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ESPACE ET THÉORIES SOCIOLOGIQUES

Espace géographique: espace social organisé et mis en valeur par des groupes humains
afin de répondre à des objectifs fondamentaux (habitat, communication, production)
Production de l'espace par les sociétés: résultat d'un rapport de force entre acteurs
domination, compétition, coopération

Evolution du concept de l'espace:

sciences dures "hard science" (physique, maths) : définition claire de l'espace


sciences sociales "soft science" : définition floue ⟶ dépendance du pdv géographique
"l'espace" était considéré comme un concept secondaire, un support d'autres processus
(réalités sociologiques, économiques, historiques, représentations…)

⟶ L'espace était un « lieu » absolu où se réalisait la société (l'absolutisme ).

Avant 1980's: rôle mineur de l'espace dans la théorie sociologique.


Après 1980's: impossible d'expliquer certains changements sociologiques sans prise de
conscience de la composante spatiale. Ce changement de perspective est appelé:

Tournant spatial :

Réflexion contemporaine sur l’espace en sociologie


Affirmation de la nécessité qu’une pensée de l’espace pour mieux comprendre &
expliquer le monde du pdv des sciences sociales et humaines.
L’espace, contrairement à ce qui était largement véhiculé durant la période moderne,
n’apparaît plus comme un simple contenant des processus sociaux et temporels, mais
comme participant activement à la structuration de la société .
Edward Soja affirme que c’est dans les années 1960 et 1970 que prend véritablement
corps ce TS, en particulier dans les travaux de Michel Foucault et Henri Lefebvre. Ils ont
tous deux défendu l’idée d’une revalorisation épistémologique des enjeux spatiaux,
faisant de l’espace une des clés de compréhension des transformations des formes
d’organisation de la société et de l’exercice du pouvoir.

Selon Henri Lefebvre: l’argument qui sous-tendait la nécessité d’un tel tournant
épistémologique renvoyait au fait que c’était le rapport même à l’espace qui avait changé :
"Les nouvelles pénuries ne sont pas homologues aux anciennes raretés, notamment parce
que le rapport à l’espace a changé"

Ce changement du rapport à l’espace s’ancrait dans l’extension de la capacité de l’être


humain à le maîtriser et de le mettre au service du capitalisme : "Sans aucun doute, la
problématique de l'espace nait d'une croissance des forces productives. Forces productives
et techniques permettent d'intervenir à tous les niveaux de l'espace : local, régional,
national, planétaire"

Les grandes mutations qui affectent le rapport entre espace et sociétés:

Sociologie de l'espace et sociologie urbaine:


Les transformations socio-économiques actuelles ont provoqué un bouleversement des
sciences sociales. Les formes de ses manifestations sont multiples:

Passage de la société industrielle à une société de services


Erosion du modèle sexué de la division du travail selon Gottschall, 1995
Emergence d’une société d’information et de réseaux suite à l’apparition de nouvelles
technologies et de nouvelles formes d’organisation selon Castells, 1996
Importance accrue des différentes formes de connaissance au sein de la société du
savoir selon Stehr, 1994
Mise en place d’une société globalisée suite à la flexibilisation et à l’internationalisation
Passage à une société postmoderne – dans le sens d’une fin de la modernité selon Bell,
1973 et Inglehart, 1998.

Changement structurel de la société ⟶ changement de la ville selon Frey & Koch, 2011 ⟶
naîssance de la sociologie urbaine.

Sociologie urbaine: c'est une branche de la sociologie qui tend à comprendre les
rapports d'interaction et de transformation qui existent entre les formes d'organisation
de la société et les formes d'aménagement des villes.
L'étude de la première de ces formes, celles qu'une société prend dans l'espace est
appelée morphologie sociale depuis Marcel Mauss, Maurice Halbwachs ou Jean Brunhes;
L'étude de la seconde, celle des formes de la ville avec son habitat, ses monuments, ses
décors, et en général tous ses aménagements, s'appelle morphologie urbaine.

Morphologies sociales: Les études urbaines bien conduites concentrent leurs analyses des
formes sociales sur la distribution des classes sociales, des groupes sociaux et des différentes
ethnies au sein des espaces urbains et ruraux, en accordant une attention particulière aux
coutumes, aux habitudes, aux faits culturels; Rapportées au territoire où se déploie toute
société, elles mettent en évidence :

soit une spatialisation de la segmentation sociale dans lesquelles les différentes


catégories de population et d'activités correspondent à des types particuliers de
quartiers (quartier universitaire, quartier des théâtres, quartiers commerçant, quartier
d'artisans, etc. dans chacun desquels il y a des manœuvres et des directeurs, des riches
et des pauvres)
soit au contraire à une répartition spontanée purement ségrégative qui aboutit à des
processus spontanés de ghettoïsation positives ou négatives (gated communities), c'est-
à-dire à conforter la stratification des revenus dans des quartiers-dortoirs qui regroupent
les plus ou les moins favorisés de tous les secteurs d'activité.

Morphologies urbaines:

L'étude peut être faite à toutes les échelles depuis les formes d'habitations et plus
généralement d'immeubles (Maisons, grands ensembles d'habitation, équipements
publics ou commerciaux tels que mairies, postes, tribunaux, lycées, théâtres, gares,
magasins et supermarchés, églises, etc.) jusqu'aux formes complètes des villes (avec
l'articulation des quartiers, des rues, des places, des rivières, des monuments, de la
campagne environnante, des liaisons avec d'autres villes, etc.).
Si elle est peu étudiée en sociologie urbaine, elle l'est traditionnellement en géographie
urbaine ou rurale, en histoire des formes urbaines: elle porte sur les modèles urbains
matériels et symboliques, sur les différentes échelles et les différentes formes du bâti et
du cadastre, sur les couleurs, sur les aspects, sur les symétries, sur les rythmes, et plus
généralement sur tout ce qui fait la culture matérielle.

Objectif de la sociologie urbaine:

Le consensus fondateur de la sociologie urbaine postule une relation mutuelle entre les
structures sociales et les structures spatio-urbaines.

Dans les villes, les processus sociaux de transformation deviennent visibles au niveau de
l’espace social et peuvent être décrits empiriquement. Dans le même temps, les villes, leurs
habitantes et leurs habitants agissent comme forces motrices des mutations structurelles de
la société.

Ce paradigme fondateur de la sociologie urbaine est encore et toujours actuel : les structures
sociales et sociétales ne peuvent être vraiment analysées et représentées que dans leur lien
avec les données spatiales.

Les catégories centrales et les méthodes pour décrire l’emboîtement spatial des structures et
des relations sociales évoluent donc avec les bouleversements actuels. Il est cependant
évident que les sciences sociales centrées sur l’espace, ainsi que l’architecture et
l’aménagement du territoire, requièrent de plus en plus des modèles explicatifs spécifiques.

Les sciences sociales, avec leurs théories et leurs modèles, ont infiltré les discours
médiatiques et politiques. Parallèlement, la sociologie urbaine, avec ses descriptions et ses
analyses de l’évolution de l’habitat, est sollicitée par les discours de politique sociale axés sur
la pratique.

Histoire de la sociologie urbaine:

AMÉRIQUE :
Mise sur le devant de la scène urbaine par l’École de Chicago, la sociologie urbaine
émerge au début du XXème siècle pour étudier les relations inter-ethniques et la
délinquance dans les grandes villes aux Etats-Unis, avec comme toile de fond
l’évolution de la ville de Chicago.
Aujourd’hui, ses domaines d’études sont bien plus diversifiés, confrontant
l’organisation de la société avec l’aménagement de nos villes.
EUROPE :
Les spécialistes français ont également participé à faire évoluer la discipline
Gaston Bardet est l’un des théoriciens de l’urbanisme dit culturaliste
Maurice Halbwachs de la morphologie sociale.
Henri LEFEBVRE rédige des ouvrages ayant encore une véritable résonance
aujourd’hui dont Critique de la vie quotidienne en 1958, et son manifeste Le droit à la
ville, en 1967.
Paul Henry Chombart de Lauwe, sociologue qui se décrira plus tard davantage comme
un anthropologue, se passionne pour les cultures urbaines et cultive une sociologie
imprégnée d’humanisme progressiste.
Raymond LEDRUT prône une sociologie au service d’une planification urbaine mieux
informée et plus humaine, et comme le retranscrit bien l’article de Christian TOPALOV,
Trente ans de sociologie urbaine, il affirme la vision suivante : “La ville doit être un lieu
d’intégration sociale et la sociologie urbaine étudiera les conditions de la cohésion
des unités qui composent l’espace : leur cohésion interne – il faut d’« authentiques
quartiers » – et la cohésion du tout que constitue l’agglomération”.
Jean Rémy avec ses écrits dont celui que nous allons analyser par la suite espace et
théories sociologiques

Comment saisir l'espace dans l'analyse sociologique et en sociologie urbaine ?

La théorie de la ville créative: (1990 et 2000) met l'accent sur l'importance de l'économie
créative dans le développement urbain: les villes doivent encourager la créativité et
l'innovation dans des secteurs tels que les arts, le design, la technologie et les médias pour
stimuler la croissance économique et améliorer la qualité de vie.

La théorie de la ville inclusive: (2000 et 2010) s'intéresse à la manière dont les villes peuvent
favoriser l'inclusion sociale et la justice spatiale: les villes doivent travailler à réduire les
inégalités socio-économiques, à améliorer l'accès aux services et aux infrastructures, et à
promouvoir la diversité culturelle et l'inclusion sociale pour assurer une ville plus équitable
et durable.

La théorie de la différenciation spatiale: (Pierre Bourdieu, 1970's) met l'accent sur les
inégalités socio-économiques qui se reflètent dans l'espace urbain: les espaces urbains sont
différenciés en fonction des modes de vie et des préférences culturelles des groupes
sociaux, et ces différences contribuent à la reproduction des inégalités.

La théorie de l'espace public: (Henri Lefebvre, 1960's) considère l'espace urbain comme un
lieu de rencontre et d'interaction sociale: la production de l'espace urbain est étroitement
liée aux relations sociales et aux conflits de pouvoir entre différents groupes.

La théorie de l'écologie urbaine: (Clarence Perry, 1920's), postule que la ville se compose de
différents quartiers ou zones, chacun ayant ses propres caractéristiques écologiques et
sociales.

La théorie de la ville en tant que système social: (Georg Simmel, début 20e siècle), considère
la ville comme un système complexe de relations sociales. Selon cette théorie, les
interactions sociales dans la ville sont souvent superficielles et impersonnelles en raison de
la grande densité de population et de la diversité culturelle.

La théorie de la gentrification: popularisée dans les années 1960 et 1970 par des sociologues
tels que Ruth Glass ou encore Sharon Zukin, étudie les processus par lesquels les quartiers
urbains autrefois abordables et habités par des populations défavorisées sont rénovés et
réaménagés, conduisant souvent à la hausse des loyers et à la disparition des communautés
locales.

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