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UNIVERSITE HASSAN II

FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ECONOMIQUES


ET SOCIALES, AIN SEBAA

Filière de Droit

Cours :

La Responsabilité Civile

S3

2021/2022

BEL-AMIN Samir

Enseignant chercheur à la FSJESAS


Chapitre 3 : Responsabilité civile extracontractuelle

La responsabilité civile extracontractuelle peut se définir comme l’obligation mise à la


charge d’une personne de réparer un dommage subi par une autre personne en dehors d’une
relation contractuelle. Elle regroupe les faits juridiques dommageables qui sont source d’une
obligation de réparer dont le responsable est débiteur et la victime créancière.
La responsabilité extracontractuelle est constituée par deux types de responsabilités,
délictuelle et quasi délictuelle, dans lesquelles l'acte dommageable consiste en la violation d'une
obligation, quelle qu'en soit l'origine (légale au sens le plus large, coutumière, jurisprudentielle)
et que l'acte soit volontaire (délit) ou involontaire (quasi- délit).
Surtout, une personne peut être déclarée responsable indépendamment de la question de
savoir si elle a commis ou non une faute (il en est ainsi des parents pour les dommages causés
par leurs enfants mineurs ou du gardien d’une chose pour le dommage causé par le fait de celle-
ci).
La responsabilité extracontractuelle est en effet le principe. Elle a vocation à régir la réparation
de tous les dommages et s'impose tant que les conditions de mise en œuvre d'une responsabilité
contractuelle ne se trouvent pas réunies.

Régie aux articles de 77 à 106 du DOC, la responsabilité civile extracontractuelle


suppose que soient réunies certaines conditions (chapitre 1), afin de produire des effets en
l’occurrence donner lieu à réparation (chapitre 2).

Section 1 : Les conditions de la responsabilité civile extracontractuelle

D’après les articles de 77 à 106 du DOC, la mise en œuvre de la responsabilité civile


extracontractuelle nécessite la réunion de trois conditions : un préjudice (sous-section 1), un fait
générateur (sous-section 2) et un lien de causalité entre le dommage et la faute (sous-section 3).

Sous-section 1 : Le dommage ou préjudice

Comme en matière de responsabilité contractuelle, Pour engager la responsabilité civile


extracontractuelle, il faut établir un dommage 15 ou un préjudice16. Cette nécessité d’un
dommage résulte particulièrement, en matière extracontractuelle des articles 77, 78, 85, 85
bis, 86, 88 et 89 du DOC 1.

Ainsi, l’article 77 du DOC dispose que : « Tout fait quelconque de


l’homme qui, …, cause …. À autrui un dommage matériel ou moral, …
lorsqu'il est établi que ce fait en est la cause directe. ».

De son côté, l’article 78 du DOC, dispose que « Chacun est responsable


du dommage moral ou matériel qu’il a causé, non seulement par son fait, mais
par sa faute, lorsqu'il est établi que cette faute en est la cause directe… ».

S’agissant de l’article 98 du DOC, celui-ci parle de perte effective


éprouvée et de gain dont le demandeur est privé. Sous le vocable perte éprouvée,
on doit comprendre tout appauvrissement occasionné par le fait dommageable.
C’est le cas par exemple d’un préjudice matériel résultant des frais
d’hospitalisation ou des frais de justice.

Par gain manqué on désigne tous les profits que l’agissement d’un tiers
responsable a empêché de réaliser. Tel est le cas par exemple de l’interruption
d’études causés par un accident.

On en déduit, l’existence d’une variété de dommages (§1). Mais tout


dommage n’est pas réparable. Celui-ci ne sera pris en considération que s’il
présente certaines qualités (§ 2).

§1 : La diversité du dommage

Le dommage peut être matériel (A), moral (B) ou corporel (C).

A- Le dommage matériel

Il recouvre le dommage matériel au sens strict, c’est-à-dire l’atteinte au patrimoine. Ceci est
l’exemple d’une atteinte au droit à la propriété.

Elle peut consister dans une perte éprouvée, en la détérioration ou destruction d’un objet, et
dans un gain manqué en la diminution du rendement d’une terre en raison de l’implantation d’une
usine polluante.

1
Tenant compte d’autres dispositions du DOC qui prévoient des situations particulières comme les articles 79,
80, 81 et 82, 83 et 84 relatifs respectivement à la responsabilité de L'Etat et les municipalités, des agents de l’Etat
et des municipalités, les magistrats, donneurs de renseignements, de conseil et de recommandations et à la
concurrence déloyale.
En droit français, la réparation d’un dommage matériel est gouvernée par le principe de la
réparation intégrale du préjudice. En vertu de l’article 1149 du code civil (règle contractuelle,
couramment transposée en matière délictuelle), l’indemnisation par l’allocution de dommages-
intérêts est calculée en tenant compte à la fois de la perte éprouvée et du gain manqué par la
victime.

Par exemple, la réparation de la destruction d’un produit doit couvrir tant son prix d’achat que
le bénéfice qu’un commerçant aurait pu retirer en revendant le produit s’il n’avait pas été détruit.

B- Le dommage moral

Le dommage moral peut revêtir des aspects très variés : atteinte à l’honneur et à la réputation
d’une personne défigurée, atteinte aux sentiments (préjudice d’affection causé par la perte d’un
être aimé).

L’indemnisation de ce dommage a donné lieu à de nombreuses discussions : pour certains


auteurs, comment peut-on réparer, par une somme d’argent, une atteinte à l’honneur, par exemple ?
L’argent ne peut restaurer l’honneur atteint.

D’autres auteurs estiment, en revanche, que l’octroi d’une somme d’argent à la victime lui
permettra d’oublier en partie son chagrin.

Quoiqu’il en soit, la plupart des législations sont favorables à la répartition du dommage


moral, comme c’est le cas du DOC qui a traité le préjudice moral sur un pied d’égalité avec le
préjudice matériel.

C- Le dommage corporel

Le dommage corporel est l’atteinte portée à l’intégrité physique de la personne. Il peut aller
de la simple égratignure ou blessure à la mort de l’individu. La gravité du dommage est évaluée
au moyen d’une expertise médicale.

Par exemple, en matière d’accident de circulation, le dommage corporel causé à des tiers doit
être réparé selon les conditions prévues par le dahir du 2 octobre 1984.

Le rôle du médecin est primordial dans la procédure d’indemnisation des victimes d’accidents
de la voie publique. De manière générale, la victime peut d’une part soit souffrir d’une perte réelle
et effective par exemple la perte d’un proche ou encore les frais chirurgicaux, et d’autre part soit
de la privation d’un profit escompté par exemple l’impossibilité pour une personne de reprendre
son activité professionnelle.
§ 2 : Qualités du préjudice réparable

Pour qu’il soit réparé, le préjudice doit présenter certaines qualités : le préjudice doit être
certain (A), personnel (B), ne pas avoir été réparé (C), légitime (D) et direct (E).

A- Le préjudice doit être certain :

Le préjudice certain est celui qui est très vraisemblable et mérite d’être pris en considération.
Il peut être actuel ou futur. L’exigence d’un dommage certain signifie surtout qu’il ne peut y avoir
de responsabilité que si l’on a la certitude que le dommage s’est déjà réalisé ou se réalisera.

Il y a des dommages futurs qui sont certains et donnent lieu à réparation. Le dommage apparait
comme la prolongation certaine et directe d’un état actuel et susceptible d’évaluation directe. Ceci
est notamment le cas de de l’indemnité versée à une victime frappée d’invalidité et qui répare le
préjudice qu’elle va subir dans les années à venir.

En revanche, Le dommage éventuel est hypothétique ne peut être réparé. Est éventuel, le
dommage que pourrait causer, en cas d’accident, une ligne à haute tension installée près d’un
bâtiment.

Par ailleurs, force est de souligner que la perte de chance est aussi un dommage réparable.
C'est la disparition par le fait du défendeur d'une éventualité favorable qui devait se produire dans
un avenir proche et qui n'a pas pu être tentée.

Cependant, comme il demeure une incertitude dans la perte de chance qui est difficile à
évaluer, les juges du fond n'accordent pas la totalité du gain espéré mais une fraction, qu'il évalue
par rapport aux chances perdues. La perte de chance est un dommage particulier, intermédiaire
entre le dommage éventuel non réparé et le dommage certain qui lui est entièrement réparé.

La victime d’un dommage invoque la perte d’une chance passée ou future, c’est-à-dire qu’il
a manqué l’occasion qui aurait pu être profitable. La perte d’une chance de bénéficier d’un élément
favorable ou d’éviter un événement défavorable constitue un préjudice spécifique appelé perte de
chance. La perte de chance devrait être définie comme un événement intermédiaire faisant
disparaître la possibilité de l’événement final dont le processus de réalisation était engagé.

La perte d’une chance passée est l’hypothèse du cas où une chance qui existait à un moment
donnée a été définitivement perdue par le fait du défendeur qui est l’auteur du dommage. L’aléa
consiste dans le fait que l’on ignore si en courant sa chance la victime aurait réussie, c’est
l’appréciation du juge qui détermine si le dommage est certain ou non
La chance perdue aurait pu améliorer la situation de la victime. Dans ce cas, l’aléa porte non
seulement sur l’existence du succès mais également sur les conséquences qui l’aurait entrainé s’il
avait été remporté. Ceci est notamment l’exemple d’un accident de circulation qui a empêché la
victime de se présenter à un concours dont dépendait sa carrière. Dans tous les cas, le juge va se
livrer à une appréciation portant non seulement sur la vraisemblance mais également sur
l’importance du profit qu’aurait tirée la victime.

B - Le préjudice doit être personnel

Le préjudice doit être personnel au demandeur, que celui-ci soit une personne physique ou
une personne morale.

Est personnel et réparable, le préjudice subi directement par la victime. L’action ouverte à la
victime est transmise à ses héritiers.

Est personnel également, le préjudice subi par ricochet. Le dommage subi par la victime
directe entraine également un préjudice pour autrui

Le dommage par ricochet est un dommage matériel ou moral qu’éprouvent, par répercussion
du dommage subi par la victime directe, les personnes qui lui sont proches par la parenté, l’alliance,
l’affection, la profession ou telle autre relation. C’est le cas par exemple d’un accident moral qui
touche la victime et sa famille, affectivement et financièrement.

C’est le cas également des proches parents de la victime décédée suite à un accident et qui
subissent un préjudice par ricochet parce qu’elle ne peut plus subvenir à leur besoin.

La victime par ricochet est celle qui équivaut à un tiers subissant un préjudice matériel ou
moral du fait des dommages causés à la victime directe, tel un fils privé de subsides à la suite du
décès de son père tué accidentellement ».

Une victime par ricochet subi une atteinte par contrecoup d’un autre dommage. Le préjudice
par ricochet peut être matériel ou moral. Néanmoins, on ne répare par dans n’importe quelle
circonstance, il faut démontrer l’existence d’un lien étroit entre la victime et la victime par ricochet.

Le cercle des personnes pouvant obtenir réparation n’est donc pas précisément fixé, à
l’exception du dahir du 6 février 1963 relatif aux accidents du travail et du dahir de 2 octobre 1984
relatif aux accidents de circulation qui déterminent les personnes pouvant se prévaloir de l’action
en réparation.
Le dommage personnel est celui qui porte atteinte non seulement à une personne physique
mais également à une personne morale telle que les syndicats, les associations et organisations
professionnelles qui ont pour mission la défense de leurs intérêts collectifs.

Le dommage collectif peut être la somme de dommages individuels, par exemple, de


nombreux consommateurs ont été victimes d’un dommage causé par le même produit.

Mais ce dommage peut être diffus et ne pas être la somme de préjudices individuels. Ceci est
notamment l’exemple d’une personne qui exerce d’une manière illégale la profession d’avocat et
qui cause un préjudice à l’ensemble de la profession.

Souvent la réparation prend un aspect symbolique, l’action est intentée devant une juridiction
répressive et non devant une juridiction civile parce qu’il s’agit de sanctionner le responsable et
non d’indemniser les victimes.

C- Le dommage ne doit pas avoir été réparé

La victime ne peut intenter une action en justice pour demander la réparation d’un dommage
précédemment réparé. Cette exigence découle même de la logique juridique et des principes de
justice et d’équité.

Toute réparation supplémentaire à une indemnisation intégrale du même dommage est réputée
comme étant un enrichissement sans cause.

D- L’exigence d’un intérêt légitime, juridiquement protégé

Cette exigence signifie que le demandeur ne peut se prévaloir de situations qui sont contraires
à la loi, à l’ordre public et aux bonnes mœurs.

Ceci étant, une prostituée ne pourrait faire valoir, que du fait d’un accident, elle ne peut plus
exercer son métier.

La cour de cassation marocaine a refusé la demande de réparation de la concubine non pas


parce que les relations sexuelles en dehors du mariage sont illicites mais parce que l’Islam a prévu
des remèdes juridiques et licites comme le divorce et dans certains cas exceptionnels, la possibilité
d’avoir plus d’une épouse.
E- Le dommage doit être direct

Pour mettre en œuvre la responsabilité, le dommage doit, selon l’article 77 du Dahir des
Obligations et contrats, être la conséquence directe du fait générateur. D’un point de vue
procédural, la preuve du dommage doit être établie par la victime. C’est la raison pour laquelle la
victime devra démontrer soit une perte éprouvée due à l’appauvrissement occasionnée par le fait
dommageable, par exemple que la chose a été détruite ou détériorée, soit un gain manqué résultant
du dommage subi, par exemple en droit du travail ou en droit commercial le fait de subir une
concurrence déloyale.

Parfois le dommage peut avoir plusieurs causes et il faudra alors déterminer laquelle a été la
cause du dommage.

Sous-section 2 : Le fait générateur : la faute

L’existence du préjudice ne suffit pas à elle seule pour mettre en œuvre l’action en réparation.
Il faut en plus que l’auteur du dommage ait commis une faute.

Selon les cas, une distinction s’impose entre la responsabilité pour faute prouvée et la
responsabilité sans faute prouvée.

En principe, la responsabilité pour faute prouvée est désignée par l’expression de


responsabilité du fait personnel (§1). Mais il existe des responsabilités que l’on peut encourir sans
faute (§2), que ce soit du fait d’autrui ou du fait des choses.

§1- Responsabilité pour faute prouvée : fait personnel

La responsabilité du fait personnel est celle qui est engagée par un fait
dommageable propre au responsable. Ce dernier apparait ainsi à la fois comme l'auteur du
dommage et le responsable.

Le régime de responsabilité du fait personnel est un régime de responsabilité


extracontractuelle dans lequel le fait générateur de responsabilité est le fait personnel de l’auteur
du dommage. Il est posé par les articles 77 et 78 du DOC.

C’est ainsi que l’article 77 du DOC dispose que : « Tout fait quelconque de l’homme qui, sans
l’autorité de la loi cause sciemment et volontairement à autrui un dommage matériel ou moral,
oblige son auteur à réparer ledit dommage, lorsqu’il est établi que ce fait en est la cause directe.

Toute stipulation contraire est sans effet ».


De son côté, l’article 78 du DOC dispose que : « Chacun est responsable du dommage moral
ou matériel qu’il a causé, non seulement par son fait, mais par sa faute, lorsqu’il est établi que cette
faute en est la cause directe.

Toute stipulation contraire est sans effet.

La faute consiste, soit à omettre ce qu’on était tenu de faire, soit à faire ce dont on était tenu
de s’abstenir, sans intention de causer un dommage ».

La lecture des articles 77 et 78 du DOC, révèle que la faute est une condition nécessaire à la
responsabilité du fait personnel. L'article 77 du DOC s'applique aux fautes intentionnelles, le mot
« fait » (Tout fait quelconque de l'homme...) étant mis ainsi pour
« fait intentionnel », alors que l'article 78 du DOC, énonçant que
l'on est responsable non seulement du dommage causé, par son fait (faute intentionnelle), mais
par sa faute, lorsqu’il est établi que cette faute en est la cause directe ", ne vise quant à lui que les
fautes non intentionnelles ( négligence, imprudence ou inattention).

Ceci dit la responsabilité civile extracontractuelle fonde l’obligation de réparer un dommage


en cas de faute intentionnelle, sur le fondement de l’article 77 du DOC, en cas de faute non
intentionnelle (négligence ou d’imprudence) sur le fondement de l’article 78 du DOC.

Présentant une diversité (B), la faute suppose la réunion de certains éléments (A).

A- Les éléments constitutifs de la faute

La faute suppose un élément matériel (I) et un élément moral (II).

I- L’élément matériel

L’élément matériel réside dans l’illicéité du comportement : le comportement de l’auteur


du dommage est illicite, anormal, défectueux. Cela peut découler de la transgression d’une
disposition légale ou réglementaire (a) mais aussi d’une règle qui ne dispose d’aucun fondement
textuel (b).

a- La violation d’un devoir déterminé par une norme juridique

La faute peut résulter de la violation d’un devoir qui est généralement défini par une norme
(loi, réglementation), dont l’objet est d’imposer un certain comportement, une certaine attitude, et
la faute consistera à ne pas avoir eu cette attitude. La faute extracontractuelle va résulter de
l’inobservation de cette attitude, on parle de faute contraventionnelle. La victime va voir sa charge
de la preuve facilitée. Il suffira de prouver que l’auteur du dommage n’a pas eu la bonne attitude.

Dans d’autres cas, la transgression du devoir n’est qu’indirecte. Ceci est le cas où une
norme confère un droit subjectif à une personne. Quand ce droit subjectif sera transgressé, il y aura
indirectement violation de la norme, et par conséquent faute pour manquement à la norme. A
travers la violation d’un droit subjectif il y aura violation d’une norme et d’un devoir déterminé
par cette norme. (Ex : violation d’un droit de la personnalité, droit au respect de la vie privée, droit
à l’image de la personne. La négation de la propriété d’autrui est une faute).

Dans tous les cas, le juge n’aura qu’à constater la violation du droit, à moins que l’auteur
puisse se prévaloir d’un fait justificatif expliquant son attitude.

Se pose à cet égard la question de savoir si l’abus de droit constituerait une faute engageant
la responsabilité de son auteur.

Autrement dit, l’auteur d’un abus de droit sera- t-il responsable des dommages qu’il cause
par l’exercice abusif des prérogatives qui lui appartiennent ?

La position du législateur marocain est exprimée en vertu de l’article 94 du DOC. Celui-ci


dispose que : « Il n'y a pas lieu à responsabilité civile, lorsqu'une personne, sans intention de nuire,
a fait ce qu'elle avait le droit de faire.

Cependant, lorsque l'exercice de ce droit est de nature à causer un dommage notable à


autrui et que ce dommage peut être évité ou supprimé, sans inconvénient grave pour l'ayant droit,
il y a lieu à responsabilité civile, si on n'a pas fait ce qu'il fallait pour le prévenir ou pour le faire
cesser ».

Il en découle que le législateur considère comme usage abusif d’un droit, engageant la
responsabilité civile de son auteur dans deux situations :

- Si la personne recherche par l’exercice d’un droit, de nuire à autrui. Ceci est notamment le cas
d’une personne qui édifie une fausse cheminée sur le toit de sa maison dans le seul but de masquer
la vue à ses voisins.
- Si le titulaire d’un droit cherche à réaliser, en faisant usage de son droit, un intérêt moins important
par rapport au préjudice manifeste qui peut être causé à autrui par l’exercice de ce droit.
b- La violation d’un devoir général de conduite

La faute ne suppose pas uniquement la violation des devoirs définis par une norme
juridique. D’autres comportements peuvent constituer des fautes, en dehors de ces devoirs définis.
Il y a ainsi un devoir plus général qui impose à toute personne une norme générale de conduite
comme le devoir de respecter des droits d’autrui et ne pas lui causer un préjudice.

Lorsque la faute résulte de ce devoir, il appartient au juge de décider si le fait dommageable


est illicite.

L’appréciation de l’illicéité peut se faire de deux manières :

1- La méthode subjective : c’est une méthode qui consiste à nuancer les obligations en
fonction de la personnalité de chaque individu (sexe, santé physique et morale, etc.). Le système
de cette appréciation tend à comparer le comportement dommageable de l’auteur à son
comportement habituel. On juge l’auteur du dommage par rapport à la prudence et la diligence
dont il fait preuve habituellement.
En se basant sur le critère subjectif, si la personne est habituellement, émotive et
intelligente, la moindre défaillance dans son comportement, est considérée comme étant une faute
engageant sa responsabilité. En revanche si la personne est habituellement maladroite, son
comportement ne saurait être considéré une faute que lorsqu’il a constitué une défaillance
manifeste.
Cette méthode a été largement contestée, étant donné son caractère injuste, puisqu’elle
conduisait à un traitement sévère avec la personne prudente qui sera responsable de la moindre
imprudence et tolérant à l’égard de la personne négligente qui ne sera responsable que pour les
fautes intentionnelles.
2- La méthode objective : c’est une méthode qui consiste à ne pas tenir en compte des facteurs
personnels. Elle se réfère à un type d’individus moyens « bon père de famille ». Les juges ne
tiennent pas compte des caractéristiques propres de l’auteur du dommage (son ignorance, sa
maladresse habituelle, son intelligence, son émotivité…). Ainsi, le comportement de l’auteur
est comparé à celui d’un individu moyen normalement avisé.

C’est cette méthode qui a été quasi-unanimement adoptée par tant la doctrine que la
jurisprudence.
II- L’élément moral ou subjectif

Cet élément concerne l’imputabilité de la faute à son auteur, c’est-à-dire la faute


extracontractuelle impose au responsable d’avoir conscience de la portée de ses actes.

Il devait, au moment de l’acte, savoir discerner le bien du mal (a) et avoir agi en toute liberté
sans l’existence des faits justificatifs (b).

a- Nécessité de discernement et de perception

En droit marocain, une personne n’est responsable de ses fautes que si elle a le discernement
suffisant et qu’elle est capable de distinguer entre le bien et le mal.

C’est ainsi que le mineur dépourvu de discernement (âgé de moins de 12 ans), ne répond pas
civilement du dommage causé par son fait. Il en est de même de l'insensé, quant aux actes
accomplis pendant qu'il est en état de démence.

C’est ce qui ressort de l’article 96 du DOC qui dispose que : « Le mineur, dépourvu de
discernement, ne répond pas civilement du dommage causé par son fait. Il en est de même de
l'insensé, quant aux actes accomplis pendant qu'il est en état de démence.

Le mineur répond, au contraire, du dommage causé par son fait, s'il possède le degré de
discernement nécessaire pour apprécier les conséquences de ses actes ».

La victime peut, néanmoins, intenter une action en réparation contre les personnes chargées
de la surveillance des personnes dépourvues de discernement dans le cadre de la responsabilité
civile du fait d’autrui.

S’agissant des sourds-muets et les infirmes, ils sont responsables s’ils possèdent le degré de
discernement nécessaire pour apprécier les conséquences de leurs actes, et ce conformément à
l’article 97 du DOC.

De même, en application des dispositions de l’article 93 du DOC, le législateur marocain


considère l’ivresse involontaire comme cause d’absence de responsabilité car il y a absence
involontaire de discernement.

Quant au prodigue, celui qui dissipe sa fortune dans des dépenses inutiles, il est pleinement
responsable parce qu’il dispose de la faculté de discernement même s’il gère sa fortune d’une
façon anormale.
Par ailleurs, il faut souligner que l’exigence de discernement ne concerne que la personne
physique sans la personne morale qui ne possède pas la volonté. Seul donc l’élément matériel est
exigé pour engager sa responsabilité. C’est ainsi que l’article 77 du DOC dispose que : « tout fait
quelconque de l’homme… ».

Ceci dit, la société qui cause dommage à autrui, en raison de l’utilisation d’une substance
porteuse de risque, engage sa responsabilité sans pouvoir prévaloir de l’élément de discernement.

b- L’inexistence des causes de justification de l’acte fautif

L’élément moral de la faute extracontractuelle ne se réalise pas dès que le fait


dommageable émane d’une personne pourvue de discernement. Mais celle-ci doit avoir agi sans
l’existence des causes de justification de son acte fautif.

L’article 95 du DOC cite deux causes de justification : la force majeure ou le cas fortuit (1)
et la légitime défense (2), auxquels on peut ajouter l’état de nécessité (3).

1- La force majeure

Un cas dit de « force majeure » est un événement exceptionnel auquel on ne peut faire face.
Traditionnellement, l’événement doit être «extérieur, imprévisible et irrésistible » pour constituer
un cas de force majeure.

La force majeure permet une exonération de la responsabilité, c’est-à-dire qu’on écarte la


responsabilité qui aurait normalement dû être retenue au vu de la règle de droit applicable, en
invoquant les circonstances exceptionnelles qui entourent l’événement.

Pour être considéré comme présentant les caractères de la force majeure, le fait doit être
extérieur, imprévisible et irrésistible pour le défendeur.

Le fait doit être extérieur signifie qu’un phénomène indépendant de la volonté du


défendeur, est à l’origine du dommage.

Un événement est jugé imprévisible lorsqu’il n’y avait aucune raison particulière de
penser qu’il se produirait. Seul sera retenu un événement normalement, raisonnablement
imprévisible. De manière générale, pour vérifier cette condition, les tribunaux s’appuient sur la
probabilité de réalisation de l’événement mais aussi sur la soudaineté de l’événement, sa fréquence
ou son intensité. Cette appréciation est faite par référence tant à des circonstances externes (temps,
lieu) qu’à des circonstances propres à l’agent (ses connaissances).
Or, l’irrésistibilité indique que l’événement est insurmontable et inévitable, celui-ci n’est
ni un simple empêchement ni une difficulté accrue. Il peut s’agir de catastrophes naturelles
(séisme, tempête…) ou d’événement politiques majeurs (révolution, guerre). Quant à l’individu,
il faut qu’il lui ait été impossible, pendant l’événement, d’agir autrement qu’il ne l’a fait. C’est une
appréciation « in abstracto » de son comportement par référence à un individu moyen placé dans
la même situation.

Lorsque la force majeure est constatée, elle supprime la responsabilité parce qu’elle est la
cause exclusive du dommage et qu’en conséquence aucune faute ne peut l’avoir causé.

2- La légitime défense

Aux termes de l’article 95 du DOC, « le cas de légitime défense est celui où l’on est
contraint d’agir afin de repousser une agression imminente et injustice dirigée contre la personne
ou les biens de celui qui défend ou d’une autre personne »

C’est un concept emprunté au droit pénal. Il a pour but de supprimer la responsabilité de


l’auteur de l’acte dommageable »

Pour être exonératoire de responsabilité, il faut que l’attaque contre les personnes et les
biens ait été injuste et que la défense ait été proportionnelle à l’attaque.

Il y aura partage de responsabilité entre l’auteur agressé et la victime si la riposte est


supérieure à l’attaque. L’excès dans l’exercice de la riposte est sanctionné.

3- L’état de nécessité

Il s’agit d’une situation dans laquelle une personne accomplit volontairement un acte
dommageable afin d’éviter un dommage plus grand.

Par exemple, il y a état de nécessité lorsqu’un passant pousse violement sur le trottoir un
piéton afin de lui éviter d’être renversé par un camion dont les freins ont lâché.

Si la force majeure supprime toute volonté de l’auteur du dommage, dans l’état de nécessité
cette volonté existe, seulement, elle n’est pas libre.
B- Diversité de la faute

La faute extracontractuelle se présente sous plusieurs aspects, elle peut être par commission
ou par omission (I), lourde ou légère (II) et peut être intentionnelle ou non intentionnelle (III).

I- Faute par commission et faute par omission

L’abstention comme l’action peuvent constituer une faute.

La faute d’action ou par commission consiste conformément à l’article 78 du DOC, à faire ce


dont on était tenu de s’abstenir ». Celui qui cause un dommage par un acte positif est tenu de le
réparer : coups et blessures, injures…

La commission est alors, fautive lorsque l’intéressé aurait dû s’abstenir de l’acte qu’il a
accompli. Ceci est notamment le cas de l’automobiliste qui circule la nuit sans allumer les phares,
renversant ainsi un piéton et lui causant des blessures.

Or, la faute par omission consiste, selon le même article à « omettre ce qu’on était tenu de
faire ». L’omission est fautive lorsque l’intéressé aurait dû agir. C’est le cas de l’abstention de
porter secours à une personne qui est en train de se noyer.

II- Faute lourde et faute légère

La faute légère est une faute d’imprudence ou de négligence. Elle est appréciée in abstracto,
en comparant le comportement de l’auteur de la faute à celui d’un homme moyennement doué,
placé dans la même situation.

Or la faute lourde qualifiée de dol en vertu de l’article 98 du DOC consiste en une négligence
grossière que l’homme le moins avisé ne commettrait pas dans la gestion de ses propres affaires.
Elle produit les mêmes conséquences que le dol.

La faute lourde diffère de la faute intentionnelle dans la mesure elle est une faute non-
intentionnelle, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de volonté de causer un dommage, mais c’est une faute
d’une certaine gravité. Il faut que l’auteur du dommage ait agit de façon particulièrement
imprudente ou négligente, il faut qu’il ait conduit une erreur de conduite grossière.

Ceci est l’exemple d’un automobiliste qui conduit son véhicule sur une route étroite ou il
y a de la foule, d’une vitesse qui dépasse 80 km/h.
En principe, en matière extracontractuelle, les tribunaux n’accordent pas de considération
à la gravité de la faute. Une simple faute légère peut donc entrainer réparation au profit de la
victime.

Mais dans des cas exceptionnels, le législateur marocain n’admet l’action en réparation que
s’il y a faute lourde. Ceci est le cas des agents de l’Etat et des municipalités qui ne peuvent être
responsables de leurs fautes légères et non intentionnelles. C’est ce qui ressort de l’article 80.

De même le législateur marocain a, conformément à l’article 98 du DOC, obligé le juge de


tenir en considération le degré de la faute (légère ou lourde) dans l’évaluation du montant des
dommages-intérêts.

III-Faute intentionnelle et faute non intentionnelle

Le DOC fait aussi une place à la distinction entre faute intentionnelle et faute non
intentionnelle. Cette distinction correspond à l’opposition traditionnelle entre le délit et quasi-délit.

La faute intentionnelle est caractérisée par l’intention de nuire et la volonté de causer un


dommage. Ceci est l’exemple de la concurrence déloyale.

Celui qui conduit sa voiture, avec excès de vitesse, et renverse un piéton, ne peut être considéré
comme accomplissant une faute intentionnelle que s’il avait l’intention de le renverser.

La faute intentionnelle est appréciée subjectivement. Le juge doit procéder à une analyse
subjective du comportement de l’individu et non pas à une analyse abstraite par référence au
comportement de bon père de famille. Le juge tient compte de la personnalité de l’individu (âge,
état de santé, niveau d’éducation, profession…).

Or la faute non intentionnelle est celle qui résulte d’une imprudence ou négligence, sans être
caractérisée par la volonté de nuire. L’auteur n’a pas voulu les conséquences de son acte.

Qu’il s’agisse de la faute intentionnelle ou de la faute non intentionnelle, la réparation


s’impose dans les deux cas mais le juge peut se porter beaucoup plus sévère s’il y a un dol par
exemple (article 98 du DOC).

§2- Responsabilité sans faute prouvée en principe : faute présumée

Il s’agit de la responsabilité du fait d’autrui (A) et la responsabilité du fait de la chose (B).


A- Responsabilité du fait d’autrui

L’article 85 du DOC vise certaines personnes responsables du fait d’autrui : les pères et mères,
les maitres et commettants, les artisans et ceux qui devaient surveiller les individus privés de
discernement même s’ils sont majeurs2.

Ces divers cas sont énoncés par l’article 85 du DOC par une formule générale : « On est
responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui
qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre ».

L’article 85 bis ajoute un seul cas de la responsabilité du fait d’autrui. Il en est ainsi des
instituteurs du fait de leurs élèves.

Ceci étant, du fait d’autrui pouvant reposer exceptionnellement sur une faute prouvée. Il s’agit
(I), comme elle peut être une responsabilité avec présomption de faute qui admet la preuve
contraire (II) ou avec présomption de plein droit (III).

I- Exception du principe de la présomption de la faute : faute prouvée : les instituteurs


du fait de leurs élèves

L’article 85 bis du DOC dispose à son premier alinéa que : « Les instituteurs et les
fonctionnaires du service de la jeunesse et des sports sont responsables du dommage causé par les
enfants et jeunes gens pendant le temps qu'ils sont sous leur surveillance ».

L’instituteur est toute personne chargée de l’éducation ou de l’instruction d’enfants ou des


jeunes gens, en même temps que leur surveillance.

Ce n’est pas simplement l’enseignant public ou privé, mais toute personne qui donne
l’enseignement d’un art ou d’une science, à titre onéreux ou gratuit. La qualité d’instituteur
appartient à toute personne qui se charge à quelque titre que ce soit même par bienfaisance de
l’éducation et de la surveillance d’autrui.

La qualité d’instituteur suppose donc deux éléments : un élément moral, l’éducation et un


élément matériel, la surveillance.

2
La responsabilité résultant du fait des insensées et autres infirmes d’esprit est méconnue pas le droit français
La responsabilité des instituteurs est fondée sur la faute prouvée. C’est à la victime
qu’incombe la charge de la preuve conformément à l’article 85 bis qui dispose à son deuxième
alinéa que : « Les fautes, imprudences ou négligences invoquées contre eux, comme ayant causé
le fait dommageable, devront être prouvées conformément au droit commun par le demandeur à
l'instance ».

La mise en œuvre de cette responsabilité suppose que la victime apporte la preuve que :

1- Le dommage résulte du fait de l’élève. Le fait de l’élève s’analyse comme étant un acte
objectivement illicite puisque l’instituteur ne sera pas responsable du dommage causé par
l’élève s’il n’a pas pu prouver un mouvement brusque ou un acte soudain de celui-ci,
causant un accident dont a été victime un tiers.
2- L’élève était sous la surveillance de l’enseignant, pendant le temps de surveillance, aux
termes de l’article 85 bis du DOC, que ce soit pendant la scolarité ou en dehors de la
scolarité dans un but d’éducation morale ou physique non interdite par les règlements.
3- L’enseignant a commis une faute, à savoir le défaut de surveillance : la faute de l’instituteur
doit avoir été la cause du dommage exclusive ou partagé avec une faute de la victime. Elle
consiste parfois à ne point avoir surveillé les élèves ou plus souvent à les avoir surveillés
insuffisamment.

Etant engagée, la responsabilité civile de l’instituteur a pour conséquence :

- La substitution de l’État : l’article 85 bis du DOC, crée une sorte d’immunité des éducateurs
publics dans la mesure où leur responsabilité ne peut être engagée devant les tribunaux civils,
même en prouvant leurs fautes. Ils ne peuvent pas être mis en cause devant ces tribunaux. Ainsi,
seul l’État pourrait être mis en cause dans tous les cas où la responsabilité civile des éducateurs
publics est engagée et seul l’État également pourrait les poursuivre en remboursement de ce qu’il
a été versé à la victime conformément au droit commun.

La juridiction compétente en matière de la substitution de la responsabilité civile de l’État


est le tribunal de première instance du lieu où le dommage a été commis. L’action en responsabilité
exercée contre l’État se prescrit par un délai de trois ans, à compter du jour où le fait dommageable
a été commis. C’est ce qui ressort de l’article 85 bis du DOC, à son dernier alinéa.

L’État dispose, en revanche, d’un recours soit contre son enseignant fautif soit contre les
tiers auteurs du dommage mais en pratique ce recours est très rarement exercé.
Cette responsabilité ne joue qu’à l’enseignement du public. Si l’enseignant exerce sa fonction
dans un établissement privé, il sera responsable personnellement du fait de l’élève mais la victime
peut agir contre l’établissement privé qui doit indemniser la victime et pourra se retourner contre
l’instituteur.

II- Responsabilité pour faute présumée admettant la preuve contraire : présomption


simple

S’inscrivent dans le cadre de ce type de responsabilité : la responsabilité des pères et mères


du fait de leurs enfants (a), des artisans du fait de leurs apprentis (b) et la responsabilité du fait des
insensés et autres infirmes d’esprit (c).

a- Les pères et mères du fait de leurs enfants

L’article 85, alinéa 2 du DOC dispose que : « le père et la mère après le décès du mari, sont
responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux ».

Etant pour faute présumée, la responsabilité des pères et mères ne peut être engagée que si
certaines conditions soient remplies (1), bien qu’elle est une présomption simple admettant la
preuve contraire (2).

1- Les conditions

Il s’agit de la minorité (1-1) et de la cohabitation (1-2).

1-1 La minorité

Sont considérées comme mineur, les personnes qui n’ont pas encore atteint l’âge de la majorité
(18) ans ou celui de l’émancipation (16) ans.

L’enfant doit être placé sous l’autorité de ses parents. Les parents ne sont pas responsables
l’un et l’autre, mais l’un à défaut de l’autre. La mère n’est responsable, du fait de son enfant
mineur, qu’en cas de décès de son mari. La responsabilité n’est donc pas solidaire.

La présomption est instituée à l’encontre des parents. Elle ne peut être étendue à d’autres
personnes même si elles exercent une autorité quelconque sur l’enfant, et en assumant la garde.

L’article 85 du DOC vise le père durant sa vie. Même s’il est éloigné pour des raisons
professionnelles, il n’en demeure pas moins responsable.

1-2 La cohabitation
La responsabilité des parents ne peut être mise en œuvre que si leurs enfants mineurs habitent
avec eux. La vie commune permet de présumer que les parents sont en mesure de s’acquitter de
leurs obligations.

Le défaut de cohabitation, même légitime, ne constitue pas un moyen sûr pour écarter la
responsabilité des parents.

Il ne devient effectivement exonératoire que s’il rend impossible toute surveillance.

2- Les limites à la présomption

L’enfant qui a causé le dommage a été l’objet d’une défaillance que les père et mère ont
commis dans l’éducation ou la surveillance de l’enfant. Il y a donc faute présumée à leur encontre,
les rend responsables envers la victime. Cette dernière n’a pas à prouver la mauvaise surveillance
ou l’éducation défectueuse.

Il lui suffit de faire état du dommage causé par l’enfant, la faute des parents est présumée.

Toutefois, la présomption pesant sur eux est une présomption simple qui est susceptible d’être
détruite par la preuve contraire.

L’article 85 du DOC prévoit que les parents peuvent s’exonérer en prouvant qu’ils n’ont pu
« empêcher le fait qui donne lieu à cette responsabilité »

Pour pouvoir détruire la présomption de l’article 85 du DOC, la preuve des parents devrait
porter sur la surveillance et l’éducation. Ils doivent prouver qu’ils se sont convenablement
acquittés de leur devoir de surveillance et d’éducation.

Contrairement à la surveillance qui peut être appréciée par rapport à un fait précis, l’éducation
des parents parait excessive. Les tribunaux sont conscients de cette difficulté et mettent surtout
l’accent sur la surveillance.

b- Les artisans du fait de leurs apprentis

Aux termes de l’article 85 du DOC, les artisans sont responsables du dommage causé par leurs
apprentis pendant le temps qu’ils sont sous leur surveillance ».

La responsabilité de l’artisan se justifie par l’autorité que lui confère sa double qualité de
formateur et d’employeur et qui lui impose un devoir de surveillance.
L’artisan est chargé d’enseigner à un apprenti un métier (menuiserie, mécanique…). Il y a
donc une relation d’apprentissage qui les unit et qui peut exister sans qu’il y ait nécessairement un
contrat écrit d’apprentissage.

La responsabilité des artisans est engagée par la présence de trois conditions :

1- Relation d’apprentissage : Cette relation porte sur la formation d’un métier basé sur
l’existence d’un contrat de travail type particulier écrit ou oral, par lequel l’artisan s’engage
à assurer la formation professionnelle de l’apprenti et à lui verser, éventuellement, une
rémunération. En retour, l’apprenti s’engage à travailler pour l’artisan pendant la durée du
contrat.
2- Dommage limité dans le temps : L’artisan n’est responsable que du dommage causé par
l’apprenti pendant le temps que ce dernier soit sous sa surveillance.
3- Fait dommageable par l’apprenti : Il est à signaler, à ce titre, que l’abaissement de l’âge de
la majorité à 18 ans, combiné avec les lois sur l’apprentissage, fait surgir une difficulté
quant au point de savoir si l’apprenti doit être obligatoirement mineur.

Les artisans sont admis à se dégager de leur responsabilité par la preuve contraire. Comme à
l’encontre des parents, la présomption qui pèse sur les artisans est une présomption simple et non
irréfragable, ce qui leur permet de se décharger en prouvant qu’il n’a pas commis de faute de
surveillance ou qu’il n’a pas pu empêcher le dommage ou que le dommage résulte d’un cas de
force majeure.

La preuve contraire réservée à l’artisan se situe uniquement sur le plan de la surveillance


diligente, or il n’est pas chargé de parfaire l’éducation de l’apprenti, mais seulement de lui
apprendre un métier.

b- Les parents et proches parents et conjoints du fait des insensés et autres infirmes d’esprit

L’article 85 du DOC prévoit une responsabilité du fait d’autrui à la charge de ceux qui
devaient surveiller les individus privés de discernement même s’ils sont majeurs. Il s’agit du père,
de la mère, des autres parents ou conjoints. Contrairement au cas du mineur, le champ
d’application de l’article 85 du DOC en ce qui concerne les insensés est beaucoup plus large.
Sont également responsables, les personnes qui se chargent par contrat, de l’entretien ou de la
surveillance de ces personnes tels que le médecin, l’infirmier ou du responsable de l’établissement
spécialisé.

Pour que ces personnes soient responsables, il faut que le dommage se produise pendant les
intervalles ou les faibles d’esprit perdent leur lucidité.

Par contre, les sourds-muets et les infirmes sont pleinement responsables s’ils possèdent la
faculté de discernement nécessaire, conformément à l’article 97 du DOC.

Le défendeur peut s’exonérer en prouvant l’absence de faute. Il en est ainsi s’il a exercé sur
l’insensé toute la surveillance nécessaire ou s’il ignorait le caractère dangereux de la maladie ou
si le dommage est dû à une faute de la victime.

III- Responsabilité pour faute présumée n’admettant pas la preuve contraire : présomption
irréfragable : les maitres et commettants du fait de leurs domestiques et préposés

Aux termes de l’article 85 du DOC, alinéa 3, « les maitres et les commettants (sont
responsables) du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles
ils les ont employés ».

Ce texte fait peser sur le commettant une présomption de responsabilité. C’est une
responsabilité de plein droit. Mais cette présomption est irréfragable, elle n’admet pas la preuve
contraire. Le commettant ne peut donc pas s’exonérer de la responsabilité en prouvant qu’il a
exercé sur son préposé toute la surveillance nécessaire ou qu’il n’était pas négligeant ou imprudent
dans cette surveillance.

Il ne peut se décharger de sa responsabilité que s’il prouve que le dommage n’a pas été
commis par le préposé, mais dépend d’un cas de force majeure ou cas fortuit ou du fait de la
victime.

La responsabilité des commettants ne sera engagée que s’il y a un lien de préposition entre
le commettant et le préposé (a), et que l’acte dommageable doit avoir été commis pendant les
fonctions auxquelles le préposé est employé (b).
a- Lien de préposition

Le lien de préposition est le lien de subordination qui place le préposé sous les ordres du
commettant. Cette notion a été définie par la jurisprudence comme : « le droit de donner au préposé
des ordres ou des instructions sur la manière de remplir des fonctions auxquels il est employé ».

Le commettant est l’individu qui fait appel aux services d’une personne dénommée préposé
pour accomplir certaines tâches et fonctions.

Le préposé participe à l’activité du commettant tout en étant sous ses ordres et instructions.

Le cas typique du lien de préposition est celui du contrat de travail dans lequel le salarié a la
qualité de préposé mais le lien de présomption peut naitre hors contrat et résulter d’un rapport
familial de pur fait. Ainsi, le fils peut être le préposé du père. La subordination peut donc s’exercer
hors convention, il suffit qu’il existe un lien de dépendance entre individus.

De plus, il importe peu que les fonctions du préposé soient exercées à titre permanent ou
temporaire.

Peu importe également que le préposé perçoive une rémunération ou non, dans la mesure où
il existe un lien d’autorité entre employé et employeur.

b- L’acte commis par le préposé doit être lié à ses fonctions

L’article 85 du DOC subordonne la responsabilité du commettant au fait que l’acte


dommageable ait été commis pendant les fonctions auxquelles le préposé est employé.

La mise en jeu de la responsabilité du commettant suppose en plus que soit préalablement


établie la faute du préposé.

Le préposé doit avoir agi dans l’exercice de ses fonctions et être soumis au commettant par
un rapport d’autorité. A défaut, la responsabilité de ce dernier n’est pas engagée. (Un salarié en
vacances croise son contremaitre et lui donne plusieurs coups mortels sur la tête).

B- Responsabilité du fait des choses

Il s’agit du régime de responsabilité le plus important étant donné que le développement de


l’industrialisation et la mécanisation ont multiplié le nombre des accidents de travail mettant les
victimes dans une quasi-impossibilité d’apporter la preuve de la faute de leur employeur,
propriétaire des machines. Il est injuste de ne pas les indemniser. Les victimes sont dispensées de
prouver la faute du gardien de la chose.
Ce régime a donné lieu à de nombreuses controverses aussi bien au niveau de la doctrine qu’au
niveau des tribunaux. De même, le contentieux est très abondant en cette matière. Sans oublier
l’expansion de l’assurance dans ce domaine qui a contribué à l’évolution des principes de la
responsabilité du fait des choses.

Ainsi, une chose intervient dans la production d’un dommage. Celui qui avait cette chose sous
sa garde est responsable sans qu’on ait à prouver qu’il a commis une faute dans son utilisation ou
dans sa surveillance. Tel est le principe de la responsabilité du fait des choses.

Le DOC prévoit deux systèmes spéciaux de responsabilité du fait des choses : une
responsabilité du fait des animaux et une responsabilité du fait des bâtiments (II).

Quant au régime général de la responsabilité du fait des choses, il est prévu par l’article 88 du
DOC (I).

I- Régime général : du fait de la chose

Le régime général de la responsabilité du fait des choses, est prévu à l’article 88 du DOC qui
dispose : « Chacun doit répondre du dommage causé par les choses qu’il a sous sa garde, lorsqu’il
est justifié que ces choses sont la cause directe du dommage, s’il ne démontre :

1. Qu’il a fait tout ce qui était nécessaire afin d’empêcher le dommage ;

2. Et que le dommage dépend, soit d’un cas fortuit, soit d’une force majeure, soit de la faute
de celui qui en est victime ».

Il en découle que cette responsabilité n’est pas fondée sur la faute mais sur la notion du risque.
L’employeur retire un profit de ses outils de production. Il doit en contrepartie en supporter les
conséquences. Il doit être responsable de plein droit dès l’instant ou survient un dommage du fait
des choses dont il a la garde.

Il ne peut pas échapper à sa responsabilité en prouvant qu’il n’a pas commis de faute. C’est le
cas de la chaudière d’un remorqueur qui a explosé à cause d’une soudure défectueuse qui n’avait
pas pu être détecté et a causé la mort du mécanicien qui travaillait sur le navire. Dans ce cas, le
propriétaire du remorqueur est responsable et ne peut s’exonérer que s’il y a une force majeure.

L’exonération du gardien peut résulter principalement de la preuve d’une cause étrangère,


c’est-à-dire de l’existence d’un cas fortuit ou de force majeure.
La faute de la victime constitue aussi une cause d’exonération si le comportement de la victime
constitue la cause exclusive du dommage3.

La responsabilité du fait des choses suppose, l’existence des trois éléments suivants : une
chose (a), le fait d’une chose (b) et la garde de la chose (c).

a- Une chose

L’article 88 du DOC intéresse des choses de toute sorte : un courant électrique, des fleurs, la
fumée… peu importe que cette chose soit altérée ou non par un défaut apparent.

Cependant, on a exclu certaines choses de cette responsabilité les choses régies par des lois
spéciales qui dérogent au principe général prévu à l’article 88 du DOC. Il s’agit des choses
suivantes :

- Choses visées par des textes spéciaux, comme les véhicules terrestres à moteur régis par
le dahir du 3 octobre 1984 relatif à l’indemnisation des victimes d’accidents causés par des
véhicules terrestres à moteur, ce dahir qui déroge au principe général édicté par l’article 88 du
DOC.

- Produits défectueux qui sont régis par des dispositions spéciales (articles de 106_1 au
106_14).

- Le corps humain.

- Les choses qui sont abandonnées, les choses sans maître, c’est-à-dire celles qui n’ont pas
de propriétaire mais qui sont néanmoins appropriables.

b- Le fait de la chose

Le fait de la chose signifie l’intervention causale de la chose dans la réalisation du dommage.


En d’autres termes, cette intervention de la chose dans la réalisation du dommage signifie que la
chose a eu un rôle actif, donc la victime doit prouver cette intervention matérielle de la chose dans
le dommage.

3
En dehors de l’article 88 du DOC, pour s’exonérer de la responsabilité qui lui est imputable, le gardien de la
chose mis en cause peut prouver le fait passif de celle-ci. Il doit démontrer que la survenance du dommage est
due à une cause qui lui est étrangère. Il peut par exemple prouver qu’au moment de la réalisation du dommage,
il n’avait pas la garde de la chose ou que celle-ci ne lui appartenait plus ou encore qu’elle était dans une situation
normale (cas d’une chose immobilisée) ou qu’elle avait un comportement parfaitement régulier (cas d’une chose
en mouvement).
D’abord, la victime doit prouver que la chose a contribué matériellement à la réalisation du
dommage, ce qui signifie que sans cette chose, le dommage n’aurait pas pu se produire (c’est le
cas de basket-ball qui s’est décroché et a provoqué la mort d’un lycéen qui se trouvait dessous).

Ensuite, il faut que la chose ait joué un rôle actif dans la réalisation du dommage. Par exemple,
le propriétaire d’une droguerie renverse par maladresse un bidon d’eau de javel dont les projections
brûlent gravement les yeux d’un client. Le bidon joue bien un rôle actif dans la production du
préjudice, car sans le renversement, la victime n’aurait pas été blessée.

La victime doit donc prouver l’intervention active de la chose et établir la participation de la


chose à la production du dommage. Si la chose a joué un rôle passif, le gardien n’engage pas sa
responsabilité.

c- La garde de la chose

La garde appartient à celui qui a l’usage (action de se servir de quelque chose), la direction
(action de diriger, conduire) et le contrôle de la chose (maitrise de la manœuvre de véhicules,
d’appareils).

Le gardien est celui qui exerce un pouvoir effectif sur la chose, ce qui signifie qu’il en a la
maîtrise. Le propriétaire est présumé gardien de la chose. La garde n’est pas forcément juridique.
Il n’est pas nécessaire que le gardien détienne la chose en vertu d’un titre juridique. Il suffit que
cette garde soit purement matérielle (par exemple, le voleur de voiture devient le gardien du
véhicule).

Le propriétaire perd la garde lorsqu’il a été dépossédé de la chose contre son gré. Ce qui arrive
par exemple lorsqu’une personne s’empare de la chose appartenant à ses parents (une voiture, …).

La perte de la garde peut être instantanée comme lorsqu’une personne arrache un couteau des
mains de son propriétaire, s’emparant ainsi des pouvoirs sur la chose.

Mais la garde peut aussi se trouver transférer lorsque le propriétaire se dessaisit


volontairement de la chose par l’effet d’un contrat de bail ou de dépôt. Le garagiste acquiert la
garde du véhicule qui lui est remis. Seulement, en matière de vente le propriétaire est gardien de
la chose tant qu’il n’a pas transféré la propriété au vendeur.

Notons enfin que le gardien doit être pourvu de discernement puisque la garde implique un
devoir de surveillance qui ne peut être assumé par une personne dépourvue de discernement.
II- Régimes spéciaux

Si l’article 88 du DOC constitue le régime de droit commun en matière de responsabilité


du fait des choses. Le législateur en prévoit deux régimes spéciaux. Il s’agit de la responsabilité
du fait des bâtiments (a) et de la responsabilité du fait des animaux (b).

a- Du fait des bâtiments

Cette responsabilité est réglementée par l’article 89 du DOC qui dispose « Le propriétaire
d'un édifice ou autre construction est responsable du dommage causé par son écroulement ou par
sa ruine partielle, lorsque l'un ou l'autre est arrivé par suite de vétusté, par défaut d'entretien, ou
par le vice de la construction. Sa même règle s'applique au cas de chute ou ruine partielle de ce qui
fait partie d'un immeuble tel que les arbres, les machines incorporées à l'édifice et autres
accessoires réputés immeubles par destination. Cette responsabilité pèse sur le propriétaire de la
superficie, lorsque la propriété de celle-ci est séparée de celle du sol.

Lorsqu'un autre que le propriétaire est tenu de pourvoir à entretien de l'édifice, soit en vertu
d'un contrat, soit en vertu d'un usufruit ou autre droit réel, c'est cette personne qui est responsable. .
Cet article vise les dommages causés par l’écroulement ou la ruine ».

Une présomption de faute pèse donc sur le propriétaire de l’édifice lorsque la ruine est
causée par un défaut d’entretien ou par un vice de construction.

La mise en œuvre de cette responsabilité est subordonnée à la réunion de certaines conditions


(1) et produit des effets (2).

1- Les conditions :
Le dommage doit avoir été causé par un bâtiment. Ce terme vise les constructions
immobilières en matériau durables, achevés et fixés solidement au sol (un immeuble,
un puits…)

La notion de bâtiment, signifie alors, « tout édifice ou toute autre construction en matériaux
durables élevés par l’homme et fixés au sol ».

Donc, ne sont pas considérés comme bâtiments, les grottes, les souterrains, ainsi que les
constructions provisoires sur un chantier (par exemple : la victime d’une baraque de chantier ne
peut agir sur la base de l’article 89 mais sur l’article 88 du DOC).

L’origine du dommage doit impérativement trouver sa source soit dans un défaut


d’entretien, soit dans un vice de la chose.
Le dommage doit résulter de l’écroulement ou de la ruine du bâtiment. La ruine suppose
une dégradation très importante de la chose, notamment son écroulement ou sa
destruction. Cette ruine peut être totale ou seulement partielle. Elle implique la chute
d’un ou de plusieurs éléments constitutifs de la chose ou de son ensemble (par exemple,
l’arrachement d’une toiture par le vent, le décrochement d’un balcon, l’effondrement
d’un immeuble…)

2- Les effets

On a tenté de considérer la responsabilité du fait des bâtiments comme en cas de


responsabilité fondée sur une présomption de faute à la charge du propriétaire. Mais la ruine peut
parvenir d’un vice de construction. La faute serait alors celle de l’architecte ou celle de
l’entrepreneur. Le propriétaire a un recours contre l’architecte ou l’entrepreneur fautif.

Le propriétaire peut s’exonérer dans les cas suivants :


- La faute de la victime supprime la responsabilité du propriétaire, par exemple, si la victime est
entrée sans autorisation dans la propriété d’autrui.
- Si la ruine du bâtiment est due à la force majeure (tremblement de terre…). En revanche, la
responsabilité subsiste, si le bâtiment ne s’est effondré que parce qu’il est vétuste, mal entretenu
ou mal construit.

b- Du fait des animaux

La responsabilité du fait des animaux est organisée par l’article 86 du DOC. Celui-ci précise
les conditions de mise en œuvre (1) ainsi que les causes d’exonération (2).

1- Conditions de mise en œuvre :


L’existence d’un animal : l’animal doit être susceptible d’appropriation (un chat, un
chien…) il s’agit des animaux domestiques, ce qui exclue les animaux sauvages.
Toutefois, les propriétaires de terrains où vivent des animaux sauvages doivent détruire
ceux qui sont en excédent parce qu’ils sont responsables des dommages qu’ils causent
à des tiers.
le gardien de l’animal : le responsable de l’animal est le propriétaire ou celui qui s’en
sert, que l’animal soit sous sa garde ou qu’il soit égaré ou échappé. Le gardien est celui
qui exerce un pouvoir effectif sur l’animal. Par exemple, si un chien est volé et cause
des problèmes, le voleur sera considéré comme le gardien. Le problème se pose lorsque
l’animal a été confié à un tiers (un vétérinaire par exemple).
2- Causes d’exonération :

Pour s’exonérer de la responsabilité, le gardien de l’animal doit prouver :


- Qu’il a pris toutes les précautions nécessaires pour l’empêcher ou pour le surveiller
- Ou que l’accident provient d’un cas fortuit ou de force majeure (la tempête effraie un chien qui
dans sa fuite, mord sérieusement un passant).
- Ou que l’accident est dû à la faute de la victime

Sous-section 3 : Le lien de causalité


L’exigence d’un rapport de causalité entre le fait générateur et le dommage constitue le
troisième terme de l’équation en matière de responsabilité extracontractuelle.

Il ne suffit, alors, pas, d’établir l’existence d’un fait générateur et d’un dommage pour que
la victime soit fondée à se prévaloir d’un droit à indemnisation.

Pour que naisse l’obligation de réparation, encore faut-il que soit établie l’existence d’une
relation de cause à effet entre la faute et le dommage.

Il s’agit plus précisément d’un rapport qui met aux prises deux éléments distincts : Le
dommage qui peut se présenter sous plusieurs formes et le fait générateur qui peut consister en
plusieurs sources de responsabilité.

L’exigence de ce lien causal puise sa source de toutes les dispositions régissant la


responsabilité civile extracontractuelle. Il en est ainsi de l’article 77 du DOC qui vise « le fait de
l’homme qui cause… ». Il en est de même de l’article 78 qui évoque le dommage que la faute de
chacun a causée. Il en est encore de l’article 85 du DOC qui prévoit dans le même esprit qu’on est
responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait mais encore de celui
qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre. C’est le même principe adopté à
l’article 85 bis du DOC. De leurs côtés, les dispositions des articles 86, 88 et 89 évoquent les
dommages causés par les choses dont on a la garde.

En empruntant l’analyse du doyen Carbonnier, le rapport de causalité peut être envisagé de


deux façons distinctes dans le procès en responsabilité. La victime du dommage tentera d’établir
l’existence d’un lien de causalité afin d’être indemnisée de son préjudice. Pour ce faire il lui
appartiendra d’identifier la cause du dommage et prouver le lien de causalité. L’auteur du
dommage s’emploiera à son tour à démontrer la rupture du lien de causalité afin de faire échec à
l’action en responsabilité dirigée contre lui.

Cela revient pour ce dernier à se prévaloir de causes d’exonération. Mais la détermination


d’un lien de causalité n’est pas souvent une tâche aisée, particulièrement dans les cas suivants :
lorsque plusieurs éléments ont concouru à la réalisation d’un seul dommage (§1), lorsque plusieurs
dommages sont causés par le même fait (le dommage réparable) (§2), en cas de pluralité de
responsables du même dommage (§3) et en cas de la rupture du lien de causalité par le défendeur
(§4).

§1- Pluralité de causes participant à la réalisation d’un seul dommage

Cette situation correspond au cas où plusieurs causes se sont rattachées au même dommage.
Ceci est notamment le cas de la personne qui a été blessée à la jambe suite à un accident de
circulation. Et comme l’ambulance a fait un retard, on la lui a amputée après avoir eu une infection.

Ceci est encore le cas de celui qui avait une pathologie cardiaque et comme il était victime
d’un coup de main de moyenne intensité, il est décédé. Or le coup n’aurait pas pu causer la mort à
une autre personne qui ne présente pas la même maladie. Se pose alors, la question de savoir la
cause du décès : la maladie ou le coup de main infligé à la victime.

Afin de répondre à ce problème, se sont développées deux théories : l’équivalence des


causes et la causalité adéquate.

Selon la théorie de l’équivalence des conditions, tous les faits qui ont concouru à la
production du dommage doivent être retenus, de manière équivalente, comme les causes juridiques
dudit dommage, sans qu’il y ait lieu de les distinguer, ni de les hiérarchiser.

Cette théorie repose sur l’idée que si l’un des faits à l’origine de la lésion n’était pas
survenu, le dommage ne se serait pas produit.

Aussi, cela justifie-t-il que tous les faits qui ont été nécessaires à la production du dommage
soient placés sur un pied d’égalité.
Certes la théorie de l’équivalence des conditions est, incontestablement, extrêmement
simple à mettre en œuvre, dans la mesure où il n’est point d’opérer de tri entre toutes les causes
qui ont concouru à la production du dommage

Tous les maillons de la chaîne de responsabilité sont mis sur le même plan.

Toutefois, l’application de la théorie de l’équivalence des conditions est susceptible de


conduire à retenir des causes très lointaines du dommage dès lors que, sans leur survenance, le
dommage ne se serait pas produit, peu importe leur degré d’implication.

Comme le relève Le professeur Patrice Jourdain, il y a donc un risque, en retenant cette


théorie de contraindre le juge à remonter la « causalité de l’Univers».

Par ailleurs, selon la théorie de la causalité adéquate, tous les faits qui ont concouru à la
production du dommage ne sont pas des causes juridiques. Tous ne sont pas placés sur un pied
d’égalité, dans la mesure où chacun possède un degré d’implication différent dans la survenance
du dommage.

Aussi, seule la cause prépondérante doit être retenue comme fait générateur de
responsabilité.

Il s’agit, en d’autres termes, pour le juge de sélectionner, parmi la multitude de causes qui
se présentent à lui, celle qui a joué un rôle majeur dans la réalisation du préjudice.

En ne retenant comme fait générateur de responsabilité que la cause « adéquate », cela


permet de dispenser le juge de remonter à l’infini la chaîne de la causalité

S’agissant de la position du législateur marocain, il retient la cause directe qui s’apparente


à la causalité adéquate, en application des dispositions des articles 77 et 78 du DOC.

Ceci dit la cause retenue au niveau du premier exemple est l’accident du fait qu’une
expertise médicale a démontré que le retard de l’ambulance n’avait aucun rôle dans l’infection.
Pour le deuxième exemple c’est la maladie cardiaque puisque le coup de main ne pourrait causer
le décès à une autre personne normale. Les causes subsidiaires sont alors écartées.

§2- Pluralité des dommages causés par le même fait

Cette situation correspond à celle du dirigeant d’une société décédée à cause d’un accident,
ce qui a causé la liquidation judiciaire de la société suite à son incapacité de continuer
l’exploitation, exigé le licenciement des salariés et impacté défavorablement sur les autres sociétés
ayant habitué à opérer des transactions commerciales avec elle.

Le dommage réparable est également, celui directement causé conformément aux articles
77 et 78 du DOC. L’opinion dominante en doctrine admet que le dommage direct est celui réputé
représentant la conséquence normale de la faute. En application de cette solution à l’exemple
susmentionné, le dommage réparable demeure le décès du dirigeant de la société considéré comme
le résultat normal de l’accident.

Le responsable ne sera donc pas responsable de la liquidation de la société, le licenciement


ainsi les dommages subis par les sociétés partenaires, dans la mesure que ces dommages ne sont
pas directs.

§3- Pluralité des responsables d’un seul dommage

Dans certains cas, plusieurs personnes participent à causer le dommage à autrui. Il serait
ainsi difficile de déterminer le responsable du dommage. Ceci est notamment le cas d’un groupe
de chasseurs qui ont tiré en même temps sur un objectif commun, ce qui a causé des blessures à
un passager. Ceci est également le cas des enfants qui causent, en jouant sur la voie publique, le
bris de glace d’une voiture ou d’une vitrine d’un magasin commercial.

Comment, dans ces situations, la victime peut-elle obtenir la réparation du dommage


qu’elle a subie, sachant qu’il est impossible de déterminer la proportion de chacun dans la
réalisation du dommage.

En vertu des articles 99 et 100 du DOC, la responsabilité serait solidaire en cas de pluralité
des responsables du même dommage alors qu’il était impossible de déterminer l’auteur principal
ou la proportion de la contribution de chacun à causer le dommage.

Se pose également en ce sens, le problème relatif à l’impossibilité d’identifier le


responsable du dommage en cas de la fuite d’un automobiliste responsable d’un accident de
circulation. Afin d’assurer la réparation de la victime lorsque l’identification du responsable est
impossible, le législateur marocain a, mis en place le fond de garantie des accidents de circulation.

§4- Cas de rupture du rapport causal entre la faute et le dommage

Le lien de causalité entre la faute et le dommage peut être mis en échec par le défendeur
(le responsable du dommage) s’il prouve l’existence d’une cause étrangère extérieure de sa volonté
et qu’il ne pouvait ni le prévoir ni le surmonter. Cette cause étrangère peut consister soit dans la
force majeure ou le cas fortuit soit dans l’état de nécessité et la légitime défense. Elle peut
également être constituée par la faute de la victime ou la faute du tiers.

Comme la force majeure ou le cas fortuit ainsi que l’état de nécessité et la légitime défense
ont été précédemment analysés, on se contentera d’étudier la faute de la victime (A), et la faute du
tiers (B).

La faute de la victime

Parmi les causes d’exonération de la responsabilité, on trouve la faute de la victime. Cette


faute peut conduire à une exonération totale (I) ou partielle (II) du défendeur comme elle ne peut
avoir aucune influence sur sa responsabilité (III).

Exonération totale de responsabilité à cause d’une faute de la victime

Cette situation correspond au cas où la victime a commis une faute intentionnelle qui
éradique la simple négligence du défendeur. Ceci est notamment l’exemple de la personne qui se
jette, avec l’intention de se suicider, sous les roues d’un véhicule qui roule avec une vitesse
excessive.

Dans cette hypothèse, la faute de la victime a pour effet de faire obstacle à la naissance de
l’obligation de réparation, dans la mesure où le lien de causalité est totalement rompu. La faute
intentionnelle de la victime a, ainsi, entrainé une rupture du lien de causalité entre la faute du
défendeur et le dommage. L’auteur du dommage est alors, pleinement exonéré de sa
responsabilité.

Exonération partielle de responsabilité à cause d’une faute de la victime


Dans certaines situations, la faute du défendeur et celle de la victime contribuent dans la
survenance du dommage sans que l’une puisse assimiler l’autre et par conséquent la rendre sans
aucun effet sur la responsabilité.

Le dommage est, donc, causé d’une faute partagée entre le défendeur et la victime. Ceci
est le cas de l’automobiliste qui conduit sa voiture avec excès de vitesse pendant la nuit et renverse
un cycliste qui emprunte la même direction, sans doter son vélo d’un éclairage ou d’éléments
réfléchissants.

En présence d’un cas pareil, la responsabilité est partagée entre le défendeur


(l’automobiliste) et la victime (le cycliste), au prorata de la participation de la faute de chacun à la
réalisation du dommage. La juridiction de fond est compétente en matière de fixation des
proportions de responsabilité, qui dispose d’un pouvoir discrétionnaire qui échappe au contrôle de
la cour de cassation.

Absence d’exonération en présence d’une faute de la victime

Lorsque la faute de la victime ne constitue qu’une simple imprudence alors que le


défendeur a commis un faute intentionnelle lui faisant échec, l’auteur du dommage serait infondé
à s’exonérer de sa responsabilité même partiellement.

Ceci est le cas par exemple de l’automobiliste qui profite de l’occasion que son adversaire
marche anormalement sur la voie public alors qu’il était en état d’ivresse manifeste pour le
renverser et lui donner la mort.

La responsabilité du défendeur est également pleinement engagée lorsque la faute de la


victime n’est que la conséquence de sa faute. C’est le cas de l’automobiliste qui, accompagné de
son ami, a, après avoir aperçu les agents de la sureté nationale, accéléré pour ne pas être arrêté
pour port de stupéfiants. Terrifié, son ami a sauté de la voiture subissant ainsi des blessures graves.

La faute du tiers

Un tiers peut avoir concouru à la production du dommage, de sorte que s’il n’était pas
intervenu, aucun fait illicite n’aurait pu être imputé au défendeur.
Le mot tiers désigne toute personne n’étant ni la victime ni le défendeur ni également les
personnes dont ce dernier en doit répondre (les enfants mineurs habitant avec lui, les insensés ou
ses préposés…).

La faute du tiers produit les mêmes effets, que la faute de la victime, sur la responsabilité
du prétendu responsable. Elle peut l’exonérer (I) ou partiellement (II) comme elle ne peut avoir
aucune conséquence sur sa responsabilité (III).

Exonération totale de responsabilité à cause de la faute d’un tiers

Lorsqu’il émane d’un tiers une faute dont la gravité l’emporte sur celle commise par le
défendeur, celui-ci est exonéré totalement de la responsabilité, qui doit être assumée, ainsi, par le
tiers.

Ceci est l’exemple de l’automobiliste qui roule avec une vitesse excessive, alors qu’un tiers
en profite pour pousser son adversaire avec l’intention de lui donner la mort. La faute du tiers est
alors une faute intentionnelle qui fait échec à celle du conducteur et partant produit son exonération
totale de responsabilité.

Exonération partielle de responsabilité à cause de la faute d’un tiers

Le concours entre la faute d’un tiers et celle du prétendu responsable, sans que la gravité
de la faute de l’un fait échec à celle de l’autre, entraine le partage de responsabilité à concurrence
de la proportion de leur contribution dans la réalisation du dommage. Le défendeur est donc
partiellement responsable.

Ceci est l’exemple de l’automobiliste (le tiers) qui, en s’opposant pendant la nuit avec un
autre automobiliste (le défendeur), ne procède pas au changement de l’éclairage très fort, le
poussant à renverser un cycliste roulant devant lui.

Par ailleurs, en cas de pluralité des responsables ayant concouru à la réalisation du


dommage, ils répondent solidairement de la réparation dudit dommage conformément à l’article
99 du DOC.
Absence d’exonération en présence de la faute d’un tiers

Dans certaines situations, la faute d’un tiers ne produit aucun effet sur la responsabilité du
défendeur. Il en est ainsi lorsque la faute du tiers n’était pas en mesure de rompre le rapport causal
entre la faute du défendeur et le dommage.

Le défendeur ne peux s’exonérer ni totalement ni partiellement de la responsabilité. Il sera


tenu de la réparation intégrale du dommage.

Section 2 : Les effets de la responsabilité extracontractuelle

Lorsque toutes les conditions sont réunies à savoir, la faute, le dommage et le lien de
causalité, la responsabilité extracontractuelle peut être mise en œuvre et donne lieu à réparation
(sous-section 2).

Les parties peuvent se mettre d’accord à l’amiable pour trouver une solution au litige sans
l’intervention du juge. Elles peuvent également s’adresser aux tribunaux pour faire valoir leurs
droits et avoir recours à la solution contentieuse (sous-section 1).

Sous-section 1 : L’action en réparation

Il s’agit d’examiner les parties à l’action en responsabilité (§1), la juridiction compétente


(§2) avant d’aborder le délai de prescription de l’action en responsabilité extracontractuelle (§3).

§1- Les parties à l’action en responsabilité extracontractuelle

L’action en responsabilité implique deux personnes : le demandeur (A) et le défendeur (B).

A- Le demandeur

L’action en responsabilité extracontractuelle est introduite devant les tribunaux civils par
le demandeur, c’est-à-dire par la victime du dommage, celui qui a subi le préjudice. Le demandeur
doit avoir un intérêt personnel et certain à agir en application de la règle « pas d’intérêt pas
d’action ».

Le demandeur peut être une personne physique (la victime directe, son représentant, la
victime par ricochet, les héritiers de la victime, ses créanciers). Il peut aussi être une personne
morale. (Association, syndicat…).
Lorsque le demandeur est un mineur âgé de moins de douze (12) ans, l’action est exercée
par son représentant légal.

Si le préjudice a causé le décès de la victime, ses héritiers pourront agir en réparation du


préjudice subi, qu’il soit matériel ou moral4.

S’il y a plusieurs victimes, chacune d’elles peut assigner le défendeur devant les tribunaux 5.

B- Le défendeur

Le défendeur est celui qui a causé le dommage et qui est tenu de le réparer, que ce dommage
soit causé par son fait personnel, par le fait d’autrui ou par les choses dont il a la garde.

Comme le demandeur, le défendeur peut être une personne physique ou une personne
morale. En cas de décès du responsable avant l’obtention de la réparation, l’action est intentée à
l’encontre des héritiers. Il n’y aura pas lieu d’héritage qu’après le paiement du passif, sans recourir,
toutefois aux patrimoines personnels des héritiers.

§2 - La juridiction compétente

Afin de déterminer la juridiction compétente de connaitre de l’action en responsabilité


extracontractuelle, il est lieu de distinguer entre la compétence d’attribution (A) et la compétence
territoriale (B).

A- La compétence d’attribution

Les juridictions compétentes diffèrent selon l'auteur du dommage est dans certains cas
selon la nature du préjudice ou selon le montant de la demande.

D'une manière générale, la compétence de connaître des actions en réparation en matière


de responsabilité extracontractuelle relève des juridictions de droit commun. C'est ainsi que les
sections de justice de proximité, qui ont remplacé les tribunaux communaux et d'arrondissement,
sont compétentes pour connaître des actions en réparation dans le montant n'excède pas 5000
dirhams.

Lorsque le montant de réparation dépasse 5000 dirhams, la compétence relève en principe


du tribunal de première instance.

4
Sous réserve des développements accomplis lors de la conférence en présentiel.
5
Egalement, veuillez-vous y référez à la conférence en mode présentiel.
En effet, les tribunaux de première instance sont compétents en premier et dernier ressort
à concurrence du montant de vingt mille dirhams (20.000 dhs), et en premier ressort à charge
d'appel auprès des cours d'appel pour toutes les demandes qui dépassent vingt mille dirhams.

Les tribunaux de première instance demeurent compétents pour statuer sur les actions
relatives aux accidents de circulation même si l’une des parties est commerçant6.

La compétence des tribunaux de première instance s’étend également aux dommages


causés sur la voie publique par un véhicule quelconque appartenant à une personne publique. Et
ce exceptionnellement de la compétence des tribunaux administratifs7.

Sont exclues de la compétence des tribunaux de première instance, toutes les actions en
réparation relevant des juridictions spécialisées.

En effet, les tribunaux administratifs sont compétents pour connaitre des actions en
réparation des dommages causés par les actes ou les activités des personnes publiques comme les
fautes de service des agents de l'Etat et des municipalités et établissements publics dans le cadre
de l'article 79 du DOC. Or les dommage causés en cas de faute lourde ou de dol dans l’exercice de
leurs fonctions relèvent de la compétence des juridictions de première instance, sauf en cas
d’insolvabilité de l’agent ou la responsabilité incombe à l’Etat en raison de sa solvabilité.

Par ailleurs, les tribunaux de commerce sont compétents de connaître des actions en
responsabilité extracontractuelle dont le montant dépasse vingt mille dirhams (20.000 dhs) 8
lorsqu’elles s'inscrivent dans le cadre de domaines de compétence de ces juridictions
conformément à l'article 5 de la loi 53.95 institutions instituant les tribunaux de commerce.

B- La compétence territoriale

Concernant la juridiction territorialement compétente pour connaître des actions en


réparation du dommage causé par le fait illicite, la victime peut exercer l'action en réparation soit
auprès de la juridiction dans le ressort duquel se trouve le domicile du défendeur ou dans le ressort
duquel s’est réalisé le fait dommageable.

§3- La prescription

6
Alinéa 7 de l’article 5 de la loi 53.95 instituant les tribunaux de commerce.
7
Alinéa 1 de l’article 8 de la loi 41.90 instituant les juridictions administratives.
8
Article 6 de la loi 53.95.
Aux termes de l'article 106 du DOC, l'action en réparation se prescrit par cinq (5) ans à
partir du moment où la victime a pris connaissance du dommage et de celui qui est tenu dont
répondre et se prescrit dans tous les cas par vingt (20) ans à partir du moment où le dommage a eu
lieu.

Ce principe connait quelques exceptions. Par exemple l'action en réparation contre l'Etat
qui se substitue aux instituteurs des établissements publics et aux fonctionnaires de la jeunesse du
sport pour les dommages causés par leurs élèves se prescrit par 3 ans, conformément à l’article 85
bis du DOC.

Sous-section 2 : La réparation du préjudice

La réparation tend à compenser le dommage. Lorsque les conditions de la responsabilité


extracontractuelle sont réunies une obligation de réparer la victime du préjudice qu'il a subie
incombe à celui déclaré responsable. C'est ce qui ressort de l'article 77 du DOC.

En ce sens, on abordera les modalités de réparation (§1) avant d'examiner l'évaluation du


montant de la réparation (§2).

§1- Modalités de réparation

En fonction de sa nature la réparation peut-être en nature (A) ou par équivalent (B).

A- La réparation en nature

La réparation en nature vise à remettre la victime en l'état où elle se trouvait avant la


survenance du dommage dont elle a été l'objet. Ceci est notamment le cas de la destruction d'un
mur construit par le responsable sur les terres d'autrui ou sur une terre qui lui appartient mais il
s'est abusé dans l'exercice de son droit.

En matière extracontractuelle la réparation en nature constitue l'exception, elle ne


s'applique qu’exceptionnellement et rarement comme le cas de figure susmentionné.

En revanche en matière de responsabilité contractuelle la réparation en nature est le


principe. Le recours à la réparation par équivalent ne peut se faire que lorsque la réparation en
nature s’avère impossible9.

9
Voir à ce sujet les articles 259 et 261 du DOC.
B- La réparation par équivalent

On peut distinguer dans le cadre de la réparation par équivalent entre la réparation


pécuniaire (I) et la réparation non pécuniaire (II).

I- La Réparation pécuniaire

Ce mode de réparation est le plus appliqué en matière de responsabilité civile


extracontractuelle étant donné les nombreux avantages qu’il présente, en l'occurrence sa force
libératoire absolue, sa souplesse sa simplicité ainsi que la possibilité pour la victime de l'affecter
comme bon lui semble.

La réparation par équivalent pécuniaire peut être allouée sous forme d'une rente dans le
versement sèche-linge dans le temps ou d'un capital versé en une seule fois ou encore par des
versements périodiques au profit des héritiers de la victime en cas de décès

II- La réparation non pécuniaire

La réparation non pécuniaire consiste à obliger le responsable du dommage de le réparer


ni par nature ni sous forme de paiement d'une somme d'argent.

On fait recours à la réparation non pécuniaire lorsqu'il est impossible de procéder à la


réparation par nature ou la réparation pécuniaire. Ceci est notamment le cas du jugement rendu en
matière d’insultes et injures et qui condamne le défendeur de le publier à sa charge comme une
réparation non pécuniaire du dommage subi par la victime.

Soulignons encore que ce type de réparation est largement contesté par la doctrine dans la
mesure où sa mise en place ne comporte aucun intérêt pratique. En fonction de son objet, la
réparation ne peut être qu’en nature ou par équivalent pécuniaire.

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