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TRACES 43 PB-PP B 19464

BELGIE(N) - BELGIQUE

DE MÉMOIRE
PÉDAGOGIE ET TRANSMISSION
JANVIER - FÉVRIER - MARS 2022
Éditeur responsable: Henri Goldberg - ASBL Mémoire d’Auschwitz - Rue aux Laines 17/Boîte 50 - 1000 Bruxelles - Bureau de dépôt BRUXELLES X - Numéro d’agrégation P801056

UNE PUBLICATION TRIMESTRIELLE DE


L’ASBL MÉMOIRE D’AUSCHWITZ

LA RÉSISTANCE
LA RÉSISTANCE PASSIVE
Actualité
L’interview qui
n’a pas eu lieu
p. 2

Auschwitz
Maximilian Kolbe
Une vie pour une autre
p. 3

No Comment
p. 5

Approfondissement
À pile ou face.
Destinées juives face à
la bureaucratie louviéroise,
1940-1942
p. 6

Interrogation
La spiritualité comme
résistance passive au nazisme
p. 12
+ fiche pédagogique p. 15

Le saviez-vous ?
La grève des 100 000
Résistances et
luttes sociales
p. 16

Réflexion
Femmes et
résistance passive
p. 20

Varia
p. 22

APRÈS LECTURE,
MERCI DE ME DÉPOSER
DANS LA SALLE DES PROFS.
actualité

© DR
L’ INTERVIEW QUI N’A PAS EU LIEU

La rubrique « Actualité » des nu- Il n'existe que peu d'exemples vie privée pour mettre en garde la
méros 41 et 42 de Traces de Mé- connus de ces actes de résis- société contre les faux prophètes,
moire présentait une interview. tance plutôt passifs, précisément les mensonges, le populisme et
C'était également notre intention parce que la plupart de ces résis- l'extrémisme. Année après année,
pour les numéros 43 et 44, mais le tants ont œuvré « discrètement » souvent jusqu'à la mort, ils ont té-
COVID en a décidé autrement. sous le radar et le plus souvent il moigné inlassablement lors de ré-
Fin 2020, j’ai pris contact avec un s’agissait d’individus qui n’appar- unions académiques et de com-
homme faisant partie d'un groupe tenaient pas à des organisations mémorations, ils sont retournés
d'habitants d'un village de nos politiques ou autres. dans les endroits les plus horribles
Ardennes, qui avait organisé une Après la Libération, certains resca- où ils ont non seulement perdu
« résistance passive » contre l’oc- pés ont commencé à témoigner leur famille, mais où on a aussi
cupant pendant la Seconde an de sauvegarder des traces voulu les dépouiller de leur dignité
Guerre mondiale. Un certain des horreurs commises, pour dé- et de leur humanité, ils ont visité
nombre de fermiers, ainsi que le noncer les coupables, mais aussi des centaines d'écoles pour ra-
boulanger et le boucher du vil- pour faire comprendre au monde conter leur histoire aux jeunes,
lage, avaient réussi à faire dispa- les dangers qui pouvaient les l'avenir de notre société. Ne de-
raître systématiquement la nourri- guetter. D'innombrables femmes vrions-nous pas également consi-
ture destinée aux soldats alle- et hommes ont consacré leur vie dérer ces rescapés, ces témoins,
mands ou à la rendre impropre à témoigner de ce que des gens comme des résistants ?
à la consommation. Ce témoin ordinaires ont fait subir à d'autres
devait être interviewé au sujet gens ordinaires, mus par une idéo-
de ces événements, mais à la logie qui leur avait fait perdre tout
mi-2021, il est malheureusement sens de la raison. Ils ont souvent Georges Boschloos
décédé du coronavirus. sacrié leur vie de famille et leur ASBL Mémoire d’Auschwitz

2 TRACES DE MÉMOIRE
auschwitz

Maximilian Kolbe est toujours considéré


comme un héros en Pologne. On peut encore
acheter des posters représentant sa
silhouette et les deux couronnes portant
© DR

les couleurs du drapeau national

MAXIMILIAN KOLBE
UNE VIE POUR UNE AUTRE

Quiconque a déjà visité Auschwitz est forcément passé par la traversée, en file indienne, du sous-sol du tris-
tement célèbre Block 11 – le bloc de la mort – et la découverte d’une cellule différente des autres. Sur un mur,
une plaque commémorative porte l’inscription suivante : « Ici est mort le frère Maximilian Maria Kolbe ».
Dans une Pologne virtuellement rayée de la carte du monde, Maximilian affirme avoir eu au cours de sa jeu-
nesse une vision dans laquelle la Vierge lui aurait proposé deux couronnes : une blanche (la couleur de la
pureté), et une rouge (la couleur du martyre). Né dans une famille extrêmement pauvre, mais profondément
catholique, le jeune homme a accepté les deux. En 1914, il a prononcé ses premiers vœux devant les frères
mineurs de l’Ordre franciscain, et lors de son ordination, en 1918, il a exprimé son idéal comme suit : « Pro
amore usque ad victimam » (Tout pour l’amour, jusqu’au don de sa vie).

Quand l’Allemagne envahit la Po- culé ») à la n des années 1920, Block 14 sous le matricule 16670.
logne, en 1939, les nazis s’atta- est alors connu en tant que ré- Le 30 juin 1941, l’un de ses codé-
quent directement à l’élite intel- dacteur et éditeur d’un journal tenus parvient à s’échapper
lectuelle polonaise. Ils s’en pren- catholique. En 1939, il est arrêté après une journée de travail
nent ainsi aux professeurs, aux no- pour la première fois par l’occu- forcé. La réaction de la direction
tables, mais aussi aux prêtres, car pant allemand. Rapidement re- du camp est alors radicale :
la religion catholique occupe laxé, il est à nouveau inquiété Karl Fritzsch, le Lagerführer
alors une place prépondérante moins de deux ans plus tard, en d’Auschwitz, décide de se venger
au sein de la société polonaise. février 1941. En mai, il est envoyé en choisissant arbitrairement dix
À cette époque, Maximilian au camp de concentration ré- prisonniers du Block 14, d’où s’est
Kolbe, qui avait déjà fondé le mo- servé aux intellectuels polonais : échappé le fuyard et où Maximi-
nastère Niepokalanów (« imma- Auschwitz. Il y est enfermé dans le lian Kolbe est écroué, et les con-

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damne à mourir de faim. L’un de 14 août 1941, Kolbe et quatre tion de Kolbe par le pape Paul VI,
ces dix malchanceux est un sol- autres détenus reçoivent une in- en 1971. Onze ans plus tard, en
dat polonais catholique et père jection fatale de phénol. Leurs dé- 1982, Kolbe sera canonisé
de quatre enfants nommé Fran- pouilles seront incinérées au cré- comme martyr par le pape polo-
ciszek Gajowniczek. Découvrant matorium du camp dès le lende- nais Jean-Paul II.
le sort qui lui est réservé, ce dernier main. Gajowniczek, le soldat dont Gajowniczek, qui s’est éteint en
est pris de panique et de déses- Kolbe a pris la place, fera quant à 1995, déclarera que les Polonais
poir. Kolbe décide alors d’interve- lui partie des survivants avaient grand besoin d’un saint et
nir, et, prêt à mourir pour son pro- d’Auschwitz. d’un martyr. Après tout, le blanc
chain, demande à prendre la La surprenante décision du La- et le rouge sont les couleurs des
place de Gajowniczek. Contre gerführer Fritzsch peut s’expli- deux couronnes reçues par le
toute logique, Fritzsch accepte sa quer : puisque toute personne qui jeune Kolbe dans sa vision, mais
proposition. Le 31 juillet 1941, entre à Auschwitz est destinée à y aussi celles de la nation polo-
Kolbe et neuf de ses codétenus laisser la vie, remplacer Gajow- naise…
sont donc emmenés au redouté niczek par Kolbe ne revenait pas
Block 11 – le bloc de la mort – et à ses yeux à épargner l’ancien
enfermés dans la cellule 18, pour soldat, mais uniquement à retar- Johan Puttemans
y attendre de mourir de faim. der l’échéance. Franciszek Ga- Coordinateur pédagogique
Deux semaines plus tard, le jowniczek assistera à la béatica- ASBL Mémoire d’Auschwitz

Source : Diana Dewar, Saint of


Auschwitz: The story of
Maksymilian Kolbe, Londres,
Darton, Longman and Todd
Ltd., 1982.

Maximilian Kolbe a offert sa vie sans


hésiter pour sauver celle de l'un de
ses codétenus. Il a accepté son sort
avec abnégation et s'est ainsi montré
© DR

plus fort que la logique haineuse des nazis.

4 TRACES DE MÉMOIRE
Dans cette rubrique : des images, des textes, des liens Internet, sans
commentaire. Que sais-tu du contenu de cette page ? Quel est le lien
avec le thème et quel est ton opinion critique ? Envoie ta réponse à
ces trois questions par mail via georges.boschloos@auschwitz et no comment
gagne une de nos publications au choix.
© DR

N° 43 - MARS 2022 5
approfondissement

À PILE OU FACE
destinées juives face à la
bureaucratie louviéroise, 1940-1942

UNE SÉGRÉGATION PAR ÉTAPES Belgique. » Le 30 septembre 1940, ment, empêche le retour des fugi-
le commissaire d’arrondissement tifs, identie les entreprises, interdit
Durant le second conit mondial, de Soignies ad interim commu- tout acte de disposition, exclut les
différentes ordonnances promul- nique aux communes de son res- Juifs de la fonction publique ainsi
guées par l’occupant allemand sort les directives de l’Ortskom- que des professions d’avocat, de
visent spéciquement la popula- mandantur. Les administrations lo- professeur de l’enseignement su-
tion juive en Belgique. Débutant le cales sont appelées à fournir, pour périeur et de journaliste pour le
23 octobre 1940 avec l’interdic- le 4 octobre suivant, un relevé no- 31 décembre au plus tard. Le mi-
tion des abattages rituels d’ani- minatif de leurs citoyens juifs, un nistère de l’Intérieur et les dépar-
maux, elles vont progressivement concept qui leur est bien entendu tements ministériels compétents
tisser une toile autour de leurs vic- précisé préalablement. Il com- sont respectivement chargés des
times. Après l’enregistrement des prend « tous les individus de race instructions et de l’exécution2.
personnes et des biens (1940- juive quelle que soit la religion à Si l’indifférence doit avoir prévalu
1941) suivent les mesures ayant laquelle ils appartiennent [ainsi au sein de la population, le secré-
pour objectif d’isoler « le Juif » par que ceux] dont deux aïeux au taire des charbonnages du Bois-
la limitation de sa libre circulation, moins ont appartenu à la race du-Luc signale cependant le
la création de l’Association des juive. » Nichée dans la région du 7 novembre, dans son journal que
Juifs en Belgique, l’organisation Centre, La Louvière, une com- « l'autorité occupante vient de
de l’enseignement et de l’aide so- mune industrielle forte d’environ prendre des mesures sévères
ciale ou encore l’interdiction des 23 000 habitants, ne s’empresse contre les Juifs. Je n'ai aucune
voyages à l’étranger (1941-1942). pas. Manquant peut-être simple- sympathie pour ces derniers mais
Les ultimes étapes sont franchies ment de ressources documen- je ne puis approuver ces mesures
en 1942 avec la mise au travail taires adéquates, elle admet ainsi d'exception prises envers eux. La
obligatoire, la conscation des le 9 octobre que sa police et son franc-maçonnerie est bien plus
biens et la distribution de signes service de la population n’ont pu dangereuse. » Il ajoute le 8 no-
distinctifs. Les administrations lo- mener leur mission à bon port. vembre qu’il a « lu l'édit du Gou-
cales assument alors un rôle es- Il en va tout autrement lorsqu’il vernement militaire contre les
sentiel et apportent leur collabo- s’agit d’appliquer les deux ordon- Juifs, c'est terrible. »
ration à l’exécution des ordon- nances ciblant précisément les Entretemps, le personnel politique
nances1. Juifs prises par le commandant louviérois fait l’objet de nombreux
militaire pour la Belgique et le changements. Un processus
DES JUIFS À LA LOUVIÈRE ? Nord de la France le 28 oc- d’épuration, permettant de rem-
tobre 1940 et publiées dans le Ve- placer certains mandataires
« Ce relevé n’a qu’un but pure- rordnungsblatt du 5 novembre. ayant pris la fuite par des individus
ment statistique. On n’envisage L’occupant spécie alors la no- politiquement plus conciliants, a
aucune mesure contre les Juifs de tion de Juif, organise le recense été mis en place par l’occupant.

6 TRACES DE MÉMOIRE
La mention dans l'avis de
changement de résidence :
« mariée devant rabbin à
Hanovre le 6-6-1920 » sera
lourde de conséquence
pour Rosa Rosen
© AVLL - Entrés 1939

Le 13 novembre, l’arrêté du se- aux Juifs. Entre le 27 novembre et QUESTIONS D’ATOUTS ?


crétaire général du ministère de le 2 décembre, les déclarations,
l’Intérieur Jean Vossen démet de facilitées par l’enregistrement des Née à Cologne en 1900 de pa-
leurs fonctions les bourgmestres intéressés, se multiplient. Contrai- rents polonais, Rosa Rosen épouse
et échevins ayant abandonné rement à de nombreuses autres, David Miedzinski en 1920. Elle le
leur poste au cours du mois de les autorités louviéroises n’au- suit en Belgique en 1923 où ils s’ins-
mai et n’étant pas revenu au raient dès lors pas attendu la tallent successivement dans la ré-
1er octobre. À La Louvière, Ca- circulaire du ministère de l’Inté- gion de Charleroi, à Liège, à
mille Deberghe, le bourgmestre li- rieur et de la Santé publique Bruxelles et à Jette. C’est seule,
béral faisant fonction, a été arrêté du 6 décembre qui renforce avec ses deux enfants Jacob et
le 15 août et a été remplacé ad l’obligation de s’inscrire avant le Mariette, qu’elle emménage à La
interim par le secrétaire commu- 20 décembre au registre ouvert Louvière en 1939. À petites
nal Georges Cotton. Le bourg- par les administrations commu- causes, grands effets, le rapport
mestre socialiste légalement élu, nales. Avec quelques semaines « étranger » dressé par le commis-
Victor Ghislain, est quant à lui mis de retard, le collège louviérois saire en chef de police liégeois le
sur la touche le 9 octobre. Un can- conera, le 18 janvier 1941, un 31 octobre 1925 sera plus tard
didat extérieur au conseil commu- état de la question au ministère lourd de conséquences.
nal, l’avocat Raoul Goutier, est de l’Intérieur : les informations ont Pendant le conit, le phénomène
désigné le 11 décembre suivant. été placardées, la presse a prostitutionnel fait l’objet d’une
Répondant à la directive du mois été avisée, trente Juifs (dont grande vigilance de la part de
de septembre, Georges Cotton trois belges) ont requis leur inscrip- l’occupant et des autorités lo-
communique, le 7 novembre, à tion et deux entreprises ont de- cales. C’est probablement pour
l’Ortskommandantur de Soignies mandé l’afchette « entreprise cette raison que Rosa Rosen,
les premières données relatives juive »3. soupçonnée de tenir un café de

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© AVLL - RELLC - 7498
Szaja Macarz

moralité douteuse dans la rue Syl- voyé par la commune de Jette le tance publique et l’application
vain Guyaux, suscite l’intérêt en 10 novembre 1939 à La Louvière : des différentes mesures antijuives
ce mois de janvier 1941. Confor- « mariée devant rabbin à règleront son sort. Elle est convo-
mément aux prescriptions sani- Hanovre le 6-6-1920 ». Le let se quée, avec sa lle, à la succursale
taires, le bourgmestre requiert à resserre alors inexorablement au- de l’Ofce du Travail de la rue Ni-
ce moment l’intervention d’un tour d’une Rosa Rosen qui n’avait caise le 22 juillet 1942. Toutes deux
médecin auprès de celle-ci. At- pas demandé son inscription au seront déportées avec le
teinte d’arthrite au cou-de-pied registre des Juifs et n’avait pas ap- XIIIe convoi le 10 octobre 19424.
droit, elle sera admise à l’hôpital posé d’afchette sur son « entre- Originaire de Pultusk, en Pologne,
civil de La Louvière jusqu’au mois prise juive ». S’inquiétant auprès Szaja Macarz (dit Moncarz) arrive
de mars de la même année. L’his- du bourgmestre pour l’avenir de quant à lui en Belgique en 1923.
toire serait d’une banalité confon- ses enfants, elle est renvoyée, ainsi Âgé de 20 ans, il s’installe à La
dante si, lors du contrôle d’iden- que ses extraits d’actes de bap- Louvière après avoir passé une
tité opéré par l’administration, tême, vers la Kreiskommandantur année dans la région de Charle-
cette dernière n’avait eu l’atten- non sans avoir été « rassurée »… roi. Il est alors chocolatier et ouvre
tion attirée par une mention ajou- Ses petits-enfants ne seront plus rapidement une salle de vente de
tée au registre de la population. considérés comme Juifs selon l’or- meubles dans la rue Neuve. Bien
Trouvant son origine en Cité ar- donnance. Les contrôles de mo- vite, il entreprend les démarches
dente, l’écrit réapparait sur l’avis ralité, son statut d’indigente se- nécessaires auprès de la Sûreté
de changement de résidence en- courue par la commission d’assis- publique an que sa ancée do-

8 TRACES DE MÉMOIRE
© AVLL - RELLC - 9265

Bajla Drazek

miciliée à Varsovie, Bajla Drazek, mestre rexiste Jean Gorain. Un et les met en relation avec René
puisse le rejoindre. Ils se marieront peu plus tôt, le 1er avril, les direc- Janssens, alors sous-chef de bu-
en 1931 à La Louvière et devien- tions scolaires louviéroises ont été reau au service communal de la
dront les parents d’Eta, deux ans informées des termes de la circu- population. Depuis la n 1941, cet
plus tard. Les Moncarz se confor- laire relative à l’enseignement juif. ancien combattant de la Pre-
ment aux ordonnances du 28 oc- Le bourgmestre a également mière Guerre est également aflié
tobre 1940. Le 30 novembre, ils se fourni, le 9 juin, le double des au groupement des Milices patrio-
font inscrire au registre des Juifs. À ches d’inscription au registre des tiques du Centre. Il va faciliter la
la demande du bourgmestre, ses Juifs ainsi qu’une liste récapitula- disparition furtive des Moncarz en
services ne manquent pas de si- tive à la Kreiskommandantur de appliquant un mécanisme bien
gnaler aux intéressés l’obligation Mons. Sa police y réceptionnera, huilé. Il sufra de leur donner
de respect des différentes me- au prix d’un franc pièce, qua- l’identité de Louviérois partis au
sures. L’entreprise familiale est rante bandes d’étoiles jaunes qui Congo. Les Neunez-Vincaert et
ainsi déclarée avant le 21 juil- seront distribuées dans la se- leur lle conviennent alors en tous
let 1941. La police communale conde partie du mois de juin par points. Au début du mois
perd néanmoins la trace des le service de la population. L’in- d’août 1942, un certicat de
Moncarz au mois de juillet 1942. quiétude grandit dans les milieux changement de résidence est en-
La Louvière est devenue le bien informés. Charles Belline, un voyé à Huy. Szaja, Bajla et Eta,
20 juin 1942 une grande agglo- tailleur membre de la Résistance, alias Yvon Neunez, Rose Vincaert
mération dirigée par le bourg- prévient ses voisins, les Moncarz, et Christiane, s’établiront dans la

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En s'établissant à Huy durant l'été 1942,
Szaja, Bajla et leur fille Eta ont pris l'identité
des Neunez-Vincaert, partis au Congo
© AVLL - sorties 1942

cité mosane jusqu’à la n du con- membres juifs du Front de l’Indé- femme et une lle, René Janssens
it. En date du 23 octobre 1944, le pendance, le Comité de Défense meurt au camp de Schützenhof
patronyme « Macarz » remplace- des Juifs fournira aide matérielle le 20 février 1945. Il obtiendra le
ra celui des Neunez dans le re- et morale aux Juifs passés dans la statut posthume de prisonnier po-
gistre de la population hutois et clandestinité. litique et sera également reconnu
une note manuscrite conrmera Les destinées de deux familles comme membre du service de
que de fausses cartes d’identité établies à La Louvière avant la renseignements Marc pour son
avaient été faites à La Louvière. Seconde Guerre mondiale auront activité déployée en 1944. À l’ins-
La présence des Neunez-Vincaert été façonnées par une multitude tar d’autres résistant.es louvié-
à Boma, au Congo belge, sera de facteurs. Rosa Rosen est présu- rois.es comme Léon Blanpain et
quant à elle rapportée dans le re- mée décédée à Auschwitz avant Carmen De Beir, Georges et
gistre louviérois5. le 20 octobre 1942. Les Moncarz Jeanne Garin, Fernand Lescot ou
sont de retour dans leur com- encore Zelma Deiller, René Jans-
LES DEUX FACES D’UNE MÊME PIÈCE mune hennuyère en 1945. sens recevra du Yad Vashem, le
Le 11 août 1944, huit hommes sont 10 novembre 1975, le titre honori-
Les aides individuelles sponta- arrêtés comme otages à La Lou- que de Juste parmi les Nations6.
nées, l’action de réseaux de résis- vière. René Janssens en fait partie.
tance et l’intervention de cer- Incarcérés à Casteau puis à Char-
taines autorités auront permis de leroi, ils sont envoyés en Alle-
sauver plus de la moitié de la po- magne le 31 et dirigés vers les Thierry Delplancq
pulation juive en Belgique. Fondé camps de Neuengamme et Blu- Archiviste de la Ville et
au mois d’octobre 1942 par des menthal à Brême. Laissant une du CPAS de La Louvière

10 TRACES DE MÉMOIRE
René Janssens, sous-chef de bureau au
service communal de la population, est affilié
au groupement des Milices patriotiques
du Centre. Il meurt au camp de Schützenhof,
le 20 février 1945
© AVG - 11139

(1) Nous adressons nos plus vifs remer- mondiale », La Louvière aux urnes, La par des Belges durant la guerre » (té-
ciements pour leur aide à Louis-Phi- Louvière, 2007, p. 156-157 ; Meinen, moignage de Bajla Drazek, s.d. (ar-
lippe Arnhem, Sabine Godfroid, Hilde op. cit., p. 30-31 ; Roekens, op. cit., chives familiales Moncarz) ; Del-
Keppens, Fabrice Maerten, Alexan- p. 60-61; « Notes journalières tenues par plancq, « Des mandataires… »,
dra Matagne, Samuel Pauwels et Ma- Oswald Heyndrickx, secrétaire des p.159-160 ; attestation du responsable
thias Tuybens. Merci également à charbonnages du Bois-du-Luc, pen- du service Population de la Ville de
Yannik van Praag pour l’opportunité dant la guerre 1939-1945 », inédit, Huy, 14 octobre 2003.
offerte de reprendre ces recherches. p. 55 (Musée de la Mine, Bois-du-Luc). (6) Dossier René Janssens (Musée de
Anne Roekens, La Belgique et la per- (4) Ofce des étrangers, dossier la Résistance de Belgique) ; citation à
sécution des Juifs, Bruxelles, n° 1.250.121 ; correspondance, l'ordre du jour des Milices patriotiques
Cegesoma-La Renaissance du Livre, 13 janvier 1941, 1er novembre 1941, (CEGES, AA2127/boîte 930a/n°2844) ;
2010, p. 50-57 ; Rudi Van Doorslaer 18 mars 1942, 25 mars 1942, Sûreté de l’État. Dossier René Jans-
(dir.), Emmanuel Debruyne, Frank 3 avril 1942, 8 avril 1942 et 23 juil- sens (CEGES, AA1333/dossiers indivi-
Seberechts, Nico Wouters, La Bel- let 1942 (AVLL, LLC, 0.4.2.) ; registre duels/boîte 1048/dossier 28347) ; dos-
gique docile. Les autorités belges et des entrées de l’hôpital civil de La sier René Janssens (Service Archives
la persécution des Juifs en Belgique Louvière (AVLL, CPAS, 553/1941/79) ; des Victimes de la Guerre, n° 11139) ;
durant la Seconde Guerre mondiale, Thierry Delplancq, « Félix et les dossier de reconnaissance des Milices
Bruxelles, Luc Pire, 2007, t. II, p. 1132- femmes de mauvaise vie. Le contrôle patriotiques René Janssens (Musée
1134. de la prostitution à La Louvière durant de la Résistance de Belgique) ; Mar-
(2) Correspondance, 7 et 17 octobre 1940 la Seconde Guerre mondiale », Quoti- cel Huwé, Fidèle Mengal, Fernand
(AVLL (Archives de la Ville et du diana: huldealbum Dr. Frank Daele- Lienaux, Histoire et petite histoire de
CPAS de La Louvière), LLC, 0.4.2) ; mans, 2021, p. 500-502 (ABB, numéro La Louvière, La Louvière, 1984, t. II,
dossier Juifs (AVLL, Maurage, 0.9.) ; spécial, vol. 95) ; Van Doorslaer, De- p. 448 ; Dan Michman, Encyclopedia
Thierry Delplancq, « Des paroles et bruyne, Seberechts, Wouters, op. cit., of the Righteous Among the Nations:
des actes. L’administration bruxelloise t. 1, p. 459 ; Mémorial de la déporta- Belgium, Jerusalem, 2005, p. 147 ;
et le registre des Juifs, 1940- 1941 », tion des Juifs de Belgique, Bruxelles- Roekens, op. cit., p. 76 ; Fabrice
Les Cahiers d’histoire du temps pré- New York, 1982, p. 383 et 442. Maerten, Du murmure au gronde-
sent, n° 12, 2003, p. 145-147 et 158 ; (5) Correspondance, 14 juillet 1941, ment. La résistance politique et idéo-
Insa Meinen, La Shoah en Belgique, 21 juillet 1941, 1er avril 1942, 8 juin 1942 et logique dans la province de Hainaut
Bruxelles, Renaissance du livre, 2012, 23 juin 1942 (AVLL, LLC, 0.4.2) ; audi- pendant la Seconde Guerre mon-
p. 30-31. tion de Szaja Moncarz, 18 avril 1945 diale (mai 1940-septembre 1944),
(3) Thierry Delplancq, « Des manda- (AVLL, Police, 9.2.0.) ; Ofce des Mons, 1999, t. II, p. 641 (Analectes
taires en conit. Portraits du personnel étrangers, dossier n° 1.312.223 ; « Té- d'histoire du Hainaut).
politique pendant la Seconde Guerre moignages sur les secours apportés

N° 43 - MARS 2022 11
interrogation

LA SPIRITUALITÉ COMME
RÉSISTANCE PASSIVE AU NAZISME
Le dicton « Erst kommt das Fressen, dann kommt die Moral » (D’abord la bouffe, ensuite la morale) signifie
que l’homme doit d’abord assurer sa survie avant de s’inquiéter de problèmes secondaires. Pour les oppres-
sés de l’époque nazie, cette philosophie aurait pu se traduire par : commençons par rester en vie, et pour
l’amitié, le débat, la morale et la religion, on verra après. Et pourtant ! Pourtant, la spiritualité – en tant que
telle, et pas nécessairement sous forme de foi en Dieu ou en la Providence – est devenue une sorte de résis-
tance passive contre la décadence. Les pratiques religieuses offraient alors une autre forme de survie : même
si les détenus des camps se savaient condamnés, et même s’ils n’avaient plus la force de lutter physiquement,
la spiritualité leur permettait de résister par l’esprit.

Les camps nazis regorgeaient de la priorité aurait logiquement dû Des fêtes juives au message pré-
personnes écartées de la société, être de sauver sa peau en pen- cieux
car considérées, par l’idéologie sant avant tout à sa propre survie.
nazie, comme dangereuses pour Après tout, la vie prime sur la foi. Pessa’h (la Pâque juive), est l’une
la race ou la collectivité. Or, il est Pourtant, la résistance passive par des principales fêtes du judaïsme.
particulièrement difcile de se la religion a sauvé plus d’un dé- Fête de la liberté, Pessa’h com-
montrer solidaire ou compatissant tenu. Elle a, par exemple, ren- mémore la n de l’esclavage des
dans un environnement où le mot forcé la solidarité entre captifs Juifs par les pharaons, et la sortie
d’ordre est « chacun pour soi ». Les partageant des convictions simi- d’Égypte sous l’égide de Moïse.
détenus étaient donc obligés de laires, augmentant par la même Ce récit occupe le second livre
mettre de côté leur éducation re- occasion leurs chances de survie. de la Torah (les cinq premiers livres
ligieuse et leurs principes éthiques Elle a permis à des personnes iso- de l’Ancien Testament des chré-
et moraux. lées de rester fortes sur le plan psy- tiens), intitulé Sjemot – l’Exode. La
À l’extérieur des camps, il était chologique. Les détenus se con- veille de Pessa’h, les Juifs célè-
déjà rendu impossible pour les tentaient de croire. Ils ne s’interro- brent l’Exode et la libération du
pratiquants de la religion juive de geaient pas sur l’existence de joug égyptien pendant le Séder.
professer ouvertement leur foi. Dieu. Ils n’essayaient pas de justi- Par tradition, ils mangent du pain
Pratiquer leur religion était donc er sa bonté (théodicée), ne se sans levain (matsa) et boivent
en soi une forme de résistance qui demandaient pas pourquoi les quatre coupes de vin. Pessa’h est
leur permettait de préserver leur Juifs étaient tant mis à l’épreuve. une fête importante parce que
honneur, leurs codes et leur iden- Ces questions théologiques les enfants sont invités à y partici-
tité. Ils résistaient ainsi aux décrets n’avaient pour eux que peu d’im- per et à perpétuer à leur tour la
anti-juifs des nazis en maintenant portance, car y répondre ne les religion juive.
leurs pratiques religieuses. aurait pas aidés dans leur lutte Dans la Haggada (le livre utilisé
Dans un camp de concentration, quotidienne. pendant le seder), il est écrit que :

12 TRACES DE MÉMOIRE
« À chaque génération, l’homme semble peu réalisable au vu du envoyés aux chambres à gaz dès
doit se voir comme s’il était sorti contexte historique général, mais leur arrivée à Birkenau. Des travail-
d’Égypte. » Célébrer une fête reli- qui frise l’impossible lorsqu’on sait leurs forcés sont alors chargés
gieuse dans un camp de concen- que cette histoire se passe en d’entreposer leurs biens dans des
tration est déjà un acte de résis- outre dans le camp de concen- baraques spéciales (section Ka-
tance en soi, mais lorsque la fête tration d’Auschwitz II (Birkenau). nada). En ouvrant les bagages
en question commémore la sortie Célébrer cette Pâque juive im- qui lui sont conés, l’un des insti-
de l’esclavage et trouve un écho plique en effet de se procurer plu- gateurs de la fête de la liberté qui
dans la situation actuelle, cet sieurs choses, à commencer par travaille justement dans la section
acte est encore plus fort. Se remé- du matsa et du vin. Kanada trouve, à sa grande sur-
morer le succès de l’Exode don- Les Juifs de Grèce sont déportés prise, tout le nécessaire pour célé-
nait ainsi aux détenus le courage vers Auschwitz deux semaines brer Pessa’h. Cette découverte le
de résister à l’oppression dont ils avant Pessa’h. Tout se passe telle- bouleverse d’autant plus qu’il
étaient eux-mêmes victimes ! ment vite qu’ils ont à peine le comprend immédiatement d’où
temps de s’organiser. Ils décident proviennent les affaires sur les-
La fête de la liberté à Birkenau alors d’emporter toutes leurs pos- quelles il vient de mettre la main !
sessions – et surtout leurs effets Il s’empresse de ranger ses trou-
En 1943, peu après Purim, la fête religieux. La plupart – à commen- vailles dans une cachette se-
du destin, quelques Juifs décident cer par les enfants, les parents crète, sachant pertinemment que
de fêter Pessa’h : un projet qui et les personnes âgées – sont s’il se fait attraper par un garde SS,

« Festival Prayer » :
dessin à l’encre, par
Felix Bloch, à
Theresienstadt en 1943

© Deutsches Historisches Museum

N° 43 - MARS 2022 13
© The Jewish Museum, NY
Lampe pour fêter Hanoucca, sculptée en bois
par Arnold Zadikow et Leopold Hecht à
Theresienstadt en 1942

il risque non seulement de perdre pour soudoyer le Blockleider, un dû subir cet esclavage. La nuit qui
son trésor, mais aussi de se voir in- Polonais, et veiller à ce qu’il ferme suit est une nuit de célébration,
iger une punition qui pourrait les yeux sur la fête à venir. Le soir, d’émotion… et d’espoir. L’espoir
bien lui coûter la vie. À partir de là, un détenu monte la garde de- de quitter le camp de concentra-
le plus difcile est d’introduire de vant l’entrée pour s’assurer qu’au- tion en hommes libres et de fêter
la nourriture dans le camp sans se cun garde SS n’arrive à l’impro- à nouveau Pessa’h en tant que
faire repérer. Par chance, le Kapo viste. tels après avoir connu l’escla-
(surveillant) est également juif, et Une fois la nuit tombée et l’obscu- vage.
soutient cette initiative. Il lui con- rité totale, des bougies sont allu-
seille de diviser les mets en petites mées et distribuées aux détenus Johan Puttemans
portions et de les distribuer à au- présents, allongés sur leurs lits su- Coordinateur pédagogique
tant de monde que possible pour perposés. Faute de haggada, ils ASBL Mémoire d’Auschwitz
que l’opération passe inaperçue. récitent de mémoire le qiddush, la
Et cela fonctionne. bénédiction qui accompagne la Sources : Thomas Rahe, Hoor
Erev Pessa’h (la veille de Pessa’h première coupe de vin. Lorsqu’un Israël. Joodse religiositeit in natio-
et, par extension, le jour même) garçon de douze ans pose les naal-socialistische concentratie-
est une journée particulièrement quatre questions traditionnelles kampen, Ten Have-Baarn,
harassante. Pendant de longues portant sur le caractère particulier Utrecht, 2001.
heures, les travailleurs ne man- de cette soirée, les larmes tom-
gent rien de ce qui sort des cui- bent en même temps que les ré- https://www.theyeshi-
sines du camp, ce qui accentue ponses. vaworld.com/news/promo-
la faim déjà bien présente. Il ne L’absence de haggadot (le pluriel tions/1717336/print-this-for-the-se-
leur reste plus qu’un obstacle à de haggada) oblige chacun à li- der-the-unforgettable-passover-
franchir : ils utilisent la nourriture vrer sa propre interprétation des of-1943-in-auschwitz-birkenau-
mise de côté pendant la journée raisons pour lesquelles les Juifs ont 2.html

14 TRACES DE MÉMOIRE
application La fête des Lumières comme symbole de résistance
pédagogique

Nom et prénom Classe / Cours


Vous trouverez chaque trimestre dans votre TRACES DE MÉMOIRE une application pédagogique avec une fiche didactique à utiliser en classe ou à conserver.

Tâches :

1) Recherche des informations sur la fête juive des Lumières (Hanoucca, ou


Chanoeka, en hébreu). Explique brièvement en quoi consiste cette fête.

2) En quoi cette fête aurait-elle pu être un symbole de résistance pendant la


période nazie ?

3) Trouve quelques exemples de fête des Lumières (ou d’une autre fête)
célébrée dans un camp de concentration nazi.
Ces fiches sont également à télécharger sur notre site internet www.auschwitz.be sous l ’onglet « pédagogie ».

(P. ex. Hanoucca à Bergen-Belsen en 1943, ou à Buchenwald en 1944.)

4) Cette photo montre un Chanoekia (le chandelier à neuf branches utilisé pour
Hanoucca). Au verso, Rachel Postner, qui vivait à Kiel (en Allemagne) avec son
mari Akiva, a rédigé le texte suivant :
Hanoucca 5692
« Mort à Juda »,
dit le drapeau.
« Juda est éternel »,
répond la lumière.

De quel acte de résistance est-il question,


sachant que cette photo date de
décembre 1932 (soit un mois avant la
Machtsübernahme des nazis) ?

Source : Photo 12/Universal Image Group

Remarques de l’enseignant/e TRACES DE MÉMOIRE


est une publication trimestrielle de
l’ASBL Mémoire d’Auschwitz

www.auschwitz.be

FICHE PÉDAGOGIQUE N° 22 (TRACES DE MÉMOIRE N° 43)


le saviez-vous ?

LA GRÈVE DES 100 000


résistances et luttes sociales
Lorsqu’on évoque la Résistance, les premières images qui viennent à l’esprit sont celles d’hommes et de
femmes opérant au sein de réseaux très secrets pour lutter contre l’occupant nazi. On pense aux actions de
sabotage, aux imprimeurs clandestins, aux opérateurs radio cachés dans les combles, aux filières d'évacua-
tion vers le Royaume-Uni, à l'aide aux familles juives pour entrer dans la clandestinité, ou aux coups d’éclat
comme l’attaque, en avril 1943, du vingtième convoi, afin de libérer ses passagers en route pour Auschwitz.
On pense moins à celles et ceux qui ont, activement ou passivement, contribué à gripper la machine de guerre
nazie depuis les ateliers, les usines ou les mines.

Avant toute chose, rappelons de leurs dirigeants, l’UTMI va rapi- contre des baisses de salaires, ou
qu’en 1940, l’appareil industriel dement se voir octroyer le mono- des réorganisations de travail. Du-
belge est performant, développé, pole de la représentation ou- rant l’hiver 1940, d’autres, plus im-
et a peu souffert de la campagne vrière. Afchant de plus en plus un portants, surgissent, essentielle-
des 18 jours. L’industrie lourde, les caractère ouvertement national- ment dans les charbonnages,
charbonnages, la fabrication de socialiste, elle ne regroupera pas mais aussi aux ACEC, à Charleroi.
matériel roulant, de machines-ou- plus d’un quart des syndiqués Ils sont surtout dus à un ravitaille-
tils, d’armement, etc. intéressent d'avant-guerre. Parallèlement à ment insufsant, mais ravivent un
au plus haut point l’Allemagne, l’UTMI, vont se construire des ré- esprit de corps et de résistance.
dont l’économie est entièrement seaux de syndicats clandestins, On trouve en première ligne les
centrée sur la guerre. Les travail- présents surtout en Wallonie où ouvriers auxquels sont demandés
leurs belges ont bien conscience domine la grande industrie, mais les plus lourds efforts physiques. Ils
de cette valeur. aussi à Bruxelles et en Flandre. réclament des rations alimen-
taires plus élevées, des produits
Rappelons aussi que l’Occupa- Les mouvements sociaux qui écla- de base, comme du savon ou des
tion sonne la n des libertés syndi- tent durant l’Occupation revêtent hausses de salaire. L’occupant
cales. En novembre 1940 est des formes particulières, les reven- tente de rejeter les défaillances
créée l'Union des Travailleurs Ma- dications salariales ou portant sur d’approvisionnement sur le blo-
nuels et Intellectuels (l’UTMI), un les conditions de travail se mêlant cus britannique, mais sans succès.
syndicat unique imposé par les bien souvent à la volonté de nuire Il va rapidement être tenu pour
Allemands. Conçu tout d’abord à l’économie nazie. Dès l’été seul responsable du rationne-
comme une coupole regroupant 1940, des mouvements de grève ment, avec en toile de fond les
les syndicats d’avant-guerre, et éclatent. Ils sont limités et surtout craintes d’un retour des privations
avec la collaboration d'une partie défensifs, avant tout dirigés de la Première Guerre.

16 TRACES DE MÉMOIRE
Mais le moment fort qui fait date rielles : augmentation des rations guerre nazie, dont les armées sont
dans l’histoire sociale durant l’Oc- et des salaires, mais le mouve- engagées sur de nombreux fronts
cupation est sans conteste le ment est aussi empreint de buts (Grèce, Yougoslavie, Libye, etc.)
mouvement de grève qui secoue politiques, le choix du 10 mai et à quelques semaines de défer-
notre pays en mai 1941, resté dans n’étant bien sûr pas dû au hasard. ler sur l’Union soviétique (l’opéra-
les mémoires sous le nom de Il est aussi intense que bref (le tra- tion Barbarossa sera lancée le
« grève des 100 000 ». Elle débute vail reprenant sur la plupart des 22 juin). L’occupant nazi cherche
à Seraing, sur le site de Cockerill, sites entre le 19 et le 21 mai), et à faire cesser au plus vite un mou-
le 10 mai 1941, un an jour pour jour débouche sur des victoires inat- vement qui coûte 2 000 tonnes
après l’invasion de la Belgique par tendues : hausse des salaires de d’acier quotidiennes à l’industrie
l'Allemagne nazie. Le mouvement 8%, allocations de vacances et du Reich. Hitler intervient d’ailleurs
se répand comme une traînée de rations supplémentaires. personnellement, ordonnant une
poudre à travers le bassin liégeois, distribution immédiate de ravitail-
la région du Centre et les mines Sans doute faut-il voir dans les ra- lement1. La répression suivra bien-
de Campine, mobilisant au plus pides concessions allemandes tôt, dès le mois de juin, et sera bru-
fort de la contestation probable- une conséquence des contin- tale. Par ailleurs, les grévistes
ment 70 000 travailleurs (60 000 de gences internationales. Si pour les belges inspirent directement leurs
l’aveu même de l’occupant). Les travailleurs belges, le moment re- voisins français. Le 27 mai, ce sont
revendications portent essentiel- vêt un caractère symbolique fort, les mineurs du Nord-Pas-de-Calais
lement sur des questions maté- il tombe mal pour la machine de qui débrayent, entamant l’un des

Ouvrières en grève, s.d.

© Real Productions, Wéo/Télés Nord-Pas de Calais, RTBF (Unité documentaire), Pictanovo

N° 43 - MARS 2022 17
Monument à Julien Lahaut dans le cimetière de la Bergerie à Seraing

© DR
plus importants mouvements de nelle à l’Union soviétique, la signa- que l’occupant nazi était l’en-
grève dans l’Europe occupée2. ture du pacte germano-sovié- nemi3. Dès les premiers mois de
tique (23 août 1939) a amené l’Occupation, le PCB se con-
Mais la « grève des 100 000 » fait l’appareil du parti à déployer des centre sur la lutte sociale, qui cul-
aussi revenir à l’avant-plan le Parti trésors de rhétorique pour donner minera avec la « grève des
communiste de Belgique, qui a un semblant de cohérence à une 100 000 », qui sera son plus grand
pesé de tout son poids dans la ligne politique impossible à tenir. fait d’armes. Mais c’est aussi de-
préparation et l’organisation du Le slogan « Ni Londres ni Berlin » ne puis le début de l’année 1941 que
mouvement. Julien Lahaut, dé- parvenait pas à cacher les affres sont posés les premiers jalons qui
puté et échevin sérésien, gure qui traversaient le PCB, de la base donneront naissance au Front de
populaire du parti, réputé pour au sommet. Nombreux sont ceux l’indépendance4, concrétisant
son talent oratoire, en est le princi- qui l’avaient rejoint avant la une volonté de s’engager dans
pal meneur. Il est devenu courant guerre parce qu’ils voyaient en lui une résistance qui ne se limite plus
d’afrmer que les communistes l’adversaire le plus inconditionnel à la lutte sociale.
belges ont attendu le 22 juin 1941, du fascisme. Malgré la confusion
date de l’agression nazie contre causée par un discours ofciel de Le dimanche 22 juin 1941, conjoin-
l’URSS, pour entrer en résistance. neutralité, interdisant de choisir tement avec l’attaque contre
entre l’Allemagne et le Royaume- l’Union soviétique, les Allemands
La réalité est cependant plus Uni, il était évident que l’Ordre lancent l'opération Sonnen-
complexe. Par délité incondition- nouveau était inacceptable et wende (Solstice d’été) dans les

18 TRACES DE MÉMOIRE
Le Drapeau Rouge, 1er juin 1941

© DR

Appel à la grève générale, suite aux rafles


© DR

de Juifs à Amsterdam en février 1941

zones occupées, qui consiste en La « grève des 100.000 » ne fait


une arrestation massive de mili- l’objet d’aucune commémora-
tants et sympathisants commu- tion ofcielle. Hormis quelques ini-
nistes. En Belgique, plusieurs cen- tiatives personnelles ou locales, les
taines de militants, souvent impli- mouvements sociaux n’occupent
qués dans la grève de mai 1941, d’ailleurs pas de place véritable
sont arrêtés. Emprisonnés à Breen- dans la mémoire de guerre. Cela
donk ou au fort de Huy, bon pose question, vu leur nombre im-
nombre d’entre eux seront en- portant, en Belgique et ailleurs.
voyés dans des camps de con- Faut-il voir dans cette absence (1) José Gotovitch, Du rouge au trico-
centration ; beaucoup n’en re- des raisons purement politiques ? lore. Les communistes belges de 1939
viendront pas. Parce que le climat de la guerre à 1944. Un aspect de la Résistance en
froide ne favorisait pas la mise en Belgique, Bruxelles, Labor, 1992,
Les faits de résistance – mais aussi valeur de mouvements où les p. 112.
de collaboration – au sein des en- communistes avaient pesé ? (2) https://www.cheminsde-
memoire.gouv.fr/fr/la-greve-des-
treprises ont presque totalement Existe-t-il d’autres raisons ? Des
disparu de la mémoire collective questions de classes, de représen- mineurs-du-nord-pas-de-calais, con-
sulté le 15 février 2021.
en Belgique. tations, de concurrences mémo-
(3) Les atermoiements qui secouent le
rielles, etc. ? L’intérêt des histo- parti entre août 1939 et juin 1941 ont
En Italie, en France ou aux Pays- riens pour la construction des mé- été longuement analysés, notam-
Bas, cette histoire est (un peu) moires de la guerre, de l’Occupa- ment dans Jules Gérard-Libois et José
mieux connue, mais pas pour au- tion et de la Résistance est relati- Gotovitch, L’An 40. La Belgique occu-
tant beaucoup plus commémo- vement récent. La mémoire des pée, Bruxelles, Le Crisp, 1971, ou dans
rée. Amsterdam se démarque luttes collectives mériterait assuré- la monographie citée dans la pre-
quelque peu, célébrant chaque ment qu’on s’y attarde un peu mière note.
(4) La date du 15 mars 1941, souvent
année, ofciellement, la grève plus.
citée, relève plus du mythe que de la
générale des 25 et 26 février 1941, réalité, mais l’élaboration d’un réseau
déclenchée pour protester contre et d’une politique de lutte pour l’in-
les raes de Juifs par l'occupant Yannik van Praag dépendance est en gestation depuis
nazi. ASBL Mémoire d’Auschwitz cette époque.

N° 43 - MARS 2022 19
Réflexion

FEMMES ET RÉSISTANCE PASSIVE


Andrée Geulen, jeune institutrice bruxelloise,
a contribué à cacher et sauver environ 300 enfants juifs
durant la Seconde Guerre mondiale
© Kazerne Dossin/Fonds Geulen

Défendre des valeurs et sauver diffusion de journaux et tracts de taires, de résistants, de prisonniers
des vies contre-propagande hostiles à de guerre évadés ou de soldats
Tout comme les hommes, les l’occupant. Enn, elles se sont en- alliés devront leur survie à l’action
femmes ont résisté activement, gagées en soutenant les familles d’anonymes, et parmi ceux-ci de
mais aussi de façon passive à la des victimes de la répression. Soli- nombreuses femmes qui leur ont
présence de l’occupant. Que ce darité, l’organisme d’entraide fourni un abri et de la nourriture.
soit de manière individuelle ou clandestin du Front de l’Indépen-
collective, elles ont exprimé leur dance, comptait des milliers « Du pain, du lait pour nos
refus de la domination allemande d'hommes, mais surtout de gosses ! »
et se sont engagées de manière femmes qui se sont dévouées an Des femmes ont également ex-
pacique pour défendre les va- de récolter et distribuer des fonds primé leur opposition en prenant
leurs antifascistes ou pour sauver aux proches des résistants captu- part à la contestation sociale.
des vies menacées par le régime rés par l'ennemi. Elles ont été le fer de lance du
nazi. Cette « résistance de solidarité » mouvement de protestation dé-
La résistance des femmes s’est ex- dans laquelle les femmes se sont nonçant les défaillances du ravi-
primée de différentes façons. Tout particulièrement distinguées con- taillement allemand. Étant au
d’abord de manière symbolique. nait un essor important à partir de centre du foyer, elles ont ressenti
Elles n’ont pas hésité à déer l’oc- la n de l’année 1942. Le nombre de manière plus aigue les pénu-
cupant en montrant leur attache- de personnes recherchées par ries provoquées par l’Occupation
ment patriotique lors de manifes- l’occupant augmente considéra- et les difcultés à nourrir leur fa-
tations publiques, comme ce fut blement suite à l’imposition du tra- mille au quotidien. Dès le mois de
le cas le 11 novembre 1940 à vail obligatoire en Allemagne et à décembre 1940, elles se sont mo-
Bruxelles. Ce jour-là, aux côtés des la mise en œuvre de la déporta- bilisées pour réclamer des me-
hommes, des centaines de tion des Juifs. Ces deux mesures sures qui pouvaient améliorer le
femmes bravant l’interdiction, ont ont incité nombre de femmes à quotidien. Par la suite, leur action
rendu hommage au Soldat in- braver le danger et à cacher des s’est intensiée et, à la n du mois
connu. Plus concrètement, les clandestins ; leur motivation était de mai 1941, le Comité des ména-
femmes ont, dès le début de l’Oc- autant humanitaire que politique. gères a organisé une grande
cupation, participé de manière Jusqu’à la n de l’Occupation, marche qui a rassemblé plus de
importante à l’élaboration, et à la des milliers de Juifs, de réfrac- 3 000 femmes délant dans les

20 TRACES DE MÉMOIRE
La Voix des Femmes n° 2, juin 1941
© Cegesoma

Détenues avec leur bébé peu après la


libération du camp de Ravensbrück.
Sans la solidarité organisée par les
autres prisonnières, ces nouveau-nés
n’auraient jamais survécu aux terribles
conditions de vie du camp
© Mahn- und Gedenkstätte Ravensbrück/Stiftung Brandenburgische Gedenkstätten

rues de Bruxelles scandant le slo- mando de travail le moins pénible moralement les unes sur les autres
gan « Du pain, du lait pour nos possible. Ne pas se laisser détruire augmentait de manière signica-
gosses ! » Au même moment se physiquement mais aussi morale- tive les chances de survie.
déroulait la « Grève des 100 000 » ment en luttant contre la déshu-
dans les bassins miniers liégeois manisation. Il fallait essayer de Sarah Timperman
tandis qu’ailleurs dans le pays, conserver sa dignité, « prendre ASBL Mémoire d’Auschwitz
d’autres femmes à Gand, Mous- soin » de soi, par exemple en fai-
cron et dans le Borinage se sont sant une toilette sommaire quoti-
mobilisées pour obtenir un meil- dienne, pour les plus chanceuses
leur ravitaillement, et la libération avec un morceau de savon, Bibliographie
des prisonniers de guerre. Elles ont maintenir une apparence phy- * Jacques Semelin, Sans armes
eu recours parfois à des interrup- sique et tenter de sauvegarder un face à Hitler. La résistance civile
tions de travail comme les travail- peu de sa féminité. en Europe (1939-1943), Paris,
leuses du textile à Gand qui ont Tout acte s’opposant aux règles Payot, 1989.
revendiqué une prime unique de du camp était un acte de résis- * Catherine Lacour-Astol, « La ré-
pouvoir d’achat en octobre 1942. tance. Dès lors, le fait d’exprimer sistance de solidarité. Une forme
sa solidarité en partageant son de Résistance révélée par la ré-
S’entraider dans les camps pain ou en protégeant une ca- pression », in Robert Vanden-
La résistance dans les camps ne marade affaiblie représentait une bussche (dir.), La clandestinité en
pouvait être par essence que pas- véritable déance envers l’ordre Belgique et en zone interdite
sive pour la majorité des déte- concentrationnaire. De la même (1940-1944), Lille, Institut de re-
nues. Se restreindre au travail pour façon, pour lutter contre le dé- cherches historiques du Septen-
saboter la production était à peu couragement, les déportées se trion, 2018, p. 51-71.
près la seule façon d’exprimer son réunissaient pour discuter, se ra- * Chantal Kesteloot, Femmes
insoumission. Résister en déporta- conter leur histoire, réciter des contre la faim et… contre l’occu-
tion signiait avant tout rester en poèmes, fêter les anniversaires... pant, site du Cegesoma : Bel-
vie : parvenir à améliorer son quo- Tous ces moments étaient interdits gium WWII https://www.belgium-
tidien en trouvant un surplus de et se faisaient en cachette des wwii.be/belgique-en-guerre/ar-
nourriture et de vêtements, éviter S.S. et des kapos. Appartenir à un ticles/femmes-contre-la-faim-et-
de prendre des coups et faire en groupe au sein duquel les déte- contre-l-occupant.html, consulté
sorte d’être affecté à un com- nues veillaient matériellement et le 21 décembre 2021.

N° 43 - MARS 2022 21
VARIA
© Fondation Auschwitz/Georges Boschloos

VOYAGE D’ÉTUDES

Les différentes visites guidées (en Français) sont complétées par de


nombreux plans, dessins, photos et témoignages

Nous visitons plusieurs musées exceptionnels.


Ci-contre le musée Radegast à Łódź

© Fondation Auschwitz/Georges Boschloos

Depuis quarante ans, la Fonda- ment de nombreux autres pays, sidant dans le Gouvernement gé-
tion Auschwitz et l’ASBL Mémoire Auschwitz s’est développé en tant néral et les 400 000 Juifs habitant
d’Auschwitz organisent chaque qu’archétype de la destruction dans la région de Białystok.
année un voyage d’études à des Juifs en Europe. Il est vrai que Au cours de ce nouveau voyage
Auschwitz et Birkenau. C’est là lorsqu’Auschwitz devient entière- d’études : « Sur les Traces de la
que la majorité des Juifs de Bel- ment opérationnel, la plus grande Shoah en Pologne » de huit jours,
gique ont été déportés. Les Juifs partie de l’« Aktion Reinhardt » nous visiterons les cinq autres
aptes au travail étaient enfermés (l’annihilation des Juifs du Gouver- centres d'extermination – c’est-à-
dans le camp de concentration nement général) était déjà ac- dire Chełmno, Majdanek, Bełżec,
et les autres tués dans le centre complie. Sobibór et Treblinka –, avec les
d’extermination. Après la première phase de la villes, ghettos (Varsovie, Łódź, Lu-
Sans vouloir minimiser le rôle destruction des Juifs, c’est-à-dire blin) et lieux de déportation cor-
d’Auschwitz – aussi bien pour l’his- après les actions meurtrières me- respondants, dans une perspec-
toire de la destruction qui a nées par les Einsatzgruppen (la tive historique et pédagogique –
frappé la communauté juive en « Shoah par balles », dans les Pays en nous aidant notamment de té-
Belgique, que pour l’importance baltes, en Biélorussie, en Ukraine moignages, de cartes et de pho-
d’Auschwitz dans son ensemble – et en Russie), qui furent psycholo- tographies –, pour retracer le par-
il est également important d’ana- giquement trop « éprouvantes » cours des déportés juifs d’Europe
lyser la Shoah en d’autres lieux à pour les meurtriers, une nouvelle de l’Est.
l’Est. Rassemblant les déportés de méthode devait être trouvée Ce voyage se déroulera selon un
l’Europe de l’Ouest, mais égale- pour les quelque 2 284 000 Juifs ré- parcours chronologique et lo-

22 TRACES DE MÉMOIRE
VOYAGE D’ÉTUDES

Lors de la visite du dernier centre de mise-à-mort,


Treblinka, nous organisons une cérémonie de clôture

Après avoir visité l’ancien ghetto des villes,


nous nous arrêtons à l’Umschlagplatz du lieu,
endroit d’où partaient les trains de déportation
vers les centres d’extermination

© Fondation Auschwitz/Georges Boschloos

© Fondation Auschwitz/Georges Boschloos

L’ancien ghetto est toujours le point de départ


© Fondation Auschwitz/Georges Boschloos dans chaque ville que nous visitons

gique ; nous visitons à chaque un arrêt sur le lieu où la population Départ : 11 juillet 2022
étape la ville concernée et l’an- juive a entamé son dernier Retour : 18 juillet 2022
cien ghetto qui s’y trouvait. Il est voyage.
important de présenter la vie, la Une séance de formation obliga- Prix : 750,00 € par personne sur
tradition et la culture juive toire est organisée quelques se- base de chambre double (un sup-
d’avant la Seconde Guerre mon- maines avant le départ, an d’ini- plément de 150,00 € par personne
diale. tier le futur participant à la struc- sera demandé pour une chambre
An de permettre le fonctionne- ture complexe et à l’histoire de la individuelle). Ce prix comporte le
ment de l’« Aktion Reinhardt », Shoah en Pologne. La matière vol aller-retour Bruxelles-Varsovie,
trois centres d’extermination ont présentée durant cette séance 7 nuitées dans des hôtels confor-
été construits (Bełżec, Sobibór et est indispensable pour une bonne tables avec copieux buffet au pe-
Treblinka) ; ceux-ci étaient totale- compréhension de ce pan de tit-déjeuner, deux repas chauds
ment différents de l’image que l’histoire de la Shoah. Celle-ci per- par jours, bus privé avec chauf-
nous avons d’Auschwitz en ce qui mettra à l’accompagnateur de feur tout le long du séjour, les
concerne leur structure. À partir replacer, durant le voyage, ces guides dans différents musées et
de début 1942 et jusque n 1943, lieux méconnus dans un en- tous les tickets d’entrée pour les
environ 1 650 000 Juifs ont été dé- semble cohérent. musées et les sites que nous visi-
portés des ghettos et exterminés tons en groupe.
dès leur arrivée. Attention ! Le nombre de partici-
Avant de nous rendre sur le centre pants est fortement limité. Renseignements et inscriptions :
d’extermination, nous marquons georges.boschloos@auschwitz.be

N° 43 - MARS 2022 23
INSCRIT TON ÉCOLE POUR
vARia
OBTENIR LE LABEL
BALISES POUR LA CITOYENNETÉ
Nous nous demandons souvent deux commissions pédagogiques, reconnues pour leur travail. Les
comment préparer nos enfants à francophone et néerlandophone, établissements intéressés devront
vivre dans ce monde qualié de de mettre en lumière les écoles nous renvoyer leur demande de
« turbulent », comment leur ap- qui font des efforts particuliers participation par mail via :
prendre à rééchir de façon indé- dans le domaine de l'éducation georges.boschloos@auschwitz.be
pendante et critique, comment de la mémoire et qui prennent
leur enseigner le « vivre en- l'initiative d'enseigner tolérance, C’est la date de la commémora-
semble », comment les aider à respect et responsabilité civique, tion de la libération du camp
communiquer avec « l’autre » en leur attribuant le label « Balises d’Auschwitz, le 27 janvier, que
dans le respect et la compréhen- pour la citoyenneté ». nous avons choisie pour la céré-
sion. monie de remise des labels, et
Nous voulons reconnaître chaque l'Atelier Marcel Hastir à Bruxelles
Enseigner les valeurs attachées à année les efforts de citoyenneté comme endroit, pour des raisons
la citoyenneté est aussi important qui ont été entrepris par les ensei- historiques : C'est dans ce lieu que
que d’apprendre à lire et à écrire. gnants, par les élèves et par les di- trois jeunes gens ont pris la déci-
recteurs. Toutes les écoles secon- sion d’arrêter le XXe convoi de
L’ASBL Mémoire d’Auschwitz a daires du pays sont contactées et Malines vers Auschwitz, acte ul-
décidé, en collaboration avec ses informées de la possibilité d’être time de citoyenneté.

mémoire d’auschwitz asbl - fondation AuschwitZ www.auschwitz.be


rue aux laines 17/Bte 50 - 1000 Bruxelles - Tél.: +32 (0)2 512 79 98 info@auschwitz.be
Directeur de la publication : Henri Goldberg Avec le soutien de :
Rédacteurs en chef : Frédéric Crahay, Johan Puttemans
Secrétaire de rédaction : Georges Boschloos
Comité de rédaction : Jean Cardoen, Dirk Lagast,
Yves Monin, Thierry De Win, Yannik van Praag
Traductions vers le Français : Ludovic Pierard SPF Sécurité Sociale
Graphiste : Georges Boschloos Services des
Victimes de la Guerre

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