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Diagnostic différentiel en Rhumatologie

L’histoire et l’examen clinique sont la base dans le diagnostic et l’évaluation d’une arthrite.

Reconnaître que le patient souffre d’une arthrite est l’élément primordial. En effet, avec le
développement de nouveaux traitements, nous pouvons empêcher le développement des
déformations par un traitement précoce.

Antécédents : il faut rechercher des antécédents


1 personnels ou familiaux d’arthrite, d’arthrose ou de 2 Problèmes non articulaires :
psoriasis ainsi que : blessure tendineuse, syndrome de douleur
chronique (fibromyalgie), myopathie :
 Une maladie inflammatoire de l’intestin;
 Pas de limitation de mouvement, ni d’ankylose;
 Des maladies cutanées (psoriasis, lupus), photosensibilité;
 Un phénomène de Raynaud;  Les mouvements actifs sont douloureux et dans
certains axes seulement;
 De la goutte;
 Une atteinte oculaire (uvéite, iritis);  Douleur localisée, superficielle (lorsque la
structure est accessible à l’examen), touche un
 Un diabète qui est associé à plusieurs pathologies musculo-
tendon, une bourse ou un ligament; sauf si la
squelettiques telles la capsulite et les neuropathies;
douleur est osseuse ou secondaire à la
 Arthrite dans la famille : arthrite rhumatoïde, spondylite fibromyalgie.
ankylosante, arthrite psoriasique ou autre.

3 Problèmes articulaires : en présence d’un problème articulaire, les mouvements, tant passifs qu’actifs, sont
douloureux et limités. Une ankylose est présente. La douleur est diffuse, profonde, localisée aux articulations.

Non inflammatoires : arthrose primaire ou secondaire Problèmes inflammatoires

L’histoire et l’examen permettent en général de déterminer On doit soupçonner la présence d’une


que le problème est d’origine arthrosique : arthrite devant des douleurs articulaires
présentant les caractéristiques suivantes :
 Absence de raideur matinale ou raideur légère < 30 minutes;
 Problème en général, pire le soir;  Raideur matinale franche > 1 heure;
 Rougeur et chaleur le plus souvent absentes;  Douleur plus marquée à l’éveil;
 Arthrose : augmentation du volume osseux;  Rougeur et chaleur peuvent être présentes;
 Douleur augmentée par l’activité.  Gonflement articulaire (tissus mous).
En cas de doute, en particulier pour les mains : procéder à une L’examen physique sera axé sur la re-
radiographie, faire un bilan sanguin approprié, voir la section sur cherche de synovite et de signes physiques
le laboratoire et assurer le suivi du patient. L’évolution permettra de maladies associées aux arthrites.
souvent de poser un diagnostic.

4 Diagnostic différentiel selon la présentation d’une arthrite


 Une arthrite aiguë : penser à la goutte, pseudogoutte, un Reiter, une arthrite septique ou virale;
 Une douleur articulaire chronique : arthrose, PAR, arthrite psoriasique;
 Épisodes intermittents : penser surtout à la goutte et à la pseudogoutte. Parfois, il peut s’agir d’une arthrite palindromique
pouvant évoluer vers une PAR;
 Certaines localisations nous orienteront davantage vers un diagnostic :
- Interphalangienne distale : arthrose, arthrite psoriasique. Une dactylite suggère une arthrite psoriasique ou un Reiter,
- Atteinte lombosacrée : arthrite axiale,
- Atteinte des MCP très suggestive d’une arthrite, type rhumatoïde,
e e
- Poignets, coude, MCP du 2 au 5 doigt, articulation glénohumérale : articulations rarement touchées par l’arthrose,
- Atteinte du premier orteil : fait soupçonner la goutte, la pseudogoutte ou de l’arthrose,
- Atteinte des hanches et des épaules de façon prédominante : une polymyalgia rheumatica,
- Pseudogoutte : touche souvent les genoux, les poignets ou les chevilles.
5 Principales arthrites

Monoarthrite Oligoarthrite
Oligoarthrite
L’élément le plus important demeure l’analyse du liquide Cinq articulations touchées ou moins et
synovial. Les éléments essentiels sont le décompte cellulaire, la culture absence d’arthrite axiale :
et la recherche de cristaux. Le bilan sanguin peut être utile : acide
urique, calcium-phosphore, ferritine, (dépistage de l’hémochromatose).  Arthrite psoriasique;
 Arthrite associée aux maladies inflam-
Le diagnostic différentiel principal est le suivant : matoires de l’intestin;
 Arthrite infectieuse, jusqu’à preuve du contraire;  Goutte ou pseudogoutte;
 Arthrite microcristalline;  Une PAR peut être au début oligo-
 Arthrite associée à une atteinte axiale; articulaire;
 Arthrite réactionnelle (maladie de Reiter).  Sarcoïdose.

Arthrite axiale
Arthrite axiale

Classification : spondylite ankylosante, arthrite psoriasique, associée aux maladies inflammatoires de l’intestin,
maladie de Reiter, spondyloarthropathie indifférenciée.
Diagnostic : principalement avec l’histoire, l’examen et les radiographies
des sacro-iliaques :
 Une histoire familiale peut être présente;
 Une uvéite peut nous orienter vers ce diagnostic;
 HLA-B27, utile seulement si tableau clinique compatible;
 La scintigraphie osseuse est peu utile;
 Diagnostic difficile durant les premières années d’évolution.

Polyarthrite
Polyarthrite
Plus de cinq articulations atteintes au-delà de six semaines. On doit attendre une persistance des symptômes d’une
durée d’au moins six semaines avant de poser un diagnostic de polyarthrite étant donné les conséquences pour le
patient. Une arthrite réactionnelle rentre dans l’ordre presque toujours avant ce délai.

Arthrite rhumatoïde : Collagénoses (connectivites) :

Le diagnostic est surtout clinique, les facteurs Les collagénoses sont des maladies relativement rares,
rhumatoïdes et les anti-CCP ne doivent être l’évaluation clinique est l’élément le plus important, les
demandés que devant un tableau clinique compatible. anticorps antinucléaires (ANA ou FAN) ainsi que les
Les radiographies des mains et des pieds doivent anticorps spécifiques (anti-DNA, anti-RO, etc.) ne doivent
être faites si la maladie évolue depuis quelques mois. être demandés que lorsque la probabilité de la maladie
recherchée est relativement élevée.

Arthrite psoriasique :
La pseudogoutte et la goutte :
Le diagnostic est clinique : identifier l’atteinte cutanée
peut nécessiter un examen soigneux, parfois l’arthrite Les arthrites microcristallines peuvent parfois causer une
peut précéder l’atteinte cutanée. Une histoire familiale atteinte polyarticulaire pouvant mimer une arthrite
est parfois présente. L’atteinte au niveau des mains rhumatoïde. Toutefois, c’est rarement la présentation
peut être typique. L’image radiologique peut être très initiale, ces maladies sont présentes habituellement depuis
utile au diagnostic. plusieurs années et ont déjà été diagnostiquées.

Une évaluation clinique structurée (questionnaire, examen physique, bilan radiologique) associée à une utilisation
appropriée des tests de laboratoire permet un diagnostic précis dans la majorité des cas. Toutefois dans certains
cas, même pour un expert, c’est le suivi, parfois sur plusieurs années, qui permet un diagnostic précis.
Tableau résumé des principales arthrites

Diagnostic Clinique Laboratoires Radiographies


• Facteur rhumatoïde présent
• Symétrique dans 50 % des cas initiale- • Les signes
ment et 75 % après un an apparaissent après
• Polyarticulaire
• Anti-CCP plus sensible et plus quelques années
Arthrite rhumatoïde • Atteinte périphérique spécifique • Érosion,
• MCP et IPP souvent atteints • Sédimentation augmentée déminéralisation
re
• Maladie souvent atypique dans la 1 année. dans la plupart des cas péri-articulaire
• Anémie inflammatoire fréquente.
• Sclérose
• Asymétrique • MCP non atteints
Arthrose • Normaux • Ostéophytes
• IPP et IPD • Douleur mécanique
• Pincement articulaire
• Myalgies diffuses • Normaux
• Points gâchettes positifs
Fibromyalgie • Absence de • Normales
• Fatigue, insomnie • Diagnostic uniquement clinique
synovites
• Mono ou oligo-articulaire (30 à 50 % des cas).
• Arthrite souvent
• Arthrite symétrique : affection des mains et des peu érosive sauf
pieds souvent associée à une atteinte des dans les formes
ongles, (30 à 50 % des cas), touche surtout les • Souvent normal mutilantes.
IPP et les IPD, mais peut ressembler à la PAR.
Arthrite psoriasique • Dans les formes sévères, la • L’aspect peut être
• Arthrite axiale : avec peu d’atteinte périphérique sédimentation peut être élevée typique
(5 % des cas).
• Rayons X des
• Arthrite mutilante : très sévère (environ 5 % des sacro-iliaques dans
cas), résulte en ostéolyse au niveau des les arthrites axiales
phalanges et des métacarpes avec déformation.

Spondylarthropathie • Sacro-iléite (visible


séronégative radiologique après
quelques années)
Spondylite ankylosante • Atteinte axiale et des sacro-iliaques • HLA B27 en général + • Signes plus
ou spondylarthropathie
• Atteinte asymétrique • Facteur rhumatoïde négatif précoces au TACO
associée à une arthrite
psoriasique, un • Rechercher : psoriasis, dactylite, uvéite, • Test de chlamydia + (Reiter) ou à la résonance
syndrome de Reiter ou symptômes digestifs • Syndesmophytes
une arthrite • Érosions
entéropathique. asymétriques

• Présence de cristaux à la • Goutte : érosion


er
Arthrite ponction articulaire 1 MTP (après
• Tableau aigu
microcristalline • Le taux d’acide urique peut plusieurs années)
• Mono/oligoarthrite
• Goutte être normal lors d’une crise de • Pseudogoutte :
• Peut mimer une PAR
• Pseudogoutte goutte, le mesurer idéalement chondrocalcinose
2 semaine après la crise (non spécifique)

• Normales
• Maladie très rare avant 60 ans
• Sédimentation élevée dans
• Début subit avec atteinte de l’état général • La présence
Polymyalgia 90 % des cas
Rheumatica d’érosion signifie
• Myalgies des ceintures scapulaires et pelviennes
• Sérologies négatives une autre forme
• Réponse spectaculaire à la prednisone d’arthrite
• ANA positif (95 % des cas)
• Photosensibilité • Atteinte SNC • Si Anti-DNA positif : très
Lupus érythémateux • Arthrite non érosive
• Raynaud • Rash malaire spécifique
disséminé
• Pleuropéricardite • Atteinte rénale • Analyse d’urine perturbée si
atteinte rénale

 Les connectivites autres que le lupus (sclérodermie, polymyosite, dermatomyosite, connectivites mixtes) sont rares dans la
pratique de l’omnipraticien. Les sérologies spécifiques seront demandées devant un tableau compatible. En général, l’arthrite ne
domine pas le tableau clinique.
 Devant une arthrite aiguë persistant quelques semaines seulement, il faut toujours envisager la possibilité d’une arthrite virale
(hépatite B ou C, rubéole parcovirus B19, rubéole).
 La sarcoïdose peut être à une arthrite des genoux, des chevilles, des membres inférieurs ou à un érythème noueux.
6 Diagnostic différentiel selon l’âge

Chez l’enfant et l’adolescent

Les arthrites sont souvent oubliées dans les diagnostics différentiels des problèmes articulaires chez l’enfant.

 L’arthrite rhumatoïde juvénile appelée maintenant arthrite juvénile idiopathique est


de loin l’arthrite la plus fréquente :
- Il existe trois formes, soit une polyarthrite, une oligoarthrite ou une forme systémique,
- Le facteur rhumatoïde est presque toujours absent, mais les anticorps antinucléaires souvent présents.
 Le lupus érythémateux ainsi que la dermatomyosite peuvent survenir avant l’âge adulte. Les
autres connectivites sont très rares.
 Le purpura d’Henoch-Schönlein est une cause relativement fréquente de synovite chez l’enfant.
 L’arthrite est un diagnostic d’exclusion chez l’enfant. Il faut toujours éliminer une infection, une
maladie métabolique osseuse ou une maladie hématologique comme la leucémie.

Chez le jeune adulte

Les arthrites frappent souvent au début de l’âge adulte, en particulier, chez les femmes pour l’arthrite rhumatoïde et
le lupus et chez l’homme pour les arthrites axiales.
Arthrites les plus fréquentes :
 L’arthrite rhumatoïde;  Spondylarthropathies (arthrites axiales) : arthrite psoriasique, arthrites associées aux
 Sarcoïdose; maladies inflammatoires de l’intestin, syndrome de Reiter, spondylite ankylosante.
 Arthrite virale;

Les connectivites sont rares dans la pratique d’un omnipraticien. Les symptômes systémiques sont habituellement
prépondérants; les symptômes articulaires souvent ne sont pas l’élément qui domine le tableau clinique.

Chez l’adulte âgé

 L’arthrite rhumatoïde de la personne âgée est fréquente. À noter que le facteur rhumatoïde est souvent absent.
 La Polymyalgia Rheumatica peut être associée à des légères synovites des mains et des poignets ou des
arthralgies. Toutefois, l’atteinte des ceintures, des épaules et des hanches est l’élément essentiel du tableau.
 La pseudogoutte est relativement fréquente, bien que la présentation sous forme de monoarthrite ou d’oligoarthrite soit
la plus fréquente; le tableau clinique peut ressembler à une arthrite rhumatoïde, les articulations les plus fréquemment
touchées sont les genoux et les poignets.
 La goutte, après plusieurs années d’évolution, peut présenter un tableau polyarticulaire et atteindre même les
mains et les poignets, alors qu’initialement, elle est beaucoup plus fréquente aux membres inférieurs.

Crédits iconographiques : image de la main, page 1 : Encyclopédie familiale de la santé © Les Éditions Québec Amérique inc., 2010. Tous droits réservés.

Auteur : Dr Gilles Côté, M.D., omnipraticien, médecin-conseil, Agence de la santé et des services sociaux du Bas-Saint-Laurent.
Révision : Dre Isabelle Fortin, rhumatologue, CSSS de Rimouski-Neigette.
Référence :
- BOIRE, Gilles, Raisonner l’investigation en rhumatologie, Le Rhumatologue, Association des médecins rhumatologues du Québec,
novembre #6/2008, 8 p.
- BUDD, Ralph C., Gary S. FIRESTEIN, Mark C. GENOVESE, Edward D. HARRIS, Jr., Shaun RUDDY, John S. SERGENT et Clement B.
SLEDGE, Kelley’s Texbook of Rheumatology, Volume I, Seventh Edition, Elsevier Saunders, 2005, 1 916 p.
- HAZELTINE, Mark et Jean-Luc TREMBLAY, La consultation en rhumatologie : Quand et comment?, Le Rhumatologue, Association des
médecins rhumatologues du Québec, novembre 2006, 05, 8 p.
- TREMBLAY, Jean-Luc, L’examen musculosquelettique, Les Presses de l’Université de Montréal, 2009, 356 p.

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ou (418) 724-5231
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