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Droit Commercial

Introduction

Commerce = pour les économistes, le commerce renvoie à la commercialisation des biens et des services.
On le distingue de l’industrie qui renvoie aux activités de production.
En droit, il a une autre signification. Sont englobés dans ce terme les activités de commercialisation mais
aussi certaines activités de production. Le mot commerce n’englobe pas toutes les activités économiques
non plus. Les activités agricoles, artisanales et libérales ne sont pas des activités commerciales.

Droit commercial = c’est une branche du droit privé c’est-à-dire du droit qui s’occupe des relations des
personnes privées entre elles. Dans le droit privé, les bases sont des règles de droit civil. Ensuite il y a des
règles spécifiques pour régir certaines situations particulières, exemple : droit du travail, droit commercial.

Ces règles spécifiques ont été prises car :

- Le commerçant n’est pas une personne comme les autres. C’est la conception subjective = le droit
commercial est le droit des commerçants.
- Les activités commerciales ne sont pas des activités comme les autres. L’acte de commerce est
différent des autres. C’est la conception objective = le droit commercial est le droit des activités de
commerce.

En France, sous l’Ancien Régime, la conception subjective l’a emporté. Puis vient la Révolution avec le
décret d’Allard et la loi le Chapelier adopté en 1791 : le premier texte proclame la liberté du commerce et de
l’industrie, le deuxième texte interdit les groupements/les corporations. On bascule vers une conception
plutôt objective avec le nouveau Code de Commerce adopté en 1807.
Aujourd’hui les deux conceptions se combinent, avec une domination de la conception objective.

Le droit des affaires est différent du droit commercial. Le droit des affaires regroupe les règles qui
s’appliquent à toutes les activités économiques qu’elles soient commerciales ou non. Certaines activités
économiques ne relèvent pas du droit commercial. Le droit commercial n’est donc qu’une partie du droit des
affaires.

Les règles qui s’appliquent uniquement aux commerçants sont très peu nombreuses et tendent à disparaitre
progressivement. Exemple : les faillites ; l’action en concurrence déloyale ; les tribunaux de commerce qui
sont étendus aux artisans.
Le législateur emploie alors l’expression de professionnel ou d’entreprise donc les règles ne s’appliquent pas
qu’aux activités commerciales mais aussi aux activités économiques.

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Leçon 1 – Les actes de commerce

Chapitre 1 – La nature des actes de commerce

Section 1 – Définition générale des actes de commerce

3 critères sont mis en avant pour caractériser l’acte de commerce :

- La spéculation = ce qui compte dans l’acte serait le but.


- L’entreprise = le fait que l’acte s’inscrive dans le cadre d’une entreprise.
- La circulation = l’acte de commerce serait identifié par sa fonction dans le cycle de
commercialisation du produit.

Rien n’est rationnel dans cette liste, c’est arbitraire.

Section 2 – Inventaire des actes de commerce

Il y a plusieurs types d’acte de commerce selon le rôle que la notion remplie en droit.

Paragraphe 1 – L’acte de commerce par sa nature

L’acte de commerce par nature est celui qui confère à son auteur la qualité de commerçant.

I. Les actes de commerce relevant du négoce

Article L110-1 du Code de Commerce : « La loi répute actes de commerce :


1° Tout achat de biens meubles pour les revendre, soit en nature, soit après les avoir travaillés et mis en
œuvre ; 
2° Tout achat de biens immeubles aux fins de les revendre, à moins que l'acquéreur n'ait agi en vue d'édifier
un ou plusieurs bâtiments et de les vendre en bloc ou par locaux ; 
3° Toutes opérations d'intermédiaire pour l'achat, la souscription ou la vente d'immeubles, de fonds de
commerce, d'actions ou parts de sociétés immobilières ; 
4° Toute entreprise de location de meubles ; 
5° Toute entreprise de manufactures, de commission, de transport par terre ou par eau ; 
6° Toute entreprise de fournitures, d'agence, bureaux d'affaires, établissements de ventes à l'encan, de
spectacles publics ; 
7° Toute opération de change, banque, courtage, activité d'émission et de gestion de monnaie électronique
et tout service de paiement ; 
8° Toutes les opérations de banques publiques ; 
9° Toutes obligations entre négociants, marchands et banquiers ; 
10° Entre toutes personnes, les lettres de change. »

A. Les biens visés

A l’origine, seuls les meubles étaient visés car l’immeuble était lié à la famille, il était de circulation plus
difficile. En 1967, une loi soumet les activités immobilières au droit commercial notamment l’achat et la
revente d’immeubles. En 1970, on rajoute «  à moins que l’acquéreur n’ait agi en vue d’édifier un ou
plusieurs bâtiments et de les vendre en bloc ou par locaux. 

B. Les actes visés

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Il faut un achat suivi d’une revente. On exclut donc 2 opérations :
- Les ventes sans achat préalable = commissionnaires/intermédiaires qui achètent pour les autres
- Les achats sans revente = achat pour utiliser ou pour transformer

II. Les actes de commerce relevant de l’industrie

Article L110-1 : « La loi répute actes de commerce : toute entreprise de manufactures, de commission, de
transport par terre ou par eau. »

Les artisans, les agriculteurs ainsi que les industries extractrices sont mises de côté. Exception à l’article
L131-3 : « L’exploitation des mines est un acte de commerce. »

III. Les actes de commerce relevant du domaine des services

A. Les entreprises de fourniture

Article L110-1 : « La loi répute actes de commerce : toute entreprise de fournitures, d’agence, bureaux
d’affaires, établissements de ventes à l’encan, de spectacles publics. »
Donc cela concerne les fournisseurs d’énergie, les hôtels, les restaurants…

B. Les entreprises intermédiaires

Article L110-1 : « La loi répute actes de commerce : toutes opérations d’intermédiaire pour l’achat, la
souscription ou la vente d’immeubles, de fonds de commerce, d’actions ou parts de sociétés immobilières. »

Les courtiers et les commissionnaires ne font pas partis de cette catégorie. En effet, les courtiers ne
représentent personne et les commissionnaires achètent ou vendent pour le compte d’une autre personne
mais quand même en son nom. C’est pour masquer l’identité du véritable acheteur ou vendeur.

Les mandataires au contraire font partis de cette catégorie. En effet, ils ne cachent personne, ils agissent pour
le compte d’une autre personne mais en se déclarant comme simple représentant sans masquer qui que ce
soit.

C. La location de meubles

Les meubles relèvent du commerce mais pas les immeubles.

D. Activités de transport

Article L110-1 : « La loi répute actes de commerce : toute entreprise de manufactures, de commission, de
transport par terre ou par eau. »

E. Les entreprises de spectacles publics

Article L110-1 : « La loi répute actes de commerce : toute entreprise de fournitures, d'agence, bureaux
d'affaires, établissements de ventes à l'encan, de spectacles publics. »

A la base on visait seulement les grands théâtres parisiens puis on a étendu aux salles de concert, aux
casinos, aux clubs sportifs…

F. Les activités financières

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Article L110-1 : « La loi répute actes de commerce : toute opération de change, banque, courtage, activité
d'émission et de gestion de monnaie électronique et tout service de paiement. »

La tenue d’un compte, les instruments de paiement, le change, le crédit… relèvent du commerce.

G. Les agents et les bureaux d’affaires

Article L110-1 : « La loi répute actes de commerce : toute entreprise de fournitures, d'agence, bureaux
d'affaires, établissements de ventes à l'encan, de spectacles publics. »

Les agences de publicités, de voyage, les gestionnaires de patrimoine… relèvent du commerce.

IV. Les actes de commerce relevant du domaine maritime

Article L110-2 : « La loi répute pareillement actes de commerce :


1° Toute entreprise de construction, et tous achats, ventes et reventes de bâtiments pour la navigation
intérieure et extérieure ;
2° Toutes expéditions maritimes ;
3° Tout achat et vente d'agrès, apparaux et avitaillements ;
4° Tout affrètement ou nolisement, emprunt ou prêt à la grosse ;
5° Toutes assurances et autres contrats concernant le commerce de mer ;
6° Tous accords et conventions pour salaires et loyers d'équipages ;
7° Tous engagements de gens de mer pour le service de bâtiments de commerce. »

Article L931-1 : «  L’activité de pêche est réputée commerciale sauf quand elle est exercée de manière
individuelle »

Paragraphe 2 – L’acte de commerce par accessoire

L’acte de commerce par accessoire est un acte civil de par sa nature qui va devenir un acte de commerce
dans 2 hypothèses :

I. En raison de l’auteur de l’acte

C’est lorsqu’un commerçant accomplit un acte pour les besoins de son commerce. Cet acte va devenir un
acte de commerce puisqu’il est établi par un commerçant pour les besoins de son commerce.

Article L110-1 : « La loi répute actes de commerce : toutes obligations entre négociants, marchands et
banquiers.  »

II. En raison de l’objectif de l’acte

C’est lors d’un achat de fonds de commerce. Ce n’est pas un acte de commerce par nature mais un acte de
commerce par accessoire car son objectif est commercial.

Paragraphe 3 – L’acte de commerce par la forme

C’est un acte de commerce par sa forme, quel que soit son objet ou la personne qui le fait.

Article L110-1 : « La loi répute actes de commerce : entre toutes personnes, les lettres de change. » 

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La lettre de change est un effet de commerce, il est soit écrit, soit dématérialisé. Une personne, le tireur, qui
a une créance, donne à un débiteur, le tiré, l’ordre de payer une certaine somme à une échéance donnée à
une autre personne, le porteur.
Quand on la signe, on se soumet au droit commercial même si on n’est pas un commerçant (sauf pour les
particuliers).

Article L210-1 : « Le caractère d’une société est déterminé par sa forme ou par son objet. »
« Sont commerciales à raison de leur forme et quel que soit leur objet, les sociétés en nom collectif, les
sociétés en commandite simple, les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés par actions. »

Chapitre 2 – Les règles spécifiques des actes de commerce

Section 1 – Les règles applicables aux actes de commerce

Ce sont des actes conclus par 2 personnes commerçantes. Ces règles reposent sur des impératifs propres au
commerce. Il y a des impératifs de rapidité, de sécurité des échanges.

Paragraphe 1 – Les règles relatives à l’existence des actes de commerce

Pour un acte civil, un contrat, il y a 3 conditions de validité :


Article 1128 : « Sont nécessaires à la validité d’un contrat :
- Le consentement des parties
- Leur capacité à contracter
- Un contenu licite et certain »

Pour la preuve qu’il a été valablement formé :


Article 1359 : « L'acte juridique portant sur une somme ou une valeur excédant un montant fixé par décret
doit être prouvé par écrit sous signature privée ou authentique. (1500 euros)
Il ne peut être prouvé outre ou contre un écrit établissant un acte juridique, même si la somme ou la valeur
n'excède pas ce montant, que par un autre écrit sous signature privée ou authentique. »

 La capacité : Toutes les personnes sont normalement capables, c’est-à-dire être titulaires de droit et être
capable de les exercer.

Les incapables sont de 2 sortes :


- Les mineurs
- Les majeurs protégés

Ces personnes sont toujours titulaires de droit mais pour les actes les plus graves, elles doivent être
représentées. C’est un tuteur qui agit pour le compte de la personne protégée. Mais un tuteur ne peut pas
accomplir des actes de commerce :
Article 509 : « Ne peut exercer le commerce ou une profession libérale au nom de la personne protégée. »

Il y a une possibilité pour les mineurs, à partir de 16 ans on peut demander l’émancipation. Elle permet
d’avoir la capacité juridique avant 18 ans. Il ne suffit pas d’être émancipé, il faut que ce soit autorisé par le
juge des tutelles au moment de l’émancipation, ou après au président du tribunal judiciaire.

 Le consentement : Pour qu’un acte soit valable, il faut que les parties y aient consenties librement. On
fait une offre (proposition ferme et précise), si elle est acceptée, le contrat est formé. Un contrat c’est une
offre et une acceptation.

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 L’acceptation : Article 1120 : « Le silence ne vaut pas acceptation à moins qu'il n'en résulte autrement
de la loi, des usages, des relations d'affaires ou de circonstances particulières. »
Donc parfois le silence est assimilé à l’acceptation :
- Quand il y a des relations d’affaires, des commandes suivies et habituelles.
- L’usage renvoie aux pratiques de tout un secteur professionnel considéré, s’il est d’usage de
considérer que le silence vaut acceptation, alors c’est bon.

 La preuve : Article L110-3 : «  A l’égard des commerçants, les actes de commerce peuvent se prouver
par tous moyens à moins qu’il n’en soit autrement disposé par la loi. »

Article L123-23 : «  La comptabilité régulièrement tenue peut être admise en justice pour faire preuve entre
commerçants pour faits de commerce. Si elle a été irrégulièrement tenue, elle ne peut être invoquée par son
auteur à son profit. La communication des documents comptables ne peut être ordonnée en justice que dans
les affaires de succession, communauté, partage de société et en cas de redressement ou de liquidation
judiciaires. »

Donc parmi les obligations du commerçant, il y a l’obligation d’établir une comptabilité. Quand on a une
comptabilité régulièrement tenue, on peut la produire à titre de preuve d’un acte de commerce.

Paragraphe 2 – Les règles applicables à l’exécution des actes de commerce

Il y avait 4 grandes règles spécifiques au droit commercial pour garantir plus de sécurité aux actes de
commerce, mais qui se sont effacées :

 La faculté de remplacement :

Hypothèse d’un commerçant victime d’un retard de livraison, après mise en demeure infructueuse, le
commerçant va commander ailleurs un produit équivalent et mettre à la charge du fournisseur qui a fait
défaut, l’éventuel prix supplémentaire.

Article 1222 : « Après mise en demeure, le créancier peut aussi, dans un délai et à un coût raisonnables,
faire exécuter lui-même l'obligation ou, sur autorisation préalable du juge, détruire ce qui a été fait en
violation de celle-ci. Il peut demander au débiteur le remboursement des sommes engagées à cette fin. »

 La faculté de réduction du prix :

C’est l’idée de modifier le contrat notamment le prix. On demande une réduction de prix car on est satisfait
de manière partielle.

Article 1223 : « Le créancier peut, après mise en demeure, accepter une exécution imparfaite du contrat et
solliciter une réduction proportionnelle du prix. »

C’est le juge qui détermine la réduction du prix.

 La solidarité :

Article 1310 : « La solidarité est légale ou conventionnelle, elle ne se présume pas. »

On parle d’une obligation au sens juridique du terme. Dans une vente, un acte juridique, il y a une obligation
de payer le prix et une obligation de délivrance. D’autres évènements peuvent créer des obligations tels que
les faits juridiques.

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Hypothèse où il y a 2 débiteurs et 1 créancier : solidarité passive. Cela signifie que chaque débiteur est
solidaire de l’autre, il peut être amené à payer pour l’autre. La solidarité c’est le fait que le créancier peut
d’adresser à n’importe lequel des débiteurs pour lui demander de payer la totalité de la dette. C’est un
engagement dangereux car ils peuvent payer plus que leur part. C’est pourquoi en droit civil, cette solidarité
ne se présume pas si ni la loi ni le contrat ne le dit.

En matière commerciale, c’est l’inverse, la solidarité se présume même si rien n’est dit dans le contrat. On
part du principe qu’elle va s’appliquer sauf clause contraire dans le contrat. C’est la jurisprudence qui le dit,
ce n’est pas écrit dans le Code de Commerce.

 Les procès, les contestations relatives aux actes de commerce doivent être portés devant les
tribunaux de commerce

Paragraphe 3 – Les règles relatives à l’extinction des actes de commerce

La prescription est la prise en compte par le droit du temps qui passe. Il y a la prescription acquisitive, c’est
le passage du temps qui finit par créer un droit et la prescription extinctive, c’est le passage du temps qui
éteint un droit. On va parler de la prescription extinctive.

Pendant longtemps, il y avait une grosse différence entre les actes civils et les actes de commerce. En droit
civil, la prescription était de 30 ans. Pour les actes de commerce, la prescription était de 10 ans. Il y a eu une
grande réforme de la prescription par une loi du 17 juin 2008, on a fusionné la prescription des actes civils et
des actes de commerce en prévoyant un délai de 5 ans à compter du moment où le titulaire avait
connaissance de son droit ou devait connaitre son droit.

Section 2 – Les règles applicables aux actes mixtes

- Un acte conclu entre 2 professionnels mais 1 seul commerçant.


- Un acte conclu entre 1 commerçant et 1 consommateur.

Face à l’acte mixte, on peut mettre en place :

- Le traitement dualiste qui consiste à appliquer à chaque partie les règles qui la concerne.
- Le traitement unitaire qui consiste à appliquer aux deux parties soit uniquement le droit civil soit
uniquement le droit commercial.

Paragraphe 1 – Les cas du régime dualiste

 La capacité juridique : La capacité de faire des actes de commerce (vu avant) sera requise pour le
commerçant alors que la capacité civile suffira pour le non commerçant.

 La solidarité passive : Si le débiteur est le commerçant, on présume la solidarité. Mais si le débiteur est
le non commerçant, on ne la présume pas.

 La preuve : Un non commerçant qui veut prouver contre un commerçant bénéficie de la liberté de la
preuve, la preuve est libre. Mais un commerçant qui veut prouver un acte contre un non commerçant devra
se soumettre au droit civil donc + de 1500 euros avec un écrit (vu avant).

 Les tribunaux de commerce : La règle est que le non commerçant qui veut assigner un commerçant a le
choix : soit assigner le commerçant devant le Tribunal de Commerce soit assigner le commerçant devant les
tribunaux civils donc le Tribunal Judiciaire.

Paragraphe 2 – Les cas du régime unitaire


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 La prescription : Avant la réforme de 2008, on appliquait aux 2 parties la règle commerciale plutôt que
la règle civile donc la prescription de 10 ans. Aujourd’hui, si on a un acte conclu entre 1 professionnel et 1
commerçant, c’est 5 ans. Si c’est une action entre 1 professionnel et 1 consommateur, s’il agit contre le
commerçant c’est 5 ans sinon si c’est le professionnel qui agit contre le consommateur c’est 2 ans.

 La compétence territoriale des tribunaux : Normalement on doit assigner devant la juridiction qui
correspond au domicile du défendeur.

Article 48 Code de Procédure Civile : « Toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles
de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu'elle n'ait été convenue entre des personnes
ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu'elle n'ait été spécifiée de façon très apparente dans
l'engagement de la partie à qui elle est opposée. »
Dans un acte mixte, on ne peut pas imposer cette clause désignant une juridiction compétente si on n’a pas 2
commerçants.
Leçon 2 – Les personnes commerçantes

Chapitre 1 – La qualité de commerçant

Section 1 – La notion de commerçants

Paragraphe 1 – Les critères positifs (ce qu’il est)

Article L121-1 : «  Sont commerçants ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession
habituelle.  »

Le commerçant est défini par ce qu’il fait et non par ce qu’il est. L’intérêt est de soumettre au droit
commercial tous ceux qui bien que non déclarés comme commerçants exercent dans les faits des actes de
commerce.

Le fait de ne pas être inscrit au Registre du Commerce et des Sociétés n’empêche pas d’avoir la qualité de
commerçant. Réciproquement, il ne suffit pas d’être inscrit pour être commerçant. L’inscription ne donne
qu’une présomption.

Les actes de commerce dans l’article sont des actes de commerce par nature. Dans le cas des actes de
commerce par la forme (lettre de change), l’accomplissement de tels actes ne donnent pas la qualité de
commerçant. Il faut accomplir les actes de commerce à titre de profession habituelle.

I. Un exercice à titre habituel et professionnel

A partir de 2 actes de commerce, on parle d’acte habituel. Les juges font au cas par cas en fonction de
critères :
- Nombre et fréquence des actes
- Intention derrière les actes
- Aspect professionnel, intention spéculative

II. Un exercice à titre indépendant

Le critère du contrat de travail est le lien de subordination juridique c’est-à-dire le fait pour un employeur de
donner des ordres et d’en sanctionner l’inexécution. On recherche le degré de liberté laissé au prestataire,
s’il est suffisant c’est bon. L’inscription fait présumer la qualité de commerçant indépendant. Les VRP
bénéficient du droit du travail. Les gérants de succursale bénéficient du droit du travail à certaines
conditions.
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III. Un exercice pour son propre compte

Hypothèse d’un commerçant aidé par son conjoint dans son activité.
Est-ce que le fait pour le conjoint de participer à l’activité commerciale de son conjoint lui donne la qualité
de commerçant ?

Article L121-3 : «  Le conjoint d’un commerçant n’est réputé lui-même commerçant que s’il exerce une
activité commerciale séparée de celle de son époux. »

Il y a 2 problèmes ensuite :
- Même si le conjoint n’est pas commerçant, il peut subir les conséquences du commerce de son époux
en fonction du régime matrimonial qu’ils ont adopté. Exemple de la saisie des biens communs pour
le régime de la communauté.
Le conjoint doit être informé de ses risques et l’époux doit justifier de cette information lors de son
inscription au registre des commerces et sociétés.
- Le fait de participer à l’activité ne donne pas la qualité de commerçant au conjoint.
Le commerçant doit obligatoirement déclarer la participation de son conjoint en faisant le choix entre 3
statuts :
 Conjoint collaborateur : aide occasionnelle mais pas de statut d’associé ou de salarié ni de rémunération.
Le conjoint collaborateur doit avoir un mandat pour effectuer certains actes. Il dispose d’une protection
sociale.

 Conjoint salarié (le plus favorable) : le conjoint est lié au commerçant par un contrat de travail et possède
tous les avantages découlant du droit du travail. Ce statut suppose une activité régulière dans l’entreprise.
Si le conjoint dispose d’un autre contrat de travail d’une durée au moins égale à la moitié de la durée légale,
il n’est pas considéré comme exerçant une activité régulière dans l’entreprise du commerçant.

 Conjoint associé : hypothèse d’une entreprise qui a pris la forme de société commerciale. Le conjoint
jouit alors des droits attachés à la qualité d’associé.

Paragraphe 2 – Les critères négatifs (ce qu’il n’est pas)

I. L’artisan

A. La qualité d’artisan
A l’origine, il n’y avait aucune distinction entre les commerçants et les artisans. Au fil du temps, il y a eu
une organisation administrative et réglementaire avec notamment l’enregistrement des artisans dans le
répertoire des métiers.

La loi du 5 juillet 1996 fixe les 3 conditions requises pour s’inscrire au répertoire des métiers :

- L’entreprise artisanale ne doit pas employer plus de 10 salariés. Cependant, en cours de vie de
l’entreprise, on peut dépasser ce seuil tant que l’on n’atteint pas les 50 salariés.

- L’activité de l’entreprise doit être exercée à titre professionnel et indépendant.


- L’activité doit concerner la production, transformation, réparation ou prestation de services relevant
de l’artisanat. Un décret donne aujourd’hui une liste d’environ 250 professions regroupée en 4

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grandes familles qui relèvent toutes de l’artisanat : les métiers de l’alimentation, les métiers du
bâtiment, les métiers de la fabrication et les métiers de services.

Ainsi, les juges ont indiqué 2 critères pour distinguer artisan et commerçant :

- L’artisan tire l’essentiel de ses revenus de son activité manuelle et non de la spéculation ou du travail
d’autrui.

- Les achats reventes doivent demeurer secondaire.

B. Le statut des artisans


L’’inscription au répertoire des métiers est obligatoire. Elle doit se faire dans le délai d’1 mois avant le début
de l’activité ou alors faire un courrier recommandé au plus tard la veille du début de l’activité, puis délai d’1
mois supplémentaire pour s’immatriculer.

A l’origine, un stage était obligatoire et destiné à les préparer mais la Loi Pacte a supprimé ce stage. Il faut
aussi justifier, lors de l’inscription, d’une qualification professionnelle.

Le chef d’entreprise n’a pas forcement lui-même la qualification professionnelle, mais il suffit qu’un de ses
salariées l’ait. On a donc créé des titres reconnus permettant de reconnaitre la compétence professionnelle :
artisan, artisan d’art et maître d’artisan.

L’artisan est soumis au droit civil et non au droit commercial même si au fil des années les règles
applicables aux artisans et commerçants se rapprochent (fonds de commerce et fonds artisanal). De plus, à
compter du 1er janvier 2022, les artisans relèveront des tribunaux de commerce.

II. L’agriculteur

Article L311-1 du code rural : « Sont réputés agricoles toutes les activités correspondantes à la maitrise et
à l’exploitation d’un cycle biologique de caractère végétale ou animale ainsi que tout ce qui en est le
support ou le prolongement.  »

Produire du lait est une activité agricole mais fabriquer un yaourt n’en est pas une.

Le statut conféré aux agriculteurs provient d’une organisation administrative séparée des autres professions,
il existe des chambres d’agricultures ainsi qu’un registre des actifs agricoles. Ainsi, un agriculteur doit
s’immatriculer comme un artisan ou un commerçant. Pour le reste, les agriculteurs sont soumis au droit civil
et à toutes les dispositions spécifiques du code rural. Même si là encore, des règles à l’origine pour les
commerçants ont été étendu aux agriculteurs (les faillites).

III. Le professionnel libéral

Il y a 3 éléments qui caractérisent le professionnel libéral :


- L’indépendance
- L’accomplissement de prestations intellectuelles
- La déontologie professionnelle : principes et règles éthiques qui gèrent et guident une
activité professionnelle.

Les professionnels libéraux sont soumis à des règles éthiques, morales, déontologiques plus strictes que pour
les autres professions. Un code de déontologie va ainsi être géré par des chambres disciplinaires.

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Ici encore, c’est le droit civil qui s’applique et non le droit commercial même s’il y a une tendance au
rapprochement entre les deux.

La Cour de Cassation a mis en lumière une spécificité du secteur libéral : le lien de confiance très
particulier qui unit le professionnel libéral à sa clientèle, sa patientèle. Ce lien ne peut pas être vendu,
les clients sont libres de choisir le professionnel libéral qu’ils veulent suivre. Ainsi, les contrats prévoyant
une cession du fonds libéral ont été déclarés comme nul, le terme de fonds libéral était inexistant.
On admettait donc un contrat portant sur 2 obligations :

- Celui qui cède son lieu de travail s’engage à ne pas se réinstaller dans un certain périmètre.
- Il doit présenter le nouveau venu à son ancienne clientèle.

Décision 7 novembre 2000 Cour de Cassation : elle a reconnu la validité du contrat de cession du fonds
libéral sous réserve que soit préservée la liberté de choix du professionnel pour le client.

Section 2 – Les obligations des commerçants

Paragraphe 1 – Les obligations de publicité

Tous les commerçants, sociétés commerciales et personnes exerçant une activité commerciale doivent
s’inscrire au registre du commerce et des sociétés (RCS). Cette inscription permet de :

- Protéger les tiers et informer le public = pouvoir se renseigner sur une entreprise
- Contrôler l’activité des commerçants = vérifier les autorisations, la capacité commerciale
- Servir de preuve à l’existence de l’activité commerciale

Ces informations sont recueillies par les greffes des tribunaux de commerce. Ensuite, l’Institut National de
la Propriété Intellectuelle (INPI) centralise toutes les informations. Depuis de nombreuses années, il existe
des centres de formalité des entreprises auprès desquels les commerçants vont effectuer leur démarche.
Depuis la Loi Pacte, il existe même un guichet électronique unique pour accomplir ces démarches en ligne :
guichet-entreprise.fr.
L’immatriculation doit se faire 15 jours au maximum après le début de l’activité. Le juge peut ordonner,
sous astreinte, que l’immatriculation soit faite si le délai est dépassé. Une amende est perçue si des
informations incomplètes ou inexactes sont fournies de mauvaise foi.

Lors de l’immatriculation, l’entreprise doit donner sa domiciliation. Elle peut déclarer son local d’habitation
si aucune disposition législative ou contractuelle ne s’y oppose. En revanche, si l’entreprise n’a aucun autre
établissement, elle peut déclarer le local d’habitation à titre d’adresse du siège en quelque sorte.

 Conséquences de l’inscription ou de la non-inscription au RCS :

- L’immatriculation permet de présumer la qualité de commerçant mais il existe les commerçants de


faits, l’absence d’immatriculation n’empêche pas d’obtenir cette qualité.

- Le commerçant de fait ne peut invoquer les règles commerciales contre un tiers et ne peut
réciproquement s’abriter derrière sa non-immatriculation pour échapper aux règles commerciales qui
s’appliquent à lui. Il en tire les inconvénients et non les avantages.

- Une société non immatriculée n’existe pas en tant que personne juridique.

Suite à l’immatriculation, on nous attribue un numéro composé de :

- Le sigle RCS suivi de la ville où se trouve le greffe où la personne est immatriculée.


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- La lettre A (entrepreneur individuel), B (société commerciale), C (groupement économique) ou D
(société civile)
- Le numéro SIREN
- Le numéro SIRET
- Le Code NAFE qui permet d’identifier l’activité principale de l’entreprise
- Si l’entreprise est assujettie à la TVA, elle disposera en plus d’un numéro de TVA
intracommunautaire

Paragraphe 2 – Les obligations de facturation et de comptabilité

I. La facturation

Entre professionnels B to B : la facturation est obligatoire, elle doit être faite dès la réalisation de la vente
ou de la prestation de services et être conservée par le client. Cette obligation est répartie entre le Code de
Commerce (Article L441-9) et le Code Général des Impôts.

 Entre un professionnel et un client B to C : la règle est assouplie, il faut délivrer une note si le client le
demande ou si la prestation excède 25€. Le professionnel doit quand même pouvoir justifier de toutes ses
recettes : il les enregistre soit dans un carnet de souche soit avec à une caisse enregistreuse. Depuis le 1 er
janvier 2018, la caisse doit être agréée pour éviter la fraude fiscale avec l’effacement de certaines
transactions.

II. La comptabilité

Article L123-12 : « Tout commerçant doit tenir un livre journal et un grand livre. De plus, tous les ans, il
doit établir un bilan, un compte de résultat et son annexe. »
Il faut conserver les documents comptables pendant 10 ans et il faut dépasser 2 des 3 seuils suivants : CA >
8 millions ; bilan total > 4 millions ; avoir + de 50 salariés.

 Le cas des micro-entrepreneurs :

La comptabilité est simplifiée pour les micro entreprises. Il s’agit d’une variété d’entreprise individuelle qui
bénéficie de formalités allégées et d’avantages sociaux et fiscaux. Il ne faut pas dépasser 76 200 € pour la
vente de marchandises et 72 600 € pour les prestations de services y compris les professions libérales. En ce
qui concerne la comptabilité, il n’y a pas de compte annuel à établir, il faut juste effectuer un enregistrement
chronologique des recettes.

Normalement, un professionnel a un compte bancaire dédié à l’activité professionnelle mais le micro-


entrepreneur peut utiliser son compte personnel sauf si 2 années de suite il dépasse un chiffre d’affaires de
10 000€. S’il dépasse ce montant, il peut choisir :
- Soit d’opter pour un compte professionnel
- Soit d’opter pour un 2ème compte classique puisque la loi exige juste des comptes séparés.

III. Le paiement de taxes et impôts

A. Les bénéfices imposables

Les bénéfices sont imposés à l’IR ou l’IS selon le régime de l’entreprise. Les professions libérales et les
EURL sont soumises de plein droit à l’IR. Certaines sociétés peuvent aussi opter pour l’IR. En ce qui
concerne l’IR, le fisc distingue les BIC, les BNC et les BA.

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Certaines sociétés sont de plein droit soumis à l’IS, le taux est de 15 à 31% suivant le revenu fiscal. La
société va payer l’IS, les dirigeants et associés ne sont imposés individuellement qu’au titre des
rémunérations et dividendes perçues.

B. La déclaration et le paiement de cotisations sociales


Certains micro-entrepreneurs dont le revenu fiscal de référence se trouve en dessous d’un certain seuil
peuvent opter pour le versement libératoire de l’impôt sur le revenu, les impôts et charges sociales sont
payés en un seul versement.

C. La TVA
Les entreprises collectent la TVA pour le compte de l’État, elles la facturent aux clients et la récupèrent sur
ses achats.
En dessous de 85 800€ de CA pour l’achat revente et 34 400€ pour les prestations de services, l’entreprise
n’est pas assujettie à la TVA.

D. La contribution économique et territoriale


Elle est composée de la CFE (cotisation foncière des entreprises) + de la CVAE (cotisation sur la valeur
ajoutée des entreprises). Les micro-entrepreneurs sont exonérés en début d’activité ou si leur CA n’excède
pas 5000 €. Pour le reste, l’assiette de la CFE est déterminée par la commune où sont implantés les locaux
professionnels. La CVAE est due uniquement par les entreprises qui font plus de 500 000 € de CA.

Chapitre 2 – Le mode d’exercice de l’activité commerciale

Section 1 – L’exercice de l’activité commerciale par une personne physique

Paragraphe 1 – Le principe : absence de protection du patrimoine privé de l’entrepreneur individuel

Une personne physique possède 2 casquettes :


- Personne privée comme tout particulier
- L’entrepreneur avec des biens dédiés à l’activité professionnelle

C’est cette même personne qui prend les engagements, signe les contrats avec le proprio des locaux, la
banque, les fournisseurs, les clients…

Notion de patrimoine : Aubry et Rau sont connus pour avoir systématisé la notion de patrimoine avec 3
principes essentiels :
- Seules les personnes ont un patrimoine
- Toutes les personnes ont un patrimoine tant que la personne est vivante
- Les personnes n’ont qu’un patrimoine = unicité du patrimoine

Conséquences :
Article 2284 Code Civil : « Quiconque s’est obligé personnellement est tenu de remplir son engagement sur
tous ses biens mobiliers et immobiliers, présents et à venir. » = droit de gage général

13
Paragraphe 2 – Les exceptions permettant une protection du patrimoine privé du commerçant

I. La déclaration d’insaisissabilité

La déclaration d’insaisissabilité a été créée par la loi du 1er aout 2003, modifiée en 2008 par la loi LME et
encore modifiée le 6 aout 2015 par la loi Macron.

L’idée première de ce principe est que l’entrepreneur individuel fasse une déclaration afin de rendre
insaisissable sa résidence principale.
2008 : on a étendu la déclaration d’insaisissabilité à d’autres immeubles que celui utilisé comme résidence
principale.
2015 : la résidence principale est devenue de droit insaisissable.

Ces règles sont regroupées dans le livre 6 du Code de Commerce article L526 et suivants.

A. Conditions de la déclaration d’insaisissabilité

Cette démarche doit être faite par acte notarié qui doit comporter une description de l’immeuble et doit être
publié au bureau des hypothèques et au registre du commerce et des sociétés.
Cette déclaration et possible uniquement pour les professionnels immatriculés dans un registre de publicité
légal.

Lorsque la cession d’un immeuble objet de la déclaration d’insaisissabilité porte sur la résidence principale,
le prix obtenu de la revente n’est pas saisissable s’ils sont réemployés dans un délai d’un an en vue de
l’acquisition d’une nouvelle résidence principale

B. Effets de la déclaration d’insaisissabilité

La déclaration protège uniquement contre les actions des créanciers dont les droits sont nés à l’occasion de
l’activité professionnelle et postérieurement à la publication de la déclaration.
Il est possible à tout moment d’y renoncer. Elle obéit aux mêmes conditions de validité que la déclaration.
Cette renonciation peut porter sur tout ou une partie des biens et aux bénéfices d’un ou plusieurs créanciers.
On peut aussi révoquer sa renonciation.

II. L’EIRL, l’entrepreneur à responsabilité limité

L’EIRL a été créé par une loi du 15 juin 2010 et a été modifié à plusieurs reprises notamment par la loi Pacte
du 22 mai 2019. Il est régi aux articles L526-5-1 et suivants.

Article L526-6 : « Pour l'exercice de son activité en tant qu'entrepreneur individuel à responsabilité limitée,
l'entrepreneur individuel affecte à son activité professionnelle un patrimoine séparé de son patrimoine
personnel, sans création d'une personne morale ».

La création d’une EIRL reste compliquée, ce n’est pas plus simple que la création d’une société. Par ailleurs,
la protection du patrimoine de l’entrepreneur n’est pas absolue.

A. La constitution de l’EIRL

Article L526-5-1 : « Toute personne physique souhaitant exercer une activité professionnelle en nom propre
déclare, lors de la création de l'entreprise, si elle souhaite exercer en tant qu'entrepreneur individuel ou
sous le régime de l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée défini par la présente section.
L'entrepreneur individuel peut également opter à tout moment pour le régime de l'entrepreneur individuel à
responsabilité limitée ».

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La déclaration doit comporter un état descriptif des biens affectés à l’activité professionnelle. Article L526-
6 : « Les biens qui sont nécessaires à l’activité professionnelle mais ceux aussi qui sont utiles pour
l’exercice de son activité professionnel sont nécessairement affecté à l’activité.  »

Les modifications du patrimoine affecté :


Désormais, l’entrepreneur individuel peut décider de désaffecter un bien si on en assure une publicité. De
plus, tous les biens qui sont inscrit en comptabilité peuvent être affectés. Lorsque des biens sortent du
patrimoine affecté et sont remplacés par des créances, ensuite réutilisées pour acquérir de nouveaux biens,
alors ces nouveaux biens sont automatiquement affectés au patrimoine professionnel et sont saisissable.

B. Le régime de l’EIRL

Article 2284 : « Quiconque s'est obligé personnellement, est tenu de remplir son engagement sur tous ses
biens mobiliers et immobiliers, présents et à venir ».

Article 2285 : « Les biens du débiteur sont le gage commun de ses créanciers ; et le prix s'en distribue entre
eux par contribution, à moins qu'il n'y ait entre les créanciers des causes légitimes de préférence ».

a. Le principe de fractionnement

Les créanciers professionnels ne peuvent saisir que les biens affectés à l’activité professionnelle.
Réciproquement, les créanciers personnels ne peuvent pas saisir les biens affectés à l’activité
professionnelle. La déclaration d’affectation n’est opposable qu’au créancier, dont les droits naissent
postérieurement à sa publication. Pour les biens inscrit dans la comptabilité, ce n’est opposable qu’à compter
de la publication des comptes auprès du registre de publicité.

b. Les exceptions du fractionnement

En cas de fraude ou de manquement grave aux obligations comptables, l’entrepreneur répond de tous ses
biens, notamment si l’entreprise individuelle fait l’objet d’un procédure collective (mise en redressement,
liquidation judicaire…), ou alors en cas de faute de gestion, l’entrepreneur peut être condamner à combler
une éventuelle insuffisance d’actif en puisant sur son patrimoine non affecté.

Lorsqu’il y a eu confusion de 2 patrimoines dans la gestion, une extension des procédures est possible : le
tribunal va pouvoir considérer que les biens non affectés à l’activité professionnelle font partis des actifs
liquidables pour le paiement des créances.

Section 2 – L’exercice de l’activité commerciale par une personne morale

3 codes et quelques textes non codifiés évoquent le principe de l’exercice de l’activité commerciale par une
personne morale :
- Le Code Civil
- Le Code de Commerce : article L210-1 et suivants. Avant ce code, elles étaient dans la loi du 24
juillet 1966.
- Le Code Monétaire et Financier

Les grandes lois de ces dernières années :


- La loi SAPIN 2, décembre 2016
- La loi du 27 mars 2017 : création d’un devoir de vigilance des sociétés mères et des sociétés
donneuses d’ordre.
- La loi PACTE du 22 mai 2019 et la loi de simplification, de clarification et d’actualisation.

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Paragraphe 1 – La naissance de la société

I. Le choix sociétaire

A. Pourquoi créer une société ?

a. La société est une technique d’organisation du partenariat

Lorsque l’on entreprend à plusieurs, la question de société se pose. Ce n’est évidemment pas toujours le cas,
les conjoints ou enfants peuvent par exemple participer sans être associés à la société. En dehors de ces cas
spécifiques, un partenariat durable et égalitaire entrainera forcément la création d’une société car aucun
recours à la subordination ou autre ne sera souhaité.

b. La société est une technique d’organisation de l’entreprise

Il peut y avoir 3 intérêts à créer une société plutôt qu’une entreprise individuelle :

 Intérêt juridique :
La création de société offre une personnalité juridique distincte des personnes physiques qui ont créé la
société. C’était jusqu’à peu, la seule manière de séparer les patrimoines privés de celui de la société. La
création d’une société en facilite la transmission : il est plus facile de céder des titres sociaux, qu’une
entreprise individuelle entre vivants. Lors du décès de l’entrepreneur individuel, l’entreprise individuelle va
tomber en indivision entre les héritiers propriétaires indivis de l’entreprise. Il entraîne parfois même la mort
de l’entreprise. Or une société se transmet plus facilement aux héritiers.

 Intérêt financier :
Sans création de société, il y aura forcément un frein au développement de la société car une société peut
ouvrir son capital en cas de gros besoins de financement. A un moment donné, la fortune d’une personne ou
d’une famille ne suffit plus pour répondre aux besoins de développement de l’entreprise.

 Intérêt fiscal :
Certaines sociétés permettent de passer de l’IR à l’IS ce qui a certains avantages.

c. La société est une technique d’organisation du patrimoine

La société ne peut servir qu’à organiser le patrimoine dans les meilleures conditions fiscales possibles (SCI
par exemple).

B. Quelle société choisir ?

a. Les sociétés civiles et les sociétés commerciales

Une société peut être commerciale soit en raison de son objet soit en raison de sa forme.
Une société civile est toute société qui n’est pas commerciale.
Une société civile qui exercerait une activité commerciale s’expose à une requalification en société
commerciale créée de fait avec de lourdes conséquences pour les associés qui deviendront responsables
solidairement des dettes de la société.

b. Les sociétés de personnes et de capitaux

Les sociétés de personnes se caractérisent par un intuitu personae fort c’est-à-dire une considération de la
personne importante. Ainsi, la mort d’un cocontractant entraine la fin du contrat tout comme la mort d’un

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associé entraine la fin de la société. Dans les sociétés de personnes, l’accord de tous les associés est
nécessaire pour en sortir ou pour y entrer. Enfin, la responsabilité des associés est illimitée.
Les sociétés de capitaux sont tout l’inverse, seul le capital compte. Les actionnaires ont ainsi une
responsabilité limitée, ils ne risquent que de perdre leur apport.

c. Les sociétés à risque limité et les sociétés à risque illimité

Dans les sociétés à risque limité, la responsabilité des associés est limitée à ce qu’ils ont apporté à la société.
Les créanciers de la société n’ont aucun droit à faire valoir sur le patrimoine personnel des associés.
Certaines infractions pénales ne peuvent être caractérisées que dans les sociétés à risque limité (abus des
biens sociaux).
Dans les sociétés à risque illimité, les associés sont personnellement, solidairement et indéfiniment tenues
aux dettes sociales.

Quand on veut protéger son patrimoine, on ne crée pas de société à risque illimité.
Les sociétés commerciales par la forme sont presque toutes à risque limité. Exception : les sociétés en nom
collectif et en commandite.
Les sociétés commerciales par leur objet créées de fait, et celles en participation, sont à risque illimité.

d. Société unipersonnelle et société pluripersonnelle

Il existe des sociétés constituées que d’un seul associé.

e. Société immatriculée ou non

Certaines sociétés ne sont pas immatriculées et n’ont donc pas la personnalité morale.

f. Société offrant au public des titres financiers et sociétés n’en offrant pas

Avant on parlait de société faisant ou non « appel public à l’épargne ». Cette situation fait peser des risques
sur les épargnants. Seules certaines formes de sociétés commerciales sont autorisées à le faire : les sociétés
anonymes, en commandite par action et européenne.

On constate aujourd’hui qu’il y a de plus en plus une césure en droit avec d’un côté les sociétés cotées et de
l’autre les sociétés non cotées : exemple du vote des actionnaires sur la rémunération des dirigeants imposé
seulement pour les sociétés cotées.
g. Société coopérative et société capitalistique

Les sociétés coopératives reposent sur des principes différents :


- La règle que chaque associé de la coopérative possède les mêmes droits.
- Le principe d’exclusivité : normalement, une société coopérative n’est constituée que pour offrir des
services à ses membres.

Le but de ses sociétés n’est pas de réaliser et de partager un profit comme les sociétés capitalistiques mais
plutôt d’améliorer le sort des membres de la coopérative, satisfaire les besoins économiques, sociaux ou
culturels des membres de la coopérative. Elles se caractérisent par le fait qu’elles réunissent des personnes
que tout oppose.

Une société capitalistique distingue les associés et les clients, mais dans une société coopérative c’est
associé = client = une seule et même personne.

II. La création sociétaire

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Une société est à la fois un contrat et une institution.

A. Le contrat de société / l’engagement sociétaire

Le terme de contrat est impropre car il est vérifié dans 90% des cas mais parfois ce n’est pas un vrai contrat
mais seulement un engagement unilatéral.

1. La constitution du contrat sociétaire

- Les conditions issues du droit commun des contrats : le consentement des parties ne doit pas être
vicié + les parties doivent être capables de contracter + le contenu doit être certain et licite. Articles
1120 et suivants.

- Les conditions supplémentaires propres à ce type de contrat : article 1832 code civil : règles sur le
contrat de société, définition de la société.

« La société est instituée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent par un contrat d'affecter à une
entreprise commune des biens ou leur industrie en vue de partager le bénéfice ou de profiter de l'économie
qui pourra en résulter. Elle peut être instituée, dans les cas prévus par la loi, par l'acte de volonté d'une
seule personne. Les associés s'engagent à contribuer aux pertes. »

a. Le nombre d’associés

Normalement, toute société doit comporter à sa création et en cours de vie sociale, au moins 2 associés.
Parfois il en faut plus : dans les sociétés en commandite par action il en faut 4.
En principe il n’y a pas de plafond au nombre d’associés sauf pour les SARL c’est limité à 100 personnes
maximum.
Loi de 1985 : dans les SARL, dans les SAS et dans les sociétés européennes, il peut y avoir une seule
personne.

 Lorsqu’une société pluripersonnelle à l’origine devient en cours de vie sociale unipersonnelle, il y a 4


solutions :

- Si la forme de la société le permet, elle peut rester unipersonnelle.


- Si la forme de la société ne le permet pas, il y a possibilité de transformer la société en une forme
permettant l’uni personnalité.
- Une régularisation peut être faite dans un délai d’1 an. L’associé unique peut céder des parts ou créer
une nouvelle société. Au-delà, toute personne intéressée peut demander la dissolution de la société en
justice.
- L’associé unique peut décider lui-même de liquider la société.

b. L’apport

Chaque associé doit réaliser un apport. Il existe 2 significations du terme apport :

- Il s’applique souvent à l’opération d’apport donc au contrat conclu entre la société et l’associé. Le
contrat obéit à des qualifications variables, il peut être assimilable à une vente, un échange, un bail…
- Il est aussi employé pour désigner l’objet même de ce contrat c’est-à-dire ce qui est concrètement
apporté à la société par l’associé.

Article 1843-3 qui distingue 3 catégories d’apport : « Chaque associé est débiteur envers la société de tout
ce qu'il a promis de lui apporter en nature, en numéraire ou en industrie. »

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- Numéraire = apport en argent = lors de la constitution de la société, le capital doit être intégralement
souscris. Il ne faut pas confondre la souscription d’une part du capital qui est la promesse de réaliser
l’apport avec la libération qui est l’exécution de la promesse. La loi encourage la libération rapide et
totale du capital de différentes manières (par exemple des avantages fiscaux qui ne sont accordés que
lorsque le capital est entièrement libéré). Sanctions quand les apports ne sont pas faits aux dates
fixées :
o L’associé fautif est de plein droit débiteur des intérêts à compter du jour où il aurait dû payer.
o L’associé fautif peut être condamné à verser des dommages intérêts si l’absence de
libéralisation du capital dans les délais a causé un préjudice.
o Si les dirigeants de la société n’effectuent pas les appels de fond pour la libéralisation du
capital, tout intéressé peut demander au président du tribunal d’enjoindre aux dirigeants de
faire cet appel ou de désigner un mandataire.

- Nature = donner à la société un bien autre que de l’argent susceptible d’une évaluation pécuniaire
(immeuble ; meuble corporel ou incorporel) = son évaluation en argent a des incidences fortes entre
associés, actionnaires et tiers. En raison de ces risques, dans les SARL et dans les sociétés par action,
la loi prévoit la désignation d’un commissaire aux apports chargé des évaluations. Un délit est prévu
en cas de majoration frauduleuse d’un apport en nature. Dans les autres sociétés, la désignation d’un
commissaire aux apports est facultative.
Plusieurs manières de faire un apport en nature :
o L’apport en nature en pleine propriété = hypothèse où la société devient propriétaire du bien
apporté. C’est une forme de contrat d’échange car ce n’est pas une vente. Il est envisagé dans
le code civil : pour l’essentiel ce sont les règles du contrat de vente qui s’appliquent. Les
parties se doivent garantie d’éviction et des vices cachés. Si le bien est commun à 2 époux, il
faut l’accord des 2.
o L’apport en jouissance = article 1843-3 distingue 2 hypothèses :
 Les corps certains = chose identifiable, unique
 Les choses de genre = chose identifiable que par son genre, peut être
remplacée
Lorsqu’il porte sur un corps certain, le contrat d’apport en jouissance est assimilable à un bail.
L’apporteur a les mêmes obligations qu’un bailleur et la société a les mêmes droits qu’une
location. L’associé reste propriétaire et récupère son bien au moment de la dissolution.
Si l’apport porte sur des choses de genre, le contrat est translatif de propriété à charge pour la
société de rendre des choses semblables à la liquidation.
o L’apport en nue-propriété / usufruit = la propriété d’un bien peut être démembrée, partagée
entre un nu propriétaire et un usufruitier. Il est possible d’avoir un apport démembré.

- Industrie = c’est l’hypothèse d’un associé qui promet d’apporter son travail à la société mais sans
avoir de lien de subordination juridique. Il ne participe pas à la formation du capital social, il n’est
pas saisissable. Il était interdit pendant longtemps dans toutes les sociétés par action. Aujourd’hui, il
reste interdit dans les sociétés anonymes, mais il est admis dans les SARL depuis 2001 et dans les
sociétés action simplifiée depuis 2008. Il n’est possible que pour les commandités dans les sociétés
en commandite.

c. La volonté de s’associer : l’affectio societatis

C’est la volonté non équivoque de tous les associés de travailler ensemble sur un pied d’égalité au succès de
l’entreprise commune.
Pour les sociétés avec des milliers d’actionnaires c’est compliqué de la distinguer.
Pour les sociétés unipersonnelles, il y a l’associé et la société donc cette volonté est quand même possible à
identifier.

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Juridiquement, cette notion est toujours utilisée. Quand cet élément disparait en cours de vie sociale, il y a
des conséquences : les juges l’utilisent souvent pour déclarer certaines sociétés fictives.

Cette notion permet d’identifier des sociétés créées de fait. On observe si les personnes se comportent
comme des associés c’est-à-dire qu’ils travaillent ensemble sur un pied d’égalité au succès de l’entreprise
commune.

d. La vocation de participer au résultat de la société

La vocation première de la société est de réaliser des bénéfices.

Les associations sont définies par la loi 1901 comme ayant un objet autre que le partage des bénéfices.
Au fil des années, il y a eu un rapprochement qui s’est opéré par un ajout en 1978 : une société peut être
constituée non pas pour faire du bénéfice mais pour profiter d’une économie, diminuer les couts. La Cour de
Cassation disait aussi qu’une association peut avoir pour but la recherche d’une économie.

La contribution aux pertes existe dans toutes les sociétés à risque limité ou illimité :

- Dans les sociétés à risque limité, les pertes sont inscrites au bilan. A la liquidation, la société a une
dette envers les associés, ils risquent de perdre tout ou une partie de ce qu’ils avaient apporté car ils
doivent rembourser leurs pertes. Mais il peut y avoir une contribution anticipée sans attendre la
liquidation, elle peut être :
o Imposée par la loi, dans les SA ou SARL, en cas de perte de la moitié du capital social, les
actionnaires doivent renflouer la société.
o Imposée par les statuts, les associés contribuent aux pertes à la fin de chaque exercice.

- Dans les sociétés à risque illimité, on n’attend pas la liquidation de la société, les associés répondent
indéfiniment des dettes de la société.

Article 1844-1 : la répartition des pertes et des bénéfices 

« La part de chaque associé dans les bénéfices et sa contribution aux pertes se déterminent à proportion de
sa part dans le capital social et la part de l'associé qui n'a apporté que son industrie est égale à celle de
l'associé qui a le moins apporté, le tout sauf clause contraire. »

« Toutefois, la stipulation attribuant à un associé la totalité du profit procuré par la société ou l'exonérant
de la totalité des pertes, celle excluant un associé totalement du profit ou mettant à sa charge la totalité des
pertes sont réputées non écrites. »

 Clauses léonines = associé qui se réserve une grosse part. Hypothèses :


- Une clause qui réserve tous les bénéfices à un associé ou l’en exclut totalement
- Une clause faisant supporter toutes les pertes à u associé ou l’en exonérant totalement

 Domaine des promesses de cession assorties d’un prix plancher. C’est la situation d’un associé qui
obtient une promesse d’achat de ses actions par un autre associé ou un tiers moyennant un prix minimal
convenu à l’avance. Celui qui bénéficie de la promesse va pouvoir lever l’option à tout moment ce qui
déclenche la vente avec le prix minimal convenu.

La Cour de Cassation 1ère chambre civile a fait application de l’article 1844-1 en considérant que ce type de
clause est une clause léonine, ce qui entraine la nullité de la promesse. Si entre le moment o la promesse est
conclue et le moment ou son bénéficiaire lève l’option, la valeur des titres cédés se dégrade
considérablement, cela revient à exonérer celui qui bénéficie de la promesse des pertes de cette société. Mais

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la Chambre Commerciale a jugé différemment, elle estime que sauf preuve d’une fraude, que le contrat n’a
qu’un but de contourner l’interdiction du code civil, la clause de prix plancher est valable.

2. La nullité éventuelle du contrat sociétaire

Lorsqu’un contrat ne respecte pas une condition de validité, il est nul. S’il est annulé, il est censé n’avoir
jamais existé. Il ne fait plus d’effet pour l’avenir mais aussi pour le passé. Il faut effacer tous les effets que le
contrat a pu produire (rétroactivité).
Ces conséquences pour le contrat de société seraient dramatiques car la société ne pourrait plus exister, alors
même qu’elle peut être viable et en plus il faudrait effacer tous les contrats conclus.
Le législateur ne pouvait pas traiter la nullité du contrat de société comme la nullité des autres contrats. La
loi est intervenue :

a. Limitation des causes de nullité

Article 1844-10 du Code Civil : «  La nullité de la société ne peut résulter que de la violation des
dispositions « de l'article 1832 et du premier alinéa des articles 1832-1 et 1833 », ou de l'une des causes de
nullité des contrats en général.
Toute clause statutaire contraire à une disposition impérative du présent titre, dont la violation n'est pas
sanctionnée par la nullité de la société, est réputée non écrite.
La nullité des actes ou délibérations des organes de la société ne peut résulter que de la violation d'une
disposition impérative du présent « à l'exception du dernier alinéa de l'article 1833 » ou de l'une des causes
de nullité des contrats en général. »

Article L235-1 du Code de Commerce : « La nullité d'une société ou d'un acte modifiant les statuts ne peut
résulter que d'une disposition expresse du présent livre ou des lois qui régissent la nullité des contrats. En
ce qui concerne les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés par actions, la nullité de la société ne
peut résulter ni d'un vice de consentement ni de l'incapacité, à moins que celle-ci n'atteigne tous les
associés fondateurs. La nullité de la société ne peut non plus résulter des clauses prohibées par l'article
1844-1 du code civil  = clauses léonines »

C’est le même principe dans les deux textes. L’idée générale est la suivante : pas de nullité sans texte la
prévoyant expressément. On écarte donc les nullités virtuelles : lorsqu’un texte prévoit au sujet d’un acte
une condition à respecter et qu’il ne dit rien en ce qui concerne la sanction, le juge peut malgré le silence de
la loi, décider qu’implicitement le législateur a voulu la nullité.

En droit des sociétés, ce n’est pas possible. Le juge ne peut pas déduire la nullité en se basant sur la volonté
implicite du législateur.

Dans les deux textes, soit la nullité vient du fait que le contrat de société ne respecte pas les conditions de
droit commun des contrats, soit elle peut venir de règles propres u contrat de société prévues par le code
civil soit prévues par le code de commerce.

- Les dispositions du droit commun du contrat : la capacité à contracter + le consentement des associés
ne doit pas être vicié + le contenu doit être licite et certain.
o Capacité et consentement : en théorie, si on a un des associés incapables de contracter, ou
dont le consentement a été vicié, il pourrait demander la nullité du contrat, ce qui entrainerait
la destruction du contrat alors que ce problème ne concerne qu’un seul associé.
o Contenu : hypothèse de la fraude ou des sociétés fictives.
 La fraude corrompt tout. La fraude c’est quand celui qui en est l’auteur cherche à
contourner ou à détourner la règle de droit.
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Exemple de fraude :
 Une entreprise de taille importante qui s’est découpé en petites sociétés de
moins de 50 salariés car au-dessus de 50 il y a des règles contraignantes.
 Une personne qui n’a pas le droit d’acquérir un immeuble, elle constitue une
SCI pour que celle-ci se porte acquéreur de l’immeuble qu’elle ne peut pas
acquérir.
 Société fictive : aucune réalité et vie sociale, elle existe seulement sur le papier. Elle
est soit nulle soit inopposable aux tiers.
Exemple de société fictive :
 Secteur de l’hôtellerie, les juges estiment que 32 SARL créées étaient en fait
fictives. Ils ont décidé ça car il était nécessaire de supprimer le mirage de ces
sociétés pour mettre à jour la réalité d’un lien de subordination juridique entre
les franchiseurs et les gérants de petites sociétés.
 Société constituée par un architecte, pour faire des travaux dans le bâtiment.
Les juges ont estimé qu’elle était fictive car personne ne portait d’intérêt à la
société, aucun apport n’était fait, pas de salarié.

Article 1833 du code civil : « Toute société doit avoir un objet licite et être constituée dans l’intérêt
commun des associés. »
Selon les juges, il faut tenir compte de l’objet statutaire = activité de la société décrite dans les statuts. Dans
ce cas, la société mérite d’être annulée.

Article L235-2 du Code de Commerce : « Dans les sociétés en nom collectif et en commandite simple,
l'accomplissement des formalités de publicité est requis à peine de nullité de la société, de l'acte ou de la
délibération, selon les cas, sans que les associés et la société puissent se prévaloir, à l'égard des tiers, de
cette cause de nullité. »
C’est la seule hypothèse de nullité du contrat de société dans le Code de Commerce.

b. Amortissement des effets de nullité

Le droit met plusieurs obstacles à l’action en nullité :

 En ce qui concerne la qualité pour demander la nullité : certains cas de nullité peuvent être -invoqués
par toute personne justifiant d’un intérêt. Ce sont les cas de nullité absolue. Mais de nombreux cas sont de
nullité relative et ne sont ouverts qu’à une seule personne, celle qui est protégée par la loi.
 En ce qui concerne la prescription : c’est l’effet du temps sur la possibilité d’invoquer en droit. Droit
commun c’est 5 ans et ici c’est 3 ans à compter du jour où la nullité est encourue. C’est la Cour de Cassation
qui l’a précisé : 3 personnes créent une société mais toutes les parts sont réunies sur la tête d’une seule
d’entre elle. L’une des personnes soulèvent la nullité de la société en faisant valoir qu’il n’y a pas affectio
societatis œuvre ensemble sur un pied d’égalité. L’autre dit que la prescription de 3 ans est déjà acquise. La
Cour d’Appel dit que la prescription n’est pas acquise car c’est une nullité permanente donc elle commence
à court que le jour où la cause de nullité a disparu. La Cour de Cassation n’est pas d’accord et dit que
l’action en nullité se prescrit à compter du jour où la nullité est encourue.
 En ce qui concerne la régularisation : c’est le fait de faire disparaitre la cause de nullité. Tous les cas de
nullité peuvent être régularisés sauf l’illicéité de l’objet social. L’action en nullité va donc s’éteindre si au
jour où le juge statut, la cause de nullité a cessé. Le tribunal peut d’office accorder un délai pour régulariser
au lieu d’annuler la société.

Si cette demande aboutit, la nullité est prononcée mais n’a pas de rétroactivité. Article 1844-15 du Code
Civil : « Lorsque la nullité de la société est prononcée, elle met fin, sans rétroactivité, à l'exécution du
contrat. »

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B. L’institution sociétaire

1. Les sociétés sans personnalité morale

a. Les sociétés en participation

C’est la seule société voulue comme n’ayant pas de personnalité morale.


Articles 1871 et suivants : « Les associés peuvent convenir que la société ne sera point immatriculée. La
société est dite alors " société en participation ". Elle n'est pas une personne morale et n'est pas soumise à
publicité. Elle peut être prouvée par tous moyens. »
« Les associés conviennent librement de l'objet, du fonctionnement et des conditions de la société en
participation, sous réserve de ne pas déroger aux dispositions impératives. »

Avant, elle était destinée à être secrète et connue par les seuls associés. Si elle se dévoilait aux tiers, elle
perdait sa qualité de société en participation. Ça a été supprimé depuis 1978.

Mais aujourd’hui, elle n’est une réalité opposable que pour ses membres.

 Constitution : On a des conditions réduites au minimum pour sa création. La rédaction d’un écrit n’est
même pas indispensable. Elle peut être prouvée par tout moyen. La seule particularité est qu’il faut la
déclarer fiscalement car il y a des droits à payer.
Il faut :
- 2 personnes qui ont l’intention de s’associer et qui veulent participer au résultat de l’entreprise.
- Les apports sont essentiels.

 Utilisation : On a recours aux sociétés en participation dans 3 cas :


- Dans le cadre de la coopération inter-entreprises (construction ; industrie cinématographique)
- Dans la volonté de mieux gérer une indivision. C’est le cas des entreprises qui utilisent ensemble le
même équipement. Ces sociétés précisent les modalités d’utilisation de cet équipement.
- Pour financer à plusieurs une opération risquée. Les banques ont souvent recours aux sociétés en
participation ou les compagnies d’assurance pour ne pas assumer un gros risque toute seule.

 Fonctionnement : Elles sont très libres, elles ont beaucoup de souplesse.


« Les associés conviennent librement de l'objet, du fonctionnement et des conditions de la société en
participation, sous réserve de ne pas déroger aux dispositions impératives. »
Elle peut être une société civile si elle a une activité civile donc elle y est soumise sauf si c’est marqué que
non.

Elle n’a pas de personnalité morale puisqu’elle n’est pas immatriculée, elle n’a pas de patrimoine, pas de
compte en banque, pas de siège social, pas de salariés, elle ne peut pas air ou être assignée en justice, pas de
liquidation judiciaire, elle échappe à toutes responsabilités, elle n’existe qu’au regard des associés. Donc
chaque associé y compris le gérant contracte en son nom personnel et est seul engagé à l’égard des tiers :
article 1872-1 alinéa 1 : «  Chaque associé contracte en son nom personnel et est seul engagé à l'égard des
tiers. »
Le tiers ne peut donc pas agir contre un autre associé que celui qui a agi sauf dans 3 cas : alinéa 2 et 3 :
« Chaque associé contracte en son nom personnel et est seul engagé à l'égard des tiers.
Toutefois, si les participants agissent en qualité d'associés au vu et au su des tiers, chacun d'eux est tenu à
l'égard de ceux-ci des obligations nées des actes accomplis en cette qualité par l'un des autres, avec
solidarité, si la société est commerciale, sans solidarité dans les autres cas. »
« Il en est de même de l'associé qui, par son immixtion, a laissé croire au cocontractant qu'il entendait
s'engager à son égard, ou dont il est prouvé que l'engagement a tourné à son profit. »

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 Dissolution : Les règles générales s’appliquent. Mais aussi elle peut être conclue pour une durée
indéterminée donc il y a un cas de dissolution propre : elle peut être provoqué par une simple notification
adressée par un des associés à tous les autres mais de bonne foi.
Article 1872-2 : « Lorsque la société en participation est à durée indéterminée, sa dissolution peut résulter
à tout moment d'une notification adressée par l'un d'eux à tous les associés, pourvu que cette notification
soit de bonne foi, et non faite à contretemps. »

b. Les sociétés créées de faits

 Définition : 2 ou plusieurs personnes se sont comportés dans les faits comme des associés sans avoir
exprimé formellement leur volonté en ce sens, sans avoir réaliser de démarche et même sans avoir
conscience de se comporter comme les associés d’une société.
Point commun avec la société en participation  pas d’existence formelle, aucune démarche officielle.
Différence avec la société en participation  les associés n’ont même pas conscience de l’existence de cette
société, alors qu’en participation les associés veulent la créer.

 Identification : 2 cas de figure :

- Un associé qui prétend qu’une société crée de fait existe avec une autre personne afin de participer à
la liquidation de cette société et de profiter des actifs.
o Exemple : on donne de l’argent à un ami qui achète un ticket de loto et il gagne, on conteste
le partage des gains, la liquidation des gains s’opère en justice et passe par la société de fait.
o Exemple : en concubinage sans formalisation de l’union, l’un des concubins à un fonds de
commerce qu’il exploite, ils travaillent ensemble et l’autre apporte son aide, un jour c’est la
rupture  règlement des comptes devant le tribunal, l’avocat du propriétaire du fonds dira
qu’il n’y avait aucune société et que l’autre n’a le droit à rien, l’avocat de la partie adverse
plaidera que tous les éléments du contrat de société sont réunis (2 personnes, affectio
societatis, apports en nature et industrie de l’autre, vocation aux résultats). Si le juge est
convaincu, il accordera au concubin un boni de la liquidation de cette société.

- Un tiers par rapport à la société (créancier) qui va revendiquer l’existence de société crée de fait pour
pouvoir identifier d’autre débiteur.
o Le tiers n’a pas à prouver séparément chacun des éléments qui participe au contrat de société,
seulement l’apparence extérieure d’une société créée de fait.

En principe, le Code Civil applique à cette société les règles qui sont prévus pour les sociétés en
participation.

c. Les sociétés en formation, en cours de création

Leur personnalité morale est reconnue qu’après l’immatriculation. Mais sans attendre le processus
d’immatriculation, il y a des démarches qui sont effectuées :

1ère étape : rédaction des statuts. Il peut s’agir de statut qui vont prendre la forme d’un acte sous seing privé
ou d’un acte authentique lors de l’apport d’un immeuble. Selon la forme de la société, on pourra rédiger plus
ou moins librement les statuts.
Article 1835 : « Les statuts doivent être établis par écrit. Ils déterminent, outre les apports de chaque
associé, la forme, l'objet, l'appellation, le siège social, le capital social, la durée de la société et les
modalités de son fonctionnement. Les statuts peuvent préciser une raison d'être, constituée des principes
dont la société se dote et pour le respect desquels elle entend affecter des moyens dans la réalisation de son
activité ».

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2ème étape : enregistrer les statuts après du service des impôts. C’est une formalité qui a été supprimé sauf
dans 2 cas depuis 2015.

3ème étape : les tiers doivent être informés de la constitution de la société. Avis de constitution de la société à
publier dans un journal légal.

4ème étape : immatriculation au RCS si la société est commerciale par sa forme ou son objet. La liasse doit
être déposée au CFE : exemplaire des statuts, une copie des actes de désignations des dirigeants s’ils n’ont
pas été énumérés dans les statuts, et d’autres documents selon la forme de la société (ex : apport en nature
dans les SARL), la liste des bénéficiaires effectifs.

Article 1843 : « Les personnes qui ont agi au nom d'une société en formation avant l'immatriculation sont
tenues des obligations nées des actes ainsi accomplis ».

Article 1843 in fine exception : « La société régulièrement immatriculée peut reprendre les engagements
souscrits, qui sont alors réputés avoir été dès l'origine contractés par celle-ci  ». Mais attention conditions  :

 Conditions de fond : L’acte doit déjà avoir été passé avant l’immatriculation. Il doit avoir été conclu
pour le compte de la société en formation. Donc le cocontractant sait que la reprise peut avoir lieu.

 Conditions de forme : 3 cas de figures de la reprise :


- Si l’acte a été passé avant la signature des statuts, et si en annexe des statuts on a un état des actes qui
ont été accompli, la signature des statuts montre le consentement de tous les associés et cette reprise
se fera automatiquement au moment de l’immatriculation.
- Si l’acte est passé entre la signature des statuts et l’immatriculation. Si un mandat express et spécial
visant l’acte que le mandataire peut conclure est donné à un associé, l’immatriculation emportera la
reprise des actes.
- La société peut reprendre tout acte s’il a été accompli avant l’immatriculation par un vote de la
majorité des associés.

S’il y a reprise, dans tous les cas de figure on fait comme si la société avait passé l’acte dès l’origine.
L’associé est déchargé de toute responsabilité liée à cet acte même pour la période antérieure à la reprise.

2. Les sociétés avec personnalité morale

Une fois immatriculée, la société a la personnalité morale.

a. Attributs de la société immatriculée

 Capacité juridique = elle peut conclure des actes juridiques en son nom et pour son compte. C’est
comme les personnes physiques sauf que les personnes morales ont une capacité spéciale et non générale.
C’est-à-dire qu’elle est doublement limitée car :

- Limite objective : l’acte doit entrer dans l’objet social. L’objet social est défini dans les statuts. C’est
l’activité que la société entend mener (article 1835 : « Les statuts déterminent l’objet »). Si l’objet
social disparait car il a été réalisé ou car il s’est éteint (devenu impossible), alors la société sera
dissoute. La société peut changer d’objet mais si elle change totalement d’objet, fiscalement ce sera
une cessation d’activité. Pour les sociétés non commerciales par la forme, c’est l’objet qui va définir
si elle est civile ou commerciale. L’acte ne correspondant pas à son objet social : selon l’article 1145
du Code Civil, l’acte serait nul. Donc en 2018 on supprime cette version et l’article renvoie au Code
des Sociétés. Donc tout dépend du type de sociétés : dans les sociétés à risque illimitée, la société
n’est pas engagée par les actes qui dépassent son objet social. Dans les sociétés à risque limité, la

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société est engagée seulement si le tiers contractant de la société est de bonne foi et qu’il ignore que
le contrat est conclu en dehors de l’objet social de la société.

- Limite subjective : l’acte doit être conforme à l’intérêt social. L’intérêt de la société ne se confondait
pas avec celui des dirigeants mais également avec celui des associés. Il est arrivé qu’un acte contraire
à l’intérêt social soit annulé alors qu’il avait été adopté à l’unanimité par les associés. Article 1833 :
«  La société est gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et
environnementaux de son activité. »
Lorsqu’un acte est jugé contraire à l’intérêt social, dans les sociétés à risque illimité, l’acte peut être
nul. Dans les sociétés à risque limité, l’acte ne serait pas nul au nom d’une Directive Européenne qui
limite les cas de nullité.

 Droits de l’Homme = les sociétés bénéficient dans une certaine mesure des droits fondamentaux :
- Droits liés à l’accès à la justice : article 6 de la convention euro de sauvegarde des droits de
l’Homme.
- Comme les personnes physiques, les sociétés ont droit à la protection de leur honneur, elles peuvent
agir en diffamation ou en dénigrement.
- Elles jouissent de la liberté d’expression.
- Elles ont le droit à une certaine intimité, le secret des affaires. Articles L153-1 et suivants.

 Dénomination sociale = toute société immatriculée doit être nommée. Article 1835 « l’appellation ».
Cette dénomination est librement choisie mais ne doit pas être contraire à l’ordre public et aux bonnes
mœurs. Il faut aussi éviter de reprendre le nom d’une société concurrente. La dénomination n’est pas un
véritable titre de propriété comme une marque. Lorsqu’elle correspond au nom d’un des fondateurs, cela
pose problème lorsqu’il quitte la société en mésentente, et qu’il veut reprendre son nom. Arrêt 12 mars 1985
Bordas.

 Siège social = c’est l’équivalent du domicile, toutes les sociétés en ont. Lorsqu’une société est assignée
en justice, elle doit l’être dans le tribunal de son périmètre. L’adresse du siège détermine le lieu des
formalités de publicité. Le siège détermine aussi la nationalité de la société : article 1837 « Toute société
dont le siège est situé sur le territoire français est soumises aux dispositions de la loi française. »
Lorsqu’il y a un problème entre le siège réel et le siège statutaire, les tiers peuvent se prévaloir au choix au
siège statutaire ou au siège réel s’il est différent.
Toute société peut transférer son siège par une modification de ses statuts. Une société qui transfert son
siège dans un autre pays c’est l’équivalent d’une dissolution car la société ne doit son existence qu’au droit
de son pays d’origine. En Europe, on reconnait la liberté de circulation des personnes et pour les personnes
morales c’est la liberté d’établissement. Pour la garantir en Europe, on a créé la société européenne qui doit
son existence non pas à une législation nationale mais au droit européen donc une société peut transférer son
siège en toute liberté. Directive du 18 novembre 2019 : elle facilite le transfert de siège donc pas de
liquidation.

 Nationalité = comme les personnes physiques, les sociétés ont une personnalité. C’est important pour
déterminer certaines lois qui s’appliquent à la société. Article 1837 : « Toute société dont le siège est situé
sur le territoire français est soumises aux dispositions de la loi française ». En principe, c’est le siège
statutaire qui compte même si le siège réel est en fait à l’étranger. Si le siège statutaire est à l’étranger alors
qu’en réalité la société est pilotée depuis la France, on peut appliquer le droit français.

b. Responsabilités de la société immatriculée

 La responsabilité civile :

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- Du fait personnel : la société peut être engagée par un acte du dirigeant accomplie en son nom. Elle
est responsable elle-même puisque le dirigeant exprime la volonté de la société. C’est comme si la
société avait elle-même accompli la faute ou le fait à l’origine du dommage.
- Du fait d’autrui : la société peut avoir la qualité d’employeur et à ce titre elle est responsable pour les
dommages causés par ses employés. Quand ils sont dans le cadre de leur mission, ils engagent la
responsabilité de l’employeur. Si certaines conditions sont réunies, la victime ne peut pas agir contre
l’employé, elle est tenue d’agir uniquement contre la société car immunité des salariés qui ont agi
dans le cadre de leur fonction.
- Du fait des choses : tout gardien d’une chose est responsable du dommage causé par cette chose.
Mais cette notion est incompatible avec la notion de subordination juridique qui caractérise le contrat
de travail. On estime donc qu’en entreprise, lorsqu’un employé utilise une chose, il ne peut pas en
avoir la garde.

 La responsabilité pénale :

On estimait pendant longtemps que les sociétés n’étaient pas pénalement responsables (contravention ;
délit ; crime). On avait des difficultés à leur imputer une volonté délictueuse notamment avec la preuve de la
volonté de commettre une infraction.
Cette responsabilité a été admise tardivement et aménagée par une loi du 9 mars 2004.

Il y a 5 grands principes applicables :


- Toutes les personnes morales sont potentiellement responsables et pas seulement les sociétés (sauf
l’État et les collectivités locales).
- Toutes les infractions ne sont pas concernées, seules certaines peuvent être imputées à une personne
morale. Il faut que la loi prévoie expressément qu’elle est imputable à une personne morale.
- Il faut pouvoir rattacher l’infraction à une personne morale. Le fait qui matérialise l’infraction doit
avoir été accompli par un organe ou un représentant précisément identifié. Si c’est intentionnel, la
volonté doit être vérifié au niveau de l’organe ou du représentant.
- L’infraction doit avoir été accomplie pour le compte de la personne morale. La société doit profiter
de l’infraction. Si elle ne profite qu’à la personne délictueuse, ça ne suffit pas.
- Les sanctions encourues :
o Amende dont le montant maximal est x 5 du montant prévu pour les personnes physiques.
o Dissolution de la société commerciale prononcée par le juge.
o Interdiction d’exercice prévue pendant une durée définie.

Paragraphe 2 – La vie de la société

I. Les dirigeants

A. Le statut des dirigeants

Distinction dirigeant de droit / dirigeant de fait. Celui auquel on va s’intéresser est le dirigeant de droit.

1. Désignation et révocation

La désignation comme la révocation font l’objet de mesure de publicité, l’information est assurée aux tiers.
Tant que la publication n’a pas lieu, la société ne peut pas se prévaloir à l’égard des tiers des nominations et
des révocations qui sont intervenues. Ces mesures de publicité viennent purger toute irrégularité éventuelle.
Article L 210-9 du Code de Commerce : « Ni la société ni les tiers ne peuvent, pour se soustraire à leurs
engagements, se prévaloir d'une irrégularité dans la nomination des personnes chargées de gérer,
d'administrer ou de diriger la société, lorsque cette nomination a été régulièrement publiée. »

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Le dirigeant peut être désigné directement pas les associés ou les actionnaires ou indirectement par exemple
dans les sociétés anonymes. Le dirigeant peut être une personne physique ou une personne morale par
exemple dans les sociétés en commandite.

La révocation est une modalité d’interruption des fonctions d’un dirigeant. Il y a 3 grands principes :
- Un dirigeant n’est jamais irrévocable.
- Il y a 2 formes possibles de révocation selon la société :
o Les sociétés dans lesquelles les dirigeants sont révocables ad nutum (sur un signe de tête) =
elle vient du contrat de mandat. Elle permet au mandant de révoquer à tout moment le
mandat, sans préavis, sans motif et sans payer une indemnité. Toute clause contraire est
réputée non écrite mais la Jurisprudence est souple car elle admet les clauses d’indemnisation
pourvu qu’elle n’empêche pas la société d’exercer sa liberté de révoquer.  Sociétés
anonymes.
o Les sociétés dans lesquelles les dirigeants sont révocables pour juste motif = il faut mettre en
avant un juste motif tel qu’une faute de gestion. Si un juste motif est présent, la révocation est
possible, le gérant n’est pas indemnité. S’il n’y a pas de juste motif, la révocation est possible
mais le dirigeant a droit à une indemnisation  Sociétés en nom collectif, sociétés à
responsabilité limitée.
- Quel que soit le régime de cette révocation, on ne distingue plus, le dirigeant peut obtenir une
indemnité si la révocation intervient de manière attentatoire à son honneur, à sa réputation… ou
inutilement vexatoire.

2. Rémunération

Le dirigeant peut exercer bénévolement. Mais dans la plus grande majorité des cas il est rémunéré. La loi
n’encadre pas le montant des rémunérations dans les entreprises privées.

Dans les sociétés anonymes, obligation de transparence imposée : « tout actionnaire peut être informé du
montant global des rémunérations versées aux 5 personnes ou 10 personnes les mieux rémunérées de la
société. »

Depuis la loi Sapin 2 du 9 décembre 2016, on a imposé un certain contrôle des actionnaires sur la
rémunération dans les SA cotées.

B. Les fonctions des dirigeants

1. Les pouvoirs des dirigeants

Dans certaines circonstances, ils peuvent perdre tout ou une partie de leur pouvoir si un juge a été invité à
nommer un administrateur qui prend la place du dirigeant mais on s’en fou.

Le dirigeant est décrit comme ayant les pouvoir les plus étendu pour agir en toute circonstances au nom de
la société. Mais en réalité il y a au moins 4 limites aux pouvoirs du dirigeants :
- L’acte accompli par le dirigeant doit entrer dans l’objet social et doit être conforme à l’intérêt social.
- Les pouvoirs du dirigeant s’exercent dans la limite des pouvoirs que la loi donne impérativement aux
autres organes de la société. Par exemple pour les sociétés anonymes, l’assemblée générale est seule
habilitée à modifier les statuts de la société.
- Les pouvoirs des dirigeants peuvent être limités par les statuts. Ils peuvent librement prévoir qu’un
acte d’un dirigeant ne pourra pas être conclu et devra être conclu par un autre organe tel que
l’assemblée générale. L’acte conclu en violation de cette clause statutaire sera valable. En effet, ces
clauses sont inopposables aux tiers, la société est engagée, les tiers ne connaissent que les limites
légales mais pas les limites statutaires donc le tiers est protégé, l’acte sera valable.
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- Certains actes conclus par les dirigeants sont contrôlés, c’est-à-dire qu’on soupçonne un conflit
d’intérêt :
o Les conventions conclues entre la société et son dirigeant
o Les conventions conclues entre la société et un associé
o Les conventions conclues entre la société et un conjoint d’un dirigeant ??

Il existe 3 cas de figure :

o Les conventions libres : elles portent sur des opérations courantes qui sont conclues à des
conditions normales. Si le dirigeant est dans ce cas, il pourra exercer ses pouvoirs
normalement.
o Les conventions interdites : l’emprunt du dirigeant auprès de la société ou le cautionnement
par la société d’un engagement du dirigeant.
o Les conventions règlementées : il faut l’approbation de l’assemblée.

2. Les responsabilités des dirigeants

a. Responsabilité civile

 Sphère interne (le dirigeant engage sa responsabilité à l’égard des associés) : on peut retenir 4
hypothèses de fautes retenues :

- Le manquement au devoir de loyauté : le dirigeant est tenu d’un devoir de loyauté à l’égard des
associés. Il a été jugé que dans le cadre de vente de parts sociales à un autre associé, le dirigeant est
tenu de révéler ce qu’il sait de la valeur des parts sociales en question.
- La violation des dispositions légales applicables à la société.
- La violation des statuts : il doit agir en connaissance des clauses statutaires.
- La faute de gestion : négligence ou faute plus grave.

Il faut que cette faute ait causé un préjudice :

- Subi par la société : 2 actions en justice sont possibles :


o L’action ut universi : elle doit être représentée par son représentant légal mais il est
responsable donc pour cette action il faut qu’il y ait plusieurs dirigeants ou que le dirigeant ait
été remplacé.
o L’action ut singuli : elle est prévue pour réagir aux autres hypothèses donc dans le cas où on
n’a pas plusieurs dirigeants et celui qui est fautif est responsable. Il ne va pas s’attaquer lui-
même donc cette action peut être exercée par un ou plusieurs associés qui agissent au nom et
pour le compte de la société. Cette action existe dans toutes les sociétés et elle est d’ordre
public.

- Subi par un associé : un associé va réclamer indemnisation au dirigeant d’un préjudice propre à lui.
Mais il faut que le préjudice soit distinct du préjudice subi par la société du fait des fautes du
dirigeant. Exemple : la baisse de la valeur des parts sociales n’est pas jugée comme distinct du
préjudice subi par la société.

 Sphère externe (le dirigeant engage sa responsabilité auprès des tiers) : en théorie, il suffit que le tiers
prouve son préjudice, une faute commise par le dirigeant et le lien de causalité entre la faute et le préjudice
subi. Mais la Jurisprudence protège les dirigeants en posant une limite à leur responsabilité : le dirigeant
n’est responsable que s’il commet une faute détachable ou séparable de ses fonctions. S’il reste dans le cadre
de sa mission, il dispose d’une immunité, seule la responsabilité de la société est engagée. C’est la faute
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intentionnelle d’une particulière gravité incompatible avec l’exercice normal des fonctions sociales. Donc il
faut un caractère intentionnel et une certaine gravité qui montre que l dirigeant est totalement sorti de ses
fonctions. De ce fait, toute infraction pénale intentionnelle est nécessairement une faute détachable de ses
fonctions et engage sa responsabilité civile.

 Cette notion de faute détachable n’est pas exigée dans la sphère interne + cette exigence de faute
séparable n’est exigée que si la société est dotée de la personnalité morale !

b. Responsabilité pénale

Le dirigeant peut être auteur, co-auteur ou complice de la société pour une infraction pénale.
Certaines infractions ont été adoptées dans les sociétés à risque limité pour viser les dirigeants :
- Distribution de dividendes fictifs
- Publication ou présentation de comptes annuels infidèles
- Abus de biens sociaux
Fiscalement, le dirigeant peut être tenu de payer personnellement les impôts et les pénalités dus par la
société.

II. Les associés

Droit patrimonial :
Droit financier : droit aux dividendes lorsqu’un bénéfice est distribué et le droit au boni de liquidation.

Droit politique : article 1844 alinéa 1 : « Tout associé a le droit de participer aux décisions collectives.  »
Il recouvre 2 droits :

A. Le droit à l’information

Il n’y a pas de texte de droit commun qui exprime ce droit. Mais dans le droit des sociétés, on retrouve cette
idée.
- Droit périodique : il s’exerce à certaines périodes seulement, c’est-à-dire lors de la réunion de
l’assemblée générale annuelle. C’est la possibilité de prendre connaissance de certains documents
tels que les comptes sociaux et de poser des questions aux dirigeants.
- Droit permanent : il s’exerce toute l’année indépendamment de la réunion de l’assemblée générale
annuelle. C’est la possibilité de prendre connaissances de documents sociaux.

B. Le droit de vote

En principe, tout associé a le droit de vote. Ce n’est pas possible pour les statuts de priver l’associé de son
droit de vote hors des cas prévus par la loi.

1. Le titulaire du droit de vote

C’est l’associé qui est titulaire du droit de vote. Mais lors de l’indivision, il faut définir le titulaire du droit
de vote. Les copropriétaires doivent choisir un mandataire unique pour exprimer le vote sinon il sera désigné
en justice s’il n’y a pas unanimité.

Les droits sociaux peuvent être démembrées : usufruitier et nu-propriétaire. N’importe quel bien peut faire
l’objet de droits démembrés notamment lors d’une succession.

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- Règle générale : article 1844-3 du Code Civil : « Le droit de vote appartient au nu-propriétaire,
sauf pour les décisions concernant l'affectation des bénéfices, où il est réservé à l'usufruitier.  »
- Règle spécifique pour les sociétés anonymes et les sociétés en commandite par action : article L 225-
110 alinéa 1 du Code de Commerce : «  L’usufruitier vote aux assemblées générales ordinaires. Le
nu-propriétaire vote pour les assembles générales extraordinaires. »

2. La répartition du droit de vote

En principe, le vote est proportionnel au capital détenu : une action = une voie.
Dans les sociétés de personne, le principe est : un associé = une voie.

3. L’irrégularité du droit de vote

 Problèmes de forme : change d’une société à l’autre.

 Problèmes de fond : les associés sont en principe libre de voter dans le sens de leur choix mais il ne s’agit
pas d’un droit discrétionnaire puisqu’on applique au droit de vote la théorie de l’abus de droit. Les associés
peuvent exercer leur droit de vote tout en commettant une faute dans l’exercice de ce droit de vote donc en
engageant leur responsabilité :

- Abus de majorité = il est formé lorsque 2 conditions sont réunies :


o Une décision prise contrairement à l’intérêt social.
o Une décision prise dans l’unique but de favoriser les membres de la majorité au détriment de
la minorité.
Exemple  Rémunération disproportionnée pour les dirigeants sociaux majoritaires.
Lorsqu’il est constaté, il peut y avoir 2 sanctions :
o Une action en responsabilité des minoritaires contre les majoritaires, preuve du préjudice et
du lien de cause à effet, donc condamnation de dommages intérêts
o Une action en nullité de la délibération qui a matérialisé l’abus de la majorité.

- Abus de minorité = abus négatif, on reproche aux minoritaires de bloquer une décision. Il est formé
lorsque 2 conditions sont réunies :
o Il faut prouver que l’attitude des minoritaires est contraire à l’intérêt social et que cette
attitude interdit la réalisation d’une opération essentielle voire nécessaire à sa survie pour la
société.
o L’attitude du minoritaire est adoptée dans l’unique but de favoriser son propre intérêt au
détriment des autres associés.
Lorsqu’il est constaté, sanctions :
o Les dommages intérêts sont dus.
o La nullité de la délibération n’est pas concevable puisque les minoritaires ont empêché cette
prise de décision. La Cour de Cassation laisse entendre que le juge peut donner lui-même
force à la décision qui aurait été nécessaire et interdite par les minoritaires. Mais la Cour fnit
par reconnaitre que le juge ne doit pas s’immiscer et il peut seulement désigner un mandataire
qui va représenter les associés minoritaires à l’occasions d’une nouvelle assemblée et voter à
la place des minoritaires.

Paragraphe 3 – La fin de la société

I. Les causes de dissolution

Article 1844-7 du Code Civil qui donne 8 causes de dissolution de la société :


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 L’arrivée du terme de la société : limitation de durée de vie de 99 ans. La dissolution peut être évitée par
une prorogation. Cela permet d’allonger la durée du contrat, la loi prévoit que c’est le dirigeant qui doit
convoquer les associés pour prendre cette décision au moins 1 an avant le terme. Cela suppose une
modification des statuts. Si le dirigeant ne les convoque pas, tout associé peut demander au tribunal la
désignation d’un mandataire qui va lui-même convoquer les associés à la place du dirigeant. A l’arrivée du
terme, la société est dissoute de plein droit si cela n’est pas fait.
Loi du 19 juillet 2019 : met en place une nouvelle procédure qui permet de régulariser cette situation au
maximum 1 an après le terme prévu.

 La réalisation ou l’extinction de son objet : dans tous les contrats de sociétés, il y a une clause qui définit
l’objet social. Il y a 2 hypothèses visées par l’article :
- Réalisation : société constituée pour un objet social bien précis et après sa réalisation, la société n’a
plus de raison d’être.
- Extinction : elle ne dépend pas de la volonté des associés, l’extinction d’impose à eux, il n’est plus
possible d’exercer l’activité pur des raisons indépendantes des associés.
Exemple : lorsque le fonds de commerce est fermé judiciairement et définitivement ; lorsque
l’activité de la société est déclarée illégale ou illicite.

 L’annulation du contrat de société : la loi limite au maximum les cas d’annulation ou les effets de
l’annulation (pas de rétroactivité).

 La dissolution anticipée décidée par les associés : notion de « mutuus dissensus  », ce que les parties ont
fait, les parties peuvent le défaire. Cela suppose la majorité absolue ou la majorité qualifiée. L’intérêt est
qu’en cas de difficulté, les associés peuvent préférer une liquidation amiable plutôt qu’une liquidation
judiciaire.

 La dissolution anticipée prononcée par le tribunal à la demande d’un associé pour juste motifs : comme
c’est l’initiative d’un seul associé, il faut des justes motifs sinon le juge refuse la demande de dissolution de
la société. On distingue :
- Un autre associé maque à ses obligations
- Une mésentente entre associé qui paralyse le fonctionnement de la société.
Il n’y a pas lieu de distinguer car dans le 1er cas le Cour de Cassation rajoute une condition, il faut prouver
que le manquement paralyse le fonctionnement de la société.

 La dissolution anticipée prononcée par le tribunal dans le cas prévu à l’article 1844-5 : hypothèse où les
parts de la société se retrouvent réunies dans les mains d’une seule personne.

 Par l’effet d’un jugement ordonnant la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d’actifs : droit
des faillites = droit des procédures collectives.

 Pour toute autre cause prévue par les statuts : c’est la liberté contractuelle.

II. Les effets de la dissolution

A. Le principe : la liquidation et le partage

On distingue la liquidation amiable entre les associés et la liquidation légale ou judiciaire. Ce régime légal
s’applique s’il n’y a aucune clause qui organise la liquidation ou si les associés demandent à la justice de
l’organiser.

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Dans tous les cas, quand il y a liquidation, il y a nomination d’un liquidateur qui se substitue au dirigeant. La
personnalité morale de la société subsiste uniquement pour les besoins de la liquidation jusqu’à la
publication de la clôture de la liquidation. Le liquidateur dresse un inventaire des actifs, il les cède et avec
l’argent récupéré il procède au règlement du passif. Puis il va rembourser les apports et si après ça il reste
encore des biens (bonni de liquidation), un partage est opéré entre les associés.

B. L’exception : la dissolution sans liquidation

 En cas de scission ou fusion de la société : il y a transmission universelle du patrimoine de la société


dissoute à une autre société.
 En cas de dissolution d’une société unipersonnelle : le patrimoine est transféré à l’associé unique sauf si
l’associé unique est une personne physique alors cela ne s’applique pas car limitation de la responsabilité de
la forme sociale.

Leçon 3 – Les libertés commerciales

Chapitre 1 – La liberté du commerce et de l’industrie

Section 1 – Le principe

Sous l’Ancien Régime, la liberté du commerce et de l’industrie n’existait pas. Les commerces étaient
organisés en corporation fermées sur elles-mêmes. On a proclamé la liberté du commerce et de l’industrie
suite à la Révolution Française. Décret d’Allarde du 2 et 17 mars 1791 : l’objet est d’instaurer un nouvel
impôt payé par toute personne exerçant une activité professionnelle indépendante, la « patente », devenue la
taxe professionnelle.
Comme on avait peur des organisations professionnelles, on adopte un autre texte pour donner plus de force
au Décret d’Allarde, loi le Chapelier du 14 et 17 juin 1791 : elle abolit et interdit les groupements
professionnels/coalisions pour empêcher la reconstruction des corporations pour faire en sorte que les
entreprises ne s’organisent pas pour fermer l’accès au commerce.

Le Décret d’Allarde est toujours de rigueur, il est de droit positif et se décline en 2 composantes :
- La liberté d’entreprendre : n’importe qui peut créer une entreprise.
- La liberté d’exploiter : le commerçant est libre de conduire son activité sous les conditions qu’il
souhaite.

Section 2 – Les limites

Paragraphe 1 – Les limites concernant l’accès à certaines activités

I. Les limites générales

A. Limites tenant à l’existence d’un monopole public

C’est une limite absolue, l’État réserve une certaine activité à un certain opérateur privé ou public. La FDJ a
le monopole sur certains jeux, c’est une personne privée. Ces monopoles se réduisent sous la pression de
l’Europe notamment avec le principe de libre prestation de service et liberté d’établissement dans le Traité
Européen. Une entreprise doit pouvoir offrir ses prestations de services aux clients résidant dans un autre
état membre.

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Cette liberté est parfois invoquée pour contredire les monopoles publics avec les loteries et la FDJ
notamment : c’est considéré comme une atteinte à la libre prestation de service.
Certaines atteintes peuvent être justifiés avec certains motifs selon le Traité Européen. Le monopole de la
FDJ est nécessaire pour protéger le consommateur contre les dangers des jeux.

Quand un État membre met en avant un motif pour justifier cette atteinte, un principe de cohérence est
quand même exigé. Dans l’exemple de la FDJ, la mesure prise doit être nécessaire pour lutter contre
l’addiction, il faut prouver que c’est proportionné, prouver que l’État prend toutes les mesures pour mettre
ce principe en avant et prouver qu’il s’abstient de prendre des mesures contraires.

B. Limites tenant à la nécessité d’un agrément ou d’une autorisation

Pour les activités bancaires, on doit être agrée par l’ACPR. Ce sont des professions sensibles qui doivent
être régulées, car la conséquence de leur faillite peut être grave.

Pour le commerce de détail, les grandes surfaces ne peuvent pas être ouvertes librement, les surfaces de plus
de 1 000 mètres carrés, il faut une autorisation auprès d’une commission d’aménagement commercial.

II. Les limites propres à certaines personnes

 Ces limites peuvent tenir à la nationalité avec 2 cas de figure :


- Le ressortissant d’un État membre de l’UE : dans le Traité sur le fonctionnement de l’UE, il existe le
principe de non-discrimination. Il y a aussi 2 libertés économiques : la liberté d’établissement et la
libre prestation de services. Il y a aussi le principe de reconnaissance mutuelle des titres, des
diplômes et des agréments qui sont reconnus dans les autres états membres. La condition de
nationalité ne peut donc pas être invoquée pour un commerçant ressortissant de l’UE.
- Le ressortissant d’un état tiers : on a certaines activités qui sont interdites à ces ressortissants
notamment le transport de fonds, la protection des personnes, le gardiennage… En ce qui concerne
les activités autorisées, on a une double contrainte :
o Exigence de réciprocité, il doit y avoir une même liberté commerciale offerte dans l’État du
commerçant.
o Exigence d’une carte de séjour temporaire autorisant l’exercice d’une activité
professionnelle.

 Ces limites peuvent tenir à une incompatibilité/interdiction, une déchéance :

- L’incompatibilité c’est le fait que certaines personnes ont un statut incompatible avec l’exercice
d’une activité commerciale : les fonctionnaires, les professionnels libéraux et les officiers
ministériels. Le non-respect de cette règle entraine des sanctions disciplinaires mais aussi des
sanctions pénales notamment pour les fonctionnaires qui exerceraient du commerce.
Cela ne signifie pas que le droit commercial ne va pas s’appliquer à eux, mais ces personnes ne
pourront pas invoquer les règles du droit commercial à leur profit.
- La déchéance c’est le fait que pour certaines infractions pénales, le tribunal peut décider d’une
interdiction définitive ou provisoire d’exercer une activité professionnelle.

Paragraphe 2 – Les limites concernant l’exercice des activités : la concurrence déloyale

Article 1240 du Code Civil : «  Tout fait quelconque de l’Homme qui cause à autrui un dommage oblige
celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. » Il fonde la responsabilité extracontractuelle.

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Certains estiment qu’il serait opportun de synthétiser les apports de la jurisprudence dans les textes. Les
juges se sont servis de la responsabilité civile pour la régulation des comportements sur le marché
commercial et pour réguler la concurrence alors que ce n’était pas fait pour.

Il y a 3 types de comportements jugés déloyaux qui sont ressortis de l’étude de la jurisprudence par Paul
Roubier : le dénigrement, la désorganisation et la confusion. Le parasitisme est ressorti plus tard.

I. La faute

A. Généralités sur la faute : éléments indifférents

C’est celui qui veut obtenir réparation qui doit prouver la faute. Pour établir cette faute, il y a des éléments
qui ne sont pas requis :

1. La bonne ou mauvaise foi du défendeur

Pour prouver la concurrence déloyale, on ne doit pas prouver la bonne ou mauvaise foi.
Article 1241 : la faute peut prendre la forme d’une imprudence. Il n’est pas nécessaire de prouver la
mauvaise foi lors de la concurrence déloyale, il peut ne pas avoir fait exprès. C’est le préjudice qui permet
de calculer le montant des dommages intérêts et non pas la mauvaise ou la bonne foi.

2. La violation d’une règle préexistante

Pour prouver la concurrence déloyale, on ne doit pas prouver la violation d’une règle préexistante.
La faute peut être caractérisée en dehors de cette hypothèse : il peut y avoir faute lorsqu’une personne
adopte un comportement que le bon père de famille n’aurait pas adopté dans cette situation.

Exemple : Free contre SFR, Free dit que SFR vend du crédit, le consommateur achète un téléphone à crédit
(plusieurs mensualités). Mais il y a des règles sur les crédits, il faut être un établissement spécial pour en
faire et SFR ne l’est pas donc Free considère que c’est une concurrence déloyale.
Exemple : Dominos contre Speed Pizza, Dominos fait des avances de trésorerie immenses pour faire une
concurrence très agressive pour éliminer cette dernière. Speed Pizza dit que le franchiseur qui fait du crédit
n’a pas le statut pour le faire donc concurrence déloyale.
Exemple : Uber qui concurrence taxi, est-ce-que Uber est un véritable prestataire de transport ? il faut
respecter les mêmes contraintes sinon concurrence déloyale.

Lorsqu’une règle a été violé, cela facilite la preuve de la faute. Mais cela ne justifie pas qu’il faut prouver la
violation d’une règle préexistante. Ce n’est pas une condition, ça aide juste.

3. La présence ou l’absence d’un droit protégé

Pour prouver la concurrence déloyale, on ne doit pas prouver la présence ou l’absence d’un droit protégé.
Aujourd’hui, l’action en concurrence déloyale peut être exercée par des non commerçants. L’action en
concurrence déloyale protège les entreprises mêmes si elles n’ont pas de droits privatifs, de droits déposés,
de droits d’auteur…

4. La présence ou l’absence d’une situation de concurrence

Il y a eu une longue évolution, à l’origine il fallait être commerçant pour agir en concurrence déloyale et on
ne pouvait agir que contre un autre commerçant. Tout cela a été supprimé, l’action est aujourd’hui ouverte à
tout professionnel, ce n’est plus propre au droit commercial seulement. Les associations peuvent aussi agir
en concurrence déloyale. Le rapport de concurrence n’est plus exigé, on peut agir entre non-concurrents.
Exemple : les producteurs de champagne ont agi contre YSL qui ont appelé un parfum « champagne ».

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Exemple : un étudiant en école de commerce soutient un mémoire devant un jury avec un banquier. Il
expose un projet de nouveau produit bancaire offert à des nationaux français habitant à l’étranger. Cet
étudiant constate que la banque a développé son projet. La banque a agi en concurrence déloyale.

B. Typologie des fautes retenues

Roubier a développé 3 types de comportements déloyaux :

1. Le dénigrement

Dénigrer en droit commercial c’est le fait de jeter le discrédit sur une entreprise, sur ses produits, en
répandant des informations malveillantes qu’elles soient exactes ou inexactes. Il y a un aspect intentionnel,
une certaine mauvaise foi.

 Les sujets : une entreprise peut dénigrer une autre entreprise (concurrence). Mais l’auteur du
dénigrement n’est pas nécessairement une entreprise, la concurrence n’est pas nécessaire. L’auteur peut être
un particulier comme un consommateur, un journaliste, une association…
La cible exerce une activité économique, ce n’est pas un particulier, il faut mettre sur le marché des produits
ou des services. La cible doit pouvoir être identifiée mais il peut s’agir d’une indentification indirecte : la
cible n’est pas citée mais on estime qu’il y a dénigrement dans la mesure où elle est identifiable. C’est
notamment le cas des marchés où il y a peu d’opérateurs. Le dénigrement peut aussi être caractérisé lorsqu’il
vise tout un groupe d’entreprise.
Exemple : affaire d’une pub financée par des notaires qui mettait en avant les qualités de sérieux et
d’efficacité attachées à l’activité des notaires. Les agences immobilières s’estiment collectivement
dénigrées. Cela n’a pas abouti car la Cour rappelle que lorsqu’un professionnel se donne des qualités, cela
ne signifie pas qu’il discrédite les autres.
Exemple : une pub menée par Leclerc où on voyait un verre d’eau avec une pièce d’1 euro en train de se
dissoudre avec comme texte « il faut mettre un terme au monopole des pharmaciens pour les médicaments
non remboursés ». Les pharmaciens s’estiment collectivement dénigrés.

 L’objet : il y a 2 cas de figure :

- Les propos dénigrants portent sur les produits ou services d’une entreprise. Mais attention, la
comparaison neutre, objective et mesurée est tout à fait valable.

- Les propos dénigrants portent sur la personne même de l’entreprise. Mais le dénigrement est
susceptible d’entrer en conflit avec une autre interdiction : la diffamation (= porter atteinte à
l’honneur ou à la réputation d’une personne).
La jurisprudence n’est pas claire sur cette distinction. Mais on relève que c’est l’objectif poursuivi
qui permet d’identifier le dénigrement et la diffamation. Lorsque derrière la personne que l’on
vise c’est plutôt les produits, c’est du dénigrement. La diffamation porte à l’honneur sans objectif
de détournement de la clientèle.
Les juges rappellent qu’on peut caractériser un dénigrement même lorsqu’on donne une information
exacte. C’est le processus déloyal qui est sanctionné. Mais la jurisprudence semble avoir introduit
une exception de vérité. Elle a surtout vocation à jouer entre non-concurrents. Les juges s’efforcent
de préserver la liberté d’expression. Dans le cadre de l’affaire Leclerc, on estime que le dénigrement
ne se justifie pas car c’est un débat d’intérêt public donc liberté d’expression.
Arrêt de principe 9 janvier 2019 : la Cour dit que même en l’absence de concurrence, il y a
dénigrement. De plus, il n’y a pas dénigrement si le sujet en cause relève de l’intérêt général.

2. La désorganisation

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C’est une catégorie un peu fourre-tout. On y trouve des pratiques variées qui ont en commun le fait qu’elles
désorganisent ou déstabilisent les entreprises victimes.
Exemple : le fait de détourner les fichiers clients, de supprimer ou de dissimuler la publicité d’une
entreprise, le fait de détourner ses commandes, le fait de débaucher son personnel…

Il n’est pas interdit d’employer une personne qui travaille pour un concurrent mais s’il y a une stratégie de
désorganisation, on peut interdire ce comportement. Il y a stratégie de désorganisation si le débauchage vise
à capter des secrets industriels, le savoir-faire d’une entreprise concurrente, ou lorsque les débauchages sont
massifs… Le salarié peut aussi être sanctionné s’il crée une entreprise concurrente ou s’il organise une
stratégie de désorganisation avec d’autres salariés.

3. La confusion

Il s'agit de toute pratique qui crée une confusion avec une autre entreprise aux yeux du consommateur. Dans
tous les cas, pour qu'il y ait confusion il faut qu'il y ait à un moment un élément imité. Il existe 3 grandes
possibilités :

- Imitation des signes distinctifs de l’entreprise victime de la confusion : enseigne, nom… Lorsqu’il y
a imitation de sa marque, il y a le problème du titre de propriété. Il y a conflit entre l’action en
contrefaçon de marque et l’action en concurrence déloyale. Les 2 actions sont possibles que si la
concurrence déloyale repose sur des faits distincts par rapport à ceux déjà invoqués lors de la
contrefaçon de marque. La concurrence déloyale ne sanctionne que la confusion. On doit se mettre à
la place du consommateur moyen et voir s’il y a confusion.

- Imitation des produits, de leur apparence, de leur conditionnement. On doit se mettre à la place du
consommateur moyen et voir s’il y a confusion.

- Imitation de l’agencement ou de l’apparence d’un magasin ou d’un site web. L’agencement d’un
magasin peut faire l’objet d’une protection au titre du droit de marque.

4. Le parasitisme

A l’origine, ce sont des universitaires qui ont exposé une théorie du parasitisme économique. L’idée
principale est qu’il faudrait interdire les comportements par lesquels une entreprise se place dans les sillages
d’une autre entreprise en profitant de ses efforts, de sa notoriété. C’est l’idée de détourner à son profit ce
qu’a fait une autre entreprise Il se distingue de la confusion car son originalité vient du fait qu’on n’a pas à
prouver la confusion. C’est le simple fait de profiter des efforts d’autrui.

Certains auteurs estiment qu’il est normal de l’interdire car on s’épargne des couts de conception, des couts
de communication… On va pouvoir vendre au même prix mais en dégageant une marge plus importante…

Mais pour d’autre c’est dangereux de le sanctionner car il y a la règle de quand il n’y a pas de propriété
intellectuelle, la copie est censée être libre. Le risque est de pouvoir tout protéger alors qu’il n’y a rien de
déposé.

Le parasitisme a été admis par la jurisprudence pour la 1ère fois dans les années 90. Il a été admis vraiment à
part de la concurrence déloyale car dès le départ on estime qu’il peut être interdit entre concurrents et entre
non-concurrents. Exemple : affaire YSL et producteur de champagne.

Aujourd’hui, il peut toujours être invoqué devant les juges mais ils en font une application raisonnable. Il y a
2 hypothèses :

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- Le parasitisme des investissements : on veut créer un site internet, on prend toute l’architecture d’un
site déjà créé.
- Le parasitisme de notoriété : un concurrent prend les mêmes idées qu’un autre.

II. Le préjudice et le lien de causalité

En plus de la faute, on doit prouver le préjudice et le lien de causalité. Mais de manière générale, c’est
parfois difficile de le prouver. Mais il ne faut pas que les difficultés de preuve empêchent de condamner
l’auteur de la faute puisque la concurrence déloyale a moins pour objectif d’indemniser que de réguler les
marchés.

La Cour de Cassation a prévu une règle propre à la concurrence déloyale : tout acte de concurrence déloyale
cause nécessairement un préjudice. Le préjudice et le lien de causalité sont présumés si la faute a été
reconnue.

Chapitre 2 – La liberté de la concurrence

L’ordonnance de Balladur du 1er décembre 1986 est l’acte de naissance de la vraie liberté de concurrence.

Le problème est que la concurrence n’est pas une situation naturelle des marchés. Il faut une politique pour
obtenir la concurrence donc il faut du droit pour qu’elle devienne une réalité :

Section 1 – L’interdiction des pratiques anticoncurrentielles

Paragraphe 1 – L’interdiction des ententes

I. Le principe d’interdiction

Pour qu’il y ait entente, et donc la sanctionner, il faut au moins 2 entreprises distinctes au sens du droit de la
concurrence. De plus, il faut une condition d’autonomie et de prise de risque. Une entreprise mérite son nom
lorsqu’elle est autonome sur le marché et qu’elle assume des risques.

 Les ententes concernent au moins 2 entreprises distinctes

Il existe 3 cas de figure où cette condition n’est pas satisfaite :

- Pas d’entente entre l’entreprise et ses salariés/ses dirigeants.


- Les ententes intra-groupes, mère et fille : critère de l’autonomie : il y a une présomption lorsque la
fille est détenue à 100% ou presque par la société mère, on présume qu’elle n’est pas autonome, donc

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pas d’entente possible sanctionnable. C’est une sorte d’immunité au cas par cas des ententes
intragroupes.
- Le fournisseur qui a recours à des agents pour la distribution de ses propres produits. C’est aussi au
cas par cas, cela dépend du degré d’autonomie laissé à l’agent.

 Les ententes peuvent prendre plusieurs formes

Il existe 3 catégories d’ententes :

- La décision d’association d’entreprises : c’est un syndicat, un groupement professionnel, qui réunit


plusieurs entreprises d’un même secteur. Une décision prise par cette structure peut donc être
considérée comme une entente.
- L’accord : n’importe quel accord/contrat conclu entre 2 entreprises est susceptible d’être vu comme
une entente. Une clause d’un contrat peut être interdite selon le droit des ententes.
- L’action concertée : ce sont des ententes non formalisées. C’est l’hypothèse où des entreprises se
sont réunies et ont décidé de coordonner leurs comportements dans un but donné.

 Les ententes s’inscrivent dans un contexte horizontal ou vertical

- Entente horizontale : elle réunit des entreprises qui se situent au même stade du processus
économique donc elles sont en concurrence.
Exemple : entente de partage de marché ; entente de fixation du prix ; échange d’infos stratégiques…

- Entente verticale : elle réunit des entreprises qui se situent à des stades différents du processus
économique.
Exemple : entente de fixation du prix entre fournisseur et distributeur ; entente de répartition
géographique ; entente faisant obstacle à l’entrée de nouveaux fournisseurs sur le marché ; entente
limitant le nombre de distributeurs…

 Les tribunaux judiciaires ou les tribunaux de commerce peuvent :

- Constater qu’un contrat ou une clause est constitutif d’une entente, donc l’annuler.
- Condamner les parties à indemniser les victimes.

 Les autorités de concurrence et la Commission Européenne peuvent :

- Demander aux parties de cesser leur comportement d’entente à l’avenir.


- Condamner les parties à une sanction financière pouvant atteindre 10 % de leur CA mondial HT.

 Qui prouve quoi ?

Le juge ou l’autorité doit prouver l’existence de l’entente. Il doit aussi prouver que l’entente a un objet ou un
effet anticoncurrentiel.
Si l’entente a un objet ou un effet anticoncurrentiel, les parties peuvent échapper à l’interdiction en prouvant
que l’entente est favorable au progrès économique.

II. Les possibilités d’exemption

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Une entente ou un accord ayant un objet ou un effet anticoncurrentiel échappe à l'interdiction lorsque 4
conditions sont réunies. Ces conditions sont cumulatives, elles doivent toutes être réunies pour que
l’entente ou l’accord échappe à l’interdiction :

- L’entente doit être à l'origine de gains d'efficacité économique (réduction des coûts ; amélioration de
la qualité des produits ; amélioration de la distribution).
- Les gains doivent profiter pour une partie équitable aux utilisateurs (exemple : la réduction des couts
doit être répercutée en partie aux consommateurs).
- L’entente ne doit pas contenir de restrictions qui ne sont pas indispensables à l’obtention des gains
d’efficacité économique (exigence de proportionnalité).
- L’entente ne doit pas donner aux entreprises la possibilité d’éliminer la concurrence pour une partie
substantielle du marché concerné (prise en compte du pouvoir du marché).

 Le système applicable jusqu’à la fin des années 1990 reposait sur un contrôle a priori des accords notifiés
par les entreprises à la Commission Européenne. Elle pouvait répondre aux entreprises en constatant
l’absence d’objet ou d’effet anticoncurrentiel ou en accordant une exemption si l’accord était à l’origine de
gains d’efficacité économique.

 Le nouveau système repose sur un contrôle a posteriori et suppose une auto-évaluation de l’accord opéré
par l’entreprise. Pour offrir une certaine sécurité aux entreprises, la Commission Européenne a adopté des
règlements d’exemption pour la plupart des contrats d’affaires :

- Des règlements d’exemption pour les accords horizontaux : accords de coproduction, accord de
recherche et développement…
- Des règlements d’exemption pour les accords verticaux : les contrats de distribution
- Un règlement d’exemption pour les accords de transfert de technologie.

 Fonctionnement des règlements d’exemption :

- Part de marché : chaque règlement fixe un seuil à ne pas dépasser.


- Contenu de l’accord : chaque règlement fixe une liste de restrictions caractérisées et une liste de
restrictions exclues qui correspondent à des clauses ou des pratiques à proscrire.
o Restriction caractérisée : elle prive l’ensemble de l’accord de l’exemption
o Restriction exclue : elle préserve les restes de l’accord

Si ces conditions sont respectées, il est présumé que l’accord répond aux conditions du schéma :

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Paragraphe 2 – L’interdiction des abus de position dominante

La position et l’abus doivent être analysés ensemble, séparément ça ne fonctionne pas.

I. La position dominante

De manière générale, la position dominante est définie comme une position de puissance économique
détenue par une entreprise qui lui donne le pouvoir de faire obstacle au maintien d’une concurrence effective
sur le marché en cause, lui fournissant la possibilité de comportements indépendants dans une mesure
appréciable vis-à-vis de ses concurrents, de ses clients et de ses consommateurs.

C’est simplement un pouvoir de marché très fort. L’entreprise peut faire certains choix dans certaines
mesures et de manière relative en ignorant/sans souffrir de la réaction de son environnement.

Il ne faut pas la confondre avec :


- La domination du marché avec la domination des clients ou des fournisseurs.
- La taille de l’entreprise avec la domination du marché

Pour déterminer l’existence éventuelle d’une domination de marché, il faut prendre en compte :

- Des critères structurels : importance des parts de marché de l’entreprise par rapport à celles de ses
plus proches concurrentes en tenant compte de leur évolution dans le temps, de la puissance
compensatrice détenue par les acheteurs à même de diminuer la domination de l’entreprise, de
l’existence de barrières à l’entrée du marché lui permettant de ne pas tenir compte de concurrents
potentiels.
- Des critères comportementaux : possibilité de monter les prix ou de diminuer la qualité des produits
sans crainte de représailles.
- La détention d’avantages concurrentiels : réserves importantes de trésorerie, avance technologique,
détention de nombreux titres de propriété intellectuelle…

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II. L’abus

Pour la jurisprudence, l’entreprise en position dominante a la responsabilité de ne pas porter atteinte à une
concurrence effective et non faussée dans le marché intérieur par son comportement.

Une pratique permise dans des conditions normales de concurrence peut constituer un abus lorsqu’elle est le
fait d’une entreprise dominante car la structure du marché le rend vulnérable à certains comportements qui
en temps normal n’auraient pas été nocifs.

Exemples d’abus selon les juges au cas par cas :

- Le refus de contracter (refus de vente ; refus d’offrir un accès à une infrastructure essentielle…)
- Les pratiques discriminatoires
- Les prix abusivement bas ou élevés
- Le monomarquisme et les remises de fidélités (le fait d’imposer une obligation de non-concurrence
ou le fait d’accorder une remise seulement si le client n’achète pas ailleurs)
- Les ventes liées ou les remises de couplage (le fait que pour acheter le produit X, il faut aussi acheter
le produit Y, on ne peut pas acheter les 2 séparément ou le fait que l’on est obligé d’acheter le
produit X pour avoir une remise sur le produit Y)

Section 2 – Le contrôle des concentrations

Paragraphe 1 – La définition de la concentration

I. Les critères qualitatifs

A. Les fusions

1. Les fusions de droit

- Par absorption d’une entité par une autre


- Par création d’une entité nouvelle avec les deux autres anciennes

2. Les fusions de fait

Elles ne se traduisent pas par la disparition des entités comme les fusions de droit. Les deux entités
demeurent distinctes en droit mais dans les faits elles se comportent comme une seule et même entité :
gestion économique unique et durable.

B. Les prises de contrôle

Ce sont des prises de participation : une entité prend des participations dans une autre entité. Il y a prise de
contrôle quand il y a une majorité des droits de vote. La prise de contrôle sera donc notifiable. Mais il y a
aussi des prises de participation minoritaires sans majorité de droit de vote, on peut quand même avoir le
contrôle et le notifier.

II. Les critères quantitatifs

A. Les seuils nationaux

Ils concernent les opérations à notifier à Paris. En dessous de ces seuils, ce n’est pas notifiable :
- Gros seuil : le CA HT total mondial des entreprises concernées que l’on additionne. Il doit être
supérieur à 150 millions d’euros.

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- Petit seuil : le CA HT individuel réalisé en France par chacune des entreprises concernées. Il doit être
supérieur à 50 millions d’euros
B. Les seuils européens

Ils concernent les opérations à notifier à Bruxelles.


- Gros seuil : 5 milliards
- Petit seuil : 150 millions d’euros

Paragraphe 2 – La mise en œuvre du contrôle des concentrations

I. La phase de notification

A. L’objet de la notification

Il faut constituer tout un dossier qui décrit la concentration et l’envoyer soit à Paris soit à Bruxelles à la
Commission Européenne.

B. Les modalités de la notification

La notification doit avoir lieu avant la réalisation effective de l’opération, ni trop tôt, ni trop tard. Toute
opération faite sans être notifiée donne lieu à des sanctions financières.

C. Les effets de la notification

Il y a un effet suspensif : à partir du moment où le dossier est notifié, l’opération est suspendue, elle ne doit
pas avoir lieu, les parties doivent encore se comporter comme des entités concurrentes. Pendant ce laps de
temps, c’est la phase de contrôle :

II. La phase de contrôle

A. Les étapes du contrôle

1. La 1ère phase (examen préalable)

25 jours à compter de la notification du dossier. A l’issu de cette phase, soit l’autorité dit que c’est bon on
autorise car pas d’atteinte à la concurrence, soit elle doute donc elle passe à la 2nd phase.

2. La 2nd phase (examen approfondi)

65 jours à compter de la notification du dossier. Au terme de cette phase, l’autorité peut soit autoriser soit
interdire la concentration (ce qui est rare).

B. Les critères du contrôle

1. Le risque d’atteinte à la concurrence

L’autorité de la concurrence met en balance d’un côté le risque d’atteinte à la concurrence et de l’autre coté
la contribution à l’activité économique. Le risque est plus grand pour les concentrations horizontales. On
mesure cela grâce à l’Indice Herfindahl-Hirschman. Cet indice est établi en aditionnant le carré des parts de
marché de toutes les entreprises du secteur considéré. Il mesure le degré de concentration du marché.

2. La contribution éventuelle au progrès économique

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Ce risque d’atteinte est contrebalancé par la contribution au progrès économique. L’autorité va étudier les 2
critères. Tout remède susceptible de supprimer le risque de concurrence peut être accepté par l’autorité.

Examen : QCM 20 questions – 1 seule réponse correcte – mauvaise réponse -0,25 – pas de réponse 0

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