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La critique de la libération du désir

Cet extrait est tiré du livre Gorgias écrit à cette même époque par Platon. Le Gorgias
est composé de plusieurs dialogues et porte principalement sur la critique de la rhétorique
pratiquée par les sophistes du dialogue dont principalement Calliclès évoqué par le groupe
précédent. La rhétorique vient du mot « rhetorica » qui veut dire technique. Il s’agit d’un art
oratoire qui vise notamment à persuader et non pas à convaincre contrairement à l’art
philosophique. Un texte rhétorique oppose 2 orateurs c’est-à-dire 2 pdv différents. Dans cet
extrait ce sont C et S qui vont notamment s’affronter pour tentent d’établir un idéal de
l’homme. La thèse de Calliclès défend l’idéal d’une liberté absolue qui consiste à satisfaire tous
nos désirs. Pour notre part, nous allons parler de la thèse de Socrate qui pense que la liberté
c’est de se commander soi-même, se dominer et de la thèse de Spinoza qui pense qu’être
captif de son plaisir est être esclave de celui-ci et par conséquent être libre c’est être sous la
conduite de la Raison. Tout d’abord, nous allons voir que la poursuite des plaisirs,
contrairement aux conceptions communes ne provoque pas le bonheur. Ensuite nous verrons
que le bonheur réside dans la tempérance. Et pour finir, la licence n’est pas la liberté.

I)La poursuite des plaisirs ne provoque pas le bonheur


II) Le bonheur réside dans la tempérance
a) La tempérance, l’une des 4 vertus cardinales
La tempérance est une vertu cardinale ou vertu morale parmi la justice, la prudence
et la force. Elle permet de discipliner le désir et les passions humaines. Les vertus cardinales
ont été distingué par les philosophes du Ve siècle notamment par Platon. La tempérance est
indispensable car l’intempérance regroupe l’avidité et l’orgueil, le besoin de tout posséder,
d’exploiter. Au contraire, la tempérance est l’art de la mesure. Elle ouvre à la modestie, à la
douceur et à l’harmonie. C’est l’art de maîtriser ses instincts et ses passions, l’ambition et la
jalousie. Extrait Socrate : « l.3-7 ».
Pour Socrate, au lieu d’une vie déréglé rien n’est mieux qu’une vie d’ordre qui se contente
de ce qu’elle a et qui s’en satisfait. Et selon lui, le bonheur réside dans la tempérance, qui est
la vertu caractéristique du sage, qui consiste à avoir une attitude correcte et modérée face
aux désirs et plaisirs. En revanche, pour Calliclès, le bonheur consiste à satisfaire tous nos
plaisirs, à assouvir toutes nos passions, indépendamment de toute contrainte. Il l’illustre
avec la métaphore du tonneau dans le Gorgias où Socrate oppose deux genres de vie : celui
de l’intempérant et celui du tempérant. Il les compare à deux hommes dont l’un aurait des
tonneaux percés qu’il passerait son temps à remplir en vain (Calliclès) et l’autre une fois ses
tonneaux pleins il serait comblé.
D’ailleurs, cette métaphore on la retrouve dans un mythe « Les Danaïdes ». Ça raconte
l’histoire d’un mariage général de 50 filles et 50 garçons pour une histoire de succession. Le
jour du mariage le père demande a ses filles de tuer leur mari pdt la nuit car il a appris lors
d’un oracle que ces derniers allaient les tuer. Toutes le font sauf une. L’homme épargné tue
les 49 filles et elles se retrouve en enfer dans le tartare condamné a remplir éternellement
une jarre percée. C’est un châtiment éternel. Et cela a donné l’expression « tonneau des
Danaïdes », une tache absurde, sans fin.

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b) Elle s’appuie sur la raison
Comme nous avons pu le voir, la tempérance est le fait de modérer mais pour cela il
faut en avoir la notion et donc la raison. Cela montre bien la différence qu’il y a entre les
Hommes et les animaux. Les animaux agissent par pulsion alors que nous on les restreint un
peu comme les désirs. Dans le Gorgias, il y a un oiseau qui « mange et fiente en même
temps », le pluvier sert les arguments de Socrate face à Calliclès dans le Gorgias. Grâce à ce
petit volatile, Platon met au jour les contradictions et l’absurdité d’une vie guidée par les
plaisirs.
Mais on peut aller plus loin et dire que le désir s'oppose essentiellement à la raison, comme
le montre Platon dans la République (livre IV) lorsqu'il distingue à l’intérieur de nous la partie
« désirante » et la partie « rationnelle », qui sont souvent en conflit : quand une personne
désire boire avec excès, sa raison doit lutter contre ce désir, elle doit le dominer ou le
maîtriser pour que cet homme agisse sagement. Il n’est pas vrai que celui qui ne se maîtrise
pas est nuisible aux autres, mais utile à lui-même ; bien au contraire, il fait du mal aux autres,
mais il s’en fait encore plus à lui-même

Une image de Platon pour montrer comment on pourrait allier désir et raison : Voilier (République,
livre VI) : Dans un voilier, c'est le pilote qui doit utiliser la force des vents et des courants pour aller là
où il veut. Supposons qu'il n'y ait pas de pilote, le bateau va être à la merci des courants, il va finir
par s'échouer ou couler. De même pour nous c la raison qui doit être pilote. Un homme sans raison
c'est comme un bateau sans pilote donc il finit par échouer. C’est la raison, en nous, qui doit décider
et donc il ne faut pas se laisser emporter par ses désirs. De même que le bon pilote peut décider de
naviguer contre vents et marées, on peut, si on juge cela plus raisonnable, décider d'aller en
l'encontre des désirs mais cela au prix d'énormément d'efforts. L'idéal, pour Platon, « c’est de savoir
surfer sur la vague de nos désirs pour mieux se laisser porter et aller où l'on veut. »

http://philojohanmermoz.canalblog.com/ désir et raison

III. La licence n’est pas la liberté


1. Liberté et licence :

Comme on l’a vu toute-à-l ’heure avec l’autre groupe, la liberté est l'état d'une personne ou
d'un peuple qui ne subit pas de contraintes, de soumissions, de servitudes exercées par une
autre personne, par un pouvoir tyrannique ou par une puissance étrangère. C'est aussi l'état
d'une personne qui n'est ni prisonnière ni sous la dépendance de quelqu'un ou de quelque
chose.

La licence est une liberté individuelle absolue : il s'agit d'accepter aucune restriction,
frustration et aucun obstacle dans l'assouplissement de ses propres désirs, c’est ainsi l’idéal
de liberté et de bonheur défendu par Calliclès et critiqué par Socrate dans Le Gorgias.
Socrate reproche l’idéal défendu par Calliclès d’être contradictoire et fait l’éloge d’une vie où
il faut maîtriser ses désirs et pas être soumis à eux.

2. S’adonner à tous les plaisirs implique en être esclave :

L’homme qui conduit une vie dérèglée est en effet « forcé de les (les tonneaux) remplir sans
cesse ». Il est soumis, malgré lui, à la vie d’insatisfaction qu’engendre ses désirs. Il a un
rapport de dépendance avec ses désirs et les plaisirs qu’ils procurent qui échappe donc à sa
volonté quand il veut s'en abstenir, causant ainsi frustration et souffrance. Même quand
l’individu veut arrêter définitivement, c’est très compliqué de le faire, puisqu’il ne semble
plus en contrôle de sa propre volonté. C’est notamment l’exemple des stupéfiants mais ça
peut être le cas avec toute autre dépendance (du shopping, d’internet etc.). Ce qui accumule
toute dépendance c’est le fait que lorsque le désir surgit, on a envie de délaisser tout ce
qu’on est en train de faire pour répondre à cette envie, à ce manque. Cette dépendance
devient donc obstacle à notre capacité de réfléchir, de prendre des décisions et de nous
comporter. On délaisse donc notre vie pour répondre à ce désir. C’est notamment ce qui
explique Spinoza dans la citation suivante :

« On pense que l’esclave est celui qui agit par commandement et l’homme libre celui qui agit
selon son bon plaisir. Cela cependant n’est pas absolument vrai, car en réalité être captif de
son plaisir et incapable de rien voir ni faire qui nous soit vraiment utile, c’est le pire
esclavage, et la liberté n’est qu’à celui qui de son entier consentement vit sous la seule
conduite de la Raison »

Spinoza, Traité théologico-politique, 1670

Le bon plaisir semble en effet de nous distraire de tout ce qui nous est vraiment utile.
Spinoza parle même de “captive de son plaisir” renforçant l’image d’esclavage. La liberté
selon Spinoza consiste à vivre sous la seule conduite de la raison. Pour être libre, l’homme
doit se déterminer lui-même à agir et penser. Puisque quand il utilise sa raison pour agir, sa
soumission aux « bon plaisirs » diminue. Donc lorsqu'on assouvi tous ses désirs sans jamais
se restreindre, on risque de tomber dans l'esclavage acceptant aucune frustration, aucune
restriction. La personne qui assouvi tous ses désirs n'est plus libre et n'est plus maître de
soi-même mais commandée par ses désirs.

3. Sur un plan social, la licence limite la liberté autrui

Pour Calliclès, la liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui nous plaît sans aucune
restriction, ce qui implique qu’elle ne concerne que celui qui n’obéit à personne d’autre.
Cette liberté pour tous présuppose donc une limite pour la liberté de chacun puisqu’elle
serait réservée à l’élite dirigeante. Cela implique donc une vision tyrannique de la société
car seul celui qui dirige peut faire tout ce qui lui plaît. Cette vision de la liberté est donc
restreinte.

Donc Socrate contredit Calliclès sur le plan social. Selon Socrate, cette liberté individuelle
implique une négation de la liberté de certains autres individus puisque seuls les plus
puissants, les plus riches peuvent assouvir tous leurs désirs. Même si c'est au détriment de
la liberté des autres. Il affirme au contraire que la maîtrise de soi peut nous rendre heureux
et de même pour notre entourage puisqu’elle permet d'équilibrer les désirs assouvis pour
tous les niveaux sociaux et garantit donc un liberté collective et équitable.

Conclusion :

Pour conclure, la vie heureuse ne peut être réduite à une accumulation de plaisirs car elle
deviendrait synonyme de souffrances diverses à niveau individuel et au niveau social. C’est
pour cette raison que l’idéal d’homme défendu par Socrate est un homme libre et heureux
puisque indépendant de tout désir et distraction pouvant l’égarer du bonheur. Il s’agit d’un
homme qui grâce à la maîtrise de soi même établi les valeurs de justice et morale et vit une
vie libre en accord avec sa raison. Finalement la véritable liberté n’est pas une liberté totale,
mais un certain degré de liberté où, pour pouvoir exercer pleinement notre liberté et vivre
une vie tranquille ainsi que pour accomplir notre moralité, il faut se gouverner soi-même en
prenant ses distances avec ses désirs.

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