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Texte n°17 Mélancholia

Victor Hugo

Au XIX siècle, le mouvement romantique réhabilite les émotions, les sentiments et


l'engagement. C'est le cas de Victor Hugo , chef de file du romantisme qui concilie lyrisme et
engagement dans son recueil Les Contemplations , publié en 1856 à Guernesey, terre d'exil,
mais ouvrage conçu et rédigé dès 1830, pour rendre compte aussi bien de la douleur du
deuil que de sa lutte contre toutes les formes d'injustices et d'inégalités, comme dans le
poème Mélancholia datant de 1838 et dénonçant le travail forcé des enfants.

I. Le scandale du travail des enfants, dans des conditions inhumaines

 beaucoup d'indices temporels ou de compléments circonstanciels de temps saturent


le texte « 15h sous des meubles »( v.4) » de l'aube au soir » (v.8) et l'attestent, en
plus de l'adverbe « éternellement » qui renforce l'intensité et la fatigue au travail,
soulignés par la rime « même mouvement » (v.6)

 la pénibilité du travail est associée à un esclavage, traduit par le terme servitude,


procédé du « ô » vocatif, dans un registre pathétique, doublé d'un effet de gradation «
il est question de prison » (v.6), « bagne », « enter » (v.9)

 la machine est rapprochée métaphoriquement « d'un monstre qui mâche...avec effet


d'allitération en « f » qui suggère l'asphyxie

 met l'accent sur la maladie avec le champ lexical de la pathologie, doublé d'un effet
de gradation, depuis la proposition relative « que la fièvre maigrit » (v.2) jusqu'à «
aussi quelle pâleur »(V.12) et « rachitisme »(v.18)

 le péril de la mort est souligné par une périphrase, pour traduire la tragédie « la
cendre est sur leur joue » (v. 12), illustration des victimes innocentes avec la
métaphore de la prédation « travail mauvais qui prend l'âge tendre en sa serre »
(v.23)

Il est question d'un massacre des innocents, pour un salaire dérisoire de la peur et les
enfants sont les victimes d'une société immorale

II. La satire de la société, qui exploite la faiblesse, au nom du profit économique

 la beauté détruite révélé par l'oxymore d' « Apollon [...] bossu »(v.22) ou encore il est
question de l'intelligence sacrifiée, soulignée par « Voltaire […] crétin » (v.22)

 Les termes mélioratifs, à valeur d'éloge sont en contraste antithétique « innocents


dans un bagne, anges dans un enfer » (v.9), avec l'allégorie de la lutte entre le bien
et le mal, renforcée par les mots à la rime et la métaphore « briser la jeunesse en
fleur » (v.27)

 la malédiction est traduite par une anaphore et des répétitions au vers 30-31-32
« Maudit », repris en épiphore en fin de vers 29, ainsi que la modalité exclamatives
des phrases, pour traduire sa révolte, avec remise en question du travail forcé en
question rhétorique « où va-t-il ? Que veut-il ? » (v.26)
 opposition au travail idéal caractérisé par une énumération en expansion nominale
« travail saint, fécond, généreux »

 formule une demande de pardon : l'invocation à Dieu est exprimée avec l'insertion de
discours direct « notre père...hommes ! »(v.16) et « ô Dieu » (v.32)

Il incrimine donc, preuve à l'appui, une société coupable et il exprime une perte d'espoir pour
la société de son temps, mais une espérance malgré tout, pour l'avenir

L'intérêt de ce poème est donc de concilier lyrisme et engagement, conviction et persuasion,


en vue de lutter contre l'injustice intolérable, innommable éhontée, de son siècle, qui
entretient la misère et sacrifie des innocents sur l'autel du profit économique. Ce poème, aux
accents polémiques, souligne l'incohérence même et le scandale d'une société qui
s'autodétruit, en brisant l'avenir et l'énergie de sa jeunesse. Cet engagement anticipe le
Discours sur la misère ou le roman, Les Misérables, au sein duquel, la petite Cosette
travaille comme une esclave dans la pension des Thénardier.

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