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n° 07 BELGIQUE - BELGIË
P.P.
Mars BRUXELLES X
2013 1/9464
de mémoire
Pédago gie et tr ansmissi on
CENTRE D’ÉTUDES ET DE DOCUMENTATION
« MÉMOIRE D’AUSCHWITZ » ASBL
| trimestriel n°7 | janvier – février – mars 2013
| BUREAU DE DéPÔT : BRUXELLE S X | N° Agrégation P 801056
sommaire
actualité
La mémoire de la Shoah.
À propos de quelques lieux
communs p.2
Interrogation
« Vivre et militer pour
Éditeur responsable : Baron Paul Halter – ASBL Mémoire d’Auschwitz – 65, rue des Tanneurs – 1000 Bruxelles
Approfondissement
Le mémorial, actualité c Galerie de photos au Zentralsauna,
Auschwitz II-Birkenau.
le lieu, la mémoire.
La monumentalisation
du camp de Westerbork.
p.12 La mémoire de la Shoah.
Application pédagogique p.19
À propos de quelques lieux
Varias p.20
communs
n Philippe Mesnard nous invite à revisiter quelques idées reçues
concernant la mémoire de la Shoah.
w Lire page 2
actualité
communs
– marque encore intraçable de l’anéantis- Antelme, tous deux publiés dans la NRF en
sement –, mais aussi la nécessité de s’expri- encore intraçable 1962. En 1961, sort sur les écrans Kapo de
mer pour que la terreur subie ne soit pas Gillo Pontercorvo qui peu après réalise La
banalisée. Pour ceux qui en étaient restés de l’anéantissement –, Bataille d’Alger (1965). Kapo ne laisse aucun
loin ou avaient été épargnés, il y avait le mais aussi la nécessité doute sur la liquidation génocidaire des
Selon des interprétations largement répandues,
n
caricaturent-elles. Et elles ont souvent été pressentiment que ça affleurait la langue
de s’exprimer pour que
Juifs par les nazis6. Chronique d’un été (1961)
le génocide des Juifs a fait l’objet d’une occultation adoptées par défaut faute de meilleures et que, avec le temps ou en passant par les de Jean Rouch et Edgar Morin marque,
mémorielle au cours des deux premières décennies après
explications et compréhension que l’on détours d’autres événements, ça allait se la terreur subie ne soit pas pour Michael Rothberg7, l’émergence de
a pour tâche, aujourd’hui, de délivrer en faire entendre. La grande question de Primo la figure du survivant du génocide des Juifs.
la guerre. Comme le souligne Philippe Mesnard, cette vision soulignant la complexité des décades qui, Levi était « comment transmettre de façon banalisée. Ces exemples, parmi tant d’autres,
mérite d’être nuancée étant donné que le silence était moins de 1945 aux années 1970, ont été le théâtre compréhensible ? » Mais, hormis dans les engagent, d’une part, à nuancer l’idée
général qu’on a tendance à le croire. Dans cet article, l’auteur non seulement des antagonismes Est- rêves qu’il raconte dans Si c’est un homme selon laquelle le génocide des Juifs a été
attire l’attention sur les différents discours émergeant à Ouest, mais aussi des processus extrême- et dans La Trêve, il n’a jamais été véritable- la philosophie et la littérature ont été de radicalement occulté durant les décades
l’époque en question, qui étaient parfois étroitement liés aux ment violents de la décolonisation qui ont ment confronté à un refus d’écoute. Et si puissants vecteurs de ce que les discours d’après-guerre et, d’autre part, à souligner
été ressentis jusque dans les métropoles. l’accueil dans le Piémont ou en Lombardie politiques négligeaient. que la guerre d’Algérie a joué un rôle impor-
voix et aux histoires de la décolonisation. Revoyons donc les données du pro- était radicalement différent de ce qu’Elsa Ces années réputées sourdes ont été tant dans la constitution de la mémoire du
blème à la lumière de quelques percées Morante décrit du triste retour des 15 Juifs animées par de nombreux passeurs de la nazisme et du génocide des Juifs. Dès les
opérées ces dernières années. Et, par là rescapés (sur 1056 déportés) à Rome4, cela mémoire du génocide des Juifs. En 1951, Les années 1950, les mémoires se combinent,
même, tentons d’ouvrir le débat. ne fait que confirmer qu’opérer des géné- Temps Modernes publient le témoignage se répondent et coexistent avec les événe-
O
Face à l’ampleur des crimes et des ralités à l’échelle nationale revient le plus de Miklos Nyiszli, médecin juif hongrois ments liés aux guerres de décolonisation.
n parle beaucoup de violences commis pendant les six ans 1 souvent à procéder à des réductions. interné dans le quartier des chambres à Et s’il y a eu ou s’il y a encore des antago-
mémoires de groupe et qui ont embrasé l’Europe (et le monde), Si, par ailleurs, l’on peut admettre gaz de Birkenau et, en 1961, quelques cha- nismes, ceux-ci correspondent à une phase
communautaires en limi- il faut admettre qu’il y avait un réel pro- qu’après-guerre le passé de la Seconde pitres de Si c’est un homme de Primo Levi. qui participe à l’élaboration mémorielle
tant leur rapport et leur histoire à des blème de rupture cognitive que les crimi- Guerre mondiale a été configuré par des En 1958, La Nuit d’Elie Wiesel paraît chez sans pérenniser pour autant hostilités ou
conflits, des guerres, des concurrences. On nels ont d’ailleurs amplement exploité. Une groupes qui, ayant été engagés dans la résis- Minuit (maison née de la Résistance, scène fractures. n
a, par ailleurs, souvent mis en avant que le partie de la réalité n’était pas intelligible et tance, étaient pris dans les enjeux politiques éditoriale du Nouveau roman et porte-
génocide des Juifs avait été occulté et mis les événements qui avaient eu lieu n’ont de la guerre froide, de là à considérer que parole des atrocités commises par l’armée Philippe Mesnard,
sous silence durant une vingtaine d’années pu, a posteriori, être seulement éclaircis ces mêmes groupes ont su imposer une française en Algérie). Le livre est préfacé Directeur de l'ASBL Mémoire d'Auschwitz
notamment par les mémoires issues de par des explications elles-mêmes restées vision hégémonique sans qu’aucune marge par François Mauriac qui avait déjà fait de
groupes de résistants. incomplètes après-guerre. Ce que, lors ne leur échappe pour d’autres configura- même, en 1951, pour Le Bréviaire de la haine
Ce sont là des interprétations qui ont de la guerre de 1914-1918, l’on appelait le tions et d’autres récits, c’est paradoxale- de Léon Poliakov. Durant ces années, trop
été accueillies par des publics cultivés tout « silence du permissionnaire2» était en par- ment projeter une vision totalitarienne sur nombreuses ont été les publications lit-
autant en quête de savoir que de réponses tie dû à l’incapacité à traduire le réel vécu en des pratiques dont on voudrait dénoncer le téraires témoignant de la destruction des
face non seulement à la violence du XXe mots, situation redoublée par l’inaptitude caractère totalitaire. Il faut penser, d’abord, Juifs d’Europe pour que cette attention soit
siècle – avec le génocide des Juifs comme à écouter que manifestent souvent, quelle que les esprits nourrissent des résistances anodine, souligne judicieusement François
(4) Elsa Morante, La Storia [1974], Paris, Gallimard,
(1) On peut également considérer, notamment avec paroxysme –, mais aussi à la façon dont ces que soit l’époque, les êtres humains face et des manières d’être autonomes (ce que Azouvi5. Certains auteurs sont lauréats de 1977, p. 538-539.
David Roskies, que les violences visant les Juifs ont
commencé, pour ceux d’Europe de l’Est, à prendre événements sont toujours présents dans au désarroi ou à la souffrance d’autrui. Par Michel de Certeau nomme le braconnage) prix éminents comme, entre autres, le Gon- (5) François Azouvi, Le Mythe du grand silence, Paris,
une tournure exterminatrice au moment de la guerre la vie culturelle, éducative et, pour certains, ailleurs, il y avait un principe de réalité qui contre les tentatives d’imposer à la pensée court pour André Schwartz-Bart, en 1959, Fayard, 2012.
de 1914-1918, passant à un niveau supérieur à celui, (6) Philippe Mesnard, Consciences de la Shoah, Paris,
pourtant déjà radical, de celui des pogroms. personnelle. Or, en y regardant de plus près, dictait aux survivants de se raccrocher à la des visions simplifiées et acritiques, ensuite, et Anna Langfus, en 1962. Signataire de la
Kimé, 2000, p. 13, 26-27 et Philippe Mesnard, « La
(2) Jean Paulhan, Les Fleurs de Tarbes ou la Terreur tout laisse à penser que, sans être totale- bouée de sauvetage du travail, de l’occupa- que nombreuses furent les associations qui, « Déclaration sur le droit à l’insoumission tension des identités mémorielles », Rue Descartes,
dans les Lettres [1941], Paris, Gallimard, 1990, ment erronées, ce sont là des interpréta- tion du temps et de la reconstitution, ne accueillant les survivants, ont aussi indirec- dans la guerre d’Algérie » (le Manifeste des n° 66 (n° thématique : Evelyne Grossman et Pierre
p. 35-37. Lauret (éds.), "Changer les identités"), 2010, p. 93-100.
(3) Aharon Appelfeld, L’Héritage nu [1994], Paris,
tions radicales et partisanes. Elles tendent serait-ce que pour soi-même, d’une socia- tement favorisé la prise de conscience de 121), Claude Lanzmann évoque explicite- (7) Michael Rothberg, Multidirectional Memory,
L’Olivier, 2006, p. 9. à réduire les situations, parfois même les lité. « La mémoire devint votre ennemi3. » ce qu’avaient subi les Juifs, enfin, que l’art, ment le « génocide des Juifs » quand, en Stanford, Stanford University Press, 2009, p. 176-198.
c
l’État belge de régler des comptes avec ses la collaboration. Lors de la Première Guerre les néerlandophones ne changea pas dans cette façon de présenter – et d’excuser – vérité incontestable auprès de bon nombre
ertains clichés concernant ennemis politiques. Beaucoup d’entre eux l’entre-deux-guerres. Comme l’État refusa les choses connut un grand succès. Parmi de personnes, dont souvent les enfants des
la motivation des collabo- étaient persuadés qu’ils n’avaient pas com- (1) Cette étude ne couvrant pas la question de la d’écouter les demandes flamandes, les Fla- les anciens collaborateurs, on compta bon collaborateurs.
rateurs flamands ont la vie mis de faute, et estimaient que les peines collaboration en Wallonie, nous renvoyons à ce mands furent obligés de se tourner vers nombre d’écrivains, de journalistes, d’his-
sujet notamment aux études de Martin Conway,
longue. Subsiste jusqu’à nos jours le cliché étaient trop sévères et injustes. Cette ran- Collaboration in Belgium : Léon Degrelle and the Rexist les Allemands. Durant toute la période de toriens et d’autres personnes fort capables Dans le cadre du projet de recherche
du prêtre excitant ses jeunes élèves ou cune à l’endroit de l’État belge, qui trouva Movement, 1940-44, New Haven, Yale University collaboration, les collaborateurs ont en de s’exprimer, qui répandirent leurs idées qui est à la base du livre Pour la Flandre,
Press, 1993 ; Eddie de Bruyne, For Rex and for
paroissiens à s’engager sur le Front de l’Est, son germe dans les milieux collaborateurs, Belgium : Léon Degrelle and Walloon Political and somme agi par amour du peuple flamand auprès d’un public plus large. De nombreux le Volk et le Führer, nous avons analysé les
et celui de l’idéaliste nationaliste flamand se trouva nourrie dans les camps d’interne- Military Collaboration 1940-1945, Solihull, Helion, et le seul reproche qu’on pourrait leur faire, ouvrages (pseudo)historiques sur la guerre facteurs qui ont prédisposé certaines per-
2004 ; Flore Plisnier, Ils ont pris les armes pour Hitler.
dupé par les Allemands. Voilà des images ment où furent rassemblées des milliers de La collaboration armée en Belgique francophone, c’est d’avoir eu la naïveté de compter sur ou la répression virent le jour, écrits par sonnes à collaborer. Les résultats de l’étude
qui reviennent sans cesse dans les discus- personnes soupçonnées de collaboration. Bruxelles, Renaissance du Livre/CEGES, 2008. les Allemands pour défendre leurs intérêts, d’anciens collaborateurs. Après la guerre, nous amènent à réviser l’idée d’une naïveté
Compte-rendu illustré de ce dernier ouvrage dans
sions et les réflexions au sujet la collabo- La situation de disgrâce des anciens colla- O., Rogeau, « Collaboration. Ce que les Wallons ne ou de se laisser séduire par la rhétorique ceux-ci se réintégrèrent relativement vite nationaliste flamande.
ration. D’autre part, la représentation de borateurs donna naissance à une véritable veulent pas savoir », Le Vif-L'Express, 22.2.2008, p. 48- völkisch sans savoir le fin mot de l’affaire. – beaucoup plus vite qu’aux Pays-Bas, par
52 (il est possible de se procurer le texte de l'article
la collaboration en Flandre est marquée subculture : les collaborateurs se retrou- via la Médiathèque des Territoires de la Mémoire : Voilà ce que nous déclarent les anciens exemple – dans la vie sociale. Plusieurs col- Sources
aussi par la mémoire de la répression et de vaient dans des associations, leurs enfants http://mediatheque.territoires-memoire.be/index. collaborateurs dans leurs biographies : rien laborateurs devinrent membres d’un parti
php?lvl=notice_display&id=128708).
la poursuite judiciaire des collaborateurs étaient membres des mêmes mouvements (2) Un mythe démonté entre autres par Sophie De
n’était connu sur les camps à ce moment-là. Trois questions étaient à la base de
après la guerre. Certaines images fortes de jeunesse, ils avaient leurs propres revues Schaepdrijver dans La Belgique et la Première Guerre L’histoire ne se prête pas à une hineininter- l’étude :
mondiale, Berlin – New York, P.I.E.-Peter Lang, 2004. (3) Oswald Van Ooteghem, ancien combattant au
– celles des femmes rasées, des maisons et partis politiques. Ce fut au sein de cette Voir aussi C. Van Everbroeck, « Une conscience dans
pretierung. Les collaborateurs ne savaient Front de l’Est, devint sénateur pour la VU ; Hector
(1) Qui était le collaborateur moyen,
détruites, des collaborateurs enfermés à la subculture qu’on harmonisait les images le feu. Divergence à propos du pourcentage des pas tout ce qu’on sait aujourd’hui. Les nazis de Bruyne, ancien membre de la VNV, fut sénateur dont le pouvoir était généralement limité
victimes flamandes de la Première Guerre mondiale, et ministre du Commerce extérieur (VU) ; Victor
Libération dans les cages aux lions du zoo que chacun se faisait de sa propre période Anne Morelli (éd.), Les grands mythes de l’histoire de
n’avaient pas encore montré leur vrai visage Leemans, aussi de la VNV, fut président du Parlement
d’Anvers – se sont mêlées au sentiment de collaboration. L’image de soi créée ainsi Belgique, Bruxelles, Vie Ouvrière, 1995, p. 233-242. aux collaborateurs intègres. Ces derniers se européen. Suite p.6 w
w Suite de la p.5 motivation, parfois très divers. Ainsi, cer- « Tout le monde doit cette idéologie et comment définir le sou-
tains ont collaboré parce qu’ils croyaient tien à l’égard du Nouvel Ordre ?
mais qui s’engageait néanmoins en faveur en un Nouvel Ordre, un meilleur monde. prendre sa responsabilité.
de l’occupant ? D’autres espéraient faire de l’argent à tra- Si j’avais été célibataire Idéologie
(2) Pourquoi ces personnes ont- vers la collaboration, avaient peur d’être
elles décidé de collaborer ? Quels étaient convoqués en Allemagne pour le travail et en bonne santé, Pour savoir ce que cela signifiait
leurs motifs, leurs mobiles ? En dans quelle obligatoire, ou ont agi par revanche, par j’aurais déjà rejoint d’être partisan du Nouvel Ordre et afin
mesure ces motifs ont-ils été inspirés ou goût d’aventure ou par rébellion. de connaître l’idéologie sous-tendant les
déterminés par l’entourage ? Afin d’avoir une meilleure idée de les rangs de la Légion actions des collaborateurs, nous avons
(3) Sur quelle base idéologique la col- l’importance de ces motifs dans chaque flamande. Vivre et militer étudié les lettres insérées dans les dossiers
laboration s’est-elle greffée ? Quelles étaient cas individuel, il était nécessaire d’étudier de la première et de la deuxième catégo-
l’image de soi et la vision du monde des les rapports entre les différents motifs mais pour un idéal, c’est la seule rie. Il s’agissait de vérifier, d’un côté, ce que
collaborateurs ? aussi de situer ceux-ci par rapport à la situa- option valable. » les collaborateurs ont écrit (contenu) et,
tion personnelle du collaborateur et par de l’autre, quels mots et discours ils ont
Afin de pouvoir formuler une rapport au contexte social. En général, il employés (forme).
réponse à ces questions, nous avons décidé y avait un ensemble de motifs et de fac- L’analyse des lettres nous a permis de
de ne pas procéder à des entretiens avec teurs décisifs plutôt qu’un seul motif sous- la persécution ou le travail obligatoire). Il formuler quatre conclusions sur la vision
les témoins – étant donné que ces derniers tendant la collaboration. En retraçant la s’agit de personnes qui, étant donné leur du monde des collaborateurs idéologiques.
ont souvent pu subir l’influence de l’image récurrence des motifs et les rapports entre sympathie pour le Nouvel Ordre, ont choisi (1) La collaboration n’était pas uni-
justificatrice vieille de presque septante ans ceux-ci, nous avons établi une typologie de résoudre leurs problèmes dans ce cadre quement une réalité professionnelle ou
maintenant – mais de travailler unique- comprenant plusieurs clusters de motifs, en s’engageant dans la collaboration. économique, mais avait aussi des réper-
ment avec des sources créées pendant ou qui permet de classifier les collaborateurs (3) Le troisième groupe (32 %) com- cussions sur la vie sociale. Les collaborateurs
immédiatement après la guerre, à savoir en trois groupes, dont le dernier comprend prend les collaborateurs qui n’avaient, avaient adapté leur réseau social – leur
les dossiers de procès de la répression. Ces deux sous-catégories : d’après leur dossier, que des motifs person- cercle d’amis et de connaissances – à ce
dossiers ont l’avantage qu’on n’y donne (1) Le premier groupe (40 %) com- nels. Leur engagement au sein de la colla- nouveau contexte. Les liens avec les non-
pas seulement la parole aux collabora- prend les gens qui ont collaboré pour des boration ne relevait pas d’une conviction collaborateurs étaient rompus (des deux
w Suite de la p.9
document document
Extraits de J. Van Dingenen, « Waarom wij collaboreerden » [Pourquoi nous avons collaboré] Auditorat général, dossier n° 117/44,
Gilbert B., lettre à sa sœur, dd. 26/1/1943
LA VOIE VERS LA COLLABORATION Une trahison envers la Flandre ? La seulement les vaincus mais, de par leur passait beaucoup de choses que nous avons Front de l’Est, le 26.1.1943
coopération avec la Belgique, qui prouvait fuite, aussi les coupables, qui se trouvaient désavouées sur le moment et que nous
Tout le monde sait qu’il y a eu beaucoup de depuis 110 ans qu’elle était l’ennemie de la face à leur juge potentiel. désavouons aujourd’hui encore. Ma chère petite sœur,
formes de collaboration et que les Flandre, n’était-elle pas une trahison bien
motivations pour lesquelles quelqu’un a Ce « quelqu’un » ne pouvait pas non plus Mais fiers du fait que tant de nationalistes Cela m’a fait un grand plaisir de recevoir ton petit mot du 10.1.
plus grande qu’une coopération
collaboré peuvent diverger. Dans ce travail être l’un ou l’autre collaborateur occasionnel, flamands se sont engagés sans réserve, en
occasionnelle avec l’Allemagne, dont il
nous nous limitons à la collaboration qui serait bien trop tenté de tirer un profit tant que véritables idéalistes, pour servir Oui bon la poste arrive un peu tard ces jours-ci mais c’est à cause de l’Hiver.
restait à voir si elle serait une amie ou une
flamande-nationale, c’est-à-dire la personnel de cette collaboration. leur peuple en souffrance, même au risque
ennemie ? La façon dont les dirigeants Oui, ma petite Marie-Louise, je peux bien croire que les kerlinnekes [mouvement
collaboration des nationalistes flamands belges avaient abandonné leur peuple, tout d’y rester. Grâce à cet engagement, grâce à
Ça devait être quelqu’un qui de par son de jeunesse flamingante pour les filles] y perdent aussi, cela ne m’étonne pas. Et
qui ont collaboré en raison de leur ce qui s’était passé au cours de ces fameux notre « collaboration », on a sauvé bien des
passé ne pouvait pas être considéré c’est partout pareil, ma petite Louise. Et tu sais pourquoi ? Parce que la croyance et
conviction nationaliste, parce qu’ils ont jours de mai et par la suite, montrait choses pour notre peuple.
comme un ennemi de l’Allemagne et qui la confiance en le Führer, Adolf Hitler, manque. Et c’est ça que tu dois avoir, ma
estimé à un moment donné qu’une certaine clairement que notre régime politique était pourrait donc parler librement et Même si notre but politique de réaliser un petite Marie-Louise, de la confiance et de la croyance en le Führer parce que sinon,
forme de coopération avec les dirigeants on ne peut plus corrompu. Et que notre franchement, mais ça devait aussi être « Dietse volksstaat » a échoué – cet espoir il est impossible d’obéir inconditionnellement à ses supérieurs.
en place était la meilleure façon de critique de ce régime était entièrement quelqu’un qui était suffisamment idéaliste ayant viré en effet dans la désillusion totale
défendre les intérêts de la Flandre. […] justifiée et qu’il était urgent de construire un pour défendre les intérêts réels de ses – nous avons néanmoins la consolation Mais si les choses tournent mal chez vous là-bas, c’est parce que le VNV [Vlaamsch
(p. 25-26) ordre nouveau et meilleur chez nous aussi. concitoyens et qui serait au besoin prêt importante d’avoir réellement servi notre Nationaal Verbond, Ligue nationale flamande] veut être national-socialiste mais ne
La volonté de collaborer pour cela à prendre pas mal de risques peuple et d’avoir agi de façon à ce que la l’est pas vraiment parce qu’on a ses propres méthodes et cela fait maintenant
À cela s’ajoutait que l’attitude et le
personnels. Flandre soit l’une des régions les moins presque trois ans qu’on patauge et il n’y a presque rien qui ait été accompli et qui
L’idée d’une collaboration au sens de comportement de la Wehrmacht
allemande nous donnait une toute autre affectées par cette guerre. Si, en ressemble à quelque chose. Pourquoi ne prend-on pas exemple sur l’Allemagne?
coopération avec les dirigeants en place Il apparut donc que ce « quelqu’un » ne
image du peuple allemand que celle qui comparaison avec nos pays voisins, cette Parce que beaucoup de gens, je t’assure, beaucoup de gens ont peur que, s’ils vont
pour mieux servir la Flandre a toujours été pouvait être qu’un VNV, renouvelé ou non.
nous était parvenue à partir des histoires « pauvre » Flandre d’avant mai 1940 devint suivre la méthode d’Adolf Hitler, ils n’aient plus rien à dire parce qu’on se
présente au sein du nationalisme flamand. (p. 35-36)
de la guerre de 1914-1918 et à travers la après 1945 l’un des pays les plus prospères débarrasserait d’eux en raison de leur incapacité.
À chaque fois que le nationalisme flamand de l’Europe occidentale, ce fut aussi grâce à
propagande belge. Un échec sans que l’effort fut vain
en arrivait à un stade où il possédait un notre travail ! Tu vois petite Louise, je suis très sérieux avec toi. Dieu créa le monde et tout ce qu’il
certain pouvoir politique, cette idée de Pour nous, cette différence constituait un Ce fut un échec et le dénouement fut en contient. Dieu fit aussi en sorte que les gens soient de différentes espèces, de
coopération s’imposait avec force. indice très clair que le nouvel ordre en effet très amer, mais nous ne devons pas Que la Belgique ait ensuite gaspillé cette différentes races (noire, jaune, rouge, blanche). Voilà les distinctions principales.
Allemagne était non seulement nouveau avoir honte de notre lutte et de notre richesse n’est pas de notre « faute », car Mais il y a plus, ces différentes races ont toutes reçu de Dieu des qualités
Mai 1940 nous étions alors emprisonnés en tant que
mais aussi meilleur. Quelques jours plus engagement. Lorsque le cours de l’histoire différentes, tant intellectuelles que physiques.
[…] Alors que des dizaines de milliers de tard, la libération des prisonniers de arriva à un stade où le moment fut venu « traîtres », pour payer notre « faute » envers
nationalistes flamands ont risqué leur vie guerre, aux Pays-Bas aussi bien qu’en pour le VNV de tenter sa chance, de la Belgique. Nous appartenons à la race germanique, celle qui depuis des milliers d’années
pour défendre la Belgique, leurs leaders Flandre, viendrait enlever les derniers s’engager, d’essayer de défendre les engendre de loin les hommes les plus beaux et les meilleurs parce que Dieu l’a
C’est ainsi que s’est terminée « notre »
ont été arrêtés, amenés comme des doutes. (p. 31-32) intérêts de la Flandre, le VNV a hésité à voulu.
collaboration et qu’a commencé la répression
criminels et livrés aux services de sécurité procéder à de plus amples consultations,
belge. Une fois de plus, nous avons été Et Dieu plaça ces différentes qualités dans le sang des hommes. Et les gens avec
français. Nous avons ressenti ceci comme LA COLLABORATION mais il n’a pas hésité à prendre ses
confrontés à la Belgique réelle et une fois de les mêmes capacités appartiennent ensemble et tentent de se réunir. En moi, en
une déclaration de guerre de la part des responsabilités, à prendre des risques
Une collaboration nécessaire ? plus, le sentiment de loyauté, renouvelé par toi, il y a le même sang, que nous avons eu de notre mère et père, c’est ce qui nous
autorités envers le mouvement flamand, considérables afin de sauver la Flandre et
la grande désillusion qu’avait été la fait frère et sœur. Et nous, les Flamands, avons les mêmes ancêtres que les
de telle sorte que tout sentiment de Durant cette « période d’attente », nous de servir notre peuple.
collaboration, se trouvait étouffé au départ. Allemands. Voilà pourquoi nous avons le même sang et les mêmes qualités et
solidarité envers la Belgique qui germait avons progressivement pris conscience Ceux qui détestent aveuglément les Flamands
De toutes nos forces nous avons lutté, non nous sommes destinés à vivre ensemble. Tel était le cas autrefois. Mais au cours
en nous, fut étouffé au départ. d’une raison très importante pour laquelle ne comprendront sans doute jamais que la
pour nous-mêmes mais pour notre peuple de l’histoire cela a changé ; la Flandre a été arrachée à l’Allemagne. Maintenant il y
le VNV [Vlaamsch Nationaal Verbond – Ligue et notre idéal. Pour la Belgique, nous Belgique a alors raté une opportunité unique
Objections morales contre la a Adolf Hitler, et la Flandre a de nouveau l’occasion de s’engager dans la voie
nationale flamande] devrait effectivement étions peut-être des traîtres et nous avons de réconcilier la Flandre avec la Belgique.
collaboration ? voulue par Dieu. Et si beaucoup de Flamands ne comprennent pas, c’est parce
collaborer et dont nous n’avions pas tenu été punis en tant que tels. Pour la Flandre,
Cette répression a prouvé que nous ne nous qu’ils ont peur. Peur de quoi ? Qu’ils aient plus de devoirs et en particulier le devoir
Ayant survécu à la guerre active, nous compte précédemment. Il était nous pouvons attester avec notre dirigeant
étions pas trompés en tentant notre chance d’être soldats. Ils souhaitent bien profiter de la victoire allemande mais sans faire
attendions avec impatience de voir quelles parfaitement clair que quelqu’un devrait Staf de Clerq : « Nous avons fait tout ce que
en dehors et même à l’encontre de la trop d’efforts. Il y a pourtant assez de gens qui en savent long et qui ne reculent pas
seraient les possibilités que cette guerre négocier les intérêts de la population nous avons pu pour notre peuple ».
Belgique. Cette Belgique de 1945 ne pouvait devant leur devoir et l’accomplissent dans la Waffen-SS ou ailleurs en Allemagne.
pourrait apporter à la Flandre. Du 28 mai auprès de l’occupant.
jusque mi-juin, nous avions en tant que En tant que nationalistes flamands, nous en effet pas constituer une patrie pour la
Ce « quelqu’un » pouvait difficilement être Ton frère te salue amicalement du Front de l’Est.
prisonniers de guerre le temps de réfléchir pouvons être fiers de notre lutte et nous en Flandre. (p. 37-38)
l’un des anciens dirigeants, car ces sommes fiers !
et de méditer sur ces questions. J. Van Dingenen, « Waarom wij Heil Hitler
derniers avaient perdu pratiquement tout
L’argument de la trahison envers la crédit de par leur fuite. En plus, tout ce Fiers, non pas de la collaboration, et collaboreerden », Broederband, n° 11-12,
novembre-décembre 1970, p. 3-48. Gilbert
Belgique n’avait pour nous aucune valeur, qu’ils pourraient faire auprès de l’occupant, certainement pas de tout ce qui s’est passé
pour les raisons déjà citées. ce serait acquiescer, car ils étaient non pendant la collaboration. Parce qu’il se Traduction: Fransiska Louwagie Traduction : Anneleen Spiessens
Le mémorial,
le lieu, la mémoire
La monumentalisation
S
les trains de déportation, consistant en un reflétant la subordination des victimes aux ne sont pas représentatifs de la population
ous l’occupation alle- l’occupation allemande, le site servit de Cette fonction prit fin en 1948 et on prévit butoir et nonante mètres de rails, dont intérêts de la nation. La croix positionnée des camps et de leur expérience.
mande, différents camps de camp de transit, constituant dès lors l’anti- ensuite d’en faire une porcherie – une sug- les extrémités vrillent dans les airs4. Ce derrière le monument et la citation du
concentration furent établis chambre des camps d’extermination basés gestion provenant du ministère de la Jus- monument s’inscrit dans une historicité Wilhelmus, l’hymne national, sous la liste Monument national
aux Pays-Bas. Notamment les camps de en Pologne. Les camps aux Pays-Bas firent tice – ou de démolir le camp. Cependant, mémorielle dont on exposera brièvement des noms, donnent l’impression que les Westerbork
Schoorl, Amersfoort, Ommen et Vught – partie d’un réseau de plus de 10 000 camps, sous la tutelle du ministère de la Défense, le contexte. défunts se sont battus pour la trinité natio-
par ordre chronologique de leur édification mis en place par la terreur nazie, qui com- le site fut utilisé comme camp d’entraîne- nale : avec l’aide de Dieu, pour le bien de la Le premier monument renvoyant aux
– sont communément désignés comme prit au moins 17 types différents de camps. ment militaire. En 1950, le nom du camp Les premiers mémoriaux nation et de la monarchie. victimes juives de Westerbork fut un vitrail
des « camps de concentration ». Pour les de Westerbork fut changé en Schatten- commémoratif inauguré le 23 février 1949
Juifs, on construisit des camps « spéciaux» Bon nombre d’anciens camps de berg et le ministère de la Défense mit le Les premiers monuments érigés aux Si ces monuments ne commémorent dans la mairie du village de Westerbork,
dont Westerbork fut le plus connu et le concentration sont de nos jours des lieux site à disposition du ministère de l’Intérieur, Pays-Bas pour les victimes des camps furent pas des victoires, ils sont tout de même situé à une dizaine de kilomètres du camp.
plus important. Le camp fut érigé en 1939 de mémoire. C’est surtout depuis la chute dans le cadre du rapatriement de familles des monuments dédiés aux fusillés. Ainsi, à bien ancrés dans une tradition de sacri- Le vitrail fut offert par la Croix Rouge néer-
sous les ordres de l’État, une opération cofi- du mur de Berlin en 1989, La Déclaration hollandaises d’Indonésie. Ensuite, le camp Vught on édifia un mur commémoratif fice et de culte des héros, où la souffrance landaise en signe de gratitude à la com-
nancée par les autorités juives, pour assurer de Stockholm (2000) et La Déclaration de offrit refuge à des militaires moluquois du sur l’ancien champ de tir en 1947, à Wes- et la mort sont interprétées comme des mune de Westerbork pour son aide aux
la prise en charge des réfugiés juifs. Sous Prague sur la conscience européenne et le KNIL3 et à leurs familles. Les baraques qui terbork on érigea un monument en 1949 offrandes pour la patrie. Les camps furent Juifs déportés. Les Juifs furent invités à faire
communisme (2008) que ces sites se sont n’étaient plus utilisables furent vendues et et à Amersfoort on construisit en 1953 une ainsi représentés comme des endroits où
(1) Cf. Rob van der Laarse, De oorlog als beleving. ancrés vivement dans la mémoire collective servirent entre autres comme grange agri- statue située au bout de l’ancien champ la captivité fut la suite logique d’une union Suite p.14 w
Over de musealisering en enscenering van Holocaust- européenne1. Pour les camps d’Amersfoort, cole, entrepôt, église ou lieu de rencontre, de tir. Le monument commémoratif de nationale contre l’Occupation. La place
erfgoed [La guerre comme expérience. Sur la
muséification et la mise en scène du patrimoine de Vught et de Westerbork ce processus dans différents endroits du pays. En 1965, Westerbork, appelé aussi monument de centrale étant accordée à la résistance, il (4) Le créateur du monument est Ralph Prins. Sous
l’Occupation, Prins fut interné à Barneveld et fut
Holocauste], Reinnwardt Académie 2010/2011, p. fut cependant loin d’être évident, car dans l’État décida que les résidents moluquois l’Insurrection et de la Résistance, fut dédié n’y avait dans ces monuments pas de place plus tard, en passant par Westerbork, déporté à
26, 64.
l’après-guerre les camps furent réutilisés à installés dans les baraques devaient s’inté- aux 10 résistants fusillés à Assen en sep- pour les victimes ou pour les événements Theresienstadt. Il a survécu à la guerre, la plupart
(2) Harold Marcuse, « The afterlife of the camps des membres de sa famille furent gazés. Prins devait
», Jane Caplan/Nikolaus Wachsmann (dir.), diverses fins, comme ailleurs en Europe2. grer dans la société néerlandaise. À cet effet, tembre 1943. qui ne concordaient pas avec les mythes transmettre des messages au sein du camp et fut dès
Concentration camps in Nazi Germany, London – Après la Libération, Westerbork fut d’abord on procéda à la démolition progressive du d’héroïsme et de résistance nationale. La lors témoin des transports hebdomadaires. L’essence
New York, Routledge, 2010, p. 186-211. même de Westerbork était selon Prins la question
(3) Koninklijk Nederlandsch-Indisch Leger (Armée
transformé en camp d’internement pour camp de Westerbork. Les derniers rési- Ces monuments érigés en mémoire commémoration ne porta en effet que sur suivante : si oui ou non l’on partait avec le prochain
royale indo-néerlandaise). des Néerlandais accusés de collaboration. dents moluquois déménagèrent en 1971 de fusillés s’accordaient parfaitement avec des prisonniers morts exécutés : les captifs train ?
w Suite de la p.13
w Suite de la p.15 une reconstruction étant perçue comme gré le béton gris des ruines reconstruites, une reconstitution photographique de la
irréelle ou kitsch. On opta plutôt pour l’ins- il manque au site la grisaille de certains baraque sur le site ; les restes originaux sau-
Le soir du lundi 4 mai 1970, le Monu- cription de « traces » au sein du paysage, camps, comme à Buchenwald. L’aména- vés de l’incendie sont maintenant exposés
ment National de Westerbork fut inauguré notamment en plaçant certaines construc- gement de Westerbork, avec ses talus au musée du centre mémoriel.
par la reine Juliana et le prince Bernard. Le tions en béton évoquant des ruines (fol- couverts d’herbe, rappelle plutôt la façon
monument consiste en un butoir avec à lies). Pour rendre visible la structure du dont les tombes de masse à Bergen-Belsen Outre la remise en place d’une partie
l’avant nonante mètres de rails dont les camp, des talus furent mis en place sur le ont été conçues : comme un parc naturel, des baraques, il est prévu de restituer aussi
extrémités pointent vers le ciel. L’artiste site, indiquant l’emplacement original et la couvert de plantes que l’on a tendance à les miradors du camp et les barbelés. Pour
Ralph Prins en était le créateur. Prins avait taille des baraques. Auprès de chaque talus trouver dans les cimetières allemands – rétablir le Boulevard des Misères, la route
créé un monument exceptionnel pour se trouve une petite pyramide en béton en conséquence, le parc mémoriel actuel asphaltée du camp sera remplacée par un
l’époque. Les rails abîmés, les poutres déla- avec un numéro et un texte explicatif : laisse à peine entrevoir la réalité historique chemin empierré. L’ancienne maison du
brées, fragments d’une histoire tragique, pour exemples, l’administration était située de Bergen-Belsen. Il en va de même pour commandant du camp sera aussi intégrée
w Suite de la p.17 le site. À leur tour, ils souhaitent y retrou- Ce qui est sûr, c’est que le terrain changera
ver leur histoire. C’est dans cette perspec- encore souvent de face, mais aussi qu’il Une version étendue de cet article a été
qui s’est déroulée ici mieux lisible, visible, tive que Rob van der Laarse se demande : n’échappera pas à l’ombre d’Auschwitz. n publiée en néerlandais dans la revue
Témoigner, entre histoire et mémoire (n° 114,
tangible ? Et si on le peut, jusqu’où peut-on « qui s’appropriera ce patrimoine à l’ave- p. 59-75), au sein d’un dossier thématique
Roel Hijink,
aller ? Faut-il justement faire preuve d’une nir ? Combien d’héritiers souhaitons-nous intitulé “Sites mémoriels” (coordination:
Docteur en Histoire de l'art, Université d’Amsterdam Frediano Sessi, avec la collaboration de
grande réticence, et laisser l’aspect du camp admettre dans “notre” paysage mémoriel, Traduction : Alessandro Vlerick et Stijn Verleyen Carlo Saletti et de Frédéric Crahay). Pour
tel qu’il est, le fruit contingent des sept et qui décidera qui en sera responsable à Remerciements à Guido Abuys, conservateur du la traduction française de l’article intégral,
a Éducation
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