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Revue Économie, Gestion et Société Vol 1, N°38 février 2023

AGADIR :
PORT ET SYSTEME DE TRANSPORT URBAIN

AGADIR:

PORT AND URBAN TRANSPORT SYSTEM

Par
El Mati OUARMASSI
Docteur en Géographie et Aménagement du Territoire, Université Ibn
Zohr, Agadir.
ouarmassi143@gmail.com
&
Mohamed CHBAICHB
Docteur en Géographie et Aménagement du Territoire, Université Ibn
Zohr, Agadir.
chbaichb@gmail.com

Résumé
L’interaction port-système du transport est l’une des relations les plus importantes et
compliquées entre le port et sa ville. Un grand générateur des déplacements, le port influence
souvent l’organisation de l’infrastructure du transport terrestre et induit des
dysfonctionnements structurels relatifs aux problèmes de congestion. Cet article tente
d’analyser la place du port dans la planification et l’organisation de l’infrastructure du
transport et ses impacts sur les déplacements urbains dans l’agglomération d’Agadir.

Mots clés : Port, système du transport, relation ville-port, déplacements urbains, Agadir.

Abstract

The port-transport system interaction is one of the most important and complicated
relationships between the port and its city. A major generator of travel, the port often

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influences the organization of land transport infrastructure and induces structural dysfunctions
relating to congestion problems. This article attempts to analyze the place of the port in the
planning and organization of transport infrastructure and its impact on urban travel in the
Agadir agglomeration.

Keywords: Port, transport system, city-port relationship, urban travel, Agadir.

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Introduction
La question de la planification des transports terrestres urbains est un enjeu pour la ville que
pour le port, car la superposition des flux portuaires avec les flux locaux génère une
congestion routière préjudiciable d’un point de vue portuaire et urbain. D’ailleurs, au niveau
de différents documents de planification urbaine, la problématique ville-port se limite souvent
à la question du transport.

La présence du port dans une agglomération contribue à structurer les réseaux de transport qui
l'irriguent. Symétriquement, la qualité des infrastructures et le système de transport terrestre
impactent le développement de l’activité portuaire. L’on aborde ainsi l’analyse de l’une des
principales interactions entre le port et la ville au Grand Agadir à travers l’examen des
impacts mutuels entre l’activité portuaire et le système de transport. L’accent sera focalisé sur
le transport de marchandises ainsi que les déplacements de la main d’œuvre portuaire.

1- Port et configuration de l’infrastructure routière


L’agglomération du Grand Agadir est connecté à son environnement par l'ensemble des axes
routiers aux échelles régionale et nationale ; par le port Agadir et l'aéroport d’Al Massira au
plan international. Concernant les infrastructures routières, le port et l’agglomération sont
desservis par deux axes routiers de niveau national, à savoir la route nationale RN1 qui lie
l´agglomération avec les provinces du Sud et les régions du Nord en plus de la route nationale
RN10 vers Taroudant et Ouarzazate. Agadir est également liée au réseau autoroutier par le
tronçon Marrakech-Agadir d’une longueur de 230m. À cela s’ajoute la route régionale qui
raccorde la RN1 à Biougra à travers Lqliâa, ainsi qu’un réseau routier relativement dense
reliant le port avec le reste de son hinterland régional (plaine et montagnes du Souss et du pré-
sahara de Tata).

En l’absence de liaison ferroviaire, la route constitue l’unique infrastructure de transport pour


l’accès au port. Alors que la compétitivité de ce dernier est influencée, en plus de ses
infrastructures et équipements, par la qualité des liaisons avec l’hinterland.

L’activité du port nécessite donc d’être soutenue par un réseau de transport plus adéquat dans
l’agglomération et l’arrière-pays pour distribuer rapidement les marchandises et adapter le
transport maritime aux autres modes de transport. Ce qui permettra davantage une meilleure
circulation des marchandises du port vers l’arrière-pays, et celles de ce dernier vers le port.

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Le port d’Agadir, qui se soucie de sa compétitivité, se trouve donc obligé de renforcer ses
relations avec son hinterland, notamment urbain. Une excellente relation entre port et
ville/région et le soutien de cette dernière sont une des conditions essentielles de sa
compétitivité.

Carte 1- Voies structurantes et localisation des principales zones d’activités au Grand


Agadir

Carte réalisée par les auteurs

Actuellement, l’accès au port se fait à travers la route d’Essaouira qui accueille un fort trafic
par une bretelle détournée qui implique un détour relativement important si on vient d’Agadir
centre, ce qui provoque souvent l’emprunt d’une voie à contre sens pour les deux roues, avec
des risques pour leur sécurité. Les piétons traversent aussi cette zone très passante dans des
conditions de sécurité qui ne sont pas optimales. La spécificité de la zone portuaire doit être
donc mieux prise en compte dans la planification des infrastructures routières du fait qu’elle
est surtout un lieu de travail, et un grand générateur de déplacements de toutes sortes
d’usagers. Ces derniers ont des habitudes et des comportements sociaux spécifiques qui

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doivent être prises en considération à travers des aménagements dédiés (poids lourds, tri-
porteurs, deux roues, piétons, …).

Au niveau urbain, l’insuffisance et l’inadaptation des infrastructures du transport mènent à


des problèmes de mobilité au niveau du port et de la ville. De plus, la morphologie de
l'agglomération rend difficile la résolution des problèmes de transport que génère l'énorme
débit de trafic qui y conflue, en raison des possibilités limitées de création de voies de
communication interne et le manque des voies de contournement.

La nature du site constitue une contrainte majeure au développement des infrastructures ; le


port lui-même peut être considéré comme une contrainte pour le développement de
l’infrastructure routière au Nord de la ville. En fait, l’emplacement du port et de la zone
industrialo-portuaire d’Anza constitue une sorte d’obstacle du fait qu’il réduit les possibilités
de connexion routière entre la ville et les quartiers du Nord, de même que le trafic des
marchandises vers le port doit traverser la ville, engendrant ainsi des problèmes de
circulation. Ainsi, les déplacements entre la zone portuaire et la ville sont-ils de plus en plus
difficiles au fur et à mesure que les volumes de trafics augmentent.

Concernant l’organisation de l’infrastructure routière, elle est axée autour des deux routes
principales la R.N1 et la R.N 10 qui ont comme point commun la sortie du port. Étant
parallèles, ces deux axes entourent la ville pour converger ensuite au niveau de la commune
d’Ait Melloul. Ils ont été au centre de tous les aménagements routiers proposés dans le cadre
du SDAU de 1978 ou celui du plan de transport du Grand Agadir ou encore celui du SDAU
de 1987 (Rehaimi H., 2013).

La RN1 est considérée comme une voie de contournement qui a été réalisée pendant la
période de reconstruction de la ville après le séisme de 1960. Elle limite la ville à l'Est et
dessert également les zones industrielles de Tassila et Ait-Melloul, au Sud-Est. C'est un axe
routier qui joue un rôle primordial, car il constitue l'entrée de la ville en arrivant de Marrakech
comme il relie les zones limitrophes d'Agadir au port.

La RN10, quant à elle, constitue l'épine dorsale de la trame viaire à l'échelle de la ville. Elle
est le seul axe qui traverse la ville d'une manière franche du Nord au Sud. Elle est prolongée
au nord par la RP 8 et articule l'ensemble de l’agglomération : port, Agadir, Dcheira, Inezgane
et Ait-Melloul. Elle constitue également un axe de continuité et d'organisation urbaine propice

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à l'animation touristique. Mais, elle cause une séparation physique remarquable entre la ville
et le secteur touristique. En effet, cette route coupe la ville en deux parties : le secteur
touristique et les autres secteurs posant ainsi des problèmes de liaison directe entre la ville et
la mer.

2- Place du port dans les déplacements urbains


Au plan de la mobilité urbaine, fort est de constater tout d’abord l’existence d’un grand
nombre de voyages intérieurs et de courts trajets à l’intérieur de l’agglomération supportés par
les voies urbaines. En effet, la plupart des voyages au niveau de l’agglomération ont leur
origine et leur destination dans les centres d'Agadir et d’Inezgane qui jouent un rôle
d’échangeur au niveau des deux grandes places du transport en commun : Inezgane et quartier
Hay Hassani (Abattoir) (bus, petits et grands taxis). Le trafic intérieur est donc très important
et s’effectue en trajets courts.

2.1- Le port, un important générateur de déplacements urbains


Le port constitue un des grands générateurs de déplacements urbains vu l’importance de son
activité et l’existence dans son enceinte d’un grand nombre d’entreprises. C’est un pôle
d’emploi qui attire des milliers de travailleurs quotidiennement. En effet, en plus du trafic de
marchandises, il existe un trafic quotidien d’une importance non négligeable généré par les
travailleurs du port. Pour le seul port de pêche, le nombre des marins atteint 13.896 marins
dont 2.500 permanents à terre et 6.500 temporaires (SDAU, 2015). En plus du port, les unités
de traitement des produits halieutiques, installées à sa proximité, sont d’importants
générateurs de déplacements. À cela s’ajoute la zone de restauration ‘Bab El Marsa’ située à
côté de l’entrée de port de pêche. En effet, plusieurs restaurants (spécialité poisson) sont assez
fréquentés par la population locale, les touristes nationaux et internationaux.

D’une manière générale, le port génère entre 20.000 et 30.000 déplacements (tous modes
mécanisés) par jour. Si on prend en considération uniquement les déplacements entre les
centres de l’agglomération, Agadir génère à elle seule presque un tiers des déplacements
(31%), suivie d’Inezgane (24%). Viennent ensuite Tikiouine (14%) et Ait Melloul (13%) ;
alors que la zone portuaire reçoit 7% de ces déplacements (SDAU, 2015).

Photos 1 et 2- L’entrée du port de pêche, un point noir de congestion

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Source : Clichés des auteurs, 23 ‎Mars ‎2019

S’agissant du transport en commun, en plus des grands et de petits taxis, le port d’Agadir est
desservi par le bus. Différentes lignes le lient vers Agadir et les différents centres
périphériques.

2.2- Port et transport en bus

Avant l’avènement du nouveau concessionnaire (ALSA), la liaison entre le port et le reste de


l’agglomération s’effectuait par une dizaine de lignes de transport en bus (RATAG,
ZETRAP). Mais, cette liaison enregistrait des ruptures dans quelques lignes. À titre
d’exemple, la liaison entre le port et Lqliâa par ZETRAP était assurée successivement par
trois bus, du port par la ligne 1 jusqu’à la place Salam, puis par les lignes 5 ou 6 jusqu’à
Inezgane et enfin par la ligne 8 d’Inezgane à Lqliâa. Mais, « À partir de 1998, les services
techniques de la wilaya ont créé une nouvelle ligne (25) assurant directement le trajet entre
les deux points du Grand Agadir, tout en évitant la rupture de charge pour les usagers et en
optimisant la durée du trajet et le coût du déplacement »1.

Après l’avènement du nouveau concessionnaire en 2010, les lignes couvertes par le service
des bus suivent les mêmes anciens tracés pour la majorité. À l’origine, les lignes unissaient le
port avec des points éloignés. La fréquence moyenne de ces lignes était toutes les 20 minutes,
avec un prix relativement élevé pour les courts trajets (Commune urbaine d’Agadir, PDU,
2015).

Carte 2- Lignes de bus liant le complexe portuaire et l’agglomération en 2010

1
HnakaZainab, 2018, « L’évolution de l’offre de transport collectif en bus au Grand Agadir entre 1978 et
2017 », Revue Espace Géographique et Société Marocaine, N°23, p.70
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Source : Services de la compagnie Alsa Carte réalisée par les auteurs

En 2013, les lignes liant le port à l’agglomération deviennent plutôt linéaires vers Aourir et
Taghazout au Nord et vers Inezgane et Temsia au Sud. Tandis que Drarga et Tikiouine à l’Est
ne sont plus desservis par des lignes directes vers le port.

Actuellement, les lignes liant directement le port à l’agglomération sont au nombre de 4 dont
3 vers le Nord de la ville (lignes n° 4, 31 et 8) et 1 vers Inezgane (ligne n° 98).

À cela s’ajoutent d’autres lignes passant par la route nationale N°1 vers le Nord (Aourir,
Taghazout, Tamri). Certes, ces lignes ne passent pas par la route desservant directement le
port mais, une partie de la main d’œuvre préfère se déplacer vers le boulevard Mohammed V
pour prendre ces bus qui desservent les zones de leur résidence (lignes 32 et 33 vers le Nord
de la ville).

Carte 1- Lignes de bus liant le complexe portuaire et l’agglomération en 2021

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Source : Services de la compagnie Alsa Carte réalisée par les auteurs

D’autres lignes peuvent également concernés indirectement le complexe portuaire. Il s’agit


des lignes dont le terminus est au niveau de la Wilaya et qui desservent les zones habitées par
la main d’œuvre portuaire (Drarga, Tikiouine, Hay Mohammadi et piémont, Salam, El Houda,
Bouargane,…).

Toutefois, la seule ligne prenant le port comme terminus est celle de 98 qui lie le port de
commerce à Inezgane. Les comptages réalisés ont révélé que le nombre de passagers utilisant
cette ligne tout au long d’une semaine (du lundi 02 à dimanche 08 Juillet 2019), en prenant en
compte les départs à partir du port de commerce et celui de pêche. Le comptage est enregistré
par heure du 6h00 matin à 21h00 soir chaque jour de la semaine. Les résultats sont illustrés
dans les tableaux ci-dessous.

Tableau 1- Nombre de passagers utilisant la ligne 98 pour le départ du port de


commerce

Horaires Port de commerce Total


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Mercre Vendre Dimanc


Lundi Mardi Jeudi Samedi
di di he
06:00-
3 13 10 28 13 8 2 77
06:59
07:00-
80 35 64 55 84 152 25 495
07:59
08:00-
37 68 21 46 43 19 15 249
08:59
09:00-
43 73 22 18 52 68 44 320
09:59
10:00-
58 84 32 43 133 94 24 468
10:59
11:00-
79 120 69 124 97 111 78 678
11:59
12:00-
64 16 68 50 102 171 21 492
12:59
13:00-
76 92 104 113 85 153 48 671
13:59
14:00-
36 61 138 93 97 100 48 573
14:59
15:00-
122 63 25 58 95 18 23 404
15:59
16:00-
101 41 38 58 87 37 20 382
16:59
17:00-
126 63 75 118 135 128 54 699
17:59
18:00-
50 37 39 112 183 98 5 524
18:59
19:00-
44 6 26 38 66 83 36 299
19:59
20:00-
- - - 39 31 14 15 99
20:59
Total 919 772 731 993 1303 1254 458 6430
Source : Comptage à l’aide des services de la compagnie d’Alsa, Juillet 2019

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Tableau 2- Nombre de passagers utilisant la ligne 98 pour le départ du port de pêche

Port de pêche
Horaires Total
Lundi Mardi Mercredi Jeudi Vendredi Samedi Dimanche
06:00-06:59 9 0 3 0 0 0 0 12

07:00-07:59 23 16 9 0 10 0 6 64

08:00-08:59 7 11 4 3 8 3 0 36

09:00-09:59 4 7 14 16 0 0 2 43

10:00-10:59 35 87 6 11 32 0 0 171

11:00-11:59 28 21 18 7 35 0 0 109

12:00-12:59 34 15 34 66 0 0 0 149

13:00-13:59 13 22 14 34 0 0 0 83

14:00-14:59 27 36 13 11 0 42 0 129

15:00-15:59 19 0 41 32 21 35 14 162

16:00-16:59 15 17 68 23 10 8 37 178

17:00-17:59 20 52 69 6 14 7 33 201

18:00-18:59 13 41 53 23 0 14 40 184

19:00-19:59 3 7 11 8 14 13 2 58

20:00-20:59 - - - 0 0 11 12 23

Total 250 332 357 240 144 133 146 1602

Source :Comptage à l’aide des services de la compagnie d’Alsa, Juillet 2019


Si on prend la totalité des départs au niveau des deux arrêts (port de commerce et port de
pêche), le nombre des passagers prenant la ligne 98 pour leur retour est illustré dans le tableau
suivant.

Tableau 3- Le nombre des passagers utilisant la ligne 98 pour leur retour du port

Nombre de passagers
Lundi 1169
Mardi 1104
Mercredi 1078
Jeudi 1233
Vendredi 1447
Samedi 1387
Dimanche 604
Total 8022

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Ainsi, en prenant en compte seulement la seule direction Port-Inezgane, la ligne 98 assure le


déplacement d’une population dépassant 8000 personnes par semaine, soit une moyenne de
plus de 1145 personnes par jour.

D’autre part, l’on remarque que la grande partie des déplacements concerne le port de
commerce qui regroupe plus de 80% des passagers utilisant cette ligne. Ce qui montre que la
main-d’œuvre résidant dans les quartiers desservis par la ligne 98 est composée
majoritairement des employés des unités industrielles localisées dans le port de commerce
ainsi que ceux des entreprises d’exploitation et de traitement des marchandises.

2.3- Réseaux de taxis et transport informel

Pour les grands taxis, la place du port connait elle aussi une certaine dynamique quotidienne.
Selon nos enquêtes, le nombre de taxis dépendants officiellement de cette place est de l’ordre
de 35 taxis. Toutefois, d’autres taxis peuvent desservir le port dans les périodes
d’augmentation de la demande. Le nombre de taxis peut ainsi aller de 50 à 60 taxis. Les deux
importantes lignes desservis sont le port-Inezgane et le port-Aourir en passant par Anza.

Si on prend en compte seulement les taxis liés officiellement à la place du port (35 taxis) et
qui assurent chaque jour entre 15 à 20 départs (6 personnes par voyage), le nombre de la main
d’œuvre transportée peut dépasser 4.000 personnes par jour. Ce nombre concerne seulement
le port de pêche ; le port de commerce n’étant pas doté d’une station de taxis. Il est desservi
par le bus et le transport clandestin. Le complexe portuaire est également desservi par les
petits taxis de la ville qui circulent même à l’intérieur de l’enceinte portuaire.

Photo 3- Taxis et véhicules de transport informel à l’entrée du port de pêche

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Source : Cliché des auteurs, 2021

À côté du Bus et des grands taxis, le transport informel2 assure aussi la liaison entre le port et
les différentes zones d’Agadir pour le transport de d’œuvre portuaire, issue notamment des
zones du Nord (Anza, Taddart, Aourir,…) ainsi qu’Inezgane.

Une dizaine de véhicules de ce type s’installe d’une manière permanente à côté des entrées
du complexe portuaire. Ce type de transport substitue le manque du transport public
réglementaire surtout dans les heures de pointes qui correspondent à l’entrée ou la sortie
massive de la main d’œuvre (6h00-8h00 et 18h00-20h00).

Concernant les zones desservies, le transport informel est destiné principalement à la zone
Nord de la ville, notamment Taddart (Haut-Anza). Un parc dépassant 50 véhicules de
différentes capacités (voiture particulière, camionnette, …) assure donc le transport de la
main-d’œuvre portuaire à un prix abordable : le port-Taddart à 3dhs, un prix que les taxis ne
peuvent concurrencer, c’est pour cela que la zone de Taddart par exemple n’est pas desservie
par les grands taxis. Le nombre de la main d’œuvre concernée par ce type de transport
avoisine, selon nos estimations, 3.000 personnes par jour.

2
Il s’agit d’un transport informel mais non clandestin du fait que les véhicules stationnent chaque jour à côté
des portes du port pour transporter la main d’œuvre. Une partie des transporteurs exercent d’autres
professions et font de cette activité une autre source de revenu en assurant le transport de la main d’ouvre
pendant les premières heures de matin et le soir. Pour d’autre, cette activité est leur unique source de revenu.
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Pour le transport des employés, à signaler qu’il existe aussi des opérateurs spécialisés qui
prennent en charge le transport des employés jusqu’au lieu de travail (le cas de l’entreprise
Lux) sachant que les parcours suivis par le transport en commun ne coïncident pas
parfaitement avec les localisations des entreprises. Ainsi, une partie des employeurs délèguent
aux entreprises privées le transport de leur personnel afin de minimiser les retards. Ce mode
de transport représente environ 14 500 déplacements par jour ouvrable (Commune urbaine
d’Agadir, 2014). D’autres entreprises utilisent leurs propres véhicules utilitaires (camions,
camionnettes, pickup) pour le transport de la main d’œuvre surtout celles de la zone
industrielle d’Ait Melloul dont l’aire de recrutement est relativement vaste (Amskroud,
Agadir, Drarga, Lqliâa,…). En effet, le nombre des déplacements effectués par ces véhicules
utilitaires au niveau des quartiers industriels et autres zones d’activités du Grand Agadir
dépasse 6200 déplacements par jour ouvrable (Commune urbaine d’Agadir, 2015), ce qui
représente environ 0,5% des déplacements urbains de l’agglomération.

2.4- Vers des systèmes de transport alternatifs

Dès le premier SDAU d’Agadir en 1978, on a envisagé l’utilisation du transport ferroviaire.


Le côté de sol réservé au couloir ferroviaire est toujours pris en compte par les documents
d‘urbanisme même si, jusqu’à aujourd’hui, il n’existe aucune étude concrète pour la
réalisation de ce projet. Au niveau des stratégies nationales, il est prévu que le train à grande
vitesse arriverait à Agadir en 2030. L’implantation de ce grand projet révolutionnerait sans
doute la structure de transport au niveau de toute la région.

Un autre grand projet qui vient d’être lancé est celui de bus à haut niveau de service (BHNS)
qui reliera le port à Tikiouine dans une première phase et Agadir à Aït Melloul via Inezgane et
Dcheira ensuite. La première ligne, dont la mise en service est prévue en 2018, aura une
longueur de 10Km et desservira le port et le secteur de Tikiouine en passant par le centre-
ville, la cité universitaire et le quartier industriel de Tassila. Ce bus facilitera les déplacements
tout en valorisant les espaces publics et en réduisant les nuisances environnementales. L’un
des grands pôles d’échange de cette ligne est prévu au niveau de l’entrée du port de pêche.

Carte 2- Tracé du projet de bus à haut niveau du service BHNS

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Source : Commune urbaine d’Agadir Carte réalisée par les auteurs

Toutefois, on remarque que les quartiers de la zone Nord du port (Anza, Taddart, Aourir) et
les quartiers et commune du Sud-est (Bensergao, Dcheira, Inezgane, Ait Melloul,…) ne sont
pas intégrés dans la ligne de BHNS, même si une grande partie de la main-d’œuvre portuaire
réside dans ces zones.

3- Trafic portuaire et trafic urbain : le problème de congestion


La situation actuelle de l’accès terrestre au port et de sa liaison avec son hinterland constitue
une contrainte majeure pour son développement (augmentation des coûts et des délais de
livraison), ainsi que pour les déplacements urbains et le cadre de vie de la ville (pollution,
bruit, congestion, accidents,...). En effet, la congestion routière est l’une des principales
contraintes du fonctionnement du port d’Agadir. Au même temps, la congestion routière
générée par le port impacte négativement la ville, mais aussi le port en augmentant les temps
de retard et le coût du transport.

Les contraintes de mobilité représentent donc un problème sérieux pour la compétitivité de


l’économie locale et régionale qui dépend du transport par route pour aller aussi bien au port
qu’au reste du pays en passant par la conurbation. Ce problème est accentué par l’absence des
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infrastructures alternatives à la route, notamment la voie ferrée ; ce qui fait que le transport
routier est le seul moyen de transport des marchandises au niveau de la région d’Agadir. Une
autre source de problème est liée au trafic de transit qui n’a pas d’autre choix que de traverser
les centres urbains de l’agglomération à cause de l’absence des voies de contournement
adéquates à l’extérieur des tissus urbains.

Au niveau d’Agadir, le trafic du port traverse l’espace urbain causant ainsi des problèmes de
mobilité et une saturation des routes principales notamment celle liant le port au Nord à
l’aéroport au Sud en traversant le secteur de Tikiouine déjà congestionné. Cette route supporte
l’ensemble du trafic liant le port à Marrakech au Nord, à l’arrière-pays régional (Souss et
Drâa) à l’Est et aux provinces sahariennes au Sud via Tiznit. En plus de la congestion
routière, ce trafic génère des grands impacts négatifs au que ce soit au niveau économique,
spatial ou environnemental.

La création de plusieurs giratoires n’a pas amélioré la situation des déplacements dans cet axe.
En effet, dans le tronçon routier entre le port et l’aéroport, sur une longueur d’environ 20 km,
il existe 21 giratoires, soit presque 1 giratoire/km. La plupart d’entre eux connaissent une
saturation forte aux heures de pointe, ce qui augmente aussi le taux de pollution et génère
également une pollution sonore.

Photo 4-Trafic du port en interaction avec le trafic urbain

Source : Clichés des auteurs, 2021


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Un autre grand problème de circulation est lié au fait que le même réseau routier a plusieurs
utilisateurs (poids lourds, taxis, voitures privées, deux roues,…). Alors qu’en termes de
compétitivité économique, des passages spécialisés doivent être réservés par exemple aux
camions qui ont le port comme destination, ainsi que pour les trafics de passage de long trajet
qui sont obligés de traverser les centres urbains ; ce qui entraine l’augmentation du temps et
de coût des déplacements pour l’ensemble des utilisateurs.

Du côté du port, la voie qui conduit à la zone portuaire occasionne généralement un


engorgement remarquable, surtout en période de pointe. On assiste à un encombrement qui se
traduit par l’augmentation des délais d’attente, ce qui impacte négativement la performance
du port. Selon les données du PDU, et d’après les simulations du trafic routier du Grand
Agadir, l’affectation des déplacements Origine/Destination sur le réseau de voirie actuel en
heure de pointe (18:00-19:00), le tronçon entre la RN1 et le port subit de grands problèmes
de congestion. En effet, si on prend en considération le ratio ‘Volume de trafic / Capacité du
réseau’ pour l’année 2013, ce tronçon se trouve relativement congestionné pour le port de
commerce (entre 0,5 et 0,75), voire très congestionné pour le cas du port de pêche (entre 1,5
et 1,75). Autrement dit, le trafic passant par ce tronçon dépasse sa capacité réelle de 50% à
175%. Les prévisions des trafics pour les prochaines années, notamment celui des conteneurs
et celui des minerais, posent de nouveaux problèmes.

La question des déplacements a commencé donc à être l’une des sources de conflits entre la
ville et le port. Si l’intensité des flux de camions vers ou à partir du port est un signe de sa
dynamique, la congestion routière qui en résulte est remarquable plus au niveau de la ville. De
plus, les acteurs urbains supportent des coûts d’entretien des infrastructures routières
endommagés par les trafics induits par l’activité portuaire. De ce fait, la symbiose ville-port
est liée également à la capacité de répondre aux besoins du port en termes de connectivité
terrestre sans créer des problèmes de déplacements au niveau de la ville. C’est un immense
défi qu’Agadir est encore loin de relever.

Au niveau de la ville, la congestion routière liée au trafic des poids lourds est un problème qui
prend de plus en plus de l'ampleur. La même chose se remarque à l’entrée du port, notamment
dans les périodes de la haute saison agricole et de la pêche. Excepté le secteur touristique et
Inezgane (le pôle commercial de tout le Sud marocain), les tronçons congestionnés au niveau
de la ville coïncident dans la plupart des cas avec les voies de circulation des poids lourds

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ayant relation avec la zone portuaire et les zones industrielles (Tassila et Ait Melloul). Par
conséquent, le trafic portuaire constitue une contrainte majeure pour les déplacements urbains
surtout le long de la RN1 entre le port et l’aéroport par la zone de Tikiouine.

Au cours de l’année 2012, le nombre de circulations à l’entrée et la sortie du port de


commerce d’Agadir est estimé à environ 100.000 (Commission Européenne, Autoroutes
maritimes méditerranéennes II, 2013). Et si nous prenons seulement l’exemple des trafics des
céréales qui peut s’élever jusqu’à 450 000 tonnes par an, et sachant que les camions utilisés
pour ce trafic ont une capacité de 26 tonnes en moyenne, le nombre de camions nécessaires
pour l’acheminement des céréales du port vers l’hinterland dépasse les 17.300 camions par
an, soit une moyenne d’environ 47 camions par jour ; ce qui constitue une charge énorme
pour le port et pour la ville aussi. Toutefois, il est à signaler que le nombre des poids lourds
entrant/sortant du port ne reflète pas toujours le niveau de vitalité économique du port. C’est
le tonnage transporté qui offre une image exacte du trafic portuaire, car les conteneurs
transportés sont parfois vides3. Par conséquent, la congestion du port ne reflète pas toujours sa
dynamique.

Toutefois, les incidences de l’activité portuaire ne concernent pas seulement le trafic de la


zone portuaire mais aussi celui relatif aux différentes unités agroalimentaires dans les
différents quartiers industriels de la ville. Ces unités génèrent des circuits spécifiques ayant
pour la plupart le port comme point de départ ou d’arrivée. À titre d’exemple, les produits de
la mer suivent un circuit du type aller-retour puisque après leur débarquement au niveau du
port, ils sont ensuite transportés vers les unités de traitement dans les différentes zones de la
ville avant d’être transportés à nouveau vers le port pour l’exportation. La ville joue ici le rôle
de centre de valorisation pour le port lui permettant de valoriser son trafic à travers
l’exportation des produits transformés.

Il n’en reste pas moins qu’en plus de l’absence de voies dédiées à ce type de trafic, les
mesures de sécurité ne sont pas prises en compte par la plupart des transporteurs. En effet, les
conteneurs et les marchandises transportés sont souvent attachés avec des sangles ou des
cordes sur un plateau sans être bien arrimés. Ce qui constitue une menace pour l’ensemble des

3
Une importante partie des conteneurs à l’importation sont vides. Ils correspondent à des retours à vide des
trafics de primeurs et agrumes exportés par le port.
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utilisateurs de la route. Des conteneurs ont ainsi chaviré à plusieurs reprises sur la RN1
paralysant ainsi la mobilité, notamment pendant des heures de pointes.

Au niveau de l’accidentalité, les points noirs se coïncident souvent avec les principales voies
de passage des poids lourds, surtout près des intersections principales (les échangeurs le long
de la RN1, l’entrée du port, les quartiers industriels,…). D’après les procès-verbaux de la
police, la jonction RN1-RN10 à l’entrée du port de pêche comptabilise plus de 30 accidents
entre 2009 et 2012 (Commune urbaine d’Agadir, PDU, 2015).

Conclusion

La desserte du port d’Agadir et de son hinterland doit constituer une priorité pour développer
sa position dans le trafic national et international face à une concurrence de plus en plus
accentuée ; étant donné que les infrastructures de transport terrestre de bonne qualité
contribuent à rendre le port plus compétitif et à accroître l’étendue de son arrière-pays. Mais,
les problèmes de mobilité urbaine de plus en plus grands affectent à la fois le fonctionnement
du port et de la ville. En outre, la congestion dont souffrent le port et les infrastructures
routières de la ville prouve l’absence d’une adéquation entre le système du transport et la
demande réelle en déplacements, d’où la nécessité de prendre en compte l'aspect multimodal
des transports, notamment la mise en place d’un réseau ferré longtemps attendu au niveau de
la région. Dans ces conditions, l’agglomération d’Agadir deviendra un pôle multimodal des
transports en associant à la fois le transport maritime aux transports aérien, ferroviaire et
terrestre.

Bibliographie

 Commission Européenne, Autoroutes maritimes méditerranéennes II, 2013, « Études


logistiques, analyses de l’intermodalité et plans d’action », Rapport final, Maroc, 142p
 Commune urbaine d’Agadir, 2015, « Etude portant sur l’élaboration du plan de déplacements
urbains dans le Grand Agadir. Phase 4. Concertation, finalisation et approbation du document
PDU », 296p
 DUCRUET César, 2004 « Les villes-ports, laboratoires de la mondialisation », Thèse du
Doctorat en Géographie et Aménagement, Université du Havre, 435 p
 EL HJOUJI Abdellah, 1983 ; « L’aménagement urbain de l’aire d’Agadir de 1960 à 1983, sur
les interventions de l’Etat » ; Thèse de Doctorat à l’Institut d’Aménagement Régional ;
Université de droit, d’économie et des sciences d’Aix-Marseille ; Tome I ; 176p

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 EL KHAYAT Mustapha, 2002, « Enjeux logistiques et compétitivité du port de Casablanca »,


in Méditerranée, Tome 98, ‘Systèmes de transport en mutation dans l'espace euro-
méditerranéen’, pp. 105-112.
 HNAKA Zainab, 2018, « L’évolution de l’offre de transport collectif en bus au Grand Agadir
entre 1978 et 2017 », Revue Espace Géographique et Société Marocaine, N°23, pp. 57-78
 LIHOUSSOU Messan, 2014, « Ports et désenclavement territorial: cas de l’arrière-pays du
port de Cotonou », Thèse de Doctorat en géographie des transports, Université du Havre,
461p
 NACHOUI Mostafa, 2013, « Casablanca et son port, deux évolutions contrastées dans le
sillage de la mondialisation : vision prospective », in LABARONNE Daniel (Coordination),
2013, « Villes portuaires au Maghreb, acteurs du développement durable », Institut CDC pour
la recherche, Université Montesquieu, pp. 89-102.
 OUARMASSI El Mati, 2016, « Les relations ville-port à travers le tourisme de croisière. Cas
d’Agadir », Revue Espace Géographique et Société Marocaine n°15, pp. 137-144.
 OUARMASSI El Mati, 2020, « Infrastructures de transport, facteur de développement et de
structuration des activités économiques dans le Souss-Massa. Cas du port d’Agadir », Revue
des Études et Recherches en Logistique et Développement (RERLED), Edition 2020, Vol 1,
N°6, pp.92-103.
 OUARMASSI El Mati, 2021, « Les relations ville-port : essai bibliographique », Revue
Dirassat, Faculté des Lettres et des Sciences Humaines d’Agadir, Vol. 23 : N°1, pp. 27-50
 REHAIMI Hassan, 2013, « Le système de transport et la ségrégation sociale de l’espace
urbain: Cas du Grand Agadir », Thèse du Doctorat ès Sciences Economiques, Faculté des
sciences juridiques, économiques et sociales d’Agadir, 354p.

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