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Economie monétaire et financière II, S4

Moustapha HAMZAOUI

Partie 2

1. Introduction
L’économie d’un pays, son système financier et les politiques monétaires évoluent en
interaction continuelle. Avec le développement des entreprises, le secteur financier développe
ses produits pour suivre le besoin des entreprises. Quand les entreprises ont besoin de
financement pour l’élargissement de leur activités, les banques leurs proposent plusieurs
formes de financement. Le crédit est le premier produit qu’on avance pour répondre à ce
besoin. Ce crédit peut prendre la forme de ligne à découvert pour les opérations de roulement
comme il peut prendre la forme d’un crédit à long terme. Pour les grandes entreprises, celles-
ci peuvent avoir directement l’accès aux marchés de capitaux pour effectuer des émissions
obligataires et recevoir des liquidités. Trouver une contrepartie pour l’achat d’une obligation
nécessite une offre alléchante en termes de taux d’intérêt nominal proposé. En effet, ces
grandes entreprises, présentant un risque élevé et qui ont besoin de financement, doivent
proposer un taux d’intérêt élevé aux bailleurs de fonds. Dans ce cas la prime du risque 1 est
élevée. On voit bien que de manière générale, la variable clef pour les opérations de
financement est le taux d’intérêt. Le modèle explicatif de la demande de monnaie dans
l’économie doit absolument intégrer cette variable qui est à la fois microéconomique et
macroéconomique. En décembre 2019, la dette globale du monde était de 260 trillions de
dollars contre un PIB mondiale de 85 trillions : l’économie mondiale est une économie
d’endettement.

1
La prime de risque est l’écart entre la rentabilité d’un investissement et le taux d’intérêt rapporté à sa volatilité,
soit (µ-r)/σ. Ce rapport est souvent utilisé pour comparer entre différents investissements.

1
D’après ce qui précède, et contrairement à ce qui a été avancé par Fisher, la demande de
monnaie ne dépend point uniquement du produit global. Son hypothèse principale, vitesse de
circulation constante, n’est pas valable non plus.
En réalité la vitesse de circulation de la monnaie n'est pas constante. Par exemple pour la zone
euro même avant la fusion monétaire, le tableau suivant donne une vitesse de circulation
variable :

année V (Euro M3)


1980 1.73
1982 1.60
1983 1.65
1993 1.40
1995 1.46
2000 1.38
2001 1.42
2006 1.16

D'après le tableau qui donne la vitesse de circulation de la monnaie entre 1980 et 2006. Ce
tableau a été déterminé à partir du revenu nominal (PIB) et de l'offre de la monnaie (agrégat
M3 le plus représentatif pour la banque centrale européenne).
Entre 2000 et 2006 la vitesse de circulation a varié de 18%. On enregistre une baisse
tangentielle depuis 1980 et donc V n'est pas constante. Ceci nous conduit à une autre théorie
de la demande de monnaie : théorie Keynésienne de la préférence pour la liquidité2. Déjà en
1936, Keynes, rejette le modèle de Fisher et propose un autre modèle développé dans la
section suivante.

2. Théorie Keynésienne de la préférence pour la liquidité.

2
Un actif est liquide lorsqu’il peut être transformé en moyen de paiement sans perte de valeur. Le lecteur doit
pouvoir distinguer entre illiquidité et insolvabilité. L’insolvabilité d’un établissement de crédit consiste en une
insuffisance de ses fonds propres. Une crise d’insolvabilité peut dégénérer en une crise lorsque le ratio de
solvabilité n’est plus respecté. Les fire sales (ventes d’urgence) génèrent souvent des pertes à causes des ventes
d’actifs à prix bas, par manque de liquidité. Le risque de contrepartie cause aussi la même chose comme c’est le
cas de la crise des subprimes où il y a eu une mauvaise évaluation des actifs acquis et du risque de signature.

2
Afin de déterminer la quantité optimale de monnaie qui doit circuler dans une économie,
Keynes part de l’idée des raisons qui poussent un agent économique à demander et stocker de
la monnaie.
Ayant remarqué que la vitesse de circulation de la monnaie n'est pas constante, John Keynes
dans son œuvre (théorie de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie, 1936) rejette le modèle
classique. L'idée de départ de Keynes était basée sur la raison pour laquelle un agent
économique préfère détenir de la monnaie. Keynes donne trois raisons pour la détention de la
monnaie : la transaction, la précaution et la spéculation.

2.1 La raison transactionnelle

Pour les classiques, la fonction de la monnaie étant en premier lieu un moyen utilisé pour
faciliter et effectuer des transactions entres les agents économiques. Il s'ensuit que plus le
volume des transactions est grand, plus il y aura une demande pour la monnaie. Et cela se fait
dans les mêmes proportions. A partir de cette hypothèse, et puisque qu'en moyenne le volume
des transactions est proportionnel au revenu, Keynes établit que la demande de monnaie,
détenue pour des raisons de transactions, est aussi proportionnelle au revenu. Il est à
remarquer que la transaction à ce niveau est déterministe et répond à un besoin connu dans le
temps et dans l'espace : vouloir détenir de la monnaie transactionnelle suppose que l’agent
économique connait d’avance les transactions qu’il va réaliser, en date et en montant. Keynes,
comme pour le cas de Fisher, admet que la demande de monnaie dépond des transactions
volontaires. Mais les transactions ne sont pas les seuls motifs pour détenir de la monnaie.

2.2 Le motif de précaution

La chute de Lehman Brothers a eu des effets en cascade qui ont considérablement secoué les
secteurs bancaires. Aux Etats-Unis, ce sont près de 400 banques qui ont fait faillite entre 2009
et 2011. Cci n’est pas propre uniquement à ce pays et c’est un phénomène ancien. En France,
entre 1931 et 1933, il y a eu aussi plus de 230 faillites de banques à cause des paniques
bancaires : course aux guichets (bank run and Bankruptcy ) dans laquelle un grand nombre de
clients craignent qu'elles deviennent insolvables et en retirent leurs dépôts le plus vite possible

3
par précaution. 3 Certes, ces évènements arrivent rarement mais, la précaution est une réserve
que se font les agents économiques très régulièrement.
Si la monnaie est détenue pour effectuer des transactions, l'instant où les transactions seront
réalisées n'est pas toujours connu avec précision. En effet, un agent économique ne
consomme pas tout son revenu dans le présent mais distribue son revenu à consommer sur
plusieurs périodes afin de maximiser son utilité. De plus, le futur n'est pas connu avec
certitude, l'agent économiques peut se voir changer ou adapter sa consommation suivant des
événements inattendus (crise, médicaments, promotions etc.).
Selon Keynes le montant détenu, pour des raisons de précaution, est d'habitude anticipé pour
les transactions imprévus et est proportionnel au revenu : les encaisses monétaires de
précautions sont proportionnelles au revenu. La transaction dans ce cas est une transaction
souvent forcée puisque l'agent économique se trouve confronté à des situations où "il doit les
réaliser".

2.3 La raison spéculative

Les deux motifs de détention de la monnaie qu'on a vu précédemment, c'est-à-dire de


transaction ou de précaution conduisent à une un proportionnalité entre la demande de
monnaie et le revenu global. Mais selon Keynes, il existe une troisième raison de détention
de la monnaie. En effet, la monnaie est une réserve de valeur (de richesse ou de pouvoir
d’achat) et la valeur comme celle d'un bien peut fluctuer au cours du temps selon l'amplitude
de la demande. Remarquons que selon l'analyse de Keynes, le rendement est le seul motif qui
permet à un agent économique de détenir de la monnaie plutôt qu'un titre4, qui est aussi une
réserve de valeur mais moins liquide. En effet, si le rendement anticipé de la détention de la
monnaie est supérieur au rendement du titre alors, l'agent préférera détenir de la monnaie.
Inversement, si le rendement anticipé du titre est supérieur à celui de la monnaie, il préfèrera
alors détenir l’obligation. Il est à noter aussi que le rendement de la monnaie est par rapport
au compte à vue qui ne doit être, en principe, rémunéré (rendement nul). Alors que celui d'un
titre est formé de l'intérêt nominal corrigé par le gain en capital.

3 Ce phénomène continue à se répéter puisque les bilans des banques se trouvent fragilisés car leurs actions
deviennent très volatiles aussi bien que les actions des entreprises. Au Lebanon, certaines banques font pour leur
dépositaires en 2020) des limites de retrait pour des raisons de liquidité. La banque centrale doit par son autorité
via la politique monétaire veiller à un contrôle sévère sur les banques dans ce genre de situation.
4
Pour Keynes, ce titre est en fait une obligation : L’agent économique alors se pose la question de détention de
l’obligation ou de la monnaie sous forme liquide sans percevoir un intérêt, en principe.

4
Il s'ensuit que le taux d'intérêt joue à ce propos un rôle très important pour réguler la quantité
de monnaie détenue comme réserve de valeur surtout dans un système où on octroie beaucoup
de crédits à la consommation, au logement etc.

Définition
Une obligation est un titre de créance émise par l’Etat ou une société pour emprunter des
fonds sur les marchés des capitaux.

Exemple :
Bons du trésor, certificat de dépôt, Euro bonds etc.

Caractéristiques d’une obligation

a. Emetteur :
C’est celui qui émet l’obligation, il peut être une société ou l’Etat. Les deux présentent un
risque. C’est pour cela que les prix des obligations, qui sont généralement cotés en bourse,
dépendent de l’émetteur. Le risque provient de la capacité de remboursement des montants
empruntés. Des agences de notations existent pour mesurer ce risques pour les pays et les
sociétés (Standard & Poor's, Moody's etc.).

b. Principal :
C’est le montant de l’emprunt qui est nominal figurant dans l’obligation.

c. Taux d’intérêt :
C’est le taux exprimé en pourcentage que le prêteur charge à l’emprunteur. Il est nominal et
peut être fixe ou variable. Les intérêts sont payés annuellement mais dans certains pays, ils
sont payés semestriellement comme c’est le cas des états unis Le coupon attaché à une
obligation est en fait l'intérêt que verse cette obligation à son détenteur.

d. Maturité :
La maturité désigne, généralement, le temps qui sépare la date à laquelle une obligation est
émise et la date d’échéance à laquelle la valeur nominale ou le principal de cette obligation est
remboursée intégralement, soit c’est la durée de l’emprunt.

5
e. Libellé de l'obligation
C’est la devise avec laquelle l’obligation est émise sur un marché des capitaux par un
emprunteur non-résident et généralement "libellé’’ dans la monnaie de ce marché.

f. Prix
Le prix d’une obligation est généralement sa valeur affiché en cotation. Cette valeur dépend
des coupons et de l’évolution du marché des taux d’intérêts. Le prix est en général affiché sur
une échelle de 100. C’est-à-dire un pourcentage sur le principal.

Intéressons-nous au prix d'une obligation de principal 100 et de maturité 1 an et dont le taux


nominal est r (sans coupons et sans frais de transactions).

Le prix de cette obligation aujourd'hui est

D'après cette formule une hausse anticipée de taux d'intérêt va voir cette obligation se
dévaluer : une hausse des taux d'intérêt entraine une diminution du prix des titres et donc une
perte en capital qui peut aboutir à un rendement anticipé négatif en cas de forte hausse de taux
d'intérêt. Ce rendement négatif va inciter les individus à détenir leur richesse en monnaie : on
observera une forte demande de monnaie en cas de hausse anticipée des taux.
Dans le cas contraire, une baisse anticipée des taux d'internet conduit à hausse des prix des
titres et des gains en capital; la demande de monnaie sera faible dans ce cas.
Remarquons que ces gains ou pertes sont instantanés et n’ont rien à voir avec les intérêts
perçus en fin de périodes. La rentabilité réelle de l’obligation dépend donc du taux nominal
mais aussi de l’évolution du taux d’intérêt sur le marché et que les détenteurs des obligations
peuvent ne pas attendre jusqu’à l’échéance pour dénouer leurs positions (c’est-à-dire vendre
leurs obligations sur le marché avant la maturité et réaliser un gain. Ce gain est lié au niveau
du taux d’intérêt réel sur le marché et non pas le taux d’intérêt nominal inscrit sur
l’obligation).

6
Un détenteur d’une obligation aura la préférence de vendre l’obligation5 en cas de baisse de
taux d’intérêt, son obligation va se transformer en monnaie et donc la demande de monnaie
augmente6 : la demande de monnaie évolue à l’encontre du taux d’intérêt.

En conclusion on peut dire que


La demande de monnaie est une fonction décroissante des taux d'intérêts.

On voit bien que le taux d'intérêt détermine si les agents économiques préféreront détenir de
la monnaie ou migrer vers une position en portefeuille d'obligations (et même d'actions
comme on va voir dans le modèle suivant). Leur choix est justifié par le pouvoir d'achat de la
monnaie qui se traduit par des préférences pour la liquidité.
L'équation de demande suggéré par Keynes regroupant les trois raisons de détention de la
monnaie porte le nom de fonction de préférence pour la liquidité et relie la demande
d'encaisses réelles Md/P au revenu Y et au taux d'intérêt r

5
Pendant la crise corona covid 19, plusieurs banques ont vendus leurs obligations à la banque centrale pour
répondre à la demande de liquidité des clients : le taux directeur avait baissé.
6
Les Etats rachètent parfois leurs obligations. Comme résultat, une injection de liquidité va se faire dans
l’économie pour réguler la valeur de la monnaie mais aussi pour inciter les agents à investir puisque la
rémunération via le taux d’intérêt diminue.

7
La demande d'encaisses réelles est une fonction décroissante de taux d'intérêt
(le signe – dans l’équation (2), exprime que la demande d’encaisse est fonction décroissante
du taux r et que ceci est liée à la spéculation7 aux niveaux des titres obligataires) et croissante
en revenu réel (signe + ). Ceci est différent de l'approche des classiques puisqu'on a aussi le
taux d'intérêt qui agit sur la demande la monnaie. Cette équation confirme les critiques du
modèle classique où la vitesse de circulation de la monnaie est constante.
En effet, on a

D'après cette formule, si r croit f diminue et donc V augmente : ce qui se traduit par le fait que
les agents détiennent moins d'encaisses réelles en cas de hausse des taux. Ceci induit une
augmentation de la vitesse de rotation de la monnaie.

La théorie keynésienne permet, non seulement, de justifier la sensibilité de la vitesse de


circulation au taux d'intérêt mais aussi de capturer les phénomènes cycliques des taux
d'intérêts (augmentent en expansion et diminuent en récession). La relation (3) va traduire
aussi le même phénomène pour la vitesse de circulation, confirmée empiriquement. En
conclusion, la théorie keynésienne de la préférence pour la liquidité rejette la conclusion de la
théorie quantitative classique de la monnaie selon laquelle la quantité de monnaie détermine
le revenu nominal.

3. Reformulation de l’encaisse Transactionnelle de W.J.


BAUMOL8

7
En général, la spéculation est une opération d’achat et de vente afin de tirer profit des fluctuations des prix sous
forme de plus-values sans vraiment satisfaire un besoin lié à l’activité économique réelle. Elle se base sur des
anticipations (prévisions). Elle peut être sur le marché monétaire (r, TC…), financier (actions, indices…) ou sur
le marché des matières premières (pétrole, or …). Pour réaliser des spéculations on fait appel souvent au marché
des produits dérivés.

8
William J. Baumol (26 février 1922 - 4 mai 2017) fut un économiste américain et professeur à l'Université de
New York depuis 1971. Ses travaux néo-keynesiens concernent principalement le marché du travail,
l'entrepreneuriat, la monnaie et l'histoire de la pensée économique

8
Comme approfondissement du modèle de Keynes, Baumol fait une analyse de la quantité de
monnaie en considérant le stock de monnaie et applique le modèle de la quantité économique,
utilisé pour la gestion des stocks pour les entreprises.
On rappelle que pour une entreprise, lorsque le stock pour un bien donné est élevé pour une
entreprise, on doit s’attendre à ce qu’une partie de stock reste inutilisé. Ceci va engendrer des
coûts inutile pour l’entreprise puisque une partie du capital est bloqué et non rentable. Ce
capital bloqué aurait pu générer un revenu financier en le plaçant avec un taux d’intérêt.
Inversement, lorsque le stock de l’entreprise est à un niveau bas, certains clients ne seront pas
servis à temps et donc un gain possible est perdue : un coût d’opportunité va être chargé à
l’entreprise, un manque à gagner. Il existe un stock optimal qui va permettre de minimiser le
coût total de l’entreprise (coût financier et coût du stock).
En suivant ce raisonnement, dans le cas d’un stock de monnaie cette fois, un agent
économique va modeler son stock de monnaie en fonction du niveau des taux d’intérêt : si
ceux-ci sont élevés, il va diminuer son stock pour profiter des intérêts, sinon il va préférer de
la liquidité que lui procure un rendement élevé.
De manière plus formelle, Baumol montre que l’encaisse de transaction dépend du taux
d’intérêt.
Considérons un agent qui reçoie des revenus à des dates fixes (fin du mois par exemple). Il les
dépense progressivement. Cet agent va supporter un coût d’opportunité relativement à
l’argent non dépensé qui pouvait lui apporté un intérêt.
Si l’agent possède une encaisse maximale C en début de période et 0 en sa fin, alors son
encaisse moyenne sur la période est de C/2.

Encaisses
C

C/2

0
0 1 2 3 Temps

Le coût d’opportunité est une fonction du niveau moyen détenu par l’agent (C/2) et du taux
d’intérêt r ; soit r*C/2.

9
Inversement, si l’agent détient des titres, il subit un coût de transaction lorsqu’il va
transformer ces titres en liquidité. Ce coût dépend du nombre de transaction, n, et du coût
unitaire par transaction, b (frais de courtage, impôt etc.).
On a donc que le nombre de transactions est


T est le montant des transactions (revenu) et C est le montant des prélèvements
monétaires, régulièrement, effectués.
Le coût total de la détention d’encaisses transactionnelles s’écrit alors,

L’encaisse transactionnelle optimale, doit minimiser le coût total. Elle s’obtient en annulant la
première dérivée dans la relation (4) :

Et donc

Ce résultat montre que l’encaisse de transaction optimale est une fonction décroissante du
taux d’intérêt r. Le modèle de Baumol confirme celui de Keynes repris dans l’équation (2) ou
on a une forme explicite de f() quoique le produit global Y n’y apparait pas.
Remarque :
On remarque que l’encaisse de transaction n’est pas linéaire par rapport au taux d’intérêt et
que globalement :
- La demande de monnaie transactionnelle évolue plus vite que l’évolution de r (si r est
positive)
- La demande de monnaie transactionnelle évolue moins vite que l’évolution du coût
unitaire par transaction.

11
D’après cette remarque, on peut mener une politique monétaire basée sur la fiscalité des
transactions et l’intermédiation ou sur le taux d’intérêt pour réguler la liquidité sur le marché.
On peut donc conclure que le modèle économique de Baumol décrit la demande de monnaie
d'un ménage. Cet agent doit répartir ses actifs entre obligations (épargne peu liquide) et
monnaie (liquide) afin d'effectuer ses transactions. Les variables clés du modèle sont donc le
taux d'intérêt nominal r, le niveau de revenu réel T et un coût fixe b de transfert des richesses
entre les catégories de liquidité et les titres obligataires.

Une politique monétaire moderne est orientée vers un objectif de stabilité des prix et une
croissance durable. Etant que la politique budgétaire a perdu son attrait comme instrument de
régulation car primo, les mesures budgétaires conduisent nécessairement à une régulation
conjoncturelle, secundo, les politiques budgétaires influencent énormément les déficits
budgétaires.
Une stratégie monétaire basée sur les taux d’intérêt, quoique que très couteuse sauf en
situation de crises, voit les banques centrales augmenter leurs niveaux pour des objectifs de
réduction d’inflation ou les diminuer pour prévenir contre une récession économique. Ceci
suppose une bonne maitrise des mécanismes de transmission9 de la politique monétaire pour
qu’elle soit efficace. D’un point de vue empirique, les Keynésiens ont étudié ces mécanismes
selon deux approches : formes structurelle et réduite.

9
On rappelle Les mécanismes de transmissions d’une politique monétaires via les canaux traditionnels de taux
d’intérêts : 1. I↑→r↑, : 2. r↓ → I↑→Y↑, 3. Politique expansionniste : Pa↑ → πa↑→ r↓→ I↑→Y↑ où p est le prix
attendu, π est l’inflation anticipée.
Il existe aussi des canaux basés sur d’autres actifs, comme
1. L’effet du taux de change sur les exportations nettes : r↓→ TC↓ → NX↑→ Y↑ avec TC taux de change
déprécié par rapport à la monnaie étrangère et NX sont les exportations nettes.
2. Effet des actions via le coefficient de J. TOBIN q = (valeur boursière des entreprises/cout du
renouvellement du capital). Pa↑ → q↑→ I↑→Y↑. où Pa est le prix des actions qui augmente et génère
des dépenses en investissement.
3. Effet de richesse : Pa↑ → R↑→ C↑→Y↑. avec Pa prix des actifs, R est la richesse, C est la
consommation.
Et enfin le canal par le crédit :
1. Canal bancaire : dépôts bancaires↑ → prêts bancaires↑→ I↑→Y↑.
2. Canal bilan : M↑ → Pa ↑→ richesse nette↑→ RM↓→ prêts bancaires↑→ I↑→Y↑. avec RM est le risque
moral qui se crée après la réalisation des transactions par le biais duquel un emprunteur prend le risque
de s’engager dans des activités indésirables pour le préteur. L’asymétrie d’information qui en découle
peut conduire au non remboursement de l’emprunt et la banque peut devenir très exigeante à ce propos
pour diminuer ce risque.
3. Variation non anticipée des prix Pna : Pna↑ → AS↓→ prêts bancaires↑→Y↑. AS est le risque d’anti-
sélection qui se crée avant la réalisation des transactions et qui est aussi due à une asymétrie
d’information entre le préteur et l’emprunteur (non transparence et make-up au bilan). Ce risque
provient du fait que les mauvais emprunteurs, qui représentent des crédits risqués, peuvent être
sélectionnés pour avoir le crédit alors qu’ils auront probablement de mauvais résultats.

11
Approche de la forme structurelle :
L’approche de la forme structurelle consiste à une modélisation structurelle qui examine
l’influence d’une variable sur une autre en employant un modèle précis à travers lequel cette
influence est exercée. Dans ce cas, on a une description détaillée du fonctionnement de
l’économie. Cette description est formulée par un système d’équations sectorielles10 qui
expliquent comment une politique monétaire affecte la demande et la production globale.

Schéma de l’Approche par la forme structurelle

M r I Y
Offre en Taux Dépense Production
Monnaie d’intérêt d’investissement globale
Monnaie

Lorsque la causalité entre M et Y est déterminée, l’évaluation des mécanismes de


transmission permet de prévoir les conséquences des modifications institutionnelles liant M et
Y. (innovation financière, lois etc.). Dans ce cas cette approche est préférable.
Pour les monétaristes, ce modèle structurelle peut négliger ou omettre certains mécanismes de
transmissions pourtant importants. En effet, ce modèle reste inconnu. Par exemple, le
mécanisme : augmenter l’offre de monnaie, fait diminuer le prix de location de l’argent r,
incite donc à l’investissement I et donc crée de la richesse :

M ↑ → r↓ → I ↑ → Y ↑

Mais, on peut envisager que si les dépenses de consommation sont plus importantes que les
dépenses en investissement privilégiant ainsi un second canal11. Les monétaristes rejettent
alors ces conclusions car ceci sous-estime l’importance de la monnaie dans l’activité
économique (Oeilleres).

10
Le modèle d’équilibre générale calculable est un bon exemple de modèle très complexe, regroupant une
centaine d’équations sectorielles pour évaluer les politiques économiques.
11
Beaucoup de pays du tiers monde, s’endettent à l’international mais c’est juste pour faire face au déficit
prévenant des frais de fonctionnement sans productivité respectable.

12
Approche par la forme réduite :
Les monétaristes ont parfois tendance à observer directement la relation entre M et Y, appelé
forme réduite, sans passer par les variables intermédiaires. Dans ce cas, ils ne précisent pas les
canaux par lesquels la monnaie agit sur le produit global. Ils examinent, surtout, si il y a effet
d’une corrélation forte entre l’activité économique et l’évolution de M. Le système
économique et les interactions entre ses différentes entités sont tellement compliqués qu’on ne
peut isoler des effets de variables sur d’autres ; il serait non prudent de montrer et d’expliquer
l’influence des variables intermédiaires.

Schéma de l’Approche par la forme réduite

M X Y
Offre en Boite noire Production
Monnaie globale

Ce modèle reste simple et n’impose aucune contrainte sur l’influence de la politique


monétaire sur l’économie. Ceci en observant directement la relation entre M et Y puisque les
canaux sont tellement nombreux qu’on ne peut point les identifier tous.
Mais en utilisant cette approche, on peut suggérer à tort une causalité12. En effet, une
corrélation n’explique pas nécessairement une causalité ou son sens. On parle alors de
causalité inversée dans le cas de la relation entre M et Y. Par exemple, on sait qu’une hausse
de la production peut conduire à une hausse d’offre de la monnaie alors que la banque
centrale envisage de contrôler le taux d’intérêt : le contrôle de M ne facilitera pas le contrôle
de la demande globale, c’est donc Y qui influence M et non l’inverse.

4. Conclusion
Si la première réflexion de pensée économique, de Fisher qui est un monétariste, stipule que
les gouvernements doivent mener une politique monétaire stricte dans le but de limiter la
quantité de monnaie en circulation. Le paradigme Keynésien a dominé l’époque d’après
Fisher. Mais peu après il y a eu un retour vers la théorie quantitative de la monnaie pour
relancer cette théorie et le rénovateur de ce courant monétariste est sans conteste l'économiste

12
Le sens de causalité est parfois difficile à déterminer. Un gouvernement peut augmenter les patrouilles pour
diminuer la criminalité. Mais statistiquement, il y a une corrélation positive entre le nombre de patrouille et la
criminalité. La même remarque dans le cas de pandémie ou le nombre de médecins augmente avec les malades.
Certaines tribus en Asie tuaient les médecins car ils croyaient qu’ils apportaient la maladie.

13
Milton Friedman ('École de Chicago). Ainsi il y a eu une renaissance de ce courant. La
politique monétaire a pris le devant de la scène pour figurer parmi les instruments les plus
importants de la politique économique contemporaine.

14
Questions de cours

1. Définir la liquidité
2. Quelle différence entre illiquidité et insolvabilité ?
3. Exposer le modèle de la théorie de la préférence pour la liquidité
4. Donnez des exemples pour le motif de précaution
5. Définir la spéculation
6. Donnez des exemples pour le motif de spéculation
7. Qu’est-ce qu’un produit dérivé
8. Quelle la différence entre le modèle de Fisher et celui de Keynes ?
9. Quelle est la source d’incertitude dans le modèle de Keynes ?
10. Présentez le modèle de Baumol
11. Présentez la forme réduite et la forme structurelle ? et quelles sont les avantages et les
inconvénients de chaque approche ?
12. Quelles sont les objectifs finaux et intermédiaires d’une politique monétaire ?
13. Quelles sont les canaux de transmission d’une politique monétaire ? D’après quel est
le canal le plus efficace dans le cas du Maroc ?
14. Quelle sont les canaux de transmission efficace dans le cas la monnaie digital (comme
le bitcoin) ?
15. Définir le risque moral et le risque d’antiselection
16. Quelles sont les rubriques de bale III qui limitent le risque d’insolvabilité ?
17. Définir le coefficient de Tobin ? Expliquer comment il peut être utilisé pour créer de la
richesse ? Donnez un exemple et quelles sont les risques d’une telle approche ?
18. Quelles sont les caractéristiques d’une obligation ?
19. Donner deux exemples d’obligations de même maturité et de même principal pour
deux émetteurs différents ? comparer leurs taux et conclure.
20. Quelles sont les critères utilisés par les agences de notations pour mesurer le niveau de
risques pour les sociétés et les Etats. Quelle est le classement du Maroc ?

15
Exercice 1
En utilisant la fonction financière PRIX.TITRE dans Excel ;
1. calculer le prix d’une obligation européenne dont les caractéristiques suivantes :

Données Description

15.02.08 Date de liquidation

15.11.19 Date d’échéance

3,75 % Taux du coupon semestriel

5,50 % Taux de rendement

100 € Valeur de remboursement

1 Coupon semestriel)

0 Base : 30/360

2. Si on estime que le rendement va à la baisse à 6,5%, qu’elle est le nouveau prix et


combien on va gagner en capital ?

Exercice 2
On se place dans les conditions de Baumol avec :
- Un montant de transactions de 100
- Un taux d’intérêt de 8%
- Un coût unitaire de transaction égal à 4
1. Calculer l’encaisse de transaction optimale
2. Si le coût unitaire de transaction augmente de 1 pour un taux d’intérêt constant,
a. Calculer la nouvelle encaisse de transaction
b. Conclure
3. On suppose que le coût unitaire de transaction est constant et que le taux d’intérêt passe de
8 à 9%.

16
a. Quelle est l’influence sur l’encaisse de transaction optimale ?
b. Conclure
c. Ce résultat est-il en accord avec l’approche de Friedman ? (chapitre suivant)
(Esquisse de solution : calculer la différentielle ∆M en fonction de ∆b et ∆r)

Exercice 3
Reprendre le modèle de Baumol mais dans lequel l’agent épargne un taux e% de son revenu.
Cet épargne passif n’est pas utilisé pour un l’achat des titres mais plutôt pour le motif de
précaution. Un manque à gagner en intérêt apparait.
1. Calculer l’encaisse transactionnelle optimale en fonction de r, T, b et e. Conclure de
point de vue monétaire.
2. Que devient cette encaisse si l’épargne augmente de 10% ? conclure

Questions de Discussion
Sujet 1 :
Le taux de crédit pour les jeunes auto-entrepreneurs est un taux préférentiel de 2% en urbain.
1. Quelle est le canal de transmission en question ?
2. Comment peut-on justifier que cette décision est bénéfique pour l’économie ? Faites une
synthèse.
Sujet 2
Avec la crise économique mondiale 2020, plusieurs pays ont opté vers un taux d’intérêt
négatif.
Comment on peut utiliser le modèle de Keynes ou de Baumol pour réguler la demande en
monnaie transactionnelle ?
Sujet 3
Dans des pays où le système financier est islamique le taux d’intérêt n’existe pas (taux
d’usure).
- Si possible, comment ces pays peuvent utiliser le modèle de Baumol ou celui de
Keynes pour réguler la quantité de monnaie qui circule dans l’économie ?
- Dans ces pays, le taux de Zakat est de 2.5%. est -il possible aussi d’utiliser le modèle
de Baumol pour déterminer la demande en monnaie transactionnelle ? si oui
comment ?

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