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Si vis pacem, para bellum. Si tu veux la paix prépare la guerre.

La guerre est inscrite comme fondement de notre modernité, malgré le fait que la paix constitue un idéal social et politique qui traduit
non seulement une absence de perturbation, d’agitation ou de conflit, mais aussi un état de sécurité. Elle est une des ressources qui fait le plus défaut dans ce monde. La paix est en ce moment la
chose du monde la moins partagée alors qu’elle est, pour la plupart des États au monde, une condition sine qua non de la survie de l’humanité et de tout développement durable. Une des clés de la
paix réside dans la compréhension du rôle que joue le territoire comme source de conflit et de violence entre groupes. De toutes les questions qui déclenchent un conflit, les différends territoriaux ont
la plus forte probabilité de dégénérer en guerre, comme l’a déjà expliqué Lila dans son exposé guerre et territoire. Toutefois, la guerre n'est guère inévitable ; beaucoup dépend de la manière dont
les questions territoriales sont traitées. Plus important encore, le règlement des différends territoriaux et l'établissement de frontières mutuellement reconnues peuvent engendrer de longues
périodes de paix entre voisins, même si d'autres questions saillantes surgissent. On peut alors se demander dans quelle mesure paix et territoire sont liés.

Selon les territoires et leur histoire, la paix peut être perçue ou construite de différentes manières. Prenons des exemples concrets afin d’expliquer cette différence de perception.

À la bataille de Marignan en 1515, les suisses (Confédérés) connaissent une sanglante défaite face au roi François Ier. Ils concluent dès l’année suivante avec la France une paix perpétuelle qui
sera constamment renouvelée jusqu’à la Révolution française. C'est la fin d'une longue tradition guerrière qui avait valu aux montagnards suisses une réputation de redoutables et cruels
combattants avides de pillages. Malgré ou à cause de leur violence passée et de ces épreuves, ils vont s'accrocher à leur neutralité, ce qu'ils appellent « rester tranquille et silencieux », c'est-à-dire
ne pas intervenir dans les conflits étrangers. Elle leur permettra jusqu'à nos jours de se tenir à l'écart des guerres européennes et, plus important encore, de préserver la paix intérieure entre les
différents cantons. Pour eux, maintenir une paix durable dans le pays est plus important que de créer un système d’alliance avec d’autres pays.

En revanche, les membres de l’OTAN (organisation du traité de l’atlantique nord) ne sont pas du même avis. Ils préfèrent défendre les pays membres de cette alliance militaire plutôt que de rester
impuissant face à leur destruction.

Un autre point de vue encore peut être celui des anciennes colonies devenues indépendantes. Prenons l’exemple de l’Algérie. L'Algérie était une colonie de l'Empire français depuis 1830. Au
lendemain de la Seconde Guerre mondiale, ses revendications d'indépendance se font plus pressantes auprès du gouvernement français, qui refuse toute idée d'indépendance. Le 1er novembre
1954, la situation se détériore brutalement en Algérie. Le Front de Libération National organise une série d'attentats qui font huit morts. Cela marque le début de la lutte acharnée des algériens pour
obtenir leur indépendance. En 1962, au terme d’un conflit très violent de presque 8 ans, et surtout plus d’un siècle d’occupation coloniale, l’indépendance de l’Algérie est proclamée. Ici, un désir fort
d’indépendance a amené la population algérienne à laisser la paix de côté et à faire des sacrifices pour arriver à leurs fins.

La délimitation des espaces terrestres, maritimes ou aériens a toujours été un enjeu du droit international faisant l’objet des rivalités entre États. Le territoire se transforme et se recompose en
permanence entre continuité (les successions d’États par exemple) et fragmentation (les recherches d’indépendance des colonies par exemple). L’obsession du territoire constitue un défi majeur
pour la consolidation de la paix.

Signés en 1648 par la quasi totalité des puissances européennes, les traités de Westphalie mettent fin à la guerre de Trente Ans marquée par l'affrontement entre protestantisme et catholicisme.
Outre le remodelage territorial de l'Europe, ils posèrent les bases du système international organisé autour du principe de souveraineté, en vertu duquel chaque entité politique est reconnue comme
souveraine à l'intérieur de ses frontières. Ce modèle politique donne naissance au concept de l'État moderne, exerçant le monopole de la violence légitime sur son territoire et assurant la sécurité de
ses frontières par une armée nationale. Cependant, la définition des frontières européennes atteinte après la signature de ces traités n’a pas été de très longue durée. En effet, l’Europe ayant connu
d’autre guerres, elle a aussi connu d’autre paix et des signatures de nouveaux traités. Or souvent, les traités de paix présentent entre autres un remodelage des frontières en faveur du vainqueur,
influant donc sur le territoire.

Il est important de ne pas oublier la dangerosité de ces signatures de traités pour l’obtention de la paix. Comme nous pouvons le voir avec le traité de Versailles de 1919, certains traités de paix, par
leurs demandes trop orgueilleuses, peuvent amener à d’autres guerres par la suite. Il est même probable que ces nouvelles guerres soient plus violentes et féroces que la précédente, l’honneur du
perdant ayant été touché.

Qu'en est-il des considérations idéologiques, culturelles rattachées à ces territoires ? La paix peut être très difficile à obtenir lorsque la population craint pour la disparition de sa culture et ses
idéologies. En voici 2 exemples :

En 1947, sir Cyril Radcliffe pose pour la première fois le pied dans l’Empire britannique des Indes avec une mission : dessiner les nouvelles frontières des futurs Etats indépendants de la République
d’Inde et la République islamique du Pakistan. Cet avocat ne connaît pas ces régions, ne compte que sur une aide locale réduite et n’a que cinq semaines pour délimiter plus de 7 000 km de
frontières. Des régions culturellement uniformes comme le Pendjab, à l’ouest, ou le Bengale, à l’est, sont alors écartelées, des villages ou des champs coupés en deux par le seul coup de crayon
d’un novice étranger ayant comme seul souci celui de répartir les zones majoritairement musulmanes d’un côté et celles hindoues de l’autre. Cela entraîne l’une des plus grandes et meurtrières
migrations de l’histoire moderne, déplaçant 14 millions de personnes et coûtant la vie à plus d’un million d’autres. En apparence, la création de deux nations autonomes en 1947 était une victoire
pour celles et ceux qui aspiraient à l’autodétermination et allait amener une paix durable sur le territoire grâce au contentement de la population. Mais dans les faits, la séparation de territoires dont
les cultures et idéologies sont les mêmes et le mélange de territoires que la culture et les idéologies opposent déclenche des massacres entre les communautés et beaucoup d’affrontements
sanglants. Le sentiment d’appartenance à une culture et à un territoire ne doit pas être sous-estimé.

Pour finir cet exposé, parlons d’un sujet d’actualité. La guerre entre la Russie et l’Ukraine. Encore une fois, cette guerre est principalement due au territoire. La Russie réclame une partie du territoire
ukrainien et l’Ukraine refuse de reculer face à la puissance russe, car ces territoires sont des territoires ukrainiens. Pour se justifier, les deux disent que la population du territoire se sent plus
ukrainienne ou plus russe. La Russie ne reculera pas tant que l’Ukraine n’aura pas rendu ces territoires à la Russie, et l’Ukraine ne compte pas abandonner ses territoires aux mains des russes pour
la paix.

En somme, paix et territoires sont intimement liés, et ce depuis toujours et cela ne risque pas de changer, surtout avec l’ouverture de nombreux territoires à la mondialisation avec notamment
l’expansion des NTIC (Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication).

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