut
être défini sous 2 sens principaux : le sens objectif et le sens subjectif.

Dans le premier sens, le droit signifie l’ensemble des règles qui sous la garantie
de la contrainte publique, sociale ou étatique gouvernent les rapports des
individus vivant en société, tant sur le plan national qu’international.

Ainsi défini, le droit est envisagé sous l’angle de son objet, lequel objet est
d’assurer l’ordre dans la société, le besoin d’éviter l’anarchie, le besoin d’éviter
que là où il y a les hommes il y ait du désordre.

Dans le 2ème sens appelé «droit subjectif», le droit signifie l’ensemble des
prérogatives, des facultés, des libertés ou des possibilités que le droit objectif
reconnaît à un individu ou groupe d’individus, et dont ces derniers peuvent se
prévaloir dans leurs rapports les uns avec les autres en invoquant, si nécessaire,
la protection et l’aide des pouvoirs publics.

Dans ce sens, le droit est envisagé sous l’angle de son bénéficiaire appelé « sujet
de droit ». D’où l’expression «  droit subjectif ».

Exemples:

1) La victime d’un dommage a le droit « subjectif » d’exiger la réparation


du dommage causé car il y a une règle de droit, objectif, qui dispose
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que : «  Tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage


oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. » (art. 258 CCL
III).
2) D’autres exemples: nous avons le droit à la vie, le droit de fonder ou
d’appartenir à une association, le droit d’élire et d’être élu, le droit
d’exercer le culte (de religion). Tous ces droits subjectifs existent parce
qu’il existe des règles du droit objectif qui reconnaissent ces possibilités
ou ces prérogatives.

Le droit objectif et le droit subjectif seront étudiés séparément et nous auront


d’abord à étudier le concept général du droit objectif qui fera l’objet de la
première partie du cours, avant de nous consacrer ensuite à l’étude du droit
subjectif qui fera l’objet de la 2ème partie du cours.
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Ière Partie: DU DROIT OBJECTIF

CHAPITRE I: LE PHENOMENE JURIDIQUE REGULATEUR DE LA


VIE EN SOCIETE

Section 1. De l’omniprésence du droit objectif

L’observation la plus élémentaire et l’expérience courante débouchent sur


cette constatation que la vie des hommes en société est assujettie à des règles.

En effet, comme le disait déjà ARISTOTE, « L’homme est un être social»


c’est-à-dire que l’homme ne peut vivre seul mais qu’il recherche, par instinct ou
par raison, la compagnie des autres êtres humains pour vivre groupés dans des
communautés de consistance variable: famille, clan, tribu, cité, associations
diverses, Etats, confédération d’Etats, etc.

Il n’y a pas de groupement viable si chacun entend agir à sa guise sans se


soucier des répercutions que son action peut avoir à l’égard des autres membres
du groupe ou à l’égard du groupe lui-même.

Par conséquent, tout groupement suppose une organisation. Toute société


humaine implique une discipline, c’est-à-dire un minimum de règles destinées à
permettre la coexistence sociale. Ces règles énoncent ce qui est permis et ce qui
interdit. L’observation de ces règles est nécessaire à l’existence même du
groupement, de la société ; et par conséquent à chacun des membres du groupe.
Mais il ne suffit pas d’avoir des règles de droit dans la société, il faut en assurer
l’observation. Celui qui viole la règle de droit doit savoir qu’il s’expose à une
sanction c’est-à-dire à une certaine contrainte. Dépourvue de cette sanction, la
règle de droit risquerait de ne pas être suivie.

Ainsi, l’observation la plus élémentaire et l’expérience courante nous


ramènent à la première approche du droit car ces règles qui régissent la vie en
société et qui sont assorties d’une sanction se rattachent à l’idée du droit.

Dès lors ; on considère qu’aucune société n’est concevable sans le droit et


que ce dernier se trouve toujours à la base de la vie sociale de toute société
humaine organisée.
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C’est dans ce sens qu’il faut comprendre l’adage latin : « ubisocietasubi jus »
qui signifie que « Là où il y a une société humaine, là, il y aura forcément le
droit ».

Section 2. Définition et caractères du droit objectif

A. Définition du droit

Si on examine l’étymologie du mot français « droit », on y retrouve l’idée


de ce qui est conforme à la règle « directum » qui vient du verbe «dirigere» qui
évoque l’idée de directive, de normes ou de règles.

Le terme «directum» suggère que le droit exprime l’idée de direction,


l’idée /d’autorité. On retrouve cette même idée d’autorité dans un autre mot latin
«jus» qui éveille l’idée d’un ordre, l’idée d’un indicatif qui s’impose à l’homme.
Ce terme «jus» vient lui-même du verbe « jubere», qui veut dire ordonner ou
commander. Le terme «jus» a donné lieu à l’adjectif «juridique» qui désigne ce
qui est propre au droit.

Les manifestations du droit sont innombrables. Par exemple, il y a lieu


d’évoquer la circulation routière, les rapports entre employé et employeur, le
paiement des impôts, du loyer, les rapports entre parents et enfants, entre
vendeur et acheteur, la répression des meurtres ou vol, l’organisation des
élections…etc.

Le droit qui se manifeste de façon multiforme dans les sociétés humaines dont il
conditionne l’existence en y faisant régner l’ordre est défini comme étant
l’ensemble des règles qui, sous la garantie d’une contrainte sociale, publique ou
étatique, régissent les rapports des hommes vivant en société tant sur le plan
national que sur le plan international.

Dans cette définition, le droit est envisagé sous l’angle de son objet. C’est pour
cela qu’on le désigne sous l’expression «  droit objectif » ou encore sous
l’appellation « droit positif ». Si ces deux termes sont souvent considérés
comme synonymes, il importe de noter qu’un examen approfondi permet de
déceler entre eux une dégager une légère nuance.
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En effet, l’expression de «droit objectif» met surtout l’accent sur le rôle ou


l’objet du droit qui est de régir en tout temps les relations des hommes vivant en
société, tandis que l’expression « droit positif» évoque l’ensemble des règles de
droit qui sont effectivement en vigueur sur un territoire donné et à un moment
précis de l’histoire d’un peuple.

Quand on parle du droit positif burundais, on vise toutes les règles de droit en
vigueur en ce moment, et ce droit n’est pas forcément le même que celui de
l’année passée ou de celui d’il y a 10 ans.

En définitive donc, le concept de «droit objectif» vise essentiellement une


abstraction en ce sens qu’il évoque le droit envisagé sous l’angle de son objet
tandis que le vocable « droit positif» vise un système juridique concret, c’est-à-
dire la catégorie des règles posées par l’autorité étatique et qui sont en vigueur à
un moment précis de l’histoire d’un Etat.

B. Les caractères généraux de la règle de droit objectif

De la définition retenue précédemment, il apparaît que la règle de droit présente


un certain nombre de caractères :

- Le caractère étatique

- Le caractère contraignant

- L’orientation vers le bien commun

1. Le caractère étatique de la règle de droit

La notion de droit est liée au fait que l’homme ne peut vivre que dans une
société organisée. Pour qu’il y ait droit, il faut qu’il y ait un groupement humain
organisé. Le droit n’aurait ni sens ni utilité dans le cas d’un homme isolé, vivant
seul dans un monde qui lui est propre.

Les sociétés humaines se présentent généralement comme des


groupements nombreux et fortement organisé sous forme des Etats. Lorsqu’on
prend par exemple le cas du Burundi et des sociétés étatiques similaires, on
constate que les règles de droit y apparaissent avant tout, comme émanant de
l’Etat, ou comme consacrées par lui. En effet, il y a des règles qui s’établissent
spontanément dans une société, qui naissent peu à peu des usages ou des
habitudes des gouvernés eux-mêmes et dont l’Etat ne fait que consacrer
l’existence. Ce sont des règles dites coutumières.
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Il y a d’autres règles qui sont promulguées par les gouvernants et qui


proviennent ainsi de la volonté des organes de l’Etat. Ce sont des lois écrites.
Dans les sociétés modernes, la catégorie de règles émanant de l’autorité étatique
est la plus importante.

En tout état de cause, qu’il s’agisse des unes ou des autres, le rôle de
l’Etat est de les faire respecter sans distinction parce que toutes ces règles
intéressent la collectivité étatique et sont nécessaires pour le bon fonctionnement
de la société toute entière.

2. Le caractère contraignant de la règle de droit

Il ne suffit pas d’avoir des règles de droit. Il faut encore les faire respecter.
La règle de droit doit revêtir un caractère obligatoire. Dépourvue de ce cachet,
elle pourrait devenir illusoire et ne pourrait pas être observée. D’où la nécessité
d’une contrainte sociale, étatique ou publique pour assurer l’efficacité des règles
de droit. La règle juridique est une norme dont le caractère obligatoire est
garanti par l’intervention éventuellement des sanctions.

En effet, dès lors que la règle de droit vise à organiser la société, il faut
s’assurer qu’elle sera respectée même par ceux quine s’y rallient pas facilement
de leur propre gré. La menace d’une sanction vaincra sans doute leur réticence.
Dans le cas contraire, la mise en œuvre de la sanction aura pour effet le
rétablissement de l’ordre perturbé. Les sanctions qui renforcent la règle de droit
sont de nature différente : il ya les sanctions civiles et les sanctions pénales.

a. Les sanctions civiles

Elles protègent essentiellement les intérêts particuliers ou privés. Elles ont pour
objet de remettre les choses dans leur pristine état c’est-à-dire dans la situation
où elles se trouvaient avant la violation de la règle de droit, l’état initial ou l’état
primitif.

Parfois, la sanction civile pourra consister dans la mise à néant d’un acte
juridique passé en violation des conditions prescrites pour la validité dudit acte.

Exemple: l’annulation d’une vente faite par un enfant

b. Les sanctions pénales


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Elles interviennent lorsque les intérêts de la société ou de la collectivité


sont mis en jeu par la violation de la règle de droit. Les sanctions pénales sont
constituées par les peines qui peuvent atteindre le délinquant dans sa personne,
(emprisonnement ou peine de mort) dans ses biens (amendes ou confiscations)
ou dans ses droits (interdiction des droits politiques, saisie d’un permis de
conduire).

Les sanctions pénales visent à réparer les préjudices causés à la société


toute entière, contrairement aux sanctions civiles qui ne consiste qu’à réparer un
préjudice occasionné à des intérêts particuliers. Les sanctions pénales sont
administrées au nom et pour le bien de la société.

N.B.: Ces deux catégories de sanctions : civiles et pénales ne s’excluent pas.


Elles peuvent s’accumuler lorsque la violation de la règle de droit porte atteinte
à des intérêts privés en même temps qu’elle perturbe l’ordre social en violant un
des principes essentiels à l’organisation d’une société.
Ainsi, un automobiliste qui renverse fautivement un piéton à la suite de la
violation de la règle du code de la route, sera condamné à réparer le dommage
causé au piéton (sanction civile), mais pour avoir commis une infraction de la
violation du code de la route, il sera en même temps condamné à une sanction
pénale.

3.La règle de droit est orientée vers le bien commun

La règle de droit a pour but ultime la réalisation du bien commun,


constitué par le plein épanouissement matériel, culturel et ou même moral des
membres d’une société.

En vue de la réalisation de ce bien commun, le droit tend à la création des


conditions générales indispensables à celui-ci, et qui dépassent les possibilités
de l’initiative individuelle. Ainsi, le droit vise à promouvoir la sécurité des
individus, la stabilité de l’ordre public, l’organisation de l’économie, le maintien
de l’ordre public, l’organisation de l’enseignement, des infrastructures
publiques, etc.
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CHAPITRE II. DISTINCTION DE LA REGLE DE DROIT DES


DIVERSES AUTRES REGLES DE CONDUITE
DANS LA SOCIETE

Section I:Le droit et la morale

Les règles de la morale comme les règles du droit positif sont destinées à
régir l’activité humaine. Mais la morale et le droit ne sont pas confondus. On
peut sans doute relever des points de convergence mais des divergences existent
entre ces deux disciplines.

§1: Les divergences

A. La morale a un domaine plus étendu que le droit

Le droit ne régit que la conduite des hommes tant qu’ils vivent dans la
société. Si ses règles peuvent être empruntées à la morale, ce sera là à la morale
sociale à laquelle le droit ferait recours.

La morale quant à elle se préoccupe de la conduite de l’homme non


seulement à l’égard des hommes, mais aussi à l’égard de lui-même, voire à
l’égard de la divinité.

On doit noter cependant que même si le domaine du droit est moins étendu que
celui de la morale, le droit formule parfois des règles dont la morale ne se
préoccupe pas, et même des règles immorales. Ainsi, les règles de droit en
matière de circulation routière sont indifférentes vis-à-vis de la morale.

En revanche, le droit consolide une situation immorale lorsqu’ il permet qu’on


puisse devenir propriétaire de l’objet possédé après une possession prolongée.
(art.647 du CCL III : Toutes les actions, tant réelles que personnelles, sont
prescrites par trente ans sans que celui qui allègue cette prescription soit obligé
d’en rapporter un titre, ou qu’on puisse lui opposer l’exception déduite de la
mauvaise foi.)
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B. Le droit apparaît comme une règle positive, comme une injonction du


pouvoir social dans lequel vit effectivement une collectivité.

A ce titre, la règle de droit est une réalité d’essence sociale. Par contre, la
morale est la règle à laquelle l’homme se sent obligé d’obéir pour respecter sa
propre humanité et celle d’autrui.

A ce titre, elle d’essence individuelle et spirituelle. En d’autres termes, le


droit a pour objectif la vie en société. La morale au contraire s’intéresse au
perfectionnement des consciences, de chaque conscience en particulier, sans
considérer au premier plan la réglementation des activités et des relations
humaines.

C. La morale est plus stricte et plus exigeante que le droit

La morale tend à la perfection absolue de l’individu. Elle régit même les


pensées les plus intimes et ne pourra être respectée scrupuleusement que par
quelques-uns.

Le droit quant à lui est fait pour assurer l’ordre et la paix dans une société.
Les règles qu’il pose ne visent pas la perfection.

Le droit admet des gestes ou des pensées que la morale réprouve. C’est ainsi
par exemple que le mensonge est condamné par la morale quelque en soit la
gravité, mais n’est pas toujours condamné comme une faute décisive par le droit.
C’est l’exemple de l’adage en matière de mariage « trompe qui peut ».

D. Les sources de la morale et du droit sont souvent différentes

Les sources que les divers systèmes philosophiques assignent à la morale


tiennent soit à la révélation divine, soit dans la conscience individuelle ou
collective.

Les règles de droit par contre sont d’origine étatique. Il peut s’agir des règles
édictées par les gouvernants, tout comme il peut s’agir de celles consacrées ou
ratifiées par ceux-ci après une lente élaboration coutumière.

E. Le droit et la morale n’ont pas les mêmes sanctions

Les sanctions des règles morales se placent au niveau interne : celui de la


conscience. Elles sont d’ordre psychologique ou religieux. Elles se traduisent le
plus souvent par le remord.
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Les sanctions des règles juridiques ont par contre une origine externe. Elles sont
positives ou sociales en ce sens qu’elles sont infligées par les pouvoirs publics.
Les gouvernants les feront respecter par la force sociale ou publique comme les
peines d’emprisonnement, les amendes, etc.

§2. Les points de convergence

Nonobstant le décalage entre le droit et la morale au niveau des critères que nous
venons de relever, il subsiste des liens assez étroits entre les deux disciplines.

A. Souvent les règles morales servent de complément à des règles juridiques

De la sorte, en droit privé un grand nombre de règles sont dictées et imposées


par l’idée de morale d’honnêteté si bien que la morale circule à l’intérieur du
droit comme le sang dans le corps.

Dans ce contexte, on peut relever l’art.122 du CPF qui impose aux époux des
devoirs généraux et mutuels de cohabitation, de fidélité, de secours et
d’assistance. Si ce sont des devoirs de droit, ils sont également avant tout des
devoirs moraux. Il y a ainsi une sorte de connexité du droit positif et de la
morale dans ce sens.

B. Parfois, le droit renvoie lui-même tacitement à la morale

Autrement dit, le droit se fait relayé par les prescriptions relevant de la


morale. Ainsi, l’art.32 du code des obligations ou CCL III, prescrit qu’il est
interdit de passer un contrat «dont les clauses vont à l’encontre de bonnes
mœurs».

Aussi, bien qu’aucun texte précis du droit ne l’interdise, la donation faite


entre concubins sera considérée comme nulle par l’application du seul principe
de l’art.32 du code des obligations, si elle a été faite dans le but d’entreprendre
ou d’entretenir et maintenir des relations de concubinage. A travers cet exemple,
on se rend compte que c’est une certaine conception morale qui forme la
substance de la règle du droit.
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Section II. La règle de droit et les règles de convenance sociale

A côté des règles morales, obligatoires en conscience, et des règles juridiques, il


existe aussi des règles admises dans les rapports entre les hommes et qui
constituent des règles de convenance telle que les usages de bonne éducation, de
courtoisie, et de bienséance.

Elles sont très importantes dans la vie sociale et il est habituel de s’y conformer
parce qu’elles contribuent puissamment au fonctionnement de la vie en société,
en développant des sentiments de solidarité, de sympathie, etc.

La question qui se pose est celle de savoir si ces règles de convenance sociale
peuvent être considérées comme des règles de droit. La réponse est négative car,
ces règles ne sont pas assorties de sanctions sociales ou étatiques. Et c’est dans
ce sens qu’il est possible de parler de relations non juridiques.

Toutes ces règles de convenance sociale sont certes dépourvues de véritables


sanctions étatiques, mais elles connaissent tout de même des sanctions d’une
autre nature. Celui qui ne les observe pas s’expose au ridicule, au blâme ou à la
déconsidération. Mais pareilles sanctions n’ont pas la même nature, ni la même
finalité que la sanction qui réconforte la règle de droit. Par conséquent, ces
règles de bienséance, de savoir vivre ou de courtoisie ne sont pas des règles de
droit.

Section III. Le droit et la justice

Dans la présente section, nous envisageons le terme justice dans le sens


d’une valeur morale qui peut servir de fondement au droit. Il est certain en effet
que la puissance du droit et son respect par les sujets de droit dépendent
largement des relations suffisamment étroites que le droit entretient avec la
justice. Les citoyens respecteront d’autant plus le droit en vigueur qu’ils auront
le sentiment que les règles posées par lui sont justes. Un courant de pensée fort
ancien définit d’ailleurs le droit comme «la science du juste».
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CHAPITRE III. LES GRANDES SUBDIVISIONS DU DROIT

Le phénomène normatif (le droit) est à la fois un et multiple. Il est un


parce que ses différentes manifestations ou ses différentes branches poursuivent
toutes une même finalité ou un même objectif à savoir la réglementation des
rapports sociaux.

Il est multiple dans ce sens que les relations sociales qu’il est destiné à
régir appellent en raison de leur diversité des solutions différentes. Des
regroupements peuvent être donc opérés dans ce qu’on appelle les branches du
droit qui sont des ensembles de règles constituées autour des principes
communs.

Pour le Burundi, nous partirons du fait que le système normatif se


subdivise d’abord en droit écrit et en droit coutumier. Ensuite, nous allons
aborder la distinction du droit interne et du droit international.

Section 1. Le droit coutumier et le droit écrit.

La règle de droit peut être formulée par une autorité sociale établie à cet
effet et dont le rôle est de formuler par écrit les règles de caractère général. Les
règles de droit écrit sont ainsi élaborées et promulguées par le ou les organes
ayant dans l’Etat le pouvoir de confectionner des normes juridiques.

La règle de droit peut également se dégager des usages et des pratiques


répétées dans un milieu social donné en dehors de l’intervention des autorités
publiques. Elle sera dite de source coutumière et se caractérisera comme une
règle non écrite, transmise oralement, reconnue obligatoirement par l’ensemble
d’une population donnée et destinée à régir ou réglementer la vie de cette
société. L’ensemble de ces coutumes en vigueur dans une société donnée
constitue le droit coutumier.

Tout le droit du Burundi ancien était du droit coutumier. L’occupation du pays


par les puissances occidentales a eu pour effet d’y introduire le droit écrit
d’inspiration européenne, qui a remplacé progressivement le droit coutumier
mais ce dernier subsiste en certaines matières notamment en matière
successorale.
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Section 2. Le droit interne et ses différentes branches

Le droit interne qu’on appelle aussi le droit national est ainsi dénommé
parce que c’est le droit positif en vigueur dans un Etat déterminé, le droit ayant
des sanctions et des sources propres à cet Etat, le droit qui réglemente les
rapports sociaux qui se situent à l’intérieur de cet Etat sans qu’aucun élément
ressortissant d’un autre Etat n’intervienne dans ces rapports.

On oppose traditionnellement au sein du droit interne de chaque Etat, le


droit public au droit privé.De toutes les ramifications du droit, cette subdivision
est la plus ancienne et la plus importante.

De façon générale, elle correspond à ce qu’indiquait Montesquieu


lorsqu’il définissait le droit public appelé par lui «droit politique» comme étant:
« Les lois dans les rapports qu’ont ceux qui gouvernent avec ceux qui sont
gouvernés».

Montesquieu désignait le droit privé par l’expression droit civil et le


définissait comme étant : « les lois dans les rapports que les citoyens ont entre
eux ».

§1. Le droit public et ses subdivisions

Le droit public comprend l’ensemble des règles qui, dans un Etat donné
président à l’organisation de l’Etat et gouvernent ses rapports avec les
particuliers. Il englobe tous les rapports de droit dans lesquels l’Etat intervient
pour maintenir l’ordre, maintenir les services publics, etc.

Le droit public se subdivise en plusieurs branches qu’il importe de


distinguer.

A. Le droit constitutionnel

Le droit constitutionnel est la branche du droit public qui détermine les


règles relatives à la forme de l’Etat, à l’organisation des pouvoirs dévolus
(reconnus) a cet Etat i.e les pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire et qui fixent
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les devoirs et les droits fondamentaux des citoyens de cet Etat (les libertés
publiques).

En ce qui est de la forme de l’Etat du Burundi par exemple, l’Etat du


Burundi est un Etat laïc, unitaire et démocratique.

B. Le droit administratif

Il n’y a pas de différence fondamentale entre le droit constitutionnel et le


droit administratif mais seulement une question ou une différence de niveau.
Dans les deux cas, il s’agit d’assurer le bon fonctionnement de l’Etat au service
de l’intérêt général grâce à un système de règles qui réalisent un équilibre entre
les prérogatives des citoyens et celles de la puissance publique.

Le droit constitutionnel remplit sa mission en ce qu’il établit la charpente


de l’Etat, sa forme, ses organes fondamentaux, ainsi que les prérogatives
fondamentales des citoyens.

Le droit administratif quant à lui remplit sa mission dans un contexte différent :


celui de l’application quotidienne du droit à une multitude de situations. En
d’autres termes, celui de la gestion courante des affaires publiques. Dès lors, on
remarque que le droit administratif est la partie du droit public qui règle
l’organisation et le fonctionnement des administrations locales, territoriales,
centrales ainsi que les services publics.

C. Le droit fiscal

Le mot « fisc » et ses dérivés viennent du latin « fiscus » qui veut dire panier. A
Rome, on désignait par ce terme les paniers dans lesquels les collecteurs
d’impôts mettaient leurs recettes

Aujourd’hui, le droit fiscal désigne la branche du droit public qui détermine les
modalités suivant lesquelles il est contribué aux charges publiques en
déterminant les contribuables, l’assiette de l’impôt, le mode de calcul de l’impôt,
ainsi que les modalités de perception des différents prélèvements.
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D. Le droit pénal

Il ya des actes de violence,de ruse, deméchanceté, parfois même des actes


de simple négligence ou d’omission qui mettent en péril les intérêts de la
collectivité. L’objet du droit pénal est de définir les faits qui constituent des
infractions ainsi que les peines applicables à leurs auteurs.

E. Le droit des finances publiques

C’est la branche du droit qui s’occupe des questions relatives au budget et


à la comptabilité de l’Etat et des services publics, aux emprunts de la monnaie, à
l’émission de la monnaie et aux différentes opérations relatives aux deniers de
l’Etat et des autres personnes publiques.

F. Le droit judiciaire

Le droit judiciaire est la branche du droit public qui a trait à l’exercice de juger
par les cours et tribunaux. Il pourvoit à la constitution des juridictions et à
l’organisation de leurs compétences respectives ainsi qu’à la détermination de la
procédure suivant laquelle les juridictions pourront exercer leurs pouvoirs.

Le droit judiciaire se subdivise en droit judiciaire répressif ou pénal qui s’occupe


des affaires pénales et en droit judiciaire privé qui s’occupe des affaires de
nature civile.

§2. Le droit privé et ses subdivisions

Le droit privé est l’ensemble des règles juridiques qui, dans un Etat donné
gouvernent les rapports que les particuliers ou les collectivités privées peuvent
avoir entre eux.

Le droit privé se subdivise en branches.

A. Le droit civil
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Le droit civil peut être considéré comme étant la branche du droit privé
qui constitue le droit commun des rapports entre les particuliers ou les
collectivités privées et qui leur est applicable dans la mesure où ces rapports
n’appartiennent pas à une catégorie de rapports juridiques régie par une branche
spécialisée du droit privé.

Les principales sous- branches du droit civil sont groupées comme suit :

a. Le droit des personnes et de la famille

Il réglemente les conditions et les éléments de la personnalité, de son état


civil et de son statut d’une part, et d’autre part, il réglemente les rapports de
famille tel que le mariage et ses effets au point de vue des personnes et des
biens, les modes de dissolution du mariage, des rapports qui naissent de la
parenté, etc.

b. Le droit des biens

C’est la branche du droit civil qui règlemente les droits subjectifs que les
personnes peuvent avoir sur les choses du monde extérieur en vue de s’en
approprier l’utilité en totalité ou en partie. Le droit des biens réglemente
également les différents biens meubles et immeubles.

c. Le droit des successions

Le droit des successions règle le sort des biens laissés par une personne à
sa mort(le de cujus). Cette branche du droit civil est encore régie par le droit
coutumier au Burundi.
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B. Le droit commercial

Au droit civil, branche générale du droit privé, s’oppose d’abord le droit


commercial, branche spéciale établissant les règles particulières aux
commerçants (personnes morales ou physiques) et aux actes de commerce. La
rapidité des opérations commerciales et leur nombre assez élevé rendent les
règles de droit civil souvent impropres à la normalisation des affaires. En
d’autres termes, la vie des affaires faite de transactions exige du droit
commercial qu’il concilie deux impératifs : la sécurité et la rapidité. Pour ce
faire, de nombreuses règles du code civil ont été adaptées ou amendées aux
exigences du commerce.

C. Le droit social

Le terme «droit social» est ici employé pour désigner la branche du droit
privé qui s’applique au travail individuel ou collectif, travail s’exerçant dans le
cadre d’un contrat de travail qui instaure les mécanismes de protection contre les
risques inhérents à la prestation du travailleur (réparation des accidents de
travail, pension de vieillesse ou d’invalidité, etc).

En d’autres termes, le droit social est ici utilisé d’une manière


conventionnelle et comprend deux parties : le droit du travail proprement dit et
le droit de la sécurité sociale. La première subdivision règle essentiellement les
relations qui existent entre les travailleurs et l’employeur du fait de la prestation
du travailleur. La seconde s’attache à l’organisation d’une protection contre les
risques sociaux en assurant aux travailleurs qui en sont victimes des allocations
ou indemnités.

Section 3. Le droit international et ses subdivisions

Dans la précédente section, nous n’avons envisagé que la vie juridique à


l’intérieur des Etats. Mais il existe des relations qui débordent les frontières des
Etats. Le droit qui les régit est appelé « droit International » par opposition au
droit interne qui est aussi appelé « droit national ».On retrouve au sein du
droit international la distinction entre le droit public et le droit privé.
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§1. Le droit international Public

Il est constitué par l’ensemble des règles juridiques qui régissent les
rapports de droit des sujets de la société internationale (les Etats souverains et
les organisations internationales).

L’originalité et même la faiblesse du droit international public est que les


règles de conduite qu’il édicte à l’égard des Etats ou organisations
internationales ne sont pas toujours sanctionnées efficacement, pour ne pas dire
que souvent elles ne sont nullement sanctionnées.

En d’autres termes, les relations du droit international public ne sont pas


dominées comme celles du droit interne par un pouvoir étatique établi qui assure
l’autorité des règles juridiques. On en a parfois tiré la conclusion que le droit
international public ne méritait pas le nom de droit, parce qu’il établit des règles
dont les Etats peuvent impunément s’affranchir et cela parce qu’il n’y a pas
d’autorité super étatique disposant d’un pouvoir de contrainte.

§2. Le droit international privé

Le droit international privé concerne les rapports de droit privé au sujet


desquels plusieurs législations internes ou nationales entrent en concours. Il
envisage les hypothèses dans lesquelles une situation juridique relève à la fois de
lois de 2 ou plusieurs Etats et édicte des règles qui permettent de résoudre les
conflits de lois en présence.

Exemple : Un mariage entre un homme de nationalité française et une femme de


nationalité congolaise est projeté d’être conclu au Burundi.

La question qu’on se pose est celle de savoir la loi à laquelle on va se


référer pour célébrer ce mariage. Est-ce la loi française, la loi congolaise ou la
loi burundaise?

La réponse est donnée par une règle de droit international appelée « règle de
rattachement ».

De telles situations suscitent des questions de conflit de lois c'est-à-dire la


question de la détermination du droit national applicable à ces situations
comportant des éléments d’extranéité (étranger l’un de l’autre).
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La loi burundaise ne s’applique pas forcément à toutes les situations qui naissent
sur le territoire burundais. Les étrangers résidant au Burundi peuvent continuer à
être régis par leurs droits nationaux parce que le droit burundais leur donne cette
possibilité. Inversement, les Burundais passant les actes à l’étranger, peuvent
continuer à être régis par le droit burundais si la loi du pays où ils se trouvent
leur donne cette possibilité.

CHAPITRE IV. LES SOURCES DU DROIT OBJECTIF

Section I. La loi

§1. Définition formelle et matérielle de la loi

Le droit trouve son centre de gravité dans la loi. Le mot «loi» est
susceptible de 2 sens différents : le sens formel appelé aussi sens strict et
précis ainsi que le sens matériel appelé sens large.

Au sens strict, appelé aussi sens formel, la loi désigne toutes les
dispositions éditées par l’organe étatique investi du pouvoir législatif par la
constitution élaborées selon mes et procédures également prévues par la
constitution. Au Burundi, le pouvoir législatif est exercé par le parlement qui
comprend deux chambres. L’Assemblée Nationale et le Sénat. Une fois que
celui-ci adopte une loi, cette dernière est ensuite promulguée par le Président de
la République.

Il faut noter cependant que le Gouvernement peut exceptionnellement, et


pour l’exécution de son programme, demander au pouvoir législatif
l’autorisation de prendre par décrets-lois pendant un temps limité, les mesures
qui sont normalement du domaine de la loi.

Ces décrets-lois doivent être ratifiés par le pouvoir législatif au cours de la


session parlementaire suivante, à défaut de quoi ils sont frappés par caducité,
c’est-à-dire que seuls les effets produits par ce décret-loi avant son refus restent
valables.

Ainsi, au sens strict, la loi désigne l’acte qui émane exclusivement du


pouvoir législatif que cet acte soit promulgué sous forme de loi après avoir été
voté par le pouvoir législatif ou qu’il soit pris sous forme de décret-loi par le
Président de la République dans des circonstances exceptionnelles et après
autorisation du pouvoir législatif.
20

La loi peut être également définie du point de vue matériel ou large. Sous
cet angle, elle se ramène à toute règle de droit écrite formulée d’une manière
générale un organe étatique compétent dans l’exercice du pouvoir législatif ou
même du pouvoir exécutif.

Si elle émane du pouvoir législatif, elle portera l’appellation de loi ; si elle


émane du pouvoir exécutif, elle va porter le nom de décret-loi, décret, arrêté,
ordonnance ou d’une manière générale, de décision administrative lorsqu’elle
est prise par les autorités administratives de niveau inférieur dans le cadre de
leur compétence (décision du Gouverneur de province, de l’Administrateur
communal ou d’un Directeur Général, etc).

Ce sera la loi au sens matériel qui sera envisagée dans le cadre de la


théorie des sources du droit.

§2. Sphère d’application de la loi

A. Le phénomène normatif dans l’espace

La règle de droit se trouve affectée d’une relativité dans l’espace. La


juxtaposition des Etats à caractère souverain commande de distinguer le champ
d’application des différentes lois nationales.

D’une manière générale, on peut dire que la règle de droit s’applique dans le
cadre territorial pour lequel elle a été faite et mise en vigueur. Les autorités
étatiques ne doivent obéissance qu’aux règles appartenant à leur ordre juridique
sans que les normes en vigueur dans les autres systèmes juridiques puissent les
obliger. C’est le principe de la territorialité de la loi.

B. Le champ d’application de la loi ou de la règle de droit dans le temps

La règle de droit a une force obligatoire, ce qui est du reste considéré comme
l’un des caractères inhérents à toute règle de droit. Pour déterminer la durée de
cette force obligatoire, il faut rechercher à partir de quel moment la règle de
droit entre en vigueur et comment elle disparaît ou perd sa force. Ces aspects
vont être examinés autour de 3 questions à savoir, la question de l’entrée en
vigueur de la loi, celle de l’effet de la règle de droit une fois mise en vigueur et
enfin celle de l’abrogation de la loi.
21

1. La mise en vigueur de la règle de droit

La règle de droit s’applique à partir du jour où elle est mise en vigueur. La


date de son entrée en vigueur est généralement fixée par le législateur lors de la
signature ou de la promulgation de la règle de droit.

La signature ou la promulgation d’une règle de droit rend cette règle


exécutoire mais il faut encore porter à la connaissance des citoyens la nouvelle
règle de droit. Cela est fait par le procédé de la publication.

♦ La publication

La publication d’une règle de droit est destinée à permettre au public de


prendre connaissance du texte légal déjà promulgué, car, pour qu’une règle de
droit puisse produire ses pleins effets, il faut que les citoyens soient à mesure de
la connaître.

Si la signature ou la promulgation rend la règle de droit exécutoire, la


publication quant à elle lui confère son caractère obligatoire. On confond assez
souvent la promulgation ou la signature d’un texte et la publication de ce texte.
Ce sont cependant 2 opérations distinctes.

Lorsque la promulgation est faite, la loi devient exécutoire c’est-à-dire


qu’elle est susceptible d’être exécutée par tous ceux qui en auraient déjà pris
connaissance. Mais il faut ensuite que le texte de loi soit porté à la connaissance
des citoyens. Cela est assuré par la publication. Une fois que celle-ci est réalisée,
la loi doit être obligatoire et exécutée par tous ceux à qui elle s’adresse. Le
principe de la publication des règles de droit se fonde sur la considération
qu’une disposition légale ne peut être obligatoire qu’à une double condition.

Tout d’abord, il s’impose que son authenticité soit assurée. Ensuite, il faut
que la règle soit effectivement connue par les citoyens qu’elle intéresse ou du
moins que les citoyens soient mis à mesure de la connaître avant qu’elle ne leur
soit imposée.

Parfois, l’autorité qui promulgue une règle de droit intercale un délai entre
le moment de la promulgation de la règle de droit et le moment où la règle
deviendra obligatoire. On désigne ce délai par l’expression latine «vocatio legis»
qu’on traduit en français comme étant «le délai légal d’information».

Il s’agit en réalité d’un délai pendant lequel les citoyens auront l’occasion
de prendre connaissance de la nouvelle règle de droit promulguée et publiée.
22

Une fois que le délai de la vocation legisest expiré, la loi sera censée
connue par tout le monde même si en réalité certains n’en ont pas pris
connaissance ou s’ils n’ont pas été à mesure d’en prendre. C’est le sens de la
maxime ou de la présomption : « Nul n’est censé ignorer la loi ».

2. L’effet de la loi dans le temps

Les relations entre le droit et le temps peuvent susciter des difficultés


énormes. On peut poser le problème dans les termes suivants : lorsqu’ une loi en
vigueur est abrogée par une loi nouvelle, quels sont les faits, quels sont les actes
qui seront régis par la loi ancienne ou par la loi nouvelle ?

Cette question qui pourrait sembler facile à résoudre est en réalité une des
plus délicates. L’art. 2 du Code Napoléon semble répondre à la question en
précisant que: « La loi dispose pour l’avenir et n’a pas d’effet rétroactif ». De ce
principe, on peut dégager deux propositions distinctes :

1) La loi n’a pas d’effet rétroactif

Cela veut dire qu’une loi n’est pas applicable aux situations juridiques dont les
faits ont été entièrement consommés sous la loi précédente.

2) La loi dispose pour l’avenir

Cela veut dire qu’à partir du moment où une loi est mise en vigueur, elle va
régir immédiatement les situations juridiques qui vont naître postérieurement à
cette mise en vigueur.

Si ces deux propositions sont apparemment fort simples, leur mise en


application est souvent difficile en raison de la complexité des faits sociaux. La
création d’une situation juridique nécessite parfois une série d’actes qui
s’échelonnent dans le temps.
23

Ainsi par exemple, la formation d’un mariage nécessite une publication du


projet de mariage, mais aussi la célébration de ce mariage par l’officier de l’état
civil.

Si un changement de législation relative à la formation d’un mariage


intervient à la fin de la publication des bans, mais avant la célébration du
mariage, comment déterminer la compétence de ces deux lois successives?

On se rend compte que le principe que la loi nouvelle a vocation à régir


l’avenir et non le passé peut susciter des problèmes assez délicats à résoudre.
Pour analyser cette matière, il y a lieu d’étudier successivement les deux
propositions précitées qui découlent directement du principe énoncé par l’art.2
du code Napoléon.

a. La loi n’a pas d’effet rétroactif ou le principe de la non


rétroactivité de la loi

1. Sens et fondement du principe

Dire qu’une loi n’a pas d’effet rétroactif signifie qu’il ne faut pas
appliquer une loi à des actes ou des faits juridiques qui se sont passés
antérieurement au moment où cette loi a acquis force obligatoire en vue de
modifier ou d’effacer les effets juridiques produits sous la loi ancienne.

2. Caractère du principe de la non rétroactivité de la


loi

En droit Burundais, à part la matière pénale dans laquelle le principe le


principe de la non rétroactivité est toujours inscrit dans les différentes
constitutions (art.18 de la constitution du 13/03/1992 et l’art.41 de la
constitution du 18 mars 2005), le principe de la non rétroactivité n’est pas
consigné dans la loi.

3. Les exceptions au principe de la non rétroactivité

Certaines lois ont un effet rétroactif et leur application remonte dans le


passé. Ces lois peuvent régir les faits accomplis ainsi que les situations
juridiques déjà passées. Ces lois dérogent ainsi au principe de la non
rétroactivité de la loi. Il y a lieu d’en relever les principales catégories
d’exception.
24

a. Les lois que l’autorité étatique déclare expressément rétroactives

A condition d’exprimer nettement sa volonté, l’autorité étatique a le


pouvoir de prendre des lois rétroactives. Mais ces lois demeurent tout de même
assez exceptionnelles.

b.Les lois interprétatives

On appelle loi interprétative, une loi par laquelle le législateur se propose


de déterminer le sens jusque là obscur, douteux ou controversé d’une loi
ancienne.

Tout le monde s’accorde à reconnaître que les lois interprétatives


s’appliquent rétroactivement même pour résoudre des difficultés concernant les
actes ou les faits accomplis avant leur promulgation sous la loi interprétée.

c.Les lois pénales plus douces

C’est en droit pénal que l’exclusion de la rétroactivité est plus que


nécessaire. En effet, la conduite qu’une personne a aujourd’hui, et que le droit
regarde actuellement comme permise ne saurait être punie demain en vertu
d’une loi nouvelle qui viendrait déclarer après coup que la conduite antérieure
était interdite.

Cependant, la non rétroactivité de la loi ne s’impose d’une manière


absolue que lorsque cette loi établit une infraction nouvelle ou aggrave une
peine qui existait.

Lorsque les lois pénales sont plus douces c’est-à-dire lorsqu’elles suppriment ou
adoucissent une pénalité, on admet qu’elles rétroagissent. On parle alors de la
rétroactivité « in mitius » ;c’est-à-dire la rétroactivité au mieux ou pour faire du
bien.

En réalité, si le législateur estime qu’un fait ou un acte ne doit plus être réprimé
avec la même sévérité qu’autrefois ou qu’il n’est plus justifié de lui confier un
caractère fautif, il est équitable que les adaptations que le législateur apporte à la
loi pénale s’appliquent aux actes accomplis avant leur entrée en vigueur, que ces
adaptations prescrivent une peine moins forte ou qu’elles suppriment purement
et simplement l’infraction. Il serait en effet inhumain et illogique d’infliger une
peine que le législateur vient de supprimer ou de réduire parce qu’il l’a trouvée
excessive. Il faut donc appliquer aux délinquants antérieurs la loi nouvelle, tout
au moins s’il y a encore moyen de le faire.
25

3. L’abrogation

Abroger une loi c’est lui enlever sa force obligatoire. Soit on la supprime
purement et simplement, soit on la remplace par une loi ou une disposition
nouvelle. Il y a deux modes d’abrogation unanimement reconnus, à savoir
l’abrogation expresse et l’abrogation tacite. Mais il existe à côté de ces deux
modes un 3éme mode controversé dans l’état actuel de notre droit positif à
savoir l’abrogation par désuétude.

a. L’abrogation expresse

L’abrogation est expresse quand elle est formulée par une disposition de
la nouvelle loi qui déclare la loi ancienne abrogée en tout ou en partie.

L’abrogation d’une règle de loi émanant d’une autorité ne peut résulter que
d’un acte de la même autorité c’est-à-dire de l’autorité de la même
hiérarchie ou de l’autorité de la hiérarchie supérieure.

Ainsi, dans le droit positif burundais, une loi ne peut pas être abrogée que par
une autre loi ou par une disposition constitutionnelle. Un décret ne peut être
abrogé que par un autre décret ou par une loi ou même par une disposition
constitutionnelle.

Un arrêté ne peut être abrogé que par un autre arrêté ou par un décret ou par une
loi ou par une disposition constitutionnelle.

Une ordonnance ne peut être abrogée que par une autre ordonnance, un décret,
un arrêté ou une loi.

b. L’abrogation tacite

L’abrogation tacite est celle qui ne résulte pas d’un texte exprès, mais de
l’incompatibilité qui existe entre une loi ancienne et une loi nouvelle. Pareille
abrogation suppose donc forcément une contradiction au niveau des textes. Cette
contradiction est directe si la deuxième loi nie ce qu’affirme la première. Elle
est par contre indirecte lorsque la loi nouvelle annonce une ou des dispositions
différentes de l’ancienne mais demeurant tout de même en rapport avec elle.

En principe, c’est la loi exprimant la plus récente volonté du législateur


qui doit l’emporter.
26

c. L’abrogation par désuétude

Une loi est dite abrogée par désuétude lorsque sans avoir été abrogée
officiellement elle n’est plus appliquée depuis longtemps alors que les
conditions d’application étaient pourtant réunies. Une question qui se pose alors
est de savoir si la loi peut être abrogée par un usage contraire ou cesser d’être
obligatoire par suite d’un non usage prolongé.

La réponse est controversée, mais l’opinion dominante de la doctrine


admet que la désuétude ou l’établissement d’un usage contraire n’entraîne pas
en droit l’abrogation de la loi. L’autorité étatique a seul le droit de révoquer les
ordres qu’elle a donnés. C’est lui qui a le pouvoir de promulguer la loi et qui est
habilité à l’abroger.

Section II. La coutume

La coutume est un usage implanté dans une collectivité sociale et


considéré par elle comme juridiquement obligatoire. En d’autres termes, c’est le
droit créé à partir des usages, des pratiques répétées ou des mœurs.

Si le droit apparaît partout où il existe une communauté sociale, il apparaît


aussi et avant tout avant même d’être formulé par le législateur. Dans les
sociétés primitives, où le législateur n’intervient qu’exceptionnellement, le droit
s’établit et se consolide par l’habitude que prennent les hommes de se soumettre
à l’observation d’une même règle toutes les fois que se renouvelle le même fait.

La coutume ne se révèle pas comme une loi ou par un acte unique, mais
plutôt par une répétition d’actes semblables et par la conception qui règne au
sujet de leur force obligatoire.

Section III. La jurisprudence

Dans le langage courant, la jurisprudence désigne l’ensemble des


décisions rendues par les cours et tribunaux. Ce même terme peut cependant être
pris dans un sens plus ou moins large. C’est ainsi que ce mot peut être utilisé
27

pour désigner tantôt l’ensemble des décisions rendues par les cours et tribunaux
d’un pays (jurisprudence burundaise ou togolaise), tantôt aussi il peut désigner
l’ensemble des décisions rendues par les cours et tribunaux sur une matière bien
déterminée (la jurisprudence sur le droit de propriété, sur le divorce, etc ), tantôt
aussi il peut désigner l’ensemble des décisions rendues par les cours et tribunaux
d’un certain degré ( exemple la jurisprudence de la Cour Suprême, de la Cour
d’Appel, etc).

La jurisprudence est d’une extrême importance dans la vie du droit et on accorde


aux décisions judiciaires une attention particulière qui s’explique aisément dans
la mesure où la loi ou toute autre source du droit ne suffit pas toujours pour
trouver une solution appropriée à un litige.

Section IV. L’équité/la conscience du juge

Lorsque ni la loi, ni la coutume, ni la jurisprudence ne permettent de résoudre


des questions conflictuelles adressées à un juge, celui-ci aura recours.

L’équité permettra au juge de statuer en âme et conscience et de dégager des


solutions conformes à ce qui lui paraît juste et bon. On dit que le juge
statue « exaequo et bono ».

Le juge n’est soumis à aucune règle bien précise mais dispose d’un pouvoir
souverain d’appréciation. Il ne devrait pas, bien entendu, dénaturer l’équité et
verser dans l’arbitraire.

Section VI. La doctrine

La doctrine est constituée par l’ensemble des travaux des juristes tels que
les professeurs de droit, les magistrats, les avocats et tous les autres praticiens du
droit. Les opinions de ces différentes catégories de personnes sont exposées dans
les enseignements, les articles, les ouvrages, etc. Ces ouvrages ou ces études ont,
de tout temps, joué un grand rôle pour la connaissance et le développement du
droit.
28

Deuxième Partie : LE DROIT SUBJECTIF

CHAPITRE I. LA DIVERSITE DES DROITS SUBJECTIFS

Section I. Définition

Le droit subjectif peut être défini comme étant l’ensemble des


prérogatives, des libertés, des possibilités que le droit objectif reconnaît à un
individu ou à un groupe d’individus et dont ceux-ci peuvent se prévaloir dans
leurs rapports les uns avec les autres en invoquant si c’est nécessaire la
protection et l’aide des pouvoirs publics ou d’une manière générale de la société.

Le droit est ici envisagé sous l’angle de son bénéficiaire qui est le sujet de
droit, d’où l’expression «droit subjectif».

Ex : Le droit à la vie, le droit de culte, etc.

♦ Quels sont les rapports entre le droit objectif et le droit subjectif ?

Le sens objectif et subjectif ne sont pas opposés. Au contraire, ils


constituent les deux aspects d’une même réalité. Le droit objectif intervient pour
reconnaître et protéger le droit subjectif en ce sens qu’il n’y a jamais de droits
subjectifs que dans la mesure où une règle de droit objectif les a reconnus et
définis.

Section II. Classification des droits subjectifs

Les droits subjectifs sont extrêmement nombreux, mais il y a lieu de les


regrouper en 2 grandes catégories: Les droits patrimoniaux et les droits
extrapatrimoniaux.

Les droits patrimoniaux sont ceux qui ont une valeur pécuniaire. C'est-à-
dire qu’on peut les évaluer en argent. Ils font partie du patrimoine. Celui-ci est
composé d’un actif et d’un passif. L’actif est constitué par des droits et des
biens, tandis que le passif comporte les obligations, les charges et les dettes.

De leur côté, les droits extrapatrimoniaux sont des droits qui ne sont pas
susceptibles d’être évalués en argent, et de ce fait, ils sont hors commerce.
29

§1. Les droits patrimoniaux

Les droits patrimoniaux sont ceux qui comme le qualificatif l’indique font partie
du patrimoine d’une personne. Ils ont pour caractéristique d’avoir une valeur
pécuniaire c’est à dire d’être évaluable en argent et d’être susceptibles des
transactions juridiques.

Etant appréciables en argent, les droits patrimoniaux appelés également des


biens sont dans le commerce juridique. On veut dire par là qu’ils s’insèrent dans
un système d’échange généralisé, qu’ils peuvent passer d’une main à une autre,
qu’ils peuvent changer de titulaire. Ils sont donc cessibles.

On peut donc les céder à un autre titulaire en les échangeant contre un autre bien
ou contre une somme d’argent. Mais à coté de cette cession à titre onéreux, ces
droits peuvent être également cédés à titre gratuit.

Les droits patrimoniaux sont également transmissibles càd qu’ils peuvent être
transmis aux héritiers.

Ils sont également saisissables, cela signifie que les créanciers du titulaire de ces
biens peuvent les faire saisir si leur titulaire n’exécute pas spontanément les
obligations qu’il aurait contractées envers ses créanciers. La saisie sera suivie de
la vente des biens saisis et le prix obtenu sera réparti entre ces créanciers.

Les droits patrimoniaux sont enfin prescriptibles càd qu’ils donnent effet lorsque
les conditions sont remplies à la prescription acquisitive ou à la prescription
extinctive. Le propre de la prescription est de consolider les situations qui se
prolongent dans le temps et subvenir à la situation éventuelle de la disparition
des preuves. Tantôt la prescription rend inattaquable la situation du possesseur
en lui permettant de puiser dans sa possession prolongée une preuve irrécusable
du droit qu’il possède. C’est la prescription acquisitive. Tantôt la prescription
met le débiteur à l’abri de la poursuite de son créancier qui aura longtemps
négligé d’exiger son payement. C’est la prescription extinctive ou libératoire.

La prescription possède de cette idée que dans l’intérêt de la paix sociale, de la


sécurité des transactions, il s’impose souvent de stabiliser des situations de fait
qui se sont prolongées dans le temps même s’ils étaient contraires au droit.

Les droits patrimoniaux peuvent être classés en 3 catégories : Les droits réels,
les droits de créance et les droits intellectuels.
30

A. Les droits réels

C’est l’ensemble des droits subjectifs qui s’exercent directement sur la


chose et qui permettent à leur titulaire de tirer directement de la chose tout ou
partie des utilités qu’elle comporte. En d’autres termes, ce sont des droits qui
créent un rapport direct entre les choses et les personnes. Le mot réel vient du
mot latin « res » qui signifie chose.

De la définition du droit réel, il découle que le droit réel suppose deux


éléments:

- une personne qui est bénéficiaire


- une chose qui en est l’objet

Les droits réels sont limitativement énumérés par la loi. Ils se subdivisent en 2
groupes: les droits réels principaux et les droits réels accessoires.

1. Les droits réels principaux

Le plus important des droits réels principaux est le droit de propriété qui
confère à son titulaire une maîtrise totale de la chose qui en est l’objet. C’est le
droit réel le plus complet.

Il comprend :

♦ L’«usus» ou le droit d’user ou de ne pas user de la chose, le droit de se servir


ou de ne pas se servir de la chose.

♦ Le «fructus» ou droit de percevoir tout ce que la chose produit tel que les fruits
des arbres, les loyers des immeubles dont on est propriétaire, etc.

♦ L’«abusus» ou le droit de disposer de la chose en l’aliénant ou en la


consommant et même le droit de la détruire matériellement.

A côté du droit de propriété, notre droit positif reconnaît d’autres droits réels
principaux qui sont moins étendus que le droit de propriété. C'est-à-dire des
droits qui confèrent des pouvoirs moins importants que le droit de propriété. On
les appelle à ce titre des droits réels principaux démembrés de la propriété. Ces
derniers consistent en des prérogatives limitées sur les choses dont une autre
personne est propriétaire. Ce sont des droits réels démembrés portant sur la
chose d’autrui.

EX : L’usufruit.
31

2.Les droits réels accessoires

Ce sont des droits réels qui n’ont pas d’existence autonome ou propre. Ils
ne se conçoivent que comme accessoires d’un droit de créance dont ils
renforcent l’efficacité pour éviter l’insolvabilité du débiteur qui doit
normalement s’acquitter de sa dette.

Appelés aussi droits réels de garantie, les droits réels accessoires


consistent à accorder au créancier sur un ou plusieurs biens appartenant en
général au débiteur un droit réel qui, sans impliquer l’utilisation de ces biens par
le créancier, lui assurera le paiement de sa créance, puisque s’il n’est pas payé à
l’échéance, il pourra faire vendre ces biens sur lesquels portent les droits réels
accessoires et se faire payer sur le prix par priorité à tout autre créancier.

Ex : Un créancier qui a prêté à son voisin une forte somme d’argent. Pour éviter
l’insolvabilité du voisin, le créancier exige à son voisin de constituer une
hypothèque ; c'est-à-dire un réel accessoire sur un immeuble de son voisin.

B. Les droits de créance, droits personnels ou encore droits d’obligation

Nous venons de voir que le droit réel porte directement sur une chose qui
en est l’objet. Les droits personnels par contre, appelés aussi droits de créance
ou droits d’obligations s’exercent sur une personne.

Ainsi, le droit personnel est un rapport juridique entre 2 ou plusieurs


personnes dont l’une, le créancier ou sujet actif, a le droit d’exiger de l’autre le
débiteur ou sujet passif, une prestation ou une abstention. Ces obligations
varient à l’infini, mais on peut les classer en trois catégories:

- Les obligations de donner


- Les obligations de faire
- Les obligations de ne pas faire

1. Les obligations de donner

Ce sont celles par lesquelles le débiteur s’engage à payer au créancier la


propriété d’une chose. Par exemple, dans le contrat de vente le vendeur s’oblige
à donner la marchandise à l’acheteur moyennant paiement d’un prix. C’est une
obligation de donner.

2. Les obligations de faire


32

Ce sont celles par lesquelles le débiteur s’engage à faire quelque chose ou


s’engage à accomplir un acte déterminé au profit du créancier.

Ex : Dans un contrat de travail, l’employé s’oblige à effectuer le travail qui lui
sera donné par son employeur.

3. Les obligations de ne pas faire ou d’abstention

Ce sont celles par lesquelles une personne prend l’engagement de s’abstenir de


tel acte déterminé dans ses rapports avec une autre personne.

Ex : Une personne vend sa firme et s’engage vis-à-vis de l’acheteur à ne pas


ouvrir dans la même localité un établissement semblable à celui qu’il a cédé.

C. Les droits intellectuels ou droits de la propriété incorporelle

Les droits intellectuels sont d’origine relativement récente. Ce sont des


droits subjectifs à caractère patrimonial qui ne sont ni des droits réels, ni des
droits de créance.

Dans cette catégorie, rentrent les droits sur les créations intellectuelles
d’ordre littéraire ou artistique, les droits sur les inventions, les dessins et les
modèles industrielles brevetés, les noms commerciaux, les insignes, les marques
de fabrique, etc.

Ces droits couvrent la maîtrise de l’homme sur l’œuvre qu’a produite son
intelligence et son imagination.

§2. Les droits extrapatrimoniaux

Ce sont des droits subjectifs qui n’entrent pas directement dans le


patrimoine. Ils ne sont pas des biens et Ils n’ont pas de valeur pécuniaire. Ils
sont attachés à la personne de leur titulaire qui ne peut en faire d’autres usages
que les exercer lui-même. Ils sont donc incessibles, insaisissables,
intransmissibles et imprescriptibles.

Les droits extrapatrimoniaux sont classés en 3 catégories:

- Les droits de la personnalité


- Les droits familiaux
- Les droits politiques.
33

A. Les droits de la personnalité

Les principaux droits de la personnalité sont :

1. Le droit à la vie et à l’intégrité physique


Ce sont des droits qui tendent à la protection de l’individualité physique
de la vie et du corps. D’après le droit positif burundais, la personne humaine est
sacrée et l’Etat a l’obligation de la respecter et de la protéger. C’est ainsi que le
code pénal burundais sanctionne les atteintes intentionnelles et non
intentionnelles à la vie, à la santé et à l’intégrité du corps de l’homme.

2. Le droit à l’intégrité morale


Cette prérogative vise à faire respecter l’honneur, les sentiments
d’affection, la vie privée de chaque individu. Elle comporte ainsi plusieurs
aspects: le droit à l’inviolabilité du domicile, la liberté de pensée, la liberté de
religion, la liberté d’expression, le droit de se réunir et de former des
associations, etc.

3. Le droit au nom
Toute personne est désignée par un nom destiné à l’individualiser. Le droit
au nom est une prérogative qui permet à toute personne d’agir en justice contre
le tiers qui refuserait de lui donner son véritable nom d’une part et d’autre part
contre ceux qui se serviraient indûment de son nom.

B. Les droits familiaux

Ces droits concernent toutes les prérogatives extrapatrimoniales d’une


personne dans les rapports avec les membres de sa famille. Ce sont des droits
qui tiennent d’une manière générale à la parenté: les droits des époux, les droits
attachés à la filiation, c’est-à-dire au lien juridique qui unit les pères et les mères
à leurs enfants et par extension à leurs descendants ou à leurs adoptés.

C. Les droits politiques

Ces droits englobent les prérogatives reconnues à l’individu en tant que citoyen
et qui le fait participer au gouvernement de son pays. C’est notamment le cas du
34

droit à l’électorat, du droit à l’éligibilité, de l’accès à la fonction publique, le


droit d’accès au service militaire, etc.

CHAPITRE II. LES SOURCES DES DROITS SUBJECTIFS

S’intéresser aux sources des droits subjectifs, c’est se demander quels


événements, quelles circonstances sont de nature à déclencher l’application de la
règle de droit objectif, et à donner naissance à un droit subjectif au profit de telle
ou telle autre personne déterminée.

Dans l’extrême variété des événements qui peuvent servir comme condition
d’application des règles du droit objectif et qui peuvent ainsi déterminer la
naissance du droit subjectif, il est devenu classique de retenir deux sortes de
circonstances : les actes juridiques d’une part et les faits juridiques d’autre part.
La distinction faite entre ces deux notions repose sur la prise en considération du
rôle ou de l’absence du rôle de la volonté du sujet de droit dans la détermination
des effets juridiques de l’événement considéré.

Section 1ère. Les actes juridiques

§1. Définition et principales classifications des actes juridiques

A. Définition

L’acte juridique est un événement volontaire accompli par le sujet de droit,


pour produire ; conformément à la règle du droit objectif, des effets de droit dont
la nature et la mesure sont précisément déterminés par le sujet de droit.

B. Classification des principaux actes juridiques

1° Les actes bilatéraux et les actes unilatéraux

a. Les actes unilatéraux

Un acte juridique est dit unilatéral lorsque l’effet juridique auquel il tend
résulte de la volonté d’une seule personne.
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EX : Un testament. Il s’agit d’un acte par lequel le testateur désigne


unilatéralement c’est-à-dire de sa seule volonté, celui ou ceux qui, après sa mort,
seront ses légataires.

N.B. Il ne faut pas confondre l’acte unilatéral et le contrat unilatéral.

b. Les actes bilatéraux

Un acte est dit bilatéral lorsqu’il est le résultat d’un accord de volonté
intervenu entre deux personnes ou même deux groupes de personnes.

Cet accord de volonté porte dans le langage du droit le nom de consentement


tandis que les actes bilatéraux sont désignés habituellement sous les termes de
contrat ou de convention.

Le contrat est l’acte juridique par excellence. Il est la principale source de droits
subjectifs.

2. Les actes juridiques constitutifs, les actes déclaratifs et les actes


translatifs

Cette classification repose sur le caractère innovateur de l’acte considéré.

● Les actes constitutifs sont ceux qui créent un droit nouveau.

Ex : Le mariage crée pour les conjoints un état ou un statut nouveau de gens
mariés avec pour eux des droits et des obligations nouveaux.

◘ Les actes translatifs se bornent à transmettre à un nouveau titulaire, un droit


déjà existant.

EX : La vente transfère à une nouvelle personne la propriété d’une chose qui
appartenait au vendeur.

● Les actes déclaratifs sont des actes qui n’engendrent aucune situation
juridique nouvelle, que ce soit en faisant naître un droit, en l’éteignant ou en le
transférant.

Ils ont pour seul objet d’apporter la constatation officielle d’une situation
juridique préexistante mais qui était jusque-là incertaine ou inefficace.

EX : La reconnaissance volontaire d’un enfant naturel


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C’est un acte du père ou de la mère de l’enfant naturel qui a pour effet de créer
des droits et des obligations entre le parent qui reconnaît l’enfant et ce dernier.

3. Les actes conservatoires, actes de disposition et actes d’administration

L’idée directrice est ici l’incidence de l’acte sur le patrimoine de l’intéressé.

- Les actes conservatoires sont ceux qui sont nécessaires à la sauvegarde du


patrimoine ou un de ses éléments, ou de façon plus générale à la sauvegarde
d’un droit. Ils se caractérisent par le peu d’importance de la dépense qu’on doit
faire pour les assurer relativement au bien et au droit à sauvegarder.

EX : Les actes d’entretien d’un immeuble.

- Les actes d’administration sont ceux qui sont nécessaires pour la gestion
courante d’un bien. On entend par là, les actes qui ont pour but de faire fructifier
les biens. (ex. : la vente des fruits ou des récoltes, l’encaissement des loyers ou
des intérêts des sommes dues, etc.)

- Les actes de disposition sont ceux qui atteignent ou qui risquent d’atteindre la
valeur d’un bien considéré comme capital et qui ont une portée définitive ou de
longue durée. Ils modifient de façon définitive ou de longue durée la situation de
la personne qui les passe. Tel est le cas par exemple de l’aliénation ou de la
passation d’un contrat de bail de très longue durée portant sur un bien.

4.Les actes à titre gratuit et les actes à titre onéreux

♦ L’acte à titre gratuit est par définition une libéralité c’est-à-dire une
générosité. Il n’engendre pour celui qui l’effectue aucune contrepartie. Il est
inspiré par un esprit de bienfaisance qu’on appelle « animus donandi »,
l’intention de donner.

Ex : la donation (le don)

♦ L’acte à titre onéreux par contre est celui dans lequel chacune des parties ne
s’oblige envers l’autre qu’en vue de recevoir ce celui-ci une prestation
considérée comme équivalente à ce qu’il s’engage elle-même à fournir. Il est
généralement inspiré de l’idée d’échange.Ainsi, en est-il du prêt à intérêt de la
banque.

5.Les actes entre vifs et les actes à cause de mort (mortis causa)
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♦ Les actes entre vifs sont ceux dont les effets se produisent du vivant des
parties.

♦ Les actes à cause de mort sont ceux dont les effets se produisent au décès de
l’une des parties contractantes.

Le droit admet plus facilement les actes entre vifs. Ce n’est que dans des cas
particuliers que le droit admet que la volonté puisse produire des effets
juridiques après la mort.

Ainsi, le droit civil reconnaît la valeur du testament (acte unilatéral à cause de


mort) mais interdit en principe les contrats à cause de mort c’est-à-dire ce que la
loi appelle les pactes sur des successions futures.

EX : Le fils ne peut pas vendre la succession à venir.

§2.Les effets des actes juridiques

A. L’effet obligatoire de l’acte juridique

1. Situation des parties à l’acte

Comme le souligne l’art.33 du CCLIII au sujet des contrats, l’acte


juridique régulièrement formé crée entre les parties qui y ont participé un lien ou
un effet obligatoire et irrévocable.

L’effet de l’acte juridique oblige les parties aussi fortement que peut le
faire une loi. La formule employée est en effet sans équivoque: « Les
conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites….».

2. Situation des personnes qui participent à l’acte par représentation

Il se peut qu’une partie prenante à l’acte juridique n’ait pas pris


directement part à sa négociation et à sa formation, mais qu’elle ait été
représentée soit par effet de la loi, soit par l’effet d’un mandat. Dans ce cas,
l’acte juridique est passé par le représentant, mais tout se passe en principe
comme si c’était le représenté lui-même qui l’avait souscrit.

En conséquence, le représenté est considéré comme la seule véritable


partie à l’acte, bien qu’il n’y ait pas directement et personnellement participé.
38

En termes très simples, la représentation est un remplacement d’une


personne par une autre pour l’accomplissement d’un acte juridique.

B. Effet relatif des actes juridiques

Les tiers sont des personnes totalement étrangères à l’accomplissement de


l’acte juridique, c’est-à-dire celles qui n’y ont pas participé, ni par elles-mêmes,
ni par voie de représentation.

L’acte juridique ne peut à leur endroit faire naitre des droits, ni créer des
obligations. C’est ce qui est exprimé par l’article 63 du CCLIII qui dispose au
sujet des contrats que ceux-ci ne peuvent en principe ni nuire aux tiers ni leur
profiter.

Mais la question qui se pose est celle de savoir si l’on peut déduire de là que
tout se passe à l’égard des tiers comme si l’acte juridique auquel ils sont
étrangers n’était pas intervenu. En effet, les tiers ne sont pas fondés à
méconnaitre l’acte juridique passé par les parties. Cet acte crée une situation
juridique qui s’impose à tous, au respect de tous. On dit que l’acte juridique est
opposable aux tiers.

L’opposabilité des actes juridiques signifie que les tiers ne sont pas admis à
se comporter en méconnaissance des actes intervenus.

Ainsi par exemple, si un mariage est conclu, seuls les époux qui l’ont voulu
sont mariés. Mais ils le sont à l’égard de tous. Les tiers auront donc à tenir
compte de leur statut d’époux des gens mariés lorsqu’ils entreront en rapport
avec eux.

De même, un employeur se rendrait coupable de débauchage s’il tentait


d’attirer dans son entreprise un travailleur déjà lié par un contrat de travail dans
un autre établissement.

Section 2.Les faits juridiques

§1 Notion

On entend par fait juridique un événement volontaire ou involontaire qui produit


des effets de droit dont la nature et la mesure échappent complètement à la
volonté du sujet de droit qui subit ces effets. En d’autres termes, c’est un
événement dont la loi fixe directement les conséquences juridiques
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indépendamment de la volonté humaine. Les faits juridiques sont constitués par


des situations de fait qui entrainent par leur existence même une création, une
modification, une transmission ou une extinction d’un droit subjectif. Ces
situations ou événements peuvent être aussi bien volontaires que non
volontaires. Seulement, même lorsqu’ils sont volontaires, ces événements
demeurent des faits juridiques et ne s’identifient pas aux actes juridiques. En
effet, dans l’acte juridique, les effets produits ont été recherchés et dans leur
nature et dans leur mesure tandis que dans les faits juridiques même volontaires,
les effets n’ont pas été voulus.

Ainsi, quand une personne cause un dommage à une autre par des coups et
blessures volontaires, elle a voulu le dommage mais non les conséquences
juridiques que la loi y attache. Sa volonté n’intervient pas dans la détermination
des effets rattachables à ce fait volontaire.

La naissance de l’obligation de réparation est une conséquence que la loi


identifie et réglemente indépendamment de la volonté de l’agent ou de l’auteur.

De toute manière, dans les faits juridiques, la loi reconnait à l’événement des
effets juridiques sans se préoccuper du point de savoir si les intéressés ont voulu
ces effets.

§2 Diversité des faits juridiques

Les faits juridiques sont très nombreux et variés car les événements qui
influencent sur les relations humaines sont eux-mêmes nombreux et variés. Très
diverses aussi sont les formes que prennent ces relations au sein de la société.
Cette diversité empêche la construction d’une théorie générale applicable à tous
les faits juridiques. Chacun des faits que le droit retient pour lui rattacher l’effet
créateur, modificatif, translatif ou extinctif des droits subjectifs reçoit une
règlementation particulière.

On peut donc tout au plus se borner à donner un aperçu des principaux faits
juridiques en les rangeant dans deux catégories.

A. Les faits juridiques involontaires

Comme tous les faits juridiques, les conséquences qui en résultent échappent
complètement à la volonté de l’auteur ou du sujet de droit. Leur particularité est
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que la survenance échappe également à la volonté de l’auteur : la déficience, la


mort, la naissance, l’âge, la majorité,….

B. Les faits juridiques volontaires

La volonté de l’agent et de l’auteur est certes là. Les événements qui arrivent
sont voulus par lui. Mais comme tout fait juridique, les conséquences qui y sont
rattachées ne sont pas voulues par l’agent : responsabilité civile.

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