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LIVRET THEORIQUE
Inégalités de genre et
mécanismes sous-jacents

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Sommaire du livret
Introduction : L’égalité femmes-hommes : oui mais pourquoi ?

A. Etat des lieux des inégalités en France

1. Inégalités dans la société

a. Au travail et face à la précarité


b. Dans le sport et la culure
c. Accès à la parole
d. Accès aux responsabilités
e. Violences de genre
f. Répartition des tâches domestiques

2. Inégalités dans l’enseignement supérieur et la recherche

3. Inégalités dans les associations

B. Mécanismes sous-jacents aux inégalités

1. La valence différentielle des sexes

2. Les stéréotypes de genre

3. La construction de soi

3. Le cercle vicieux «stéréotype - discrimination - inégalité»

5. Notions utiles de psychologie sociale


a. Le sentiment d’efficacité personnelle
b. Effet pygmalion
c. Menace du stéréotype

6. La culture du viol
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l’égalité femmes
INTRODUCTION :

L’égalité femmes-hommes : oui mais pourquoi ?


Les pages qui suivent s’attachent à dresser un constat sur certaines inégalités entre
hommes et femmes qui sont toujours aujourd’hui d’actualité puis à tenter d’expliquer les
mécanismes qui font perdurer ces dernières, alors qu’en théorie, hommes et femmes ont
les mêmes droits.
Toutefois, avant de lire ces différentes parties, il est nécessaire de se poser la question à
soi-même des raisons que nous voyons à atteindre l’égalité femmes-hommes. Puisqu’on
en parle beaucoup de l’égalité des genres, mais bon est-ce bien un combat utile et qui
nous concerne ?
Oui. Oui car nous avons tous à gagner de vivre dans une société plus égalitaire. Le
premier enjeu de cet égalité est un enjeu éthique : pourquoi trouverions-nous ça normal
d’être limité.e dans ses choix en fonction de son sexe (cela fonctionnant évidemment que
l’on soit homme ou femme) ?
Lutter pour l’égalité femmes-hommes, ce n’est pas une lutte de femmes pour les
femmes. C’est la lutte que devrait mener chacun et chacune pour toutes et pour tous, puisque
l’égalité des sexes libèrera un peu plus les uns et les autres des contraintes qui lui pèsent sur
le dos, des normes qui l’enferment dans un rôle prédéfini et le marginalisent s’il s’en écarte.
Lutter contre le sexisme, c’est aussi le levier le plus efficace pour prévenir les violences
de genre : violences faites aux femmes, violences conjugales, violences homophobes…
Promouvoir l’égalité femmes-hommes, c’est aussi militer efficacement pour la mobilité
sociale, puisque l’on va voir que les personnes de classes populaires sont plus victimes des
inégalités que leurs pairs de classe favorisée. Permettre à chacun de se réaliser comme il
le souhaite, au plus profond de lui, avec une influence moindre du conditionnement, c’est
aussi permettre à la société de bénéficier du talent et des compétences du plus grand
nombre. Autrement dit, une multitude d’enjeux : éthique, sanitaire, social, économique, etc.
Bien sûr, des progrès ont été faits. Il ne faut pas le nier mais justement se le remémorer,
puisque tous ces droits gagnés pour les femmes et pour les hommes sont bien le fruit d’une
lutte de longue haleine. Ces victoires ne sont pas le fruit du hasard et celles-ci ont fait face,
à leur époque, à de très nombreuses résistances.

Hommes et femmes ont désormais, en France, les mêmes droits. Pourtant, les progrès
en termes de parité, d’accès aux responsabilités, d’orientation... ne sont pas rapides, car
les stéréotypes de genre, eux, sont bien ancrés. Notre action doit donc, désormais, viser
à déconstruire tous ces stéréotypes en faisant évoluer les mentalités, les habitudes, les
comportements. A moyen et long termes, tout le monde y gagnera mais rien ne se fera dans
un passéisme bienheureux. Au-delà des actions spécifiques (journées de sensibilisation,
de débats…), l’enjeu est bien d’amener chacun à prendre conscience des faits sous-
jacents et à les prendre en compte dans notre prisme de lecture de l’autre et dans notre
relation à nous-même et aux autres.

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A. ETAT DES LIEUX DES INEGALITES EN FRANCE
Ce livret a pour objectif de dresser un constat des inégalités entre les hommes et les
femmes qui persistent aujourd’hui, afin de démontrer que la lutte pour l’égalité des genres n’est
pas un combat vain ni un combat du passé et que, bien que des progrès soient visibles, celui-ci
est toujours autant d’actualité. Ainsi, alors que les femmes ont les mêmes droits, en théorie, que
les hommes, grâce à de nombreuses années de lutte, les inégalités demeurent. Celles-ci ne sont
pas forcément visibles au premier regard, mais lorsque l’on s’interroge, lorsque l’on étudie les
statistiques, lorsque l’on analyse notre société, elles apparaissent rapidement.

Certaines inégalités sont matérielles: les femmes accèdent moins à des postes à haute
responsabilité, sont en moyenne moins payées que les hommes pour un même poste comparable
et consacrent toujours plus de temps aux tâches ménagères que les hommes. Un autre type
d’inégalités réside dans l’exposition des femmes au risque de harcèlement et violences sexuelles.
Tous les 3 jours, une femme meurt sous les coups de son conjoint. 84 000 femmes ont été victimes
de viol ou de tentative de viol en France en 2015, etc.

1. Inégalités dans la société


a. Sur le marché du travail
Aujourd’hui encore, les femmes sont victimes de discriminations et d’inégalités dans le
monde professionnel.
Ainsi, elles sont notamment moins payées que les hommes pour le même travail et
elles sont plus exposées à la précarité et au chômage. En 2012, le salaire horaire net des
femmes était inférieur de 16,3% en moyenne à celui des hommes, illustrant à la fois des écarts
de salaire au sein de chaque famille professionnelle mais aussi d’importantes différences de salaire
entre métiers. Les inégalités de salaire croissent avec le niveau de qualification. Ainsi, les
femmes cadres dirigeantes sont payées 32% de moins que les hommes – en équivalent temps-
plein. Cette différence de salaire a plusieurs caractéristiques :
- ¾ de l’inégalité salariale correspondent aux écarts salariaux intraprofessionnels, c’est-à-
dire aux écarts constatés pour le même métier ;
- l’écart est aussi expliqué par le fait que les femmes sont davantage employées dans des
métiers moins rémunérateurs (écarts interprofessionnels).

D’autre part, les secteurs professionnels sont en réalité très peu mixtes : seuls 17% des
métiers sont considérés mixtes, c’est-à-dire qu’ils concentrent entre 40% et 60% des deux sexes
qui l’exercent. Les autres métiers - la grande majorité - correspondent donc à des métiers « genrés
». Ainsi, 12 familles professionnelles concentrent plus de 50% des femmes actives (aides
à domicile, infirmières, assistantes maternelles…) et 20 familles professionnelles concentrent
plus de 50% des hommes actifs (conducteurs, ouvriers du bâtiment…). On constate ainsi une
activité dans des domaines différenciés : les femmes occupent majoraitairement le domaine du
«care» (soins à la personne) lorsque les hommes occupent principalement des métiers associés à

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la force et la technique : construction, industrie1... Les femmes sont aussi sous-représentées dans
les métiers dits d’excellence, tels que chef cuisinier, chefs d’orchestre… Il est aussi essentiel
de comprendre que ces inégalités pénalisent différemment les personnes du même genre,
en fonction de leur catégorie socio-professionnelle et leurs qualifications. Ainsi, le choix du
métier sépare précocement 20 % des garçons et des filles, surtout pour des jeunes de milieu
populaire, du fait d’une surreprésentation des enfants d’ouvriers et d’employés dans l’enseignement
professionnel.

Les femmes sont aussi plus exposées que les hommes à la précarité et à la pauvreté.
Leur taux d’emploi (pour les 20 à 64 ans) est de 65,6% alors que celui des hommes est de 73,7%. Un
peu plus de huit salariés à temps partiel sur dix sont des femmes, correspondant à 1 femme
sur 3 qui travaille à temps partiel. Sept femmes sur dix ont connu au moins une interruption de
carrière depuis leur premier emploi, contre un peu plus d’un homme sur deux, avec en deuxième
motif de cette interruption (après le chômage) le fait de devoir s’occuper des enfants, alors que
celui-ci représente 2 % des interruptions de carrière chez les hommes.
Les femmes sont aussi plus touchées par la pauvreté, notamment les mères seules.
Ainsi, 14,3% des femmes vivent sous le seuil de pauvreté, contre 13,4% d’hommes et 1/3 des
familles monoparentale est pauvre, dont 81,5% sont des femmes seules.
Enfin, la retraite des femmes est à l’image de ces inégalités au cours de l’activité : la retraite
des femmes représente 72% de celle des hommes. Les causes de ces inégalités sont plurielles
mais reposent en grande partie sur le fait que la «charge» des enfants repose en grande partie
sur les femmes.


b. Sport et culture
Des inégalités subsistent aussi dans le domaine des loisirs. Ainsi, les femmes représentaient
en 2013, 36,8% des licenciés des fédérations de sport (chiffre qui progresse), avec 6 fédérations
qui accueillent plus de 80% de femmes (fédération d’équitation…). A l’inverse, 6 fédérations ont
plus de 95% de licenciés hommes, notamment celles de football et de rugby.
Dans le domaine de la création artistique, les femmes représentent 25% des metteurs en
scène, 4% des chefs d’orchestre et 1% des compositrices !
Le monde du cinéma et des dessins-animés est un grand pourvoyeur de stéréotypes de
1 http://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/cgsp_stereotypes_filles_garcons_web.pdf

5
genre et de clichés, notamment les films hollywoodiens et laisse peu de places aux femmes comme
actrices principales, réalisatrices... Que ce soit concernant la répartition du temps de parole,
l’attribution des rôles, la position sur les affiches…, les exemples sont nombreux. Un Tumblr
dénonce d’ailleurs le phénomène fréquent qui tend à « couper la tête aux femmes » sur les
affiches de film : « The Headless women of Hollywood », mettant en avant la « chosification
» (fréquente) des femmes dans les communications.

D’autre part, des études montrent que les femmes parlent moins à l’écran, même
lorsqu’elles sont les héroïnes (étude réaliséée2 sur les dessins-animés Disney par exemple). On
constate aussi que les femmes sont sous-représentées parmi les réalisateurs, dessinateurs de
BD mais surtout qu’elles sont moins médiatisées et moins connues. C’est pour cette raison qu’au
cours de plusieurs des derniers grands festivals de cinéma ou de BD, les réalisatrices, actrices,
dessinatrices… ont vivement critiqué le manque voire l’absence de femmes parmi les personnes
sélectionnées pour les prix.
Toutes ces inégalités sont extrêmement importantes puisqu’elles alimentent les stéréotypes
de genre (cf infra) et normalisent des comportements et attitudes sexistes. Il faut bien comprendre que
lorsque ces femmes regrettent le manque de sélection de femmes dans le cadre de la compétition,
il ne s’agit pas de se dire qu’on va nominer des femmes pour nominer des femmes, quitte à ce
qu’elles soient moins compétentes, mais bien de comprendre que de manière inconsciente, nous
remarquons moins et nous nous arrêtons moins sur les créations des femmes et nous encourageons
moins les femmes à exercer ce type de métier.

c. Accès à la parole
Les femmes sont aussi moins nombreuses à investir l’espace public, à être médiatisées
et à accéder à la parole dans l’espace public. Ainsi, elles ne représentent que 20% des
experts interrogés par les émissions généralistes de télévision et 17% des personnalités
invitées par les radios généralistes. Lorsqu’une femme parle à la radio, la télévision, c’est plus
souvent (statistiquement) à titre de témoin qu’à titre d’experte, dans le registre émotionnel plutôt
qu’intellecutel. D’ailleurs, pour augmenter la visibiltié des femmes expertes dans leur domaine,
2 https://www.washingtonpost.com/news/wonk/wp/2016/01/25/researchers-have-discovered-a-major-pro-
blem-with-the-little-mermaid-and-other-disney-movies/

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plusieurs d’entre-elles ont créé une association «Les expertes»3, qui offre un annuaire d’une
multitude d’expertes qui peuvent être sollicitées pour intervenir auprès des médias, au cours de
conférences, etc. Les grandes scientifiques, expertes renommées... sont elles aussi moins
nombreuses mais surtout moins connues. Le nombre de femmes ayant obtenu un prix Nobel
par exemple est nettement moins élevé que le nombre d’hommes à en avoir obtenu un.

d. Accès aux responsabilités


Le concept du plafond de verre illustre les obstacles visibles et invisibles à l’accès des
femmes aux responsabilités alors que l’on constate toujours que les femmes ont moins accès
que les hommes aux responsabilités, que l’on se place dans le domaine professionnel, le
domaine associatif, politique, artistique, etc.

Ainsi, en 2013, les femmes représentaient 14 % des chefs d’entreprise5. D’autre part,
les femmes sont moins nombreuses dans le domaine de la création d’entreprises : elles ne
représentaient ainsi que 28% des chefs d’entreprise ayant créé leur propre entreprise en 2010. Dans
3 http://expertes.eu/
4 crédit image : site «RSE news : portail dédié à la responsabilité sociale et environnementalre de l’entreprise»
5 https://www.kpmg.com/FR/fr/IssuesAndInsights/ArticlesPublications/Documents/Etude-femmes-dirigeantes-
en-France-062015.pdf

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la fonction publique d’état, alors que les femmes représentent 61% de l’ensemble des personnels
de la catégorie A (enseignants...), les femmes n’occupent plus que 30% des emplois à la décision
du gouvernement, tels que préfet ou recteur d’académie6. Autre exemple : en 2015, aucune
femme n’était présidente-directrice générale d’une entreprise française côtée en bourse.
Les assemblées politiques sont, elles aussi, encore principalement masculines.
L’Assemblée Nationale compte 26,9% de femmes députées et le Sénat 25% de sénatrices.
Le Parlement européen est «meilleur» puisque 44,4% des eurodéputés sont des femmes. D’autre
part, seules 7,7% des présidents de conseils régionaux sont des femmes, comme 16% des maires.
On constate aussi qu’au CESE (Conseil Economique, Social et Environnemental), qui a introduit
une contrainte paritaire en 2010, même si la proportion de femmes a progressé, celles-ci restent
minoritaires à exercer la présidence de groupes (elles sont 3 contre 15 hommes).

e. Violences du genre
Encore aujourd’hui, les femmes sont les principales victimes d’agressions sexuelles,
statistiquement, même si elles ne sont pas les seules victimes. Selon les données de la Banque
Mondiale, une femme entre 15 et 44 ans a plus de risque d’être victime de viol ou de violence
conjugale que d’avoir un cancer, un accident de la route, de vivre une guerre ou de contracter
le paludisme réunis7. Lorsque l’on sait que dans les pays occidentaux, une femme sur 3 meurt
d’un cancer et que le paludisme est une des premières causes de mortalité en Afrique, cela force
la réflexion. Rappelons qu’en France, une femme décède tous les 2,8 jours, victime de son
conjoint. D’autre part, en 2015, 84 000 femmes se sont déclarées victimes ou tentative de viol sur
une année, ainsi que 16 000 hommes. Selon une enquête de l’IFOP et du Défenseur des Droits,
une femme active sur 5 entre 18 et 64 ans a été personnellement confrontée au harcèlement
sexuel dans sa vie professionnelle.

f. Tâches domestiques
Contrairement à ce que l’on pourrait de manière instinctive au vu des progrès réalisés ces
dernières années, les femmes assument toujours la majorité des tâches ménagères et de
gestion des enfants. Si le temps hebodomadaire dédié aux tâches ménagère a diminué, c’est bien
plus du fait de l’automisation de nombreuses tâches et la mise sur le marché d’objets ménagers
plus rapides que de l’augmentation du nombre d’heures réalisé par les hommes. Les femmes qui
6 Chiffres clés de la partité - 2016 Ministère des famlilles, de l’enfance et des droits de la femme
7 http://www.un.org/fr/women/endviolence/situation.shtml

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travaillent subissent autant ce déséqulibre que les femmes au foyer, réalité de laquelle découle le
concept de «double journée de la femme», sous entendue comme la double journée de travail.
Dans son enquête emploi du temps 2009-2010 de l’INSEE montre que les femmes consacrent
en moyenne 3h26 par jour au temps domestique (2h35 de ménage et cuisine et 36 minutes de
soins aux enfants et adultes) alors que les hommes y consacrent en moyenne 2heures (1h08 de
ménage et cuisine et 18 minutes de soins). En onze ans, le temps moyen journalier consacré aux
tâches domestiques par les femmes a diminué de 22 minutes alors que celui des hommes a
augmenté d’une minute.
Cette inégalité se met d’ailleurs en place très tôt puisqu’on l’a détecte déjà parmi les
étudiant.e.s. Ainsi, les étudiantes en couple consacrent plus de temps aux tâches domestiques et
culinaires, dans une proportion qui augmente avec l’âge8.

2. Inégalités dans l’enseignement supérieur et la recherche


La mixité progresse lentement (mais progresse) dans l’enseignement supérieur même si
de grandes disparités existent encore, notamment en fonction des filières. Il y avait 55,4% des
femmes dans le supérieur en 2012, représentant 84% des étudiants dans les écoles de
formations sanitaires et sociales contre 27% des étudiants ingénieurs9.

Tout d’abord, la répartition des genres est inégale en focntion des établissements d’enseignement
supérieur. Ainsi, les femmes sont majoraitaires à l’université (52% des effectifs) alors qu’elles ne
représentent que 28% des étudiant.e.s en école d’ingénieurs.

A l’Université, alors que les filles sont majoritaires en licence et master, elles sont bien moins
nombreuses en doctorat. Il esxiste aussi de fortes disparités parmi les enseignants et au niveau de
la présidence.

8 Filles et garçons : des façons diverses d’étudier, de travailler, de se distraire. - OVE infos 8/3/06
9 http://cache.media.enseignementsup-recherche.gouv.fr/file/Charte_egalite_femmes_hommes/90/6/Chiffres_
parite_couv_vdef_239906.pdf

9
Ensuite, la répartition des femmes et des hommes au sein des filiières est elle-aussi inégale.

Il est d’ailleurs intéressant de noter que les filiières les plus «féminines» sont aussi celles qui
statistiquement ont un taux d’insertion professionnelle moins important. Cette rapide présentation
n’est pas exhaustive et nombreuses sont les différences et inégalités entre hommes et femmes au
sein de l’enseignement supérieur.

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3. Inégalités dans les associations étudiantes
On constate dans les associations étudiantes beaucoup des inégalités décrites en
1. - puisqu’elles ne sont pas coupées de la société - et des inégalités qui leur sont plus
spécifiques, en raison de leur environnement d’ancrage (établissements du supérieur et
inégalités dans l’orientation par exemple).

Le concept du plafond de verre, notamment, est aussi vérifiable dans les associations
étudiantes. On constate en effet que plus l’on monte vers un niveau élevé de responsabilités,
plus les femmes sont rares10. Alors que les femmes représentent plus de la moitié des bénévoles
associatifs, tous postes confondus, celles-ci sont bien moins nombreuses à occuper des postes à
responsabilité, notamment de présidence.
On constate aussi une répartition plus ou moins stéréotypée des hommes et des
femmes aux différents postes de bureau d’association et sur les différentes thématiques.
Ainsi, aux hommes les postes à responsabilités et plus tournés vers l’extérieur (postes politiques,
tournés vers l’extérieur, postes à responsabilités...) et aux femmes les postes de gestion interne ou
portés sur la prévention, la citoyenneté, le social et l’environnement (secrétaire, chargée de mission
prévention…).
Ensuite, on constate, dans le cas d’une fédération, la même tendance à la diminution
du nombre de femmes plus l’échelle d’action de la structure est grande. On constate enfin
des inégalités dans l’accès à la parole, au sein des assemblées générales et conseils
d’administration.
Ainsi, les associations étudiantes ne sont pas exemptes d’inégalités en leur sein, à la fois
puisqu’elles reproduisent celles de la société en général mais aussi parce qu’elles trouvent leur
origine dans un milieu aux inégalités plus spécifiques, celui de l’enseignement supérieur.

Après avoir dressé un constat des inégalités qui subsistent dans notre société, dans ses
différentes sphères et sous différents aspects, on ne peut que se demander quels mécanismes
expliquent leur perpétuation. La seconde partie de ce livret s’attache donc à présenter ces différents
mécanismes.

10 «Les femmes et le pouvoir dans les associations étudiantes» - Animafac - 2013

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B. MECANISMES SOUS-JACENTS AUX INEGALITES
Avertissement : tous les concepts présentés ci-dessous sont des concepts généraux qui tentent
d’expliquer les tendances statistiques que l’on a montrées plus haut. La réalité est toujours bien plus
complexe et diversifiée que la statistique donc la réalité mais celle-ci ne peut être réduite à ce que décrivent
ces concepts.

ZOOM SUR :
Le genre : quelle différence avec le sexe?

• Le sexe d’une personne correspond à son identité


biologique et anatomique. En règle générale, il est aisément
identifiable dès la naissance.

• Le genre correspond lui au sexe ressenti d’une personne,


à la façon dont elle se comporte en se considérant
comme «femme» ou «homme», dans une société donnée.
Le genre est donc une construction sociale. Ce n’est donc
pas une donnée naturelle mais une donnée culturelle.

1. La valence différentielle des sexes


Françoise Héritier, anthropologue et ethnologue française de renom, considérée par Lévi-
Strauss lui-même comme sa successeure, a beaucoup étudié le genre et les rapports hommes-
femmes en observant plusieurs cultures. Françoise Héritier constate que la distinction entre
féminin et masculin est universelle et que «partout, de tout temps et en tout lieu, le masculin
est considéré comme supérieur au féminin» : c’est la «valence différentielle des sexes». Elle
observe notamment la pratique d’utiliser des femmes comme monnaie d’échange dans des
groupes très différents et jamais l’inverse, ni des groupes mixtes échanger des groupes mixtes.
Cela lui fait dire que cette pratique existait déjà certainement depuis le Paléolithique11.

Selon Françoise Héritier, l’observation du monde incluant les différences anatomiques et


physiologiques conduit à une classification binaire. D’après elle, la pensée humaine s’est organisée
à partir de cette constatation : «Il existe de l’identique et du différent. Toutes les choses vont
ensuite être analysées et classées entre ces deux rubriques (…). Dans toutes les langues il
y a des catégories binaires, qui opposent le chaud et le froid, le sec et l’humide, le dur et le
mou, le haut et le bas, l’actif et le passif, le sain et le malsain…»12. Elle constate que dans toutes
les langues, ces catégories binaires sont associées au masculin ou au féminin et celles-ci
sont toujours culturellement hiérarchisées : «L’observation ethnologique nous montre que le
positif est toujours du côté du masculin, et le négatif du côté du féminin. Cela ne dépend pas
11 «La plus belle histoire des femmes», Françoise Héritier, Edition Seuil
12 opus cité

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de la catégorie elle-même : les mêmes qualités ne sont pas valorisées de la même manière
sous toutes les latitudes. Non, cela dépend de son affectation au sexe masculin ou au sexe
féminin. (…) Par exemple, chez nous, en Occident, «actif» (…) est valorisé, et donc associé
au masculin, alors que «passif», moins apprécié, est associé au féminin. En Inde, c’est le
contraire: la passivité est le signe de la sérénité (…). La passivité ici est masculine et elle
est valorisée, l’activité – vue comme toujours un peu désordonnée – est féminine et elle est
dévalorisée.»13

Ainsi, ces valeurs catégorisées ne sont donc pas par essence positives ou négatives
mais cela dépend de l’époque et de la région du groupe. Néanmoins, de manière universelle,
les catégories sont rattachées au masculin lorsqu’elles sont connotées positivement et
rattachées au féminin lorsqu’elles sont connotées négativement. C’est ce que Françoise
Héritier appelle la valence différentielle des sexes.

2. Les stéréotypes de genre


Les trois quarts des personnes (femmes comme hommes) interrogées au cours de
l’étude « Egalité hommes-femmes et lutte contre les stéréotypes» du Laboratoire de l’Egalité14
pensent qu’il existe des caractéristiques typiquement féminines et d’autres typiquement
masculines, principalement expliquées [...] par la nature”. De plus, l’édition 2015 des chiffres
clés de la parité du Gouvernement montrent que 17% des personnes interrogées feraient moins
confiance à un homme qu’à une femme pour s’occuper des enfants dans une crèche (avec
respectivement 11% pour les femmes et 24% pour les hommes). Cette statistique illustre facilement
ce qu’est un stéréotype de genre.
Un stéréotype est une représentation schématique, globalisante, de l’ordre de
la croyance, figée et largement partagée, un «cliché». Les stéréotypes existent pour toutes
les «caractéristiques» des personnes : genre, pays d’origine, religion, couleur de peau... A titre
d’exemple, on peut citer une expérience réalisée aux Etats-Unis15 qui a testé la réaction des
passant.e.s face à un homme blanc puis un homme noir ostensiblement en train de tenter de voler
un vélo. Alors que les passants regardent surpris le premier, le questionnent pour lui demander
s’il a oublié ses clés, il ne s’écoule que quelques minutes pour que plusieurs personnes appellent
la police face à l’homme noir. Ces personnes ne sont pas forcément racistes, en tout cas pas de
13 idem
14 http://www.laboratoiredelegalite.org/wp-content/uploads/2016/05/Enqu%C3%AAte-Mediaprism-Labora-
toire-de-l%C3%A9galit%C3%A9-St%C3%A9r%C3%A9otypes-Novembre-2012.pdf
15 https://www.youtube.com/watch?v=_DHToEHkIUE

13
manière revendiquée. Elles sont convaincues que, pour elles, la couleur de peau de l’homme n’avait
rien à voir avec leur réaction. Mais elles ont intégré des stéréotypes racistes qui imprègnent notre
culture, qui sont véhiculés tout autant dans les films que par les politiques et les personnes que
nous rencontrons. Ces stéréotypes ont alors influé leur perception de la situation et leur réaction.
Le même mécanisme fonctionne pour le genre. Les stéréotypes de genre sont des
croyances sur ce que sont les femmes et les hommes, en tant que conséquence «naturelle»
ou biologique de leur sexe. Ce qui rend l’identification de leur imprégnation en chacun.e de nous
difficile est leur caractère plus ou moins inconscient. Ainsi, même si l’on ne considère pas que les
hommes sont plus courageux que les femmes et les femmes plus sensibles que les hommes, peut-
être qu’on le pense, inconsciemment, mécanisme bien illustré par une autre donnée intéressant
de l’étude du Laboratoire de l’égalité sus-citée : alors que 64% des personnes reconnaissent
véhiculer malgré eux des stéréotypes de genre, 95 % des personnes interrogées ont
l’impression que les autres le font davantage. Toutes ces représentations stéréotypées
conditionnent donc notre façon de percevoir, d’analyser le comportement des autres et le
notre tout comme notre façon de nous comporter avec les autres.

Quelques exemples de stéréotypes de genre :

c. La construction de soi

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ZOOM SUR :
La répartition de l’espace entre hommes et femmes

«Aux hommes l’extérieur, aux femmes l’intérieur»

Tous ces stéréotypes, dans notre société, s’organisent à partir de


stéréotypes très prégnants et extrêmement ancrés, relatifs notamment
aux espaces dédiés aux femmes et aux hommes. Ceux-ci sont
diffusés auprès des plus jeunes au moyen des livres pour enfants, des
émissions de télévision, des jouets, etc. Ainsi, on attribue l’occupation
de l’extérieur, de l’espace public...aux hommes et l’occupation de
l’espace intérieur, l’espace privé, la maison...aux femmes. Le meilleur
exemple en matière de livres pour enfants est celui des contes pour
enfants dans lesquels on croise très souvent une princesse, passive,
enfermée dans une tour, qui attend d’être délivrée par un prince, venu de
l’extérieur, qui est actif pour la délivrer.

De cette répartition binaire de l’espace découlent nombre de


représentations et inégalités toujours d’actualité : la gestion de la
maison est considérée comme une tâche féminine alors que la rue
est plutôt considérée comme un espace masculin, ce mêmes rues
desquelles on a peur lorsqu’une femme s’y promène seule la nuit.
Cette catégorisation explique aussi que l’accès à la parole dans
l’espace public soit inégal entre hommes et femmes.

15
3. La construction de soi
Bien que de nombreuses personnes pensent que les différences de genre sont le
fruit d’une différence naturelle, il a été prouvé que cette assertion est fausse16. En effet, le
cerveau des filles et des garçons n’est pas différent à la naissance et nous ne sommes pas
prédisposés en raison de notre sexe à avoir tel ou tel caractère, tel ou tel comportement.

A la naissance, seuls 10% des neurones de l’enfant sont connectés entre-eux et les
90% restants se connectent au gré des interactions du nouveau-né avec l’environnement,
c’est ce que l’on appelle la plasticité cérébrale. Ainsi, les réseaux de neurones se font et se
défont en fonction des interactions, conscientes et inconscientes, verbales et non-verbales, des
apprentissages, des expériences, des modèles rencontrés... Ce sont ces multiples connexions qui
déterminent ensuite le comportement, les ressentis, etc de la personne, en un mot, son identité. La
construction de l’identité est donc une construction sociale, basée sur la rencontre d’un génome
unique - qu’on ne peut pas réduire au sexe - et de l’environnement de l’enfant. Le sexe biologique
n’a de conséquence que sur les caractéristiques sexuelles des enfants (sexe génital, taille…) mais
n’a pas de conséquence en soi sur leur cerveau (comportements, capacités cognitives, etc). Ainsi,
si tant est qu’il existe des différences statistiquement tangibles entre hommes et femmes
dans le domaine du comportement et du caractère, celles-ci ne sont pas le fruit de leur
différence de sexe en tant que telle, comme conséquence biologique, mais sont le fruit d’une
construction différente, conditionnée par des attentes différentes de leur environnement.
De nombreuses études montrent bien ce comportement différencié et ces attentes
différentes des parents avec leur enfant en fonction de son sexe17. Ainsi, Françoise Héritier
a réalisé une expérience dans laquelle on demande à des parents de décrire les émotions d’un
nourrisson qui pleure sur une photo. Il n’est pas possible de distinguer le sexe de l’enfant à cet âge.
Aux parents auxquels on dit que ce bébé est un petit garçon, la majorité analyse ses pleurs
comme la marque d’un sentiment de colère. A l’inverse, les parents auxquels on a dit que ce
bébé était une petite fille analysent ses pleurs comme la marque de l’angoisse, de la crainte.
On voit alors très bien que l’information sur le sexe de l’enfant donnée aux parents conditionne
leur analyse du comportement de l’enfant. On est dans le domaine de l’attente : les parents ayant
intégré, plus ou moins consciemment, que les petites filles sont « censées » être plus craintives et
les petits garçons sont « censés » être plus colériques, ils s’attendent à ce que ces assertions se
vérifient. Une fois dans la situation, ils confirment cette attente « j’analyse le comportement de la
petite fille comme craintif », non pas parce que c’est vrai (on ne sait pas quelle situation est vraie
dans le cas du bébé mais une des deux est forcément fausse, si ce n’est les deux), mais parce
que leur analyse est influencée par cette attente. Ces attentes différenciées sont extrêmement
prégnantes, notamment chez les plus petits. La construction sociale de l’identité des filles et des
garçons commence donc dès les premiers jours dans ces conditions

Comme le disait Simone de Beauvoir, “On ne naît pas femme, on le devient.” C’est cette
construction cérébrale qui est à l’origine de l’identité et du comportement, indépendamment du
16 http://www.laboratoiredelegalite.org/wp-content/uploads/2016/04/Les-st%C3%A9r%C3%A9otypes-cest-
pas-moi-cest-les-autres-Laboratoire-de-l%C3%A9galit%C3%A9-nov-2013.pdf
17 http://www.psychologie-sociale.com/index.php?option=com_content&task=view&id=101&Itemid=44&li-
mit=1&limitstart=1

16
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Kit de promotion-hdommes
l’égalité femmes
sexe biologique. Ainsi, le « genre » de notre personnalité est bien acquis et non déterminé par
notre sexe biologique et ce sont les stéréotypes de genre qui sont à l’œuvre derrière ces
attentes différentes qu’a l’environnement vis-à-vis de l’enfant.

4. Le cercle vicieux « stéréotype – discrimination – inégalité »


Ce qui rend les stéréotypes de genre extrêmement important, c’est leur capacité à
alimenter un cercle vicieux qui participe à faire perdurer les inégalités femmes-hommes
aujourd’hui. En effet, les stéréotypes outillent les discriminations et, d’autre part, ils légitiment
les inégalités.

Prenons un exemple, celui de la prise de parole dans les médias. Comme vu précédemment,
les hommes sont bien plus visibles et écoutés dans les médias que les femmes. De plus, des
observations de classe ont montré que les professeurs interagissent naturellement plus avec
les garçons qu’avec les filles, de manière inconsciente et involontaire. La conséquence de
cela : tout le monde s’habitue à entendre et voir plus d’hommes prendre la parole dans l’espace
public (assemblées, réunions, médias…) et en « déduit » une représentation, un stéréotype de
genre « Aux hommes l’espace public, aux femmes l’espace privé » (on s’intéressera d’ailleurs
à la représentation très diffusée dans les contes pour enfants du prince qui vit de nombreuses
aventures à l’extérieur alors que la princesse attend passivement dans sa tour). Cela conduit au
développement, chez les femmes, de réflexes inconscients d’autocensure. Celles-ci prennent ainsi
moins la parole, de peur de se sentir moins légitimes à le faire que les hommes, puisqu’elles
perçoivent que ce sont eux qui s’expriment le plus. On tombe alors dans le cercle vicieux : si
on leur demande de prendre la parole, puisqu’elles la prennent statistiquement moins, soit elles
refusent plus que les hommes, soit lorsqu’elles le font, on ressent plus qu’elles sont mal à l’aise,
puisqu’elles doutent de leur légitimité et qu’elles sont moins entraînées. On analyse alors le fait
qu’elles soient moins à l’aise comme étant la « preuve » qu’elles ne sont pas destinées à ce
type d‘exercice (le stéréotype), ce qui légitime de faire moins souvent appel à elles lorsque
l’on programme des interventions (la discrimination), expliquant que les femmes soient moins
souvent entendues dans les médias (l’inégalité).

Tous ces stéréotypes, en attribuant des rôles prédéfinis à chaque genre, nous enferment
tous et nous limitent dans nos possibilités. Quid d’une femme qui aime le pouvoir? Quid d’un

17
homme qui veut être puériculteur ? Quel «accueil» la société leur réserve-t-elle ? Le plus souvent
l’incompréhension, le jugement, la suspicion, etc. Les stéréotypes de genre limitent donc les
possibilités d’évolution des femmes mais enferment aussi les hommes dans des rôles traditionnels
dont ils peinent, eux aussi, à sortir.

Ainsi, l’important n’est pas de savoir si des différences de caractère existent


statistiquement entre les hommes et les femmes, mais de bien réaliser que si tel est le cas,
c’est en raison de leur éducation différentielle et de l’identité qu’ils ou elles se sont forgé.e.s
en fonction de leurs interactions avec l’environnement. Ensuite, prendre conscience de
tous ces stéréotypes est le premier pas nécessaire pour arrêter de les véhiculer et autoriser
chacun.e d’entre nous à se forger sa personnalité propre et à assumer socialement ses
comportements (« être une femme ambitieuse », « être un homme sensible »…), mais ce n’est
pas une affaire aisée.

Il est d’ailleurs intéressant d’étudier le concept de mansplaining qui décrit la tendance qu’ont
de nombreux hommes à décrédibiliser la parole des femmes, de manière inconsciente, lorsque
celles-ci s’expriment en public (cf infra).

5. Notions utiles de psychologie sociale


a. Le sentiment d’efficacité personnelle
L’engagement dans un comportement s’avère plus ou moins facile, notamment en
fonction du sentiment d’efficacité personnelle. Ainsi, le sentiment de compétence joue un rôle
essentiel en matière d’orientation et d’engagement. Une personne s’oriente préférentiellement
dans un rôle où elle pense être compétente. Donc, si depuis son plus jeune âge, un enfant
s’est senti mis en confiance dans un domaine particulier, domaine dans lequel il a développé
des compétences, il aura naturellement plus d’attrait pour s’engager dans celui-ci. Or,

18
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l’égalité femmes
puisque l’environnement, notamment les parents, a des attentes et comportements différenciés
envers les enfants qui conditionnent les comportements de ces derniers, il est logique que les
enfants développent des compétences dans des domaines différents, en fonction de leur genre.
La conséquence logique est ensuite que ces différences de domaines d’engagement subsistent,
en raison du sentiment d’efficacité personnelle. Par exemple, les femmes se jugent généralement
moins « efficaces » et aptes à réussir aux postes à responsabilités et ont ainsi, entre autres pour
cette raison, moins tendance à s’engager dans cette voie.

b. L’effet Pygmalion
« Je pense donc tu es » : l’effet Pygmalion a été démontré
en 68 par Rosenthal et Jacobson18. Il consiste en la réalisation du
comportement de notre interlocuteur en fonction de ce que
nous attendons de lui : « Je pense que tu es doué donc je te stimule
donc tu deviens doué ». Il a été notamment prouvé de la manière
suivante : on attribue deux classes de niveau comparable et moyen
à un professeur. On dit que le premier groupe est nettement meilleur
qu’une classe «normale» et que le second groupe, à l’inverse, est
nettement moins bon. Au bout de plusieurs semaines, lorsque l’on
réévalue les deux groupes, on constate que le premier groupe a
progressé et que le deuxième a regressé, en raison de l’attente du
professeur.

Cet effet est absolument essentiel à garder en tête : en nous comportant différemment
et en ayant des attentes différentes des femmes et des hommes, en raison des stéréotypes
que nous avons intégrés, nous allons influencer différemment leurs comportements respectifs
et leur donner plus ou moins confiance en leur capacité à réussir.

c. La menace du stéréotype
Après avoir abordé l’effet Pygmalion, il est intéressant d’aborder la «menace du stéréotype».
La «menace du stéréotype» illustre la tendance qu’ont les personnes qui s’attendent à échouer
à diminuer leur performance. Celle-ci a été prouvée, entre autres, par une expérience dans laquelle
on fait passer un test de mathématiques à des étudiants et étudiantes en mathématiques au niveau
Bac+4. Un stéréotype largement répandu est que les femmes seraient moins compétentes en
maths. On fait donc passer le test en disant au premier groupe que celui-ci montre régulièrement
des différences de réussite entre hommes et femmes. On fait passer le test à l’autre groupe en
annonçant que ce test n’a jamais montré de différence significative entre hommes et femmes,
toute chose égale par ailleurs. On constate alors que les femmes ont significativement moins réussi
que les hommes dans le premier groupe alors qu’il n’y a pas de différence détectable au sein du
deuxième groupe. C’est donc le fait d’avoir évoqué le stéréotype, de l’avoir activer, qui a
conduit le groupe stigmatisé dans cas précis (celui des femmes) à être moins performant19.

18 https://www.psychologie-sociale.com/index.php?option=com_content&task=view&id=253&Itemid=84
19 http://www.psychologie-sociale.com/index.php?option=com_content&task=view&id=94&Itemid=83

19
ZOOM SUR :
La communication ou la fabrique de la vérité

On n’insistera certainement jamais suffisamment sur


l’importance de la communication dans la perpétutation des
inégalités. En effet, la communication, pilier essentiel de nos sociétés
de langage, est omniprésente et a une forte influence sur chacun.e.
Or, l’image donnée par un grand nombre de médias (presse, cinéma,
publicité, réseaux sociaux...) des genres participent à normaliser de
certains comportements et à ancrer les stéréotypes de genre de manière
inconsciente. Malheureusement, nous ne croyons que ce qu’on l’on
voit et nous ne savons pas ce que l’on ne nous montre pas, d’où la
notion de communication-fabrique de la vérité. L’image que renvoient
les médias des hommes et des femmes est biaisée, soit parce qu’elle
cherche à renvoyer l’image d’un l’idéal féminin ou masculin (publicité...)
soit de manière inconsciente, car ceux qui dispensent l’information
sont tout autant imprégnés de stéréotypes que le reste de la population
générale (presse...). Il est donc absolument essentiel de garder en tête
l’impact de la communication sur l’alimentation des stéréotypes.

6. La culture du viol
Il faut prendre conscience que la France est imprégnée par la culture du viol. La culture
du viol, théorisée par le mouvement féministe dans les années 70, est un concept qui souligne
l’aspect culturel des violences sexuelles et qui véhicule des mythes sur le viol qui tendent à
réhabiliter les agresseurs et blâmer les victimes20. Les mythes sur le viol peuvent être regroupés
en trois catégories : la négation ou la minimisation du viol, la négation du non-consentement de
la victime, ou le blâme de celle-ci. Pour l’illustrer, il suffit de regarder les résultats à l’enquête de
l’IPSOS et de l’Association Mémoire Traumatique et Victimologie sur le sujet. Ainsi, pour 27%
des répondants à l’étude, une attitude provocante, telle que le port d’une jupe tenue « très
sexy », atténuerait la responsabilité du violeur. Cette culture est une des raisons qui font
que les viols continuent d’exister. On sait en effet que la pratique du viol n’est pas une pratique
«naturelle» chez les êtres humains que l’on ne pourrait empêcher, pour deux raisons. La première
est que les êtres humains font partie des seules espèces animales à avoir une sexualité découplée
de leurs fonctions reproductrices (rapports sexuels pour le plaisir, sans considéréation pour les
saisons). D’autre part, on sait que dans les civilisations où le viol est absolument inacceptable
socialement et les violeurs très fortement condamnés, les viols sont quasiment insexistants.
Cette culture explique notamment la fréquence extrêmement élevée d’agressions sexuelles envers
des femmes ou des hommes, l’utilisation d’un vocabulaire lié au viol ou la victoire lorsqu’est évoqué
un rapport sexuel, l’objectivisation du corps de la femme notamment dans la pub...

20 «Je veux savoir ce qu’est...la culture du viol» https://www.youtube.com/watch?v=AmhRX3LXzgk

20
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Kit de promotion-hdommes
l’égalité femmes

L’ESSENTIEL :
1/ Les inégalités entre hommes et femmes sont toujours d’actualité et
qu’elles concernent toutes les sphères sociétales.

2/ Ces inégalités sont expliquées par des mécanismes psychologiques


sous-jacents.

Nous avons mis en évidence le rôle prépondérant des stéréotypes de


genre parmi ces mécanismes sous-jacents. Les stéréotypes de genre sont
des représentations globalisantes, plus ou moins inconscientes et figées de
ce que «sont et doivent être» les hommes et les femmes (puisqu’ils ont une
valeur normative). Ils donnent l’impression que les différences entre femmes et
hommes sont d’origine naturelle alors qu’il a été prouvé que les différences
comportementales que l’on peut décrire entre hommes et femmes sont
culturelles.
Ces stéréotypes influencent, dès la naissance de l’enfant, son entourage,
qui se comporte différemment selon que l’enfant est une fille ou un garçon. Ces
stéréotypes s’autoalimentent puisque le jugement des parents, lui aussi influencé
par eux, leur confirme ce à quoi ils s’attendent (c’est ce que l’on appelle une
prophétie autoréalisatrice).
Le cerveau des enfants étant extrêmement plastique à la naissance, ceux-ci
se construisent en fonction des intéractions qu’ils ont avec leur environnement
et intègrent eux-mêmes les stéréotypes de genre. Plusieurs mécanismes
psychologiques expliquent l’influence des attentes de l’environnement sur
le comportement des enfants et sur leurs choix, tels que l’effte pygmalion.

Ainsi, mettre en évidence les stéréotypes de genre pour réinterroger


son propre comportement et celui des autres vis-à-vis des femmes
et des hommes est une étape absolument essentielle pour promouvoir
efficacement l’égalité femmes-hommes et à terme, permettre à chacun.e
de se réaliser comme il l’entend et de s’émanciper des cadres normatifs et
excluant de ce que devraient être les femmes et les hommes.

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