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N° 43 - 7" ANNÉE - AOUT-SEPTEMBRE 63

YIN YANG .!4 ]Ide de 1J~e

c Pourtant le lynx vit en paix avec le lynx ...


et les dauph ins se protègent les uns les autres .•• • Erasme.

Querela Pacis Qu'est-ce que Une vieille


d'Era sme la justice histoire...
{suite I l l
(texte intégral)
de C. Ohsawa par Neven H enaff

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Institut de Philosophie
et de Science d'Extrême-Orient
CENTRE IGNORAMUS
8, Rue Lamartine - Tél. : LAM 54-.31 - PARIS 9e
C. C. P. PARIS 15998.91
-- YIN-YANG --

YIN-YANG
Rédaction : G. MASSAT

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-- YIN-YANG -

A la suite des extra.l.ts de Qv.erel Pacis d'Erasme que nous avons publiéS
dans les numéros d:'aNI'il et de mai, quelques lecteurs, dont les arguments
nous ont convaincus, nom ont demandé de putiller dans Yin,.Yang le texte
intégral de cetl ouvra;ge qui, pour être le moioo connu diu grand humaniste
n'en reste pas moins le ,p lus important.

DÉCRIÉE ET CHASSÉE

DE TOUS COTÉS ET

PAR TOUTES LES NATIONS,

ÉCOUTEZ ...

Les plaintes de la paix


par Erasme de Rotterdam

Mais, qui est Erasme ?

Erasme naquit à. Rottlerdam en octobl"e 11466. n s 'appela.l.,t en réalité


Gérhard ; vers l'âge de 14 ans, à la manière des savants de la Renaissance,
U changea de nom et choisit de s'appeler Erasmus, C'es!rà.-dire, en grec, celui
qu'on aime, celui qu'on désire. n fit ses études dans les austères courventJS
de Rotterdam chez les fr,ères de la vie commune ; mais bientôt 11 s'exas--
père des théologiens qui ont ;perdu l'esprit créateur de leurs aînés et déjà,
soi-<liisant « indociles, frondeUII', maurvais esprllts », 11 prépare les invectives
que 1'on retrouvera dans l'Eloge de :r:a Folie.

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YIN-YANG

A l 'âge de 29 ans il arrive à Paris, pauvre, besogneux, i1 logo nu collège


Montaigu, ~a noumture est infecte, ll!< SonlJonne .1e dléçoH, raJpJd.cment 11
souffre d!e maux d'estomac et, persuadé d'a/Voir la peste, il s 'enJ<:rme dans
sa ohaimbre, jeune, et écrit en attendant la mo~t. Au .b out de quelqu es semai-
nes, il s'étonne non seulement dJ'ê~re viva:Diti mais encore guéri, il vient de
découvrtr lllo chose la plus inJiPortamite, la frugalité ; frugal H Je restera rboute
sa vie et ses publica.tions commencent à ~e fail'e connaître , son esprit ses
vues, ses idées cir culent dans toute l'Europe, de plus J'humaniste voyage, 11
rencont-re les eo,urit les plus audacieux de son temps. 'I1homas More, enltre
autres, qui publiera l'Utopie. De rtoute part, les grands l'invitent, lui deman-
dent conseil, c'est la gloire . En janvier 1'516 il publie Querela Pacis, il a 50
ans, l'âge où l'on rassemble toute sa puissance, où l'on fait le point, il veut
~out rd:ire, il le fait, mais sa voix passe au-dessus des •liêtes ... Aujourd'hui
encore les commentateurs de la Quere~a Pacis sont rares: et semblent n'atta-
Cher à cette œuvre qu'un intérêt historique, d 'aileurs trè& mince, ii s'obtlne
à ne voir que ce qui dépein~ le XVI• siècle en làissant scrupuleusement de
côté les valeurs éternelles ; c'est ainsi, l'homme a réservé toujours un mau-
vais sort aux idées absolues, il en est· de même de la paix comme de la justice,
on bande les yeux de celle-ci et on clhasse celle-là ...
-Qu'est-<ce que la paix selon Emsme ?
Depuis les' .a nimaux, les plantes, j u~Squ' aux « sp!l.ères célestes » tou~ est
poussé, porbé soubenu par la paix, lllo natme partout nous enseigne la paix,
« les éléphants vivent en troupeaux, les br~ebis paissent en .commun », à tra-
vers toutes leS! ef','PèCeS, à rtravers eha;que mentalité la paix s'exprime d'une
façon toujours p lus :bell.e, plus profonde, plus vaste, « la nroture n'a pas
accordé à tous les mêmes dons, elle les a répar.tis d'une maniè.Jie égale, afin
que eet~e .inégalité salit /Compensée par cles se,11vilces .f,éciproques ,.. elle a
fournJI aux aniTfU],UX des armes naturelles de défense afin qu'ils puissemt veiller(
à leur sécurité, eUe a créé un "Seul animall, l'homme, 1sans armes, faible, afin
qu'il ne pût assur•e,r sa sécurité qwe pa,r, l'uniJon aveo ses semiJZ.abZes et pa~
une .r éciproque ass·iJs.t ance .. , »

La paix trave11se tous les stades de jugements jusqu'à ee qu'elle atteigne


le plus 'haut, le plus grand, qu'elle puisse s'eXjpandre dans l'ürlini., « ... rendant
pai là évidente lOJ vérité que ces deux choses sont à ce point solidaires, que
la paix ne peut exislter s'ans Dieu e1t qwe Dieu ne peut se .trouver où la paix
est! absente ».
Et quelles sont Ies oaUI'l'es de :la guerre selon Erasme ?
Ge sont' la colère, la sottise, l'aJmbi't~on, l'avidi'té, en un mot la Peur.
L'arme est symptome de peur, la peur est sy.J:IJJI)tome die guerre. Alors il est
facile de juger tous ces, petiUs pays1qui pensent que la meilleure façon d'avoir
la paix réside dans la possibilité de « ri.pos;t er efficacement », et ils parlent
d'1li!Îité et d'alliance jusqu'au momenJt où il& &'aperçoivent que c'est la multi-
plication des forees nucléaires nationl!<les et multinationaàes qui détrui·t la
cohésion de leur fameuse Alliance, S'ape tout principe d'inter-dépendanee et
dresse die nouveaux obstacles sur· la voie .d' un acco11d de désarmement ... Mais
c'eslJ assez discouru écoutons plutôt la. Paix qui parle :

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- YIN-YANG -

Les plaintes de la paix


(Querela pacis)
Erasme

Si les mortels, malgré mon innocence et les avoantages que je leur offre,
me haïssent, me chassent et mc décriellJt, H ne me reste rplus qu'à déplorer
l'affront qu'rils me font ct Jeur iniquit·é. En m·e re:poussant ·d e la sorte, moi,
qui suis la source de toutes les félicités d'ici"bas, ils attirent sm· eux-mêmes,
le rd ébordmnent des pires malheurs : aussi, ne faut-il .p as ,plutôt déplorer leur
sort que I'outrage qu'ils me font ? (~uelque naturcJ.Ic que. soit ma disposition à
leur en vouloir, je suis forcée d'avoir quand même de la collllpassion pour
eux et de plaindre l'ironie de 'leur sort. En effet, si inhumain qu'il -soit de
r ·e pouss·e r ~ celui qui, d'une manière quelconque, ~vous prouve son dévoue;ment,
il est encore p lus ingrat de dédaigner celui qui mérite d'ètre comblé de
récomrpenses. C'est un sacrilège de ma-ltraiter la bienfaitrice -et la conservatri,ce
de toutes les ·bonnes choses ici-bas. Mais, à vrai dire, cette ,p ersévérance 'à être
jaloux de son :propre sort, à ne pas r ·econnaître la supériorité des aJvantages
que j'apporte av·e c moi -et à attirer sur -soi Jes pires maux qui déchirent ~e
monde, ne semrb le-t-eHe rpas 1]c comble de ,Ja démence ? U est naturel et juste
de méprtiser et de châtier les scélérats ; mais il ne nous reste qu'à 1]1 laindre
ceux qui sont possédés par la rage. Us sont d'autant P·lu-s à plaindre qu'ils ne
s'aJperçoivent pas qu'i~s sont eux-mêmes J'instrument d·e .l eur malheur ·Ct que
rien au monde ne peut J.e ur faire mesurer la grandeur de Œeur ·f olie.

Si je suis, ·en réalité, cette ,paix tant vantée par les hommes, la source,
la mère, la conservatri.ce et la protectrice de toutes les bonnes choses que
possèdent le ciel ·et Ia terre ; si hors de moi, aucune .p rospérité n'est ti'Ci-ba,s
durable ; si rien de 1pur, den de saint, rien qui soit a,gréable ne peut s'étaiblir ;
si par contre, la guerre est sans contredit, ~a cause .ess·entielrle d1e tous les
désastres qui a.rrivent dans Je monde, et si ce fléau >flétrit brusquement tout
ce qui fleurit ; si grâce à elle, tout ce qui avait grandi et mûri, s'écroule et
tombe en ruine ; si elle ébranle tout ce qui se s outient au prix des plus
pénibles efforts ; si elle détruit les 'choses les mieux étalblies ; si die empoisonne
tout c.e qui ·e st honnête et agréable ; en un mot, si crUe e-st aibominalb.le au
point d e détruire toute vertu dans le .c œur des ihommes e.t que rien ne leur
soit plus funeste en même temps que plus désagréa-ble : j~e vous demande
quel est celw qui ,peut croire sans peine, que ceux qui ria provoquent sont
DES HOMMES et qu'ils jouissent sri peu que ce soit ·des Jumièil'es de la raison,
quand on Jes voit s'employer avec tant de volonté, d'a.rdeur, d'·e tforts, d'artific.e
et 1de danger à me bannir et à pay·er si cher t~ant de soucis et de malheurs.

Si les bêtes f·é roc·es me ·h aïssent de cette manière, je l·e supporterais avec
rési,g nation et j,e passerais rl'injure au comrpte de la natur.e qui leur a infligé

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YIN-YANG

cc caractère violent. S i j'étais h a ï ;par les anmn.aux .p nvcs d e .raiso n , j 'attri-


buerais leur h a ine .à leur ignor ance, me disant qu'i,l s s ont trOJl d épour·vus
d 'intelligence, pout· mes urer les avantages que je Jeur o!Irc. Ma,is .h élas
0 maLheur indigne ct monstrueux ! .L a nature a créé un seul anima l, :l'homme,
qui soit doué de raison, un seul qui soit capaibJe de concevoir d es idées gran-
dioses. 'Elle ~·a rendu lui seul sensible .à la bienveillance et à Ja c oncord·e et
cependant, je trouve plus vite un asile chez les bêtes féroces que cJ1ez l es
hommes.

Les sphères célestes, bien qu'elles n'aient ni Je même mouvement, ni les


mêmes fonctions, présentent néanmoins dans ·I eur ensem,ble, depulis tant de
siècles, une harmonie in'ébranlable. La for·c e des éléments en lutte ~es uns
contre les autres, les maintient quand même dans un équilibre constant au
milieu de tant de désaccords. Un accord permanent n'existe-t-il pas entre loo
membr es d'un cor,ps animé ? QuelJ·e tendance fidèle d e se protéger les uns les
a u tres ! Y a -t-il quelque c hose d e plus dissemblaJWe que 'l e cor,p s et l'âme '!
Pourtant, l'effe t de Icur séparation bisse voi r à quel point la nature les a
étroitement liés l'un à !'.autre. 'De m ême que .Ja vic n 'est autre chose que
J'u n ion du C011J1S -e t d e l'âme, de m ·ê mc la sa nté n'est que 'l ' état résultant
d ' une harmonie entre tout es les fonctions de J'organisme. 1L cs anim a ux dépour-
vus de r·étlexion s vivent en .bonne intelli gcnec, .c omme ils convient à des citoyens
paisibles, groupés chacun suivant son espèce. Les élé}1hants vivent en trou-
peaux, les b rübis ,p aissent l'herbe -e n commun ; 'C'est en compagnie encore que
volent les grues et l es .g eais. Les cigognes qui e nseignent la piété et la !bonté
tiennent leurs conseils. ,L es dauphins se protègen t les uns et les autres, se
rendant mutuellement des .s ervices. Quan t aux fourmis et aux abeilles, l'orga-
nisation et b :bonne intelli.g ·ence qui règnent chez les insectes sont connues
de tous. Mais pourquoi insister sur ces .animaux qui, pri·v ês de raison, jouissent
au moins de leurs sens : d a ns les ar.b.res, dans les ·lwr<bes, on trouve les traces
d·e l'ami-tié. 'L a vigne ell1Jbrasse l'ormeau ; le pêcher ai·me la vigne. Les choses
même qui sont :insensibies ·s emblent éprouv·er le ,b ienfait de la paix. Si eUes
n'ont pas .Ja faculté de sentir, elles ont quand m ême -- et cela pour la raison
qu'elles ont une durée - des affinités avec tout ce qui sent. Quelle -est la
chose qui soit plus insensible qu'une picr.rc ? On dirait to utefois qu'elle ren-
ferme l'idée de .p aix et d'harmonie ! Ainsi, l 'aiJinant attil'e 'l e fer et ·]le retient.

Cette faculté d'attirer à soi se manifeste aussi parmi ·les lbêtes sauvages..
Les 'lions, quelque f.éroces qu'ils soient, ne comba ttent jamais entre eux. Le
sanglier n'attaque jamais un autre sangHer de sa dent meurtrière. Le lynx
vit en paix avec le lynx. Quant à la .b onne inteYigcncc d es loups, cHe est
passée en ,prover.b e. (.J'ajouterai ce qui sur,p rend encore plus : les mauvais
génies qui ont les premiers rOlllipu ~a paix entre 'Di eu et les hommes e t qui
n'ont pas cessé de poursuivre leur œuvre de destruc tion, sont unis ·e ntr·e eux
et toujours d'accord ,pour la protéger). Seuls les homm es qui devraient être
le plus enclins à l'union et auxquels elle est si nécessaire, demeurent sourds
à la voix de ·l a nature, si sensible et si efficace par aiJ:Ieurs. 'L es conseils ne
peuvent les unir ; le ,g rand avantage qui résulterai·t de 'leur entente ne leur dit
rien et ne peut 1les attacher Jes uns aux autres. ·L e sentiment des mallheurs
qui résultent de la guerre et b triste c~érience qu' Ils en font est sans illltluence
sur eux.

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YI N- YANG

Par tous les moyens;


la nature nous enseigne la concorde
Cependant, tout semble fait rpoui: les invi·t er à la concorde : leur aspect
qui est commun à .t ous ; la voix qui ·est le 1d on 1d:e chacun, tandis que les
a utres es.p èces d'animaux ditfèrent entre ·e lles selon Ja forme de leur cor,p s.
Plus .encore, les hommes seuls jouissent de la facuUé de raisonner qui est
propre à chacun ; Jl s n'ont rien de commun .avec l es autres animaux. Seul
l'h(}mme jouit du don de la ·p arole qui est la grande collciliatrice de l'anùtié.
La nature a pJ,acé •e ncore en chacun de nous ,Je germe de la vertu et de t outes
les connaissances ; elle a doué l es individus d'un caractère tendre et doux
qui les porte à Ja bienveiJ.I ance enver s leur prochain c t leur promet de jouir
du charme de se faire a imer et du plaisir de sc rendre utiJ.es les uns a ux
autres, à moins que, .corrom,p us par les pires .p assions, ils ne dégénèrent comme
les 'Victimes de Circé et ne deviennent ·d es 'b êtes féroces . C'est semble-t-il, par
une conséquence de la nature d e l'homme, que nous appelons communément
humain, tout ce qui s'a:ppiique à la bienveillance que .Jes individus exercent les
uns envers Jes a utres ; s i ·b ien que 1le terme 'd 'humanité ne nous révèle pas la
nature, mais les mœurs de l'homme, dignes de la nature. Enfin, Ja nature
lui a accordé 'l es •].armes qui sont une preuve incontestable de sa sensibilité :
elles nous portent à ,p ardonner et à oublier les offenses qui 'p euvent nous
atteindre ct qui obscurcissent comme d'un voile la sérénité de ·l 'aJlllitié.
Qu'on reconn a isse donc par con1,bien d·c moyens la nature nous a enseigné
la concorde . .J>ourtant, elJc ne s'cs·t p<lS contentée de rendr·e l' aJlllitié agréable
uniqu ement p-ar J.e charme d'une ·b i·cnveillancc mutuel'le, elle a voulu que ce
sentiment nous fût ·é ga.lement nécessaire. C 'est pourquoi elle a fait .e n sorte
que par leur nature p.r opr·e et par leurs facultés, le cor-ps ct l'esprit de J'homme
ne puissent se ,passer du secours des auti·es hommes, quelque humbles qu'ils
soient. La nature n'a .pas a.ccord.é à tous les m êmes dons et ne les a pas
r épartis d 'une manière éig:a'le, afin que cette inéga'lité fût compensée par des
ser.v ices réci•p roques. Elle n'a pas doté les div·erses régions des mêmes produits,
afin. que la nécessité obLigeât ,Jes hommes au comnterce qui l·es ·e ntraîne ainsi
à l'amitié les uns pour l es autres . Cette même nature a fourni aux autres
animaux des armes naturelles d e défense, a fin qu'ils puissent vei.JJer à leur
sécurité ; elle a créé un seul anÏ!Inal, l 'ho!nmc, sans arm·es et faible, afin qu'il
ne pût assurer s•a sécurité que rpar ,J' union avec ses scmblaibles c t par une
réciproque assistance.
lJa nécessité a créé les sociétés : elle a appris aux hommes à s'unir pour
veiller à 1leur défense commune contre les ·b rigands ou cont re toutes les Lforces
qu i les attaquent. ·L es circonstances et ,J es condHions de la vie sont telles que
l'homme ne peut jamais se suffir.c à 'lui.même. Le genre humain aurait, péri
dès son commencement, si l ' union conjugale n',avait pas propagé son espêc•e.
A peine l'h omme est-4.J né qu ' il ·e st près de quitter la vie ; il la .p erdrait a u
seuil même de son existenc-e, si Ja main habiJe d es sages-femmes et l es soins
tendres d e la nourrice ne v·enaient à son secours. La nature semble avoir semé
dans le cœur des ·p ar.e nts cette étincelle ,p uissante et intense de tendresse qui

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YIN-YANG -

t( • • • enfin , la nai11re lu i a accordr; les larmes

qui son ! une preuve incontestable de sa sensibilité . . . »

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YIN-YANG

fait qu'ils aiment 'leurs enfants avant même qu'ils naissent. Considérons aussi
la tendresse des enfants pour les parents dont les infirmités et l'âge sont aUégés
par les soins qu'•â leur tour i·ls ~eur donnent. Ajoutons enfin à tout cela les
liens de la parenté et de J'aJmitié. Il existe, en effet, entre certains hommes
des af·f inités dûes à la conforunité de leur nature, de :leurs t:dents, et de leurs
occupations : elles poussent à la bienveillance mutue~Ie. Beaucoup subissent
l'empire d'un s·e ntimcnt secret de l'âme qui les entraîne vers une sympathie
rédproque. Les anciens attribuaient ce sentiment à la puissa-nce divine et aux
bons génies qui invitent les hommes à s'lliimer entre ·eux.
Donc, de toutes les manières, la nature enseigne la paix et la concorde : tant
de charmes nous engagent à les aimer ; tant de liens, tant de raisons nous
invitent à les conserver ! Qu'on nous dise après tout cela quel est le démon
capable de nuire, qui brisant, ronl;Pant ou divisant tout, crée dans le cœur des
hommes, cette rage insatiable de la guerre ? Sans l'habitude et l'indolence qui
font disparaître notre étonnement ct même la conscience du ma-I, qui. pourrait
croire que ces hommes qui se disputent, qui se querellent, qui combattent
avec tant d'acharnement jouissent de la raison ? Ils piHent, tuent, répandent
à flots le sang humain, lboulev·e rsant tout, Je sa<ré et le ·p rotfane. Il n'y a pas
de traité assez solide, d'allia-nce assez ferme et assez sacrée qu'ils ne veuillent
rompre au pr.ix de ·leur ruine. Mais pour ne pas en dire dav·a ntage, la déno-
mination commune d'homme ne devrait~elle pa;s sutf.f ire pour .vivre en •bonne
inteiUgence.

Quand j'entends la voix d'un homme


Qua·nd j ' entends la voix d ' un homme, je m'empresse d'accourir, comme
vers l'·animal qu'une naissance commune a rendu mon sembla;b~e et j'espère
trouver près de lui une petite place où me reposer.

Mais, ô comble de malheur ! J'ai ·h onte de ;Je dire, les Tribunaux, les
Cours royales, les Sénats, •les Temples, les pllaces .p ubliques retentissent de
disputes et de quereHes, comme on n'en a jamais vu chez les animaux ; si
bien que la foule des avocats à qui l'on doit en grande ;partie le maJ.h eur d·e s
hommes, ,p asse ici inaperçue, tellement est considérable le nombr·e des chica-
niers. J'aperçois une vil'le, et .aussitôt un espoir renaît .d ans mon âme : je me
dis .q ue du moins ici, la •b onne intel:ligence règne entre les hommes qui, entourés
des mêmes murs, sont gouvernés par les mêmes lois et qui, s emblables aux
p a ssa,g·e rs d'un même navire, sont ·e xposés aux •mêmes .d angers. Mais malheur
à Moi ! Ici aussi tout ·e st divisé par la discorde, au p(Jint de ne trouver d·a ns
la ville entière, aucune maison où mc reposer. Je laisse de côté pour le moment,
la lie du peuple qui, à i'image d'une mer rugitée, s'.é vcrtue sans but et sans fin
ou se laisse emporter ·p ar :les flots : j'entre dans ·l e palais des princes, comme
dans un refuge sûr. La paix règnera dans cet endroit, me dis-je ; les grands
sont ~cs .p lus s'a ges que le vulgaire. Ne sont-ils point choisis pour le gouverner
g.-âcc à leur sagesse et à leur prévoyance ? Non seulement ils conduisent la
destinée de celui qui est un maître et un prince de la paix, qui m'aime et me
recommande à tous, mais Je leur suis même ;particulièrement recommandée.
Et, en vérité, tout me semble au premier abord de bon augure. L'on m'ac-
cueille avec cordialité et de la façon la ,plus aimaJble du monde. Je vois mes

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YIN-YANG

semblaibles m'em,brasser, se réunir rpour ·m anger et boire joyeusement de


compagnie ; en un mot, i'ls accomplissent tous les devoirs des !hommes en
société. Mais, ô ma·l heur indigne, on ne peut réellement trouver c.hez eux .J a
moindre ombre de vraie concorde. Tout est mensonge et fausseté. Au fond
tout est divisé. ·E talées en !Plein jour ou cachées, la. discorde et la corruption
sont maîtresses ; et i1 m'a. été d'autant moins possible de découvrir rparuni ces
hoDliiDes, un petit coin où m'installer, qu'Us sont eux-mêmes la cause ·e ssen-
tielle de toute guerre.

Trouverai-je refuge chez les savants .


?

Après tant de déceptions et de d~ ésillusions, quelle direction prendrai...jc,


malheureuse que je suis ! Les princes, me suig..je dit, sont plutôt célèbres
par leur état qu'i;Js ne sont instruits. Us sont pour la plupart conduits moins
par ·l a raison que par Jes passions : je me réfugierai cl:tcz les savants. Les
sciences, les lettres, les rendent vraiment hommes : œa philosophie en fait des
surhommes . .Je trouverai enfin cl:tez ces gens un repos sûr et certain. Mais
hélas, douleur inconcevable ! Ici encore la guerre règne ·e n maîtresse : une
~uerre qui, pour être moins cruelle, n'en est que ,p lus déraisonnable. Une
ecole est en lutte avec une autre, comme si Ja vérité immuable des choses
variait suivant le œieu. Certaines vérités •a pprouvées par Les uns ne passent
pas la mer ; certaines autres ne dépassent pas les Alpes ; d'autres enlfin ne
vont pas plus loin que le •R hin. Mais ce n'est pas tout : dans la même
académie: le rhéteur COimbat ,Je dialecticien, le scotiste CODIJbat le thomiste ;
les nommaux sont en ·guerre avec les réaux ; les péripatéticiens avec
le~ platoniciens, au point de ne pas s'entendre sur le plus petit su)et. Ils
discutent de choses irréelles et incon()CV'ables, jusqu'à ce que l·a violence des
a.l'gllme~ts les porte à l'outrage ; de d'outrage on passe ù .J a -violence et, si
la questwn n'est pas tranchée les armes à •l<a main, Us s'insultent cependant
les uns les autres, écltangeant des paroles empoisGWiées, chacun dardant sa
langue aux traits mortels aux dépens de la réputation de l'adversaire.

Chez les religieux ?.


Trahie et albandonnée par tous, de quel côté me diriger ? La religion
est mon seul refuge : elle s'offre comme une ancre d·e salut à mon espérance
car son exercice est commun au plus grand nombre, quoique chacun ;m pro-
fesse à sa manière, se différenciant ,p ar J'étiquette ct les ;pratiques de culte
par Jes cérémonies qui sont confiées à ceux qu'on appel1e communémen;
prêtres. ·E n contemplant de loin les •c hrétiens, l'espoir d.c trouver au milieu
d'·eux le refuge sûr et tranquille naissait en moi. Leurs habits blancs ornés
de couleurs me souriaient . .Je vois .te signe de )la croix qui est Je symbole de la
paix . .Je les ·e ntends employer entre eux ce nom si doux de frère qui est une
pr.e uve de J'amour parfait qui les unit . .J'entends les vœux de paix qui sont
d'un augure favorable . .Je vois qu ' ils ont toutes choses en commun : le même
collège de ~prêtres, le même temple, Jes mêmes lois, le même Heu de réunion

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YIN-YANG

quotidienne. Pourrait-on croire qu'i,l n'y a pas ici de .p lace pour la ,p aix ? Mais,
ô comble de ma:lheur ! II n'est pas un COOlège qui -vive en bonne intelligence
avec son Evêque. Cela serait toutefois de peu d'Ï.mŒlOl'ltance, si les prêtres
n'étaient pas en ipleines luttes intestines. Quel est celui parmi eux qui n'ait
tlas un motif de dis•p ute avec un autre prètre ? Paw• n'admettait pas qu'un
Chrétien ,f ût en contestation avec un autre Chrétien ; et un prêtre prend
position contre .u n autre prêtre, un évêque contre un évêque ! Mais ne pourrait-
on pas, malgré tout, .Jes excuser en quelque manière : c'est :p ar une habitude
déjà longue qu'ils sont devenus scmbl rubiles aux p·rOifanes. Ils ont, en effet, à
leur exemple, commencé à posséder d .c s terres ·ct ils jouissent sans doute, de
leurs droits quand ils les revendiquent à titre de prfJpriété.
II reste toutefois, une classe d'hommes ·q ui sont <à ce point attachés à la
religion, qu'ils ne •pourraient, si même Hs le voulaient, pas p~us l'abandonner,
qu'une tortue n'wbandonne sa carapace. .J' aurais espéré trouver une place
sûre dhcz ces derniers si tant d'c s~oirs déçus ne m'avaient pas désapprise à
espérer. Cependa nt, pour ne pas mc reprocher de ne l'avoir pas essayé, je
tentai la chance. Veut-on en connaître le résultat ? Je ne demeurai nulle part
moins longtemps que chez eux. Y avait-il, .e n etl'et, à espérer quelque chose,
là où la rclj.gion ne s'entend pas ,a vec Ia religion ? Il y a autant de factions
qu'i.t y a de confréries. •L es Dominicains sont en conJlit avec ,l es Co11deliers
déclhaussés ; les .Bénédictins avec les Bernardins. Autant de noms, autant de
cultes, autant de cérémonies différentes, de crainte de s'accorder en quoi
que ce soit : cltaque confrérie n'aime que ses règdements, pendant qu'eUe
blâme et hait ceux de ses rivrules. On les voit même dans une réunion, divisés
en p~lusï.eurs fractions : Les Cordeliers haïssent les Célestins ; les uns et les
autres détestent les Conventuc:ls qui, ii leur tour et entre eux, ne vivent pas
en .b onne intelligence.

Hélas... meme rhomme seul


lutte avec lui-même
Il ne me restait qu'à nourrir l'cs·p oir que je par.v iendrais à trouver au
moins une pla.ce dans [e cœur de quelque homme. Mais cet espoir [ui-ntême,
je dus l'abandonner. :L 'homm.e seul lutte avec [ui-ntême. La raison lutte
contre les tentations et les tentations ·S ont en conflit entre dies : la modestie
le tire d'un côté, la cupidité l'entraîne de l'autre. En outre, les passions le
mènent ; tour à tour, la colère, l 'rumbition, l'avidité le dirigent chacune à son
gré. !Et, en rproie à ce combat, les hommes n'ont pas honte cependant de
s'appeler des hommes, eux qui, de toutes les manières, sont si peu d'accord
;sur ce qui est le plus digne d'attention et le plus propre à la nature humaine.
Le fameux prophète Isaïe, [orsque inspiré par le soufille di·Yin annonça
l'arrivée 1p rochaine du Christ, le conciliateur de toutes choses ici-bas, nous
a-t-il prédit un satrape, un destructeur de viJHes, un guerrier, un triompha-
teur ? Certainement non ! Que nous a-t-il donc annoncé ? n nous a annoncé
un prince de la Paix ! Il voulait nous faire comprendre la nature du meHleur
des princes ct il nous J'a désigné sous la dénomination qui lui a semblé la
plus appréci-ée à son caractère. Cette affirmation d'iEsaïe n'est nullement

11
- YIN-YANG -

(( .. . cependant, tout gemble fait pour les inuiler à la concorde ... >>.

:.: onnante. ]) a .p ensé eomme le poète Smus, qui avait dit de moi en termes
Jgieux : « La paix est .J.a meilleure des choses que la nature ait accordée aux
.)mmes ».. Esaïe a.ppel'le ensuite la paix, l'ouvrage de da justice, pensant,
· je ne me trompe, de la même manière que Paul, lorsque, devenu au lieu
, ., Saül le Fanatique, 1l'l10mme le rpilus pacifique et le propagateur de la
>ix et ayant ,p référé l'a mour mutue.J à tous les autres dons du Saint-Esprit,
~ faisait r·é sonner aux oreilles des .c orinthiens mon éloge av·ec un courage
·rue de louanges ct avce la plus grande éloquence. Pourrai-je ne pas me glo-
.. , ier qu'un homme si parfait et si célèbr·c ait fait mon éloge ? Ce même Paul
" · rle en certains endroits de la paix de .Dieu ; en certains autres, du Dieu
· · la Paix, rendant ,p ar là évidente la vérité que ces deux choses sont à cc
iut solidaires, que la paix ne peut exister sans Dieu et que Dieu ne peut se
:mver où la paix est a!bsente.

Il n'y a rien de moins sérieux, rien de moins fondé que les argum.e nts
ceux qui ·P rétendent qu'~l est fait mention dans la Bible d ' un Dieu des
·:nées et d'un Dieu de la vengeance. Il y a !b eaucoup de ditférence entre le
·~u des Juifs et le Dieu des Chrétiens, quoique dans sa nature, Dieu soit
ique et toujours semblable à •l ui-même. Mais, 1puisque les anciennes conoep-
. :ns ne nous déplaisent point, admettons qu'il existe un .Dieu des armées,
~ondition toutefois qu'on entende par armée, la réunion d.e toutes les vertus
,, · .ts ·l 'égide desque'lles les homm·e s combattent tous les vices. Admettons encore

12
YIN-YANG

qu'il existe un Dieu de l a vengeance, .p ourvu qu'on entende par vengeanee, le


châtiment des vices, tout comme les massacres cruels dont abondent les
livres des Juifs et qui visaient non pas <Ja. destruction des hommes innocents,
mais la destruction dans leur cœur des JPassions coupables.
J'ajoute, pour pouvoir poursuivre ce que j'ai commencé que, lorsque la
Sainte-Ecriture veut fair·e connaître le .b onheur absolu, elle 'le fait au nom
de Ja paix. Ainsi, Esaïe dit : « Mon PCUiPI.C reposera dans de sein de la
Paix ,, et aiUcurs : " Que la paix règne sur 11e peuple d'Israël » ...
1

! Les maladies contre les maladies~


les villes contre les villes ...
Y at-il quelque chose de plus fragile et de 1)'lus .b ref que la vie humaine '?
A combien de maladies, à combien de malheurs n'est-elle .p as sujette ; et,
quoi qu'elle soit semée de .b eaucoup plus de ma;lheurs que les hommes n'en
pourraient souffrir, leur conséquence et leur égarement en prov·o quent néan-
1

moins de plus pénibles encor.e. Ils a1gissent avec tant d'emportement qu'ils
brisent et violent res liens de la nature ; ils ne respectent aucun traité ;
ils se font Ja guerr·e à toute ·é poque ·Ct dans tous les lieux sans 1but ni fin.
Les nations se heurtent contre les nations, ·l es viHes contre les viHes, les
[a·c tions contre les factions ct l·e s princes contre les princes ; et pour la sottise
ou l'ambition de deux faibles mortels, sujets d'un moment à l'autre à la mort
inflexible, ou ·b ouleverse de fond en comble 'l 'ordre naturel d·e s choses.
J e .p asse sous silence Jes tragédies des anciennes guerres : j'insisterai
seulement sur celles qui ont eu lieu dans ces dernières années. QueUe est la
terre où l'on ne se soit battu de la manière la plus imrpitoya·b le ? Quel est 'l e
fleuve qui n'ait pas été teinté d·e sang humain ? Et, honte inouïe, ils combat-
tent plus crueHement que les bêtes !féroces. Toutes les ,g uerres que les penp·l es
ont entreprises, ils devaient les soutenir contre les vices ; mais mallheureu-
sement, ils se sont identifiés avec ,Jes vices ; ·e t les ·h ommes combattent contre
les hommes.
Les anciens tyrans qui jadis livrai·ent des batailles y •é taient poussés
par la soif de la gloire ; toutefois ils avaient Je souci, en asse·r vissant les
nations étrangères et sauvages, d'être utiles aux vaincus, et ils s'appliquaient
ainsi, quoique vainqueurs, à mériter leur r ·e connaissance. Ds mettaient tout
leur soin à ce que la victoire fût aussi peu ensanglantée que possible, afin
qu'une g·l oire honnête !fût J.c 1prix de leur victoire, et Jeur magnan~ité la
consolation du vaincu.
On rougit de rappeler pour quels motifs honteux ou frivoles les princes
actuels font prendre les armes aux peuples.
Mais de comble de l'infamie, c'est qu'il y a des princes qui, sentant leur
autorité faiblir par suite d'une paix trop longue et de J'union de leurs sujets,
s'entendent en secret, de façon diabolique, avec .J.es autres princes qui, lorsque
le ,p rétexte es.t trouvé, provoquent la .g uerre, afin de tout .d iviser par la discorde

13
- YIN-YANG -

de ceux qui vivaient étroitement unis et de dé;pouiller le malheureux peUJPle,


grâce à cette autorité sans frein que dDnne la guerre. C'est à quoi veillent
les princes les plus scélérats qui assouvissent leurs passions au .p rix des
malheurs des peuples et qui, en temps de ,p aix, négligent 'leurs devoirs envers
l'Etat.

Pourquoi cette peur agressive


puisque nous sommes les membres
de l'humanité entière ?
Quel démon de l'enfer a pu innoculer ce venin da-ns le cœur des humains?
Qui leur a enseigné cette tyrannie que des Denys, des Mezence et d·es Phalaris
n'ont j-amais connue ? Ce sont plutôt des bêtes féroces que des hommes, nobles
uniquement .p ar leur tyrannie. Us n e sont jamais unis que pour nuire et ils
ne s'entendent jamais que pour o:pprimer leurs iEtats. Et ceux qui agissent de
cette manière sont consi:dérés comme des hrunmcs ? Ainsi souilŒ·é s de sang
osent-ils prétendre au nom d'hommes ? 0 fléaux des nations, dignes d'être
dt\portés dans les î.les les plus éloig-nées. Puisqu' ils sont les membres de
l ' humanité entière pourquoi chacun d'eux ne s'estime-t-il pas heureux du
bonheur de l'autre ?
Que peut-on dire de tout cela, sinon qu'ils dépassent par leur violence,
les !bêtes féroces ellles-mêmes. Les lbètes féroces ne combattent pas toutes entre
elles, et quand la lutte a lieu, elle ne se passe pas entre animaux de mème
espèce. J .e l'ai déjà dit et je le répète, ·a fin qu'on se •le rappelle d'autalllt mieux.

à suivre ...

Dans notre prochain no suite et fin de la QUERELA PACIS.

14
- YIN-YANG -

Les conférences de notre Centre


8, t"ue lamal"tine - PARIS

Ici, Jwn J-Jir ck el : (( ... si on y arnue pas avec


le yin, on !! arrive aure d es moyens yang ... »
et le Pr Ohsmva JIO S!! ln question : (( Com ment
dem eurer dans le bon h eur élernellement ? ... >>.

15
-- YIN-YANG --

Les conférences de notre Centre


Ici, Mme Chantereau, le chimiste Stéphanopoli el le Pr Kervran

Soyez MEMBRE PARTICIPANT du

Centre International lgnoramus

Renseignements 8, rue lamartine, Paris 9 ' - lam. 54.31

16
-- YIN-YANG --

II

QU'EST-CE
QUE
LA JUSTICE
p ar C. O HSAWA * * -* *
Un fort penchant pou r les imitation s

JI y .a beaucoup de chose en ce monde qu'.on u ne voit pas en les


voyant n, qu'on cc n'entend pas en les entendant n, qu'on cc ne connait pas
bien qu'on en parle sans cesse >>, :1a J ust ice en est une.
Liberté, bonheur, vi·el, paix, éternité, santé, harmoni e, beauté, vérité ...
tout le monde connait ça, ainsi que la justi ce, et tout le monde en demand e,
en parle, •le ·cherche... Puis chacun fait de gros efforts pour trouver des
réalités cont raires ou falsifiées .e t vivre en sécurité ...
Esclavage, malheu r, mort, guerre !maladie, incertitude, 'laideu r, imita·
t ion, mensonge, règlem ent... Beaucoup de professionnels sont spécialisés
dans la production et la vente· de ces imitations de la vé rité : marcha nds
de savons, marchands de médicaments, d'éducation, de religion, d'armes,
d'assurances, de banques, de dip·lômes, de techniqu es, etc...
On appell e la sci ence, la ,phi losophie\ l'idé e, la révolution, do... ~a
recherche d e ces imitations de la vérité.
Ah ! qu'est-ree que la Justice ?
cc Les choses vi sibles 11 et les cc choses invisibles n ·ex istent dans le
monde. Le monde où l'on peut meure r et le monde mystérieux, vague et
qu'on ne peut mesurer. Certains décident que les cc choses visib les n sont
le principal ·et que ce qu'on ne voit ,p as n'existe pas : Démocrite, Epicure,
Arisfute, Descartes, Darwin, de ...
Au contraire, certains disent que les cc choses invisibles >> sont le prin·
cipal et que 'l·es ·cc choses qu'on voit cc ne sont qu'ombres ou illusions :
spiritualisme, mysticisme, philosophies, religions, etc ... Le kokuzô (expan-
sion infinie), Sunyata, Vedenta, Lao·Tse, Sôtse, Bouddha, Nagarjûna,

17
- YIN-YANG -

Asanga, Jésus-Cihri<stl, 1etc ... ~comme partout on voit deux partis : yin ·e t
yang et un drame dit u la Vi·e 11 continue ses scènes dramatiques et amu-
santes éternellement.

Les deux parties de l'histoire du monde


Plusieurs m~liliers d'années sont passés. Ces deux partis se sont méprisés
et combattus <l'un et l'autre. Cependant, <Ceux rqui se sont engagés dans le
parti des cc choses visibles .,, et qui ont négligé ·les cc choses invisib<les rn
ont découvert dans .l a trentième année du xx• siècle que les cc choses
visibles 11 étai·e nt rprobabl ement .p roduites par les cc choses invisib<l•es 11.
C'est 'la découverte de ,J'univers des éléme·nts. C'est dire que ceux qui ont
affirmé; si bruta.Jement •q ue ,Jes cc <choses visibles 11 étaient le seu'l point
d'intérêt et que ·les cc rchoses invisibles 11 n'existaient pas, viennent de
s'aper·cevoir qu'i.ls étai·ent aveugles ...

le parti perdant vient au secours du parti gagnant


Cependant, ceux du parti des 'cc chose.s invisibles 11 et qui n'admettent
d'autres réalités ont continuenement étaient surpassés par les découvertes
du parti des cc choses visibles 11 car i.ls n'avaient pas assez étudié <la science
et ne ·c onnaissaient rien des cc choses visibles 11 .. Certes, ils ont été déchus
de leurs prérogatives et on •ne iles laisse ,p lus s'occuper que de funérailles.
Mais i<ls détiennent un chemin secret pour· sortir du cul-de-sac mortel où
le parti rdes cc choses visibles 11 est tombé.
Perdu dans la tempête d·e la peur, de l'incertitude, de l'inquiétude,
le monde est sur le point de disparaître. L'Amérique, ,Je royaume de l'or,
et qui est <l<e leader du parti des ic choses visibles 11 te sait.

Deux essats d e synthèse


Beaucou.p d'Orie·n taux, fils de la civilisation Bunmei c'est-à-dire S'P in·
tuelle (ou du parti des cc choses invisibles 11) sont attirés •p ar la civilisation
de l'or et. quelques uns reviennent déçus par rl.e matérialisme ou civiHsation
butumei. Il y a une soixantaine d'années, Okakura, auteur du LIVRE ou
THÉ, et Etsu <Sugimoto, auteur de LA FILLE DU SAMOURAI ont voulu
faire de la civilisation d'Extrême-Orient ,Ja fille adoptive du royaume de
l'or. A <la même époque, un Américain venait s'installer au Japon •comme
.joUJ!n~is<te. Il ,avait ,épousé une Japonaise et il < s 'efforça toute sa vie
d'importer .Ja civilisation d'Extl"ême-Orient ·P our secourir te point faible
du royaume de l'or, il s'appe<lait Lafcadio Hern. Hern <est à l'opposé de
ki·ppHng ou de Lawrence d'Arabie. Malheureusement, comme ·eux ou comme
Okakura et Etsu Sugimoto il appartie.n t au troisième jugement. Voilà
pourquoi ces hommes n'ont laissé de l'effort de toute leur vie que quelques
œuvres de ·littérature comme monument commémoratif.

18
- YIN-YANG -

Oh ! qu'est-ce que la justice ?


Oh ! Qu'est-ce que < l a Justice ?
D'après l'encyclopédie américaine c'est une chose comme le bonheur
que l'homme ne ·p eut jamais 'r éaliser : VoUà le jugement le plus haut du
parti des cc choses visibles 11 !
La Justice, se,Jon fe ·p arti des u ·Choses invisibles 11 est quelque chose
comme l'air que l'on respire et qui ·e st la base de tout bonheur et de
toute existence dans oe monde. E'l'le est la source de toutes <les lois. C'est
une chose sans laquet<le on ne. ,p eut vivre une seconde. Elle a été appelé
Mikoto (vie) Tao ou Miti (<le ·Chemin, la voie) Taidô (grand chemin)•
Taikô (grande loi) Taîkyoku (infini) Kaigi (grande justice) etc... J'ai
traduit tout ces mots en langage moderne par '" cc ORD-RE D·E L'UNIVERS 11
et je me suis efforcé jusqu'à soixante-dix ans de le rendre international.
C'est l'Esprit, c'est Dieu. Les anciens <l'appelaient le cc Maître de l'Univers 11
(amanominakanonusi en ancien japonais).
Les Princes du parti des u choses visibles n sont l'or, la matièr!e, fa
force et .l a destruction et <les Princes du parti des cc choses invisibles n sont
l'Esprit, <la Paix, l'Infini et 'l'Absolu. Le parti des cc choses visibles 11 est
arrivé à son point final par <le suicide du professeur Bridgeman à .l 'âge
de 79 ans.
Dans te parti des cc choses visibles 11 ri a technique de la matière, de
la foroe, de 'l'or, de la ,c onquête était 1la plus haute étude ; dans le parti
des cc choses invisibles 11 ria recher·che de la Justice, de l'Esprit, de la .P aix,
de •la Vie était la seulle question. C'est pour ce.ta que les sciences, les philo·
sophies, 'les médecines, les biologies, les rp sy•chologies Occidentales n'ont
aucun rapport avec cel<les d'Extrême-Orient. En faisant son examen de
conscience Bergson a dit ex,ce'lllemment : cc ,Ja particularité la p~us grande
de 11a science est son ignorance sur la vie n.
G. OHSAWA.

A SUIVRE
Qu'est-ce que la force spirituelle ?
Ohsawa est-iii un faiseur de miracles, un magicien, un docteur ?

Dans le prochain n° notre reportage sur le Camp OHSAWA 19 6 3

e Comment faire du silicone pur ;


e Ohsawa : "Je vais faire de l'or... ou des diamants » ;

e Le tabac... ... contre le cancer !

19
- YIN-YANG -

Aux débuts de 'll~histoiore de Rome, aes anciens Romains se nourrissaient


d'une manière qwi. semlblle d'aiJ]Jleurs avoir été q,a même pour tous les
Vieux-Européens d'origine nordique. Leurs descendants modernisés adop-
tèrent les voies diététiques• étranges. du Sud malgré ~es .grognemen,t s et
prophéties catastrophiques des vieux. A ['époque du /latin classique
plusieurs de ces descendants. modernisé!S témoignent fréquemment d'un~
gêne considéralble :
« Les vieux, écrivent-~l·s, sont !Partis ; avec eux soot parties les vieN1es
vertus romaines ; pour retrouver 'Celllles-ci, :sans doute faudrait-il vivre
comme Les vieux ae faisaienrt ; nos souvenirs anciens nous ll•e s montrent
dans des 1CJOnditions d'inconfort « vou'lu » 1et de fiiuga1ité partiate, celtique
ou germanique. Mais nous autres modernes civilliséis ne pouvons plus vivre
comme cef:,a. Personne ne renoocera désormais au confort de [·a super-Ca-
dillll'ac, au nyllon air-<conditionné, aux joies de ila bonne ta]jle française
aux 'Cafés-bars et 'Cocktails ioe--creams, aux plaisirs en foule de l a Plac~
Publique, au spiritualisme enthousiasmant du rock and roll et de Ua mariju-
ana. P lutôt renoncer à l'existence qu'aux .c!harmes de la vie. Rés1gnons-nous
donc à vivre mar1oupins et aombinaTds. Et surtout, pas de vagues ! A bas
toute suspicion de vioLence, ·e t vidlemmen't s'i'l Œe faut ! Vivent les compro-
mis et négociations, surtout ceux qu'on appellŒe Iles Lois ·e t la Jius tice !
Vive fr·a Cause Sacl"ée de il1a Paix ... Romaine ! Vivons la bonne vie ; et après
nous le déluge. »
Les modernes qui avaient le 'c ulte des vieilllles vertus étaient d'ailileuTs
beau~oup m-oins véridiques et moins sympathiques que les marlous cons-
cients et organisés. Le urs homéllies et vantardises n'étaient que théâtre
même lorsque prises pour argent c-omptant. Un Caton et un Winst-on Chur~
c'hilll sont de très. honorés windlbags reLevant de ila comédie de la place
pub1ique.

I...ISE::Z ..•

L'ÈRE ATOMIQUE
et la.

LA PHILOSOPHIE D'EXTRÊME-ORIENT

20
- YIN-YANG -

Celui qui vit cee que certains ont appété n:a vie tragique et d'autres
1a vie amusante n'a pas à renoncer aux ,cJharmes de l'existence décrits ci-
dessus pal'oe qu'H ne iles perçoit pas du tout •COmm·e des clharmes mai's
bien •c omme des vides et des enn1u·i:s·. ill n'y a de sa part aucun effort << con-
tre lui.;même », aucune notion de mérite (surtout pas de morale ! ... )
aucune justification, aucune décoration compensatrice dans ce m-onde ni
dans iles autres, pas même de VlOilonté de suTvivre (bien au c-ontraire, plutô1l
Qe g-oût du risque, Q1'attraction du danger) aucune espérance de récompen-
ses et •c onséquemment aucune crainte de châtiments. C'est pourquoi même
le stoï·cisme gréco-romnin cla:sique est déjà une attitude •c omique à peine
différente du moralisme, chl"éli en d autre. Pourquoi notre homme crain-
drait-il la 1lur'bu1ence et tout ce qui en relève et qu'il .e st inutille que je
nomme ? Qui craint 1a destruction témoigne seu:lement de pl'lessentir qu'hl
va passer. Qui est p1lein de créations n'a pas d'œ~l pour iles destructions .
tout nettoyage a même des !chances de faire de <la place pour les nouveautés
dont i:l est enceint, dont il Iui faut se libérer, qu'i1 aspire à mettTe au
monde à •seuJle fin d'en être déchargé ; 'c ar i:l est à l'observatiD'l1 de nature
très femell·le, t<rès yin si vous savez.
Rien d'étonnant à ce 'que l'Antiquité <Cil·a ssique !!1Je perçut déjà plus
rien de 'l a l"éalit:é in'c:luse dans ses vieux mots historiques fossilisés. En
vol·Cl un exemplle si,gnifi,c atif· que je donne sans l"é:fiérences tel. qu'il m'est
resté en mémoire :

f 'a<{<{ai~te erJt dérJed-(1-Üée,


ee q,énüae d-e nO-U!z/Ût de na!J..etd f

Certain auteur classique rapporte qu'un Vieux-romain était ltln redou-


tabil·e général·. Le Sénat d'un peup[e voisin qui avait apparemment de
solides raisons de ~e <redouter envo·y a des délégués avec mission de recon-
naître si l'on pouvait penser à Ie << briber ». ]l travailfrait lui-même sa tel're
quand ~1 reçut :J!es délégués. Ceux-ci venaient sans armes et pour parle~
menter ; ~l les reçut oomme -on reçoit des érangers de passage, c'est à
dire en envoyés par vos propres dieux, et l}.e ur offrit ù'hospita:lité de son
cottage et de ,s a table. Les délégués acceptèrent. Après quoi i1s prirent
congé et firent leur -rappo·r t à leur Sén at : << L 'affaire est désespérée. L'hom-
me ne peut pas êtTe aclleté : iNou s av.ons coo,trOIIé qu'il se nourrit de
navets. » Quoique les détams ne ,s·oi:ent pas communiqués, ü peut être admis
que les dits navets étaient ,cuits à 'l'eau salée et ou rôtis ou frits. Etant
m·oi~même un Breton Lmpénitent du Lan ·ar pagan, j'ai une forte tendance
à vouloir ·C roire que les nav.et:s en q uestion fussent peut-êre des panais ...
Bien entendu, le pain de ferme de céréales, 'alors surtout de seigle, était
la base invariable de ila n10urriture des Vieux-européens ; de ce fait, ill
échappait aux Temarques· diététiques ; ce qui variait avec les personnes,
c'était l'aecompagnement du pain et c'est à .ce titre que les navets sont
mentionnés .par les déllégués.
Quoiqu'hl en s oit, le commentateur !Classique rapporte qu'1un homme
qui est capable de vivre s i frugailement alors qu'~l pourrait av-oi·r son
frigidaire et en tirer queLques ananas à ~ a crème gla·c ée sera capable de

21
-- YIN-YANG --

résister aux tentations des dolll:ars et de témoigner d'une vertu incorrup-


Uble. Le mail.heur est que, dans ma VIllie de Celte déterminé, ill n'y avait
il:à rien que de très factuel. Il me semble que le bon homme, eomme aussi
ses visiteurs, eussent été très sul'pris des imPlications m~:>mili:satrices du
commentateur dviH-sé ; que pour eux il n'y avait là ni attitude de vertu
d'aucune sorte. Penser .quJ'iJl y eût l·a vertu ·a u sens moral, •C'est penser
qu'iJ. y eût ostentation rc ar toute vertu n'est pas autre ·Chose. Et cela
n'eût pas du tout permis !La •conclusion que l'homme fût incorruptible par
nature. Bien •a u contraire !

La relation de cet inci:dent ne peut se •c omprendre que sur une base


maccrdbiotique : « Qu.i!"onque se nourrit de pain de ferme accompagné de
navets se construit •ce que [es langues civi1isées appellent santé générale,
indluant sûreté d'instinct, rectitude intellllectuelle, indifférenrc e pour les
bananes frappées au sirop, méfiaruce à l'ostentation de rla Place publique,
bref, nous y reconnaissons ce que ·M aître Sakurazawa appel[e le Jugement
dévoflé.
Ce qui, pour moi, prouve que J:e ·commen tateur dlassique n'y compre-
nait rienl, c'est qu'ill me semlble h ors cLe doute qu 'il eût fait le même
commentaire ·s i ,s•on Vieux-romain n'avait eu à offri·r à ses visiteurs que des
pommes de terre en robe-eLe-~chambre. Mais je suis •convaincu qu'alors les
délégu•é s fussent revenus tout joyeux et eussent rapporté : « L'affaire est
dans a.e sac ; notre bonhomme se nourrit de patates ; Il est donc p/lus ou
moins ma1ade et désintégr<é, rusé, âpre au gain, sans noblesse naturelle,
ce que nous appelon's péjorativement un « paysan » depuis que Sir Waiter
Raleigh a rapporté ces prolifiques tuberauiles amédcains qui 0111t écarté
1a famine de nos ·campagnes du Latium »... en attendant, d'ainteurs, de Ja
causer en Irlande.
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Michio Kushi, Nippon Services, 13 We•t 46th Street, New-York.
Mr. Tommy Nakayama (C. l.) 2486, Silyerlake Blvd, Los Angeles
(Californie) .
Ohsawa-Fondation of N. Y ., 61 We•t 56 Th Street, New-York.
Alma Baumann, 1793 Modack-Chico (Californie).
JAPON:
Nippon (C. 1.), 8, Kasumityo, Minatoku, Tokyo.
Sinsei-Kai, 7, Dezima Hamadori, Sakai, Osaka.
An bara ( C. 1.), 6, Sironouti, Tokushima (Revue « De la Santé à la
Paix »).
Hede,-Ohiw, Kanagawa, Japon.
BRESIL:
Casa Longavida, Rua Const. Furtado 351, Liberdado, Sao Paulo.
INDE:
Mr. R.-T. Saklath, 9, Grant Lane, Calcutta.
(C. 1.) : Centre Ignoramus. - (0. FJ' : Fondation Ohsawa. - (C. 0.) :
Centre Observ.
(R) : Restaurant. - (lVI.) : Magasin de produits Ohsawa. - (E.) : Editeur.
(U.l : Usine de produits Ohsawa . - (S) : Sanarant.

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