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DEFINITION : L’abcès hépatique (AH) peut être défini comme une cavité suppurée en
rapport avec l’invasion et la multiplication de micro-organismes au dépend du tissu
hépatique sain ou pathologique
EPIDEMIOLOGIE :
-Mode de contamination : Les germes peuvent contaminer le parenchyme hépatique par voie
biliaire, hématogène (le plus souvent portale), ou par contiguïté notamment près du lit
vésiculaire.
-Les étiologies : Les AH peuvent être de cause bactérienne, parasitaire (amibienne essentiellement),
mixte (parasitaire surinfectée à pyogènes) ou plus rarement fungique.
La fréquence des causes varie selon les zones géographiques. En Asie du Sud est et en Afrique,
l’origine amibienne est la plus fréquente. Dans les pays occidentaux, 80 % des AH sont d’origine
bactérienne. Ils peuvent survenir au cours d’infections intra abdominales biliaires (et contaminent
alors le parenchyme par voie biliaire) ou non biliaires par voie portale (appendicite, sigmoïdite). Les
AH peuvent compliquer une chirurgie (duodéno-pancréatectomie ou transplantation hépatique) ou
un geste interventionnel hépatobiliaire (radiofréquence et/ou chimio-embolisation intra-artérielle).
Plus rarement, les AH surviennent après un traumatisme hépatique ou une embolisation artérielle
pour traumatisme. Certains AH sont secondaires à des infections extra-abdominales qui
contaminent, le plus souvent par voie hématogène, le parenchyme hépatique sain ou des lésions
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hépatiques pré-existantes (kystes biliaires, kystes hydatique, métastases nécrotiques).
Les signes clinico-biologiques révélant les AH ne sont pas spécifiques et peuvent associer des
douleurs abdominales, une fièvre et un syndrome inflammatoire. Le bilan biologique hépatique peut
être plus ou moins perturbé selon l’étendue de l’abcès, sa cause (existence d’une pathologie biliaire
sous-jacente, avec une choléstase avec ou sans hyperbilirubinémie, augmentation des transaminases
en cas d’ischémie du parenchyme hépatique) et l’importance du sepsis. Le diagnostic repose
essentiellement sur les examens d’imagerie.
IMAGERIE :
L’échographie et le scanner permettent de faire le diagnostic dans plus de 90 % des cas, ainsi que
d’orienter vers l’étiologie. Le scanner multidétecteur avec injection intraveineuse triphasique a une
sensibilité supérieure à celle de l’échographie. L’aspect des AH et leur évolution dans le temps sont
variables, mais on peut schématiquement distinguer 2 phases : une phase pré-suppurative et une
phase suppurative. À la phase pré-suppurative, il existe des lésions hétérogènes, hypodenses de
contours irréguliers, mal limitées pouvant simuler des lésions tumorales, surtout si elles sont
multiples et de petite taille. À la phase suppurative, les lésions sont de contenu hypo- ou
anéchogène, parfois multi-cloisonnées, avec un contour arrondi à parois nettes et une coque plus ou
moins épaisse. C’est à cette phase qu’on peut visualiser des images « en cocarde »à l’échographie.
Après injection, la prise de contraste est périphérique, sous la forme d’un liseré hyperdense que l’on
peut appeler « le signe de l’anneau », alors que le centre de la lésion ne se rehausse pas. Parfois, ce
liseré est cerné lui-même d’un anneau hypodense, réalisant une « image en cible ». Au temps
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artériel, on observe souvent un rehaussement du parenchyme hépatique autour de l’abcès qui peut
être très transitoire et parfois segmentaire. Le seul signe quasi pathognomonique d’un AH est la
présence de clartés gazeuses internes, cependant, des bulles d’air peuvent être observées sans
constitution d’AH plusieurs jours après certains gestes d’embolisation de l’artère
hépatique .L’imagerie doit rechercher une pathologie biliaire (localisée ou diffuse), une collection,
des signes d’infections intra-abdominales avec ou sans thrombose septique portomésentérique
(pyléphlébite). En cas de pathologie biliaire et/ou des veines hépatiques, l’IRM est utile pour
compléter le bilan : recherche d’anomalies de l’arbre biliaire et/ou d’un obstacle favorisant la
survenue d’AH biliaire. La coloscopie doit être associée aux examens d’imagerie pour dépister une
cause digestive notamment en cas d’AH non biliaires mais à germes digestifs.
Le traitement des AH de moins de 3—5 cm, surtout s’ils sont multiples, peut se faire par une
antibiothérapie sans drainage.
Compte tenu des germes potentiellement responsables, l’antibiothérapie empirique inclut un
antibiotique actif sur les bactéries aérobies Gram négatif et les streptocoques, soit la pipéracilline, le
tazobactam, l’association amoxicilline—acide clavulanique, une céphalosporine de 3e génération
(céfotaxime, céftriaxone), avec un aminoside (gentamicine). Un agent efficace contre les anaérobies,
tel que le métronidazole peut être associé si l’antibiotique choisi n’est pas actif sur les anaérobies(ou
en cas de doute avec un abcès amibien).L’antibiothérapie est secondairement adaptée au germe
isolé et à l’antibiogramme. La durée de l’antibiothérapie n’est pas clairement établie, mais elle est
généralement de plus de 2 semaines (3 à 6 semaines).
La ponction et le drainage
La ponction écho-guidée ou sous scanner associée à la mise en place d’un drain aspiratif est
actuellement le traitement de première intention des AH. La ponction a un rôle diagnostique, elle
permet d’identifier le(s) germe(s) en cause et le caractère communiquant ou non de l’AH avec les VB.
Elle peut permettre également la mise en place d’un drain permettant l’évacuation et d’assurer le
drainage de la collection.
Le drainage chirurgical est rarement indiqué dans les pays où la radiologie interventionnelle est
développée. Cependant, pour certains, il garde une place en cas d’échec des traitements percutanés,
pour les AH de plus de 5 cm et/ou AH multiloculés ou si un geste chirurgical est programmé pour
traiter la cause la cause de l’AH.
Néanmoins, avec des radiologues expérimentés, des situations complexes peuvent être gérées par «
re-drainage »et/ou par amélioration du drainage existant (drains plus larges, système de rinçage-
lavages . . .), voire par des gestes d’affaissement des cloisons par manœuvres sous contrôle
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scopique. Si une chirurgie est envisagée, elle consiste pour les AH superficiels en une mise à plat-
drainage, et pour les AH profonds, soit en un drainage sous échographique peropératoire, soit en
une exérèse limitée.
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Il s’agit d’une infection du parenchyme hépatique par contiguïté due à la perforation d’une vésicule
infectée, réalisant un AH du segment 4 bas et/ou 5. La survenue de l’AH par contiguïté peut faire
évoquer à tort une pathologie néoplasique de la vésicule biliaire. En pratique, la perforation intra-
hépatique d’une cholécystite est un événement rare avec un taux estimé à moins de 1 % des
complications vésiculaires.
Sur le plan thérapeutique, la conférence de consensus de Tokyo en 2013 a préconisé de traiter les
patients présentant une cholécystite aiguë de grade II (cholécystite aiguë modérée) associée à des
complications locales sévères, telles que l’AH, par une cholécystectomie en urgence (laparoscopie
ou voie ouverte) associée à une antibiothérapie systémique. Pour les patients présentant une
cholécystite de grade III (cholécystite aiguë compliquée de défaillance viscérale), le traitement fait
appel au drainage percutané de la vésicule et/ou de l’abcès, associé au traitement médical
(antibiothérapie et prise en charge des défaillances), puis une cholécystectomie secondaire.
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pathologique intra-abdominal dans moins de 1 % des cas, ils sont le plus souvent cryptogéniques. Les
AH à K. pneumoniae sont de plus en plus fréquemment décrit en Europe.
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La gravité de l’AH après une DPC est liée à son association avec une sténose artérielle entraînant une
ischémie des voies biliaires, le taux de mortalité peut alors atteindre 80 % [37]. Il est primordial de
vérifier la perméabilité de l’artère hépatique devant tout AH après DPC. La nonperméabilité de
l’artère hépatique après une DPC peut être en rapport avec une sténose du tronc cœliaque
(hémodynamiquement significative chez 5 % de la population générale) non dépistée en
préopératoire, un traumatisme peropératoire de l’artère hépatique ou d’une de ses branches (Fig. 5),
ou des conséquences d’une embolisation postopératoire de l’artère hépatique ou de l’artère
gastroduodénale notamment pour traiter une complication hémorragique ou un pseudo-anévrisme
post-DPC. Dans de rares cas, une sténose non ou peu significative du tronc cœliaque (ligament arqué
ou athérome) peut devenir symptomatique à l’occasion d’un bas débit post-DPC et causer une
ischémie secondaire des VB ce qui, compte tenu de la contamination de la bile par l’anastomose
bilio-digestive, peut favoriser la survenue d’AH.
1-Gestion d’un AH dans les suites d’une DPC avec une artère hépatique non perméable
Les abcès sont en général multiples et polymicrobiens. Une preuve bactériologique est
recommandée, soit par ponction directe de l’abcès soit par culture de la bile prélevée pendant la
DPC. Le traitement antibiotique peut durer plusieurs semaines ou mois et être associé à des
drainages percutanés multiples et itératifs. Un geste chirurgical (hépatectomie partielle si lésion
latéralisée) peut être discuté dans les centres experts. Si un ligament arqué est mis en évidence en
postopératoire, il est souvent trop tard pour aller le sectionner chirurgicalement, la sténose
(ligament arqué ou surtout athéromateuse) peut nécessiter un geste de dilatation avec mise en place
de stent. En cas de sténose partielle, on espère que la revascularisation du foie puisse se développer
spontanément par collatéralité à partir de l’anastomose bilio-digestive ou à partir des attaches
anastomotiques d’insertion du foie droit et gauche vers les artères diaphragmatiques. En cas de
sténose de l’artère hépatique après une embolisation, un geste de revascularisation peut être discuté
mais est difficile, voire utopique du fait du contexte (aspect très inflammatoire en rapport
avec une fistule pancréatique souvent associée).
2-Gestion d’un AH dans les suites d’une DPC avec une artère hépatique perméable
L’abcès est classiquement unique. Diagnostiqué, le plus souvent à quelques semaines de
l’intervention. Il est théoriquement la conséquence d’une ou de plusieurs poussées d’angiocholites.
Les angiocholites post-DPC dont la fréquence, probablement sous-estimée, est décrite
aux alentours de 5 % [38] sont le plus souvent paucisymptomatiques. Pour expliquer ces abcès, il faut
éliminer une sténose de l’anastomose bilio-digestive, sinon envisager un reflux au travers de
l’anastomose bilio-digestive.
En général, le pronostic est favorable sous antibiothérapie adaptée. En cas de sténose
anastomotique, il faut envisager une calibration par voie percutanée radiologique (avec ou sans stent
définitif) ou une réintervention, et en cas de reflux, il faut rechercher un obstacle sous-jacent
(sténose de l’anastomose du pied de l’anse ou au-delà, carcinose péritonéale).
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Le diagnostic d’AH après RF ou CE est essentiellement porté sur des arguments cliniques et
biologiques. L’imagerie post-thérapeutique précoce peut montrer de l’air au sein de la lésion traitée,
en dehors de toute complication infectieuse, en lien avec la nécrose des lésions tumorales
(aseptique). Néanmoins, l’augmentation de la quantité d’air ou son apparition à distance du CE ou RF
doit faire évoquer le diagnostic d’AH post-RF ou CE.
Les AH surviennent dans les suites de moins de 5 % des CE, mais sont à l’origine de la plupart des
décès à 30 jours. À noter que cette complication pourrait être plus fréquente pour les métastases de
tumeurs neuro-endocrines que pour les carcinomes hépatocellulaires, peut être en raison d’une plus
grande sensibilité du parenchyme hépatique sous-jacent qui est « sain ». Pour la plupart des équipes,
la présence d’une anastomose bilio-digestive est considérée comme une contre-indication à la CE.
La fréquence (< 1 % des cas) et la gravité des AH après RF semble moindre qu’après CE [42,43]. L’AH
après RF est également plus fréquent et plus grave chez les malades ayant une anastomose bilio-
digestive, une prothèse biliaire, ou une sphinctérotomie endoscopique avec une bile en permanence
contaminée par des germes digestifs. Le traitement peut nécessiter un geste de drainage surtout en
cas d’échec d’une antibiothérapie.
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prophylactique en cas de traumatisme hépatique n’est pas clarifiée, et les résultats de la littérature
sont discordants [47,48]. L’AH survient en moyenne dans les 15 jours post-traumatisme (extrêmes 1
—90 jours)[47]. Mais pour les AH à anaérobies, notamment à Clostridium, le temps d’incubation peut
être extrêmement court jusqu’à moins de 24—48 heures [47]. Cette évolution rapide,
et pouvant être fatale, est probablement liée à l’ischémie parenchymateuse initiale, et aux lésions
digestives associées, favorisant le développement rapide des anaérobies [47,49]. Dans le cadre d’AH
post-traumatique, le sousgroupe de malades pouvant éventuellement bénéficier d’un geste
d’exérèse limitée n’est pas bien défini.
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hépatique droite ou gauche) ou l’occlusion (accidentelle) d’un canal biliaire lors de la préparation du
greffon augmente le risque de développement d’AH qui est alors localisé .
Le traitement initial des abcès est le même que chez les patients non transplantés, associant une
antibiothérapie large à la ponction, voire un drainage en cas d’AH unique. Le traitement des AH
multiples sur ischémie biliaire reconduit souvent à une re-TH . De fac ¸on exceptionnelle, et en cas
d’échec du traitement conservateur, un geste d’exérèse peut être indiqué. Le choix dépend
de la localisation, de l’extension des abcès, et de la gravité de la maladie hépatique sous-jacente. On
doit donc systématiquement rechercher l’existence de complications biliaires à type de cholangite
ischémique en cas d’apparition d’AH post-transplantation. Le traitement chirurgical des AH post-TH a
une morbidité importante, comprise entre 20—62 % en cas de résection hépatique, et 63—79 %
pour la re-TH. La mortalité est variable entre 0—29 % et 30—67 %, respectivement pour la résection
ou la re-TH.
L’échographie est l’examen du diagnostic présomptif de l’AHA. Elle visualise un ou plusieurs abcès
siégeant huit fois sur dix au niveau du lobe droit, de volume et d’aspect variables en fonction du
stade de maturation. La ponction écho-guidée montre un pus stérile « chocolat », et doit être
largement indiquée en particulier pour différencier l’AHA des AH bactériens. La TDM est plus sensible
à la phase précoce, mais ne paraît pas supérieure à l’échographie pour les phases tardives.
Le métronidazole est le traitement de référence. Il est utilisé à la posologie de 1,5 à 2 g/jour par voie
orale ou intraveineuse pendant 10 jours. Le tinidazole ou l’ornidazole, à la posologie de 1,5 g/jour
pendant 5 jours représentent une alternative. Le traitement est complété par une cure d’amoebicide
de contact : tiliquinol—tilbroquinol (4 gélules/jour pendant 10 jours).
La ponction évacuatrice écho-guidée de l’AHA (si l’abcès est accessible), associée ou non à un
drainage percutané peut être envisagée s’il s’agit d’un abcès volumineux (> 10 cm diamètre), sous-
capsulaire en pré-rupture, en cas de surinfection ou en cas de résistance au traitement médical.
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CONCLUSIONS
L’AH est une situation grave engageant le pronostic vital dont le diagnostic repose essentiellement
sur l’imagerie (scanner). La fréquence des étiologies est variable d’une zone géographique à l’autre.
Pour les AH bactériens de moins de 3—5 cm, un traitement antibiotique seul peut être suffisant, la
ponction permettant de mettre en évidence le(s) germe(s) et éventuellement d’évacuer le contenu
(biliaire ou non?). Pour les AH bactériens plus volumineux l’antibiothérapie est associée à un
drainage radiologique plus rarement chirurgical est nécessaire.
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