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Université Mohammed V- Rabat Pre.

Hynd Ayoubi Idrissi


Faculté des Sciences Juridiques,
Economiques et Sociales

Elément : Droit patrimonial et successoral


Semestre 6
Complément de cours

Partie I : Droits patrimoniaux résultant du mariage (complément)

Chapitre I : La dot (déjà traité)


Chapitre II : La pension alimentaire (déjà traité)
Chapitre III : La gestion des biens acquis pendant le mariage en droit
marocain et comparé (déjà traité)
Chapitre IV : Les effets patrimoniaux de la dissolution du mariage par
divorce

Partie II : Droits patrimoniaux résultant de la filiation

Chapitre 1 : La prise en charge des enfants


Chapitre 2 : La gestion des biens des mineurs

1
Partie I : Droits patrimoniaux résultant du mariage (complément)

Chapitre I : La dot (déjà traité)


Chapitre II : La pension alimentaire (déjà traité)
Chapitre III : La gestion des biens acquis pendant le mariage en droit
marocain et comparé (déjà traité)

Chapitre IV: Les effets patrimoniaux de la dissolution du mariage par


divorce

Le divorce est la dissolution des liens du mariage exercée par l’époux et


l’épouse selon les conditions auxquelles chacun d’entre eux est soumis, sous
contrôle du juge et conformément au code de la famille.

Le code de la famille a introduit un nouveau mode de dissolution des liens du


mariage par le biais du divorce consensuel qui est à distinguer du divorce
moyennant compensation « Khol’» ou par le recours à la procédure de discorde.
La procédure de discorde épargne à la femme la procédure d’un divorce
judiciaire. Mais l’action pour discorde a pour fondement le règlement d’un
différend entre les époux rendant la vie conjugale impossible et le divorce pour
discorde n’est prononcé qu’après échec des tentatives de réconciliation des
arbitres et du tribunal.

Dans tous les cas, le tribunal statue sur les demandes de divorce dans un délai de
6 mois, ce qui constitue un apport considérable. De même les décisions
judiciaires de divorce sont insusceptibles de recours, dans leur partie relative à la
dissolution des liens du mariage.

Section 1 : Le divorce sous contrôle judiciaire

Le divorce sous contrôle judiciaire est la dissolution du pacte de mariage à la


demande de l’un des époux, selon des conditions propres à chacun d’eux, sous
contrôle de la justice.
Le code de la famille a soumis le divorce à l’autorisation préalable du tribunal.
En effet, quiconque veut divorcer doit demander l’autorisation au tribunal pour
le consigner par deux adouls habilités à cet effet, dans le ressort territorial du
tribunal dans lequel est situé le domicile conjugal, le domicile de l’épouse ou le
lieu d’établissement de l’acte du mariage, selon l’ordre précité1.

1-1. Les conditions du divorce

1
Art 79 du Code de la famille.

2
Le droit musulman ne prend en considération que le divorce émanant d’un mari
pubère. Le droit positif marocain se situe dans ce sillage, dans la mesure où
l’une des conditions du mariage est d’être pubère et sain d’esprit.

Pour que le divorce soit valable, il faut que le mari ait agit en pleine
connaissance de cause et en toute liberté.
Ainsi, l’art 90 du code de la famille dispose que ne peut être recevable, la
demande d’autorisation de divorce faite en état d’ébriété avancée, sous la
contrainte ou sous le coup d’une colère enlevant à la personne concernée le
contrôle de soi même, (il en était de même à l’art 49 du CSP).
De même l’art 91 du code de la famille dispose que le divorce par serment est
sans effet, (art 50 du CSP).
Le législateur a rétabli la répudiation sunnite en disposant dans son art 92 que
tout divorce associé à un nombre exprimé par la parole, par un signe ou par
l’écriture n’équivaut qu’un seul divorce (art 52 du CSP).

Pour être valable, le divorce doit concerner la femme régulièrement mariée ou


celle en retraite de continence consécutive à un divorce révocable .L’art 47 du
CSP énonçait que la formule de répudiation est sans effet si elle est prononcée
au cours d’une période menstruelle. Si la répudiation a lieu en cette période, le
juge oblige le mari de reprendre sa femme. Cette disposition n’a pas été reprise
dans le code de la famille.

1-2. Les formes de divorce :

Quiconque veut divorcer doit fournir au tribunal des informations sur l’identité,
la profession et l’adresse des conjoints et, le cas échéant, le nombre d’enfants,
leur âge, leur état de santé, leur situation scolaire, en joignant à la demande
l’acte de mariage ainsi que les éléments de preuve établissant la situation
matérielle et les obligations financières de l’intéressé2.

Le tribunal convoque les époux pour une tentative de réconciliation. Si l’époux


reçoit personnellement la convocation et ne se présente pas, il est considéré
comme ayant renoncé à sa demande de divorce. Si l’épouse reçoit
personnellement la convocation et ne se présente pas sans communiquer
d’observations par écrit, le tribunal la met en demeure par l’intermédiaire du
ministère public, qu’à défaut de se présenter il sera statué sur le dossier. Si le
mari prétend que l’adresse de l’épouse est inconnue, le tribunal recourt à l’aide
du ministère public pour établir la vérité. S’il est établi que le mari fait de

2
Art 80 du Code de la famille.

3
fausses déclarations, les dispositions de l’art 361 du code pénal lui sont
appliquées3.

Lorsque les deux époux se présentent, les discussions ont lieu en chambre de
conseil, y compris l’audition des témoins et de toute autre personne que le
tribunal jugerait utile d’entendre. Le tribunal doit prendre toutes les dispositions
y compris la désignation de deux arbitres, d’un conseil de famille ou de
quiconque qu’il estime qualifié pour tenter de réconcilier les conjoints. Si les
époux ont des enfants, le tribunal entreprend deux tentatives de réconciliation,
espacées d’une période minimale de 30 jours. Si les tentatives de réconciliation
entre les époux aboutissent, un procès verbal est établi et sera conservé dans le
dossier des intéressés4. Cette procédure garantie le droit de la femme à
l’information.

Si les tentatives de réconciliation échouent, le tribunal fixe un montant que


l’époux dépose à la caisse du tribunal dans un délai maximum de 30 jours pour
s’acquitter des droits dus à l’épouse et aux enfants

Les droits dus à l’épouse comportent : le reliquat de la dot s’il y a un


arriéré, la pension relative à la retraite de continence, le logement dans le
domicile conjugal ou en cas de nécessité, dans un logement convenant à
l’épouse et à la situation financière du mari. En cas de difficulté, le tribunal
fixe le montant des frais du logement qui sera déposé à la caisse du tribunal.
Les droits dus à l’épouse comportent également le don de consolation, qui
sera évalué en fonction de la durée du mariage, de la situation financière de
l’époux, des motifs du divorce et du degré d’abus avéré dans l’exercice de
ce droit par l’époux.5

Les droits dus aux enfants dont la charge incombe au père sont fixés
conformément aux articles 168 et 190 du code de la famille en tenant
compte de leurs conditions de vie et de leur situation scolaire avant le
divorce6.

Si l’époux ne dépose pas le montant prévu dans les délais impartis, il est
censé avoir renoncé à son intention de divorcer, et le dossier sera conservé.

Aussitôt le montant exigé est déposé par l’époux, le tribunal l’autorise à


enregistrer le divorce auprès des deux adouls7.

3
Art 81 du Code de la famille.
4
Art 82 du Code de la famille.
5
Arts 83, 85 et 85 du Code de la famille.
6
Art 85 du Code de la famille
7
Art 87 du Code de la famille.

4
Aux termes de l’art 88 du code de la famille, après réception d’une copie de
l’autorisation enregistrée, le tribunal rend une décision motivée comprenant :
1/ les noms des époux, les dates et lieux de naissance et de mariage, le domicile
ou la résidence des époux ;
2/ un résumé des allégations des deux parties, leurs demandes, les preuves
avancées, les démarches entreprises et les conclusions du ministère public ;
3/ la date d’enregistrement du divorce ;
4/ si l’épouse est enceinte ou non ;
5/ les noms des enfants, leurs âges, le titulaire de la garde (hadana) et
l’organisation du droit de visite ;
6/ la fixation des droits dus à l’épouse et aux enfants conformément aux arts
84 et 85 du code de la famille et la rémunération de la garde après
l’écoulement de la retraite de continence.
La décision du tribunal peut faire l’objet d’appel dans les formes
ordinaires.

1-3. Les effets du divorce sous contrôle judiciaire

Le droit marocain se situant dans le sillage du droit musulman distingue le


divorce révocable et le divorce irrévocable.

- Le divorce révocable :

Le divorce révocable entraîne pour la femme la retraite de continence. Le mari


perd tout droit sur le corps de sa femme, mais le lien matrimonial n’est pas
rompu, il est simplement relâché, ce qui signifie que le mariage continue à
produire ses effets, tels : la conservation par la femme du droit à l’entretien,
la vocation héréditaire réciproque, etc.
Pendant la retraite de continence, le mari peut revenir sur sa décision et rétablir
le lien matrimonial.
Il faut que la volonté de reprendre sa femme par son époux soit claire. Le mari
peut reprendre sa femme sans nouvelle dot, ni intervention du wali.

Toutefois, le code de la famille a introduit une nouvelle disposition pour la


révocation du divorce en imposant à l’époux de faire constater cette reprise par
deux adouls qui informent immédiatement le juge8.
De même le code de la famille a mis fin au droit de reprise de l’épouse par
l’époux pendant la retraite de continence, dans la mesure où le juge, avant
d’homologuer l’acte de reprise doit convoquer l’épouse pour l’en informer. Si

8
Art 124 du Code de la famille.

5
elle refuse la reprise de la vie conjugale, elle peut recourir à la procédure de
discorde (Chiquaq).
Cette mesure met fin à la contrainte exercée sur la femme et consacre sa liberté
de choisir la reprise des liens matrimoniaux ou de demander leur dissolution
définitive.

L’acte de divorce doit mentionner : la date et le numéro de l’autorisation du


divorce ; le nom, la filiation, le domicile, le numéro de la carte d’identité de
chacun des époux. L’acte de répudiation doit se référer à l’acte de mariage en
indiquant ses numéro, folio et date ; doit indiquer la nature du divorce et s’i l
s’agit de la première, la deuxième ou la troisième9.

L’acte établissant le divorce est propriété de l’épouse et doit lui être remis dans
un délai ne dépassant pas quinze jours. Le mari a droit à une copie10.

Le tribunal envoie un extrait du document de divorce, de reprise, ou du


jugement du divorce, ou de l’annulation du mariage à l’officier de l’état civil du
lieu de naissance des époux accompagné d’une attestation de remise de ce
document dans le délai des 15 jours. L’officier d’état civil fait mention de ces
éléments en marge de l’extrait de naissance des époux. Si les époux ne disposent
pas de lieu de naissance au Maroc, l’extrait est envoyé au Procureur du Roi du
tribunal de première instance de Rabat.

- Le divorce irrévocable :

Le lien matrimonial se trouve rompu, si au jour où la retraite de continence


prend fin, le mari n’a pas exercé son droit de reprise. Toutefois, la retraite de
continence ne s’impose que si le mariage est consommé. La femme
irrévocablement divorcée a droit au don de consolation et aux droits qui lui
sont dus (voir supra).

Section 2 : Le droit d’option « Tamlik »

En droit musulman, le principe est que seul le mari peut répudier. Mais le mari
peut déléguer ce pouvoir à la femme (Tafwid). Il peut également accorder à son
épouse le droit de prononcer elle-même sa répudiation (Tamlik).
Ces procédés ont été retenus par les jurisconsultes, même si des oppositions ont
été soulevées, quant à leur durée et quant à leur caractère provisoire ou définitif.
9
Art 139 du Code de la famille.
10
Art 140 du Code de la famille.

6
Pour les malékites, le mari peut revenir sur sa décision dans le cadre de la
délégation du pouvoir de répudiation. Le Tamlik peut être absolu ou stipulé
dans l’acte du mariage s’il est lié à une condition suspensive : par exemple,
clause de monogamie, etc.

En droit positif marocain, le droit d’option figurait dans l’art 44 du CSP qui
disposait que la répudiation est la dissolution des liens du mariage prononcée par
« l’épouse, lorsque la faculté lui a été donnée », mais dans la pratique, les juges
s’abritaient souvent derrière l’art 82 du CSP qui disposait que « tous les cas qui
ne pourront être résolus en application du présent code, seront réglés en se
référant à l’opinion dominante ou à la jurisprudence constante dans le rite
malékite ». Toutefois, l’Abrégé de Khalil Ibn Ishaq du rite malékite, énonce que
le mari peut déléguer la répudiation à son épouse, cette délégation peut être
absolue ou liée à une condition.

Le code de la famille dans son art 89 stipule que si l’époux a consenti au droit
d’option de l’épouse, celle-ci peut l’exercer en saisissant le tribunal d’une
demande de divorce. Le tribunal s’assure que les conditions du droit d’option
sont réunies et entreprend une tentative de réconciliation. Si la tentative de
réconciliation échoue, le tribunal autorise l’épouse à demander la
consignation du divorce et statue sur ses droits et, le cas échéant, sur ceux
des enfants, conformément à l’art 84 du code de la famille. Le mari ne peut
empêcher son épouse d’exercer son droit d’option, si celui-ci lui a été
consenti.

Section 3 : Le divorce moyennant compensation (Khol’) : divorce par


rachat

Le divorce par rachat est un mode de dissolution du mariage par accord des
conjoints, en vertu duquel, le mari accepte de divorcer de sa femme en
contrepartie d’une compensation qu’elle lui verse. Ce mode de dissolution
appelle l’étude des conditions relatives au consentement des époux ; à la
compensation et aux effets du Khol’.

1/ Les conditions du consentement des époux :

La capacité des époux, si la femme est mineure quant à ses biens, le divorce est
acquis et la mineure n’est tenue de se libérer de la contrepartie qu’avec l’accord

7
du tuteur chargé de l’administration de ses biens. La femme doit être saine
d’esprit et doit donner librement son consentement.
La femme n’a pas à chercher à acquérir sa liberté moyennant compensation, si
elle est fondée à demander le divorce judiciaire.

2/ Les conditions relatives à la compensation :

Tout ce qui peut légalement faire l’objet d’une obligation peut valablement
servir de contrepartie en matière de divorce moyennant compensation11.
Si la femme est pauvre, toute contrepartie sur laquelle les enfants ont un
droit est interdite. Toutefois, si la mère qui en contrepartie a accepté de
prendre en charge la pension alimentaire de ses enfant devient insolvable, la
pension redevient à la charge du père, sous réserve de demander à la mère
la restitution de ce qu’il a versé12.

Le code de la famille a introduit une innovation qui aura le mérite de


limiter les effets négatifs d’un Khol’ consenti à des conditions onéreuses.
Ainsi, l’art 120 dispose que si les époux conviennent du principe du divorce
moyennant compensation (Khol’), sans se mettre d’accord sur la
contrepartie, l’affaire est portée devant le tribunal en vue d’une
réconciliation. Si la tentative de réconciliation n’abouti pas, le tribunal
ordonne la mise en exécution du divorce moyennant compensation après en
avoir évalué la contrepartie, en prenant en considération le montant de la
dot, la durée du mariage, les raisons justifiant la demande ainsi que la
situation matérielle de l’épouse. Si l’épouse persiste à demander le Khol’ et
que l’époux n’y consent pas, elle peut recourir à la procédure de discorde.

Les effets personnels du Khol’ sont ceux d’un divorce irrévocable. Il s’agit
d’une dissolution irrévocable des liens du mariage.

Section 4 : Le divorce par consentement mutuel

Il s’agit d’un mode de dissolution du mariage sous contrôle du juge institué par
le code de la famille, en vertu de l’art 114. Les époux peuvent consentir d’un
commun accord de mettre fin à leur relation conjugale avec ou sans conditions,
pourvu que celles-ci ne soient pas contraires aux dispositions du code de la
famille et ne portent pas préjudice aux intérêts des enfants. En cas de désaccord,
les époux le portent à la connaissance du juge qui tentera de les réconcilier,
autant que possible, s’il n’y parvient pas, le juge ordonne la consignation et
l’enregistrement du divorce.
11
Art 118 du Code de la famille.
12
Art 119 du Code de la famille.

8
Si le code de la famille n’a pas renvoyé aux articles 84 et 85 du CF portant
sur les droits dus à l’épouse et ceux dus aux enfants, l’analyse des
dispositions de l’article 84 montrent que la femme y a droit, même s’il
s’agit d’un divorce par consentement mutuel, dont la finalité est d’épargner
aux époux les longues procédures ; de préserver de meilleures relations, en
cas de présence d’enfants.
Ce mode de dissolution de mariage paraît le plus approprié quand l’un des
époux ou les deux résident à l’étranger.

De même, le divorce par consentement mutuel peut être assorti de conditions qui
peuvent porter sur la renonciation à la dot ou aux frais de logement ou au don de
consolation.

Quand il est soumis à des conditions, le divorce par consentement mutuel


s’apparente au divorce par compensation, à la différence qu’il peut être demandé
par l’un ou l’autre époux.

Section 5 : Divorce pour discorde « Chiquaq »

Le divorce pour discorde est un nouveau mode de dissolution du mariage qui a


pour fondement, la recherche d’une solution à un profond différend entre les
époux qui risque de mettre fin à la vie conjugale et à la vie de famille.
A l’origine, il était conçu comme un mode de réconciliation par excellence, par
le recours à deux arbitres qui doivent diligenter l’ensemble des moyens
nécessaires en vue de ramener les deux époux à de meilleurs sentiments.
Or, au regard de la souplesse de la procédure, le divorce pour discorde est en
tête des modes de divorce.
C’est un divorce irrévocable qui peut être intenté à l’initiative aussi bien de
l’époux, de l’épouse ou des deux.

Outre le renvoi de l’article 97 du CF aux dispositions des articles 84 et 85


du CF, la réparation du préjudice subi par l’époux lésé est également
prévue en tenant compte de la responsabilité de chacun des époux.
Le dédommagement peut être prononcé même au bénéfice de l’époux
demandeur de divorce, s’il est victime d’un préjudice avéré.

Section 6 : Le divorce judiciaire :Tatliq

L’épouse est fondée à demander le divorce judiciaire pour l’une des raisons
suivantes :

9
- le manquement de l’époux à l’une des conditions de l’acte du mariage ;
-le préjudice ;
- le défaut d’entretien ;
- l’absence ;
- les vices rédhibitoires ;
- le serment de continence ou le délaissement (art 98 du code de la famille).

Le pouvoir d’appréciation du juge en matière du divorce judicaire est très


important. La requête en divorce est présentée à la section de la justice de la
famille du lieu de domicile des époux, à défaut selon l’ordre précité par le code
de la famille.

Après enrôlement de la requête, le juge convoque les époux pour une tentative
de réconciliation sauf dans le cas de l’absence.
Si la réconciliation a lieu, le tribunal rend une ordonnance la constatant, laquelle
met fin à la procédure.
Si la réconciliation n’a pas été possible ou si après convocations demeurées
infructueuses, les époux ou l’un d’eux n’ont pas comparu, le tribunal rend une
ordonnance de non réconciliation et autorise l’époux demandeur à poursuivre la
procédure.

Le tribunal statue, le cas échéant, sur les mesures provisoires et


conservatoires relatives à l’entretien de la femme, le domicile, le droit des
enfants, la garde de ces derniers et les objets mobiliers qui se trouvent dans
la maison. Cette ordonnance est exécutoire sur minute, nonobstant toutes
voies de recours.

En cas d’instance de divorce et si la cohabitation s’avère impossible, le


tribunal prend des mesures provisoires qu’il estime convenir à la femme et
aux enfants, et ce de sa propre initiative ou sur requête, en attendant le
jugement rendu dans l’affaire. Ces mesures concernent également le choix
du domicile chez l’un des parents de l’époux ou de l’épouse. Ces
dispositions sont exécutoires sur minute par voie du ministère public. Dans
tous les cas, l’obligation d’entretien demeure à la charge du mari.

5-1. Le divorce pour défaut d’entretien :

L’épouse aura la faculté de demander le divorce pour défaut d’entretien


conformément aux cas et dispositions suivantes, selon les dispositions de l’art
102 du code de la famille :
a/ si l’époux dispose de biens permettant d’assurer l’entretien de son
épouse, le tribunal peut y recourir à cette fin et ne donne pas en
conséquence suite à la demande de divorce ;

10
b/ en cas d’incapacité financière, le tribunal fixe, selon les circonstances à
l’époux, un délai ne dépassant pas 30 jours pour procéder à l’entretien, à
défaut le divorce est prononcé, sauf en cas de force majeure ou de
circonstances exceptionnelles ;
c/ le tribunal prononce le divorce, séance tenante, si l’époux refuse
d’assumer l’entretien de son épouse sans prouver son incapacité financière.

Ces dispositions s’appliquent également à l‘époux absent s’il est joignable. Si le


lieu du mari est inconnu, le tribunal s’assure de l’impossibilité de joindre le mari
avec l’aide du ministère public ainsi que du fondement de la demande de
l’épouse et statue sur la demande à la lumière des résultats de l’enquête et des
éléments du dossier13.

Le divorce pour défaut d’entretien est révocable car l’époux a le droit de


reprendre sa femme pendant la retraite de continence si elle est d’accord,
s’il justifie des moyens d’existence et démontre sa volonté d’assurer son
obligation d’entretien vis-à-vis de sa femme.

En effet l’art 122 du code de la famille dispose que « tout divorce prononcé par
le juge est irrévocable, à l’exception de celui qui résulte du serment de
continence ou du défaut d’entretien ».

5-2. Le divorce pour manquement à l’une des conditions de l’acte du


mariage et pour préjudice :

Aux termes de l’art 99 du code de la famille, est considéré comme un préjudice


justifiant le divorce, tout manquement à l’une des conditions de l’acte du
mariage. Est considéré comme préjudice justifiant le divorce, tout acte ou
comportement infamant émanant de l’époux ou contraires aux bonnes mœurs
portant un dommage matériel ou moral à l’épouse, la mettant dans
l’impossibilité de continuer la vie conjugale.

Le préjudice subi est établi par tous les moyens de preuve, y compris la
déposition des témoins qui seront entendus par le tribunal dans la chambre de
conseil. Si l’épouse ne parvient pas à prouver le préjudice mais persiste à
demander le divorce, elle peut recourir à la procédure de désunion14.

Dans le cas où le divorce est prononcé pour cause de préjudice subi, le


tribunal peut fixer, dans le même jugement le montant de l’indemnité due
au titre du préjudice.
13
Art 103 du Code de la famille.
14
Art 100 du Code de la famille.

11
Ces dispositions du code de la famille permettent de renforcer le droit de la
femme à demander le divorce pour préjudice subi : femmes battus, abandonnées,
etc.

Le divorce pour préjudice subi est irrévocable.

5-3. Le divorce pour absence du mari :

Il faut que l’absence dure plus d’un an et que le lieu où se trouve le mari soit
connu. L’absent signifie la personne que l’on sait toujours vivante. L’absence du
mari porte préjudice à la femme et cette dernière est fondée à demander le
divorce même si le mari a laissé des biens pouvant servir à son entretien.
Si des correspondances peuvent parvenir au mari absent, le tribunal l’informe de
la demande de divorce, en l’avisant que le divorce sera prononcé s’il ne revient
pas résider avec sa femme ou s’il ne la fait pas venir auprès de lui15.
Si des correspondances ne peuvent parvenir au mari absent, le tribunal aidé du
ministère public prend toutes les dispositions pour faire parvenir la mise en
demeure à l’époux absent, y compris la désignation d’un curateur. Si le mari ne
revient pas, le divorce sera prononcé.
Le divorce pour absence de mari est irrévocable.

5-4. Le divorce pour délaissement :

Lorsque le mari délaisse son épouse et n’accomplit plus ses devoirs intimes,
celle-ci est fondée à saisir le juge qui fixera au mari un délai de quatre mois ;
passé ce délai et si l’époux ne revient pas à résipiscence, le divorce est prononcé
par le juge.
Le divorce pour délaissement est révocable à l’instar du divorce pour défaut
d’entretien.

5-5. Le divorce pour vices rédhibitoires :

Sont considérés comme vices rédhibitoires affectant la vie conjugale et fondant


la demande du divorce :
- les vices empêchant les relations conjugales ;
- les maladies graves pouvant porter atteinte à l’autre époux et dont la guérison
ne peut intervenir dans un délai d’un an.

Pour que la demande de divorce de l’un des époux pour vices soit acceptée, il
faut que :

15
Art 104 du Code de la famille.

12
- le demandeur ignore l’existence de ce vice avant la conclusion du mariage ;
- le demandeur soit incapable de continuer la vie conjugale s’il apprend que la
guérison est impossible.

L’époux qui a eu connaissance des vices affectant son épouse avant la


consommation du mariage peut la répudier sans être tenu au paiement de la dot.
Si le mari a été induit en erreur, il peut réclamer le remboursement de la dot.

Si l’époux a eu connaissance des vices avant l’établissement de l’acte du


mariage et qu’il a répudié sa femme avant la consommation du mariage, cette
dernière a droit à la moitié de la dot. Il sera fait appel à des médecins spécialistes
aux fins d’obtenir tous les éclaircissements utiles sur le vice ou la maladie
allégés.
Le divorce prononcé par le juge pour vices rédhibitoire est irrévocable et
définitif.

Concernant le divorce judiciaire, l’article 113 CF renvoie aux articles 84 85


pour statuer sur les droits dus à l’épouse et ceux dus aux enfants, outre les
dédommagements qui peuvent être prononcés dans certains cas, tel le
divorce pour préjudice (art 101 CF).

13
Partie II : Droits patrimoniaux résultant de la filiation

Chapitre 1 : La prise en charge des enfants


Chapitre 2 : La gestion des biens des mineurs

La filiation est le lien de consanguinité qui lie l’enfant à ses parents biologiques.
Elle peut être légitime ou naturelle.
La filiation naturelle n’a d’existence que vis-à-vis de la mère et ne crée d’effets
juridiques que vis-à-vis de cette dernière en raison des liens naturels qui lient
l’enfant à sa mère.

La filiation adoptive n’existe pas en droit marocain et n’entraîne aucun effet de


la filiation légitime. Toutefois la Kafala d’un enfant entraîne des effets
patrimoniaux analogues à ceux issus de la filiation.

L’enfant né pendant le mariage, dans un délai minimum de 6 mois depuis la


conclusion du mariage ou 1 an maximum après la dissolution des liens de
mariage bénéficie d’une présomption de paternité. Cette présomption ne peut
être désavouée que par une décision judiciaire.

La filiation paternelle découle :


- des rapports conjugaux,
- de l’aveu du père,
- des rapports par erreur.
L’établissement de la filiation pour grossesse pendant la période des fiançailles,
sous les conditions prévues par l’art 156 du CF, est une application expresse de
la filiation pour rapports par erreurs.

L’établissement de la filiation entraine des obligations patrimoniales à l’égard


des enfants.

Chapitre 1/ La prise en charge des enfants

14
La prise en charge des enfants comprend la pension alimentaire, le logement, le
salaire de l’allaitement ainsi que le salaire de la garde, à la suite d’un divorce
irrévocable.

La garantie d’un logement décent à l’enfant soumis à la garde est une obligation
distincte du montant de la pension alimentaire16. Cette disposition du code de la
famille met un terme aux problèmes que rencontrait la femme divorcée qui se
trouvait expulsée avec ses enfants du logement après la fin de la retraite légale.

A/ L’allaitement :

Pendant le mariage et à la suite d’un divorce révocable, la mère ne peut


prétendre à une rémunération, car elle a droit à une pension alimentaire qui
prend en charge les dépenses inhérentes aux besoins de l’enfant.
Le salaire dû pour l’allaitement de l’enfant est à la charge de la personne à qui
incombe l’entretien de ce dernier17.

Les malékites considéraient qu’en cas d’indigence du père, la nourrice qui


s’offre gratuitement pour allaiter l’enfant est préférée à la mère qui demande un
salaire. L’allaitement doit néanmoins avoir lieu au domicile de la mère.

B/ La pension alimentaire :

Le droit de l’enfant à l’entretien découle des obligations liées à l’exercice de la


puissance paternelle et subsiste, donc, après la dissolution du mariage.
Le père doit subvenir aux besoins de ses enfants en bas âge ou incapables de se
procurer des ressources.

Le code de la famille a maintenu le droit à la pension alimentaire à l’âge de la


majorité légale pour les deux sexes et à l’âge de 25 ans s’ils poursuivent des
études. Il a également spécifié que pour la fille, la pension dure jusqu’à ce
qu’elle gagne sa vie ou qu’elle se marie. De même, l’obligation de servir une
pension à ses enfants incapables de gagner leur vie ou atteints d’un handicap
demeure à la charge du père, sans limite d’âge18.

Le montant de la pension alimentaire comporte la nourriture, les vêtements, les


soins médicaux et tout ce qui est considéré comme nécessaire ainsi que la

16
Art 171 du Code de la famille.
17
Art 201 du Code de la famille.
18
Art 198 du Code de la famille.

15
scolarisation19 . Le logement des enfants doit être assuré indépendamment des
frais inhérents à la pension alimentaire.20

Le montant de la pension alimentaire est apprécié selon les moyens du débiteur,


la situation du créancier, le niveau des prix ainsi que les usages du milieu social
du créancier21.

Les arrérages de la pension alimentaire sont payés aux enfants à partir de la date
où le père s’est refusé à leur fournir des subsides22. Il est statué en matière de
pension alimentaire dans un délai maximum d’un mois23.
Le Maroc s’est rallié à la position hanéfite en obligeant la mère qui a des biens
de pourvoir aux besoins de ses enfants, si le mari est totalement ou partiellement
incapable d’assurer l’entretien, jusqu’à ce qu’il revienne à meilleure fortune24.
Le montant de la pension alimentaire, les modalités de paiement ainsi que les
garanties sont fixées par le tribunal25.

Le jugement ordonnant la pension alimentaire demeure en vigueur jusqu’à son


remplacement par un autre jugement ou la déchéance du bénéficiaire de son
droit à la pension alimentaire.
Aucune demande pour obtenir une augmentation ou une diminution de la
pension alimentaire ne sera recevable, sauf circonstances exceptionnelles, avant
l’écoulement d’un an.

Le défaut d’entretien des enfants par la personne à qui incombe l’obligation de


prise en charge, pour une durée d’un mois ou plus, sans raisons valables peut
entraîner des poursuites pour délit d’abandon de famille (arts 479 à 483 CP).

En droit français, on parle de l’obligation d’entretien qui incombe aux deux


parents, en vertu de l’autorité parentale qui a succédé à « la puissance
paternelle » par la loi, n°70-459 du 4 juin 1970. La loi n°2002-305 du 4 mars
2002 relative à l’autorité parentale a renforcé l’exercice commun de l’autorité
par les deux parents.
L’obligation d’entretien s’impose aux deux parents du seul fait de
l’établissement du lien de filiation « de nourrir, entretenir et d’élever leur
enfant » (art 203 Code Civil). Cette obligation s’impose aux parents
indépendamment de l’exercice de l’autorité parentale et s’étend de la naissance

1919
Art 189 du Code de la famille.
20
Art 168 du Code de la famille.
21
Art 189 du Code de la famille.
22
Art 200 du Code de la famille.
23
Art 190 du Code de la famille.
24
Art 199 du Code de la famille.
25
Art 191 du Code de la famille.

16
jusqu’à ce que l’enfant soit apte à assurer sa subsistance (art 371-2 al 2 du Code
Civil).
Si la filiation n’est pas établie, l’enfant ne bénéficie pas de l’obligation
d’entretien mais peut exercer une action aux fins de subsides à l’encontre du
père présumé (art 342 CC).
Enfin l’obligation d’entretien peut être demandée, même longtemps après la
cessation de son versement, contrairement à l’obligation alimentaire où il est
traditionnellement affirmé que « les aliments ne s’arréragent pas ».

C/ Les effets patrimoniaux de la Kafala


La Kafala n’établissant pas de lien de filiation, n’entraîne aucun droit de
succession entre l’auteur de la Kafala et l’enfant.

A ce titre l’art 149 du code de la famille énonce que l’adoption est


juridiquement nulle et n’entraîne aucun effet de la filiation. Quant à l’adoption
dite de gratification ou testamentaire « Tanzil » par laquelle une personne est
placée au rang d’un héritier de premier degré, n’établit pas la filiation paternelle
et suit les règles du testament, c'est-à-dire ne dépassant pas le tiers de sa
succession, sauf accord des héritiers.

Aussi, si la personne exerçant la Kafala décide de faire bénéficier l’enfant pris


en charge d’un don, ou d’un legs ou du Tanzil ou d’une aumône, le juge des
tutelles de la circonscription du lieu de résidence de l’enfant veille à
l’élaboration du contrat prévu à cette fin et à la protection des droits de l’enfant.

17
Chapitre II : La gestion des biens des mineurs

Juridiquement incapable, le mineur est titulaire de droits patrimoniaux quand il


reçoit des biens en héritage ou bénéficie de libéralités ou perçoit des indemnités.
La gestion des biens du mineur, en raison de son incapacité, est exercée sous le
régime de la représentation légale.

La représentation légale est le procédé juridique par lequel une personne agit au
nom et pour le compte d’une personne qu’elle représente.

La représentation peut être légale, c’est le cas du tuteur qui va représenter les
intérêts d’un mineur ou d’un interdit pour démence ou prodigalité par exemple.
Les incapables et ceux qui sont partiellement incapables sont soumis, selon les
cas, aux règles de la tutelle paternelle ou maternelle, testamentaire ou dative.

La représentation peut être conventionnelle quand elle est exercée par le canal
d’un mandat (l’avocat). La représentation peut également être judiciaire, c’est le
cas par exemple de l’autorisation accordée à un époux d’agir au nom de l’autre.

La capacité est la possibilité pour un individu d’accomplir légalement les actes


de la vie juridique. C’est un droit inhérent à chaque personne, mais certaines
personnes ne jouissent pas de ce droit, elles sont incapables.

Ainsi, l’art 210 du code de la famille énonce que toute personne ayant atteint
l’âge de majorité jouit de la pleine capacité pour exercer ses droits et assumer
ses obligations, à moins qu’un motif quelconque établi ne lui limite ou ne lui
fasse perdre sa capacité.

L’âge de la majorité légale est fixé à 18 années grégoriennes révolues.

18
Section 1 : Typologie des incapacités

Les incapacités peuvent être classées de différentes manières:


1/ l’incapacité naturelle qui résulte d’un état de fait qui la rend évidente :
minorité, démence, prodigalité etc. ou l’incapacité arbitraire qui résulte d’une
décision de loi.

2/ Incapacité de protection et incapacité de déchéance :


A/ Incapacité de protection : est édictée par la loi pour protéger la personne
elle-même, jusqu’à ce qu’il soit apte d’accomplir les actes de la vie juridique.
Ex : Incapacité qui frappe le mineur, le dément, le prodigue.
B/ Incapacité de déchéance : c’est l’incapacité qui frappe des personnes qui
occupent une place en bas de l’échelle sociale (esclave, condamné à mort), soit
ceux qui ont enfreint les règles morales et religieuses (apostasie), soit les
personnes qui ont commis de lourdes fautes de gestion de leur patrimoine dont
la déchéance a été prononcée pour ne plus nuire à eux-mêmes ou aux autres (la
faillite).

3/ Incapacité Générale et incapacité spéciale :


A/ l’incapacité générale signifie que l’individu qui en est frappé ne peut
accomplir aucun acte de la vie juridique : qu’il soit de jouissance ou d’exercice.
B/ Incapacité spéciale concerne les personnes capables mais dont certains actes
leur sont interdit : état de dernière maladie.

4/ Incapacité d’exercice et Incapacité de jouissance :


A/ Incapacité d’exercice : c’est le fait d’être titulaire d’un droit mais qui ne
peut être exercé que par l’intermédiaire d’un représentant ou avec son assistance
(minorité, etc..).
B/ Incapacité de jouissance : C’est le cas d’une personne ne pouvant
légalement être titulaire d’un droit (ex : naturalisé, étranger, etc.).

L’incapacité d’exercice peut avoir deux causes : la minorité et l’aliénation


mentale.
Par contre la capacité d’exercice est seulement limitée dans les cas
suivants :
- l’enfant qui, ayant atteint l’âge de discernement, n’a pas atteint celui de la
majorité ;
- le prodigue ;
- le faible d’esprit.

Section 2 : La minorité

19
2-1. Dispositions générales

Sont considérés mineurs, les personnes qui n’ont pas atteint l’âge de la majorité,
fixé à 18 ans révolus (art 209).
Le mineur est frappé d’incapacité d’exercice, il est soumis au régime de la
tutelle. Toutefois, il existe plusieurs degrés dans la minorité.
Ainsi, l’enfant est doué de discernement lorsqu’il a atteint l’âge de 12 ans
grégoriens révolus26.

Lorsque le mineur atteint l’âge de seize ans, il peut demander au tribunal de lui
accorder l’émancipation. Le représentant légal peut demander au tribunal
d’émanciper le mineur âgé de 16 ans s’il a constaté qu’il est doué de bon sens.
La personne émancipée entre en possession de ses biens et acquiert sa pleine
capacité concernant la gestion et la disposition de ses biens. Mais l’exercice des
droits extrapatrimoniaux demeure soumis aux textes qui les régissent.

Le mineur doué de discernement peut prendre possession d’une partie de ses


biens pour en assurer la gestion à titre d’expérience. L’autorisation est accordée
par le représentant légal ou par décision du juge des tutelles, à la demande du
tuteur testamentaire ou du tuteur datif ou du mineur.

Le juge des tutelles peut annuler cette autorisation sur demande du tuteur
testamentaire ou datif, ou du ministère public ou d’office en cas de mauvaise
gestion.

Les actes à titre onéreux passés par le mineur doué de discernement sont
subordonnés à l’autorisation du tuteur. Ce dernier les ratifie ou refuse suivant
qu’ils représentent ou non un intérêt certain pour le mineur.

Le mineur autorisé à gérer une partie de ses biens est considéré pendant la
période d’expérience, comme ayant pleine capacité pour agir dans la limite de
l’autorisation qu’il a reçue et ester en justice à propos des actes de sa gestion.

2-2. Les formes de la tutelle

On distingue la tutelle légale, la tutelle testamentaire et la tutelle dative.

2-2-1. La tutelle légale :


En droit musulman, l’enfant est soumis à la tutelle légale dès sa naissance. Elle
est exercée par le père ou par le cadi. Depuis 1974, le cadi est remplacé par le

26
Art 214 du Code de la famille.

20
juge des tutelles. Le père exerce la tutelle sur la personne et sur les biens du
mineur incapable jusqu’à sa majorité.
La tutelle légale est une charge obligatoire pour le père tant qu’il n’a pas été
déchu de cette tutelle par un jugement. En cas d’empêchement du père, la tutelle
légale est exercée par la mère.

En droit musulman la mère n’a jamais été tutrice légale, elle était seulement
tutrice testamentaire, si elle était désignée par le père de son vivant ou tutrice
dative, si elle était désignée par le juge. La réforme du Code de statut personnel
du 10 septembre 1993 a permis à la mère d’exercer la tutelle légale, sous
certaines conditions et a limité les actes qui lui sont reconnus. Le code de la
famille a élargi les attributions de la mère qui exerce la tutelle légale.

En effet, la mère peut exercer la tutelle sur ses enfants à condition :


- qu’elle soit majeure ;
- que le père, par suite de décès, d’absence, de perte de capacité, ou pour
tout autre motif ne peut assumer la tutelle.
La mère peut désigner un tuteur testamentaire et elle peut également le révoquer.
Dès le décès de la mère, l’acte de tutelle testamentaire est soumis au juge pour
vérifier sa validité et le confirmer.

Si le père décédé a désigné de son vivant un tuteur testamentaire, le rôle de ce


dernier se limite à suivre la gestion faite par la mère des affaires du mineur sous
sa tutelle et de saisir la justice, le cas échéant.

Le tuteur légal qu’il s’agisse du père ou de la mère n’est pas soumis au contrôle
préalable de la gestion des biens du mineur, mais il est tenu de présenter un
rapport annuel dans le cas d’une ouverture de dossier de tutelle légale si la
valeur des biens de l’interdit est supérieur à 200.000 dirhams. Toutefois, le juge
de tutelle peut baisser cette limite et demander une ouverture de dossier de
tutelle, compte tenu de l’intérêt du mineur.

Au terme de sa mission, et lorsqu’il existe un dossier de tutelle légale, le tuteur


légal doit aviser le juge des tutelles de l’état des biens du mineur interdit, en lui
présentant un rapport détaillé pour homologation.

2-2-2. les tutelles testamentaire et dative :

Le tuteur testamentaire est le tuteur désigné par le père. Dès le décès du père, la
tutelle testamentaire est soumise au juge aux fins d’homologation.
Cette même disposition est reprise par le code de procédure civile où toute
ouverture de tutelle donne lieu à l’établissement d’un dossier au tribunal de
première instance et à son inscription dans un registre spécial tenu à cet effet.

21
Dès la réception de l’avis de décès, le juge ordonne l’établissement d’un acte
notarié mentionnant l’identité de tous les héritiers.
Si le défunt a institué un tuteur testamentaire, cette nomination est portée sur
l’acte notarié.

En l’absence de la mère ou du tuteur testamentaire, le tribunal désigne un tuteur


datif qu’il choisit parmi les plus aptes des proches (Asaba). A défaut, le tuteur
datif doit être choisi parmi les autres parents proches sinon parmi des tiers.
De même, en fonction de l’intérêt de l’enfant, le tribunal peut désigner deux ou
plusieurs tuteurs datifs, en fixant les compétences de chacun d’eux.
Les membres de la famille, les demandeurs de l’interdiction et toute personne
intéressée peuvent proposer un candidat comme tuteur datif. En cas de besoin,
le tribunal peut désigner provisoirement un tuteur datif.

Le tribunal transmet immédiatement le dossier de candidature au ministère


public pour avis, dans un délai maximum de 15 jours. Après réception de l’avis
du ministère public, le tribunal statue dans un délai maximum de 15 jours.

Les tuteurs testamentaire et datif doivent jouir de la pleine capacité, être


honnêtes, diligents et de bonne conduite. La condition de leur solvabilité
(situation financière) est laissée à l’appréciation du juge. Ainsi, la tutelle
testamentaire et dative ne peut être confiée :
- à la personne condamnée pour vol, abus de confiance, faux ou toute
infraction portant atteinte à la moralité ;
- au failli et au condamné pour liquidation judiciaire ;
- à la personne qui a un litige soumis à la justice ou un différend familial
avec le mineur interdit.

Les tuteurs testamentaire et datif doivent établir un inventaire des biens de


l’interdit qui sera envoyé au juge, et sera conservé dans le dossier de la tutelle.

A l’issue de l’inventaire, le ministère public, le tuteur légal, le conseil de


famille, un ou plusieurs proches peuvent présenter leurs observations au juge des
tutelles au sujet de l’estimation de la pension alimentaire nécessaire à l’interdit
et sur le choix des méthodes susceptibles de lui assurer une bonne éducation
ainsi qu’une bonne gestion de ses biens.

2-3. Les caractéristiques de la tutelle

La tutelle est une charge personnelle, elle ne passe pas aux héritiers. C’est une
charge obligatoire

22
La tutelle est une charge gratuite pour le père ou la mère. Le tuteur testamentaire
ou datif peut recevoir des indemnités pour les frais de gestion. Ces indemnités
sont fixées par le juge.

2-4. Les organes complémentaires de la tutelle :

1/ le subrogé tuteur : c’est un surveillant du tuteur qui est nommé par le juge. Si
le père est indigent, il appartient au juge de lui adjoindre un subrogé tuteur. Ce
dernier peut également être nommé auprès du tuteur datif pour veiller à la
gestion et le conseiller. Il peut s’agir d’un ou de plusieurs subrogés tuteurs.

2/Le tuteur ad-hoc : il s’agit d’une mission momentanée à pouvoir limité.


Le tuteur ad-hoc est nommé par le juge, quand le tuteur testamentaire ou datif se
porte acquéreur d’un bien appartenant à l’incapable et qu’il faut nommer une
tierce personne pour représenter le mineur interdit.

2-5. Les pouvoirs du tuteur :

Le tuteur représente l’enfant dans tous les actes de la vie juridique. Le mineur
n’a pas à intervenir et le tuteur agit seul. Le tuteur est soumis au contrôle
judiciaire de l’ensemble de sa gestion. Toutefois, il existe certains actes
juridiques que le mineur peut faire seul, à savoir : le mariage, la répudiation, le
divorce, le désaveu de paternité.
Le père bénéficie généralement d’une plus grande liberté dans l’administration
de la tutelle sauf s’il est indigent. Le législateur distingue les actes qui portent
sur la conservation du patrimoine et les actes de dispositions. Les codes de la
famille et de procédure civile réglementent ces opérations et soumettent à
l’autorisation du juge toute action susceptible d’entraîner l’appauvrissement du
mineur interdit.

2-6. La fin de la tutelle :

La tutelle prend fin dans les cas suivants :


- accès du mineur à la majorité sauf décision contraire du juge pour d’autres
motifs ;
- émancipation du mineur ;
- décès du mineur ;
- décès du tuteur testamentaire ou datif ; ou fin de leur mission ; ou
déchéance pour condamnation pénale, mais dans ce cas un nouveau tueur
est nommé ;
- la révocation du tuteur testamentaire ou datif.

23
A la fin de la tutelle, le tuteur rend un compte détaillé de sa gestion et remet les
biens dont il était responsable.
Le mineur devenu majeur ou ses enfants, en cas dé décès, peuvent légalement
demander ce rapport au tuteur.
L’interdit qui a atteint l’âge de la majorité ou dont l’interdiction est levée,
conserve son droit d’intenter contre le tuteur testamentaire ou datif ou toute
autre personne qui a été chargée de la gestion des affaires, toutes actions
relatives aux actes préjudiciables à ses intérêts. Ces actions sont prescrites deux
ans après que le mineur ait atteint la majorité ou que l’interdiction ait été levée.
Toutefois, en cas de vol, de dol ou de recel de documents, ces actions se
prescrivent dans un délai d’une année après qu’il en ait eu connaissance.

24

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