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- SAMABAC
Analyse du sujet
Les mots du sujet
Désir : le désir n’est pas le besoin. Ce qui caractérise le besoin est qu’il doit toujours être satisfait
sous peine de mort. Si je ne satisfais pas un désir, je ne meurs pas pour autant. Le besoin est naturel
(et aussi animal), le désir est culturel et humain. Par exemple, le désir sexuel est un besoin pour
l’espèce (elle disparaît s’il n’est pas satisfait) mais un désir pour l’individu (on ne meurt pas de ne pas
le satisfaire).
Le désir est la recherche d’un objet que l’on imagine ou que l’on sait être source de satisfaction. Il
s’accompagne donc d’un sentiment de manque, de privation.
Accomplir ses désirs, c’est les satisfaire. Le sujet précise « accomplir tous ses désirs ». « Tous »
signifie « sans exception »
Règle de vie : une règle est une formule ou une proposition indiquant une démarche ou une voie à
suivre, une manière de se conduire. Une règle de vie est donc un précepte qui nous dit comment il
faut vivre.
« Bonne » règle de vie : double sens. Une règle de vie peut être « bonne » au sens où elle nous est
utile c’est-à-dire où elle nous conduit au bonheur.
Mais est bon aussi ce qui est conforme au bien, aux normes éthiques, bref ce qui est moral
Une bonne règle de vie peut donc être aussi bien une règle de vie qui conduit au bonheur qu’une
règle de vie morale.
Le sens du problème
Il s’agit de savoir si pour être heureux et si pour être moral il faut admettre la règle, le précepte, de
satisfaire tous ses désirs sans exception ou si, au contraire, il convient de maîtriser certains d’entre
eux, voire renoncer totalement à la satisfaction de certains désirs. On remarquera que l’alternative à
« tous ses désirs » n’est pas « aucun de ses désirs » mais « quelques désirs ».
Présupposé de la question
Il est présupposé qu’il est possible d’accomplir tous ses désirs, ce qui ne va pas de soi.
Réponse spontanée
Elle est plutôt affirmative.
Plan rédigé
I Valeur du désir
1) Définition du désir
Pour comprendre la valeur du désir, il nous faut d’abord préciser ce qu’est le désir, ce qui nous
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être.
Tant que nous agissons selon notre seul conatus nous éprouvons de la joie. La tristesse vient lorsque
nous sommes empêchés de réaliser notre conatus à cause de l’intervention des choses extérieures.
Satisfaire nos désirs, en tant qu’ils proviennent de nous même et non en tant que nous subissons les
actions extérieures, est donc pour Spinoza une bonne règle de vie. Accomplir ses désirs consiste
alors à rechercher l’utile qui nous est propre, ce qui est bon pour nous. Le bon se définit d’ailleurs
comme ce qui est l’objet de nos désirs. Quelque chose n’est pas désirable parce qu’il est bon mais au
contraire bon parce que nous le désirons. Le désir apparaît alors comme producteur de valeurs.
Il faut satisfaire les désirs émanant de notre conatus et suivre sa nature définit exactement pour
Spinoza notre liberté. Mais, justement, tous nos désirs proviennent-ils de nous-mêmes ? Satisfaire
tous ses désirs contribue-t-il réellement à notre bonheur ?
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et oscille entre la souffrance (quand le désir est encore insatisfait) et l’ennui (après la satisfaction). La
souffrance est alors notre condition.
La morale de Schopenhauer va alors être une morale du renoncement. Il faut d’abord renoncer à
transmettre la vie car c’est transmettre la tromperie du bonheur, le seul sentiment moral acceptable
étant la pitié qui reconnaît l’universalité de la souffrance. La seule délivrance est la négation du
vouloir-vivre, non pas dans le suicide, mais dans l’acte de non-volonté (cette thèse n’est pas éloignée
du bouddhisme). Il faut renoncer au désir qui est le mal radical.
Comment renoncer au désir ? Une première solution se situe dans la contemplation esthétique.
Comme Kant, Schopenhauer considère qu’elle est désintéressée et donc délivrée des désirs. Mais le
vrai remède, le remède radical se situe dans l’ascétisme, refus des biens de ce monde, fusion dans le
néant. Seul l’ascète a vaincu l’égoïsme dans le renoncement. Homme clairvoyant, il renonce aux
désirs et choisit la mortification pour vaincre le vouloir-vivre générateur de souffrances.
Cette solution en est-elle une ? Rien ne peut vaincre la volonté, impérissable et immuable. Même la
mort ne supprime rien. De plus, Schopenhauer omet le caractère proprement humain du désir. Si
satisfaire tous ses désirs n’est pas une bonne règle de vie, l’alternative est-elle vraiment de n’en
satisfaire aucun ?
Incompatibles avec l’autarcie, ils empêchent aussi l’ataraxie. Ainsi, aux yeux d’Épicure, la sagesse
réside, non dans la renonciation complète à la satisfaction de nos désirs mais dans un calcul des
désirs qui vise au maximum de plaisir et au minimum de déplaisir. Nul désir n’est condamnable en
tant qu’il donne du plaisir mais aucun désir qui conduit à davantage de douleur que de plaisir ne doit
être accompli.
Ainsi, satisfaire tous ses désirs, sans maîtrise, n’est pas une bonne règle de vie au sens où cela ne
conduit pas au bonheur. Mais la vie bonne n’est pas seulement la vie heureuse, c’est aussi la vie juste,
conforme à la morale. Le désir est-il compatible avec la justice ?
2) Désir et vertu
Il n’y a pas de morale sans liberté et donc sans maîtrise de soi. Il existe des désirs dangereux et
immoraux. Platon nous montre que la tempérance est une vertu. Je ne suis pas libre de mes désirs (ils
surgissent sans que je sache d’où ils viennent) et on peut donc considérer qu’il n’est pas de vie libre
et juste là où l’on satisfait sans discernement tous ses désirs.
Dans le Phèdre, Platon compare notre âme à un attelage tiré par deux chevaux, un cheval blanc
(Thumos, courage) et un cheval noir (Epithumia, partie désirante de l’âme). Le bon attelage est celui
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où le cocher (la raison) parvient à maîtriser les deux chevaux. Cela ne signifie pas qu’il faille renoncer
à tous ses désirs puisque le cheval noir aussi fait avancer l’attelage. Cela signifie simplement qu’il
faut maîtriser ses désirs. L’alternative ne se situe pas entre satisfaire tous ses désirs ou n’en satisfaire
aucun mais entre se laisser tout entier diriger par ses désirs (et renoncer à la justice et à la sagesse)
ou les canaliser dans un sens créateur et pleinement humain. Subordonné à la raison, le désir
devient positif puisque, nous l’avons vu, la philosophie aussi est désir
3) Désir et devoir
Il n’en reste pas moins que le devoir est étranger au désir. Les désirs sont sources de conflit et la
morale se veut universelle. Kant insiste sur le caractère désintéressé de la morale. Il ne suffit pas
d’agir conformément au devoir mais « par » devoir. Le commerçant qui ne vole pas sa clientèle agit,
certes, conformément à son devoir mais, s’il n’est animé que par le désir d’avoir plus de clients et
donc de gagner plus d’argent, il ne saurait être considéré comme moral. Seul est moral celui dont la
volonté est bonne et qui agit en fonction de l’unique respect pour la loi morale. Cela ne signifie pas
que le désir soit mauvais. En réalité, il n’est ni bon ni mauvais. La morale se situe simplement ailleurs.
Si la satisfaction de certains désirs peut conduire au bonheur, la fin de l’homme n’est pas seulement
le bonheur. Il y a une destination plus haute, proprement humaine, qui est la destination morale.
Ainsi, « satisfaire tous ses désirs » n’est pas « une bonne règle de vie » au sens où une bonne règle de
vie est une règle de vie morale.
Il n’empêche que, puisque la destination humaine est double (morale et bonheur), renoncer aux
désirs lorsqu’il n’est pas contraire à la morale est aussi une mauvaise règle de vie.
Conclusion
Satisfaire tous ses désirs n’est pas une bonne règle de vie et ceci aussi bien en ce qui concerne la
question du bonheur que celle de la morale. Mais cela ne signifie pas qu’il faudrait renoncer à tous
nos désirs dans une morale inhumaine et mortifère. Le désir seul peut nous orienter vers des buts
pleinement humains. Il faut faire en sorte que de puissance de vie il ne se transforme pas en son
contraire, désir de mort et donc de mort du désir. Le désir est à la fois puissance d’action et de
négation, de transformation et de destruction et c’est à nous de savoir en rester le maître. La
frustration est aussi constitutive d’une existence morale et l’homme est partagé entre ses désirs et
les règles qu’il s’impose. On peut d’ailleurs se demander si en l’absence de règle le désir se
maintiendrait tant il semble n’avoir d’intensité qu’en fonction des obstacles et des interdits qu’il
rencontre.
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