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DIAGNOSTIC DES POLYARTHRITES


Pr Ag. Baly OUATTARA

I. DEFINITIONS
On entend par polyarthrite une atteinte inflammatoire touchant plusieurs articulations à la fois.
On distingue en pratique :
A. SELON LE NOMBRE D’ARTICULATIONS
- Polyarthrites vraies : atteinte de  4 articulations
- Oligoarthrite : atteinte de quelques articulations, en général < 4.
B. SELON LA TOPOGRAPHIE ET LA RÉPARTITION
- Polyarthrites axiales : portent sur les articulations axiales (rachis et bassin)
- Polyarthrites périphériques : portent sur les membres
- Polyarthrites distales : atteintes localisées aux extrémités des membres
- Polyarthrites proximales (ou rhizoméliques) : portent sur les racines des membres
- Polyarthrites symétriques : atteinte de degré identique pour les articulations homologues
- Polyarthrites asymétriques, opposées aux polyarthrites symétriques
- Polyarthrites dissociées : atteintes parcellaires et anarchiques.
C. SELON L’INTENSITÉ
- Polyarthrite aiguë : polyarthrite d’intensité très vive
- Polyarthrite subaiguë : polyarthrite d’intensité atténuée

D. SELON L’ANCIENNETÉ
- Polyarthrite aiguë : polyarthrite récente, datant de quelques heures ou quelques jours
- Polyarthrite subaiguë : polyarthrite datant de quelques semaines, mais < 3 mois
- Polyarthrite chronique : polyarthrite évoluant depuis plusieurs mois ( 3 mois)

II. DIAGNOSTIC POSITIF


A. ANAMNÈSE
Elle précise :
- Identité du malade : âge, sexe, profession
- Ancienneté de la maladie : date du début des symptômes
- Mode de début : brusque ou progressif
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- Signes de début, leur évolution dans le temps :
 signes articulaires : leur mode de progression : atteinte mobile et fugace, atteintes
plus fixes, généralisation d’emblée… ; la topographie des atteintes : périphérique,
axiale, distale, proximale, mixte…
 signes extra-articulaires : signes généraux (surtout : fièvre, amaigrissement) ;
signes viscéraux, en particulier :
 signes digestifs : notion de diarrhée, syndrome dysentérique,…
 signes cutanéo-muqueux : signes oro-pharyngés (angine, aphtes) ;
notion d’éruption cutanée (préciser le type, la localisation ;
 signes uro-génitaux : uréthrite, balanite, leucorrhée, annexite,
cervicite...
 signes ophtalmologiques : conjonctivite, iritis, uvéite,…
- Traitements reçus, et leur tolérance observée
- Antécédents du patient, notamment ceux pouvant avoir une interférence avec le
traitement : ulcère gastroduodénal, hépatopathies, HTA et cardiopathies, diabète,
néphropathie,…
B. EXAMEN CLINIQUE
L’examen clinique doit être extrêmement soigneux.
- Etat général : altération ou non de l’état général, fièvre, anémie, amaigrissement
- Examen articulaire : il précise notamment :
 le nombre d’articulations atteintes
 la topographie des atteintes (cf. plus haut)
 l’existence ou non de déformations caractéristiques : ex. main rhumatoïde, tophus
goutteux…
 les signes périarticulaires : état de la peau, existence de nodules sous-cutanés,
ganglions…
- Examen viscéral : il doit être complet, car la polyarthrite n’est qu’un syndrrome, et
toute polyarthrite, quelle qu’en soit la cause, peut avoir un retentissement viscéral plus
ou moins important. Il doit concerner tout particulièrement les organes visés plus haut :
examen oculaire, cutané, digestif, cardiaque, rénal,…
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C. EXAMENS COMPLÉMENTAIRES
1. Imagerie
 La radiologie conventionnelle articulaire est demandée pour les articulations les plus touchées,
ou pour des sites spécifiques, susceptibles de modifications évocatrices (ex. les mains et les
pieds dans la polyarthrite rhumatoïde).
Les signes sont souvent aspécifiques et retardés : densification des parties molles, puis
déminéralisation osseuse, érosions, destructions articulaires, ankylose…
Dans les conditions idéales, elle est guidée par la scintigraphie osseuse qui indique les sites les
plus actifs.
 La radiographie pulmonaire est systématique
2. Examens biologiques
a) Examens non spécifiques dits « tests de débrouillage »
. Hémogramme
. Tests de l’inflammation (cf. plus haut)
. Analyse du liquide synovial : doit être systématique surtout quand
l’épanchement est accessible, permettant une étude complète du liquide synovial :
macroscopique, cytologique, chimique, bactériologique (cf. tableau).
b) Tests spécifiques : ils varient selon le contexte clinique (âge, sexe, caractères de la polyarthrite,
signes associés)
Ce peut être :
. Des tests biochimiques : ex. uricémie
. Des tests bactériologiques : hémoculture, examen direct et culture d’autres liquides
biologiques (pus, urines, liquide synovial…), sérologies diverses,…
. Des tests immunologiques : sérologie rhumatoïde (Waaler-Rose, Latex), sérologie lupique
( facteurs antinucléaires, anticorps anti DNA,…)

III. DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL


A. CE QUI N’EST PAS ARTICULAIRE
- ostéalgies, myalgies
- ostéites, myosites
- polyalgies
Mais il peut exister des associations. Les polyalgies peuvent précéder ou révéler des atteintes
inflammatoires plus diffuses (ex. connectivites).
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B. CE QUI EST ARTICULAIRE, MAIS NON UNE POLYARTHRITE
1. Polyarthralgies : il n’y a pas de signes d’inflammation. Mais, il faut se méfier cependant des
polyarthrites frustres, ou à leur début, où les signes d’inflammation peuvent être très atténuées.
2. Algodystrophies : atteintes loco-régionales vasomotrices touchant aussi bien les parties molles
que les articulations. Elles évoluent en 2 phases :
 fluxionnaire et hyperalgique
 phase atrophique, avec des rétractions et déformations articulaires.
L’exemple le plus caractéristique est le syndrome épaule-main
3. Tendinites et téno-synovites : la douleur est plutôt périarticulaire, avec parfois un gonflement
asymétrique localisé. Mais elles peuvent être associées à la polyarthrite.

IV. ETIOLOGIES
Les étiologies sont nombreuses et variées.
Dans l’ensemble, les principales clés du diagnostic sont, comme nous l’avons cité plus haut : l’âge
et le sexe, la profession, les caractères de la polyarthrite, les signes d’accompagnement. Ces
paramètres analysés, peuvent permettre, dans bien des cas, une présomption diagnostique fondée.
A. DEVANT UNE POLYARTHRITE AIGUË
1. Quel que soit l’âge: Arthrites septiques (à germes pyogènes)
Le diagnostic doit être précoce car il appelle un traitement urgent pour éviter de mettre en jeu le
pronostic vital.
Germes responsables : staphylocoques dorés surtout, streptocoques, bacilles gram négatifs
(colibacilles, pseudomonas, serratia), gonocoques, …
2. Chez l’enfant
a) Rhumatisme articulaire aigu (RAA)
C’est une maladie de l’enfant et de l’adolescent, due au streptocoque beta hémolytique.
b) Arthrites chroniques juvéniles (ACJ)
Elles constituent un ensemble hétérogène de polyarthrites érosives survenant chez les
jeunes enfants, avec 2 pics de fréquence nets, entre 3 et 4 ans, puis entre 9 et 14 ans.
3. Chez l’Adulte
a) La crise de goutte
Elle donne typiquement lieu à des monoarthrites à début brusque touchant préférentiellement les
membres inférieurs mais des atteintes polyarticulaires sont possibles, surtout dans les cas suivant :
gouttes anciennes et mal traitées, gouttes secondaires (cancers, endocrinopathies, insuffisance
rénale…).
b) Poussées graves de connectivites
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Ces connectivites et vascularites sont le plus souvent : lupus érythémateux disséminé, sclérodermie,
polymyosite, périartérite noueuse, etc…

4. Chez le sujet âgé: penser à


A. Une pseudo-polyarthrite rhizomélique (PPR)
- Les douleurs sont d’installation rapide ; elles sont intenses, entraînant l’insomnie et elles
siègent à la racine des membres supérieurs et inférieurs.
- L’examen clinique montre une altération souvent sévère de l’état général, un enraidissement
douloureux des épaules et des hanches.
- Les radiographies sont normales
- La VS est très élevée > 100 mm à la 1e h
B. L’artérite temporale (maladie de Horton)
- Elle est annoncée par des céphalées occipitales ou temporales violentes, des douleurs du
scalp ainsi qu’une claudication intermittente de la mâchoire. La palpation montre une artère
temporale inflammatoire, indurée, douloureuse. Le risque majeur est l’atteinte de l’artère
ophtalmique ou l’artère centrale de la rétine provoquant une amaurose d’installation rapide
 Traitement : Prednisone : 0,5 mg/kg/j dans la PPR sans signe évocateur de maladie de
Horton; 0,7 mg/kg/j en cas de maladie de Horton sans atteinte ophtalmologique. Elle une
action spectaculaire (24h), ce qui permet une réduction rapide de la posologie en se basant
sur la CRP.
B. DEVANT UNE POLYARTHRITE SUBAIGUË OU CHRONIQUE
1. La polyarthrite rhumatoïde (PR)
La polyarthrite rhumatoïde est la plus typique et la plus pittoresque des rhumatismes
inflammatoires.
2. les arthrites réactionnelles (ou réactives)
Leur mécanisme est comparable à celui des rhumatismes streptococciques. Le terrain génétique
prédisposant est le groupe HLA B 27. Les germes inducteurs courants sont : les chlamydiae, les
shigelles, les yersiniae, les salmonelles, campylobacter, les mycoplasmes, certaines parasitoses
(filarioses, anguilulose, bilharzioses…)Le tableau clinique le plus typique est le syndrome de
Fiessinger-Leroy-Reiter.
3. Les connectivites
- Le lupus érythémateux disséminé (LED)
Le LED est une connectivite majeure, survenant surtout chez la femme jeune, dont le
pronostic est souvent aggravé par les épisodes de la vie génitale (contraception, grossesse,
accouchement).
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- Les autres connectivites : sclérodermie systémique, dermatopolymyosite, syndrome de
Sharp, etc…
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Tableau N° 1 : PRINCIPALES CAUSES DE POLYARTHRITE

I. ARTHRITES INFECTIEUSES
- Arthrites bactériennes, staphylococciques, gonococciques, …, brucelliennes…, tuberculeuses,
syphyllitiques …, arthrites de la maladie de Lyme.
- Arthrites parasitaires : filariose, teniasis, bilharziose…
- Arthrites virales : hépatites virales, rubéole, oreillons, SIDA.
- Arthrites mycosiques : candidoses,…

II. RHUMATISMES POST-INFECTIEUX / SPONDYLARTHROPATHIES


- Rhumatismes streptococciques
 Rhumatisme articulaire aigu (RAA)
 Rhumatisme streptococcique de l’adulte
- Spondylarthropathies
 Arthrites réactionnelles à Shigella, Yersinia, Salmonella, Campylobacter,
Chlamydia, Mycoplasmes.
 Arthrites des entérocolopathies (maladie de Crohn, rectocolite ulcéro-hémorragique,
malabsorptions diverses, …)
 Rhumatisme psoriasique, acné, SAPHO, …
 Spondylarthrite ankylosante

III. ARTHRITES MICROCRISTALLINES


- Goutte
- Chondrocalcinose articulaire
- Rhumatisme à hydroxyapatite

IV. COLLAGENOSES (CONNECTIVITES)


- Polyarthrite rhumatoïde
- Arthrite chronique juvénile
- Connectivites majeures :
 Lupus érythémateux disséminé (LED)
 Sclérodermie
 Dermatopolymyosites
- Connectivites mixtes et indifférenciées
- Fasciites
- Syndrome de Sjögren

V. MANIFESTATIONS OSTEOARTICULAIRES DE MALADIES GENERALES


DIVERSES
- Angéites : périartérite noueuse, pseudopolyarthrite rhizomélique (PPR) et maladie de Horton,
maladie de Takayashu, …
- Arthrites de la drépnocytose et des anémies hémolytiques, des hémopathies malignes.
- Manifestations ostéoarticulaires des endocrinopathies : ostéoporose, ostéomalacie,
hyperparathyroïdie, …
- Divers : sarcoïdose (BBS), maladie de Behcet, ostéoarthropathie hypertrophiante pneumique
(OAHP),…

VI. ARTHRITES DIVERSES


- Hydarthrose intermittente
- Rhumatisme palindromique
- Synovite post-traumatique.

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