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DROIT DU

TRANSPORT
Le droit du transport est le droit qui s’applique aux
transporteurs, aux clients et utilisateurs des moyens de
transport et aux intermédiaires ainsi qu’aux revendeurs
de billets.
Les transporteurs peuvent être des transporteurs
routiers, des transporteurs ferroviaires, des transporteurs
maritimes ou des transporteurs aériens.

Depuis l’origine, l’Homme pratique la notion de


transport. En effet, il lui paraît naturel de se déplacer et
de déplacer les choses qui l’entourent et qu’il utilise. De
ce fait, l’histoire de l’humanité souligne régulièrement
des hypothèses de transport dans le temps ou dans
l’espace et chaque grande période historique se réfère à
un mode de transport. Ainsi, l’antiquité est marquée,
grâce aux grecs et au phéniciens, par l’activité maritime
qui peu à peu va céder la place à la route. Le 19ème siècle
sera celui du développement ferroviaire et le 20 ème celui
de l’aviation et de l’aéronautique.

Tout au long du parcours historique, on note le


développement important des moyens de transport à
l’occasion des guerres. Jusqu’au 20ème siècle, les guerres
se traduisent par le développement maritime (radeaux,
galères et gros bateaux), les taxis avec la première guerre
mondiale, les ponts aériens avec la seconde guerre
mondiale pour favoriser le débarquement. Les guerres les
plus récentes contribuent au développement du
transport aérien. Toutes ces situations de guerre vont
certes développer le transport mais permettre également
de comprendre l’intérêt du transport pour l’activité
commerciale.

Le transport est ainsi devenu l’expression la plus


fréquente de l’activité commerciale, il repose sur
l’échange et la répartition des richesses et rejaillit sur la
vie quotidienne. En effet, l’individu a besoin de se
déplacer pour exercer son activité professionnelle. En
parallèle, le développement des loisirs et de la notion de
temps de travail a donné l’occasion aux individus de
voyager seuls, de manière organisée ou ad hoc
(croisières, charters). Par ailleurs, la qualité de vie est
devenue est concept important, la publicité et la société
de consommation suscitent de plus en plus le
déplacement des marchandises. L’accès est de plus en
plus mis sur les produits naturels ou frais de telle sorte
que le consommateur souhaite de tels produits en toute
saison ce qui implique des déplacements rapides pour les
produits périssables selon les saisons, le climat et le lieu
de production. L’activité de transport constitue donc à la
fois un facteur de progrès et un critère de développement
économique, autant vis-à-vis des personnes que des
marchandises. Etant donnée l’importance du transport,
les pouvoirs publics s’y intéressent, toute tendance
politique confondue. La politique des transports passe
par l’amélioration des modes de transport (métro, TGV
etc.) et des structures (aéroport, voies ferrées, routes),
elle va aussi générer des techniques nouvelles
considérées comme des moyens de transport car elles
entraînent des circulations: oléoducs et gazoducs. Les
recherches spatiales (navettes) sont aussi faites dans une
optique de transport.

Par ailleurs, les transports sont aussi un domaine


privilégié d’expression des politiques communautaires ce
qui complique souvent les législations puisque les
mesures nationales et européennes se juxtaposent. Cette
complexité se retrouve dans les sources et l’organisation
du droit des transports français.
Section 1: L’organisation des transports

L’organisation des transports repose en France sur des


structures administratives et professionnelles chargées
de mettre en œuvre la politique française et européenne
de transport. Il y a autant de structures administratives et
professionnelles que de type de transport, seul le
ministère des transports est unique. S’agissant du
transport routier:
1) Le ministère des transports

Il s’agit souvent d’un ministère autonome mais il peut


être doublé de l’équipement. Les interventions du
ministre sont nombreuses et dans des domaines variés.
Toutes les décisions prises sont susceptibles de recours
devant le juge administratif. Le ministre actuel est M.
Christophe Béchu , le ministère se trouve dans l’arche sud
de la défense.
2) Le Conseil national des transports (CNT)

Créé par la loi du 30 déc. 1982 d’orientation des


transports intérieurs (LOTI).
– Composition: représentants du parlement et des
collectivités territoriales, représentants des entreprises
de transport, représentants des salariés du transport,
représentants des usagers et de représentants de l’Etat
nommés en raison de leurs compétences.

Le CNT peut créer des comités régionaux et


départementaux, présidés par le préfet.
– Missions:
 rôle consultatif: le CNT émet un avis
consultatif sur les questions soumises par le
ministre et chaque fois qu’une loi ou un
règlement impose sa consultation.
 surveillance: le CNT surveille le
fonctionnement des transports et en
particuliers les schémas nationaux de
développement des transports et des
infrastructures.
Le CNT rédige un rapport annuel et fait des
propositions au ministre à condition qu’elles aient été
avalisées par au moins 2/3 de ses membres.

3) Le Conseil national de la coordination tarifaire


(CNCT)

Le CNCT comprend des représentants de la SNCF, de


réseaux ferrés de France ainsi que de transporteurs,
loueurs et commissionnaires. Ainsi, hormis les
représentants de la SNCF, tous sont des représentants
d’organismes professionnels d’où une certaine
indépendance vis-à-vis de l’Etat quant à l’établissement
des tarifs.

4) Les organes professionnels

 A) Le comité national routier (CNR)

Le CNR a été créé par le décret de 1989 qui le qualifie de


comité professionnel de développement économique.
– Composition: 18 membres choisis par le ministre sur
proposition des organisations professionnelles
représentatives.
– Mission: observer le prix et le coût des transports afin
d’établir à titre indicatif des tarifs de référence.

 B) Les bureaux régionaux de fret

Ils ont été créés pour informer les professionnels et les


usagers sur les besoins, les ressources, les tarifs et les
prix pratiqués dans la région.
Section 2: Les sources du droit des transports

1) Les sources classiques françaises

Le droit des transports est défini de manière générale


comme la branche du Droit s’intéressant au déplacement
des choses ou des personnes, ce déplacement s’opérant
grâce à un engin mobile. Le droit des transports décrit les
mécanismes juridiques qui assurent et organisent le
transport et en jugule les conséquences.

Le développement constant du transport marchand


international a également provoqué en droit interne
l’adoption de contrats-types et à l’échelon international
de conventions uniformes puisqu’il a fallu passer outre la
complexité du droit interne.
– Le droit commun du transport
 Le Code civil considère le contrat de transport
comme une espèce principale de louage
d’ouvrage et d’industrie Livre 3, Titre 8 Chap.
3. Code Civil Article1782 à 1786 concerne les
voituriers par air (ce qui comprend donc la
terre) ou par eau. Ces dispositions s’adaptent
à tous les types de transport mais font peser
sur le voiturier une obligation de résultat tout
en laissant une grande liberté au contrat que
peuvent passer les voituriers avec les autres
personnes, les dispositions du Code Civil étant
purement supplétives.
 Le Code de commerce est plus précis, l’ancien
Code s’intéressait à la fois aux
commissionnaires de transport et aux
voituriers, il envisageait notamment leur
responsabilité. L’actuel Code de commerce est
issu de l’ordonnance du 18 sept. 2000 Article
L132-3 à -9 pour les commissionnaires, L133-1
à -7 pour les voituriers.
Ces dispositions du Code civil et Code de commerce
constituent ainsi le droit commun du transport qui va
s’appliquer en l’absence de lois spéciales et de textes
internationaux ou communautaires.
– Le droit spécial du transport: il existe une série de lois
particulières qui s’appliquent à un type de transport
déterminé:
 loi du 18 juin 1966, modifiée en 1986 sur le
transport maritime
 loi du 30 déc. 1982 d’orientation des
transports intérieurs (LOTI) affirme le droit au
transport et prévoit des contrats-types
 loi Gayssot du 6 fév. 1998 a modifié
notamment la définition et le régime des
contrats de transport (en y intégrant le
destinataire)

2) Les sources internationales

Tous les textes européens et internationaux en matière


de transport sont impératifs et directement applicables.
Ils édictent des règles matérielles qui se substituent aux
textes français régissant la même question chaque fois
que le transport est international. Les textes les plus
fréquemment appliqués par les tribunaux français sont:
– Convention de Berne du 14 oct. 1890 concernant les
transports ferroviaires de marchandises et s’appliquant
à tous les envois de marchandises effectués sur un
parcours empruntant les territoires d’au moins deux
Etats parties.
– Convention de Bruxelles du 25 août 1924 pour
l’unification des règles en matière de connaissement,
concernant les marchandises circulant entre des ports
d’Etats différents.
– Convention de Varsovie du 12 oct. 1929 pour
l’unification des règles relatives aux transports aériens
internationaux de marchandises
– Convention de Genève du 19 mai 1956 relative au
contrat de transport international de marchandises par
route (CMR) s’appliquant à tout transport routier de
marchandises à titre onéreux fait au moyen d’un
véhicule automobile simple ou articulé, remorque ou
semi-remorque dont le lieu de prise en charge est le
lieu de livraison sont situés dans deux Etats différents
dont l’un au moins est contractant. La France a ratifié la
CMR, la CMR s’applique donc à tout transport routier
international de marchandise ayant pour départ ou
arrivée la France.

Le droit des transports présente 3 caractéristiques:

 – le droit des transports reste profondément


marqué par le droit commun des contrats: les
actes de transport (Partie 1)
 – le régime de responsabilité s’agissant de
l’imputabilité ou de la réparation est spécifique et
lié aux opérateurs du transport: les acteurs du
transport (Partie 2)
 – le contentieux et les voies d’action sont
spécifiques et dépendent du type de transport et
de l’opérateur: les actions du transport (Partie 3)

Titre 1: Les actes de transport


L’acte essentiel est le contrat de transport mais le
transport peut faire intervenir d’autres personnes que le
transporteur et notamment un commissionnaire.
Chapitre 1: Le contrat de transport
La notion de transport est circonscrite, d’une part, par
son objet consistant dans le déplacement d’une chose ou
d’une personne et, d’autre part, par les moyens utilisés
pour réaliser ce déplacement notamment grâce à un
engin mobile. En général, un contrat est signé et désigne
les obligations juridiques des parties. Les obligations sont
fondamentales puisqu’en matière de transport car ce
sont elles qui permettront de retenir la qualification de
contrat de transport.
L’obligation principale est celle de déplacer une chose ou
une personne d’un lieu à un autre. Le juge est tenu de
vérifier cette obligation (Cour de cassation 15 jan. 1988).

Cette définition a été proposée par la doctrine et reprise


en jurisprudence mais n’existe pas dans les textes
fondateurs du droit des transports. En effet, le Code civil
et le Code de commerce créent un statut original au
contrat de transport mais n’en donnent aucune
définition, ils permettent seulement de distinguer ce
contrat des autres contrats de louage d’ouvrage ou
d’industrie.
Le Code de l’aviation civile précise que le transport
consiste à acheminer les passagers, les marchandises ou
la poste et à titre professionnel, d’un lieu à un autre. Il
précise que pour les passagers qu’il n’y a pas de transport
en circuit fermé, ainsi, la Cour de cassation depuis 1973
juge que les passagers effectuant leur baptême de l’air ne
bénéficient pas d’un contrat de transport puisqu’ils sont
embarqués et débarqués au même endroit.

L’itinéraire adopté a peu d’importance, toutes les lois


spéciales le confirment: le trajet est commandé par le
moyen de transport utilisé. Ce qui compte est le point de
départ et le point d’arrivée, peu important le chemin
emprunté. Ainsi, en matière de transport de personne,
deux contrats distincts sont nécessaires pour un voyage
organisé: un pour le circuit touristique et un autre pour le
transport.

La vitesse peut être considérée comme un élément


important du déplacement. En effet, le transport peut
devoir intervenir dans un délai déterminé notamment par
la marchandise elle-même (marchandises périssables).

Le transporteur est libre du moyen de transport.

Le déplacement va se concrétiser par un acte positif et


par un acte matériel:
 – L’acte positif permet de distinguer le transport
du dépôt.
 – L’acte matériel permet de distinguer le transport
du mandat et de la commission.

Depuis Cour de cassation 27 oct. 1958, le contrat de


transport ne peut pas être confondu avec le contrat de
louage de choses car le transporteur ne s’engage pas
seulement à mettre un engin de transport en état de
marche à la disposition du client puisque le transporteur
s’engage à acheminer à destination.

Dans sa définition, le contrat de transport n’apparaît pas


comme un contrat onéreux. Le Doyen Rodière a ainsi
proposé une nouvelle définition selon laquelle le contrat
de transport de marchandise est le contrat par lequel un
voiturier de profession promet le déplacement d’une
marchandise jusqu’à un point défini et moyennant le
paiement d’une somme d’argent. Cette définition n’a pas
été reprise dans les textes ultérieurs, elle correspond
pourtant à la réalité et à la politique des transports. En
effet, le transporteur doit être un professionnel et donc
rémunéré.
Section 1: Les critères de détermination du
contrat de transport

1) Le déplacement

Le déplacement est l’objet de tout contrat de transport.


Les différents éléments du déplacement permettent de
distinguer le contrat de transport de conventions
voisines.

Ces éléments sont importants et précisent la prestation


promise par le transporteur et attendue par le
cocontractant.
Cette détermination suppose la stipulation d’un lieu de
départ et d’un lieu de destination. Le lieu le plus
important est le lieu de prise en charge, il doit être fixé
avec précision car il déclenchera le transport. D’ailleurs,
en droit international, à défaut de choix s’appliquera la loi
de remise au premier transporteur i.e. le lieu de prise en
charge.

Ces actes matériels vont faciliter la distinction du


transport et du mandat. En effet, le mandat suppose des
actes juridiques et n’admet l’exécution d’actes matériels
qu’à titre accessoire. En matière de transport, les actes
matériels sont fondamentaux. Il peut y avoir cumul de
contrats: ainsi l’expéditeur peut demander au voiturier de
transporter la marchandise et lui donner mandat
d’obtenir le paiement contre remboursement,
l’expéditeur peut aussi demander au transporteur de
procéder au dédouanement de la marchandise.

L’organisation du déplacement permet de distinguer le


transport de la commission de transport. Dans les deux
contrats, le débiteur est libre du parcours à suivre, il
organise le transport à sa guise mais le voiturier va
intervenir seul alors que le commissionnaire va recourir à
d’autres personnes pour réaliser l’acheminement.
2) La maîtrise du déplacement

Le transporteur est entièrement libre techniquement et


commercialement, il a l’entière maîtrise du déplacement
promis à son client. Il utilise les moyens à sa convenance,
seule important l’arrivée à destination dans les délais
impartis.

La responsabilité pesant sur le transporteur née du fait


que la garde des marchandises lui soit transmise au
regard de Code Civil Article1384.
Cette maîtrise va permettre de distinguer le contrat de
transport du contrat de remorquage et du contrat de
location de véhicule avec chauffeur.

 A) Transport et remorquage

Le remorquage est une opération courante intervenant


dans de nombreux domaines: remorquages de véhicules
en panne, remorquage de trains et wagons d’entreprises,
remorquage de péniches dans les ports et écluses,
convois exceptionnels, remorquage de planeurs,
remorquage de caravane etc.
Si le remorqueur est transporteur, il va bénéficier de
certains avantages comme la prestation abrégée (1 an) et
le privilège de Code Civil Article2102, il va être tenu d’une
obligation de sécurité de résultat pour les dommages
causés au véhicule remorqué et aux marchandises
contenues dans celui-ci.

Si le remorqueur n’a pas la qualité de transporteur, il


s’agira d’un contrat de location de traction i.e. un contrat
d’entreprise ordinaire de telle sorte qu’il ne sera
responsable que de ses fautes prouvées.

La qualification sera aussi importante en matière


d’assurance, la Cour de cassation estimant que le fait
d’atteler un véhicule assuré à un autre véhicule modifie
l’instrument du risque et constitue un cas de non
assurance. La compagnie d’assurance peut couvrir cette
hypothèse en prévoyant une clause de remorquage dans
le contrat.

La question du remorquage a intrigué la doctrine, certains


auteurs estimant que le remorqueur se contente de
fournir le moyen d’assurer une traction, d’autres
estiment de du fait de la traction il y a déplacement et
donc transport.

En matière maritime, la loi de 1969 règlemente le


remorquage et distingue le remorquage hauturier (i.e. en
haute mer) du remorquage portuaire. En haute mer, il
s’agit d’un contrat de transport car le navire remorqueur
maîtrise le déplacement. En revanche, dans les ports, il ne
s’agit pas d’un contrat de transport puisque le
remorqueur pousse le navire et de ce fait le capitaine du
navire principal converse la maîtrise. La Cour de cassation
vérifie toujours si l’engin remorqué a ou non un moyen
de propulsion utilisé lors de l’opération.

De même en matière terrestre et ferroviaire, c’est


autonomie de direction ou de propulsion conservée ou
non par l’engin remorqué qui détermine la nature du
contrat.
 B) Transport et location d’un véhicule avec
chauffeurs

Cette location a pour objet le déplacement d’un point à


un autre. Les sociétés de transport offrent souvent ce
type de prestation (ex: coursiers).

La LOTI impose la rédaction d’un contrat précisant les


obligations des parties, les conditions d’emploi du
conducteur et l’exécution des opérations de transport. Un
décret de 1986 a institué un contrat-type. La
jurisprudence estime que le loueur n’est qu’un
fournisseur de moyens i.e. il a satisfait à ses obligations
dès la remise du véhicule. Le locataire devient alors
voiturier et le conducteur devient son préposé, c’est donc
le locataire du véhicule qui est garant des pertes et
avaries survenant lors du déplacement.

La seule solution est de dissocier contractuellement les


contrats en passant un contrat de transport et un contrat
de location.

Il arrive qu’une personne rende service et conduise ainsi


son véhicule pour déplacer une autre personne ou des
marchandises vers un point déterminé (sans contrat écrit
ni rémunération), il s’agit d’un transport bénévole qui
pose problème en jurisprudence.
3) Le caractère professionnel de l’opération

Tout contrat de transport suppose que le déplacement du


passager ou de la marchandise soit effectué par un
voiturier professionnel.

Le Code Civil vise l’entrepreneur de voiture professionnel


et le Code de commerce énonce des obligations de la
profession de voiturier, ainsi ces textes édictent donc un
statut et ce caractère professionnel permet de
caractériser le contrat de transport au sein des contrats
civils et commerciaux. Malgré tout, il reste toujours des
cas de transports non professionnels.
 A) Le caractère civil ou commercial du
transport

Le contrat de transport a toujours un caractère


commercial pour le voiturier puisque les transporteurs
ont la qualité de commerçants en vertu de Code de
commerce Article L110-1 al.5.

En revanche, pour l’expéditeur, le caractère civil ou


commercial dépendant des circonstances: le contrat est
commercial si la marchandise est déplacée pour l’exercice
du commerce de l’expéditeur, dans le cas contraire, il
s’agit d’un acte mixte qui sera donc commercial pour le
voiturier et civil pour l’expéditeur (ex: déménagement).
Depuis Cour de cassation 1er fév. 1955, la jurisprudence
estime que si le contrat est commercial pour l’expéditeur,
il l’est aussi pour le destinataire même si celui-ci n’est pas
commerçant (ex: vente à distance). Cette jurisprudence
n’est pas remise en cause par la loi Gayssot de 1998 qui
transforme le destinataire en partie contractante.

 B) Les transports non professionnels

1) Le transport non professionnel rémunéré

Un propriétaire de véhicule s’engage exceptionnellement


à transporter une marchandise moyennant rémunération.
ex: les grandes surfaces livrent de l’électroménager.
Cette convention ne peut s’analyser comme un contrat de
transport stricto sensu car le voiturier n’est pas un
professionnel du transport. Les juges du fond sont
partagés, certains estiment qu’il s’agit d’un contrat
d’entreprise alors que d’autres retiennent la qualification
de transport. En réalité, il semble que les juges qualifient
le contrat dans l’intérêt des parties i.e. réalisent une
appréciation in concreto. La Cour de cassation semble
bienveillante car à chaque fois que la question s’est
posée, elle n’a pas eu besoin de la trancher car elle a
rejeté le pourvoi pour des questions procédurales. Cour
de cassation 1968 avait estimé que le fait qu’une
personne déplace des marchandises appartenant à un
tiers à titre onéreux pouvait conduire à appliquer les
règles du transport, par analogie.

2) Le transport gratuit

Il s’agit d’un acte de courtoisie ou de complaisance. Il


s’agit ainsi d’un simple fait juridique si bien qu’en cas
d’incident s’appliqueront les règles de la responsabilité
civile. Ainsi, en matière de transport bénévole de
personnes (ex: passager) et de marchandises
s’appliqueront Code Civil Article1382 et suiv. Il y a
transport gratuit lorsqu’il n’y a aucune rémunération,
quelle qu’elle soit. Si la marchandise est détériorée,
s’appliquera Code Civil Article1384 al.4. Néanmoins, si le
Code civil n’apporte aucune solution, dans le cadre d’une
promesse d’apporter la chose à destination peut être
envisagé un dépôt tacite ou un mandat tacite. Dans ce
dernier cas, l’acte se rapprocherait du contrat
d’entreprise mais la responsabilité du transporteur
bénévole serait alors appréciée beaucoup plus
souplement voire avec indulgence du fait de la gratuité
du service rendu. En pratique, les deux voies sont
tentées: une action en responsabilité sur la base de Code
Civil Article1384 et subsidiairement une action sur le
fondement de la promesse.
Section 2: Le contenu légal du contrat de
transport: loi Gayssot du 6 fév. 1998

La loi Gayssot du 6 fév. 1998 a été élaborée en raison des


grèves régulières des professionnels du transport
terrestre de marchandises. En effet, les grèves annuelles
des camionneurs paralysaient tout le réseau routier
français et les pouvoirs publics, comme toute la
hiérarchie des transports étaient convaincus de la bonne
motivation des grévistes à tel point que l’Etat n’a jamais
cherché à sanctionner les personnels grévistes alors qu’il
aurait suffit de les citer tous devant le tribunal
administratif pour leur reprocher de mettre en danger la
sécurité publique sur le territoire national. A la suite de
ces blocages, des discussions ont abouti à des rapports
dénonçant les insuffisances de définition du contrat de
transport et constant qu’il fallait assainir la profession. En
effet, il y avait trop de transporteurs et pas suffisamment
de garanties financières de sorte que lorsqu’un
transporteur effectuait sa mission il n’était pas forcément
payé.

Ainsi, la loi du 6 fév. 1998 est intervenue pour améliorer


les conditions d’exercice de la profession de transporteur
routier:
 – Article1 la lettre de voiture forme un contrat
entre l’expéditeur, le voiturier et le destinataire,
toute clause contraire étant réputée non écrite.
 – il sera fixé par décret la capacité financière
minimale requise pour exercer la profession. Ainsi,
le rehaussement du seuil a exclu environ 30.000
personnes de l’exercice de la profession de
transporteur routier (chiffre déduit des radiations
et recours devant le tribunal administratif).
1) Le destinataire devenu partie au contrat de
transport

Le destinataire est celui a qui est envoyée la marchandise


peu importe qu’il soit un professionnel ou non. Depuis la
loi Gayssot, le destinataire est partie au contrat de
transport du fait de la loi mais il l’était déjà dans les
contrats types qui lui imposaient même parfois des
tâches notamment lors du déchargement.

Le destinataire doit signer la lettre de voiture ainsi qu’un


document appelé « suivi de l’opération ».
La loi Gayssot a ainsi éclairci la situation du destinataire
vis-à-vis du transporteur et a permis l’assainissement
financier de la profession puisque le transporteur dispose
maintenant d’une action supplémentaire (contre le
destinataire) en cas de non paiement du transport.

L’ordonnance du 18 septembre 2000 codifiant le Code de


commerce n’a pas retouché au texte qui fait l’unanimité.
2) Le destinataire pleinement associé au contrat
de transport

La Cour de cassation a toujours considéré que le


destinataire était associé à l’opération de transport mais
ne pouvait en tirer toutes les conséquences. Ainsi, si le
nom du destinataire figurait sur les documents, il était
considéré comme associé à la bonne exécution du contrat
(cour de cassation, 14 mars 1995) mais il ne pouvait être
tenu en cas de mauvaise exécution.

La doctrine estimait que le destinataire devait être


considéré comme devenu partie au contrat dès lors qu’il
acceptait de prendre livraison de la marchandise. Pour
justifier les différentes solutions, les juges avaient
tendance à faire appel à la technique de la stipulation
pour autrui: en contractant, l’expéditeur demandait au
voiturier d’accomplir une prestation au profit du
destinataire et du fait de la stipulation pour autrui, ce-
dernier bénéficiait d’un droit direct contre le voiturier.
Par ce système, le destinataire pouvait exiger du
transporteur l’exécution du contrat conclu avec
l’expéditeur mais le transporteur ne pouvait pas exiger du
destinataire de payer le transport. Ainsi, en intégrant le
destinataire parmi les parties au contrat il y a des
obligations et responsabilités des deux côtés, il s’agit de
l’originalité du contrat de transport: contrat
synallagmatique à 3 parties.

Section 3: Le régime général du contrat de


transport

Le Code civil considère le contrat de transport comme un


contrat de louage d’industrie mais a été enrichi par la
LOTI pour créer un véritable statut relayé par le Code de
commerce. Néanmoins, les lignes classiques du droit des
contrats se retrouvent dans ce contrat.
1) La formation du contrat de transport

 A) Le consentement des parties

Le contrat de transport est un contrat consensuel qui se


forme donc par le simple échange des consentements.
Les juges sont assez souvent amenés à le rappeler
notamment en affirmant que toute fausse déclaration
quant à la nature des marchandises est considérée
comme constitutive d’un vice du consentement
entraînant la nullité du contrat, ainsi le bénéficiaire d’un
contrat de transport n’est pas toujours indemnisé en cas
de perte ou d’avarie.
S’agissant d’un contrat consensuel, il n’est pas obligatoire
de recourir à un écrit, l’écrit est néanmoins obligatoire
légalement en matière de transport fluvial et ferroviaire
international. En pratique, l’écrit existe dans une forme
très simplifiée puisque que le contrat est conclu par
téléphone puis matérialisé par un fax ou un e-mail. Et
même si ce n’est pas le cas, la matérialisation existe lors
de la réclamation du titre de transport.

Du fait de la concurrence, les transporteurs sont en état


d’offre permanente et disposent de conditions générales
ou de contrats type, la notion de contrat d’adhésion a
d’ailleurs pris naissance avec le contrat de transport.
 B) L’objet du contrat

Code civil Article1108 le contrat doit avoir un objet


certain qui forme la matière de l’engagement. Doyen
Carbonnier: l’objet du contrat est une ellipse par laquelle
on désigne habituellement l’objet des obligations nées du
contrat. Le contrat de transport de marchandises par
route étant un contrat synallagmatique a pour objet
d’une part la prestation promise par le transporteur i.e.
l’acheminement de l’envoi et d’autre part, la prestation
due par l’usager i.e. le paiement du prix du transport.

1) L’acheminement de l’envoi
Tous les contrats types définissent l’envoi comme la
quantité de marchandises, emballage et support de
charge compris mise effectivement au même moment à
la disposition d’un transporteur et dont le transport est
demandé par un même donneur d’ordre pour un même
destinataire d’un lieu de chargement unique à un lieu de
déchargement unique et faisant l’objet d’un même
contrat de transport. Différents lieux de chargement ou
de déchargement peuvent être admis si ces lieux sont
tous situés dans l’enceinte d’un même établissement ou
chantier (on considère alors qu’ils sont aussi uniques).
Ainsi, il y a autant d’envoi que de couples
expéditeurs/destinataires et il y aura autant de contrats
que d’envois.

Tout objet corporel, toute marchandise et tout animal (ou


homme) vivant ou mort peut faire l’objet d’un contrat de
transport, cependant la règle n’est pas absolue puisque
certaines marchandises ne sont admises que sous
certaines conditions: il s’agit du gibier, des explosifs et
des matières dangereuses. Certaines marchandises sont
aussi purement et simplement exclues de tout transport:
l’absinthe (depuis 1915), les produits de pêche sous-
marine, les envois postaux en raison du monopôle postal
(sous réserve des recommandations européennes).
2) Le prix du transport

Tous les prix de transport de marchandises par route


relèvent de la libre négociation des parties quelles que
soient les caractéristiques de l’envoi. La LOTI de 1982
impose uniquement un juste prix. Néanmoins, la
concurrence excessive entre transporteurs a fait chuter
les prix entre 1986 et 1992 ce qui a été très préjudiciable
aux transporteurs et à la bonne gestion des entreprises
de transport. Le législateur a donc dû intervenir mais il a
refusé la notion de prix planché en préférant encadrer la
concurrence. Il a donc créé en 1995 et 1996 des règles de
comportement. En dehors de ces règles de
comportement, les dispositions du Code civil
s’appliquent.

En général, le prix est librement débattu entre le donneur


d’ordre et le transporteur mais il peut également résulter
de l’attitude des parties: ainsi, le fait de ne pas contester
une majoration vaut acception du nouveau prix. Par
ailleurs, en cas de contestation, le prix peut être fixé par
le juge qui statuera en équité au motif que de toute façon
le transporteur n’a jamais eu l’intention de transporter
gratuitement.

La LOTI exige que le contrat comprenne une clause


relative au prix mais Cour de cassation 1991 a estimé que
l’accord des parties sur le prix ne constitue pas un
élément essentiel de la formation du contrat qui crée
simplement une obligation de faire. Selon la LOTI, le prix
convenu concerne le coût réel du service rendu dans des
conditions normales d’organisation et de productivité, à
défaut, le contrat serait nul de nullité absolue mais en
pratique, ce texte ne peut être appliqué dans la plupart
des cas car on annulera alors un contrat qui a été exécuté
et souvent bien exécuté, la nullité n’est donc pas la
sanction appropriée. De plus, la nullité entraîne la
restitution et donc un nouveau transport ! Les tribunaux
préfèrent donc statuer en équité quitte à réduire le prix
stipulé au contrat.
Sauf stipulation contraire, le prix de ne peut être remise
cause (Code civil 1134), lorsque les parties signent le
contrat, elles savent quels éléments sont pris en compte
pour le calcul du prix (il s’agit du prix réel: coût du
carburant etc.). Une entreprise n’est donc pas autorisée à
réclamer une rallonge sous prétexte d’une hausse de
carburant ou d’une erreur d’évaluation du coût de sa
prestation, la Cour de cassation l’affirme régulièrement
même si l’entreprise démontre que cela l’a conduit à
travailler à perte. Seule une augmentation par
l’expéditeur de la quantité de marchandises prévues au
contrat pourrait justifier une rallonge
 C) La sanction des conditions de
formation

La sanction traditionnelle en matière de formation est la


nullité du contrat mais cette sanction est inadaptée au
contrat de transport en raison des difficultés de remise en
état. Sont ainsi préférés les dommages et intérêts et la
réduction de prix.

Selon le droit commun, on constate que les vices du


consentement sont rarement invoqués. En outre, depuis
Cour de cassation 6 fév. 1922 la Cour de cassation estime
que l’erreur sur la qualité de propriétaire de la
marchandise en la personne de l’expéditeur n’a aucune
influence sur la validité du contrat de transport. Ainsi,
seule la question de l’erreur sur la nature de marchandise
peut être considérée comme une erreur sur la substance
au sens de Code Civil Article1110. Ainsi, Cour de cassation
1998 a estimé que le fait de ne pas signaler le caractère
dangereux des marchandises a pu être considéré comme
constitutif de nullité d’un contrat de transport
ferroviaire.

Selon la LOTI, la nullité est également prévue en cas


d’inobservation de certaines de ses dispositions:
– Article9 vise la nullité de la clause compromettant la
sécurité des transporteurs et des usagers, est ainsi nulle
toute clause enjoignant au transporteur de ne pas
respecter les règles de conduite et les durées de la
sécurité routière.

– Article32 envisage la nullité de l’entier contrat pour non


respect de l’obligation d’estimer les temps nécessaires à
l’exécution du contrat. Ici encore cette nullité n’est pas
efficace puisque pour savoir si la durée du transport a été
mal envisagée, il faut avoir effectué le transport !

2) La preuve du contrat de transport


Le contrat de transport peut être conclu par oral, par
téléphone. Cette absence de support textuel, ne saurait
priver le contrat de toute existence et de tout effet. La
preuve sera seulement plus difficile à apporter.
L’administration de la preuve se fait conformément au
droit commun même si ici certains documents spécifiques
peuvent faciliter les choses. Enfin, les règles vont varier
puisque le voiturier est un professionnel et donc dans la
plupart des cas le contrat sera mixte, parfois commercial
mais jamais civil.
1) La preuve du contrat de transport commercial

La Cour de cassation depuis Cour de cassation 18 juill.


1956 rappelle que le contrat de transport revêtant un
caractère commercial pour les deux parties peut être
prouvé par tout moyen notamment par témoignage ou
présomption. Le plus souvent, la preuve se fera par la
production du document de transport établi lors de la
rencontre des volontés. Il n’est pas nécessaire que l’acte
réponde aux conditions Code Civil Article1325, il peut
donc être rédigé en un seul exemplaire il vaudra alors
commencement de preuve par écrit susceptibles d’être
complété par des témoignages ou présomptions de fait
comme par exemple l’exécution du contrat par le
voiturier. La preuve peut également résulter de la facture
établie par le transporteur, arrêt de 1990 qui doit être
marqué d’une réserve puisque désormais même entre
commerçants une facture est insuffisante pour établir al
réalité d’une prestation si elle n’est pas assortie du bon
de commande (la Cour de cassation l’a jugé en matière de
vente mais la solution peut être étendue au contrat de
transport).

Les juges du fond refusent le simple récépicé de télécopie


en l’absence d’autres indices.
2) Le contrat de transport mixte

Les règles commerciales et civiles sont appliquées de


manière distributive. Le client pourra discuter selon les
règles commerciales mais le transporteur selon les règles
du Code Civil, il lui faudra alors un écrit, les témoignages
et présomptions ne pouvant suffire (Cass 1992, rappelé
en nov. 2005).

3) L’exécution du contrat de transport

Le contrat de transport est un contrat tripartite mais


même lorsqu’il avait un caractère purement
synallagmatique, il faisait naître des droits et obligations à
la charge de l’expéditeur et du transporteur mais aussi à
la charge du destinataire. Ces obligations essentielles
sont: l’acheminement de l’envoi et le paiement du prix, le
tout pour préserver les droits du destinataire à la
livraison. D’ailleurs, les plus gros développements
concernent l’acheminement de l’envoi.

 A) L’acheminement de l’envoi

Il s’agit de l’obligation principale du transporteur qu’il


doit assumer du lieu de départ au lieu de destination.
Cela suppose différentes phases:
1) La présentation de la marchandise par
l’expéditeur

Il s’agit de la première phase, elle déclenche le transport


car en l’absence de présentation il ne peut y avoir de
transport. Ainsi, le lieu de présentation est le critère de
rattachement en droit interne et international.

L’expéditeur est tenu de fournir certains renseignements


pour que le transporteur puisse exécuter le contrat. Il doit
préciser la nature de la marchandise car cela peut influer
sur le type de véhicule (ex: camion citerne). Il doit
l’informer sur la valeur de l’objet transporté surtout s’il
est précieux, cela est important car en cas de vol il y aura
soit faute lourde soit absence totale de responsabilité du
transporteur.

Le premier acte matériel est la remise de la marchandise


au transporteur. La remise conditionne le contrat de
transport, les juges estiment que la non-présentation est
une rupture unilatérale du contrat de transport
entraînant indemnisation sauf force majeure. D’ailleurs,
les contrats types contiennent souvent des clauses
pénales pour fixer forfaitairement le montant du
préjudice subi en cas de non présentation.

La présentation de la marchandise signifie que l’envoi


doit être immédiatement disponible pour le chargement,
l’expéditeur n’est pas tenu d’emballer les marchandises
car cet emballage n’est imposé que lorsque la nature de
la marchandise l’exige. Les tribunaux estiment en effet
que l’emballage généralement importe peu puisque ce
qui est fondamental est uniquement le fait que la
marchandise parvienne en bon état à destination.
Lorsque l’emballage est nécessaire, l’expéditeur peut
faire appel à un emballeur professionnel mais il s’agira
d’un contrat indépendant du contrat de transport.

Les palettes et les conteneurs sont des emballages et ne


peuvent donc pas être considérés comme prêtés, loués
ou consignés. Lorsqu’ils font l’objet de restitution, ils
constitueront un nouveau contrat de transport
moyennant rémunération (ex: d’où les tas de palette dans
les cours des transporteurs !).

L’expéditeur doit, s’il y a des colis, étiqueter chaque colis,


l’étiquette indiquant la nature de la marchandise, le lieu
de livraison, l’expéditeur et le destinataire, ceci pour
faciliter l’indentification en cas de perte et aussi pour
permettre le groupage des contrats de transport.

L’expéditeur doit donc globalement mettre la


marchandise en l’état d’être transportée. Il s’agit du
corolaire de l’obligation du transporteur de fournir un
véhicule adapté.
Présenter la marchandise pour l’expéditeur signifie aussi
charger le véhicule, les textes sont clairs: l’expéditeur est
tenu de procéder lui-même au chargement même si
celui-ci est supérieur à 3 tonnes, juridiquement ce n’est
donc pas au conducteur du véhicule de charger et de
décharger (s’il le fait quand même et se blesse il ne s’agit
donc pas d’un accident de travail). Le transporteur doit
seulement présenter le véhicule à l’opération de
chargement et n’est même pas tenu d’un devoir de
conseil. L’expéditeur peut demander à une entreprise
spécialisée en manutention d’effectuer le chargement
mais il s’agira d’un contrat indépendant du contrat de
transport. D’ailleurs, Cour de cassation 1981 a estimé que
la prescription d’un an valable pour le contrat de
transport n’est pas applicable au contrat de
manutention.

Le chargement doit être effectué dans le délai convenu


ou fixé dans le contrat type applicable. Si rien n’est prévu,
il s’agit d’un délai raisonnable. Le délai court à compter
de la mise à disposition du véhicule. D’ailleurs, l’heure de
mise à disposition et l’heure de fin de chargement
doivent être reportées sur le bulletin de transport. Ce
sera un des éléments pris en compte pour vérifier le prix
demandé par rapport au coût global du transport.
L’expéditeur sera responsable des dommages causés à la
marchandise lors du chargement puisque l’obligation de
charger ne pèse pas sur le transporteur. De même, il sera
responsable du dommage survenu en cours de transport
mais dû à un défaut du chargement effectué. Si c’est le
cas, le transporteur aura 1 an (à compter de la livraison ?)
pour agir contre l’expéditeur (qui l’a assigné pour
dommage survenu lors du transport). Si le transporteur
est blessé à l’occasion du chargement, la responsabilité
civile classique s’applique: 30 ans pour agir, l’expéditeur
ne pourra opposer le délai d’1 an.
Il arrive qu’un expéditeur doive indemniser un autre
expéditeur: en cas de groupage, lorsque le colis d’un
expéditeur endommage ou contamine celui d’un autre
qui voyageait dans le même véhicule.

2) Les obligations du transporteur quant à


l’acheminement

L’obligation essentielle du transporteur est d’acheminer


la marchandise à destination, en bon état et à la date
prévue. Il est donc garant de la marchandise et de la prise
en charge à la livraison. Le transporteur doit donc mettre
à la disposition de l’expéditeur un moyen de transport
approprié au lieu et à la date convenue.
Si le transporteur ne se présente pas, l’expéditeur doit
attendre 2 heures et ensuite peut rechercher un autre
transporteur (le délai correspondant au délai de carence
laissé au transporteur), il ne s’agit pas d’heures
supplémentaires. L’expéditeur pourra assigner le
transporteur défaillant pour obtenir des dommages et
intérêts.

NB: Si le transporteur prévient de son retard dans les 2


heures, l’expéditeur doit attendre jusqu’à l’heure
d’arrivée prévue. Le transporteur qui arrive à destination
alors que le destinataire n’est pas là interrogera
l’expéditeur qui lui demandera soit de laisser la
marchandise, soit de la ramener (il y aura alors un
nouveau contrat de transport) soit d’attendre sur place
(avec indemnisation).

Le transporteur est tenu de bâcher le véhicule une fois le


chargement effectué par l’expéditeur et il doit aussi
s’assurer de la sécurité du transport. Le transporteur n’a
pas à vérifier le chargement de la marchandise dans le
camion mais il doit tout de même vérifier si le
chargement ne porte pas atteinte à la sécurité routière
(sinon sanction pénale de mise en danger d’autrui). Cour
de cassation Crim estime en effet qu’est entièrement
responsable le transporteur qui n’émet aucune réserve
lors du chargement. Le transporteur a donc tout intérêt à
émettre des réserves sur la sécurité du transport quitte à
refuser le transport sur ces réserves ne sont pas
acceptées par l’expéditeur.

Pour le transporteur, la prise en charge est un acte


juridique mais ce n’est qu’un acte d’exécution du contrat
qui deviendra le point de départ de la présomption de
responsabilité pesant sur le transporteur. Le transporteur
ne devient donc responsable qu’à partir de la fin de la
prise en charge de la marchandise puisque
l’embarquement est de la responsabilité de l’expéditeur.
ex: affaire dans laquelle l’expéditeur a été condamné car
les produits pyrotechniques avaient explosé sur le quai
d’embarquement avant la prise en charge effective et
totale de la marchandise.

Le déplacement de la marchandise est l’obligation


essentielle du transporteur, il a toute liberté pour choisir
l’itinéraire et en cas de contentieux sera seulement vérifié
s’il a choisi le chemin le plus direct ou le plus praticable.
Les textes (Code de commerce, et Code Civil) prévoient
que le document de transport doit fixer le délai: doit être
indiquée une estimation de la durée du transport. Aucune
sanction n’est prévue en cas d’omission. En l’absence de
précision, il faudra donc se référer au délai prévu dans les
contrats types et l’usage veut que l’on retienne 400 km
par jour ouvrable.

Il arrive qu’en cours de transport l’expéditeur demande


au transporteur quelques modifications. C’est interdit
pour les contrats synallagmatiques mais le contrat de
transport étant un contrat de louage, Article1779 précise
que le maître de l’ouvrage peut modifier ou arrêter
l’ouvrage à la seule condition d’indemniser l’entrepreneur
de ses frais. L’expéditeur peut donc en cours de trajet
modifier le lieu de livraison ou demander au transporteur
de faire un détour pour récupérer une marchandise
destinée au même destinataire. Le transporteur a le droit
de refuser pour ne pas contrevenir aux règles de
circulation ou de temps de conduite. Tous ces éléments
vont être pris en compte lorsqu’un transport est à
l’origine d’un accident ayant entraîné la mort ou des
blessures involontaires. D’ailleurs, la première application
des dispositions sur la mise en danger d’autrui concerne
les transports routiers.

3) La livraison de la marchandise

Le destinataire est le créancier de l’obligation


d’acheminement de la marchandise. C’est pourquoi il a le
droit de réclamer au transporteur l’exécution de son
obligation de livraison. Néanmoins, le terme de
« livraison » ne recouvre pas la même notion qu’en
matière de vente.

 a) La notion de livraison

L’arrivée de la marchandise à destination vaut livraison en


matière de transport, elle vaut en effet exécution du
contrat. Il se peut que la livraison coïncide avec la remise
de la marchandise au destinataire. En d’autres termes,
faut-il une remise juridique (i.e. au lieu convenu) ou une
remise effective (i.e. déchargement effectué) ? En
pratique, ces deux types de livraison coïncident au lieu où
se trouve le destinataire mais la livraison peut durer un
certain temps or certains délais courent à compter de la
livraison, notamment, le destinataire a 3 jours pour
contester en cas d’avarie et donc le délai pour agir ne
sera pas le même selon que l’on se réfère à la livraison
matérielle ou à la livraison juridique. De même cela
influera sur la prescription en matière de responsabilité.
La question s’est posée en jurisprudence car les parties
agissent souvent tardivement.

Les deux conceptions ont été mélangées en jurisprudence


dans l’intérêt d’une des parties (pas forcément le
destinataire). D’après la Cour de cassation, la livraison en
matière de transport est l’opération par laquelle le
transporteur remet la marchandise à l’ayant-droit qui
l’accepte (Cass 17 nov. 1992). Pour qu’il y ait livraison, il
faut 3 conditions:

 – une acceptation manifeste de la marchandise


par le destinataire
 – le destinataire doit avoir eu la possibilité de
vérifier la marchandise
 – le destinataire doit avoir eu la possibilité de
prendre matériellement possession de la
marchandise

Ainsi, en matière de transport la livraison implique le


déchargement total du véhicule et que le destinataire ait
pris possession de la marchandise après en avoir vérifié
les qualités. La livraison juridique ne suffit donc pas. En
pratique, le destinataire n’est pas forcément l’acheteur.

 b) La réalisation de la livraison

Le transporteur doit présenter la marchandise au lieu et à


la date convenus et il doit la remettre au véritable
destinataire qui devra signer le bon de livraison. Le
transporteur a l’obligation de vérifier l’identité de la
personne se présentant comme destinataire ou le cas
échéant son mandat, à défaut il engage sa responsabilité
(et n’aura plus qu’à faire une action en répétition de
l’indu, en revendication ou en responsabilité civile 1382).
Au déchargement, le transporteur va remettre un
récépicé au destinataire afin que celui-ci puisse vérifier la
conformer de la marchandise et puisse effectuer
d’éventuelles réserves. Ce document lui permettra aussi
de prouver la livraison.

 c) Les empêchements à la livraison

Il y a empêchement à la livraison lorsque la marchandise


arrivée à destination ne peut pas être remise au
destinataire désigné (à ne pas confondre avec
l’empêchement au transport) i.e. la livraison matérielle
est impossible alors que la livraison juridique est réalisée.
Il y a empêchement lorsque le transporteur arrive devant
un établissement destinataire fermé ou n’a pas été
attendu. Le transporteur se réfèrera donc à l’expéditeur.

Il y a aussi empêchement lorsque le destinataire refuse la


marchandise: le laissé pour compte. Lorsque le
transporteur se heurte à un tel empêchement, il demeure
responsable des marchandises laissées sous sa garde, s’il
décharge malgré le refus, il commet une faute lourde. Le
transporteur ne peut pas non plus rapatrier d’autorité la
marchandise chez l’expéditeur. Le transporteur doit
recevoir les ordres de l’expéditeur après lui avoir envoyé
un délai de souffrance, il doit veiller à la conservation de
la marchandise (aux frais du destinataire ou de
l’expéditeur selon le contrat). Le transporteur peut aussi,
s’il n’en est pas propriétaire, remettre la marchandise à
l’administration des domaines pour que celle-ci
procèdent à leur mise aux enchères.

 B) Le paiement du prix du transport

Le paiement du prix du transport est l’obligation


principale pesant sur le client du transporteur.
1) Les modalités de paiement

Traditionnellement, les frais de transport sont payables


au comptant. Ce paiement comptant est effectué par
l’expéditeur pour les envois en port payé et par le
destinataire pour les envois en port dû. La majorité des
transports intervient en port payé et le prix est donc
acquitté au départ par le donneur d’ordre conformément
aux énonciations du titre de transport. Si l’expéditeur a
sollicité un mandataire, celui-ci devra bien le faire
préciser sur le contrat de transport s’il ne veut pas être
inquiété. S’il n’y a aucune précision, il sera en effet
redevable des sommes (Cour de cassation, chambre Com
13 mars 1990).

En général, aucune garantie de paiement n’est insérée


dans le contrat car les garanties légales sont souvent
suffisantes pour le transporteur. Celui-ci peut en effet se
référer au privilège spécial que lui reconnaît le Code Civil
en raison du déplacement de la marchandise. Ce privilège
va garantir tous les frais occasionnés par ce déplacement.
Néanmoins, il faut que les marchandises soient détenues
par le transporteur alors qu’elles ne sont pas payées car
Cour de cassation 1er juill. 1924 qui interdit au
transporteur de retenir des marchandises pour obtenir le
paiement d’opérations antérieures terminées. Il y a donc
un privilège par opération de transport.

Le privilège du voiturier est donc moins étendu que celui


du commissionnaire qui lui peut refuser un nouveau
transport s’il n’a pas été payé des précédents. En fait cela
ne gène pas le transporteur pour des raisons
commerciales et surtout ce privilège s’accompagnant
d’un droit de rétention, le moyen de pression devient très
efficace puisqu’il est opposable à tous (propriétaire ou
non de la marchandise).
Les contrats-types prévoient que le prix du transport peut
être acquitté jusqu’à la réception de la facture mais tout
retard entraîne immédiatement des intérêts légaux.

2) Les incidents de transport et de paiement du prix

Le contrat est synallagmatique i.e. la non-exécution d’une


obligation par l’une des parties permet à l’autre de ne pas
s’exécuter. En matière de transport, cela se traduit
surtout au stade du paiement lorsqu’un incident a affecté
le déplacement (marchandise ou emballage abimé ou
retard).
Selon la théorie classique des risques, il y a inexécution
lorsque la marchandise est perdue en route, si le
transporteur ne livre pas le destinataire, le paiement n’a
plus de cause. La jurisprudence a étendu la solution aux
avaries i.e. aux pertes partielles mais dans ce cas, il faut
que l’avarie soit importante et que seule une petite partie
de la marchandise a pu être vendue.

Il arrive aussi que le transporteur soit obligé de modifier


son itinéraire ce qui entraine des faits supplémentaires.
Là encore, il y aura réajustement si la modification est
due au donneur d’ordre et non au transporteur.
Finalement, la situation est relativement simple: lorsque
toute la marchandise est perdue, pas de paiement,
lorsque perdue partiellement ou lorsque frais
supplémentaires, le prix sera révisé. Dans tous les cas, le
juge devra intervenir, il va notamment se référer au Code
Civil Article1290 et 1291 qui permettent la compensation
(légale) entre le prix du transport et les dommages et
intérêts demandés si les dettes invoquées sont certaines,
liquides et exigibles.

Chapitre 2: Le contrat de transport CMR

Il s’agit d’un contrat de transport routier de marchandises


régi par la Convention de Genève du 19 mai 1956 (CMR).
Il s’agit d’une convention européenne à vocation
universelle, elle s’applique entre les Etats suivants:
Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne, Finlande, France,
Grande-Bretagne, Grèce, Hongrie, Italie, Luxembourg,
Norvège, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Roumanie, Suède,
Suisse et Slovaquie.

Lorsque les conditions d’application sont réunies, les


parties n’ont pas le droit d’écarter la Convention CMR, il
s’agit d’un texte impératif.
Lorsque la Convention est inapplicable, le contrat de
transport international sera régi par les règles de DIP, on
retient donc la loi d’autonomie avec à défaut de choix
l’application de la loi du lieu d’exécution du contrat. Dans
la plupart des cas, s’appliquera la Convention de Rome du
19 juin 1980 qui désigne à défaut d’autonomie la loi du
lieu de chargement ou de déchargement si ce lieu
correspond avec le siège de l’entreprise de transport, si
ça ne correspond pas ce sera la loi du lieu de
chargement.
CMR Article1 1. s’applique à tout transport international
routier si le lieu de prise en charge et de livraison de la
marchandise mentionné dans le contrat sont situés dans
des pays différents ET si l’un des 2 pays concernés est un
Etat contractant. La CMR ne s’applique donc qu’au
contrat de transport international.

ex: transport de Nice à Paris en passant par l’Italie,


l’Allemagne et la Suisse, il s’agit d’un transport interne !

Tout contrat international qui part de France ou qui arrive


en France sera un contrat CMR dès lorsque le transport a
lieu par route, Cour de cassation 8 jan. 1996 reproche à
une CA de ne pas avoir appliqué la CMR pour un transport
en partance de France pour une destination située dans
un Etat non contractant.

CMR Article1 ajoute que la nationalité et le domicile des


parties sont inopérants.

ex: tchèque domicilié en Russie contracte avec un Danois


pour transporter de Russie vers la France, il s’agit d’un
contrat CMR.

La CMR s’applique à tout contrat réalisé à titre onéreux


au moyen d’automobiles, véhicules articulés, remorques
et semi-remorques alors même que le transport serait
effectué par des Etats ou organisations
gouvernementales.

Il faut aussi que le transport se réalise de bout en bout.


En effet, la CMR régit en principe le transport pour lequel
un contrat de transport unique a été souscrit d’un bout à
l’autre et réalisé par un même transporteur. S’il y a un
commissionnaire, la CMR est inapplicable. La
jurisprudence applique néanmoins la CMR en cas de
transporteurs successifs et en cas de transports combinés
à la condition que le véhicule soit transporté sans rupture
de charge par mer, par voie navigable intérieure, fer ou
air, sur une partie du trajet CMR Article2.
Section 1: La conclusion du contrat CMR

Pour conclure un contrat CMR, l’expéditeur doit choisir


un transporteur public autorisé à effectuer le transport
international envisagé, il doit déclarer la valeur de la
marchandise, l’assurer et respecter les tarifs. La preuve
de la conclusion d’un contrat CMR se fera par tout moyen
et notamment par les offres de service et les bons de
commande.
1) Les déclarations

 A) La déclaration de valeur

L’expéditeur qui souhaite augmenter le plafond


d’indemnité en cas de dommage matériel doit souscrire
une déclaration de valeur moyennant supplément de
prix.

Le taux CMR d’indemnisation est de 8,33 unités de


compte par kilo du poids brut manquant. Si la
marchandise vaut plus de 8,33 euros par kilo, une
déclaration de valeur peut être intéressante. Cette
déclaration de valeur doit être mentionnée sur la lettre
de voiture (tout le monde doit être au courant) et de
manière assez régulière les tribunaux écartent des
déclarations de valeur unilatérales (non signées ou non
tamponnées par le transporteur). A défaut de mention
expresse valable, la déclaration ne sera pas opposable
aux tiers sauf si elle est confirmée par ailleurs (témoins,
reconnaissance du transporteur). Tout document remis
par les douanes et qui serait le seul à viser une valeur ne
vaut pas déclaration de valeur.
 B) La déclaration d’intérêt à la livraison

Pour pouvoir être indemnisé de tout type de préjudice


consécutif à une perte, avarie ou un retard, il faut avoir
souscrit une déclaration d’intérêt spécial à la livraison
sinon ne sera remboursé que le préjudice matériel direct.
Il y aura un supplément de prix et cette déclaration doit
absolument être jointe au contrat de transport, la seule
mention avec date impérative de livraison est
insuffisante. De même, s’il y a une déclaration mais sans
supplément de prix chiffré, elle ne vaut pas déclaration
d’intérêt.
2) L’assurance

L’expéditeur peut donner au transporteur toutes les


instructions nécessaires à l’assurance de la marchandise
par une mention spéciale sur la lettre de voiture. En
pratique, il est recommandé de conclure une assurance
spécifique surtout si le contrat CMR comporte une phase
de transport maritime ou ferroviaire. En effet, grâce à
cette assurance, le transporteur CMR pourra plus
facilement s’exonérer pour tous les faits (les siens ou
ceux d’un tiers) qui se produisent au cours de la phase
non routière.
Les transports publics (i.e. autorisés) routiers de
marchandises entre Etats de l’UE sont soumis à des tarifs
bilatéraux établis par des règlements communautaires.
Ces tarifs ne concernent pas tous les pays mais existent
entre la France, l’Allemagne, la Belgique, l’Italie, le
Luxembourg et les Pays-Bas. Entre ces pays, le tarif
s’applique d’autant que la Cour de cassation en 1977 a
estimé que la méconnaissance des tarifs communautaires
entraîne un redressement du prix même si le règlement
prévoit des dérogations par contrat.
Section 2: L’exécution du contrat CMR

1) La présentation de la marchandise

Avant toute prise en charge de la marchandise, le


transporteur est tenu de vérifier l’exactitude des
mentions figurant sur la lettre de voiture surtout pour ce
qui concerne le nombre de colis, les marques et les
numéros. S’il ne peut pas procéder à cette vérification, le
transporteur peut inscrire des réserves motivées sur la
lettre de voiture et ces réserves seront opposables à
l’expéditeur si celui-ci les a acceptées i.e. contresignées. A
défaut de réserve, la lettre de voiture est présumée
correspondre au contenu exact du transport.

Le transporteur CMR est également tenu de vérifier l’état


apparent de la marchandise et de son emballage avant
toute prise en charge à moins qu’on ne l’en empêche et
auquel cas, il doit encore faire des réserves. Par ailleurs,
la CMR prévoit que l’expéditeur exige à ses frais la
vérification du contenu en poids et qualité par le
transporteur.
2) Le chargement et l’arrimage

La CMR est muette sur le point de savoir à qui incombent


les opérations de chargement. TGI Nancy 15 jan. 1987 la
CMR ne prévoyant rien, estime qu’il faut se référer au DIP
pour déterminer la loi applicable permettant de répondre
à la question, il estime qu’à défaut de choix dans le
contrat, il faut se référer à la loi du lieu de conclusion du
contrat de transport car elle correspond au moment de la
rédaction de la lettre de voiture. Le transporteur doit
contrôler le chargement même si la loi applicable précise
que le chargement doit être opéré par l’expéditeur (loi
française).
La CMR ne contient pas de précision sur le délai de
chargement et de déchargement. En l’absence de
précision, il est possible de se référer aux tarifs
communautaires qui prévoient une indemnisation
forfaitaire lorsque le transporteur établit que
l’immobilisation est due au donneur d’ordre. C’est aussi
ce que prévoit le droit français. Il y a donc une application
classique du droit des transports en Europe, qu’il y ait des
tarifs ou non.

La CMR ne contient pas non plus de règles sur l’arrimage,


il faut donc se référer au DIP et appliquer à défaut de
précision la loi du lieu de conclusion du contrat: Cour de
cassation 10 oct. 1989 estime que le transporteur CMR
doit, selon la loi française désignée par la règle de conflit,
vérifier l’arrimage effectué par le client dans un souci de
sécurité du transport sous peine d’être déclaré
coresponsable de dommages survenus en cours de
transport alors qu’il n’a émis aucune réserve.

3) La prise en charge de la marchandise

 A) Avec réserves

Le transporteur qui se trouve dans l’impossibilité de


vérifier l’adéquation de la marchandise aux mentions de
la lettre de voiture a la possibilité d’émettre des réserves
motivées. Ces réserves n’engagent l’expéditeur que dans
la mesure où celui-ci les accepte et la Cour de cassation a
même estimé que le transporteur CMR peut refuser la
prise en charge s’il estime que la marchandise ne
supportera pas le voyage.

 B) En l’absence de réserve

L’absence de réserve présume une réception de


marchandises en bon état apparent i.e. correctement
emballées et conformes aux énonciations de la lettre de
voiture. Si est livrée à destination une marchandise de
moindre qualité ou quantité, le transporteur n’est tenu
de réparer cette perte ou avarie que dans la mesure où il
n’établit pas que le dommage préexistait à la prise en
charge ou qu’il est imputable à un tiers ou que le vice
n’était pas apparent.

4) L’établissement de la lettre de voiture

 A) Les mentions de la lettre de voiture

CMR Article5 en principe, la lettre de voiture doit être


établie par l’expéditeur en 3 exemplaires originaux. Un
exemplaire est remis à l’expéditeur, un autre au
transporteur et le troisième va accompagner la
marchandise et sera remis au destinataire. La lettre de
voiture doit être signée ou tamponnée par le
transporteur et l’expéditeur. Etant donné qu’il est
impossible de se soustraire à la CMR, le défaut de lettre
de voiture est considéré comme une faute dolosive ou
lourde de la part du transporteur.

En principe, les parties sont libres de formuler la lettre de


voiture comme elles l’entendent mais la CMR après avoir
posé ce principe, impose des mentions obligatoires: le
lieu et la date de l’établissement de la lettre de voiture,
coordonnées des parties, lieux et dates de prise en charge
et de déchargement, dénomination courante de la
marchandise, nombre de colis, marques et numéros,
poids brut, frais de transport, formalités douanières et
visa de la CMR.

En cas d’inexactitude ou d’insuffisance, l’expéditeur est


responsable de tout frais et dommage pouvant en
résulter.

 B) Le dédouanement de la marchandise

L’expéditeur doit joindre à la lettre de voiture tous les


documents nécessaires à l’accomplissement des
formalités douanières ainsi que tous les renseignements
utiles au transporteur. La CMR donne une liste de ces
documents et prévoit que l’expéditeur est responsable
envers le transporteur de tous les dommages pouvant
résulter de l’absence, de l’insuffisance ou de l’irrégularité
des documents et renseignements fournis.

ex: la responsabilité de l’expéditeur a été engagée pour le


gel de la marchandise contenue dans un véhicule qui
avait été en plein hiver immobilisé au tunnel du Mont
Blanc du fait de l’absence d’un document de transit.

ex: indemnisation d’un retard dû à l’absence d’un


certificat d’origine de la marchandise ou pour insuffisance
des documents fournis à l’administration des douanes.
Tout repose donc sur l’expéditeur à moins que le
transporteur n’ait perdu ou n’utilise pas correctement les
documents qui lui avaient été remis et il y a alors faute
lourde de sa part engageant sa responsabilité.

 C) La modification du transport prévu

La CMR prévoit que l’expéditeur peut modifier le contrat


de transport initial en arrêtant le transport prévu, en
modifiant le lieu de livraison ou en modifiant le nom du
destinataire. Cela est tout à fait possible dès
l’établissement de la lettre de voiture. Néanmoins, il faut
respecter certaines conditions:
– il faut fournir une nouvelle lettre de voiture

– les nouvelles instructions ne doivent pas entraver


l’exploitation normale du transporteur, elles ne doivent
pas avoir pour effet de diviser l’envoi

– le nouveau document doit prévoir le dédommagement


du transporteur pour tous les frais et préjudices suscités
par ces nouvelles instructions
5) La remise de la marchandise par le
transporteur

La CMR ne prévoit aucune disposition relative au


déchargement. Il faut donc se référer à la volonté des
parties: Cour de cassation Civ 12 avril 1938 à défaut,
s’appliquera la loi du lieu de destination. S’il y a un
empêchement à la livraison, le transporteur doit
demander des instructions à son client et à défaut, il peut
être déclaré responsable du préjudice subi par
l’expéditeur.
Normalement, le transporteur obéit à l’expéditeur mais le
destinataire a la possibilité de demander la livraison tant
que le transporteur n’a pas reçu les instructions de son
client.

ex: livraison avec incident: le destinataire est absent. Le


transporteur demande à l’expéditeur ce qu’il doit faire,
tant qu’il n’a pas d’ordre de l’expéditeur, il attend et si le
destinataire arrive il pourra prendre livraison.

Si la loi locale le lui permet, le transporteur a la possibilité


de faire procéder à la vente de la marchandise sans
instruction de son client si la marchandise est périssable,
si son état ne permet pas d’attendre ou si les frais de
garde sont disproportionnés par rapport à la valeur de la
marchandise. Dans tous les autres cas, il ne pourra faire
procéder à la vente que s’il n’a pas reçu réponse de son
client dans un délai raisonnable.

6) La réception des marchandises par le


destinataire

Le destinataire doit vérifier la marchandise et s’assurer de


sa conformité. Si tout se passe bien, il signera la lettre de
voiture sans émettre de réserves. Même dans cette
hypothèse, en cas de vice caché, il a la possibilité de
réagir tant que l’action n’est pas prescrite i.e. dans le
délai d’1 an.

En revanche, en cas de perte ou avarie apparente, il doit


formuler des réserves au moment de la livraison. Lorsque
les dommages ne sont pas apparents, il a 7 jours
ouvrables pour émettre ses réserves. Les réserves doivent
être précises sinon elles seront inopérantes. Pour éviter
toute difficulté ultérieure, la réserve a intérêt à être
contradictoire et d’ailleurs en pratique, on demande
souvent l’intervention d’un expert d’assurance pour
procéder contradictoirement au relevé des dommages.
Section 4: La réparation des pertes, avaries et
retards

Le transporteur est responsable de la perte ou de l’avarie


subie par la marchandise entre le moment de la prise en
charge et celui de la livraison, la CMR est donc très claire
sur ce point. Les tribunaux ont ajouté par analogie que le
transporteur était également responsable des retards
susceptibles d’être préjudiciables (il faut donc qu’un
dommage soit subi du fait du retard). Cette responsabilité
joue à l’encontre du transporteur pour ses propres actes,
pour ceux de ses préposés ou de ses sous-traitants mais
elle ne jouera que si la loi applicable permet d’invoquer la
faute délictuelle du transporteur, de ses préposés ou des
tiers dont il répond. Quoi qu’il en soit, les tribunaux
estiment que la disposition est inopposable aux tiers
complètement étrangers au contrat de transport.

1) La constatation de la perte, de l’avarie ou du


retard

 A) L’existence de la perte ou de l’avarie

La perte ou l’avarie de la marchandise est établie dès lors


que les réserves régulières n’ont pas été prises par le
transporteur lors de la prise en charge. En l’absence de
réserve cela signifie que la marchandise était conforme à
la description donnée dans la lettre de voiture. Par
extension, cela signifie que tout ce qui n’a pas été relevé
par le transporteur mais signalé par le destinataire résulte
d’un évènement survenu en cours de transport. La Cour
de cassation affirme régulièrement que toute avarie
même non apparente mais dénoncée par le destinataire
est présumée survenue en cours de transport sauf au
transporteur d’en établir l’existence préalable. S’il n’y a
aucune réserve formulée à la livraison par le destinataire
cela prouve que la marchandise était conforme à la lettre
de voiture d’où l’importance des réserves à quelque
moment que ce soit du transport.
 B) La présomption de perte

Rappel : La convention de Genève dite C.M.R.


(Convention relative au contrat de transport international
de Marchandise par Route) règle les conditions de
transport et la responsabilité des différentes parties au
contrat de transport (Donneur d’ordre, Chargeur,
Transporteur, Destinataire). La C.M.R. fut signée le 19 mai
1956 à Genève et mise en œuvre en 1958.

Selon la CMR, la marchandise doit être considérée


comme perdue lorsqu’elle n’a pas été livrée dans les 30
jours de sa prise en charge par le transporteur. Dans cette
hypothèse, le destinataire peut réclamer une indemnité
pour perte sans formalité particulière. Il peut aussi
demander par écrit d’être informé si la marchandise est
retrouvée dans l’année du paiement de l’indemnité. S’il a
fait la demande et qu’il est avisé du fait que la
marchandise est retrouvée, il va disposer d’un délai de 30
jours à compter de l’information pour prendre sa décision
finale: prendre la marchandise et restituer l’indemnité
perçue ou refuser la marchandise en la laissant au
transporteur qui procèdera à sa vente aux enchères ou à
sa destruction.
 C) L’existence et la constatation du retard

Le destinataire peut demander réparation au


transporteur du préjudice que lui cause une livraison
tardive surtout si le transporteur a pris l’engagement de
respecter un délai déterminé. La CMR est beaucoup plus
libérale que le droit français puisqu’elle prévoit quand
même une indemnisation en l’absence de délai prévu
lorsque la durée effective du transport dépasse le temps
que l’on est en droit d’attendre d’un transporteur
diligent, condition appréciée par le tribunal (il n’y a pas de
notion de délai raisonnable mais une référence au pater
familias). Aucune mise en demeure n’est exigée car en
cas de retard le destinataire va émettre des réserves et
que ces réserves sont obligatoires en cas de retard dans
un délai de 21 jours après la date convenue. Ainsi, jusqu’à
21 jours, il s’agit du retard et au-delà il s’agit de perte. Au-
delà d’un délai de 21 jours, les réserves deviendraient
irrecevables et donc inopposables.
2) L’exonération du transporteur

 A) L’exonération pure et simple

Le transporteur n’est pas tenu de réparer la perte, l’avarie


ou le retard si ces évènements sont dus à une faute ou à
ordre de l’ayant-droit à la marchandise (CMR Article17).

Il ne sera pas non plus responsable d’une perte ou avarie


qui résulterait d’un vice propre à la marchandise, il en ira
de même si la perte, l’avarie ou le retard sont dus à des
circonstances que le transporteur ne pouvait éviter et
surmonter. En application de la CMR, la Cour de cassation
estime que l’exonération joue même si l’évènement
irrésistible n’était pas nécessairement imprévisible (Cour
de cassation, 27 jan. 1981 à l’époque, la force majeure
revêtait encore les 3 caractéristiques cumulées:
imprévisible, irrésistible et extérieure, le DIP n’a jamais
cumulé les 3 critères).

 B) La preuve contraire

Hypothèse de la preuve contraire apportée par


l’expéditeur. Grace à la CMR, le transporteur bénéficie
d’une présomption d’origine du dommage lorsqu’il établit
que la marchandise n’était pas conforme aux prévisions
de la CMR ce qui peut être à l’origine du dommage (type
de véhicule, emballage, arrimage etc.). L’expéditeur peut
établir que le dommage n’est pas entièrement dû à ces
éléments. L’ayant-droit peut donc demander réparation
sauf cause exonératoire de CMR Article17.

Conscient qu’il ne pouvait pas toujours y avoir force


majeur, CMR Article23 dispose que le montant des
dommages et intérêts ne peut en aucun cas dépasser le
prix du transport total. La CMR prévoit aussi que les
intérêts représentent un taux de 5 %. Ce texte va dans le
sens des transporteurs pour pousser à demander
réparation dans un délai très bref. La CMR est d’ordre
public si bien que les tribunaux estiment nulle toute
clause pénale qui adopterait un autre système en vue
d’indemniser l’ayant-droit en cas de perte, avarie ou
retard.

 C) La réparation des pertes ou avaries

1) L’action en réparation

L’action en réparation est le plus souvent exercée par


l’assureur qui a indemnisé l’ayant-droit à la marchandise
et dans les droits duquel il est subrogé. Le droit d’action
contre le transporteur appartient à chacune des parties
au contrat et en principe, seul le transporteur est
assigné.
Cette action doit être intentée dans le délai d’1 an ou de
3 ans en cas de dol ou de faute équipollente au dol selon
la loi du juge saisi. La Cour de cassation estime que la
notion de faute équipollente au dol correspond à la
notion de faute lourde.

Ainsi, en pratique, il faut agir dans le délai d’1 an car la


faute lourde est rarement retenue.

Ces délais sont impératifs, les parties ne peuvent pas les


écarter ou les modifier. Ces délais s’appliquent
uniquement aux actions nées de l’exécution du contrat de
transport.
La computation des délais: point de départ:

 – le délai commence à courir du jour où la


marchandise a été livrée en cas de perte partielle,
avarie ou retard.
 – en cas de perte totale, les délais commencent à
courir à partir du 30ème jour après expiration du
délai convenu ou à défaut de délai convenu, à
partir du 60ème jour à compter de la prise en
charge de la marchandise.
 – dans tous les autres cas, les délais courent à
partir d’un délai de 3 mois à compter de la
conclusion du contrat.
Pour les délais qui se comptent en jours, le point de
départ est minuit (0h00).

La CMR prévoit que le régime de la prescription est


soumis à la loi du juge saisi (suspension, interruption
etc.). L’assignation, même devant un juge incompétent,
va interrompre la prescription alors qu’ne mise en
demeure ne va pas l’interrompre.

La CMR (antérieure à la Convention de Bruxelles) prévoit


que l’action est portée, en l’absence de choix, devant le
juge du pays sur le territoire duquel le défendeur a sa
résidence habituelle ou au lieu de prise en charge ou de
livraison de la marchandise. Idem règlement
communautaire du 22 déc. 2000.

2) Les dommages et intérêts

En principe, selon la CMR, seul le préjudice matériel doit


être indemnisé en fonction de la dépréciation de la
marchandise mais le texte fixe des limites: si l’ensemble
de la marchandise est déprécié par l’avarie
l’indemnisation ne peut pas dépasser le montant prévu
pour perte totale. Le texte prévoit aussi les modalités de
calcul et d’appréciation de cette indemnisation.
Quel que soit le montant des dommages et intérêts, il
faut se référer à l’unité de compte et l’indemnité ne
pourra être supérieure à la somme obtenue en
multipliant les kilos manquants par 8,33 (ex: si euros et
100 kg perdus 833 euros d’indemnisation) sauf
déclaration de valeur.
Exception: en cas de faute lourde du transporteur, la
réparation est intégrale.
Chapitre 3: Le contrat de commission de
transport

Le contrat de commission est une notion juridique


souvent inconnue à l’étranger et ignorée par conséquent
par les conventions internationales. Ainsi, la CMR ne peut
pas s’appliquer si le transport se réalise grâce à un
commissionnaire. Le contrat de commission de transport
de marchandises est une figure juridique (française)
autonome distincte du contrat de transport même si
pendant longtemps, ils étaient confondus. La confusion
résulte du fait que ces 2 conventions ont pour objet le
déplacement d’une marchandise d’un lieu à un autre, les
contrats étant exécutés par des professionnels tenus
d’une obligation de résultat.

Lorsque le déplacement de la marchandise suppose


l’utilisation de plusieurs services et de plusieurs types de
véhicules, l’expéditeur a tout intérêt à s’adresser à un
commissionnaire, c’est plus facile pour lui et sa
responsabilité ne sera aussi souvent engagée.

ex: un commerçant désire expédier ses produits de Lille à


Los Angeles, si ce commerçant travaille seul, il devra
d’abord passer un contrat avec un transporteur routier ou
ferroviaire pour acheminer son envoi par avion ou par
bateau. S’il choisit le bateau, il devra contacter un
transitaire portuaire puis un transporteur maritime qui
acheminera la marchandise jusqu’à New-York. Il devra
prendre contact avec un transitaire américain pour que la
marchandise soit emmenée jusqu’à un aéroport, il y aura
ensuite un transporteur aérien jusqu’à Los Angeles puis
un nouveau transport routier. Toute cette opération est
très lourde à mener et gérer pour un commerçant, il est
donc plus simple de choisir un commissionnaire puisque
son travail sera justement d’organiser le déplacement de
la marchandise et de faire la jonction entre tous les
transporteurs. De plus, en cas de problème, si
l’expéditeur a agi seul, il y aura autant de juges
compétents que de contrats passés alors que le passage
par un commissionnaire permet de n’avoir qu’un seul
juge compétent: celui du commissionnaire, peut importe
à quel stade du transport le problème survient.

Pour des raisons de trésorerie il est aussi parfois plus


intéressant de passer par un commissionnaire.

Section 1: La détermination de la commission de


transport

La loi ne donne aucune définition du contrat de


commission de transport et cette absence de définition a
aussi contribué à la confusion entre commission et
contrat de transport. Finalement, la Cour de cassation est
intervenue le 16 fév. 1988 en jugeant que la commission
de transport est la convention par laquelle le
commissionnaire s’engage envers le commettant à
accomplir pour le compte de celui-ci, les actes juridiques
nécessaires au déplacement de la marchandise d’un lieu à
un autre, elle se caractérise par la latitude laissée au
commissionnaire d’organiser librement le transport par
les voies et moyens de son choix, sous son nom et sous sa
responsabilité, ainsi que par le fait que cette convention
porte sur le transport de bout en bout.
En vertu de cette définition, le contrat de commission
comporte plusieurs éléments fondamentaux dont on peut
déduire les critères de qualification qui vont permettre de
distinguer la commission des conventions voisines.

1) Les éléments de qualification du contrat de


commission de transport

Pour la Cour de cassation, la définition est importante car


depuis 1992, elle affirme régulièrement que l’inscription
d’une entreprise au registre des commissionnaires de
transport n’est pas suffisante pour établir sa qualité de
commissionnaire dans l’opération visée. Même en
présence d’un commissionnaire, il faut que l’opération
conclue avec lui s’analyse comme un contrat de
commission: il faut que la personne soit un intermédiaire,
que cet intermédiaire soit un organisateur de transport, il
faut qu’il agisse en son nom personnel et qu’il supervise
le transport de bout en bout i.e. du début à la fin. Cela
signifie que la qualité de commissionnaire ne se présume
pas et les tribunaux comme la Cour de cassation
affirment que c’est à celui qui se prévaut de la qualifié de
commissionnaire ou qui l’attribue à son adversaire qui
doit en rapporter la preuve.
 A) Le commissionnaire est un
intermédiaire

La commission de transport suppose l’interposition d’un


troisième personnage entre l’expéditeur et le
transporteur qui va superviser le déplacement de la
marchandise. L’opération donne donc naissance à 2 séries
de rapports contractuels, d’une part existe le contrat de
commission conclu entre l’expéditeur commettant et le
commissionnaire et d’autre part les contrats de transport,
manutention, entreposage etc. qui sont conclus entre le
commissionnaire et des auxiliaires de transport pour faire
parvenir la marchandise à destination. Ces deux types de
rapports juridiques ne doivent pas être confondus. Cette
bivalence du contrat se retrouve dans Code de commerce
Article L132-8 qui dispose que la lettre de voiture forme
un contrat entre l’expéditeur, le commissionnaire et le
voiturier. L’interposition d’une personne indépendante
ne vaut pas systématiquement commission de transport.
Ainsi, lorsqu’une entreprise achemine dans l’un de ses
véhicules des envois provenant d’expéditeurs différents,
il n’y a pas d’intermédiaire, il s’agit d’un envoi groupé, il y
a simplement plusieurs expéditeurs groupés pour une
opération de transport.
 B) Le commissionnaire est un organisateur
de transport

Cette caractéristique d’organisateur de transport répond


à une exigence psychologique du commettant.
L’expéditeur qui s’adresse à un commissionnaire de
transport attend de lui un service précis. L’expéditeur va
demander au commissionnaire de gérer au mieux le
déplacement et donc d’effectuer la soudure entre les
différents auxiliaires de transport. Le commissionnaire
n’est pas obligé de faire tout lui-même, il peut se
décharger sur les transitaires mais ces personnes seront
sous sa responsabilité. L’expéditeur cherche aussi à se
dégager de cette surveillance lorsqu’il recourt à un
commissionnaire. Le commissionnaire promet à son client
ce que la Cour de cassation appelle organiser le transport
de bout en bout. Cette obligation de soigner le transport
de bout en bout est toujours vérifiée par les tribunaux
sous le contrôle de la Cour de cassation. La Cour de
cassation peut très bien casser un arrêt d’appel au motif
que la CA n’a pas expliqué en quoi le transport a été
organisé de bout en bout par celui que l’on prétend être
commissionnaire.

Le commissionnaire va avoir en contrepartie toute liberté


quant au chemin emprunté et quant aux moyens utilisés
pour parvenir à destination. En contrepartie de cette
liberté, il assumera la responsabilité du déplacement
promis.

Pour ces différentes raisons, on comprend pourquoi on


estime que la commission de transport est un métier
impliquant que la commissionnaire soit un professionnel,
ainsi, sans caractère professionnel, la qualité juridique de
commissionnaire ne peut être reconnue. La doctrine et la
jurisprudence s’accordent sur ce point: si un non
professionnel se chargeait à titre bénévole ou moyennant
rémunération, de soigner un transport de bout en bout, il
agirait comme un mandataire ordinaire et sa
responsabilité serait appréciée comme celle d’un
mandataire gratuit ou salarié. Un transporteur organisant
le transport de bout en bout étant un professionnel,
pourra se voir reconnaître la qualité de transporteur.

2) La distinction de la commission et des


conventions voisines

Pour la doctrine, l’histoire de la commission de transport


est celle d’une lutte difficile pour conquérir son
autonomie à l’égard de certaines conventions voisines
avec lesquelles elle a souvent été confondue. Si en droit,
la confusion n’est plus possible, en revanche, elle
continue à être entretenue en pratique ce qui rejailli sur
le contentieux et empêche parfois les actions en
réparation ou en responsabilité d’aboutir.

1. A) Commission et contrat de
transport

Les fonctions économiques du commanditaire et du


transporteur sont différentes et vont rejaillir sur leurs
statuts juridiques.

La distinction est fondamentale car Cour de cassation 17


fév. 1998 a jugé que la question de savoir si un opérateur
a agit comme commissionnaire ou comme transporteur
est une contestation sérieuse empêchant le juge des
référés de statuer.

1) Les intérêts de la distinction

La distinction présente de multiples intérêts pratiques


puisque le commissionnaire peut s’exonérer de sa
responsabilité pour les pertes et avaries de la
marchandise survenues en cours de transport (Code de
commerce Article L132-5). En revanche, dans ce domaine,
le voiturier ne peut insérer de clause de non
responsabilité (Code de commerce, Article L133-1 al.3).
Le commissionnaire ne peut pas se prévaloir de la fin de
non-recevoir tirée de l’expiration du délai de 3 jours
(Code de commerce, Article L133-3) alors que le voiturier
s’en prévaut régulièrement du fait de son efficacité.

Commissionnaire et transporteur bénéficient tous deux


d’un privilège mais celui du commissionnaire a pour
fondement le Code de commerce alors que celui du
transporteur est édicté par le Code Civil. Ces privilèges
ont une assiette différente: le voiturier a un privilège tant
qu’il transporte et donc tant qu’il est en possession de la
marchandise alors que le commissionnaire peut utiliser le
privilège pour obtenir le paiement d’un déplacement
antérieur.

En matière de prescription:

– action contre le transporteur: prescription d’1 an (Code


de commerce, Article L133-6)

– action contre le commissionnaire: 1 an ou 10 ans en


fonction de l’acte litigieux.
En matière aérienne, la prescription est d’1 an contre le
commissionnaire et de 2 ans pour le transporteur aérien.

2) Les critères de distinction

Dans le transport comme dans la commission, le


déplacement repose sur une obligation de résultat, la
nature de l’obligation n’est donc pas un critère de
distinction, il faut analyser son contenu i.e. la promesse
du cocontractant à son client.

Le commissionnaire promet de soigner le transport de


bout en bout. Dans cet objectif, il va conclure pour le
compte de son client tous les actes juridiques qui vont
permettre à la marchandise d’arriver à destination. Le
cadre général des opérations est donc celui du mandat.
De son côté, le transporteur agit pour son propre compte
et effectue des actes matériels. Ainsi, les conditions
d’exécution du déplacement de la marchandise
permettent de déterminer la nature juridique du contrat,
les juges s’y attacheront donc en cas de litige.

1. a) Les conditions d’exécution


matérielle du déplacement

Les juges s’intéressent d’abord à l’exécution matérielle du


déplacement. Lorsque l’opérateur exécute lui-même le
déplacement, il s’agit d’un transporteur, dans le cas
contraire, d’un commissionnaire. Cependant, parfois,
l’expéditeur ne sait pas, lors de la conclusion du contrat,
si le transporteur va transporter lui-même ou s’il va
charger une autre personne du transport, il ne va le
découvrir qu’après coup et en cas de problème. Ce
raisonnement n’est donc pas conforme à la logique
juridique. En effet, c’est l’échange des consentements qui
fait naître les obligations des parties, une fois le contrat
conclu, les obligations qui génèrent sont donc en
définitivement fixées.

La question n’a pas fait l’objet de jurisprudence en France


mais les cours d’Anvers et de Bruxelles estiment que
lorsque l’entrepreneur accepte un ordre de transport
sans faire connaître qu’il entend agir en qualité de
commissionnaire, il est automatiquement qualifié de
transporteur.

1. b) La commune intention des


parties

Le juge s’attache aussi à la commune intention des


parties. La Cour de cassation semble privilégier cette
approche puisqu’elle estime que lorsque la commune
intention de partie est clairement affichée, elle doit être
seule prise en compte, les conditions matérielles ne
pouvant jamais la remettre en cause. Ainsi, celui qui se
présente comme transporteur, traite comme
transporteur et qui en cours de transport a recours à un
autre transporteur, reste néanmoins transporteur (alors
qu’il est finalement commissionnaire).

1. c) Le critère de l’accessoire

En pratique, des difficultés surgissent du fait que les


entreprises de transport cumulent les fonctions de
commissionnaire et de transporteur, sont à la fois l’un et
l’autre.

La doctrine s’est posée la question de l’application du


principe selon lequel l’accessoire suit le principal ce qui
reviendrait donc à déterminer l’activité dominante. Les
auteurs estiment globalement qu’il faut distinguer selon
les intérêts en jeu ce qui conduit à retenir la qualification
la plus caractéristique, la doctrine rejette donc
l’application de l’adage accessorium sequitur principale.

En revanche, les juges du fond appliquent l’adage pour


adopter une qualification unique. Ainsi, un
commissionnaire conservera cette qualité pour toutes les
phases de l’opération même si à un moment donné il a
exécuté lui-même le transport. Cette solution permet aux
juges de sanctionner le commissionnaire puisqu’il ne
pourra invoquer la fin de non recevoir de Code de
commerce Article L133-3. Globalement, cette façon de
raisonner correspond le plus à l’idée du transport que
pouvait avoir l’expéditeur. En effet, juridiquement il n’est
pas sain en droit d’une partie contractante puisse choisir
telle ou telle qualité selon ce que son propre intérêt lui
commande.

1. B) Commission de transport et
contrat de transit ou de mandat

Dans tous les cas, on est en présente d’un contrat de


représentation i.e. d’intermédiaires qui contractent et
agissent pour le compte d’autrui. D’ailleurs, la Convention
de La Haye du 14 mars 1978 sur les contrats
d’intermédiaires concerne notamment ces 3 types de
contrats.

1) Les intérêts de la distinction

Le transitaire est un mandataire ayant une qualification


particulière.

Le commissionnaire est garant de ses substitués car il les


a choisi pour mener à bien la mission qui lui a été
confiée.
Par contre, le transitaire est un simple mandataire et il ne
va donc répondre que de ses fautes personnelles
prouvées.

ex: défaut d’arrimage des colis transportés. La faute est


peut être imputable au voiturier et s’il y a eu un contrat
de commission, au commissionnaire. En revanche, la
responsabilité du transitaire ne pourra être mise en
cause.

Le transitaire est seulement tenu d’exécuter les


instructions directes de son mandant et il doit préserver
les recours éventuels. Ainsi, le transitaire va prendre tous
les mesures nécessaires à la conservation de la
marchandise. En revanche, il n’est pas tenu de la
surveiller physiquement en permanence alors que le
transporteur et le commissionnaire doivent avoir vue
directe sur la marchandise.

Par ailleurs, les actions en justice contre le


commissionnaire doivent être intentées dans le délai d’1
an alors que celles intentées contre le transitaire sont
soumises au droit commun (10 ans).

De plus, le transitaire ne bénéficie d’aucun privilège


particulier pour garantir sa rémunération.
Enfin, la profession de commissionnaire est étroitement
réglementée alors que celle de transitaire est libre
puisque. Le transitaire a uniquement besoin d’accomplir
une formalité administrative s’il accomplit des formalités
en douane.

2) Le critère de distinction

Le transitaire est un mandataire salarié alors que le


commissionnaire est un intermédiaire indépendant. Ce
critère est très efficace. Si l’expéditeur s’adresse à un
commissionnaire, c’est pour se libérer de certaines tâches
et non pour lui dicter sa conduite point par point. Même
si l’expéditeur donne des instructions au
commissionnaire, il doit lui laisser une marge de liberté.
De son côté, le transitaire obéit à des ordres précis de
l’expéditeur ou du commissionnaire qui recourt à ses
services.

Ainsi, si la personne n’a aucune marge de manœuvre les


juges la qualifieront de transitaire.

1. C) Commission et contrat de
courtage
Le courtier se borne à mettre en relation deux
contractants, il va les présenter l’un à l’autre et va les
aider à s’entendre d’où une obligation de présentation.

Le courtier rédige parfois le contrat mais il n’agit pas pour


le compte d’autrui, le coutier n’est pas un représentant.

Il y a ainsi une activité de fait puisqu’aucun lien de droit


particulier ne se crée.

Ainsi, courtage et commission ne peuvent être confondus


car si le coutier reste étranger à la conclusion du contrat.
En revanche, le commissionnaire passe lui-même des
contrats pour le compte de son client. Le
commissionnaire prend l’opération à son compte et va
conclure en son nom personnel tous les actes nécessaires
à la réalisation du transport.

Section 2: Les obligations des parties au contrat


de commission

1) Les obligations du commettant

En général, le commettant est l’expéditeur de la


marchandise, il a donc l’obligation de remettre les
marchandises au commissionnaire quand ce dernier s’est
engagé à la faire parvenir à destination. Le commettant
doit ensuite acquitter le prix de la commission dont le
paiement est garanti au commissionnaire par un privilège
(Code de commerce, Article L132-2).

1. A) La remise des marchandises

La remise des marchandises doit s’effectuer aux


conditions prévues au contrat ou à celles fixées par le
transporteur. Une présentation irrégulière de la
marchandise peut entraîner la résolution du contrat s’il a
déjà été conclu, s’il n’a pas été conclu, elle empêchera la
conclusion du contrat, c’est le cas lorsque le
commissionnaire refuse la marchandise avant tout accord
de volonté.

En pratique, le respect de cette obligation ne fait gère de


difficulté puisque le commettant a tout intérêt à la
respecter. De plus, si une contestation apparaissait, on ne
pourrait recourir à l’expertise prévue par les textes
puisque Code de commerce Article L133-4 précise que
l’expertise ne peut être demandée que par les parties au
contrat de commission. Il faut donc à tout prix que le
contrat ait été conclu.

1. B) Le paiement du prix
La fixation du prix et les modalités de paiement relèvent
du contrat. La LOTI prévoit uniquement que cette
rémunération est fonction des services effectivement
rendus.

En pratique, on utilise fréquemment le prix au forfait par


référence au nombre de tonnes ou de mètres cube. Cette
pratique est d’autant plus fréquente que cela permet de
distinguer le commissionnaire du transitaire puisque le
transitaire, lui, est obligé de facturer de manière
détaillée.

Le prix comprend d’une part le montant de la commission


(qui correspond à la mission du commissionnaire de
prendre soin de la marchandise) et d’autre part le
remboursement des frais que le commissionnaire aura
avancés pour le compte du commettant (notamment
pour tous les contrats satellites: manutention etc.).

Une fois convenu, le prix demeure dû même si le


commettant ne remet pas la marchandise au
commissionnaire sans pouvoir invoquer de motif sérieux.
Cela est d’autant plus compréhensible que dans la
majorité des cas le paiement du prix intervient dans le
cadre d’un compte courant. Ainsi, des juges ont estimé
qu’un commettant qui avait confié à un commissionnaire
l’acheminement d’une grue est tenu de régler l’intégralité
du prix convenu diminué des frais de chargement et cela
au motif que ce commettant avait renoncé à
l’acheminement 24 heures avant le départ, puisque tout
été préparé, le commissionnaire a rempli une partie
essentielle de sa mission, le paiement est donc dû.

Le compte courant permet d’assurer le décompte de tous


les frais et débours consentis par le commissionnaire
depuis la conclusion du contrat. Si plusieurs affaires sont
traités les unes après les autres, entre les mêmes parties,
le compte devient un compte courant comprenant d’un
côté les créances de commission et les avances de frais
consentis par le commissionnaire et de l’autre les
acomptes et versements d’argent effectués par le
commettant. La Cour de cassation estime qu’un tel
compte développe tous les effets d’un compte courant
mais il n’y aura de compte courant que si les parties l’on
voulut i.e. le commissionnaire ne peut le créer
unilatéralement.

Lorsque le compte courant n’existe pas ou n’est pas


suffisant, le paiement résultera du privilège de Code de
commerce Article L132-2 qui dispose que le
commissionnaire a privilège sur la valeur des
marchandises faisant l’objet de son obligation et sur les
documents qui s’y rapportent pour toutes ses créances de
commission nées même à l’occasion d’opérations
antérieures.

1. C) Les conditions d’exercice du privilège


du commissionnaire

Assiette: tous les biens détenus par le commissionnaire


peuvent servir de garantie aux créances qu’il a contre son
commettant à condition qu’elles procèdent du contrat de
commission. Le commissionnaire n’est pas obligé d’avoir
les marchandises, un seul document suffit. Cela constitue
un excellent moyen de pression pour obtenir paiement.
Le commissionnaire peut exercer ce privilège grâce à des
documents douaniers, des documents relatifs au crédit
documentaire ou encore grâce à un connaissement (en
matière maritime). Sans ces documents, l’expéditeur
commettant ne peut pas être payé des marchandises qu’il
a fait acheminer. Par extension, la Cour de cassation en
1989 a estimé qu’un commissionnaire pouvait
valablement retenir des chèques émis à l’ordre de son
client et obtenus lors de la livraison contre
remboursement.
L’exercice du privilège suppose qu’il y ait identité entre le
débiteur et le donneur d’ordre. Il s’agit d’une sûreté
légale mais le commissionnaire peut renoncer à son
privilège à la condition que cette renonciation résulte
d’un engagement formel ou d’un comportement non
équivoque.

Il faut aussi que le commissionnaire soit de bonne foi


quant à la propriété de la marchandise et quant aux
conditions dans lesquelles il en a pris possession. Les
tribunaux assimilent la situation au gage de telle sorte
que le commissionnaire n’a pas à vérifier si la chose
remise est ou non grevée d’une clause de réserve de
propriété. Il en résulte que le commissionnaire peut
opposer son privilège à quiconque lui réclame la
marchandise. La seule exigence est la bonne foi, bonne
foi du commissionnaire qui réside dans la croyance
sincère et légitime que les marchandises détenues sont la
propriété de son débiteur. La bonne foi est présumée et
est appréciée au moment de la remise de la marchandise.
C’est donc celui qui conteste le privilège qui doit prouver
la mauvaise foi.
Quant à la créance garantie, elle est également très
largement conçue puisqu’elle doit se rapporter à la
commission. Le commissionnaire de bonne foi doit donc
être titulaire d’une créance certaine, liquide et exigible
pour pouvoir bénéficier du privilège. Lorsque la créance
concerne des opérations antérieures, cela ne pose
aucune difficulté on doit simplement vérifier que l’action
n’est pas prescrite.

Etant donné que les textes sont clairs, la jurisprudence


permet d’agir devant le juge des référés à la condition
d’établir l’urgence car la rétention des marchandises peut
causer un trouble illicite. C’est le cas par exemple pour
obtenir paiement pour le transport d’objets constituant
des cadeaux de fin d’année.

Le juge des référés sera compétent et pourra ordonner


une mesure provisoire en présence d’une difficulté
sérieuse au fond. Le juge peut également cantonner la
rétention et donc ordonner uniquement une main levée
partielle du droit de rétention.

Quand il n’y a pas d’urgence établie, la contestation se


fait selon la procédure de droit commun devant le
Tribunal de commerce.
Par ailleurs, le commissionnaire, du fait du privilège, peut
réaliser le gage c’est-à-dire se faire payer grâce à une
vente aux enchères ou grâce à une attribution judiciaire
de la marchandise. En pratique, les commissionnaires
n’hésitent pas à procéder de la sorte la procédure étant
rapide puisqu’elle peut intervenir 8 jours après
l’invocation du privilège. De manière générale, le
commissionnaire préfère l’attribution judiciaire car du fait
du classement des privilèges le commissionnaire est
primé par le conservateur de la chose, par les douanes et
par le Trésor public.
2) Les obligations du commissionnaire

Le commissionnaire a promis d’organiser le transport de


bout en bout afin que la marchandise parvienne à
destination en bon état et à la date prévue. Il s’agit d’une
obligation de résultat. Parfois, les juges acceptent de
tempérer la situation et estiment qu’en cas de force
majeure, l’obligation de livrer à une date précise devient
une simple obligation de moyens.

Le commissionnaire va devoir exécuter les engagements


précis qu’il a pris envers son commettant. Il doit respecter
toutes les instructions du commettant car il avait la
possibilité de refuser le mandat qui lui est confié lorsque
le commettant l’a contacté.

Le commissionnaire a de nombreuses obligations au


départ, en cours de route et à l’arrivée de la marchandise
à destination.

1. A) Les obligations du
commissionnaire au départ de la
marchandise

Les moyens utilisés sont en principe à la discrétion du


commissionnaire mais celui-ci doit agir au mieux des
intérêts de son commettant. On constate que le
commissionnaire a en fait 2 obligations au départ: soigner
l’expédition et assurer la marchandise. L’obligation
d’assurer la marchandise ne peut être que le conseil
donné au commettant en vue de prendre cette
assurance.

1) L’obligation de soin

Le commissionnaire choisit le mode de transport sauf


clause contraire. Il doit tenir compte de la nature de la
marchandise, de l’urgence du transport et des garanties
de sécurité offertes à l’expéditeur. Compte tenu de ces
circonstances, il doit choisir le meilleur moyen de
locomotion mais aussi les meilleurs auxiliaires de
transport. Il doit aussi s’assurer de l’existence et de la
régularité des documents qui lui sont remis et qui sont
nécessaires au transport.

En parallèle, le commissionnaire dispose en tant que


professionnel d’un devoir de conseil à l’égard de ses
clients. La jurisprudence estime ainsi qu’un
commissionnaire qui se charge d’un transport
international est réputé connaître la réglementation des
différents pays traversés car ces législations étrangères
peuvent avoir une incidence sur les conditions du
transport, sur le temps du transport et sur la réparation
en cas d’incident. Ce devoir de conseil est strictement
limité à l’organisation du transport, ainsi, Cour d’Appel
Paris a estimé que le commissionnaire n’était pas tenu
d’expliquer à son client les formalités nécessaires pour
éviter la forclusion prévue par la CMR, la CA estime que
c’est là « une affaire de juristes et commissionnaires et
clients sont souvent des profanes ou professionnels
inexpérimentés ». En fait, les juges apprécient le devoir
de conseil en fonction des circonstances, de la taille de
l’entreprise du commettant et des usages locaux.
2) L’obligation d’assurance

Le commissionnaire est tenu de vérifier si les


transporteurs auxquels il a fait appel sont
convenablement assurés en ce qui concerne leur
responsabilité contractuelle.

On s’est demandé si par prudence il ne devait pas


prendre l’initiative d’assurer la marchandise avant de la
remettre à ses substitués. La réponse est différente selon
que le transport est terrestre ou maritime:

– lorsque la marchandise est acheminée par voie


terrestre, la Cour de cassation depuis 1992 estime que le
commissionnaire n’a pas l’obligation d’assurer la
marchandise si le contrat de commission ne le prévoit
pas. D’ailleurs, en matière de transport terrestre, il est
rare que l’expéditeur contracte une assurance spécifique
puisque la clause d’intérêt à la livraison peut suffire.

– en matière maritime, il est d’usage d’assurer la


marchandise. La pratique étant différente de celle du
transport terrestre, les tribunaux estiment que le
commissionnaire de transport maritime ou combiné doit
prendre l’initiative d’assurer la marchandise.

Lorsque le commissionnaire est obligé d’assurer en vertu


du contrat, il doit y procéder mais, selon les tribunaux, il
doit le faire avec discernement. S’il ne souscrit pas
d’assurance, il devra verser à son client une somme égale
à l’indemnité que ce dernier aurait reçu de l’assureur, il
devient donc assureur.

Cette obligation d’assurance n’entre toutefois pas dans


les obligations normales du commissionnaire, elle fait
l’objet d’un mandat spécial et la clause est détachable du
contrat de commission, elle subira donc une prescription
de droit commun et non la prescription annale applicable
en matière de transport.
1. B) Les obligations du
commissionnaire en cours
d’acheminement de la marchandise

En cours de route, l’obligation de soigner existe toujours,


le commissionnaire a donc l’obligation d’effectuer les
opérations étapes par étapes et veiller au bon
déroulement de ces opérations. Il doit rendre compte à
l’expéditeur et dans un délai raisonnable des incidents et
difficultés qu’il rencontre.

Au départ, sa mission commence lors de la prise en


charge, c’est lui qui doit vérifier l’arrimage car
l’expéditeur est réputé profane en matière de transport,
c’est lui aussi qui doit veiller aux opérations de
chargement, c’est donc lui qui recourra, au besoin, à un
manutentionnaire (l’expéditeur et le transporteur ne
pouvant eux-mêmes procéder au chargement).

Ensuite, il va suivre l’acheminement et va donc veiller au


respect d’un temps raisonnable et compatible avec la
nature et l’objet de la prestation.

ex: c’est lui qui sera responsable s’il n’a pas tout mis en
œuvre pour que la marchandise arrive sur une foire
exposition dont il connaît la date.
S’il y a changement de transport, c’est également le
commissionnaire qui surveille la marchandise à la
charnière des deux transports (la rupture de charge), il
peut se faire aider par une transitaire.

ex: il est reproché régulièrement au commissionnaire en


cas de transport de denrées congelées de ne pas prendre
toutes les mesures nécessaires pour maintenir la chaîne
du froid. Ce type de condamnation intervient lorsque le
véhicule est impliqué dans un accident de la circulation et
que le commissionnaire doit affréter un nouveau véhicule
pour la suite du parcours, dans l’attente du véhicule il
doit gérer les produits congelés.
Cette responsabilité ne peut concerner que les
dommages apparents, il est impossible de demander au
commissionnaire de connaître mieux la marchandise que
l’expéditeur.

1. C) Les obligations du
commissionnaire à l’arrivée de la
marchandise

Les obligations du commissionnaire ne disparaissent pas


lorsque le camion, le train, l’avion ou le navire arrive à
destination, elles ne prennent fin qu’avec la livraison de la
marchandise au destinataire lui-même. Sur ce point, la
jurisprudence est claire et classique: la livraison à quai ne
suffit pas à éteindre les obligations du commissionnaire.

Le commissionnaire doit donc être présent ou représenté


au lieu de destination. Si la marchandise est perdue,
avariée ou en retard, il doit conserver les recours de son
client. Si la marchandise est refusée par le destinataire, il
doit en référer à son commettant. Si la marchandise est
acceptée sans réserve sa mission s’achève.

1) La conservation des recours du commettant

Lorsque la marchandise n’est pas livrée en bon état ou à


la date prévue, le commissionnaire doit éviter à son client
la forclusion de Code de commerce Article L133-3 ou de
CMR Article30. Il doit donc accomplir toutes les diligences
nécessaires à la procédure en raison de la confiance qui
existe dans tout contrat de commission entre
commettant et commissionnaire.

En pratique, cette conservation n’est pas évidente. En


effet, le client qui traite avec une commissionnaire a
tendance à adresser ses protestations au
commissionnaire alors que les textes prévoient qu’elles
soient envoyées au transporteur. D’ailleurs, souvent,
l’expéditeur ne connait que le commissionnaire et pas le
transporteur. Si le commissionnaire est toujours dans les
délais pour le faire, il doit notifier ces contestations au
transporteur pour conserver les droits de son client (le
délai est de 3 jours). Préserver un recours n’est pas
l’exercer, le préserver consiste à tout faire pour mettre le
titulaire de l’action en l’état d’agir, le commissionnaire
n’a pour mission que de surveiller le transport, pas
d’exercer les recours, s’il ne préserve par le recours, il
deviendra responsable. La Cour de cassation en 1996 a
cassé un arrêt de CA Paris qui avait sanctionné le
commissionnaire qui n’avait pas intenté à temps l’action
appartenant à son client.
2) En cas de refus de la marchandise par le
destinataire

En cas de refus du destinataire, le commissionnaire doit


en informer le commettant sans délai et par des moyens
de communication indiscutables i.e. il ne doit pas se
contenter de le faire par téléphone, il faut un écrit (fax, e-
mail, lettre recommandée). Si l’expéditeur lui enjoint de
ne pas rapparier la marchandise, le commissionnaire
devient simple mandataire et ne sera responsable que de
ses fautes prouvées. A l’inverse, si le rapatriement est
demandé, il donne naissance à un nouveau contrat de
transport qui restera sous la surveillance du
commissionnaire jusqu’au retour de la marchandise chez
l’expéditeur.

Lorsque la marchandise n’est pas rapatriée, le


commissionnaire a, comme les transporteurs, la
possibilité de laisser la marchandise à l’administration des
domaines qui procèdera à sa mise en vente.
Chapitre 4: Les actes spécifiques de
transport
Chaque type de transport connaît des actes spécifiques
i.e. des actes propres à sa nature. Les plus connus
existent en matière terrestre et maritime, il s’agit du
connaissement, du contrat d’affrètement et des
différentes lettres de voiture.
Section 1: Le connaissement

Le connaissement est propre au droit maritime mais les


transporteurs peuvent être combinés et donc le
connaissement peut exister à ce titre.

1) La définition du connaissement

Le connaissement est le document le plus utilisé pour


prouver l’existence d’un contrat de transport maritime.
La Cour de cassation en donne la définition suivante: le
connaissement est un titre représentatif de la
marchandise valant essentiellement reconnaissance par
le transporteur de sa prise en charge et ne saurait être
par lui-même constitutif du contrat de transport, ce
dernier résultant du seul accord de volonté des parties à
la convention. Le connaissement n’est que probatoire.

A l’échelon international, la convention de Hambourg du


31 mars 1978 précise que le terme « connaissement »
désigne un document faisant preuve du contrat de
transport et constatant la prise en charge ou la mise à
bord des marchandises par le transporteur ainsi que
l’engagement de celui-ci de délivrer la marchandise
contre remise de ce document.
On reconnait au connaissement un triple rôle: c’est
d’abord un reçu de marchandises (si on a le document,
c’est que la marchandise a été embarquée), ensuite il
s’agit d’un élément de preuve (si on l’a c’est qu’il a un
contrat de transport) et enfin il s’agit d’un titre
représentatif de la marchandise (le document décrit les
marchandises).

2) Le contenu du connaissement

Le connaissement est établi en 2 exemplaires originaux


au moins: un pour le chargeur et l’autre pour le capitaine
du navire. C’est la loi du pays d’émission du
connaissement qui va régir ses conditions de forme si le
transport est international.

En fait, la loi française contient peu de disposition, on sait


seulement que le connaissement doit fournir des
informations précises quant à la marchandise notamment
son identification, sa quantité, son poids et son
conditionnement. Ces mentions ont une force probante à
l’égard de toutes les parties puisque le destinataire est en
droit d’exiger une livraison conforme au connaissement.

Le connaissement doit aussi identifier le chargeur et le


transporteur, le nom du destinataire ne sera indiqué que
lorsque le connaissement est un connaissement
nominatif.

Chaque original du connaissement doit être daté, la date


est essentielle car elle va conditionner l’ouverture d’un
crédit documentaire. C’est la raison pour laquelle en
pratique, le connaissement est souvent antidaté. L’anti-
datage permet d’être certain que les fonds seront
provisionnés. En cas de difficulté, l’anti-datage constitue
une faute équipollente au dol i.e. une faute lourde
engageant la responsabilité de son auteur.
Le transporteur doit signer le connaissement. Le chargeur
en est dispensé mais en pratique, il a tendance à signer
également pour montrer qu’il accepte le connaissement.

3) Les réverses au connaissement

Le capitaine du navire n’a pas la possibilité de vérifier les


déclarations par un examen systématique avant
embarquement. Pour cette raison, il est autorisé à
émettre des réserves s’il sait ou s’il a des raisons de
soupçonner que les indications du chargeur sont
inexactes ou encore s’il n’a pas les moyens suffisants
d’effectuer le contrôle.
Pour éviter les abus et les clauses de style, les réserves
doivent répondre à certaines conditions, elles doivent
être précises et motivées et le transporteur doit donc
mentionner les inexactitudes ou la raison de ses
soupçons. Ces réserves doivent être inscrites sur le
connaissement mais elles peuvent aussi être adressées
par voie séparée et dans ce cas, elles ne seront pas
opposables au destinataire ou au porteur du titre, elles
permettront seulement au transporteur de garantir son
action récursoire contre le chargeur. Aucun texte
n’impose le caractère contradictoire des réserves, elles
peuvent donc être refusées par le chargeur. Enfin, les
textes ne prévoient les réserves que sur les marchandises
et ne visent pas l’emballage, cependant la jurisprudence
raisonne par analogie pour l’emballage car il semble
logique qu’un emballage défectueux ou en piteux état
pousse le transporteur à émettre des réserves. L’absence
totale de réserves vaut présomption de bon état de la
marchandise reçue à l’embarquement, cette présomption
est simple, elle peut être combattue par tout moyen.
4) Les autres documents maritimes

1. A) Les documents similaires au


connaissement

Ces documents émanent d’associations ou de fédérations


internationales en matière de transport maritime.

Il s’agit notamment du document FIATA (Fédération


internationale des associations de transitaires et
assimilés), il s’agit d’un document de transport combiné
négociable, il suppose donc le transport par au moins 2
modes de transport différent.
Le transporteur devient un opérateur multimodal et
engage sa responsabilité dans les conditions classiques du
contrat de transport.

En présence d’un commissionnaire, sera utilisé le


document NVOCC.

Existe aussi le connaissement avec certificat d’assurance


incorporé: ce document complète le connaissement et le
rend encore plus attirant et sécurisant pour le
cocontractant.

Enfin est apparu le connaissement électronique, il est très


utilisé sur des petits trajets ou des trajets rapides. Le
système databank permet de déposer les connaissements
auprès d’une banque qui les détient pour le compte de
qui il appartiendra et qui recevra notification de tout
transfert effectué sur la marchandise. En pratique, le
transporteur va enregistrer toutes les informations et va
remettre un Code au chargeur et le destinataire à
l’arrivée va prendre connaissance du code et dès qu’il
aura le code donnera l’ordre de payer.

1. B) La lettre de transport maritime

La lettre de transport maritime devrait tomber en


désuétude avec le connaissement électronique. En effet,
elle est apparue lorsque l’on a constaté que des
transports pouvaient être trop rapides et donc inadaptés
au connaissement. En effet, le connaissement est quand
même un mécanisme lourd et long à mettre en œuvre.

Le transport peut être plus rapide en raison d’un parcours


plus court ou parce qu’il est effectué avec un navire plus
rapide. Par exemple, la lettre de transport maritime est
très utilisée pour les transports transmanche. Dans ce
cas, le chargeur va expédier la marchandise au
destinataire désigné et portera sur la lettre de voiture
maritime (LVM) la mention « reçu pour embarquement »
et non pas la mention « embarqué ». La différence de
terme explique la différence de responsabilité: embarqué
signifie qu’il y a eu vérification alors que reçu pour
embarquement signifie qu’il n’y a pas eu vérification. Le
transporteur n’exerçant aucun contrôle de la
marchandise, le temps mis pour les formalités diminue et
devient raisonnable par rapport au transport.

Section 2: Les lettres de voiture en matière


terrestre

Code de commerce Article L132-8 le contrat de transport


est matérialisé par la lettre de voiture qui forme un
contrat entre l’expéditeur, le voiturier, le destinataire et
éventuellement le commissionnaire. Il y a de fait, autant
de lettres de voiture que de type de transport terrestre.

1) Le document valant lettre de voiture

Code de commerce Article L132-8 préconise


l’établissement d’une lettre de voiture matérialisant le
contrat de transport et Code de commerce Article L132-9
en précise le contenu.

L’établissement de la lettre de voiture a été rendu


obligatoire en 1999 à peine d’être sanctionné par une
contravention de 5ème classe.
La lettre de voiture et ses équivalents doivent être
présentés sur route à toute réquisition des agents de
l’Etat chargé du contrôle des transports (l’expression est
très large: police, douane, ministère des transport etc.).

En outre, ces documents doivent être conservés par


l’entreprise de transport pendant un délai de 2 ans car ils
peuvent être demandés sur réquisitions des mêmes
agents. Ces éléments conservés par l’entreprise doivent
permettre aux agents de l’Etat d’accéder aux
informations relatives au donneur d’ordre et au prix
facturé par l’entreprise de transport.

2) Le contenu de la lettre de voiture


La lettre de voiture doit être rédigée en autant
d’originaux que de parties et un exemplaire
supplémentaire doit se trouver à bord du véhicule.
Lorsque le contrat prévoit plusieurs opérations de
chargement et de déchargement, il est possible de
rédiger une seule lettre de voiture à condition de décliner
toutes les phases.

S’il s’agit d’un transport groupé, le transporteur peut


aussi faire une seule lettre de voiture mais en pratique, il
fait autant de lettres de voiture que d’envois pour éviter
les difficultés en cas de contrôle. Néanmoins, le
transporteur qui a fait une seule lettre de voiture
disposera de 3 jours pour donner aux agents contrôleurs
les détails de l’envoi.

En pratique, la forme est libre, les textes admettent


même son émission par des moyens informatiques à
l’intérieur du véhicule.

Il faut au minimum les renseignements suivants: la date,


le nom, l’adresse et le numéro SIREN ou numéro
d’identification intracommunautaire du transporteur, les
coordonnées complètes de l’expéditeur, la date et
l’adresse complète du lieu de chargement, le nom du
destinataire et l’adresse complète du lieu de
déchargement.
La lettre de voiture est établie par le transporteur avant
le transport et elle va être complétée tout au long du
transport, en effet, toutes ces précisions vont permettre
la facturation au client, il faudra donc indiquer avec
précision les délais, l’heure de départ et celle d’arrivée.

La lettre de voiture va être signée par tous les


intervenants au transport de l’expéditeur au destinataire
compris mais il est toujours possible de refuser de la
signer à condition de motiver le refus.

3) La lettre de voiture de déménagement


Il existe une lettre de voiture spécifique en matière de
déménagement (NB: les déménageurs font généralement
signer une lettre de voiture classique et non une lettre de
voiture de déménagement afin d’éviter ce régime
spéciale).

La lettre comporte obligatoirement: les coordonnées de


l’entreprise déménagement, le nom et l’adresse du client,
le mode d’exécution du transport, le volume du mobilier,
les lieux de chargement et livraison la date limite des
opérations et le numéro d’inscription de l’entreprise de
déménagement au registre des transporteurs et loueurs.

Cette lettre de voiture est établie en 4 exemplaires:


– le premier constitue la souche et est conservé par
l’entreprise,

– le deuxième est le double de la souche qui est remis au


client avant le déménagement,

– le troisième exemplaire va accompagner le mobilier en


cours de transport, c’est le bulletin de livraison: c’est sur
ce bulletin que le client émettra des réserves ou signera
une décharge, ce bulletin est conservé par l’entreprise.

– le quatrième exemplaire est le double du bulletin de


livraison, il est remis au client.
Pour la jurisprudence, le contrat de déménagement est
soit un contrat de service soit un contrat de transport,
tout dépend des opérations convenues entre les parties.
C’est la raison pour laquelle il faut faire très attention lors
de la conclusion du contrat car de la qualification
dépendra la procédure applicable et les textes
applicables: soit le droit commercial général soit le droit
des transport or le particulier a intérêt à l’application du
droit commercial général.

4) Le contrat de transport ferroviaire

Il s’agit du récépissé de chemin de fer. Le récépissé est le


duplicata de la déclaration d’expédition qui et établie et
signée par l’expéditeur sur un formulaire spécial fourni
par la SNCF. La SNCF est un transporteur comme les
autres et ses opérations de transport sont régies par Code
de commerce Article L133-1 et suiv. Il s’agit d’un
transporteur comme les autres donc la SNCF a le même
régime d’obligations et de responsabilité qu’un
transporteur terrestre. Ainsi, celui qui traite avec la SNCF
n’est pas réputé avoir signé un contrat d’adhésion, il a
toujours la possibilité de négocier librement les
conditions du transport. Les tribunaux vérifient que les
demandes formulées correspondent aux possibilités
offertes par la SNCF. L’exemplaire de la SNCF voyage avec
la marchandise, le récépissé est remis au client.
Titre 2: Les acteurs du transport

Chapitre 1: Le commissionnaire
Selon la Cour de cassation, depuis le 16 fév. 1988, le
commissionnaire est un intermédiaire, un organisateur
pouvant conclure tout contrat nécessaire à la réalisation
de sa prestation. Les deux premiers éléments sont
nécessaires, il n’y a commission de transport qu’en
présence d’une entreprise intervenant comme
intermédiaire avec une marge de manœuvre suffisante
pour l’organisation de l’opération. La Cour de cassation
estime que l’inscription au registre des commissionnaires
de transport ne suffit pas à prouver la qualité de
commissionnaire. Cela signifie donc que le
commissionnaire bénéficie d’un statut.

Section 1: Le statut de commissionnaire

Pendant longtemps n’a existé qu’un statut privé ce qui a


entraîné des confusions. Depuis quelques années, il existe
un statut public qui fait l’objet d’une réglementation très
stricte dans l’intérêt général et en parallèle se développe
un statut international.

1) Le statut public du commissionnaire

L’exercice de la profession de commissionnaire de


transport est réglementé par un décret du 5 mars 1990
pris en application d’une directive européenne du 29 juin
1982. Par ailleurs, la LOTI Article8 prévoit que le pouvoir
exécutif a la faculté de règlementer la profession de
commissionnaire. Cette règlementation a été un peu
modifiée en 1999 dans la continuité de la loi Gayssot.
L’exercice de la profession de commissionnaire est
subordonné à des conditions particulières et à la
nécessité de s’inscrire auprès des directions régionales de
l’équipement (DRE).

1. A) Les conditions d’exercice de la


profession de commissionnaire

Sont concernées, la capacité professionnelle, la capacité


financière ainsi que des conditions d’honorabilité pour
soi-même et dans le contrôle des sous-traitants.
1) La capacité professionnelle

Cette condition doit être remplie par la personne qui


assure la direction effective et permanente de
l’entreprise et à tout le moins, dans l’entreprise, celle qui
dirige la branche commission de transport.

Cette personne doit avoir satisfait à un examen écrit


(organisé chaque année) ou être titulaire d’un diplôme
équivalent. Par ailleurs, les titulaires de diplômes de
l’enseignement supérieur ou technique mentionnant une
épreuve relative au transport ont accès direct à la
profession. En l’absence de la mention « transport », le
diplôme permet d’accéder à l’attestation de capacité s’il
est complété par des éléments établissant une
connaissance nécessaire à l’exercice de la profession.

Le décret de 1999 a supprimé la passerelle résultant de


l’expérience professionnelle car elle n’était pas utilisée.

2) La capacité financière

Cette condition permet de vérifier que le


commissionnaire dispose des moyens de faire face à ses
engagements. Il faut que le commissionnaire ait les
moyens financiers de régler ses fournisseurs de services
sans faire dépendre ses règlements de ceux de sa
clientèle.
Les commissionnaires doivent ainsi disposer de capitaux
propres, de réserves ou de cautions bancaires pour un
montant au moins égal à 100.000 euros. Le montant des
cautions bancaires ne peut dépasser 49 % des ressources,
il faut donc de la trésorerie.

Cette condition financière doit exister en permanence: si


l’entreprise ne peut plus en justifier, elle sera radiée
après mise en demeure de régulariser restée sans effet
pendant un délai de 3 à 12 mois.

Si une entreprise cumule l’activité de transporteur et


l’activité de commissionnaire, elle doit aussi cumuler les
conditions financières (75.000 pour le voiturier + 100.000
pour le commissionnaire).

3) Les conditions d’honorabilité

Le décret de 1990 réputait honorables les personnes qui


n’étaient pas frappées d’une interdiction d’exercer une
profession industrielle ou commerciale résultant d’une
condamnation, d’une déchéance ou d’une sanction
administrative et commerciale.

Le décret de 1999 a considérablement renforcé cette


condition d’honorabilité, il donne une liste détaillée des
personnes devant répondre à cette condition et énumère
les condamnations entraînant la déchéance de
l’honorabilité.

En ce qui concerne les personnes: est concernée la


personne assurant la direction permanente et effective
de l’activité de commission mais il faut aussi que les
conditions soient remplies par le chef d’entreprise, les
associés, les gérants, le président du conseil
d’administration.

En ce qui concerne les condamnations: il faut que la


personne ne commette pas une infraction entraînant une
condamnation mentionnée au bulletin n°2 du casier
judiciaire (B2): les infractions relatives à l’alcoolémie
(ivresse publique, conduite en état d’ivresse), le refus de
se soumettre au dépistage d’alcoolémie, le délit de fuite,
le refus d’obtempérer, l’entrave à la circulation, usage
volontaire de fausse plaques, trucage des limiteurs de
vitesse, défaut de permis correspondant à la catégorie du
véhicule, annulation ou suspension de permis, travail
clandestin ou dissimulé, usage d’un titre périmé,
infractions relatives aux étrangers, et depuis 1995 délit de
prix abusivement bas.

Les personnes résidant en France, françaises ou


étrangères, depuis moins de 5 ans doivent prouver leur
honorabilité et l’absence de condamnation dans leur
ancien pays d’origine ou de séjour.

4) L’obligation de contrôle des sous-traitants

Avant de confier une mission, une expédition à une


personne, le commissionnaire a depuis 1999, l’obligation
de vérifier que cette personne est habilitée à exercer
l’activité demandée i.e. il est tenu de contrôler
formellement si le sous-traitant choisi est bel et bien
inscrit au registre des transporteurs publics.
Il doit également tenir et conserver un registre des
opérations d’affrètement sous pleine d’une amende
maximale de 1.500 euros.

En outre, il doit garder tous les justificatifs des deux


derniers exercices comptables.

Enfin, s’il constate une modification de nature à influer


sur l’inscription au registre, il doit dénoncer au préfet ce
changement.
1. B) Le titre d’exploitation

L’exercice de la profession de commissionnaire de


transport suppose une autorisation administrative. A
l’origine, il s’agissait d’une licence de commissionnaire,
elle était nécessaire et CE 25 juill. 1986 a annulé un acte
au motif que le transporteur armateur disposait d’un
connaissement direct mais ne justifiait pas être titulaire
d’une licence de commissionnaire. Le système de licence
était assez lourd, le décret de 1990 confirmé par celui de
1999 a substitué à cette licence, l’inscription sur un
registre régional tenu par les directions régionales de
l’équipement (DRE).
1) Le certificat d’inscription

L’inscription sur le registre est matérialisée par la remise


d’un certificat d’inscription. Ce certificat va habiliter
l’entreprise à exercer son activité de commissionnaire sur
tout le territoire métropolitain. Cette autorisation est
personnelle et incessible. Le juge administratif estime
qu’en cas de transmission ou de location du fonds de
commerce, le bénéficiaire de la transmission ou le
locataire doit demander une nouvelle inscription qui ne
lui sera accordée que s’il remplit les conditions requises.

Le refus d’inscription opposé par le préfet peut faire


l’objet d’un recours juridictionnel.
2) Les sanctions

L’exercice de l’activité de commissionnaire sans le titre


d’exploitation est passible de sanctions pénales. De plus,
à l’audience, les entreprises régulièrement autorisées
peuvent se porter parties civiles et demander la
condamnation du commissionnaire fautif au paiement de
dommages et intérêts. Cour de cassation Crim estime
cependant que la partie civile doit préciser les conditions
dans lesquelles l’infraction a pu porter atteinte à ses
droits. En pratique, ce sont donc les syndicats, les
représentants des différents auxiliaires de transport qui
se portent parties civiles et demandent 1 euro de
dommages et intérêt à titre symbolique (atteinte à
l’honneur de la profession).

Il existe aussi une sanction administrative : celui qui a


exercé sans s’inscrire n’aura aucune chance de s’inscrire
ultérieurement, ne pourra régulariser sa situation (il ne
remplit pas les conditions d’honorabilité).

Celui qui est inscrit et qui commet un manquement grave


ou qui ne répond plus à l’une des conditions fera l’objet
d’une radiation à titre temporaire ou définitif. La
radiation est prise par le préfet, il s’agit d’une décision
administrative susceptible de recours juridictionnel. La
radiation sera temporaire si une personne dénonce au
préfet des retards importants ou répétés dans le
paiement des transporteurs sollicités par le
commissionnaire, le préfet va mettre en demeure de
régulariser.

1. C) Le domaine de la réglementation

En 1961, les textes ne concernaient que la commission de


transport terrestre. Les décrets de 1990 et 1999
règlementent toutes les formes de commission de
transport, quel que soit le mode de locomotion utilisé
mais des précisions sont données en ce qui concerne les
opérations et les opérateurs.
1) Les opérations

Les opérations visées sont déterminées de façon large:


opérations de groupage, opérations d’affrètement,
opérations de bureau de ville, opérations de grande
envergure (lorsque le commissionnaire prend en charge
des marchandises en provenance ou à destination du
territoire national avec le concours de transporteurs
publics). Toute l’activité de commissionnaire est prise en
compte, qu’il s’agisse d’un transport terrestre, fluvial,
maritime ou aérien.

En revanche, la règlementation ne s’applique pas aux


activités exercées par les courtiers de fret et les
dépositaires de colis, ce sont des intermédiaires mais pas
des commissionnaires. Ne sont pas non plus pris en
compte les opérations de transit.

2) Les opérateurs

Le décret vise uniquement les entreprises établies en


France. Il s’agit d’entreprises ayant leur siège social en
France ou un établissement principal en France mais aussi
des entreprises étrangères qui ont, sur le territoire
français, une agence ou une succursale, ce texte vaut
donc loi de police.
Les ressortissants de l’UE ont accès à la profession dans
les mêmes conditions que les français sous réserve de
certains aménagements en ce qui concerne les
justificatifs de capacité professionnelle et financière. Pour
les ressortissants de l’UE, l’honorabilité se limite à la
preuve de l’absence de faillite (une condamnation pénale
est possible).

Pour les ressortissants d’Etats tiers à l’UE, leur admission


est soumise à la réciprocité mais ils ne bénéficient
d’aucun aménagement pour les conditions de capacité
professionnelle, financière et d’honorabilité.
Enfin, la règlementation ne concerne pas les entreprises
étrangères qui accompliraient un acte isolé de
commission en France.

3) Les exceptions

Le décret de 1999 permet de recourir à la sous-traitance


sans être inscrit au registre des commissionnaires. Cela
concerne les entreprises de transport réunies en
coopératives (économie solidaire).

Une dérogation existe aussi pour les entreprises de


déménagement, le transport combiné et les transports
inférieurs à 3 tonnes.
2) Le statut privé de la commission de transport

Le statut privé de la commission de transport est encore


régi en grande partie par le Code de commerce, Titre III
Section 2: Des commissionnaires pour les transports,
Article L132-3 à -9 et Article L133-6 (concerne la
prescription annale et précise qu’il s’applique également
au contrat de commission). Ces textes font du
commissionnaire un personnage orignal en droit français,
ils organisent l’exercice de la profession de manière libre
dans l’intérêt d’un acheminement correct de la
marchandise à destination.
Pour parvenir à ce résultat, le Code de commerce fait
peser sur le commissionnaire de transport un régime de
responsabilité à 2 niveaux : une responsabilité du fait
personnel et une responsabilité du fait d’autrui.

1. A) La responsabilité du fait personnel du


commissionnaire

Ce régime est édicté pour tout auxiliaire de transport.


Ainsi, le commissionnaire, comme le voiturier, est
présumé responsable des avaries, pertes et retard de la
marchandise à l’arrivée lorsque ces dommages sont la
conséquence de la violation d’une obligation assumée
personnellement par le commissionnaire de transport.
Ainsi, l’ayant-droit doit seulement faire la preuve de
l’existence du dommage pour mettre en jeu la
responsabilité du commissionnaire.

L’exonération est possible si le commissionnaire prouve


que le dommage est dû à un cas de force majeure, aux
vices propres de la marchandise, au fait d’un tiers ou à
une faute de la victime.

Le commissionnaire, grâce à Code de commerce Article


L132-5 peut se libérer d’avance de sa responsabilité du
fait personnel en insérant dans le contrat des clauses de
non responsabilité. En effet, la loi cadre Rabier
concernant les clauses limitatives n’a pas visé la
commission de transport. Ainsi, les clauses limitatives
peuvent être insérées dans un contrat par un
commissionnaire, mais en pratique le commissionnaire ne
le fait pas, pour des raisons commerciales. En pratique, le
régime de responsabilité personnelle du commissionnaire
est donc identique à celui des autres opérateurs de
transport.

1. B) La responsabilité contractuelle du
commissionnaire du fait d’autrui

Code de commerce, Article L132-6 « le commissionnaire


de transport est garant du fait des intermédiaires et
autres voituriers auxquels il adresse les marchandises ». Il
ne s’agit pas d’une responsabilité délictuelle du fait
d’autrui (Code civil Article1384) mais d’une responsabilité
contractuelle du fait d’autrui.

Le commissionnaire va donc répondre de chacun de ses


substitués car il les a choisi en toute liberté et leur a
confié la marchandise.

Limite: nemo plus juris ad allium transferere postest


quam ipse habet. Ainsi, le commissionnaire va pouvoir
invoquer tous les moyens de défense des intermédiaires
(prescription annale) et tous les plafonds de réparation
chaque fois que sa responsabilité sera recherchée pour le
fait d’un de ses auxiliaires.
3) Le statut international de la commission de
transport

La règlementation française vise l’acte de commission lui-


même et non la nature du transport qui doit en découler,
elle est donc applicable à au contrat international de
commission. Etant donné que la règlementation concerne
le transport maritime et aérien, il est logique de
l’appliquer au contrat international. Mais le texte
s’applique lorsque le contrat est soumis à la loi française.
Il n’existe pas de convention internationale unifiant le
droit matériel du contrat de commission, un projet avait
été déposé en 1967 mais n’a jamais abouti. Il faut donc se
référer au droit commun et en Europe à la Convention de
Rome du 19 juin 1980 sur les obligations contractuelles
(le projet de règlement Rome I appelé à remplacer cette
convention n’est pas encore entré en vigueur).

Section 2: Le commissionnaire est un


intermédiaire

1) La distinction avec le transporteur

La distinction entre le commissionnaire et le transporteur


rejaillit sur le statut du commissionnaire. Le
commissionnaire peut insérer une clause limitative de
responsabilité alors que c’est interdit au transporteur. En
contrepartie, le transporteur bénéficie d’avantages
refusés au commissionnaire: les fins de non recevoir et le
paiement par privilège.

A l’international, dans le cadre de la CMR, le transporteur


peut voir la prescription suspendue en cas de réclamation
écrite, cette suspension n’ayant aucun effet sur le
commissionnaire.
2) Le cumul des qualités par le commissionnaire

1. A) La sous-traitance

Aujourd’hui, la plupart des entreprises de transport d’une


certaine taille exercent les qualités de commissionnaire et
de voiturier, elles y sont d’autant plus encouragées que la
jurisprudence considère qu’il est d’usage courant pour un
transporteur de se substituer un confrère sans en référer
au cocontractant. Ainsi, l’expéditeur ne sait pas en quelle
qualité va intervenir la société qu’il contacte pour
effectuer un transport, il ne le saura que lorsque
l’opération sera terminée et qu’en cas de problème. En
cas de perte ou avarie, les responsabilités sont
néanmoins identiques : lorsque l’entreprise confie la
mission à un tiers, elle devient ipso facto
commissionnaire mais les tribunaux ont estimé que cela
ne valait que dans la mesure où le rôle de l’entreprise de
transport n’a pas été précisée lors de la conclusion de
l’opération, ils ont entendu privilégier la commune
intention des parties, en cas de doute, c’est la qualité
indiquée sur le document de transport qui l’emportera.

1. B) La succession de qualités

A l’occasion d’une opération, une entreprise peut


intervenir en tant que transporteur puis en tant que
commissionnaire notamment en cas de groupage. En cas
de difficulté, il s’agira de savoir si s’applique l’adage
accesorium sequitur principale, dans l’affirmative, toutes
les opérations seront rattachées à l’activité dominante.
L’autre possibilité est le dépeçage de la situation i.e. on va
attribuer à l’entreprise une qualité différente par
intervention. La doctrine dominante penche pour le
dépeçage mais la jurisprudence préfère l’unité de régime.
CA Paris a ainsi retenu que le transport final effectué par
le commissionnaire n’était que l’accessoire du contrat
principal du contrat de commission de transport. En
pratique, le commissionnaire, lorsqu’il est également
entreprise de transport, assure généralement le dernier
transport. Ainsi, la jurisprudence a tendance à maintenir
la qualité de commissionnaire même si pour certaines
phases la personne déplace elle-même la marchandise.

3) Le commissionnaire est un organisateur de


transport

Pour que l’opération soit analysée comme une


commission, il faut une liberté suffisante pour choisir les
modes de transport et les différents prestataires. Les
juges insistent ainsi sur le fait que le commissionnaire de
transport n’a pas à recueillir l’accord de son client sur les
noms des transporteurs qu’il choisit. A l’inverse, le fait
d’avoir sollicité l’accord ne retire pas à l’intermédiaire sa
qualité de commissionnaire lorsque celui-ci conserve le
choix du mode de locomotion et des modalités du
transport.

En contrepartie de cette liberté, le commissionnaire est


responsable de tout le déplacement, cela se justifie par la
remonté des parties puisque l’expéditeur s’adresse à un
commissionnaire quand il veut traiter avec une seule
personne. C’est aussi pour cette raison que le
commissionnaire promet de couvrir les opérations
juridiques et les opérations matérielles. Le
commissionnaire chapeaute l’ensemble des opérations et
c’est pourquoi Code de commerce Article L132-6 le
déclare garant du fait des intermédiaires et voituriers. Il
s’agit d’une responsabilité très lourde qui permet de
distinguer le commissionnaire des autres auxiliaires de
transports qui ne sont responsables que de leur propre
fait.

Chapitre 2: Le transitaire
Le transitaire est un intervenant éventuel au transport qui
dispose d’un statut particulier dont va dépendre sa
responsabilité.
Section 1: Le statut du transitaire

1) La définition du transitaire

Le déplacement des marchandises suppose assez


souvent, surtout à l’international, des modes de transport
différent et toujours des formalités administratives et
douanières qui vont nécessiter l’intervention d’un
intermédiaire spécialisé: le transitaire. La mission
essentielle du transitaire est d’assurer la continuité entre
deux transports distincts dans le cadre strict des
instructions reçues. Le terme de transitaire est souvent
employé à tort. Le transitaire ne fait pas matériellement
passer une frontière. De surcroit, une enquête du
ministère des transports a révélé que 60 % des
entreprises de transport déclarent confier le transport à
leur transitaire habituel (ils n’utilisent donc pas les
bonnes qualités). Pour cette raison, la fédération
française des commissionnaires de transport a modifié
ses contrats-types en 1994 car l’ancienne version utilisait
le terme de transitaire de manière générique, ce qui
ajoutait à la confusion, les contrats types mentionnent
maintenant l’organisateur de transport. Une grande
partie du contentieux concerne d’ailleurs la qualification
de l’intervenant et les juges doivent rappeler que
juridiquement, le transitaire n’est pas plus un voiturier
qu’un commissionnaire, il est un mandataire et à ce titre,
il est soumis au droit commun du mandat et n’a de lien
contractuel qu’avec celui qui a requis ses services. Cour
de cassation 1998 a ajouté que le fait que le transitaire ait
été amené à payer le transporteur pour le compte de son
mandant n’est pas de nature à entraîner une modification
de sa qualité juridique.

2) La distinction du transitaire avec le


commissionnaire

– Différence de fonction : La différence essentielle entre


le transitaire et le commissionnaire tient au fait que le
commissionnaire se charge complètement du transport
alors que le transitaire intervient seulement à l’occasion
de la rupture de charge ou de la rédaction d’un document
administratif ou douanier. Les juges vont surtout
apprécier ces deux éléments même si la qualification peut
varier en cours de transport.

– Différence de règlementation : la profession de


commissionnaire est réglementée (inscription sur un
registre) alors que le transitaire n’a besoin d’aucune
autorisation.

– Différence de responsabilité: le commissionnaire est


tenu d’une obligation de résultat et est responsable de
son fait personnel et du fait d’autrui. Le transitaire est
ignoré par les codes mais la jurisprudence lui a adapté les
règles du mandat, il est donc uniquement responsable de
ses fautes personnelles prouvées.

– Différence de rémunération: le commissionnaire est


rémunéré par le prix du transport (généralement
forfaitaire) convenu avec son client. Le transitaire se fait
rembourser les avances qu’il a faites pour le compte de
son mandant, il ne peut donc être rémunéré
forfaitairement. Le transitaire non payé n’a aucune
garantie sauf droit de rétention s’il a toujours les
marchandises alors que le commissionnaire bénéficie
d’un privilège spécial.

– Différence de prescription: agir contre le


commissionnaire délai d’1 an, alors que pour le transitaire
s’applique la prescription de droit commun (10 ans).

3) La rémunération du transitaire

Il n’existe pas de tarif réglementaire pour les opérations


de transit mais les tribunaux estiment que la facture d’un
transitaire se caractérise par son détail et sa ventilation
alors que celle des autres intervenants en principe ne fait
apparaître qu’un prix global. A défaut d’accord préalable,
la rémunération intervient selon les usages en
considération des services rendus. Cour de cassation
1999 a rejeté un pourvoi contre un arrêt qui avait admis
un abattement du montant de la facture pour
insuffisance de prestation, ainsi, les juges ont la
possibilité de vérifier poste par poste, le transitaire doit
donc avoir une facture détaillée.

Lorsque le transitaire est agréé en douane et qu’il


effectue les formalités douanières, il est en droit de
percevoir une rémunération distincte pour cette mission.
C’est le donneur d’ordre qui paye le transitaire, il arrive
parfois qu’un transitaire soit substitué à un autre qui a
fait l’objet d’une liquidation judiciaire. La question s’est
posée de savoir qui devait payer le transitaire: ce dernier
a-t-il une action contre le client donneur d’ordres ou doit-
il déclarer sa créance à la procédure de faillite ? Les
tribunaux sont partagés, certains estiment que le
donneur d’ordres doit payer même s’il a déjà payé l’autre
et éventuellement déclarer sa créance. D’autres
tribunaux estiment que l’origine de son intervention
étant la faillite de son confrère, il doit déclarer lui-même
directement sa créance. En pratique, on estime qu’il s’agit
de contrat en cours et on se fait garantir en demandant
l’autorisation de poursuivre les contrats au juge
commissaire. La situation pourrait aujourd’hui se régler
facilement au stade de la conciliation.

Sur cette facture va d’abord apparaitre le


remboursement des frais avancés. Le transitaire est un
mandataire, il a donc droit au remboursement des
avances et frais (Code civil Article1999). Le transitaire est
aussi tenu de préserver les intérêts et les recours de son
mandant or cela peut entraîner des frais dont il pourra
demander paiement (ex: en cas d’avarie, frais
d’entreposage de la marchandise en attente de
l’expertise). Néanmoins, le transitaire peut se trouver
privé de son droit à remboursement en cas de faute
personnelle. Ainsi, un transitaire a été débouté de sa
demande de remboursement de frais de stationnement
de conteneurs à l’étranger au motif qu’il avait tardé à
transmettre les documents nécessaires à leur
déplacement. De même lorsque l’oubli d’un document
par le transitaire a entrainé le gel de la marchandise dans
le camion bloqué au tunnel du Mont blanc.

Lorsque le transitaire accomplit des formalités en


douane, il devient commissionnaire en douane (le
transitaire accomplissait des formalités en douane est
appelé commissionnaire en douane) et en assume toute
la responsabilité, il va donc devoir payer les droits et
taxes ainsi que toutes les amendes.

Si le mandant n’a pas remis à temps les documents exigés


par le transitaire, le transitaire n’est pas responsable.

Le privilège et le droit de rétention

Le transitaire ne peut pas revendiquer le privilège de


Code de commerce Article L132-2 puisque ce privilège a
été institué au profit du seul commissionnaire.
En revanche, pour les frais qu’il expose pour la
conservation des marchandises, le transitaire bénéficie du
privilège général du code civil, ce privilège n’est pas
subordonné à la détention de la chose.

Par ailleurs, la jurisprudence reconnaît au mandataire de


droit commun (et donc au transitaire) un droit de
rétention sur les marchandises qu’il détient en vue de
forcer son cocontractant à exécuter ses obligations. Les
transitaires ont intérêt à introduire dans leurs conditions
générales ou contrats une clause de constitution de gage
conventionnel ce qui va leur permettre de bénéficier
d’une garantie équivalente à celle prévue par le Code de
commerce pour les commissionnaires. Grâce à une telle
clause, le transitaire aura la possibilité de demander
l’attribution judiciaire des marchandises ou faire procéder
à leur vente. D’ailleurs, la fédération française des
commissionnaires envisage cette possibilité pour les
transitaires.
Section 2: Les obligations et la responsabilité du
transitaire

1) Les principes de responsabilité du transitaire

Simple mandataire, le transitaire n’est pas garant de la


bonne fin du transport, sa responsabilité n’est engagée
que s’il commet une faute personnelle dans
l’accomplissement de son mandat. Cette faute peut
résider dans la violation des obligations générales ou
particulières qui sont mises à sa charge.
Contrairement au commissionnaire, aucune présomption
de responsabilité ne pèse sur le transitaire. Ainsi, sa
responsabilité n’est engagée que pour faute prouvée. De
même, conformément au droit commun, la faute retenue
à son encontre ne peut entraîner sa condamnation que si
elle est en relation directe de cause à effet avec le
dommage.

C’est au demandeur de rapporter la preuve de la faute


personnelle du transitaire et du lien de causalité entre
cette faute et le préjudice qu’il invoque.

Simple mandataire, le transitaire n’est pas garant des


transporteurs car il ne les a pas choisi (il serait alors
commissionnaire). En revanche, le transitaire peut
répondre de ses propres substitués et il répondra de leurs
fautes s’il n’a pas été autorisé, même tacitement, à
effectuer cette substitution. Les tribunaux en déduisent
aussi que si la substitution a été autorisée, il n’est plus
responsable sauf s’il a choisi une personne notoirement
incapable ou insolvable.

2) Les obligations du transitaire

Etant un mandataire, le transitaire a pour obligation


principale l’exécution de la mission qui lui a été confiée
mais il s’agit d’un professionnel du transport donc il est
également tenu par un devoir de conseil.

1. A) L’exécution fidèle des instructions

Le transitaire doit accomplir les actes juridiques et


matériels que commande le passage d’un mode de
transport à un autre. Il doit le faire conformément aux
instructions de son mandant. L’exécution doit être fidèle.
Ainsi, a été déclaré coupable d’une faute lourde le
transitaire qui avait remis les marchandises à une
compagnie aérienne autre que celle imposée par le client.
La faute lourde a aussi été retenue contre un transitaire
ayant tardé à transmettre un document relatif au
contrôle sanitaire, le document était arrivé avec une
journée de retard, les juges ont estimé qu’il y avait eu
dépréciation de la marchandise.

Dans certains cas, le transitaire refuse d’exécuter les


instructions. Lorsqu’il estime que l’exécution des
instructions est impossible, le transitaire doit en rendre
compte à son mandant car il commet une faute lourde s’il
expédie la marchandise selon « sa propre inspiration ».

Les tribunaux estiment que le transitaire doit exécuter


purement et simplement car il n’a pas qualité pour
apprécier le bien-fondé ou l’opportunité de la demande.
1. B) Le devoir de conseil

Le transitaire est un professionnel, il est ainsi tenu d’un


devoir de conseil envers son client pour les opérations
relevant de sa compétence (Cour de cassation, chambre
Com 8 déc. 1969 confirmé par Cour de cassation 4 fév.
1986). Le transitaire engage sa responsabilité notamment
s’il connaissait le caractère dangereux de la marchandise
et n’a pas attiré l’attention de son mandant sur la
règlementation du transport de matières dangereuses
par mer. Un transitaire doit aussi formuler toute
observation utile pour déterminer le véhicule adapté
Les tribunaux précisent que l’art du transitaire s’exerce
dans le transport et non dans le négoce international ou
dans le conseil juridique, le transitaire n’a donc pas à
informer son client sur la législation étrangère voire
douanière car cela fait partie de la commission du
commissionnaire. En pratique, le transitaire le fait car il
ne sait pas s’il y a ou non un commissionnaire. Il est
impossible de lui reprocher de ne pas avoir attiré
l’attention sur le fait que le délai pour agir contre le
transporteur est d’un an et non 10 (il s’agit de conseil
juridique, ce n’est donc pas dans sa mission).
1. C) L’obligation de réserver le recours de
son mandant

Réserver le recours signifie sauvegarder les conditions à


remplir pour l’exercice du recours, cela ne signifie pas
exercer le recours. Cour de cassation 1991 a ainsi estimé
que l’exercice du recours sauvegardé appartient au client
et à lui seul.

En revanche, étant donné qu’il est un mandataire salarié


et spécialisé, la jurisprudence sanctionne sévèrement
toute faute ou négligence entraînant la perte du recours
contre le transporteur, CA Lyon 2002 a ainsi condamné le
transitaire à la place du transporteur.
Si les dommages sont apparents, le transitaire doit
réserver les recours à l’arrivée de la marchandise en
formulant des réserves. Il engagera sa responsabilité si les
réserves sont imprécises, tardives ou irrégulières.
L’absence de réserve est sans conséquence car elle ne va
pas priver l’expéditeur d’une action mais sa procédure
risque d’être vouée à l’échec, dans ce cas, l’expéditeur
engagera la responsabilité du transitaire.

Si les dommages sont non apparents : lorsque le


transitaire n’a pas eu la possibilité matérielle de déceler
les dommages ou lorsqu’il y avait vice caché, l’absence de
réserve ne constitue pas une faute. Le transitaire peut
donc accepter sans réserve des conteneurs normalement
plombés et d’ailleurs le plombage est normalement
réalisé pour souligner la qualité et la protection de la
marchandise. En revanche, si le transitaire relève une
température anormale du conteneur ou même à
l’intérieur du véhicule où ils sont entreposés, il commet
une faute s’il ne signale pas le problème.

Le transitaire est également chargé de conclure les


documents de transport en vue de la réexpédition de la
marchandise. C’est le cas aussi lorsque la marchandise est
défectueuse. Mais s’il le fait sans l’autorisation de son
mandant, il n’est plus transitaire mais devient expéditeur.
Le transitaire doit aussi faire procéder dans les meilleurs
délais à la rupture de charge pour que la marchandise soit
rapidement réexpédiée grâce au nouveau moyen de
locomotion et il doit procéder à la vérification de l’état du
véhicule. La encore, il doit réserver les droits de son
mandant.

Enfin, lors des opérations de transbordement, le


transitaire doit opérer comme si les marchandises lui
appartenaient en propre, il va donc vérifier que ce sont
bien les marchandises qui lui étaient destinées et doit
vérifier leur nature, quantité, poids et qualité, au besoin,
il doit tout entreprendre pour la conservation de ces
marchandises. A défaut, le transitaire commettra une
faute lourde entraînant l’allocation de dommage et
intérêts.

Chapitre 3: La responsabilité des acteurs du


transport

Les deux responsabilités les plus fréquentes sont la


responsabilité du transitaire ou commissionnaire et la
responsabilité du transporteur. Le commissionnaire est
responsable en sa qualité d’organisateur du transport de
bout en bout, cela ne prête pas à discussion, la discussion
porte surtout sur la qualité de commissionnaire.

Section 1: La responsabilité du transitaire

Responsabilité contractuelle ou délictuelle selon la


personne visée.

Selon le droit commun, le transitaire assume une


responsabilité délictuelle à l’égard des tiers auxquels il a
causé un dommage. Cette responsabilité est engagée sur
le fondement de Code Civil Article1382 et suivants.
Le transitaire est également responsable
contractuellement s’il s’est engagé personnellement
envers le transporteur. C’est le cas lorsqu’il signe une
lettre de garantie concernant la marchandise mais
surtout lorsqu’il exécute purement et simplement la
mission qui lui a été confiée. ex: véhicules surchargés
avec l’accord du transitaire et en matière maritime des
cas de responsabilité pour non vérification du
connaissement.

Parce qu’elles sont régies par le droit commun, les actions


en responsabilité échappent à la prescription annale et
sont donc soumises en principe à une prescription de 30
ans, ramenée à 10 ans en raison de la nature
commerciale de la prestation.

Dans tous les cas, les conditions de la responsabilité sont


classiques : la réunion d’une faute, d’un dommage et d’un
lien de causalité.

1) La faute

La faute soulève le plus de difficultés car il faut l’adapter


aux conditions du transite. La faute doit être prouvée, sa
gravité doit être évaluée.
1. A) La preuve de la faute

Le transitaire n’ayant qu’une obligation de moyens, il faut


prouver la faute commise. Les tribunaux sont
régulièrement amenés à le faire soit en disant qu’il y a
obligation de moyen (la faute doit être prouvée) soit en
disant que la faute n’est pas établie. Il s’agit d’une
question de fait et la preuve peut donc se faire par tout
moyen. Le juge va seulement vérifier que le demandeur
ne s’est pas mis en situation d’impossibilité de prouver la
faute. Il faut rapporter la preuve de la faute, si la faute
n’est pas rapportée, le juge va vérifier si vraiment elle ne
peut être rapportée. Ainsi, la Cour de cassation a décidé
que le demandeur en dommages et intérêts devait être
débouté au motif que la preuve de la faute était
impossible étant donné qu’il avait exprimé sa satisfaction
et ses remerciements au transitaire.

1. B) La gravité de la faute

Normalement, n’importe quelle faute engage la


responsabilité. Pour le transitaire, Code Civil Article1992
l’affirme tout en invitant le juge à se montrer plus ou
moins sévère dans l’appréciation des fautes d’un
mandataire salarié, ce qui est le cas du transitaire. Par
conséquent, il n’est pas nécessaire d’exiger une faute
lourde mais en jurisprudence, on constate que les
tribunaux retiennent la qualification de faute lourde
lorsqu’ils veulent attribuer des dommages et intérêts
importants.

1. C) L’appréciation de la faute

L’appréciation de la faute est très variable puisqu’une


même faute peut être dans un cas une faute légère et
dans une autre hypothèse une faute extrêmement grave.
Globalement, ce qui est essentiellement reproché au
transitaire est l’absence de réserves surtout lorsqu’elle
prive le mandant d’un recours.
On reproche également un défaut de vérification mais
souvent, c’est lorsque la situation est évidente. On
considère comme fautif le transitaire qui n’a pas vérifié
l’état de la marchandise lorsque la vérification était
simple voir nécessaire en raison des circonstances. C’est
le cas par exemple si on remet au transitaire des
marchandises sensibles au froid alors que la température
extérieure a brutalement baissé. Toutefois, on n’impose
pas des contrôles délits ou complexes, le transitaire n’est
pas un expert. On va simplement lui reprocher une non
vérification de bon sens. Finalement, cela rejoint l’idée de
défaut de précaution et parfois même le défaut de
surveillance.
Le transitaire est responsable si la marchandise est volée
alors qu’il est en train d’accomplir sa mission mais la
surveillance va au-delà puisque la Cour de cassation a
admis qu’un transitaire soit condamné pour avoir confié
la direction des opérations à un agent insuffisamment
qualifié ce qui a, par la suite, provoqué un accident. La
faute s’apprécie vraiment au cas par cas.

2) Le dommage

Il faut que la faute ait causé un dommage à autrui. Le


mandant qui a subi un dommage peut agir en réparation
lui-même mais dans la plupart des cas, c’est son assureur
qui lui sera subrogé après l’avoir indemnisé. Le dommage
va être réparé selon le droit commun et non selon le droit
des transports, cela signifie que le transitaire ne pourra
pas invoquer un plafond de responsabilité.

Néanmoins, on constate que dans certains cas, les


tribunaux ne réparent pas entièrement le dommage
lorsque la marchandise n’a pas fait l’objet d’une
déclaration de valeur pour son acheminement. De plus, si
la marchandise a une valeur supérieure à la valeur
déclarée, on estime que le dommage était imprévisible
par rapport à la différence de valeur. Dans cette
hypothèse pourra s’appliquer Code Civil Article1150 qui
exclut la réparation du dommage imprévisible sauf en cas
de dol ou de faute lourde.

Enfin, en pratique, rien n’empêche le transitaire de


prévoir une clause limitative de responsabilité (c’est
autorisé en droit commun) mais elle ne pourra couvrir
que les fautes légères puisque la jurisprudence les
considère nulle en cas de dol ou de faute lourde.

3) Le lien de causalité

La responsabilité du transitaire suppose que le dommage


se soit produit au cours d’opérations dont il avait la
charge. Il faut donc prouver une faute en cours de
mission, le dommage en résultant découlant
immédiatement de cette faute.

Tout ceci fait qu’en pratique il est assez difficile d’obtenir


d’un tribunal qu’il déclare un transitaire responsable car il
est très difficile de prouver que le dommage n’aurait pas
existé s’il n’y avait pas eu intervention du transitaire.

Section 2: La responsabilité du transporteur

Lorsque le transporteur n’exécute pas ou exécute mal son


obligation, il sera déclaré contractuellement responsable
du dommage en résultant pour son cocontractant. En
principe on devrait également raisonner en termes de
faute, dommage et lien de causalité mais le transporteur
de marchandises est soumis à un régime de
responsabilité plus sévère qui s’explique par son
professionnalisme. Le Code de commerce le déclare
garant de la perte et des avaries sauf force majeure ou
vice de la chose. De plus, il n’est pas exonéré en cas de
retard car il devra justifier d’un évènement assimilable à
la force majeure.
1) L’existence d’une présomption de
responsabilité

Cette présomption résulte du fait que les textes prévoient


la garantie de la marchandise transportée. L’adjectif
« garant » est important car il permet d’aller au-delà
d’une responsabilité classique. La seule survenance d’une
perte ou avarie durant le transport fait naître à la charge
du transporteur une obligation de réparer.

Pour la même raison, seule la force majeure est tolérée à


titre de tempérament. Certains auteurs ont fait valoir que
le terme « garant » est une élégance de langage puisque
dans les textes internationaux est utilisé l’adjectif
« responsable » mais le législateur n’était pas d’accord
avec la doctrine et lors de la réforme du Ccom, a été
maintenu l’adjectif garant et donc la présomption de
responsabilité.

D’ailleurs, cette présomption de responsabilité


s’accompagne d’une présomption de lien de causalité. Le
voiturier est tenu de réparer le dommage du seul fait que
la perte ou l’avarie a été constatée à l’arrivée. Le
transporteur peut rapporter la preuve contraire par tout
moyen mais cette preuve est très difficile.
De surcroit, ce régime de responsabilité a un caractère
impératif puisque la loi de 1905 a interdit les clauses de
non responsabilité dans les contrats de transport
terrestre de marchandise et jusqu’à ce jour, cette règle
du Code de commerce n’a jamais été modifiée.

2) La mise en jeu de la responsabilité du


transporteur

Les textes ont été considérés par la jurisprudence comme


faisant peser sur le transporteur une obligation de
résultat, ceci toujours dans la lignée du caractère
professionnel de l’activité de transport. Il en résulte que
la mise en jeu de la responsabilité est facilitée pour le
demandeur. Finalement, le demandeur doit simplement
apporter la preuve de l’existence du dommage à l’arrivée.
Cette preuve étant faite, à priori le transporteur est
responsable mais il a la possibilité d’invoquer des causes
d’exonération.

1. A) La preuve du dommage

Le demandeur peut faire la preuve du dommage par tout


moyen. Dans la plupart des cas, il fera appel au
témoignage de personnes qui ont assisté au déballage de
la marchandise. De plus, en cas de problème, on va
souvent recourir au constat d’huissier mais l’huissier n’est
pas un professionnel du transport, n’est pas un expert du
transport. Finalement, l’huissier va simplement
enregistrer les faits matériels vérifiables. Ce n’est qu’un
élément de preuve car le constat d’huissier n’est pas
forcément établi de manière contradictoire mais c’est
une précaution procédurale qui a plus de foi qu’un simple
témoignage d’un salarié ayant réceptionné la
marchandise.

Lorsque le destinataire reçoit la marchandise, il doit


accomplir des formalités particulières si l’on veut
ultérieurement agir contre le transporteur. Il doit
ménager les preuves sur place et notamment faire les
réserves avant que le camion ne quitte les lieux. Si ce
n’est pas le cas, il peut toujours y avoir fin de non-
recevoir. La preuve est plus difficile en matière d’avarie
alors qu’elle est évidente en cas de perte totale ou en cas
de retard.

Les protestations doivent être notifiées aux transporteurs


par acte extrajudiciaire ou lettre recommandée, dans le
cas contraire la demande ne peut aboutir. Il faut régir
dans les 3 jours et dans certains cas l’exploit d’huissier est
préférable car la Cour de cassation estime qu’une grève
de la Poste n’est pas un cas de force majeure.
En principe, la protestation émane du destinataire car
c’est lui qui est le mieux placé pour apprécier la situation
à l’arrivée mais elle peut également émaner d’un
mandataire du destinataire (ex: son assureur). Elle peut
aussi émaner de l’expéditeur ou du commissionnaire,
bref, de toutes les personnes parties au contrat.

En pratique, l’expéditeur agit lorsque la marchandise


refusée par le destinataire lui a été rapportée. Les
tribunaux exigent que la marchandise soit rapportée en
totalité. Si le destinataire accepte une partie de la
livraison, c’est lui qui doit protester. Cette protestation
doit être motivée, elle doit donc contenir en détail les
griefs adressés au transporteur. Le fait de se plaindre par
téléphone et d’indiquer dans un courrier recommandé
que l’on conteste la livraison pour les raisons
développées à l’oral ne vaut pas protestation régulière.

Les griefs doivent également être précis. Il ne suffit pas de


viser la température intérieure d’un véhicule, même si
elle est manifestement excessive, il faut indiquer que
cette température excessive a eu une incidence sur la
marchandise. Tout ceci doit être envoyé au transporteur
dans les 3 jours, dimanches et jours fériés non compris. Il
s’agit des 3 jours à compter de la réception, le délai
commence donc à courir le lendemain à 0 heure (le jour
même à minuit). La lettre recommandée postée le jour
même de la livraison est intervenue dans les délais. Ce
délai est préfix i.e. il n’est donc pas susceptible de
modification (allongement, suspension, rétrécissement).
Si le dernier jour est un dimanche ou un jour férié, les
règles générales de la procédure civile s’appliquent,
l’échéance est reportée au lendemain.

La protestation doit être envoyée au voiturier et en


pratique, beaucoup de demandes sont mal dirigées, le
destinataire a tendance à écrire à l’expéditeur. En cas de
pluralité de transporteurs, il faut écrire au dernier, il faut
toujours écrire au transporteur qui a fait la livraison.
Lorsqu’il y a un commissionnaire, c’est le
commissionnaire qui doit rédiger la protestation et si le
destinataire se trompe, s’il proteste auprès du
commissionnaire au lieu de le faire auprès du
transporteur, le commissionnaire doit réagir très vite, il
doit garantir les recours de son mandant et il n’a que 3
jours pour intervenir.

En cas de contestation, il est toujours possible de


solliciter une expertise, il s’agit d’une expertise judiciaire
et contradictoire, elle nécessite l’intervention d’un juge
pour la désignation d’un expert. Devant un tribunal, c’est
cette expertise qui fait foi, une expertise contractuelle qui
serait diligenté par des assurances vaudra comme simple
document de travail. Comme il s’agit d’un acte judiciaire,
la demande est faite par toute personne y ayant intérêt
i.e. par toutes les parties au contrat, y compris le
transporteur. Cette demande doit être faite dans les 3
jours de la livraison. L’expert va constater et préciser les
dommages mais le CODE DE PROCÉDURE CIVILE lui
interdit de déterminer les responsabilités (c’est le rôle du
juge).

Tout le monde peut également solliciter une contre-


expertise. Les textes prévoient une seule contre-expertise
(il faut que ce soit jugé assez vite). Il n’y a pas de délai
précis mais la demande se fera par référé justifié par
l’urgence puisque les marchandises sont en état de
souffrance.

Les réserves doivent être complètes, précises et


motivées. Les réserves sont très fiables et la gestion du
contentieux rapide lorsque le transporteur accepte les
réserves mais en cas de refus le contentieux s’enlisera, il
est donc préférable de recourir à l’expertise dès qu’est
constatée une réticence du transporteur à accepter les
réserves.
Lorsque le dommage résulte d’un retard, les réserves
sont toujours possibles. Mais en cas d’inexécution totale
ou grave, le meilleur moyen réside en la mise en demeure
du transporteur. Cette mise en demeure permettra la
mise en œuvre de Code Civil Article1146 qui précise que
les dommages ne sont dus que lorsque le débiteur est en
demeure de remplir son obligation. Cette mise en
demeure souligne la nécessité d’un certain délai, d’une
certaine durée pour le retard. Le simple dépassement
n’est pas constitutif d’un dommage (les textes eux-
mêmes) laissent une franchise de 2 heures. Il faut que le
retard soit préjudiciable. Ce sera surtout le cas lorsque la
marchandise est avariée du fait du retard.

1. B) Les moyens d’exonération du


transporteur fautif

Le transporteur routier peut s’exonérer s’il prouve


l’existence d’une cause étrangère, cette cause étrangère
ayant influé sur le dommage. En matière de transport, la
loi détermine les faits susceptibles d’être considérés
comme des causes étrangères libérant le voiturier. Code
Civil Article1784 vise le cas fortuit et la force majeure. Le
Code de commerce ajoute le vice propre de la chose. La
jurisprudence a ajouté la faute de l’usager. Ces éléments
doivent résulter de constations matérielles certaines et
évidentes, il ne doit y avoir aucun doute pour
l’appréciation de cette cause étrangère. Dans la plupart
des cas, la preuve va résulter d’une expertise qui aura été
demandée par le transporteur. Mais l’expertise ne va pas
suffire car l’expert n’a pas le droit de déterminer les
responsabilités, il doit seulement donner les éléments
permettant d’apprécier le lien entre la cause étrangère et
le dommage. Ces éléments de preuve doivent être
indiscutables. En pratique, il est souvent difficile de
démontrer ce lien.
La Cour de cassation contrôle très strictement la bonne
application des règles de preuve. Par exemple, elle rejette
un motif alternatif, une Cour d’appel avait estimé que le
dommage pouvait avoir pour origine un vice propre de la
chose ou un évènement imprévisible. Pour la Cour de
cassation, le motif n’est pas correct ce doit être soit l’un
soit l’autre mais pas l’un ou l’autre.

Enfin, on découvre l’existence de dommages d’origine


inconnue, la seule chose qui soit certaine est l’existence
du dommage mais son origine. C’est le cas en cas de
contradiction d’expertise. Le dommage d’origine
inconnue va permettre au transporteur de s’exonérer.
Dans cette hypothèse, l’octroi de dommage et intérêt est
rare.

De manière classique, la clause étrangère est tous les


évènements imprévisibles et surtout irrésistibles. Ici
encore la Cour de cassation contrôle l’appréciation de
l’irrésistibilité. Ainsi, le vol du véhicule n’est pas un cas de
force majeure mais le vol à main armée est un cas de
force majeure, « on ne saurait contraindre le transporteur
à l’héroïsme ». Le fait que le camion ne passe pas sous un
pont n’est pas un cas de force majeure, il faut démontrer
qu’il ne passe pas même en dégonflant un peu les pneus.
Parmi ces causes étrangères, il peut y avoir le fait du
principe i.e. l’Etat par ses règlements peut empêcher un
transport d’arriver à destination dans les délais (ex: pic de
pollution, réduction de la vitesse etc.).

Le vice propre de la chose (marchandise) s’analyse


comme en matière de vice caché. Le vice propre peut
aussi affecter le véhicule (ex: les freins lâchent en haut
d’une côte).

Dans tous les cas, il faudra que le transporteur démontrer


cette irrésistibilité et cela pourra entraîner, comme dans
les autres cas, la réparation du dommage car en matière
de transport, même si le transporteur est exonéré, il y a
des plafonds d’indemnisation et le transporteur ne paiera
rien mais son assureur paiera.

Section 3: La réparation du dommage

Les textes imposent la réparation du préjudice résultant


de l’avarie ou du retard, ce sont les textes du droit
commun Code Civil Article1142 la non-exécution d’une
obligation de faire se résout par dommages et intérêts.
Code Civil Article1149 prévoit aussi une réparation
intégrale pour la victime quelle que soit la nature du
préjudice. Ces dispositions combinées conduisent à une
réparation pécuniaire, il faut donc déterminer le
préjudice réparable et fixer le montant de la réparation.
En pratique, expéditeur et transporteur concluent aussi
des accords en cas de préjudice subi par l’usager. Ces
accords prévoient souvent une réparation systématique.
Les clauses limitatives de responsabilité sont interdites
mais ici la responsabilité n’est pas mise en cause, le
transporteur ne limite pas sa responsabilité, il prévoit
simplement la condamnation pécuniaire et cette
réparation pécuniaire, il peut la limiter.
1) La détermination du préjudice réparable

1. A) Les éléments du préjudice réparable

On parle ici de trouble commercial, il s’agit du préjudice


matériel et du préjudice moral. La notion de trouve
commercial permet aussi d’englober la jurisprudence
relative à Code Civil 1149 perte éprouvée et gain manqué,
la jurisprudence a ajouté la perte d’une chance. Toutes
ces notions sont réunies sous la notion de réparation du
trouble commercial.

1) La perte éprouvée
La perte éprouvée est fonction de la nature du dommage
occasionné à la marchandise. Si la perte est totale ou
partielle, on va se référer à la valeur de la marchandise
plus les frais exposés pour la remplacer. Cela est
insuffisant car il faut parfois aussi rembourser la clientèle
et il faut aussi payer les heures supplémentaires qui
seront nécessaires pour réparer ou re fabriquer. En cas
d’avarie, la perte éprouvée consistera surtout dans les
frais de remise en état des choses transportées et
également dans la perte de jouissance pendant la durée
de la réparation.
Si la réparation est impossible, on aura la contrevaleur, si
la réparation est partielle, la chose sera dépréciée (baisse
du prix) et il y aura donc une compensation pécuniaire.

En cas de retard, la perte éprouvée résulte dans la


privation de jouissance de la chose transportée et parfois
dans la baisse de la valeur de la marchandise qui était
destinée à la vente (ex: biens consommables).

2) Le gain manqué

Le gain manqué apparaît surtout lorsque la marchandise


était transportée mais devait être revendue par
l’acquéreur. Le gain manque est le bénéfice escompté. En
pratique, on va se référer au cours normal de la
marchandise et en l’absence de cours officiel, au chiffre
d’affaires.

3) La perte d’une change

Il s’agit d’une création jurisprudentielle qui vise les cas


pour lesquels le préjudice ne peut être établi de manière
certaine. Cette notion a été introduite par Cour de
cassation Crim 3 avril 1979 en matière de transport,
confirmé 15 juin 1982. Il s’agissait dans ces deux affaires
d’un accident de la circulation qui s’est produit alors que
la marchandise était destinée à une foire exposition, dans
les deux cas, plus rien ne pouvait être exposé du fait de la
détérioration de la marchandise, les juges ont estimé que
le montant de l’indemnité devait correspondre au
pourcentage de change estimé perdues eu égard aux
expositions précédentes (en plus du préjudice matériel).

Si l’accident a lieu lors de la première participation à une


foire exposition, les juges du fond estiment que la perte
de chance existe et ils se réfèrent au pourcentage normal
et habituel (pourcentage moyen) des affaires effectuées
dans ce type de manifestation.
1. B) Les caractères du préjudice réparable

Code civil Article1150 et 1151 le débiteur n’est tenu de


réparer que les dommages qui ont été prévus ou que l’on
a pu prévoir (i.e. prévus et prévisibles) lors de la
conclusion du contrat et qui sont une suite immédiate et
directe de l’inexécution de la convention. Ce sont les
dommages directs et les dommages prévisibles.

Sont ainsi exclus, les dommages indirects mais les


dommages imprévisibles peuvent parfois quand même
être réparés. Selon la Cour de cassation, le préjudice est
direct lorsqu’il découle normalement de l’avarie
litigieuse, sans l’interposition d’une cause étrangère. On
va également prendre en charge l’aggravation du
dommage qui va résulter d’un enchaînement de
circonstances sans qu’une faute puisse être reprochée au
transporteur. Le Code Civil va limiter la réparation aux
prévisions lors de la conclusion du contrat, la
jurisprudence n’est pas du tout claire puisqu’elle dit que
la prévision s’entend des éléments constitutifs et non de
leur équivalent monétaire. En matière de transport, on ne
sait pas à quelle valeur se référer, en pratique on va se
référer aux éléments de fait dont le transporteur a pu
avoir connaissance au moment de la conclusion: nature
de la marchandise, destination, délais, valeur déclarée
etc.
1. C) L’évaluation du dommage

Les dommages et intérêts doivent être évalués en argent


et correspondre à l’équilibre commercial qui a été détruit
du fait du dommage. Il s’agit de remettre en état pour la
victime. Il faut prendre en compte le montant de la
marchandise car l’acquéreur ne va pas payer le prix. Ce
montant est-il le prix de vente ou revient ? La
jurisprudence prend en compte le prix réel même si le
vendeur avait accordé des ristournes à l’acheteur. Si la
victime a réparé elle-même, cela n’affecte pas son droit à
réparation et ne diminue donc pas l’indemnité.
Finalement, l’auteur du dommage ne peut subordonner
le versement de l’indemnité à la justification de la
réparation et la valeur va être calculée au jour du
prononcé de la décision de réparation.

1. D) La preuve du montant du dommage

Le demandeur en réparation doit prouver l’existence du


préjudice et son montant Cour de cassation chambre
Commerciale 21 déc. 1970 en matière de transport. La
Cour de cassation estime aussi que le demandeur doit
être débouté s’il ne prouve pas le montant du dommage
éprouvé. La preuve du dommage peut être faite par tout
moyen (usages, tarifs, catalogues etc.). La seule facture
du fournisseur, si elle est un élément important, n’est pas
un élément exclusif et décisif.

Exception à l’obligation de preuve: l’existence d’une


clause pénale (évaluation conventionnelle et forfaitaire
des dommages et intérêts). Dans cette hypothèse,
lorsque la responsabilité du transporteur est engagée,
l’usager a droit automatiquement i.e. sans prouver le
dommage, à la pénalité prévue dans le contrat. Mais
l’usager ne pourra demander plus si le coût du dommage
est supérieur au montant prévu par la clause alors que
dans l’hypothèse inverse, la clause pénale peut toujours
être minorée par le juge qui la trouverait excessive.
2) La détermination du montant de l’indemnité

Normalement, il s’agit de la remise en état i.e. réparation


intégrale. La profession de transporteur est encadrée en
raison de l’importance publique de cette activité
économique, une réparation intégrale systématique
mettrait en danger la profession. Le législateur a prévu
des atténuations, il a renversé le principe: en matière de
transport le principe est la réparation limitée et
l’exception la réparation intégrale.

Le législateur parle de responsabilité limitée mais cette


responsabilité peut être étendue (mais pas intégrale).
1. A) La réparation limitée

La réparation limitée résulte surtout de l’autorisation de


clauses limitatives de responsabilité qui ont été
introduites en droit français par la loi Rabier de 1905. Ces
clauses reposent sur des conditions juridiques et
économiques.

Juridiquement, l’objet de la clause ne doit pas porter


atteinte à l’essence du contrat (Cass Chronopost puisque
l’activité de l’entreprise est basée sur la célérité, une
clause limitative pour les retards est interdite),
juridiquement, la clause doit avoir été connue et
acceptée par l’expéditeur au moment de la conclusion, il
doit en avoir eu connaissance.

Economiquement, les conditions de la clause concernent


l’indemnité, il ne faut pas que l’indemnité soit dérisoire ni
par rapport au contrat ni par rapport au dommage. La loi
de 1905 ne concerne pas les retards, la clause limitative
calquée sur la loi Rabier ne peut concerner que les
dommages et avaries.

C’est celui qui invoque la clause limitative qui doit la


prouver. Les juges du fond disposent d’un pouvoir
souverain d’appréciation. La meilleure preuve est lorsque
la clause est signée (l’expéditeur en avait connaissance)
mais les tribunaux admettent aussi en l’absence de
signature que la personne produise une assurance
spécifique prise par l’expéditeur pour pallier les effets de
la clause.

Fonctionnement: la clause fixe un plafond mais le plafond


n’est pas un forfait, il faut donc établir le montant du
dommage, de la réparation. Si ce montant est supérieur
au plafond, le plafond sera versé, si elle est inférieure, ne
sera versée que la somme correspondant au dommage.

La clause étant insérée dans l’intérêt du transporteur,


celui-ci peut donc toujours y renoncer, même tacitement.
Ainsi, si le transporteur propose une indemnité
supérieure au montant de la clause, c’est qu’il renonce à
cette clause.

Exception: en cas de faute loure du transporteur, il ne


peut bénéficier de la clause, on revient donc au principe
de réparation intégrale.

1. B) La réparation limitée étendue

Tout en étant limitée, la réparation peut être étendue. En


effet, en matière de transport, on peut se prémunir en
matière de réparation en faisant une déclaration de
valeur ou d’intérêt spécial à la livraison. La déclaration de
valeur concerne les pertes et avaries, elle ne modifie pas
les conditions de mise en jeu de la responsabilité, son
seul but est de faire coller le montant de l’indemnité à la
déclaration de valeur. Les compagnies d’assurance ne
couvrent pas le retard en l’absence de déclaration
d’intérêt spéciale.

1. C) La réparation intégrale

Il s’agit de l’exception en droit des transports, elle


n’interviendra qu’en cas de dol ou de faute lourde du
transporteur ou de son préposé, il s’agit de la pénalité qui
va frapper le débiteur qui intentionnellement et
délibérément ne va pas s’exécuter. Ainsi, la réparation
sera intégrale en cas de vol, d’abus de confiance ou de
toute négligence d’une extrême gravité. Il s’agit d’une
appréciation des juges, l’erreur commise par un profane
peut être une faute lourde pour un professionnel.

Titre 3: Les actions du transport

Chapitre 1: La détermination du juge


compétent
La détermination du juge compétent est un préalable
nécessaire pour engager une action relative au transport.
Section 1: La détermination du juge compétent
en droit interne

1) La compétence territoriale

CODE DE PROCÉDURE CIVILE Article42 compétence de


principe du tribunal du domicile ou siège du défendeur

CODE DE PROCÉDURE CIVILE Article46 possibilité de saisir


le tribunal du lieu d’exécution de la prestation: en
matière de transport, le lieu d’exécution est le lieu de
remise de la marchandise au premier transporteur.
Le transport étant une matière commerciale, il est
possible d’insérer une clause attributive de juridiction
conforme aux exigences CODE DE PROCÉDURE CIVILE
Article 48.

Lorsque les deux parties sont commerçantes, il est


possible d’insérer une clause compromissoire.

2) La compétence d’attribution

La compétence d’attribution: le contrat de transport


étant un acte de commerce par nature, le tribunal de
commerce sera compétent quel que soit le montant de la
demande, le taux de ressort ne permettant que de
distinguer le premier et le dernier ressort.

Section 2: La détermination du juge compétent


en droit international

Les solutions du droit interne sont transposables (1959


Pelassa et 1962 Scheffel).

Les privilèges de juridiction Code Civil Article14 et 15


peuvent s’appliquer lorsque l’une des parties est
française sauf si cette personne a renoncé au bénéfice du
privilège.
Lorsque la situation est intégrée à l’UE, le juge
compétent sera déterminé par référence au règlement
communautaire 44/2001 du 22 déc. 2000. Ce règlement
pose le principe de la compétence du juge de la résidence
habituelle du défendeur et prévoit qu’en matière de
transport, le juge est celui de la remise de la marchandise
en vue du transport.

La loi applicable est la loi d’autonomie i.e. la loi choisie


par les parties, que l’on se réfère au droit commun ou au
droit conventionnel (Convention de Rome), la même
solution s’impose. A défaut de choix, on se réfèrera à la
loi du lieu d’exécution et donc de remise de la
marchandise au transporteur.

En droit international, la CMR est d’ordre public, elle


s’applique à tout transport routier international au départ
ou à destination de la France. La loi désignée par les
parties n’aura donc qu’un rôle supplétif, elle comblera les
lacunes de la CMR.

Chapitre 2: Les délais pour agir


Les délais sont très importants en matière procédurale et
particulièrement en matière de transport car le droit
commun a été volontairement écarté en vue de la
création d’un système plus sévère. Cette plus grande
sévérité a pour fondement l’objectif de préserver
l’activité économique du transport.

L’aspect le plus important est la prescription


exceptionnelle d’1 an prévue en matière de transport.
Auparavant, la prescription ne profitait qu’au plaideur
diligent, depuis la réforme du Code de commerce, cette
notion a disparue, Code de commerce Article L133-6
dispose de manière générale et maintient la prescription
annale.
La prescription annale vise toutes les actions principales
nées du contrat de transport de marchandises. Le
législateur voulait à tout prix éviter les procès: protéger le
débiteur de bonne foi (idem Code Civil 2277 salaires, si le
salarié n’a pas réclamé ses salaires pendant 4, 5 ? ans,
c’est que l’employeur avait oublié de bonne foi) mais
aussi préserver les preuves et éviter des procédures
longues avec des faits anciens de plus en plus difficiles à
établir à fur et à mesure que le temps avance et enfin
pour ne pas paralyser l’économie.
Section 1: Le domaine de la prescription annale

Le domaine est important puisque la formule est


générale. Sont concernées par la prescription annale, les
actions auxquelles le contrat peut donner lieu. Code de
commerce Article L133-6 al.1 concerne le voiturier et al.2
les autres auxiliaires.
1) Les actions soumises à la prescription annale

Ce sont:

– les actions en responsabilité pour avarie, perte ou


retard intentées contre le voiturier soit par l’expéditeur,
le destinataire ou le commissionnaire. Cela signifie que
tous les usagers peuvent agir mais aussi tous les
intervenants et tous les substitués à ces personnes. Cour
de cassation 1985 a permis à un assureur d’agir à
l’encontre du transporteur mais elle a accueilli l’exception
d’irrecevabilité soulevée par le voiturier sur le fondement
de la prescription.
– les actions en paiement de frais de transport: le
voiturier ou le commissionnaire agit contre l’expéditeur
ou le destinataire.

– les actions intentées par ou contre le commissionnaire


pour faute personnelle ou faute d’autrui.

– les actions relatives aux envois contre remboursement:


c’est le cas du transporteur qui n’a pas encaissé au
moment de la livraison ou qui a encaissé mais s’est fait
voler l’argent au cours du voyage de retour.

– toutes les demandes reconventionnelles: il s’agit de


demande incidentes rattachées à la demande principale
or la demande principale découle du contrat de transport.
Une seule et même affaire, une seule et même
prescription. La demande reconventionnelle est une
véritable demande et non une demande accessoire, c’est
sur ce constat que depuis 1965, la Cour de cassation lie la
demande reconventionnelle à la prescription annale.

– les actions relatives à une convention complexe: la


convention complexe intervient lorsqu’il y a transport et
logistique, Cour de cassation 11 juin 1996 a estimé que
s’agissant d’un contrat composite alliant transport et
logistique, la prescription annale s’applique compte tenu
du caractère indivisible de la convention et ce, malgré
l’importance des opérations de manutention. Pour la
Cour de cassation, il n’y aurait pas logistique s’il n’y avait
pas transport, le transport emporte la prescription annale
quelle que soit son importance.

2) Les actions échappant à la prescription


annale

1. A) La nécessité d’un contrat de transport

La prescription ne jouera pas à l’égard d’un tiers au


contrat de transport. Ainsi, lorsque l’action est engagée
par un tiers ou contre un tiers, la prescription ne
s’applique pas.

Ainsi, l’action du transporteur contre le garagiste dont la


mauvaise réparation est à l’origine du dommage n’est pas
soumise à la prescription annale (donc prescription de
droit commun de 10 ans).

Il faut un contrat de transport puisque l’action vise les


situations auxquelles le transport peut donner lieu. Il faut
que ce soit juridiquement un contrat de transport, c’est la
raison pour laquelle la prescription annale ne s’applique
pas au contrat de déménagement (car le contrat de
déménagement est un contrat de louage d’ouvrage et
d’industrie). Idem pour le contrat de transit, le contrat de
manutention ou de garde-meuble.

1. B) Fraude ou infidélité du voiturier

Il est fait référence au comportement du transporteur par


rapport au client. La doctrine distingue: la fraude est la
mauvaise foi alors que l’infidélité est la cupidité (i.e. pas
d’intention de nuire). La jurisprudence ne distingue pas
les actes déloyaux des actes normaux ou sans tricherie.
Pour la jurisprudence, il ne faut pas que ce soit de la
négligence ni de la maladresse car cela est gênant pour
un professionnel. La notion est floue ce qui permet une
appréciation des situations.
La notion est plus grave que la faute lourde (qui est
cantonnée au transport), prend en considération le
contexte. Etant grave, la fraude ou l’infidélité doit être
poursuivie au-delà du délai d’un an. Ne va pas être
admise l’attitude d’un transporteur qui promet un accord
amiable dans le seul but d’acquérir la prescription.

1. C) Les actions en réparation d’un


dommage corporel

La prescription annale est exclue même si l’accident se


réalise en cours du transport. Responsabilité civile, droit
commun 30 ans.
3) L’interversion de la prescription annale

Il est possible d’interrompre la prescription annale.


Normalement, l’interruption fait courir un nouveau délai
de même nature et de même durée. En droit des
transports, si cette solution était retenue elle ne
stabiliserait pas l’économie du transport.

Ainsi, en matière de transport, s’il y a interruption, la


prescription va être intervertie i.e. remplacée par la
prescription normale.
ex: une offre de réparation ne vaut pas interruption de la
prescription, le délai d’1 an va continuer à courir mais si
un courrier précis indique une date pour le règlement
d’une somme déterminée, il y a une sorte de novation, de
transaction qui fait que ce document fait quitter le
domaine du contrat de transport pour arriver dans le
domaine contractuel classique et donc soumis à la
prescription de droit commun.

De manière générale, la prescription en procédure civile


est d’intérêt privé, elle n’est pas d’ordre public et doit
donc être invoquée pour pouvoir être appliquée, c’est
celui qui invoque la prescription qui doit démontrer
qu’elle est acquise. Etant d’intérêt privé, la prescription
peut être invoquée pour la première fois en appel même
si le premier juge a connu le fond. En effet, la prescription
est une fin de non-recevoir CODE DE PROCÉDURE CIVILE
Article122 qui est opposable à tous les stades de la
procédure.

La prescription ne peut être invoquée pour la première


fois devant la Cour de cassation car dans ce cas il s’agirait
d’un moyen nouveau donc irrecevable.
Section 2: Les actions en réparation d’une
avarie ou perte partielle

Certains points du contrat de transport sont tellement


spécifiques que d’autres règles que celle générales et
uniformes doivent trouver application.

Ces règles édictées par le Code de commerce vont


s’ajouter à la prescription annale pour procurer au
transporteur une protection renforcée, notamment pour
les actions en réparation d’une avarie ou d’une perte
partielle. D’autres règles vont encore limiter les actions
en prévoyant, dans certains cas, une prescription d’1
mois.

1) Le domaine de la forclusion

Le transporteur est soumis à un régime de responsabilité


sévère en cas de perte ou avarie, il faut donc qu’il soit
informé rapidement des intentions de son adversaire
d’autant qu’il va devoir aussi réunir des preuves dans la
plupart des cas, périssables. Pour cette raison, les textes
imposent au destinataire de protester rapidement
lorsqu’il constate une perte ou une avarie à la livraison.
Pour ce faire, il dispose de 3 jours pour émettre des
protestations motivées ou pour recourir à l’expertise. Si
ces formalités ne sont pas accomplies, le transporteur
pourra opposer une fin de non-recevoir lorsqu’il sera
assigné devant le tribunal, cette fin de non-recevoir qui
entraîne une déchéance du droit d’agir est la forclusion.

La forclusion a un domaine précis, il faut préserver les


preuves avant qu’un véhicule ne soit réutilisé et c’est la
raison pour laquelle la jurisprudence l’applique
uniquement aux actions en responsabilité contractuelle.
De surcroit, la Cour de cassation les a exclues en matière
maritime ce qui entraîne automatiquement son exclusion
en cas de combinaison terre/mer. Sinon les textes sont
clairs: la réception des objets transportés éteint toute
action contre le voiturier pour avarie ou perte partielle.

1. A) Les actions soumises à la forclusion

La fin de non-recevoir titrée de la forclusion est destinée


à permettre au voiturier d’établir que l’exécution du
contrat de transport a été correcte, tout au moins en ce
qui concerne les dommages dont les preuves sont fragiles
et rapidement périssables. Chaque fois qu’une preuve est
fragile ou périssable, on fait en sorte que le transporteur
puisse opposer la fin de non-recevoir. Les textes
prévoient que la forclusion peut être opposée par le
voiturier aux actions intentées contre lui par le
destinataire ou le commissionnaire.

En revanche, lorsque la marchandise a été réexpédiée


chez l’expéditeur, se pose la question de savoir si le
voiturier peut opposer la fin de non-recevoir, cette
question remettrait en cause les notions de destinataire,
de réception et de contrat unique. En jurisprudence, pour
réexpédier la marchandise, il faut un nouveau contrat de
transport, on peut donc en déduire que lorsque la
marchandise a été réexpédiée, il y a fin de non-recevoir
puisque l’expéditeur n’a pas qualité pour contester la
livraison.
Sont concernées:

– l’action en réparation d’une avarie: les preuves de


l’existence et de l’importance d’une avarie doivent être
rapidement rassemblées pour ne pas prêter à discussion.
En France, pour éviter les discussions, on ne distingue pas
les avaries apparentes et les avaries occultes.

– l’action en réparation d’une perte partielle: une partie


de la marchandise fait défaut à l’arrivée. Il peut aussi
s’agir d’une livraison intacte, le destinataire ayant laissé
sur place les marchandises qui ont été endommagées
ensuite. Il peut aussi s’agir de la marchandise qui a été
sauvée d’un véhicule ayant pris feu à destination. Dans
toutes ces hypothèses, il n’y a pas perte totale puisqu’il y
a eu présentation à la livraison, c’est la raison pour
laquelle la forclusion est possible.

1. B) Les actions échappant à la forclusion

Le texte est clair: la fin de non-recevoir peut être opposée


par le voiturier uniquement lorsqu’il est assigné en
réparation d’une avarie ou d’une perte partielle.

Sont ainsi exclues:


– les actions en responsabilité pour perte totale: dans ce
cas, il n’y a pas eu réception de la marchandise par le
destinataire, le destinataire n’est forcément pas satisfait
de l’exécution du contrat de transport. Il est donc normal
que la fin de non-recevoir ne s’applique pas.

– les autres actions en responsabilité: le fin de non-


recevoir ne s’applique pas aux actions en responsabilité
pour retard ni aux actions en réparation d’une avarie
occasionnée par un retard. La forclusion ne concerne pas
non-plus les actions relatives au paiement du prix du
transport.
2) Les bénéficiaires de la forclusion

La forclusion protège les voituriers, elle ne peut donc être


invoquée que directement et à titre personnel par les
transporteurs. Cependant, parfois, le commissionnaire
peut en bénéficier.

1. A) Le voiturier

Selon les textes, le voiturier est la seule personne qui


puisse invoquer directement la forclusion, il faut qu’il
s’agisse d’un voiturier au sens strict i.e. un voiturier
professionnel. La forclusion ne peut donc pas bénéficier à
une personne qui accomplit un acte isolé de transport,
même rémunéré.

La doctrine estime même que la forclusion ne bénéficie


qu’au voiturier de métier dont la protection exige cette
règle écrite.

La jurisprudence y fait très attention. Ainsi, la forclusion


est refusée à un hypermarché qui faisait des livraisons
dans le cadre de ses contrats de vente (professionnel de
la vente et non du transport).

La fin de non-recevoir ne va pas non-plus opérer entre


transporteurs successifs même pour un même transport
parce que les textes imposent des formalités mais
uniquement au destinataire. Finalement, le seul visé est
le transporteur final. Dans une affaire, le juge a noté que
le deuxième transporteur était en réalité le destinataire
de la marchandise, elle a ainsi permis au premier
transporteur d’invoquer la fin de non-recevoir, mais c’est
rare, en principe le seul transporteur pouvant invoquer la
forclusion est celui recevant les protestations.

1. B) Le commissionnaire

Le commissionnaire en principe ne peut pas invoquer la


forclusion lorsqu’il est actionné en sa qualité de
commissionnaire. Le texte ne vise que le voiturier. Mais le
commissionnaire peut indirectement bénéficier de la
forclusion lorsqu’il est actionné en tant que garant du
transporteur car alors il récupère les droits du voiturier.

Le commissionnaire peut bénéficier de la forclusion dans


2 cas:

– le commissionnaire exécute lui-même le dernier


transport: il recevra les protestations en tant que
voiturier et indirectement en tant que commissionnaire.
Si cela est possible en théorie, en pratique, les juges
mettent en avant la qualité de commissionnaire et ont
tendance à refuser la forclusion au profit du
commissionnaire transporteur final.
– le commissionnaire bénéficiaire indirect: le
commissionnaire va bénéficier par ricochet de la fin de
non-recevoir lorsque le transporteur l’appelle en garantie
mais le commissionnaire doit à tout prix soulever le
moyen même si le transporteur l’a déjà fait lui-même.

3) Les conditions d’opposabilité de la forclusion

Le voiturier peut opposer la forclusion si le destinataire


n’a pas accompli les formalités (dans les délais). La
forclusion est une défense au fond, elle peut donc être
invoquée pour la première fois en appel et le juge du fond
peut la relever d’office car il s’agit d’un moyen de défense
de CODE DE PROCÉDURE CIVILE Article125 i.e. un moyen
de défense ayant un caractère d’ordre public. CODE DE
PROCÉDURE CIVILE Article125 le juge relève d’office mais
ne peut en tirer les conséquences, il doit demander aux
parties leurs observations.

S’agissant d’une défense au fond, la forclusion ne peut


être invoquée pour la première fois devant la Cour de
cassation.

Le voiturier peut être privé de son droit d’invoquer la


forclusion en raison de son comportement, il peut avoir,
par son attitude, renoncé à l’invoquer ou il peut
également avoir commis une fraude envers son client.
1. A) La renonciation du voiturier

Cette forclusion n’est pas d’ordre public, plus


précisément, seules les formes dans lesquelles les
conditions doivent être réunies sont impératives. On ne
peut pas modifier le délai par contrat, un voiturier ne
peut indiquer dans un contrat que le destinataire serait
forclos au bout de 24 heures. En revanche, il est toujours
possible pour un voiturier de ne pas invoquer la
forclusion, une demande qui serait faite au bout d’une
semaine est normalement tardive mais un transporteur
peut toujours l’admettre. Les juges ont ainsi retenu une
renonciation à la forclusion lorsqu’un transporteur avait
demandé au destinataire de passer dans ses bureaux à
une date ultérieure pour faire état des réserves, le jour
où les réserves ont été faites il était trop tard mais les
juges ont estimé que l’entretien qui avait eu lieu entre les
parties sur invitation du voiturier valait renonciation à la
forclusion. Toutefois, lorsque le voiturier transmet une
facture à son assureur, cela ne constitue pour lui qu’une
mesure conservatoire et absolument pas une
renonciation à la forclusion, il ne fait que préserver ses
recours.

1. B) La fraude
Le voiturier peut aussi avoir un comportement
frauduleux, et ce comportement frauduleux va
l’empêcher d’invoquer la forclusion. Cour de cassation 29
avril 1947 estime que la non-opposabilité de la forclusion
est une sanction de la fraude commise par le voiturier ou
ses préposés.

La fraude peut être de 2 types: il peut s’agir de la


soustraction frauduleuse de la marchandise en tout ou
partie ou de la mauvaise foi du voiturier qui fait tout pour
empêcher le destinataire de protester en temps utiles
(ex: livraison à une adresse volontairement modifiée,
intervention d’un tiers pour que le destinataire ne
réceptionne pas la marchandise et ne puisse la vérifier
dans le délai de 3 jours). Les cas de fraude les plus
fréquents sont les silences gardés à propos d’accidents de
la circulation, un accident est dissimulé, en apparence la
marchandise est parfaite mais en réalité l’accident a eu
des conséquences sur la marchandise.

4) Les effets de la forclusion

1. A) Les effets à l’égard du transporteur

La forclusion est à l’égard du transporteur une fin de non-


recevoir qui produit un effet catégorique, radical
puisqu’elle éteint toute action en responsabilité contre lui
fondée sur une avarie ou une perte partielle. Le tribunal
ne pourra pas juger l’affaire au fond même s’il est évident
que le transporteur est responsable. D’ailleurs, si le
transporteur n’a pas invoqué la forclusion, son assureur
peut ne pas l’indemniser, il peut lui refuser de le
rembourser au motif qu’il aurait dû invoquer la
forclusion. Cela s’explique par le fait que l’assureur
n’avait pas à garantir le risque puisque la responsabilité
du transporteur ne pouvait pas normalement être mise
en cause (Cour de Cassation, oct. 2004).

1. B) Les effets envers le destinataire


La fin de non recevoir peut avoir pour conséquence
d’engager la responsabilité du destinataire envers
l’expéditeur. En effet, le destinataire qui réceptionne les
marchandises doit vérifier si le contrat a été
correctement exécuté et s’il constate une avarie, il doit
prendre les mesures nécessaires pour préserver ses droits
contre le voiturier or s’il y a forclusion c’est qu’il n’a pas
agi correctement, le transporteur sera tranquille mais le
destinataire supportera les frais car il n’a pas agi
correctement et dans les délais, il sera donc condamné en
lieu et place du voiturier pour indemniser l’expéditeur. Il
faudra prouver que son attitude, que sa négligence a créé
un préjudice à l’expéditeur.
Section 3: Les actions en garantie

Les actions en garantie doivent être intentées dans le


délai d’1 mois. Il s’agit de toutes les actions récursoires
que l’on est amené à mettre en œuvre à l’occasion d’une
action principale née du contrat de transport. Ce délai d’1
mois est obligatoire et est de rigueur. On est très strict, si
l’expéditeur a assigné le transporteur et le
commissionnaire en même temps, cela ne suffit pas, il
faut que le commissionnaire assigne en garantie le
transporteur. A défaut, ce sera un jugement commun et
non un jugement avec substitution de garantie. Le
jugement commun signifie que toutes les parties sont
tenues et que l’on va se diriger vers la plus solvable pour
l’exécution (en principe le commissionnaire, il paiera tout
et ne pourra récupérer auprès du transporteur). Sur la
garantie, le transporteur pourra être condamné mais
aussi le commissionnaire s’il a commis des fautes
distinctes, le commissionnaire peut payer le tout mais
dans cette hypothèse, il peut se faire rembourser en
partie par le transporteur.

1) Les conditions d’application

Il faut que l’action principale soit fondée sur un contrat de


transport. Ainsi, si l’expéditeur est le vendeur et le
destinataire l’acheteur, si la personne agit en tant
qu’expéditeur qui ne s’est pas fait payer le prix du
transport, ce sera du transport mais si l’action vise à se
faire payer le prix de la marchandise, ce ne sera pas du
transporteur mais de la vente, aucun appel en garantie ne
sera alors possible.

L’action en garantie doit aussi reposer sur un contrat de


transport ou de commission de transport Peuvent être
appelés en garantie un transporteur, commissionnaire ou
transitaire mais pas un garde meuble ou un garagiste
ayant intervenu sur le véhicule.
Il faut qu’il s’agisse véritablement d’une action en
garantie, ce ne peut être une action contre l’assureur car
alors il s’agit d’une subrogation et non d’une garantie.
Pour la Cour de cassation, le délai d’1 mois ne vise que les
actions incidentes i.e. celles qui se greffent sur la
demande principale.

2) La computation du délai

Le délai d’1 mois court à compter du jour où l’action


principale est intentée contre le garanti et plus
précisément le délai court à compter de la signification de
l’assignation.
Il ne faut pas confondre la date de l’assignation et la date
de la signification, c’est toujours la date de la signification
qui est prise en compte.

Le délai d’1 mois ne peut être interrompu (délai préfix), la


Cour de cassation a estimé que le fait que l’on ait appelé
en garantie un deuxième commissionnaire et qu’on l’ait
fait dans le délai n’a pas interrompu ce délai de telle sorte
que le troisième appel en garantie doit être déclaré
irrecevable. Dans cette espèce un expéditeur agit contre
un destinataire, le destinataire a 1 mois pour appeler en
garantie, il a appelé en garantie le transporteur, dans le
délai d’1 mois, le transporteur a appelé en garantie un
commissionnaire et au-delà du délai d’1 mois un second
commissionnaire en garantie. Le premier appel en
garantie n’interrompt pas le délai.

Rien ne pouvant l’affecter, ce délai va s’ajouter au délai


d’1 an, il n’est pas compris dans le délai d’1 an mais cela
ne signifie pas que les demandes qui n’ont pas été
formulées dans le délai d’1 mois puissent encore l’être
dans le délai d’1 an. Par conséquent, si l’on s’est trompé
de juge et que l’adversaire soulève l’incompétence
territoriale du juge saisi et que le tribunal n’utilise pas la
passerelle (i.e. ne transfert pas le dossier au juge
normalement compétent), dans ce cas, le défendeur
devra être réassigné devant le bon juge et le délai d’1
mois n’a plus à être respecté.

ex: je devais assigner à Lille, j’ai assigné à Arras, l’appel en


garantie avait été fait dans le délai d’1 mois, le juge
d’Arras se déclare incompétent et ne transfère par le
dossier à Lille car il ne peut transférer d’office (il faut lui
demander), le demandeur est obligé de réassigner à Lille
mais il n’a pas à appeler en garantie car il l’a fait dans le
délai d’1 mois.

Le délai va expirer 1 mois jour pour jour et aucun report


n’est admis. Ainsi, si la personne a changé d’adresse, le
délai n’est pas étendu jusqu’à ce qu’elle soit retrouvée, ce
qui compte est que l’on ait essayé de la joindre dans le
délai. Le seul cas de report est lorsque le dernier jour est
un samedi, un dimanche, un jour férié ou un jour chômé.

La prescription étant d’intérêt privé, c’est celui qui s’en


prévaut qui doit l’invoquer, elle ne peut être relevée
d’office par le juge, elle peut être invoquée pour la
première fois en appel mais pas en cassation, il est
possible d’y renoncer.
3) Les effets de l’action en garantie

L’action en garantie est complètement distincte de la


demande principale, elle ne crée de lien d’instance
qu’entre le garanti et l’appelant, elle ne crée aucun lien
entre le garanti et le demandeur principal et donc elle ne
sera exécutée que si le demandeur principal exécute
contre le garanti. En fait, toutes ces actions en garantie
sont relativement rares en droit des transports puisque
lorsque la responsabilité est établie, les actions ne sont
pas engagées, on préfère avoir un geste commercial
quand la somme n’est pas élevée, sinon la compagnie
d’assurance interviendra.

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