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Prise en charge
d’un pied
3 Signes d’appel du pied
Troubles de la marche
Une fatigabilité anormale à la marche ou un périmètre de marche limité peut
révéler une atteinte débutante de l’état général (infection, tumeur, anémie,
etc.), une pathologie locale tel qu’un trouble statique ou générale comme une
neuropathie ou une artériopathie.
Une boiterie. Seul un examen complet clinique, radiologique et biologique
permet de trouver l’origine précise de l’affection en dehors de l’amputation.
Le steppage, le fauchage, la démarche spastique, pseudo ébrieuse, talonnante,
festinante, dandinante ou hystérique imposent d’emblée un examen neurolo-
gique et la recherche d’une séquelle de lésion ostéo-articulaire. La paralysie
oriente vers une neuropathie centrale ou périphérique.
Podologie
Ó 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
46 II. Prise en charge d’un pied
Gène fonctionnelle
En dehors de la marche, les activités quotidiennes privées et/ou profession-
nelles pâtissent de toute atteinte à la mobilité de la cheville et du pied : raideur,
blocage, ankylose. La lésion d’une seule articulation suffit à provoquer une
impotence. Elle oriente plutôt vers des pathologies rhumatismales ou
traumatiques.
L’amyotrophie, l’hypotonie ou à l’inverse la spasticité et les rétractions
musculo-tendineuses, surtout des muscles extrinsèques, perturbent
également la bonne mobilité du pied. Il convient de rechercher une myopa-
thie, une neuropathie ou une maladie métabolique.
Enfin, les dysesthésies souvent d’origine neurologique ont des
répercussions propres au pied. L’hyperesthésie rend le chaussage inconfor-
table voire douloureux. L’hypoesthésie aggrave les hyperkératoses
mécaniques et favorise leur évolution vers des complications cutanées
(ulcère, bursopathie).
Déformations
La raison qui conduit à examiner un pied pour une déformation dépend de
l’âge du patient.
Chez le nourrisson, toute anomalie fait craindre pour son avenir fonctionnel
et justifie la consultation d’un spécialiste. Il faut distinguer la malposition de la
malformation (cf. chapitre 7, page 103).
Chez l’adulte, une déformation peut être un motif de consultation par
simple souci esthétique, surtout chez la femme jeune. Une enquête
étiologique se justifie pour ne pas passer à côté d’un diagnostic sérieux telle
qu’une tumeur ou un rhumatisme débutant. Se méfier d’une déformation
évidente, rapide, souvent indolore chez un diabétique atteint de neuropathie,
le pied de Charcot par ostéoarthropathie n’est plus exceptionnel.
Parfois, la déformation est responsable d’une gêne au chaussage. La chaus-
sure de série ne tolère aucune saillie inhabituelle, même minime. Le conflit se
traduit rapidement par une zone de frottement excessif et une gêne à la
marche. Une déformation importante peut interdire tout chaussage de série.
3. Signes d’appel du pied 47
Ce cas n’est pas rare chez la personne âgée porteuse de simple anomalie
statique longtemps comprimée dans une tige trop étroite.
La déformation peut aussi être responsable d’un trouble fonctionnel, donc
mécanique.
Troubles trophiques
Ils se traduisent cliniquement sur la peau, les ongles, les muscles ou les ensem-
bles ostéo-articulaires.
Le tégument peut présenter un ulcère plus ou moins profond (ou escarre ou
mal perforant), une hypertrophie plus ou moins localisée (infiltration cutanée,
œdème) ou un aspect divers : peau lisse, mince et luisante ; poil cassant ou
épais ; ongle sec, friable ou dystrophique ; trouble de la sudation (dysidrose,
anidrose, hyperidrose).
Les muscles peuvent être empâtés, infiltrés ou amincis (amyotrophie).
L’atteinte ostéo-articulaire peut se traduire sur une radiographie par une
déminéralisation des os, un pincement des articulations ou une lyse osseuse.
Ces lésions peuvent entraîner des fractures spontanées, des luxations notam-
ment métatarsophalangiennes ou une modification de l’aspect du pied (rac-
courcissement, effondrement de la voûte médiale).
Lésions dermatologiques
Les problèmes dermatologiques, hormis les troubles trophiques, sont très
fréquents et variés : verrue plantaire, onychocryptose, cor, durillon, infection
bactérienne, mycosique ou parasitaire, tumeur maligne ou bénigne, plaie,
hématome, ulcération, etc. Leur existence est facilement dépistée par le
patient. Un avis dermatologique doit être demandé, surtout en cas de sus-
picion de mélanome. En revanche, toute lésion d’origine mécanique doit être
prise en charge par un spécialiste du pied.
Douleur
C’est le motif de consultation le plus fréquent. Beaucoup d’affections du pied
se traduisent par des douleurs à un stade plus ou moins tardif. Les douleurs
aiguës et invalidantes et les douleurs persistantes sont les plus mal supportées
et amènent généralement à consulter. Inconsciemment, de nombreux
patients craignent que ces douleurs annoncent une pathologie qui va leur
interdire la marche et les condamner à la chaise roulante. Il faut rapidement
écarter cette éventualité et en informer le patient afin d’éviter toute
pérennisation.
Il faut se méfier de toute douleur du pied d’étiologie inconnue. En revanche,
il est logique de ne pas s’inquiéter devant une douleur compréhensible
comme celle qui survient au port de chaussures neuves pendant les premiers
jours.
Anesthésie et hypoesthésie. Chez les patients ayant une perte de sensibilité
superficielle et/ou profonde (neuropathie, insensibilité congénitale, etc.),
48 II. Prise en charge d’un pied
Interrogatoire podologique
La synthèse d’indices recueillis lors de l’interrogatoire guidé par le motif de
consultation oriente directement le diagnostic.
Quel que soit le signe d’appel, il faut préciser :
n l’âge de survenue des premiers symptômes ;
n la localisation (bilatéralité, symétrie) ;
n le mode de début ;
n les circonstances d’apparition (nouvelle paire de chaussures, traumatisme,
prise d’un médicament, acte médical) ;
n l’évolution des symptômes depuis leur apparition jusqu’au jour de la
consultation ;
n le retentissement fonctionnel : le pied étant utilisé dans la plupart des
activités de la vie quotidienne, préciser la gêne engendrée, le périmètre
de marche, la gêne lors du port de chaussures, de la conduite automobile, la
pratique d’un sport, l’activité professionnelle, etc. ;
n le contexte pathologique. La consultation podologique est un acte médical
à part entière : noter les antécédents héréditaires, les antécédents person-
nels médicaux et chirurgicaux qu’ils aient un rapport direct ou non avec les
pieds ou l’appareil locomoteur ; les antécédents veineux, neurologiques,
métaboliques, dermatologiques, rhumatologiques, les traitements en
cours, etc. ;
n les traitements essayés et leur effet : médicaments, infiltration,
mésothérapie, physiothérapie, médecine douce, kinésithérapie, etc. Il faut
préciser les interventions chirurgicales subies (date, technique, suites
opératoires, résultat) et les essais éventuels d’orthèses (type, tolérance,
durée, résultat) ;
n l’influence des chaussures : type de chaussures portées, pointure et largeur,
hauteur du dénivelé, cambrure, rapport avec la pathologie, usure,
déformation.
Dans le cas d’une douleur. Les éléments d’orientation sont encore plus
nombreux. Plus le réseau nerveux est dense plus la douleur peut être
localisée avec précision (peau, vaisseaux, tendon, ligament, os sous chondral,
périoste). Chaque douleur présente des caractères propres à l’innervation du
tissu lésé.
Caractéristiques de la douleur :
n ancienneté ;
n mode d’installation : brutal, progressif, par accès ;
n circonstance déclenchante : spontanée, traumatisme, port de chaussures,
etc. ;
n topographie : siège et irradiation, uni- ou bilatéralité et symétrie. Une
podalgie est souvent bien localisée grâce à un critère anatomique : talon
(talalgie), tarse (tarsalgie), plante du pied (plantalgie), métatarse
(métatarsalgie), orteil, sésamoïde, en précisant parfois dorsale ou plantaire ;
3. Signes d’appel du pied 49
Remarques
Les éléments absents ont parfois autant d’importance que les éléments
positifs.
La localisation de la douleur est un bon critère d’orientation.
Le rythme de la douleur obéit rarement aux concepts classiques : douleur
mécanique réveillée ou augmentée par l’action et calmée par le repos ; dou-
leur inflammatoire soulagée par le mouvement qui échauffe et libère les
articulations lésées et qui s’exprime au repos, surtout dans la deuxième
moitié de la nuit, réveillant le malade. Au pied, une maladie inflammatoire
peut s’apaiser la nuit et s’exprimer le jour à la suite d’une charge imposée lors
de l’appui et par la contrainte des chaussures. Inversement, un trouble
mécanique peut entraîner une pseudo-inflammation des parties molles par
frottement, compression ou surcharge et continuer à se manifester au repos.
Bien sûr, une douleur insomniante oriente d’emblée vers une étiologie
organique, généralement infectieuse, rhumatismale ou tumorale.
Tableau 3.I
Échelle de qualité de vie en cas de pathologie du pied
Items/score 0 1 2 3
difficulté des aucune quelques quelques plus de
premiers pas secondes minutes 30 minutes
(dérouillage
matinal)
la marche sans gêne douleur boiterie marche
impossible
la station sans gêne piétinement limitée impossible au-
debout pénible delà de
30 minutes
les escaliers sans difficulté douleur en douleur en évités
montée descente
au repos aucun paresthésies douleurs insomnies
symptôme
aspect sans objet gêne pied nu gêne pied gêne
esthétique chaussé obsessionnelle
la conduite sans gêne gêne trajet limité en abandonnée
automobile ou intermittente durée
vélo
pratique d’une toute activité course ou saut limitée activité sans
activité possible perturbés déplacement
sportive
instabilité de inexistante entorses lors entorse à la entorses
cheville d’activité marche sur sol à répétition sur
sportive meuble tous types de
sol
soins de sans objet 1 à 2 fois par mensuels efficacité de
pédicurie an quelques jours
port d’orthèse sans indication efficacité sans effet sur la inefficace
plantaire transitoire douleur
chaussage standard aménagé thérapeutique orthopédique
de série
semelle sans objet fine et rigide fine et souple épaisse et
antalgique souple
SCORE (0 à 39) Inconfort si score supérieur à 15
3. Signes d’appel du pied 51
À retenir