Le cynisme de Maldoror et ses regrets sont représentés par l’expression « Malheureusement ils sont
petits » (l.7). La présence de cet adverbe exprimant la déception dévoile peu à peu les intentions moroses
de Maldoror. Nous retrouvons la figure ironique du mendiant sur la tête duquel le pou s’épanouirait.
Ironie qui est exagérée avec la succession d’un champ lexical de l’analyse « observez » « microscope »
(l.6) mais aussi avec la personnification « un pou qui travaille » (l.6). Le lecteur se trouve ainsi en plein
discours absurde et ridicule orchestré par un scientifique aux expressions burlesques ou extravagantes
comme la métaphore « ces brigands de la longue chevelure » (l.7) ou encore la paraphrase « monde
lilliputien de ceux de la courte cuisse » (l.9) ; enfin, par une expression ironique qui tend le registre à son
paroxysme : « les aveugles n’hésitent pas à les ranger parmi les infiniment petits » (l.9-10). Toutes ces
expressions dévoilent une forme de mépris que porte le personnage de Maldoror sur l’humanité. En
mettant en avant la figure du pou à la force dérisoire, et en y incorporant une multitude de figures
hyperboliques, Maldoror accuse une certaine faiblesse et un certain ridicule de l’Homme. Ce passage est
riche en comparaisons antithétiques. Deux animaux font leur entrée, le cachalot et l’éléphant. Nous
connaissons les caractéristiques imposantes de ces créatures mais aussi leur supériorité physique face à
l’Homme. Lautréamont présente deux antithèses fortes : « Malheur au cachalot … contre un pou » (l.10)
et « L’éléphant se laisse caresser. Le pou, non » (l.11). Le pou est supérieur, radicalement au-dessus de
tout être vivant aux yeux de Maldoror. Supérieur par les convictions, supérieur par l’intelligence et
supérieur par la force. Le burlesque est aussi bien présent dans ce passage avec deux expressions : « Il
serait dévoré en un clin d’œil » (l.10) et « Il ne resterait pas la queue » (l.11). Par ailleurs, un éloge est fait
en l’honneur du pou caractérisé par un vocabulaire mélioratif qui s’accompagne de l’horreur de la
dévoration. Horreur qui est représentée avec la comparaison « Ils craqueront comme s’ils étaient à la
torture » (l.14). Plus que la simple conjonction « comme », la métonymie « s’ils étaient à la torture »
dissocie les doigts de l’Homme de son corps car ce ne sont pas les doigts qui sont torturés mais bien
l’être humain. Un avertissement, une mise en danger apparait « Gare à vous » (l.12). S’en suit une
expression burlesque mettant en avant le poil de la main « votre main est poilue » (l.12-13) pour finir par
une formule cynique composée « d’os et de chair » (l.13). Le champ lexical de l’organique est une
nouvelle fois présent pour fragiliser l’être humain. Nous le remarquons aussi dans la comparaison « La
peau disparaît par un étrange enchantement » (l.14).
Par l’avertissement et les figures comparatives, le Comte de Lautréamont pointe certaines
faiblesses de l’être humain et cherche à nous déstabiliser. L’omniprésence du champ lexical de
l’organique ainsi que l’omniprésence du pou semblent vouloir faire ressentir au lecteur le fourmillement
de la créature sur notre corps.
Ce texte est un témoignage de mépris envers l’humanité. Dans un premier temps, le discours élogieux qui
est porté autour du pou nous délivre un message fort : l’Homme ne mérite pas d’éloges et n’a le droit qu’à
des preuves de faiblesses et des accusations, bien qu’elles soient non fondées ou totalement burlesques. A
travers cette lecture, nous avons pu montrer que l’humain est un être faible et méprisable aux yeux de
Maldoror, que nous savons être une partie de la personnalité du poète. Nous pouvons rapprocher ce texte
des Caractères de LA BRUYERE dans lesquels l’auteur critique les défauts humains dans le but d’aider
les Hommes à se corriger.