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Cours de toxicologie.

2020, MED 502

QUELQUES DÉTERMINANTS GÉNÉTIQUES

DE LA RÉPONSE TOXIQUE

On sait depuis longtemps que chaque individu réagit différemment aux produits chimiques
présents dans l’environnement. L’explosion récente de la biologie moléculaire et de la
génétique a favorisé une meilleure compréhension des causes moléculaires d’une telle
variabilité. Les facteurs déterminants de cette réponse individuelle aux produits chimiques
incluent les différences importantes existant au niveau d’une dizaine de superfamilles
d’enzymes, baptisées enzymes métabolisant les xénobiotiques (étrangers à l’organisme) ou
enzymes métabolisant les médicaments. Bien qu’on leur ait longtemps prêté un pouvoir
détoxifiant, on sait maintenant que ces enzymes sont également capables de transformer de
nombreux composés inertes en intermédiaires fortement toxiques.

C’est l’interaction complexe de ces nombreuses superfamilles d’enzymes qui détermine non
seulement le devenir d’un produit chimique chez un individu donné et son potentiel de
toxicité, mais également l’évaluation de l’exposition. La superfamille des enzymes du
cytochrome P450 illustre les remarquables progrès accomplis dans la compréhension de la
réponse individuelle aux produits chimiques. Le développement de tests ADN relativement
simples identifiant les altérations des gènes spécifiques de ces enzymes permet maintenant de
prévoir de façon plus exacte la réponse individuelle à l’exposition à un produit chimique. On
peut espérer que ces tests conduiront au développement de la toxicologie préventive. Chaque
individu pourrait ainsi connaître les produits chimiques auxquels il serait particulièrement
sensible, ce qui lui éviterait de s’exposer à des produits dont on ne soupçonnait pas
auparavant qu’ils aient chez lui des effets toxiques, voire cancérogènes.

L’être humain est exposé tous les jours, bien souvent à son insu, à une multitude de produits
chimiques. Par exemple, plus de 400 agents ont été mis en évidence dans le vin rouge, La
cigarette ne produit au moins de 1 000 espèces chimiques différentes et les produits
cosmétiques et savons parfumés renferment un nombre incalculable de produits chimiques.
Dans l’agriculture, la situation n’est pas différente: pour traiter les terres cultivées on utilise
tous les ans plus de milliers agents chimiques sous forme de pesticides, d’herbicides et
d’engrais; ces produits sont captés par les plantes et les herbivores, ou les poissons dans les
eaux environnantes, avant d’être ingérés par l’être humain qui se trouve à la fin de la chaîne
alimentaire. Cette liste ne serait pas complète sans qu’on y ajoute deux autres sources
importantes de produits chimiques: a) les médicaments consommés de façon prolongée; b) les
substances dangereuses auxquelles les travailleurs sont exposés au cours de la vie active.

Il est maintenant établi que l’exposition aux produits chimiques peut avoir de nombreux effets
nocifs sur la santé humaine et entraîner l’apparition de maladies chroniques et de bien des
cancers. Des travaux effectués ces dix dernières années ont permis de mieux comprendre la
base moléculaire de ces relations. Ils ont aussi permis de prendre conscience des différences
individuelles de sensibilité aux effets nocifs des produits chimiques.

Le présent cours porte sur les facteurs génétiques à l’origine de la sensibilité individuelle à
l’exposition aux produits chimiques. Ce champ de recherche porte le nom général
d’écogénétique ou de pharmacogénétique (Kalow, 1962, 1992).
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Figure 33.2 Corrélations entre l'évaluation de l'exposition, les différences ethniques,


l'âge, le régime, l'alimentation et l'évaluation de la prédisposition génétique — différents
facteurs jouant un rôle dans le risque individuel de toxicité ou de cancer

3.1 La variation de la réponse toxique dans la population humaine

Les toxicologues et les pharmacologues ont coutume de parler de DL50, de DMA50 et de


DE50 pour désigner respectivement, dans le cas d’un médicament donné, la dose létale, la dose
maximale admissible et la dose efficace dans 50% d’une population. On peut se demander ce
que ces doses signifient pour chacun de nous en tant qu’individu. Ce qu’on entend par là,
c’est qu’un individu très sensible peut être 500 fois plus affecté ou avoir 500 fois plus de
chances d’être affecté que le sujet le plus résistant d’une population donnée; dans l’absolu, les
valeurs de DL50 (et de DMT50 ou de DE50) ne veulent pas dire grand-chose, elles n’ont un
sens qu’en référence à une population.

La figure suivante illustre la relation dose-réponse hypothétique observée chez des individus
appartenant à une population donnée exposée à un toxique. Ce diagramme général pourrait
représenter un carcinome bronchique en fonction du nombre de cigarettes fumées, un asthme
en fonction des concentrations de l’air en ozone ou en aldéhyde, la diminution du temps de
coagulation en fonction de la consommation d’aspirine. Généralement, pour chacun de ces
cas, plus l’exposition est importante, plus la réponse toxique est intense. La majorité de la
population présentera une réponse toxique moyenne avec son écart-type en fonction de la
dose. Le sujet «hyperrésistant» (en bas à droite dans la figure ) est celui qui répond le moins
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aux expositions ou aux doses plus élevées, le sujet «hypersensible» (en haut à gauche) étant
celui qui répond de façon excessive à une exposition ou à une dose relativement faibles. Ces
sujets hors norme, réagissant de manière très différente par rapport à la majorité des individus
de la population, représentent des variants génétiques importants qui peuvent aider les
scientifiques à comprendre les mécanismes moléculaires sous-jacents responsables de la
réponse toxique.

Figure 33.3 Relation générale entre réponse toxique et dose pour tout agent chimique
ou physique présent dans l'environnement

3.2. Les enzymes métabolisant les xénobiotiques ou les médicaments

Comment l’organisme répond-il à la multitude de produits chimiques exogènes auxquels il est


exposé? L’être humain et les autres mammifères ont développé des systèmes enzymatiques
très complexes comportant plus d’une dizaine de superfamilles d’enzymes. Tous les produits
chimiques auxquels l’humain est exposé ou presque subissent une modification enzymatique
qui favorise ensuite leur élimination en dehors de l’organisme. Ces enzymes sont souvent
appelées de façon globale enzymes métabolisant les médicaments ou enzymes métabolisant les
xénobiotiques. Ces enzymes sont classés en réactions de phase I ou de phase II.

- Les réactions de phase I («fonctionnalisation») correspondent généralement à des


modifications structurales assez peu importantes du produit chimique parent par des
réactions d’oxydation, de réduction ou d’hydrolyse permettant l’obtention d’un
métabolite plus hydrosoluble.
- Les réactions de phase II ou phase de conjugaison, supposent le couplage d’une
molécule endogène hydrosoluble à un produit chimique (produit chimique initial ou
métabolite de phase I) afin d’en faciliter l’excrétion. Les superfamilles enzymatiques
catalysant les réactions de phase II sont habituellement désignées selon le type de
molécule endogène impliquée dans la réaction de conjugaison: acétylation par les N-
acétyltransférases, sulfoconjugaison par les sulfotransférases, conjugaison du
glutathion par les glutathion-transférases et glucuronidation par les UDP
glucuronosyltransférases
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Les réactions de phase I sont principalement gérées par une superfamille d’enzymes
hautement polyvalentes, appelées cytochromes P450, bien que d’autres superfamilles
d’enzymes puissent également intervenir

Figure 33.4 Présentation classique des enzymes de phase I et de phase II du


métabolisme des médicaments ou des xénobiotiques

Figure 33.5 Exemples d'enzymes métabolisant les médicaments


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Le foie est le principal organe du métabolisme des xénobiotiques, bien qu’on trouve aussi
certaines enzymes participant à leur métabolisme à un taux assez élevé dans le tractus gastro-
intestinal, les gonades, le poumon, le cerveau et les reins, ainsi qu’en plus ou moins grande
quantité dans toute cellule vivante.

Figure 20.1 : Métabolisme des xénobiotiques


MRP : Multidrug Resistance‑ associated Proteins ; P‑gp : P‑glycoprotéine

Le plus souvent, les produits chimiques liposolubles sont transformés en métabolites


hydrosolubles plus faciles à excréter. Cependant, il arrive aussi que ces mêmes enzymes
transforment des produits chimiques inertes en molécules intermédiaires hautement réactives.
Ces intermédiaires peuvent réagir avec des macromolécules cellulaires telles que les protéines
et l’ADN. Ainsi, pour chaque produit chimique auquel l’être humain est exposé, deux voies
compétitives potentielles coexistent, celle de l’activation métabolique et celle de
la détoxification.

Une brève revue de génétique

En génétique humaine, chaque gène (locus) est localisé sur l’une des 23 paires de
chromosomes. Les deux allèles (un présent sur chaque chromosome de la paire) peuvent être
identiques, mais ils peuvent aussi être différents l’un de l’autre. Par exemple, les
allèles B et b, où B (yeux marron) est dominant par rapport à b (yeux bleus): les individus de
phénotype yeux marron peuvent avoir comme génotype soit BB soit Bb, alors que les
individus de phénotype yeux bleus peuvent seulement avoir le génotype bb.

Un polymorphisme correspond à la présence de deux ou de plusieurs phénotypes héréditaires


stables (traits) ayant pour origine le(s) même(s) gène(s) qui se maintiennent dans la
population, souvent pour des raisons peu évidentes. Pour qu’un gène soit polymorphe, il faut
que son produit ne soit pas essentiel au développement, à la reproduction ou à d’autres
processus vitaux critiques
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Les différences génétiques du métabolisme des médicaments et produits chimiques


environnementaux sont connues depuis plus d’une quarantaine d’années Ces différences sont
souvent appelées polymorphismes pharmacogénétiques

3.3. Le cytochrome P450

Histoire et nomenclature

La superfamille des cytochromes P450 est l’une des superfamilles d’enzymes du métabolisme
des médicaments qui a été le plus étudiée, en raison des disparités individuelles importantes
qui caractérisent la réponse aux produits chimiques. Le terme cytochrome P450 est une
désignation générique commode, employée pour définir cette grande superfamille d’enzymes
essentielles au métabolisme d’innombrables substrats endogènes et exogènes. Les gènes du
P450 sont divisés en familles et en sous-familles.

Les gènes du P450 sont caractérisés par un symbole commun, CYP, suivi d’un chiffre arabe
désignant la famille P450, puis d’une lettre spécifiant la sous-famille et d’un autre chiffre
arabe propre au gène individuel ; Ainsi, CYP1A1 représente le gène P450 1 dans la famille 1,
sous-famille A.

La superfamille des gènes P450 des mammifères a été divisée en trois groupes, ceux qui
interviennent surtout dans le métabolisme des xénobiotiques et ceux qui participent à la
synthèse de diverses hormones stéroïdes d’une part, et à d’autres fonctions endogènes
importantes, de l’autre. Ce sont les enzymes du P450 métabolisant les xénobiotiques qui sont
les plus intéressantes sur le plan de la toxicité.

Les enzymes P450 métabolisant les xénobiotiques

Les enzymes P450 intervenant dans le métabolisme des produits exogènes et des
médicaments sont presque toujours présentes dans les familles CYP1, CYP2, CYP3 et CYP4.
Ces enzymes P450 catalysent de nombreuses réactions métaboliques, un seul cytochrome
P450 étant souvent capable de métaboliser plusieurs composés différents. De plus, des
enzymes P450 multiples peuvent métaboliser un composé sur différents sites. Un composé
peut également être métabolisé au niveau d’un site unique par plusieurs P450, mais à des
vitesses variables.

Les enzymes P450 métabolisant les médicaments sont dotés d’une propriété importante:
beaucoup de ces gènes sont inductibles par les substances mêmes qui leur servent de substrat.
Mais d’autres enzymes P450 sont induites par des molécules non substrat. Ce phénomène
d’induction enzymatique est à la base de nombreuses interactions médicamenteuses,
importantes du point de vue thérapeutique.

La sous-famille CYP1A

La sous-famille CYP1A comprend deux enzymes chez l’humain et tous les autres
mammifères. Ces enzymes, appelées CYP1A1 et CYP1A2 dans la nomenclature officielle,
revêtent un intérêt considérable, car elles participent à l’activation métabolique de nombreux
procancérogènes et sont également induites par plusieurs composés posant des problèmes sur
le plan toxicologique.
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CYP2C19

On sait depuis longtemps que les individus ne métabolisent pas tous à la même vitesse le
médicament anticonvulsivant (S)-méphénytoïne. A cause d’une déficience, entre 2 et 5% des
Caucasiens et jusqu’à 25% des Asiatiques présentent un plus grand risque de réaction toxique
à ce médicament.

CYP2D6

La variation sans doute la mieux caractérisée d’un gène P450 est celle du CYP2D6. Plus
d’une dizaine de cas de mutations, de réarrangements et de délétions touchant ce gène ont été
décrits.

On sait maintenant que les altérations du gène CYP2D6 permettent non seulement de
distinguer les individus qui métabolisent lentement ou rapidement la débrisoquine, mais aussi
ceux qui ont un métabolisme ultrarapide.

Le rôle du polymorphisme du CYP2D6 dans la prédisposition individuelle à des maladies


humaines telles que le cancer pulmonaire ou la maladie de Parkinson a fait l’objet d’études
approfondies

Le CYP2E1

Le gène CYP2E1 code pour une enzyme qui métabolise de nombreux produits chimiques, en
particulier des médicaments et de nombreux cancérogènes de faible poids moléculaire. Cette
enzyme, fortement inductible par l’alcool, peut jouer un rôle dans les lésions hépatiques
produites par des produits chimiques tels que le chloroforme, le chlorure de vinyle ou le
tétrachlorure de carbone.

La sous-famille CYP3A

Chez l’humain, quatre enzymes ont été identifiées dans la sous-famille CYP3A en raison de la
similitude de leur séquence en acides aminés. Les enzymes duCYP3A métabolisent de
nombreux médicaments couramment prescrits comme l’érythromycine et la cyclosporine.
L’aflatoxine B1, contaminant cancérogène des produits alimentaires, est également un substrat
du CYP3A.

Les polymorphismes autres que le P450

De nombreux polymorphismes existent également dans d’autres superfamilles d’enzymes


métabolisant les xénobiotiques (glutathion transférases, UDP glucuronosyltransférases, p-
oxonases, déshydrogénases, N-acétyltransférases ou mono-oxygénases à flavine, etc.). Etant
donné que la toxicité finale d’un intermédiaire généré par le cytochrome P450 dépend de
l’efficacité des réactions ultérieures de détoxification lors de la phase II, le rôle combiné des
multiples polymorphismes enzymatiques revêt une importance capitale pour la prédisposition
aux maladies provoquées par des produits chimiques.

Conclusion
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La dernière décennie a été marquée par des progrès remarquables dans la compréhension des
bases génétiques de la réponse individuelle aux produits chimiques présents dans les
médicaments, les aliments et les polluants environnementaux. Les enzymes métabolisant les
médicaments ont une profonde influence sur la manière dont les individus réagissent aux
produits chimiques. Au cours des années à venir, nous allons sans doute parvenir à identifier
une multitude d’autres polymorphismes (phénotypes) impliquant des enzymes du
métabolisme des médicaments. Ces informations seront le fruit de la mise en œuvre de
techniques ADN améliorées, peu invasives, permettant d’identifier les génotypes dans la
population humaine.
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Chapitre 4. LES MÉCANISMES DE LA TOXICITÉ


INTRODUCTION ET CONCEPTS

La toxicologie mécanistique est l’étude du mécanisme par lequel les agents


chimiques ou physiques réagissent avec les organismes vivants pour provoquer une
réaction toxique. La connaissance du mécanisme toxique d’une substance améliore
les possibilités de prévention et permet de concevoir des produits chimiques mieux
tolérés. Elle constitue la base du traitement lors d’une surexposition, permet
souvent d’éviter toute surexposition et garantit une meilleure compréhension des
mécanismes biologiques fondamentaux.

4.1. Le rôle de la pharmacocinétique en toxicologie

La pharmacocinétique étudie l’absorption, la distribution, le métabolisme


(modifications biochimiques dans l’organisme) et l’élimination ou l’excrétion du
produit chimique en fonction du temps. Par rapport aux mécanismes de toxicité, ces
variables pharmacocinétiques peuvent revêtir une très grande importance et, dans
certains cas, être à l’origine de l’effet toxique ou de son absence. Si, par exemple,
un produit est absorbé en quantité insuffisante, sa toxicité systémique (à l’intérieur
de l’organisme) n’apparaîtra pas. Inversement, un produit chimique fortement
réactif qui est détoxifié rapidement (en quelques secondes ou en quelques minutes)
par les enzymes digestives ou hépatiques peut ne pas avoir le temps de manifester
sa toxicité.

Cependant, le fait qu’un produit chimique s’accumule dans une cellule ou un


organe doit inciter à examiner attentivement son potentiel de toxicité dans l’organe
en question. Plus récemment, des modèles mathématiques ont été élaborés pour
extrapoler les variables pharmacocinétiques de l’animal à l’humain.
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Figure 33.7 Modèle pharmacocinétique simplifié

La toxicité peut s’exprimer à différents niveaux biologiques.

- La lésion peut être évaluée à l’échelle de la personne entière (ou de


l’animal), de l’organe, de la cellule ou de la molécule. Par système, il faut
entendre les systèmes ou appareils immunitaire, respiratoire, cardio-
vasculaire, rénal, endocrinien, digestif, musculo-squelettique, sanguin,
reproducteur et nerveux central. Les principaux organes sont le foie, les
reins, les poumons, le cerveau, la peau, les yeux, le cœur, les testicules et les
ovaires.
- Au niveau cellulaire ou biochimique, les effets nocifs peuvent perturber le
métabolisme protéique normal ou les récepteurs endocriniens, inhiber le
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métabolisme énergétique ou encore entraver ou favoriser l’induction


enzymatique des xénobiotiques (substances étrangères).
- Au niveau moléculaire, ils peuvent perturber la transcription ADN-ARN ou
la liaison à des récepteurs spécifiques cytoplasmiques et nucléaires, ou
encore causer des lésions au niveau des gènes ou de leurs produits.

Finalement, le dysfonctionnement d’un organe essentiel a de fortes chances


d’être la conséquence d’une lésion moléculaire dans une cellule cible
particulière de cet organe.

La figure représente de façon schématique les divers niveaux auxquels on peut


détecter une interférence avec des processus physiologiques normaux. Les
flèches montrant les conséquences chez un individu peuvent être interprétées
dans un sens descendant (exposition, pharmacocinétique vers toxicité
systémique ou organique) ou ascendant (lésion moléculaire, effet cellulaire ou
biochimique vers toxicité systémique ou organique).

Figure 33.8 Représentation des mécanismes toxiques


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4.2. Exemples de mécanismes de toxicité

Les mécanismes de toxicité peuvent être simples ou complexes. On observe


souvent une différence entre le type de toxicité, son mécanisme et le niveau de
l’effet, selon que les effets nocifs sont dus à une seule exposition à dose élevée (cas
d’une intoxication accidentelle ou toxicité aiguë), ou à une exposition répétée à
plus faible dose (cas d’une exposition professionnelle ou environnementale ou
toxicité chronique).

4.2.1. Les mécanismes de toxicité aiguë

Les exemples suivants constituent une bonne illustration des effets aigus que l’on
peut observer après une dose élevée pouvant entraîner la mort ou une incapacité
grave. Dans certains cas, les effets peuvent être transitoires et complètement
réversibles après traitement. Ils sont fonction de la dose ou de la sévérité de
l’exposition.

Asphyxiants simples. Le mécanisme de toxicité des gaz inertes et de quelques autres


substances non réactives est dû à un manque d’oxygène (anoxie). Ces produits
chimiques, entraînant une privation en oxygène au niveau du système nerveux
central (SNC), sont appelés asphyxiants simples. Lorsqu’un sujet pénètre dans un
espace clos contenant de l’azote et peu d’oxygène, il va immédiatement manquer
d’oxygène cérébral, ce qui va conduire à son inconscience et à son décès s’il n’est
pas soustrait sur-le-champ à l’exposition.

Asphyxiants chimiques. Le monoxyde de carbone (CO) entre en concurrence avec


l’oxygène pour se lier à l’hémoglobine (dans les hématies circulantes). Il prive les
tissus de l’oxygène nécessaire au métabolisme énergétique, ce qui entraîne une
mort cellulaire. L’intervention thérapeutique consiste à supprimer la source de CO
et à traiter par de l’oxygène. L’utilisation d’oxygène est basée sur le mécanisme
d’action toxique du CO.

Les dépresseurs du système nerveux central (SNC). Un grand nombre de produits,


les solvants par exemple, provoquent, sous leur forme initiale ou après
transformation en intermédiaires réactifs, une toxicité aiguë caractérisée par
l’apparition d’une sédation ou d’un état d’inconscience.

Effets cutanés. Les effets nocifs au niveau de la peau vont, selon la substance en
cause, de l’irritation à la corrosion. Les solutions acides et basiques fortes sont
corrosives pour les tissus vivants et provoquent des brûlures chimiques avec
cicatrices résiduelles.

Bien que la liste ci-dessus soit loin d’être exhaustive, elle doit permettre d’avoir un
aperçu des divers mécanismes possibles de toxicité aiguë.
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4.2.2. Les mécanismes de toxicité subchronique et chronique

Certains produits chimiques ont un mécanisme de toxicité différent selon qu’ils


sont administrés à dose unitaire élevée ou de manière répétée à dose plus faible
quoique toxique. Lorsqu’on donne une forte dose unitaire, le sujet peut ne plus être
en mesure de détoxifier et d’excréter le produit chimique et réagir différemment
que si on lui administrait des doses répétées plus faibles. Le cas de l’alcool illustre
le propos: de fortes doses d’alcool donnent lieu à des effets, principalement au
niveau du système nerveux central, alors que des doses répétées plus faibles
provoquent des lésions hépatiques.

Inhibition des anticholinestérasiques. La plupart des pesticides organophosphorés,


par exemple, ont une faible toxicité chez les mammifères tant qu’ils ne sont pas
activés par voie métabolique, essentiellement au niveau hépatique. Les
organophosphorés agissent principalement en inhibant l’acétylcholinestérase
(AChE) dans le cerveau et le système nerveux périphérique. L’AChE est l’enzyme
normale qui inactive le neurotransmetteur acétylcholine.

Activation métabolique. De nombreux produits chimiques, dont le tétrachlorure de


carbone, le chloroforme, l’acétylaminofluorène, les nitrosamines et le paraquat,
sont activés par voie métabolique en radicaux libres ou intermédiaires réactifs
inhibant ou perturbant le fonctionnement normal de la cellule. La mort cellulaire
survient dans les expositions à fortes concentrations.

Mécanismes du cancer. Le cancer est une pathologie très hétérogène, et, bien que
l’on commence à comprendre certains de ses mécanismes grâce aux techniques de
biologie moléculaire mises au point depuis 1980, il reste encore beaucoup à
apprendre. On sait de façon certaine que le cancer se développe selon un processus
multiétapes et que des gènes critiques sont à l’origine de différents types de cancer.
Des lésions de l’ADN (mutations somatiques) au niveau de ces gènes critiques
peuvent être responsables d’une sensibilité accrue ou de l’apparition de lésions
cancéreuses. Il est clair que la génétique est un facteur important dans le cancer,
ainsi que le démontrent certaines maladies génétiques comme le xeroderma
pigmentosum, où l’absence de mécanisme de réparation de l’ADN accroît
sensiblement le risque de cancer cutané après une exposition aux rayonnements
ultraviolets.

4.3. La lésion et la mort cellulaires

4.3.1. Définitions

La lésion cellulaire

On entend par lésion cellulaire tout phénomène ou stimulus, par exemple un


produit chimique, qui perturbe l’homéostasie de la cellule et permet ainsi la
survenue d’un certain nombre d’événements.
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Figure 33.9 Lésion cellulaire

Les lésions létales entraînent la mort cellulaire après une période qui varie en
fonction de la température, du type cellulaire et du stimulus; elles peuvent
également être sublétales ou chroniques — la lésion n’aboutissant pas dans ce cas
à. Ces processus se poursuivent jusqu’à ce qu’ils atteignent un état d’équilibre
physico-chimique avec l’environnement; cette phase porte le nom de nécrose.
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Durant la phase prélétale, des modifications importantes se produisent qui varient


en fonction du type de cellule et de lésion; il s’agit de l’apoptose et de l’oncose.

L’apoptose

Le terme apoptose est dérivé du grec apo, signifiant «point éloigné», et ptosis,
«chute». Il désigne le phénomène de condensation des cellules et de formation de
protubérances à la périphérie qui survient à la faveur de ce changement prélétal.
Ces protubérances se détachent ensuite et dérivent à l’état libre.

Dans l’apoptose, une augmentation du [Ca2+]i stimule la sortie du K+ et produit une


condensation cellulaire, mécanisme nécessitant probablement de l’ATP. Les lésions
qui inhibent totalement la synthèse de l’ATP entraînent donc très
vraisemblablement une apoptose. Une augmentation prolongée du [Ca 2+]i est à
l’origine de nombreux effets délétères, en particulier l’activation de protéases,
d’endonucléases et de phospholipases :

- L’activation des endonucléases est responsable de coupures d’ADN simple


ou double brin.
- L’activation des protéases modifie un certain nombre de substrats, dont
l’actine et les protéines associées, conduisant à la formation des
protubérances.
- L’augmentation du [Ca2+]i est également associée à l’activation d’un certain
nombre de protéines kinases, telles que la MAP kinase, la calmoduline
kinase, entre autres. Ces kinases participent à l’activation de facteurs de
transcription initiant la transcription de gènes tels que c-fos, c-jun et c-myc
et à l’activation de la phospholipase A2, qui provoque une augmentation de
la perméabilité de la membrane plasmique et des membranes intracellulaires
telles que la membrane mitochondriale interne.

La nécrose

La nécrose correspond à une série de modifications se produisant après la mort


cellulaire lorsque la cellule est transformée en débris éliminés par la réponse
inflammatoire. D’autres membranes sont elles aussi fragmentées: le RE, les
lysosomes et l’appareil de Golgi. Finalement, la chromatine nucléaire subit une
lyse, résultant de l’action des hydrolases lysosomiales. Après la mort cellulaire, les
hydrolases lysosomiales jouent un rôle important dans l’élimination des débris par
l’intermédiaire des cathepsines, nucléolases et lipases qui, en raison de leur pH
acide optimal, peuvent survivre au faible pH des cellules nécrotiques, les autres
enzymes cellulaires étant dénaturées et inactivées.

Les mécanismes

Le stimulus initial
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Lors des atteintes létales, les interactions initiales les plus habituelles conduisant à
la mort cellulaire sont celles qui perturbent d’une part le métabolisme énergétique.
Il est un autre type habituel de lésion initiale évoluant rapidement vers la mort
cellulaire: la modification des fonctions membranaires plasmiques..

Les voies de signalisation

Dans de nombreux types de lésion, la respiration mitochondriale et la


phosphorylation oxydative sont rapidement touchées. Dans certaines cellules, il en
résulte une stimulation de la glycolyse anaérobie permettant de maintenir l’ATP,
mais ce processus est inhibé lors de nombreuses atteintes. Un déficit en ATP prive
de nombreux processus homéostatiques importants de l’énergie nécessaire, en
particulier, le contrôle de l’homéostasie ionique intracellulaire (Trump et
Berezesky, 1992; Trump, Berezesky et Osornio-Vargas, 1981). Ce déficit provoque
une augmentation rapide du [Ca2+]i, du [Na+] et du [Cl-] responsables du
gonflement cellulaire. L’élévation du [Ca2+]i entraîne l’activation d’un certain
nombre d’autres mécanismes de signalisation traités ci-après, dont diverses kinases,
pouvant provoquer une augmentation rapide de la transcription génique de proto-
oncogènes. L’augmentation du [Ca2+]imodifie également le fonctionnement du
cytosquelette, partiellement responsable de la formation de protubérances et de
l’activation d’endonucléases, de protéases et de phospholipases. Celles-ci semblent
déclencher un grand nombre des effets importants mentionnés précédemment:
lésions membranaires par suite de l’activation des protéases et des lipases,
dégradation directe de l’ADN par activation des endonucléases et activation des
kinases telles que la MAP kinase et la calmoduline kinase, agissant comme facteurs
de transcription.
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Chapitre 5 : LA TOXICOLOGIE GÉNÉTIQUE


La toxicologie génétique est l’étude du rôle des agents chimiques ou physiques
dans le processus complexe de l’hérédité. Les produits chimiques génotoxiques
sont les composés capables de modifier le matériel héréditaire des cellules vivantes.
La probabilité pour qu’un produit chimique provoque une lésion génétique dépend
nécessairement de plusieurs variables, en particulier le taux d’exposition de
l’organisme au produit chimique, sa distribution et sa rétention une fois qu’il est
entré dans l’organisme, l’efficacité de l’activation métabolique ou des systèmes de
détoxification au niveau des cibles tissulaires et la réactivité du produit chimique
ou de ses métabolites avec les macromolécules critiques à l’intérieur des cellules.
La probabilité qu’une lésion génétique provoque une maladie dépend de plusieurs
facteurs: nature de la lésion, capacité de la cellule de réparer ou d’amplifier la
lésion génétique, possibilité pour une lésion de s’exprimer et aptitude de
l’organisme à reconnaître et à bloquer la multiplication des cellules aberrantes.

Rappel de la structure de l’ADN. Dans les organismes supérieurs, l’information


héréditaire est organisée au niveau des chromosomes. Ceux-ci sont constitués de
brins fortement condensés d’ADN en association avec des protéines. Dans un
chromosome, chaque molécule d’ADN est constituée d’une paire de longues
chaînes, non ramifiées, de sous-unités nucléotidiques associées par des liens
phosphodiester joignant le carbone 5 d’un désoxyribose au carbone 3 du
désoxyribose suivant (voir figure ). De plus, l’une des quatre bases nucléotidiques
(adénine, cytosine, guanine ou thymine) est attachée à chaque sous-unité
désoxyribose à l’instar des perles d’un collier. Du point de vue tridimensionnel,
chaque paire de brins d’ADN forme une double hélice avec l’ensemble des bases
orientées vers l’intérieur de la spirale. A l’intérieur de l’hélice, chaque base est
associée à sa base complémentaire sur le brin d’ADN opposé; une liaison
hydrogène impose un appariement solide, non covalent, de l’adénine avec la
thymine et de la guanine avec la cytosine (voir figure 33). Etant donné que la
séquence des bases nucléotidiques est complémentaire sur toute la longueur de la
double molécule d’ADN, les deux brins portent fondamentalement la même
information génétique. En fait, lors de la réplication de l’ADN, chaque brin sert de
matrice pour produire un nouveau brin fils.
Cours de toxicologie. 2020, MED 502

Figure Organisation a) primaire; b) secondaire; c) tertiaire de l'information héréditaire


humaine

A l’aide de l’ARN et d’une série de protéines, la cellule transcrit finalement


l’information codée par la séquence linéaire des bases au niveau de régions
spécifiques de l’ADN (gènes) et produit les protéines essentielles à la survie
cellulaire ainsi qu’à la croissance ou à la différenciation normales. On peut donc
dire que les nucléotides font office d’alphabet biologique servant au codage des
acides aminés, unités chimiques de base des protéines.

La mutation : Lorsqu’il se produit une perte de nucléotides ou une insertion de


nucléotides incorrects, ou encore lorsque des nucléotides inutiles sont ajoutés lors
de la synthèse de l’ADN, l’erreur est appelée une mutation.

Bien que les mutations ne soient pas nécessairement dangereuses, les altérations
provoquant l’inactivation ou la surexpression de gènes importants peuvent aboutir à
des troubles divers, dont le cancer, à des maladies héréditaires, des anomalies du
développement, une stérilité ou la mort embryonnaire ou périnatale. Il est rare
qu’une mutation entraîne un prolongement de la vie; ces événements forment la
base de la sélection naturelle.
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Bien que certains produits chimiques réagissent directement avec l’ADN, la plupart
ont besoin pour cela d’une activation métabolique.

Figure Bioactivation du: a) benzo(a)pyrène; b) de la N-nitrosodiméthylamine

La modification de l’ADN est plus inquiétante étant donné le rôle central que joue
cette molécule dans la régulation de la croissance et de la différenciation tout au
long des générations cellulaires successives.

Au niveau moléculaire, les composés électrophiles attaquent les atomes d’oxygène


et d’azote sur l’ADN. La figure montre les sites les plus susceptibles de subir de
telles modifications.

Figure 33.12 Sites primaires des lésions sur l'ADN induites chimiquement
Cours de toxicologie. 2020, MED 502

Les composés comportant une partie électrophile ont un pouvoir génotoxique du


fait de ;

- la formation de mono-adduits sur l’ADN.


- De la même façon, les composés ayant deux ou plusieurs parties réactives
peuvent réagir avec deux centres nucléophiles différents et entraîner ainsi la
formation de ponts intra- ou intermoléculaires dans le matériel génétique
(voir figure).
- Les agents génotoxiques peuvent aussi provoquer des cassures de l’épine
dorsale phosphodiester, ou entre les bases et les sucres (produisant des sites
apuriniques ou apyrimidiques) sur l’ADN..

Figure Types de lésions sur le complexe protéine-ADN

L’ADN endommagé ou que les cellules dont l’ADN est endommagé ne sont pas
capables de survivre. Durant la réparation, la base endommagée, le nucléotide ou la
courte séquence de nucléotides autour du site lésé sont supprimés et, grâce au brin
Cours de toxicologie. 2020, MED 502

opposé qui sert de matrice, une nouvelle séquence d’ADN est synthétisée et mise
en place. Pour être efficace, la réparation de l’ADN doit s’effectuer avant la
division cellulaire et avoir une grande précision, pour éviter toute possibilité de
propager une mutation.

Des études cliniques ont montré que les sujets présentant des déficits héréditaires
des mécanismes de réparation de l’ADN manifestent fréquemment un cancer ou
des anomalies du développement à un âge précoce.

Le tableau recense certains des produits chimiques ayant un pouvoir génotoxique.

Tableau 33.5 Exemples de produits chimiques génotoxiques pour des cellules humaines

Classe du produit Exemple Origine de Lésion génotoxique probable


chimique l’exposition
Aflatoxines Aflatoxine B1 Aliments Adduits de grande taille sur
contaminés l’ADN
Amines aromatiques 2- Environnement Adduits de grande taille sur
Acétylaminofluorène l’ADN
Quinones aziridine Mitomycine C Chimiothérapie Mono-adduits, pontages
anticancéreuse interbrins et cassures simple
brin dans l’ADN
Hydrocarbures Chlorure de vinyle Environnement Mono-adduits de l’ADN
chlorés
Métaux et composés Cisplatine Chimiothérapie Pontages intrabrin et interbrins
métalliques anticancéreuse dans l’ADN
Composés du nickel Environnement Mono-adduits et cassures simple
brin dans l’ADN
Moutardes azotées Cyclophosphamide Chimiothérapie Mono-adduits et pontages
anticancéreuse interbrins dans l’ADN
Nitrosamines N- Aliments Mono-adduits de l’ADN
Nitrosodiméthylamine contaminés
Hydrocarbures Benzo(a)pyrène Environnement Adduits de grande taille sur
aromatiques l’ADN
polycycliques

Classification des substances cancérogènes par le CIRC


Le CIRC est une agence de recherche sur le cancer de l’OMS, basée à Lyon. En anglais, on
l’appelle International Agency for Research on Cancer (IARC). Dans ce cadre, il identifie les
facteurs environnementaux et professionnels susceptibles d’accroitre le risque de cancer chez
l’homme en les classifiant.
Le CIRC examine la cancérogénicité éventuelle de produits chimiques, de mélanges complexes de
substances, d'expositions professionnelles, d’agents physiques et biologiques et de facteurs
comportementaux. On utilise le terme d’agent pour désigner l’ensemble.

Depuis 1971, plus de 1000 agents ont ainsi été évalués parmi lesquels 500 ont été classés comme étant
cancérogènes ou potentiellement cancérogènes pour l’être humain.
Cours de toxicologie. 2020, MED 502

Le CIRC définit 4 groupes (de 1 à 4) correspondant à des degrés d'indication de cancérogénicité pour l’être
humain. Le deuxième est subdivisé en groupe 2A et 2B.Ces groupes sont les suivants :

 Groupe 1 : agent cancérogène (parfois appelé cancérogène avéré ou cancérogène certain),


 Groupe 2A : agent probablement cancérogène,
 Groupe 2B : agent peut-être cancérogène (parfois appelé cancérogène possible),
 Groupe 3 : agent inclassable quant à sa cancérogénicité,
 Groupe 4 : agent probablement pas cancérogène.
Le tableau ci-dessous résume les principes qui guident ce classement des agents par degré d'indication du
risque et précise leur nombre actuel dans chacun des groupes.

Critères de détermination du Nombre


Classe d'agents degré d'indication de risque pour d'agents classés
l'homme et pour l'animal de laboratoire : (au 26 Janvier 2018)
Agent cancérogène Principe général : Indications suffisantes
120 agents
pour l'homme de cancérogénicité pour l'homme.
(groupe 1)
Agent probablement
Principe général : Indications limitées de
cancérogène pour 82 agents
cancérogénicité chez l'homme et suffisantes
l'homme
chez l'animal.
(groupe 2A)
Principe général (2 formes) :
Agent peut-être Forme 1 : Indications limitées de
cancérogène pour cancérogénicité chez l'homme et
311 agents
l'homme insuffisantes chez l'animal.
(groupe 2B) Forme 2 : Indications insuffisantes chez
l'homme et suffisantes chez l'animal.
Agent inclassable quant à
Principe général : Indications insuffisantes
sa cancérogénicité pour 499 agents
chez l'homme et insuffisantes ou limitées
l'homme
chez l'animal
(groupe 3)
Agent n'est probablement Principe général : Indications suggérant
pas cancérogène pour une absence de cancérogénicité chez 1 agent
l'homme l'homme et chez l'animal de laboratoire. (caprolactame)
(groupe 4)

On peut aussi classer les cancérogènes selon leur mécanisme d’action en cancérogènes
primaires et secondaires. Les cancérogènes primaires sont directement génotoxiques, alors
que les cancérogènes secondaires n’agissent pas directement sur le DNA.
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Chapitre 6 : L’IMMUNOTOXICOLOGIE
Le système immunitaire a pour fonction de protéger l’organisme contre les agents
infectieux qui peuvent l’envahir et d’assurer une surveillance immunologique vis-à-
vis des cellules tumorales naissantes. Il constitue une première ligne de défense non
spécifique capable d’amorcer des réactions effectrices et une voie spécifique
acquise dans laquelle les lymphocytes et les anticorps possèdent une spécificité leur
permettant de reconnaître l’antigène puis d’y réagir.

L’immunotoxicologie est la discipline qui étudie les événements conduisant à des


effets nocifs dus à l’interaction des xénobiotiques avec le système immunitaire. Ces
événements indésirables peuvent résulter: 1) d’un effet direct ou indirect du
xénobiotique (ou de son produit de biotransformation) sur le système immunitaire;
2) d’une réponse immunologique de l’hôte au composé ou à son (ses) métabolite(s),
ou aux antigènes de l’hôte modifiés par le composé ou ses métabolites.

Lorsque le système immunitaire agit comme cible passive des agressions


chimiques, il peut offrir une résistance moindre aux infections et à certaines formes
de néoplasie, ou être le siège d’un dérèglement ou d’une stimulation immunitaire
pouvant aggraver une allergie ou une auto-immunité. Lorsqu’il répond à la
spécificité antigénique du xénobiotique ou à l’antigène de l’hôte modifié par le
toxique, la toxicité s’exprime par des allergies ou des maladies auto-immunes.

L’immunotoxicité peut se diviser en immunosuppression et en une expression


excessive de la réponse immunitaire ou allergie

1. Le système immunitaire

Le système immunitaire a pour principale fonction d’assurer la défense contre les


bactéries, virus, parasites, champignons et cellules néoplasiques. Cette défense est
confiée à divers types cellulaires et leurs médiateurs solubles dans une harmonie
finement réglée.

Les composants du système immunitaire sont présents dans l’ensemble de


l’organisme. Le compartiment lymphocytaire se retrouve au niveau des organes
lymphoïdes (voir figure ). La moelle osseuse et le thymus sont classés comme
organes lymphoïdes primaires ou centraux; les organes lymphoïdes secondaires ou
périphériques comprennent les ganglions lymphatiques, la rate et le tissu lymphoïde
situé le long de surfaces sécrétoires telles que les tractus respiratoire et gastro-
intestinal, encore appelé tissu lymphoïde associé aux muqueuses. Environ la moitié
des lymphocytes de l’organisme sont localisés dans le lymphoïde associé aux
muqueuses, quel que soit le moment considéré.
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Figure 33.14 Organes et tissus lymphoïdes primaires et secondaires

Les cellules phagocytaires de la lignée monocyte/macrophage, ou système


phagocytaire mononucléé (SPM), se trouvent dans les organes lymphoïdes ainsi
que dans des sites extraganglionnaires; les phagocytes extraganglionnaires
comprennent les cellules de Kupffer du foie, les macrophages alvéolaires au niveau
pulmonaire et les macrophages mésangiaux respectivement aux niveau pulmonaire
et rénal et les cellules gliales dans le cerveau. Les leucocytes polynucléaires sont
localisés principalement dans le sang et la moelle osseuse, mais s’accumulent aux
sites d’inflammation.

La défense non spécifique


Cours de toxicologie. 2020, MED 502

Une première ligne de défense contre les micro-organismes est assurée par une
barrière physique et chimique: la peau et le tractus respiratoire ou digestif. Cette
barrière est secondée par des mécanismes de protection non spécifiques comprenant
les cellules phagocytaires (macrophages et leucocytes polynucléaires), capables de
tuer les agents pathogènes, et les cellules tueuses naturelles, qui peuvent lyser les
cellules tumorales et les cellules infectées par des virus. Le système du complément
et certains inhibiteurs microbiens (par exemple, le lysozyme) prennent également
part à la réponse immunitaire.

L’immunité spécifique

Après un premier contact entre l’hôte et un agent pathogène, on assiste à une série
de réponses immunitaires spécifiques. Ce qui caractérise cette seconde ligne de
défense c’est qu’elle est capable de distinguer les déterminants antigéniques, ou
épitopes, des agents pathogènes grâce à des récepteurs présents à la surface des
lymphocytes B et T. Après interaction avec les antigènes spécifiques, la cellule
portant ce récepteur est stimulée, ce qui provoque sa prolifération et sa
différenciation et aboutit à un clone de cellules filles propres à l’antigène
responsable. Les réponses immunitaires spécifiques complètent la défense non
spécifique opposée aux agents pathogènes en stimulant l’efficacité des réponses
non spécifiques. L’immunité spécifique a pour caractéristique fondamentale de
créer une mémoire. Une seconde exposition au même antigène provoque une
réponse mieux régulée, plus rapide et plus intense.

Le génome n’est pas à même de contenir les codes de l’ensemble des récepteurs
antigéniques dont il faut disposer pour reconnaître les nombreux antigènes pouvant
être rencontrés. Le répertoire de spécificité se développe selon un processus de
réarrangement génique qui est le pur fruit du hasard. Diverses spécificités
apparaissent, dont certaines sont indésirables lorsqu’elles sont dirigées contre les
composants du soi. Un processus de sélection au niveau du thymus (cellules T) ou
de la moelle osseuse (cellules B) intervient pour éliminer ces spécificités
indésirables.

La fonction effectrice immunitaire et la régulation homéostasique de la réponse


immunitaire dépendent d’une série de produits solubles, les cytokines. Synthétisées
et sécrétées par les lymphocytes et d’autres types cellulaires, les cytokines ont des
effets pléiotropes sur les réponses immunitaires et inflammatoires. La réponse
immunitaire ne peut se faire sans une coopération entre les différentes populations
cellulaires. Cette coopération prend différentes formes: régulation des réponses des
anticorps, afflux des cellules et des molécules immunitaires aux sites
inflammatoires, initiation des réponses en phase aiguë, contrôle de la fonction
cytotoxique des macrophages et nombreux autres processus essentiels à la
résistance de l’hôte. Ces processus sont influencés par les cytokines agissant
individuellement ou en association et, bien souvent, en dépendent.
Cours de toxicologie. 2020, MED 502

L’immunité spécifique comporte deux voies: l’immunité à médiation humorale et


l’immunité à médiation cellulaire.

Immunité à médiation humorale. Dans cette voie humorale, les lymphocytes B sont
stimulés après la reconnaissance de l’antigène par les récepteurs de surface. Les
récepteurs antigéniques sur les lymphocytes B sont des immunoglobulines (Ig). Les
cellules B matures (cellules plasmatiques) commencent à produire des
immunoglobulines spécifiques de l’antigène, qui agissent comme anticorps au
niveau sérique et au niveau des surfaces muqueuses. On distingue cinq catégories
principales d’immunoglobulines: 1) l’IgM, immunoglobuline pentamère, à capacité
optimale d’agglutination, la première à être produite après une stimulation
antigénique; 2) l’IgG, principale immunoglobuline dans la circulation, qui peut
passer dans le placenta; 3) l’IgA, immunoglobuline sécrétoire pour la protection
des surfaces muqueuses; 4) l’IgE, immunoglobuline fixée sur les mastocytes ou les
granulocytes basophiles, impliquée dans les réactions d’hypersensibilité immédiate;
5) l’IgD, dont la fonction essentielle est identique à celle d’un récepteur sur les
lymphocytes B.

Immunité à médiation cellulaire. La voie cellulaire du système immunitaire


spécifique est sous la dépendance des lymphocytes T. Ces cellules possèdent
également des récepteurs antigéniques sur leurs membranes. Elles reconnaissent
l’antigène s’il est présenté par les cellules possédant l’antigène (CPA) dans le
contexte de l’histocompatibilité antigénique. Ces cellules présentent donc cette
limite qui vient s’ajouter à leur spécificité antigénique. Les cellules T, qui agissent
comme cellules auxiliaires dans diverses réponses immunitaires (dont la réponse
humorale), interviennent dans le recrutement des cellules inflammatoires et
peuvent, en tant que cellules T cytotoxiques, tuer les cellules cibles après
reconnaissance spécifique de l’antigène.

2. Les mécanismes de l’immunotoxicité


2.1.L’immunosuppression

La résistance de l’hôte dépend de l’intégrité fonctionnelle du système immunitaire,


ce qui suppose que les composants cellulaires et moléculaires orchestrant la
réponse immunitaire soient présents en quantité suffisante et sous une forme
opérationnelle. Les immunodéficiences congénitales chez l’humain se traduisent
souvent par des anomalies de certaines souches de lignées cellulaires qui ne
produisent pas du tout de cellules immunitaires ou en produisent en nombre
insuffisant. Par analogie avec les maladies immunodéficientes humaines
congénitales et acquises, l’immunosuppression induite par un produit chimique
peut simplement être due au fait que le nombre de cellules fonctionnelles n’est pas
aussi élevé qu’il devrait l’être. Ces deux phénomènes, absence de lymphocytes ou
présence en nombre réduit, peut avoir des effets plus ou moins graves sur le statut
immunitaire. L’exposition à des produits chimiques immunosuppresseurs de
l’environnement peut être à l’origine de formes plus discrètes
Cours de toxicologie. 2020, MED 502

d’immunosuppression, plus difficiles à détecter, pouvant conduire, par exemple, à


une incidence accrue d’infections telles que la grippe ou le simple rhume.

Etant donné la complexité du système immunitaire et sa très grande diversité de


cellules, de médiateurs et de fonctions constituant un réseau élaboré et interactif, les
produits immunotoxiques ont de multiples possibilités d’exercer un effet. On ne
connaît pas encore parfaitement la nature des lésions initiales induites par de
nombreux produits chimiques immunotoxiques, mais on dispose chaque jour d’un
peu plus d’informations sur les modifications immunobiologiques à l’origine d’une
dépression de la fonction immunitaire, surtout grâce aux études sur les animaux de
laboratoire:

 le benzène a des effets immunotoxiques au niveau des cellules souches qui


provoquent une lymphocytopénie;
 processus de captation, de transformation et de présentation de l’antigène par
les macrophages et les autres cellules présentatrices de l’antigène (une des
cibles du 7,12-diméthylbenz(a)anthracène [DMBA] et du plomb se situe au
niveau de la présentation de l’antigène par les macrophages; les cellules de
Langerhans présentatrices d’antigène constituent une cible des rayonnements
ultraviolets);
 la fonction des cellules T auxiliaires est altérée par les organostanneux,
l’aldicarb, les biphényles polychlorés (PCB), la TCDD et le DMBA; la
fonction des cellules T suppressives est réduite par un traitement au
cyclophosphamide à faible dose;
 le benzo(a)pyrène supprime la production d’interleukine-1; les rayonnements
ultraviolets altèrent la production des cytokines par les kératinocytes;
 la synthèse des IgM et des IgG est supprimée après un traitement aux PCB et
à l’oxyde de tributylétain, et augmentée après une exposition à
l’hexachlorobenzène;
 régulation et activation du complément est altérées par la TCDD;
 le 3-méthylcholanthrène (3-MC), le DMBA et la TCDD suppriment
l’activité cytotoxique des cellules T;

2.2. L’allergie

On peut dire de l’allergie qu’il s’agit d’un effet indésirable pour la santé résultant
de l’induction excessive d’une réponse immunitaire spécifique. Lorsque des
réactions d’hypersensibilité se produisent sans la participation du système
immunitaire, on parle de pseudo-allergie. Dans le contexte de
l’immunotoxicologie, l’allergie est due à une réponse immunitaire spécifique à des
produits chimiques ou à des médicaments. Le pouvoir de sensibilisation d’un
produit chimique chez l’individu est généralement lié à sa capacité de liaison
covalente aux protéines de l’organisme.
Cours de toxicologie. 2020, MED 502

Les réactions allergiques peuvent être de plusieurs types, qui diffèrent selon le
mécanisme immunologique sous-jacent et la vitesse de la réaction. On distingue
quatre types principaux de réactions allergiques:

a- les réactions d’hypersensibilité de type I, sous la dépendance d’anticorps


IgE, avec une apparition des symptômes quelques minutes après exposition
de l’individu sensibilisé;
b- les réactions d’hypersensibilité de type II, dues à l’altération ou à la
destruction des cellules hôtes par des anticorps, les symptômes apparaissant
dans ce cas en quelques heures;
c- les réactions d’hypersensibilité de type III, ou phénomène d’Arthus, sont
également sous la dépendance d’anticorps, mais vis-à-vis d’un antigène
soluble et résultent de l’action locale ou systémique de complexes immuns;
d- les réactions de type IV ou d’hypersensibilité retardée sont commandés par
les lymphocytes T et, chez un sujet sensibilisé, les symptômes
se développent de vingt-quatre à quarante-huit heures après l’exposition.

Les deux types d’allergie chimique les plus importants pour la santé en milieu de
travail sont la sensibilisation de contact ou allergie cutanée et l’allergie respiratoire.

Hypersensibilité de contact. Un grand nombre de produits chimiques peuvent être à


l’origine d’une sensibilisation de contact. Après une exposition topique d’un sujet
sensible à un allergène chimique, il se produit une réponse lymphocytaire T dans
les ganglions lymphatiques de drainage. Au niveau de la peau, l’allergène réagit
directement ou indirectement avec les cellules épidermiques de Langerhans qui
transportent le produit chimique vers les ganglions lymphatiques et le présentent
sous une forme immunogène aux lymphocytes T sensibles. Les lymphocytes T
activés par l’allergène prolifèrent, provoquant une expansion clonale. L’individu
est alors sensibilisé et répondra à une seconde exposition de la peau au même
produit chimique par une réaction immunitaire plus agressive, responsable d’un
eczéma allergique de contact. La réaction inflammatoire cutanée caractéristique de
ce type d’eczéma résulte de la reconnaissance de l’allergène au niveau du tissu
cutané par des lymphocytes T spécifiques.

Les causes habituelles de l’eczéma allergique de contact sont des produits


chimiques organiques (tels que le 2,4-dinitrochlorobenzène), des métaux (tels que
le nickel et le chrome) ou des produits d’origine végétale (comme l’urushiol du
sumac vénéneux).

Hypersensibilité respiratoire. L’hypersensibilité respiratoire est généralement


considérée comme une réaction d’hypersensibilité de type I. Cependant, les
réactions de phase tardive et les symptômes chroniques associés à l’asthme
paraissent impliquer des processus immunitaires de type cellulaire (type IV). Les
symptômes aigus associés à l’allergie respiratoire sont dus aux anticorps IgE, dont
la production est provoquée par l’exposition du sujet sensible à l’allergène
Cours de toxicologie. 2020, MED 502

chimique inducteur. Les anticorps IgE sont distribués par voie systémique et se
lient, par l’intermédiaire des récepteurs membranaires, aux mastocytes présents
dans les tissus vascularisés, en particulier dans le tractus respiratoire. Lorsque le
même produit est inhalé de nouveau, une réaction d’hypersensibilité respiratoire se
déclenche. L’allergène se lie à une protéine et se fixe en même temps aux anticorps
IgE portés par les mastocytes. Suivent alors une dégranulation des mastocytes et la
sécrétion des médiateurs de l’inflammation tels que l’histamine et les leucotriènes.
Ces médiateurs sont responsables de la bronchoconstriction et de la vasodilatation,
donnant lieu aux symptômes de l’allergie respiratoire: asthme ou rhinite. Parmi les
produits chimiques connus pour induire chez l’humain une hypersensibilité
respiratoire, il faut citer les anhydrides d’acides (comme l’anhydride trimellitique),
certains diisocyanates (TDI, par exemple), les sels de platine et des colorants.
L’exposition chronique au béryllium est également connue pour provoquer une
pathologie pulmonaire d’hypersensibilité.

2.3.L’auto-immunité

On peut dire de l’auto-immunité qu’il s’agit de la stimulation de réponses


immunitaires spécifiques dirigées contre les antigènes endogènes du «soi». L’auto-
immunité induite peut résulter d’une perturbation de l’équilibre des lymphocytes T
régulateurs, ou de la liaison d’un xénobiotique avec des composants tissulaires
normaux les rendant immunogènes (altération du «soi»). Les médicaments et
produits chimiques connus pour induire fortuitement ou exacerber une maladie
auto-immune chez les individus sensibles sont des composés de faible poids
moléculaire (100 à 500 daltons) généralement considérés comme non
immunogènes. Le mécanisme d’une maladie auto-immune après exposition à un
produit chimique est en grande partie inconnu. La maladie peut être provoquée
directement par un anticorps circulant, résulter indirectement de la formation de
complexes immuns, ou être la conséquence d’une réaction immunologique de type
cellulaire. Il s’agit selon toute vraisemblance d’un mécanisme multiple. On connaît
mieux le mécanisme pathogène des troubles hémolytiques immunitaires induits par
les médicaments:

 le médicament peut se lier à la membrane érythrocytaire et réagir avec un


anticorps dirigé contre lui;
 le médicament peut altérer la membrane érythrocytaire de sorte que le
système immunitaire considère la cellule comme étrangère;
 le médicament et son anticorps spécifique forment des complexes immuns
qui adhèrent à la membrane érythrocytaire pour provoquer une lésion;
 la sensibilisation des hématies survient à la suite de la production d’auto-
anticorps antihématies.

En milieu de travail, l’exposition à des produits chimiques peut parfois conduire à


des syndromes de caractère auto-immunitaire, celle à des produits comme le
chlorure de vinyle monomère, le trichloroéthylène, le perchloroéthylène, les résines
Cours de toxicologie. 2020, MED 502

époxy ou la poussière de silice pouvant provoquer des syndromes du type


sclérodermie. L’exposition à l’hydrazine a été associée à un syndrome
s’apparentant au lupus érythémateux aigu disséminé.

L’évaluation du risque chez l’humain

L’évaluation du statut immunitaire chez l’humain s’effectue en étudiant des points


de vue quantitatif et fonctionnel, principalement sur le sang périphérique, les
immunoglobulines et le complément, ainsi que les sous-populations leucocytaires.
L’évaluation du risque immunotoxique d’un xénobiotique particulier chez l’humain
est une démarche extrêmement difficile quand elle n’est pas impossible, en raison
surtout de la présence d’un mélange de facteurs d’origine endogène ou exogène qui
interviennent dans la réponse des individus à une lésion toxique. C’est vrai en
particulier pour les études sur le rôle d’une exposition chimique dans les maladies
auto-immunes, où les facteurs génétiques jouent un rôle déterminant.

Dans le cas des xénobiotiques, on détermine leur potentiel immunotoxique surtout


grâce à des études contrôlées chez les rongeurs. Les études d’exposition in vivo
sont, à cet égard, la meilleure solution en raison de la nature multifactorielle
complexe du système immunitaire et des réponses immunes. Les études in vitro
sont de plus en plus utilisées pour élucider un mécanisme d’immunotoxicité.

Lorsque l’évaluation d’un risque d’immunosuppression induite par un produit


chimique repose uniquement sur des données animales, on a la possibilité pour
extrapoler à l’humain d’employer une technique qui consiste à appliquer un facteur
d’incertitude à la NOAEL (No Observed Adverse Effect Level (niveau sans effet
nocif observé)).

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