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OBJECTIF BARREAU

Préparation intensive au CRFPA 2023

Droit pénal – Corrigé du Sujet n° 2

L'exposé des faits conduit à envisager les faits relatifs à l'accident survenu à l'occasion de la kermesse (I) et celui survenu
sur la route (II)
I – L'accident survenu à l'occasion de la kermesse
Au titre de cette partie, il conviendra d'envisager la situation pénale de l'adjoint au maire (I) et celle de la commune de
Saint-Witz (II).
A – La situation pénale de l'adjoint au maire
1) Les blessures occasionnées à Mila (3 pts)
Au regard de la nature accidentelle des faits, il convient d'envisager la responsabilité pénale de l'adjoint au maire sur le
terrain des blessures involontaires. Il convient plus précisément de mentionner l'article 222-19 du CP qui incrimine les
blessures involontaires ayant entraîné une ITT de plus de trois mois. La constitution de cette infraction nécessite la
réunion d'un élément matériel et d'un élément moral.
Au titre de l'élément matériel, trois composantes doivent être vérifiées : un comportement, un résultat et un lien de
causalité entre les deux.

• Le comportement : le comportement de l'agent peut indifféremment consister en une commission (acte


positif) ou une abstention (acte négatif). En l'espèce, il est reproché à l'adjoint au maire d'avoir pris une décision
contraire aux conseils prodigués par les personnes ayant fourni la structure gonflable au sujet de son
installation. Cette composante est vérifiée.

• Le résultat : les blessures involontaires constituent des infractions matérielles. La survenance d'un résultat est
donc nécessaire, ce dernier devant consister en une atteinte à l'intégrité physique et/ou physique de la victime.
En l'espèce, l'énoncé précise que Mila est grièvement blessée et s'est vue délivrer une ITT de 14 semaines.
Cette composante est donc caractérisée.

• Le lien de causalité : il convient en premier lieu de s'interroger sur la certitude du lien de causalité avant de
déterminer son intensité (savoir s'il est direct ou indirect).

(i) Sur la certitude du lien de causalité : la Chambre criminelle rappelle que le préalable indispensable est de savoir si le
lien de causalité est certain (Crim., 5 octobre 2004 ; Crim., 12 septembre 2018), c'est-à-dire que le comportement de
l'agent doit avoir été au moins l'une des conditions sine qua non du dommage. En l'espèce, il est possible de considérer
que la décision prise par l'adjoint au maire a nécessairement joué un rôle dans la survenance de l'accident et donc du
dommage subi par Mila. En effet, en écoutant les recommandations liées à l’installation du château gonflable, le
dommage ne se serait sans nul doute pas produit. Le lien de causalité est donc certain.

(ii) Sur l'intensité du lien de causalité : le lien de causalité est direct « chaque fois que l’imprudence ou la négligence
reprochée est soit la cause unique, exclusive, soit la cause immédiate ou déterminante de l’atteinte à l’intégrité de la
personne ». (D. Commaret, « La loi du 10 juillet 2000 et sa mise en œuvre par la chambre criminelle de la Cour de
cassation », in GP, 12-13 avril 2002, p. 4.). Il est en revanche indirect, chaque fois qu’il est reproché à la personne
poursuivie, dans l’exercice d’une activité placée sous sa responsabilité, par un défaut d’organisation, de surveillance ou
de contrôle d'avoir non pas causé directement le dommage, mais d'avoir créé ou contribué à créer la situation qui a
permis la réalisation du dommage ou de ne pas avoir pris les mesures permettant de l'éviter (article 121-3 al.4 du CP).

En l'espèce, il est possible de considérer que l'adjoint au maire n'a pas directement causé le dommage mais qu'il a plutôt,
de par sa décision, créé ou contribué à créer la situation ayant permis la réalisation du dommage de sorte que la causalité
est indirecte.

L'élément matériel est constitué.

Au titre de l'élément moral, il convient de préciser que les blessures involontaires constituent une infraction non
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intentionnelle. À ce titre, une faute pénale non intentionnelle doit être caractérisée.

Le mécanisme instauré par la loi du 10 juillet 2000 (dite « loi Fauchon ») impose d'opérer une distinction entre deux
situations :
– si le lien de causalité est direct, la caractérisation d'une faute d'imprudence ordinaire (faute simple) suffira à
engager la responsabilité pénale de l'agent (1) ;
– si le lien de causalité est indirect, la caractérisation d'une faute qualifiée (faute délibérée ou caractérisée) sera
nécessaire pour engager la responsabilité pénale de l'agent (2).

En l'espèce, la causalité étant indirecte, il conviendra donc de rechercher une faute qualifiée.

• La faute délibérée désigne la violation manifestement délibérée (dol éventuel :volonté tendue vers une prise
de risque) d'une obligation particulière (précise et circonstanciée) de prudence ou de sécurité prévue par la loi
ou le règlement. En l'espèce, force est de constater que l'énoncé ne fait nullement allusion à une quelconque
obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement qui aurait été méconnue
par l'agent. L'analyse doit donc se déporter sur le terrain de la faute caractérisée.

• La faute caractérisée est celle qui expose autrui à un risque d'une particulière gravité que son auteur ne pouvait
ignorer (article 121-3 al.3). La caractérisation d'une telle faute suppose la réunion de trois conditions
cumulatives :
– la faute doit être suffisamment grave (1) ;
– elle doit avoir exposé autrui à un risque d'une particulière gravité (2) ;
– l'auteur ne pouvait ignorer le risque encouru par la victime (3). La jurisprudence exige une appréciation in
concreto de la faute, au regard des compétences, des pouvoirs et des moyens de l’intéressé (Crim., 18 juin
2002, Bull. crim. N° 138). Il ressort de la jurisprudence que la connaissance du risque peut résulter de la
répétition de plusieurs accidents survenus ayant la même origine, et donc le renouvellement tient à l'inaction
du prévenu qui aurait pu prendre les mesures nécessaires (Crim., 22 janvier 2008) ou encore se déduire des
avertissements ou signalements adressés aux personnes concernées (Crim., 2 décembre 2003).

La Chambre criminelle considère que les juges du fond ont pu valablement déduire l’existence d’une faute caractérisée
d'un adjoint aux affaires culturelles, engageant sa responsabilité personnelle et celle de la commune pour avoir exposé
les enfants utilisateurs d'un toboggan à un risque d’une particulière gravité qu’il ne pouvait ignorer au regard des
préconisations des moniteurs ainsi que de la configuration des lieux (Crim., 28 juin 2016).

En l'espèce, l'enquête a permis d'établir que la cause de l’accident résultait de trois facteurs (l’absence d’arrimage de la
structure gonflable au sol, son emplacement – sur un sol en pente et à proximité d’un fossé – et l’insuffisance du
personnel de surveillance). L’adjoint au maire en charge des affaires culturelles s’était rendu sur le site pour assister aux
opérations d’installation de la structure, et avait estimé qu'elle n’avait pas besoin d’être fixée au sol et avait choisi lui-
même l’emplacement malgré les conseils prodigués par les personnes qui avaient fourni l’attraction. Ainsi, la décision
prise par l'adjoint au maire constitue une faute grave qui a exposé autrui à un risque d'une particulière gravité (Mila a
finalement été grièvement blessée). Quant à la connaissance du risque, celle-ci peut se déduire des conseils prodigués
par les personnes ayant fourni la structure gonflable puisqu'elles avaient, semble-t-il, mis en garde l'adjoint au maire
concernant les modalités relatives à l'installation de celle-ci, notamment la configuration des lieux.

L'élément moral est vérifié.

L'infraction est constituée.

Répression : l'adjoint au maire encourt 2 ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende conformément à l'article
222-19, al.1 du CP.

2) Les blessures occasionnées à Kahina (1 pt)

Le raisonnement juridique développé en amont s'agissant des blessures subies par Mila doit également s'appliquer ici.
Cependant, une ITT de 2 mois a été délivrée à Kahina de sorte qu'il est nécessaire de viser l'article R625-2 du CP
(hypothèse dans laquelle l'ITT est inférieure à trois mois). L'article R625-2 prévoit une contravention de la 5e classe.
D'après l'article 131-13 du code pénal, les contraventions de la 5e classe sont punies d'une amende de 1 500 euros.
L'adjoint au maire encourt donc cette peine.

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Rem : il n'est pas possible de viser l'article 222-20 du CP faute de pouvoir identifier clairement la méconnaissance d'une
obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement
.
3) La faute des victimes (1 pt)

L'adjoint au maire indique que les deux victimes sont fautives car elles ont sauté au même endroit à l'intérieur du
château gonflable alors que cela était proscrit. À la supposer établie, la faute commise par les jeunes filles est-elle de
nature à permettre à l'adjoint au maire de se dégager de sa responsabilité pénale ?

Sur ce point, la jurisprudence considère que la faute de la victime ayant contribué à la réalisation de son préjudice
exonère de responsabilité l’auteur de l’infraction, si elle est la cause unique et exclusive de l’infraction (Crim., 1er avril
2008, n°07-87.433). Or, tel n'est pas le cas en l'espèce puisqu'il a été démontré en amont que l'adjoint au maire était
fautif. Il ne pourra donc pas se prévaloir d'un tel argument.

4) L'exposition d'autrui à un risque (0,5 pt)

La présence d'autres personnes à proximité de la structure gonflable n'est pas à exclure ce qui implique qu'elles auraient
pu potentiellement être blessées. En conséquence, il est judicieux d'envisager le délit de risques causés à autrui. Prévue
par l'article 223-1 du code pénal, la constitution de cette infraction nécessite la réunion d'un élément préalable, d'un
élément matériel et d'un élément moral.

Au titre de l'élément préalable, le délit de risques causés à autrui suppose la violation d'une obligation particulière de
prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement. Or, force est de constater que l'énoncé ne fait pas état de la
violation d'une telle obligation par l'adjoint au maire. Il conviendra donc, faute d'indication supplémentaire, d'écarter la
qualification de délit de risques causés à autrui.

5) Le cumul des qualifications (2 pts)


La question qui se pose est de savoir s'il est possible de cumuler le délit de blessures involontaires (art. 222-19 du CP) et
la contravention de blessures involontaires (art. R625-2 du CP) retenus à l'encontre de l'adjoint au maire.
Le principe non bis in idem, qui s’oppose à la poursuite et à la punition d’un même fait à plusieurs reprises, conduit
fréquemment la chambre criminelle à rappeler l’interdiction de cumuler les qualifications lors de la déclaration de
culpabilité.
Récemment, la chambre criminelle est venue limiter le champ d’application de l’interdiction du cumul des qualifications.
Dans un attendu de principe rendu au visa du principe de ne bis in idem, elle considère que cette interdiction « doit être
réservée, outre à la situation dans laquelle la caractérisation des éléments constitutifs de l’une des infractions exclut
nécessairement la caractérisation des éléments constitutifs de l’autre, aux cas où un fait ou des faits identiques sont en
cause et que [soit] l’une des qualifications, telles qu’elles résultent des textes d’incrimination, correspond à un élément
constitutif ou une circonstance aggravante de l’autre, qui seule doit alors être retenue ; [soit lorsque] l’une des
qualifications retenues, dite spéciale, incrimine une modalité particulière de l’action répréhensible sanctionnée par
l’autre infraction, dite générale » (Crim., 15 décembre 2021, n°21-81.864).
Dans un arrêt du 15 février 2022, la Cour de cassation a précisé que « les déclarations de culpabilité des délits et
contraventions de blessures involontaires [dans cette affaire, un fait unique avait entraîné des blessures involontaires
ayant entraîné des incapacités totales de travail supérieures à trois mois et inférieures ou égales à trois mois] ne sont
pas exclusives l'une de l'autre ; par ailleurs, aucune des qualifications telles qu'elles résultent des textes d'incrimination
ne correspond à un élément constitutif ou à une circonstance aggravante de l'autre et aucune de ces qualifications
n'incrimine une modalité particulière de l'action répréhensible sanctionnée par l'autre infraction » (Crim., 15 février
2022, n°20-81.450).
En l'espèce, les manquements relevés à l'encontre de l’adjoint au maire ont conduit à retenir plusieurs qualifications
pénales (le délit prévu par l'article 222-19 du CP et la contravention prévue par l'article R625-2 du CP). Au regard de la
position récente de la Cour de cassation, aucune difficulté ne se pose quant au cumul de qualifications entre le délit de
blessures involontaires et la contravention de blessures involontaires.
6) Le concours réel d'infractions (1,5 pt)
L'adjoint au maire a commis plusieurs infractions pénales. Il convient donc de déterminer les peines encourues par ce
protagoniste.

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Aux termes de l’article 132-2 du code pénal, « il y a concours d’infractions lorsqu’une infraction est commise par une
personne avant que celle-ci ait été définitivement condamnée pour une autre infraction ».

Il en résulte que les infractions relevées en l’espèce à l'encontre de l'adjoint au maire sont toutes en concours.

Conformément à l'article 132-3 du code pénal, si elles sont jugées au cours d’une procédure unique, la juridiction pourra
prononcer une peine de chaque nature dans la limite du maximum légal le plus élevé.

En outre, il convient de préciser que « Par dérogation aux dispositions qui précèdent, les peines d'amende pour
contraventions se cumulent entre elles et avec celles encourues ou prononcées pour des crimes ou délits en concours »
(art. 132-7 du CP).

L'adjoint au maire encourt donc 2 ans d'emprisonnement et 31 500 euros d'amende (30 000 + 1 500).

Conformément à l'article 132-4 du code pénal, si elles sont jugées au cours de procédures séparées, chacune des
juridictions se prononcera dans la limite des peines encourues pour l’infraction qu’elle aura à juger. Mais, en tout état
de cause, les peines prononcées se cumuleront dans la limite du maximum légal le plus élevé, à savoir 2 ans
d'emprisonnement et 31 500 euros d'amende.

II – La situation pénale de la commune de Saint-Witz (2,5 pts)

L'accident a eu lieu au cours d'une kermesse organisée par la commune de Saint-Witz. En conséquence, la responsabilité
pénale de la commune mérite d'être envisagée.

La responsabilité pénale des personnes morales est prévue par l'article 121-2 du code pénal. Il conviendra de distinguer
le domaine et les conditions de mise en œuvre de celle-ci.

• Sur le domaine

On peut noter qu'une commune dispose nécessairement de la personnalité juridique. Quant à l'infraction, sa
responsabilité pénale peut être recherchée sur le fondement des blessures involontaires.

Cependant, il est important de mentionner que s'agissant des collectivités territoriales et leurs groupements, une
restriction est posée par l'article 121-2 du code pénal. En effet, elles ne pourront être déclarées pénalement
responsables que des infractions commises dans l'exercice d'activités susceptibles de faire l'objet de conventions de
délégation de service public. La jurisprudence définit cette notion comme « toute activité ayant pour objet la gestion
d'un tel service public lorsque, au regard de la nature de celle-ci et en l'absence de dispositions légales ou réglementaires
contraires, elle peut être confiée, par la collectivité territoriale, à un délégataire public ou rémunéré, pour une part
substantielle, en fonction des résultats de l'exploitation » (Crim. 3 avril 2002). Il pourra ainsi s'agir de l'organisation d'une
kermesse (Crim., 28 juin 2016).

En l'espèce, l'infraction a été commise dans le cadre d'une activité susceptible de faire l'objet d'une convention de
délégation de service public, en l’occurrence l'organisation d'une kermesse.

• Sur les conditions de mise en œuvre

D'abord, une infraction doit avoir été commise par un organe ou un représentant devant être clairement identifié (Crim.,
16 avril 2019). L'organe désigne notamment les personnes physiques auxquelles la loi ou les statuts donnent des
pouvoirs d'administration, de direction et de gestion. En l'espèce, l'infraction a été commise par l'adjoint au maire qui
disposait d'une délégation du conseil municipal. A ce titre, il peut être considéré comme un représentant de la commune.

Ensuite, une infraction doit avoir été commise pour le compte de la personne morale. L’expression « pour le compte »
peut signifier « dans l’intérêt de » mais ne se limite pas à cette conception. Plus généralement, « pour le compte »
signifie dans le cadre des activités ayant pour but de réaliser l’objet social, ce qui permet d’appréhender les infractions
non intentionnelles. En l'espèce, l'infraction a bien été commise pour le compte de la commune puisqu'elle en lien avec
son activité ou son fonctionnement.

En conséquence, elle pourra voir sa responsabilité pénale engagée du chef de blessures involontaires.

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Il convient de préciser que l’article 121-2 du code pénal dispose, dans son alinéa 3, que « la responsabilité pénale des
personnes morales n’exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits ». Il en résulte que
l’engagement de la responsabilité pénale de la commune n'a aucune incidence sur celle de l'adjoint au maire.
• Sur la répression

Par application des articles 131-38 et 131-39 du code pénal, en matière correctionnelle, la peine principale encourue est
l’amende dont le montant correspond « au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques ».

En l’espèce, la peine d'amende encourue par les personnes physiques pour l'infraction prévue par l'article 222-19 du CP
est de 30 000 euros d'amende. Son quintuple est de 150 000 euros (30 000 x 5). La peine d’amende encourue par les
personnes physiques pour l’infraction prévue par l'article R625-2 du CP est de 1 500 euros. Son quintuple est de 7 500
euros (1 500 x 5).

Le même raisonnement juridique doit s'appliquer s'agissant du cumul des qualifications pénales reprochées à la
personne morale (v. Crim., 15 décembre 2021).

En conséquence, la commune encourt, 157 500 euros d'amende (150 000 + 7 500) en application des règles régissant le
concours réel d'infractions.

III – L'accident survenu sur la route


Au titre de cette seconde partie, il conviendra d'envisager le manquement au code de la route (A), les faits commis à
l'encontre de Bernadette (B), le cas du fœtus (C), et le concours réel d'infractions (D).
A) Le manquement au code de la route (0,5 pt)
L'exposé des faits indique que Mickaël a commis la contravention prévue par l'article R412-30 du code de la route. Il
conviendra ici d'indiquer uniquement la peine encourue sans qu'il soit nécessaire de caractériser l'infraction en cause.

D'après l'article R412-30 du code de la route, « Tout conducteur doit marquer l'arrêt absolu devant un feu de signalisation
rouge, fixe ou clignotant. […]

Le fait, pour tout conducteur, de contrevenir aux dispositions du présent article est puni de l'amende prévue pour les
contraventions de la quatrième classe. »
L'article 131-13, 4° du code pénal précise que le montant de l'amende est de 750 euros au plus pour les contraventions
de la 4e classe.

Mickaël encourt donc 750 euros d'amende pour le manquement au code de la route.

B) Les faits commis à l'encontre de Bernadette


1) L'hypothèse d'un homicide involontaire (1,5 pt)
À la suite de l'accident, Bernadette est décédée à l'hôpital. Il convient donc dans un premier temps d'envisager le délit
d'homicide involontaire prévu par l'article 221-6-1 du CP (usage d'un VTM). La constitution de cette infraction pénale
nécessite la réunion d'un élément matériel et d'un élément moral.
Au titre de l'élément matériel, trois composantes doivent être vérifiées.
S'agissant du comportement, il peut consister en un acte positif ou négatif. En l'espèce, Mickaël a percuté Bernadette
de sorte que le comportement est vérifié.
Concernant le résultat, la mort d'autrui doit être caractérisée. Tel est bien le cas en l'espèce puisque Bernadette est
décédée.
Enfin, s'agissant du lien de causalité, il doit être certain. Ainsi, ne justifie pas sa décision, la cour d'appel qui, pour entrer
en voie de condamnation du chef d'homicide involontaire, constate que les blessures de la victime trouvent leur cause
directe dans la faute de conduite reprochée au prévenu et attribue son décès à une maladie nosocomiale ultérieurement
contractée sans rechercher si cette infection n'était pas le seul fait en relation de causalité avec le décès (Crim., 5 octobre
2004, n°03-86.169).
En l'espèce, l'énoncé indique que l'unique cause du décès de Bernadette est due à une infection nosocomiale contractée
à l'hôpital de sorte que le comportement de Mickaël n'est pas en relation de causalité certaine avec son décès.

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En conséquence, Mickaël ne pourra pas se voir reprocher le délit d'homicide involontaire.
Il convient à présent d'envisager le délit de blessures involontaires.
2) Les blessures occasionnées à Bernadette (1,5 pt)
En percutant Bernadette avec son véhicule, cette dernière a nécessairement été blessée de sorte qu'il convient
d'envisager le délit de blessures involontaires prévues par l'article 222-20-1 du CP (usage d'un VTM). La constitution de
cette infraction nécessite la réunion d'un élément matériel et d'un élément moral.
Les conditions de l'infraction de blessures involontaires ont déjà été exposées. Il convient donc de référer aux
développements mentionnés à ce sujet.
S'agissant de l'élément matériel, on notera que le comportement est vérifié car Mickaël a heurté Bernadette avec son
véhicule. Concernant le résultat, une ITT de 2 mois a été délivrée à Bernadette de sorte que cette composante est
vérifiée. En outre, il est loisible de considérer que le comportement de Mickaël est à l'origine des blessures subies par
Bernadette de sorte que le lien de causalité est certain. Concernant l'intensité du lien de causalité, on notera qu'il est
direct. En effet, le comportement de Michael constitue le paramètre déterminant du dommage subi par Bernadette.
L'élément matériel est vérifié.
Concernant l'élément moral, on notera qu'il il conviendra de rechercher l'existence d'une faute d'imprudence ordinaire
(elle suffira à caractériser l’élément moral) car la causalité est directe. Cette faute d'imprudence ordinaire peut résulter
d'une imprudence, d'une négligence ou de l'inobservation d'une règle de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou
le règlement (article 121-3, al.3). La jurisprudence considère que « tout manquement par le conducteur d'un véhicule à
ses obligations de prudence et de sécurité est nécessairement incompatible avec les diligences normales que lui impose
le code de la route et caractérise, à sa charge, la faute définie par la loi » (Crim., 2 avril 1997).
En l'espèce, Mickaël n'a pas respecté une obligation du code de la route (art. R412-30 du code de la route). En effet, il a
méconnu une obligation de prudence ou de sécurité prévue par le règlement imposant un arrêt lorsque le feu de
signalisation est rouge. La faute simple peut donc être facilement caractérisée.
L'élément moral est vérifié.
L'infraction est constituée.
Répression : à l'état simple, Mickaël encourt 3 ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende. Cependant, deux
circonstances aggravantes méritent d'être mentionnées.
D'abord, le législateur précise que les peines sont portées à 3 ans d'emprisonnement et à 45 000 euros d'amende lorsque
le conducteur a commis une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité
prévue par la loi ou le règlement […] (article 222-20-1, 1° du CP). La faute délibérée désigne la violation manifestement
délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement. Elle suppose la
caractérisation d'un dol éventuel, c'est-à-dire une volonté tendue vers une prise de risque et la caractérisation d'une
obligation particulière de prudence ou de sécurité, c'est-à-dire une obligation précise et circonstanciée. En l'espèce,
Michael a manqué à une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par le ce de la route afin de se rendre
plus rapidement sur les lieux de l'accident de sorte qu'il est loisible de considérer que sa volonté était bien tendue vers
une prise de risque. Cette circonstance aggravante peut donc être retenue.
Ensuite, le législateur précise que les peines sont portées à 3 ans d'emprisonnement et à 45 000 euros d'amende lorsque
le conducteur, sachant qu'il vient de causer ou d'occasionner un accident, ne s'est pas arrêté et a tenté ainsi d'échapper
à la responsabilité pénale ou civile qu'il peut encourir (art. 222-20, 6° du CP). En l'espèce, même si Mickaël s'est arrêté
un instant, rien ne permet d'affirmer qu'il s'est arrêté un temps suffisamment long pour permettre à l'autre partie ou à
des témoins de relever son identité pour permettre un minimum de constatations matérielles afin d'établir les
responsabilités de sorte que cette circonstance aggravante pourra être retenue.
Le législateur précise que les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende lorsque
l'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne a été commise avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux
1° et suivants de l'article 222-20-1 du CP.
En l'espèce, deux circonstances aggravantes ont été retenues. En conséquence, Mickaël encourt 5 ans
d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende.

Rem : il ne fallait pas caractériser tour à tour les éléments constitutifs du délit de fuite prévu par l'article prévu par
l'article 434-10 du CP. En effet, le fait d'avoir pris la fuite après l'accident est un comportement qui est sanctionné au

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titre des blessures involontaires en tant que circonstance aggravante. Seule doit donc être retenue la qualification de
blessures involontaires accompagnée de la circonstance aggravante (v. Crim., 15 décembre 2021).

3) La non assistance à personne en danger (2 pts)


Mickaël n'a pas porté secours à Bernadette. Ces faits conduisent à envisager le délit de non assistance à personne en
péril. Prévue par l'article 223-6, al.2 du CP, la constitution de cette infraction pénale nécessite la réunion d'un élément
préalable, d'un élément matériel et d'un élément moral.
À titre de condition préalable, on note qu'il est nécessaire de caractériser une situation de péril. Ce dernier doit être
imminent. Il doit être impérativement et expressément constaté. Les risques éventuels ou hypothétiques ne sont donc
pas retenus. En outre, on précisera que la cause du péril n'importe pas, elle peut donc être d'origine naturelle,
accidentelle ou infractionnelle. En l'espèce, Bernadette est grièvement blessée à la suite de l'accident. Le péril n'est pas
hypothétique. Il importe peu que le péril soit dû au comportement de Mickaël. de sorte que cette condition est vérifiée.
Au titre de l'élément matériel, on précisera que le délit est une infraction formelle qui existe du seul fait de l’abstention
de secours. L'assistance apportée doit avoir été suffisante, c'est-à-dire apte à faire cesser le péril. L'assistance peut être
le fait d'agir personnellement ou de provoquer l'action d'autrui. En revanche, l'obligation d'assistance est de moyens de
sorte qu'il n'est pas exigé que l'aide apportée ait nécessairement réussi à empêcher le péril.
En l'espèce, Mickaël s'est approché de Bernadette et a pris la fuite. Il n'a apporté aucune assistance personnelle, ni
provoquer aux secours alors que l'assistance ne présentait aucun danger pour lui ou pour des tiers de sorte que l'élément
matériel est vérifié.
Au titre de l'élément moral, on notera que le délit prévu par l'article 223-6 al.2 du CP est intentionnel de sorte qu'une
faute pénale intentionnelle doit être caractérisée (art. 121-3 du CP). L'élément coupable repose sur la caractérisation
d'un dol général (la connaissance de l’existence d'un péril imminent) et d'un dol spécial (la volonté de ne pas agir). En
l'espèce, il ne fait aucun doute que Mickaël a connaissance de l'existence du péril, ce dernier étant à l'origine de
l'accident. En outre, a délibérément fait le choix de ne pas apporter son assistance.
En conséquence, l'élément moral est vérifié.
L'infraction est constituée.
Répression : conformément à l'article 223-6, al.3 du CP, Mickaël encourt 5 ans d'emprisonnement et 75 000 euros
d'amende.

4) Le cumul des qualifications (0,5 pt)


S'agissant du cumul des qualifications, il convient ici de se reporter aux éléments juridiques mentionnés en amont,
notamment la position récente dégagée par la chambre criminelle à ce sujet (Crim., 15 décembre 2021).
La situation pénale en cause n'entre dans aucune des interdictions visées par la jurisprudence de sorte qu'il sera possible
de retenir toutes les infractions pénales envisagées à l'encontre de Mickaël.

NOTE : s'il est vrai que la caractérisation de la contravention prévue par l'article R412-30 du code de la route permet
de retenir l'élément moral de l'infraction de blessures involontaires (v. développements antérieurs), force est de
constater que le législateur ne vise pas expressément le manquement au code de la route prévu par l'article R412-30
du CP au titre des éléments constitutifs des blessures involontaires de sorte qu'aucune difficulté ne se pose quant au
cumul de ces deux infractions.

C) Le cas du fœtus (1,5 pt)


L'exposé des faits indique que le fœtus que portait Bernadette fut mort-né. Il convient d'envisager la situation pénale
de Mickaël sur le terrain du délit d'homicide involontaire (article 221-6-1 du code pénal / usage d'un VTM). La
constitution de cette infraction pénale nécessite la réunion d'un élément matériel et d'un élément moral.

Au titre de l'élément matériel, trois composantes doivent être caractérisées : un comportement, un résultat et un lien
de causalité entre les deux.

S'agissant du résultat, on notera que le décès d'une personne doit pouvoir être caractérisé. La jurisprudence a considéré
dans un arrêt d’assemblée plénière du 29 juin 2001 que « le principe de la légalité des délits et des peines, qui impose
Objectif Barreau – Droit pénal – Sujet 2 7
une interprétation stricte de la loi pénale, s'oppose à ce que l'incrimination prévue par l'article 221-6 du code pénal,
réprimant l'homicide involontaire d'autrui, soit étendue au cas de l'enfant à naître dont le régime juridique relève de
textes particuliers sur l'embryon ou le fœtus » (V. pour une confirmation : Crim. 25 juin 2002). Deux hypothèses doivent
être distinguées :

• Lorsque l'enfant n'est pas né vivant : la qualification d'homicide involontaire ne peut être retenue, peu importe
que l'enfant à naître ait été viable ou non.

• Lorsque l'enfant est né vivant : la qualification d'homicide involontaire peut être recherchée, peu importe que
la vie n'ait duré que quelques minutes. Le critère utilisé par les juges est donc celui de la vie à la naissance
(Crim, 2 décembre 2003).

En l'espèce, les faits indiquent que l'enfant n'est pas né vivant. En conséquence, la qualification d'homicide involontaire
ne peut pas être retenue à l'encontre de Mickaël.

D) Le concours réel d'infractions (0,5 pt)


Les règles du concours réel d'infractions ont déjà été exposées. Il convient donc de se référer aux développements
mentionnés à ce sujet.
Si les infractions sont jugées au cours d’une procédure unique, Mickaël encourra 5 ans d'emprisonnement et 75 750
euros d'amende (75 000 + 750). Il encourra les mêmes peines si les infractions sont jugées au cours de procédures
séparées.

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